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Argumentation et Analyse du Discours (2009) Ethos discursif et image d’auteur ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Jérôme Meizoz Ce que l’on fait dire au silence : posture, ethos, image d’auteur ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Avertissement Le contenu de ce site relève de la législation française sur la propriété intellectuelle et est la propriété exclusive de l'éditeur. Les œuvres figurant sur ce site peuvent être consultées et reproduites sur un support papier ou numérique sous réserve qu'elles soient strictement réservées à un usage soit personnel, soit scientifique ou pédagogique excluant toute exploitation commerciale. La reproduction devra obligatoirement mentionner l'éditeur, le nom de la revue, l'auteur et la référence du document. Toute autre reproduction est interdite sauf accord préalable de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Revues.org est un portail de revues en sciences humaines et sociales développé par le Cléo, Centre pour l'édition électronique ouverte (CNRS, EHESS, UP, UAPV). ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Référence électronique Jérôme Meizoz, « Ce que l’on fait dire au silence : posture, ethos, image d’auteur », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 3 | 2009, mis en ligne le 15 octobre 2009, Consulté le 21 mars 2015. URL : http:// aad.revues.org/667 Éditeur : Université de Tel-Aviv http://aad.revues.org http://www.revues.org Document accessible en ligne sur : http://aad.revues.org/667 Document généré automatiquement le 21 mars 2015. Tous droits réservés

Ce Que l on Fait Dire Au Silence Posture Ethos Image d Auteur

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Jérôme Meizoz

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  • Argumentation et Analyse duDiscours3 (2009)Ethos discursif et image dauteur

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    Jrme Meizoz

    Ce que lon fait dire au silence:posture, ethos, image dauteur................................................................................................................................................................................................................................................................................................

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  • Ce que lon fait dire au silence: posture, ethos, image dauteur 2

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    Jrme Meizoz

    Ce que lon fait dire au silence: posture,ethos, image dauteur[] limaginaire est pris en charge par plusieurs masques (personae), chelonns selon la

    profondeur de la scne (et cependant personne derrire).(Barthes 1975: 123)

    1 En appendice tardif Postures littraires. Mises en scne modernes de lauteur (2007), et pourdonner suite de fructueux changes de vues avec Ruth Amossy et Dominique Maingueneausur la pertinence et lextension de la notion de posture, cet article propose une discussionde quelques termes voisins, auxquels sont confronts tant les analystes du discours que lessociologues de la littrature. Leur articulation mrite dtre explicite et discute. Je le fais sansgrande ambition thorique, ayant la coutume de penser par cas, comme le prconisent Revelet Passeron (2005), quitte reformuler ces bauches de thorisations au contact de nouveauxfaits discursifs. Que lon prenne donc ce parcours comme une invitation la discussion, sansen durcir les assertions.

    2 Sur un plan mthodologique, la notion de posture ma sembl prcieuse pour dpasserla vieille division des tches entre spcialistes de linterne et de lexterne textuel: ainsi uneposture dauteur implique relationnellement des faits discursifs et des conduites de viedansle champ littraire2. Les tudes de cas de Postures littraires tentent ainsi darticuler lesdimensions rhtoriques et sociologiques, savoir le discours des acteurs et leurs prises depositions dans le champ littraire. On y observe des conduites nonciatives et institutionnellescomplexes, par lesquelles une voix et une figure se font reconnatre comme singulires dansun tat du champ littraire.

    3 Lenjeu de larticulation entre rhtorique et sociologie me semble important dans les tudeslittraires actuelles, au moment o de toutes parts la notion problmatique dauteur faitretour, reformule et rvalue la lumire des acquis rcents de plusieurs disciplines.

    Des notions articuler4 Jai dfini la posture comme la prsentation de soi dun crivain, tant dans sa gestion du

    discours que dans ses conduites littraires publiques. Le meilleur quivalent cette notionserait le terme latin de persona qui dsigne le masque de thtre : tymologiquement,ce travers quoi lon parle (per-sonare) instituant tout la fois une voix et son lieu socialdintelligibilit. Sur la scne dnonciation de la littrature, lcrivain se prsente et sexprimemuni de la mdiation que constitue sa persona, que lon peut appeler sa posture ou sonmasque dautorit (Calame 2005).Ou pour le dire plus clairement: une personne nexistecomme crivain qu travers le prisme dune posture, historiquement construite et rfre lensemble des positions du champ littraire3. Une posture relve dune scnographieauctoriale densemble. Par ce terme, Maingueneau dcrit la dramaturgie inhrente touteprise de parole, centrant son attention sur lnonciateur du discours. Parler de posture supposede dcrire ce processus plusieurs niveaux simultanment.

    5 Ainsi, une posture nest pas seulement une construction auctoriale, ni une pure manationdu texte, ni une simple infrence dun lecteur. Elle relve dun processus interactif: elle estco-construite, la fois dans le texte et hors de lui, par lcrivain, les divers mdiateurs quila donnent lire (journalistes, critiques, biographes, etc.) et les publics. Image collective,elle commence chez lditeur avant mme la publication, cette premire mise en forme dudiscours. On la suivra dans toute la priphrie du texte, du pritexte (prsentation du livre,notice biographique, photo) lpitexte(entretiens avec lauteur, lettres dautres crivains,journal littraire). La posture se forge ainsi dans linteraction de lauteur avec les mdiateurset les publics, anticipant ou ragissant leurs jugements.

    6 Jai tudi la posture avant tout dans les genres factuels, comme lautobiographie, o lauteuret linstance de gestion du discours sont assimils par un dsormais clbre pacte (Lejeune

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    1975). Mais ds que nous parlons de genres fictionnels, un nouveau problme surgit. Dans unefiction, o situer lauteur? Quels liens faire entre lauteur, le narrateur et les personnages?Lethos de chacun na souvent rien de commun. Peut-on ds lors parler de posture dansune fiction?

    7 Une partie du problme rside dans la confusion inhrente la notion dauteur et ses usagescourants4. Selon Maingueneau (2004), qui me semble en donner la meilleure description cejour, trois instances sy imbriquent comme dans un anneau de Moebius:- la personne (ltre civil);- lcrivain (la fonction-auteur dans le champ littraire);- linscripteur (lnonciateur textuel).

    8 En loccurrence, tudier une posture, cest aborder ensemble (et croiser ces donnes, avecla prudence requise) les conduites de lcrivain, lethos de linscripteur et les actes de lapersonne. Par exemple, comprendre la relation complexe entre Michel (narrateur du romanPlateforme [2001]), Michel Houellebecq (lcrivain en public) et Michel Thomas, le citoyenfranais qui se fait appeler, en littrature, Houellebecq. Il en est de mme de la relation entreFerdinand (narrateur de Mort crdit [1936]), Louis-Ferdinand Cline (lcrivain en public)et Louis Destouches, la personne civile. Lorsque Jean-Jacques Rousseau, dans les Dialogues(Rousseau juge de Jean-Jacques), ddouble son nonciation en la voix de Jean-Jacques etcelle de Rousseau, il a pour vise rhtorique de dissocier deux faces de lauteur: cette oprationdevait permettre de racheter lcrivain(objet de dangereuses attaques) par les qualits de lapersonne. En effet, la puret dintentions de Jean-Jacques serait masque au public par laclbrit de lcrivain Rousseau. La sincrit de Jean-Jacques vient contrebalancer ici lesrisques lis au statut dcrivain, toujours souponnable dtre un dguisement. En effet, devenuun personnage public, lcrivain ne sappartient plus totalement, en tant que reprsentationde soi, mais se connat alors par limage en retour que le public lui renvoie. En 1910, Lansonnotait dj : La vie et le caractre de Rousseau ne comptent plus par ce quils ont trellement, mais par les images seules, vraies ou fausses, que les lecteurs sen faisaient, et quipouvaient se mler plus ou moins aux impressions du livre (Lanson 1910, Charles 1993:496).

    9 Lorsque Rousseau rentre Paris aprs un long exil, en 1770, la Correspondance littrairetmoigne dune scne emblmatique:

    Il sest montr plusieurs fois au caf de la Rgence, sur la place du Palais Royal; sa prsence y aattir une foule prodigieuse, et la populace sest mme attroupe sur la place pour le voir passer.On demandait la moiti de cette populace ce quelle faisait l; elle rpondait que ctait pourvoir Jean-Jacques. On lui demandait ce que ctait que Jean-Jacques; elle rpondait quelle nensavait rien, mais quil allait passer5.

    10 Genette radicalise cette ide, dans le cas de Stendhal, allant jusqu faire de la personne civileune reconstruction de lcrivain pseudonyme: Beyle nest lgitimement pour nous quunpersonnage de Stendhal (Genette 1969).

    11 Les actes de la personne civile ne sont donc pas exclus de lanalyse, pour autant quon puissefaire le lien entre eux et les conduites de lcrivain dans le champ littraire. Si lien il ya, cest sans doute par lhabitus, comme ensemble des dispositions sociales dun individu,actualisables de manire diffrentielle selon le champ o il est engag. Mais je nen suis quel pour linstant, et pas plus loin.

    Ethos et posture12 Lors dun sminaire international dAnalyse du discours tenu lEHESS en novembre 2007,

    linvitation de nos collgues norvgiens, Dominique Maingueneau sest demand si le termede posture ne faisait pas double emploi avec celui dethos. La question est pertinente, et selonle principe du rasoir dOckham, on peut douter quil soit utile la connaissance de multiplierles entits nominales linfini. Examen fait de la question, jy rponds par la ngative, dansla mesure o dans les corpus de littrature crite, lethos est infr de lintrieur dun discourset ne peut inclure une conduite sociale comme le vtement port par celui qui se prsentecomme crivain: en effet, comme lcrit Maingueneau lui-mme, lethos est une notion

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    discursive, il se construit travers le discours, ce nest pas une image du locuteur extrieure la parole (2004: 205).

    13 Pour illustrer en quoi la notion de posture dsigne un phnomne plus large que celledethos, je donne lexemple dans mon livre, de la fameuse blouse blanche de mdecin aveclaquelle L.-F. Cline sest prsent la presse lors de la sortie de Voyage au bout de lanuit en automne 1932. Elment vestimentaire, externe au discours du roman, elle constituenanmoins pour les journalistes et les lecteurs un lment verser leur portrait du nouvelauteur Cline. A cela sajoute que le systme narratif des romans cliniens invite (nonsans ruse) une lecture biographique, notamment dans Mort crdit puis dans les rcitsautofictionnels comme Dun chteau lautre (1957). Mon hypothse consiste dire que lethosdiscursif construit par Cline dans ses romans exerce une contrainte sur la mise en scne delcrivain en public. De mme, je me suis demand dans Le Gueux philosophe (2003) si lethosdiscursif mis en place par Rousseau dans ses deux fameux Discours (1750, 1755) ne pesait pasde tout son poids sur les conduites publiques que lcrivain sest senti tenu dassumer jusquaubout. Autrement dit, limage discursive de lauteur construite dans le discours, simposant parla circulation des crits, tend devenir, dans ces cas, un patron de la conduite publique delcrivain: Cline finit par suivre le clairon quil a lui-mme embouch, selon limage trsparlante de Gracq. Cest l une piste de recherche que Maingueneau trouve fconde (2004:206).

    14 Pour prciser au mieux lextension des notions dethos et de posture, Maingueneau masuggr ceci, qui reprend la terminologie de ses travaux : lethos dsignerait limage delinscripteur donne dans un texte singulier et pouvant se limiter celui-ci : lethos desChtiments (1853) nest pas celui de Lart dtre grand-pre (1877). De son ct, la posturerfrerait limage de lcrivain forme au cours dune srie duvres signes de son nom6.Je trouve cette formulation trs pertinente, car elle rappelle que lethos sorigine sur le versantdiscursif, alors que la posture nat dune sociologie des conduites7. En effet, la posturedit la manire dont un auteur se positionne singulirement, vis vis du champ littraire,dans llaboration de son uvre. Une telle prsentation de soi slabore dans la dure et demanire en quelque sorte cumulative. Entre 1762 et 1778, soit entre les Lettres Malesherbes,les Confessions et les Rveries du promeneur solitaire, les crits de Rousseau manifestentplusieurs eth distincts: de par lethos stocien quelles arborent (divers intertextes ont tidentifis), les Rveries prennent le contrepied de limage dun auteur inquiet, branl par lesattaques et press de se justifier qui mane des Dialogues. Cependant, lensemble des critsde cette dernire partie de sa vie, postrieure lexil et la condamnation de ses ouvrages,contribue une posture qui met en cohrence le discours (les crits cits) et les conduiteslittraires publiques de Rousseau (la retraite mditative, lhabit armnien). Posture dailleursparfaitement identifie, voire parodie par les contemporains: Singe de Diogne!, criraVoltaire. Signifiante et promue la clbrit dans les ultimes crits autobiographiques deRousseau, cette posture tire sa cohrence du fait quelle rpond un projet pragmatiquecommun tous ceux-ci: parvenir par diverses stratgies djouer le complot de tnbresqui lenvironne. Autre exemple: dans le chapitre six de mon livre (2007: 101-109), je faisainsi lhypothse quau cours de la trajectoire littraire de L.-F. Cline, une mme posture dudcouvreur maudit se perptue au gr de variations dethos, relatives aux genres pratiquset aux moments du champ littraire (les romans davant-guerre 1932-1936 ; les pamphlets1937-1941; les autofictions daprs-guerre 1944-1961).

    Posture et image dauteur15 Aprs cette distinction entre ethos et posture, envisageons la notion dimage dauteur laquelle

    recourt notamment Ruth Amossy dans ses travaux. Ceux-ci, comme la brillante analyse desBienveillantes (2006) de Jonathan Littell propose lors de la journe dtude mentionneprcdemment, ont pour mrite de porter aussi bien sur des textes factuels que fictionnels. Dufait mme de son nonciation, note Amossy, linstance auctoriale projette une image delle-mme dans le texte. Le lecteur se fait une image de linscripteur laide des traces diverseslaisses par celui-ci. Limage dauteur se distingue de celle du narrateur, qui, quant lui,

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    est inclus dans lunivers de la fiction. En somme, lethos discursif de linscripteur constitue,il me semble, un des lments de limage dauteur, car celle-ci est tisse de plusieurs typesdinformations, intra- et extratextuelles.

    16 La notion dimage dauteur rejoint celle dauteur implicite (implied author) propose en1961 par Wayne C. Booth dans The Rhetoric of Fiction. Dans une fine discussion de cettenotion, Tom Kindt (2007) en prcise les usages actuels et en fait voir tout lintrt pour desrecherches comme les ntres. Lide de Booth est que se manifeste dans le texte une figureimplicite dauteur, distincte de lauteur empirique et du narrateur fictionnel. La tripartitionde Maingueneau (personne, crivain, inscripteur) a la mme vertu heuristique. Chez Booth,plus quune figure intentionnellement labore, lauteur implicite constitue une infrence dulecteur. Dans la phrasologie de son temps, Barthes disait quil nous faut postuler ou dsirerlauteur pour continuer notre lecture: Comme institution, lauteur est mort [] mais dansle texte, dune certaine faon, je dsire lauteur : jai besoin de sa figure (qui nest ni sareprsentation, ni sa projection), comme il a besoin de la mienne (sauf babiller) (1973:45-46)8.

    17 Booth nallait pas jusque l, mais selon lui chaque lecteur se fait une certaine image de lauteurdu texte quil lit, que ce soit par les faits discursifs ou par des connaissances biographiques,antrieures la lecture (pour la rhtorique, autrement dit, par une saisie de son ethos pralable).En effet, chaque lecteur possde ou non des informations sur lcrivain voire sur la personnecivile, quil peut croiser loisir avec les donnes textuelles dans son portrait de lauteurimplicite9. Alain Viala a montr galement quune image slabore dans une srie de textesattribus la mme fonction-auteur. Cette image contribue situer lauteur dans le champlittraire et formate ou durcit son horizon de rception:

    En donnant une uvre, il [lauteur] construit une image de lui-mme, et, au fil des uvressuivantes, cette image se confirme ou volue: on attend de Gide quil fasse du Gide et quenmme temps il soit ni tout fait un autre, ni exactement identique au fil de ses livres (et idem pourtous) (Viala, Molini & Viala 1993: 197-198).

    18 Divers travaux ont port aussi sur le stock dinformations (notamment biographiques) dontdispose le lecteur pour infrer. Kindt (2007) en cite principalement deux:

    [David] Darby par exemple observe dans lessai dj mentionn sur lhistoire de la thorienarrative : en soi, un auteur implicite est le produit de ngociations entre les royaumesintratextuels et extratextuels. Sandra Heinen sest encore loigne davantage de la conceptionselon laquelle il convient de dfinir lauteur implicite uniquement comme une infrence reposantsur un texte donn. Dans un article paru en 2002 dans la revue Sprachkunst, elle proposede comprendre la notion dauteur implicite comme l image dun auteur que se font lesrcepteurs lorsquils lisent un ou plusieurs de ses textes en tenant compte de toutes les informationsdisponibles son sujet (p. 74).

    19 Assurment, par exemple, en lisant un roman de Michel Houellebecq prcd dune intenserumeur mdiatique, nous ne pouvons faire abstraction de toutes ces informations quand nousnous plongeons dans les propos dun narrateur qui, dans Plateforme (2001), se nomme Michel,comme lcrivain. Ce qui ne signifie pas que nous renoncions la convention romanesquepour identifier purement et simplement auteur et narrateur (Meizoz 2004). Nos infrences delecture sont cependant modifies par ces savoirs externes10. Cest dailleurs, selon moi, ce quecherchent provoquer Houellebecq ou Christine Angot, et qui alimente des dbats houleux leur sujet. Comme je lai montr ailleurs (Meizoz 2004), ces auteurs incluent dsormais lespace de luvre, conformment aux propositions de lart contemporain, la performancepublique dcrivain (entretiens, lecture, etc.)11. Du coup, le lecteur est invit confronterlinscripteur et lcrivain, dont ces auteurs ambigusent les rapports. Pour les littraires quiont comme dogme heuristique de distinguer lauteur et le narrateur, le geste de Houellebecq,qui reprend son compte (dcrivain) sur un plateau de tlvision les propos islamophobes deson narrateur, constitue un choc dont il faut pourtant rendre compte12.

    20 Cest ici que limage dauteur peut sarticuler avec la notion de posture, quelle rejoint parune direction oppose. Je rsumerai ainsi la division des tches inhrentes, me semble-t-il, ces notions:

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    21 Issu dune analyse interne, la notion dethos discursif concerne le discours de linscripteur. Issue dune analyse interne, la notion dimage dauteur concerne le discours de linscripteurrelationnellement aux informations dont le lecteur dispose sur lcrivain. Rcusant la distinction de linterne et de lexterne, la notion de posture concerne lesconduites de lcrivain relationnellement au discours de linscripteur et aux actes de lapersonne.13

    22 Nous aurions donc une srie de notions lies par inclusion, de la plus englobante (et donc, jenconviens, problmatique) la plus fine:

    Posture Image dauteur Ethos discursif

    23 Parmi les trois scnes o se joue lmergence du discours littraire (Maingueneau 2004), lascnographie (ou scne dnonciation) engage elle-mme ces trois niveaux:

    Scne englobante Scne gnrique Scnographie

    o Postureo Image dauteuro Ethos discursif

    Le silence signifie-t-il quelque chose?24 Pour illustrer cette discussion, je terminerai par un bref commentaire dune clbre nouvelle

    de fiction, Le silence de la mer. Pour ce faire, je croiserai les outils de lecture par lethos(Amossy 1999 et Maingueneau 2004), les savoirs historiques disposition et une propositionde mthode formule par Roger Chartier: Lhistoricit premire dun texte est celle qui luivient des ngociations noues entre lordre du discours qui gouverne son criture, son genre,son statut, et les conditions matrielles de sa publication (2008: 51). - Paru clandestinementle 20 fvrier 1942 sous la signature de Vercors, ce petit volume constitue lacte fondateur desditions de Minuit (Paris). Il marque la naissance dun crivain (Vercors) que les circonstanceset la fonction distinguent de la personne de Jean Bruller (1902-1991), illustrateur de pressenayant jamais publi duvre littraire jusque-l. A celle dauteur pseudonyme, Bruller jointla fonction dditeur pseudonyme (sous le nom de Desvignes) puisquil est co-fondateuret animateur clandestin des ditions de Minuit : derrire la posture dauteur, il faudraitencore envisager une posture dditeur, macro-figure dnonciation qui par le choix de textespolitiquement impliqus engage ici lensemble dun catalogue. Mais jen viens lessentielpour nous, quune polmique, comme souvent, a fait apparatre : la publication du Silencede la mer suscita une querelle mmorable sa rception, opposant notamment la lecture desrsistants gaullistes et des communistes, pisode dsormais retrac en dtails (Simonin 1994).Pour comprendre ce conflit, quelques mots sur le rcit sont indispensables.

    25 Lintrigue est quasi contemporaine de la publication, puisquelle voque linvasion allemande.Vercors a tmoign plus tard du substrat biographique de son rcit, transpos ensuite enfiction: lui-mme et son pouse ont d hberger des soldats allemands aprs la dfaite de juin1940. Rsumons la fable: le narrateur, un homme g vivant avec sa nice, doit accueillir chezlui, par ordre militaire, un officier allemand, Walter von Ebrennac, qui se rvle un hommepris de culture franaise. Entre les htes et linvit se tisse une relation marque avant toutpar le silence, dans laquelle sesquisse toutefois un sentiment amoureux possible entre la niceet lofficier. Prenant conscience des intentions destructrices des Nazis lgard de la France,aprs avoir t dup par des discours lnifiants, lofficier du se fait muter en premire ligne,et son dpart sapparente une forme de suicide.

    26 Lethos discursif du narrateur donne une image de rserve sereine, mfiante sans treagressive: disons quil reste sur son quant soi. A aucun moment, il ne juge lofficierallemand, ni nexprime sa colre. A sa rception, en fvrier 1942, les lecteurs de cette nouvelle,qui circula principalement dans le milieu littraire et parmi les rsistants communistes et

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    gaullistes, infrrent de cet ethos une image dauteurcontraste et problmatique. Et pourcause : du fait de la clandestinit de ldition, la plupart des lecteurs ignoraient tout faitlidentit civile de Bruller. Celui-ci tait avant guerre un illustrateur dont les positions degauche modre se rapprochrent du gaullisme ds juin 1940. Cette ignorance de lidentit delauteur, qui dura jusquen aot 1944 (Sapiro 1999: 503), permet dailleurs un test en doubleaveugle, car linfrence ne peut porter, ici, sur une connaissance pralable de lcrivain. Dansce livre, Vercors apparut ainsi ses lecteurs tantt comme un chantre de la rsistance pacifique(cest la lecture gaulliste), tantt comme un tratre qui, par la passivit quil prne face lennemi, fait le jeu des ennemis de la France (cest la lecture communiste dIlya Ehrenbourg,par exemple). Aprs dpres dbats par presse interpose, et diverses tentatives pour discrditerla nouvelle, cest la premire image dauteur qui triompha la Libration, appuye par lesrseaux gaullistes de Londres qui rsolurent mme de faire parachuter le texte au dessus dela France.

    27 Mais cette rception ambigu laissa des traces douloureuses pour Vercors, qui ressentit lebesoin de corriger son texte et dajouter une phrase condamnant plus explicitement lofficierallemand. Dans ldition dfinitive (selon ses vux) de la nouvelle en 1951, on lit doncceci: Ainsi, il se soumet. Voil donc tout ce quils savent faire. Ils se soumettent tous, mmecet homme-l. (Vercors, Simonin 1994: 98).

    28 Un ethos donc, dabord, puis une image dauteur, produit de luttes dinterprtation, enfinune posture (dauteur, et au-del, dditeur), signale ds le pseudonyme de lcrivain puismanifeste dans cet ajout ou repentir tardif, ultime retouche la nouvelle au moment o lesinstitutions allaient en faire le monument de lhistoire littraire pacifie que lon sait.

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    Notes

    1 Je remercie Raphal Baroni de sa relecture et de ses conseils.2 Jemprunte la notion de conduites de vie (Lebensfhrung) Max Weber, qui en fait une desnotions-phares de ltude des sectes protestantes, mais plus gnralement un concept sociologique pourdcrire les comportements sociaux dans une communaut de valeurs, cf. Lthique protestante et lespritdu capitalisme, pp. 255-317. Pour un usage littraire, cf. Denis Saint-Amand & David Vrydaghs, Labiographie dans ltude des groupes littraires. Les conduites de vie zutique et surraliste, 2008.3 Dinnombrables jeux auctoriaux ont pour but de dtourner le caractre immdiat du pacteautobiographique, ainsi dans Roland Barthes par Roland Barthes, on lit des formules comme: Toutceci doit tre considr comme dit par un personnage de roman ou plutt par plusieurs (Barthes,1975, p. 123).4 Jos-Luis Diaz (2007) a dvelopp rcemment la notion de scnographie auctoriale. Prsentantles divers plans de linstance auctoriale, il recourt une partition diffrente de celle de Maingueneau:lhomme de lettres inclut la personne et lcrivain de Maingueneau; le rgisseur formel du texte recoupelinscripteur; enfin, la figure de lcrivain est une construction dordre imaginaire, lisible dans les textes.(Jos-Luis Diaz, op. cit., premire partie, chapitre 1.). Cette dernire notion rejoint celle d imagedauteur, la diffrence prs que Diaz a) mle ainsi tort lcrivain (rle social) et la personne (identitcivile) ; b) dissocie par dcret lhomme de lettres et la figure de lcrivain, et se prive denvisagerrelationnellement leur interaction et ses effets. Selon moi, cest sparer artificiellement des phnomneslis.5 Correspondance littraire, 1770, cite par Jean-Claude Bonnet, Naissance du Panthon, p.211.6 Courriel de Dominique Maingueneau, 27 novembre 2007.7 A ce sujet, voir les prcisions de Pascale Delormas (2008).8 Voir galement les rflexions de Brian Gill sur S/Z de Barthes, Structures dauteur, mtaphores delecteur, 1996: 259-266: Le texte parat donc comme un lieu o lauteur est condamn se fixer,quil le veuille ou non (Balzac le voulait, Barthes rsiste). Et le lecteur, pour peu quil lise bien, cest--dire pour peu quil relise et rcrive, est oblig, comme Barthes, de rejeter le corps de lauteur et dele remplacer par le sien, par un anticorps. S/Z est une clbration exemplaire de ce processus. Barthes

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    ramasse toutes les traces de la culture de Balzac dans Sarrasine, les empaqute proprement dans soncode culturel, puis les fustige bien (ce sont des fatrasies, etc.); le corps de lauteur est exhum, violent,abandonn. En mme temps, la culture de Barthes essaime dans son texte, vient habiter les mtaphores,les commentaires, le titre, la structuration mme du livre: elle occupe tout le terrain, il ny a de placepour rien dautre. La lecture est bien agression, substitution (de sens et de corps), victoire sur lAutre.9 Notons au passage que si lauteur implicite peut tre, comme lauteur modle dU. Eco, limagepersonnelle que se forge chaque lecteur, la notion dcrivain dfinie par Maingueneau suppose uneconstruction collective et cumulative ralise par toute une communaut interprtative, selon lestermes de S. Fish.10 Voir aussi Raphal Baroni, Revenances de lauteur , in Kaenel Philippe, Meizoz Jrme,Rosset Franois, Valsangiacomo Nelly (ds.), La vie et luvre? Recherches sur le biographique,colloque tenu lUniversit de Lausanne en novembre 2007, [disponible en ligne sur http://doc.rero.ch/record/8828?ln=fr]. Cet article sera repris sous le titre Ce que lauteur fait au lecteur (que son textene fait pas tout seul), in Luvre du temps, Paris, Seuil, coll. Potique, paratre en 2009. Voiraussi le chapitre Regarder le monde en face? qui traite de la scnographie de La Possibilit dunele ainsi que de la posture de Houellebecq.11 Plus rcemment, Nathalie Heinich a not un semblable phnomne, parlant du dplacement sur lapersonne de lartiste du travail de cration, de stylisation et de singularisation jusqualors investi sur lesuvres. Le modelage de lartiste devient non seulement un jeu, [] mais un vritable travail [].,in Llite artiste, 2005, pp. 280-281.12 Voir par exemple R. Baroni (2007 et 2009), J. Meizoz (2004) ou encore Raphal Clis, De quelquesenjeux thiques et anthropologiques de loeuvre romanesque de Michel Houellebecq in Quelle thiquepour la littrature? Pratiques et dontologies, 2007, pp. 95-124.13 La posture dauteur, plus ou moins sciemment mise en scne, ne prsume pas de sa rception effectivepar les publics. Il y a trs souvent mouvement dialectique complexe entre la posture propose et sarception effective.

    Pour citer cet article

    Rfrence lectronique

    Jrme Meizoz, Ce que lon fait dire au silence: posture, ethos, image dauteur, Argumentation etAnalyse du Discours [En ligne], 3|2009, mis en ligne le 15 octobre 2009, Consult le 21 mars 2015.URL: http://aad.revues.org/667

    propos de l'auteur

    Jrme MeizozUniversit de Lausanne

    Droits d'auteur

    Tous droits rservs

    Rsums

    Aprs la parution de Postures littraires (2007) cet article revient sur la vise mthodologiquede la notion de posture, en la confrontant deux notions voisines, celles dethos etdimage dauteur. Il propose de hirarchiser ces trois notions dans un ensemble conceptuel.Une brve analyse du Silence de la mer (1942) de Vercors illustre cette rflexion.

    How to make silence talk Posture, ethos, authors imageAfter the publication of Literary postures (2007), this article revisits the methodologicalapproach based on the notion of posture by comparing it with two related notions, ethosand authors image. It shows how these three notions can be organized into a hierarchy insidean integrated conceptual whole. A brief analysis of Vercors TheSilence of the Sea (1942)illustrates this proposition.

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    Mots-cls :ethos, image dauteur, posture, scnographieKeywords :authors image, ethos, posture, scenography