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Co-infection VIH-VHC : quelles stratégies … · VIH-VHC L’importance toute particulière de la co-infection VIH-VHC n’est plus à démontrer. Importance épidé- ... en cas

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222 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXVIII - no 6 - novembre-décembre 2013

Actualités dans LE TRAITEMENT DE L’HÉPATITE C

Contexte de la co-infection VIH-VHCL’importance toute particulière de la co-infection VIH-VHC n’est plus à démontrer. Importance épidé-miologique d’abord, puisque, du fait de voies de transmission communes et d’un taux de guérison moindre, la fréquence des hépatites C chroniques est plus importante chez les personnes infectées par le VIH que dans la population générale. Importance clinique ensuite, puisque la maladie hépatique évolue plus vite, avec un risque plus important et une vitesse d’évolution plus rapide vers la cirrhose, vers l’insuf-fi sance hépatique terminale et vers l’hépatocarci-nome, et donc avec un retentissement important en termes de morbidité et de mortalité. Tout cela explique qu’il est recommandé de traiter plus acti-vement et précocement les personnes co-infectées, que ce soit pour le VIH ou pour le VHC. De fait, la prise en charge de l’infection par le VIH chez les personnes co-infectées VIH-VHC est désor-mais similaire à celle des personnes mono-infec-tées VIH, avec 91 à 95 % des personnes co-infectées VIH-VHC actuellement suivies sous traitement anti-rétroviral, 82 à 85 % ayant une charge virale VIH indétectable, et 73 à 79 % ayant un taux de CD4 supérieur à 350/mm3 (1). En revanche, le pourcen-tage de patients ayant une hépatite C chronique reste conséquent, avec 63 à 73 % de patients ayant un ARN du VHC positif (1). Cela est largement lié aux réticences et aux diffi cultés d’utilisation de la bithérapie standard interféron pégylé/ribavirine, et à la moindre probabilité de réponse à ce traitement en cas de co-infection VIH. Si 63 % des personnes co-infectées de l’étude Prospecth ont bénéficié

d’au moins une tentative de traitement anti-VHC en 2009, ce pourcentage refl ète une réalité qui n’est probablement pas homogène en France, et reste insuffi sant lorsqu’on observe la prévalence impor-tante de fi broses hépatiques avancées (43 % des personnes suivies dans la cohorte HEPAVIH). D’où l’importance de nouvelles approches de prise en charge et de nouvelles options thérapeutiques chez les personnes co-infectées VIH-VHC.

Comment améliorer cette situation ?L’augmentation du taux d’hépatites C chroniques guéries chez les personnes infectées par le VIH passe d’abord très en amont par une amélioration du dépistage, de la capacité à orienter et à retenir ces personnes dans la fi lière de soins, avant d’aboutir en aval à une proposition plus large de traitement anti-VHC. Cela semble particulièrement important pour des populations à risque, marginalisées et/ou vulnérables, par exemple les usagers de drogues ou les détenus. Les campagnes d’information, la mise à disposition de tests de dépistage rapide, des inter-actions courtes (pouvant être associatives) centrées sur l’incitation à la prise en charge médicale, la mise en place d’un accompagnement social, l’éducation sanitaire et thérapeutique, l’accompagnement et le soutien par des pairs, l’accès aux méthodes non invasives d’évaluation de la fi brose et leur rembour-sement, la possibilité de traitement et de suivi dans des structures spécialisées non dédiées primitive-ment à cet effet sont autant de mesures pouvant favoriser la mise en route du traitement anti-VHC et,

1 Article reçu en juin 2013. Se référer aussi au rapport d’experts sur la prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH, sous la direc-tion du Pr Philippe Morlat, paru en septembre 2013.

* Département d’infectiologie, CHU et université de Bourgogne, Dijon.

Co-infection VIH-VHC : quelles stratégies thérapeutiques ?Which therapeutic strategies in HIV-HCV co -infection?

L. Piroth*

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Points forts

in fi ne, pouvant augmenter le nombre de personnes infectées par le VIH guéries de leur hépatite C. Mais une telle augmentation passe aussi par la mise à disposition de traitements plus courts et mieux tolérés, qui doivent permettre de contribuer à lever les réticences à la prise en charge thérapeutique, non seulement des patients, mais aussi des médecins. En effet, même si l’augmentation de la probabilité de réponse n’aura qu’un impact très limité si les étapes préalables de diagnostic, d’orientation et de maintien dans une fi lière de soins ne sont pas améliorées (2), il est cependant probable que l’image de traitements plus simples et mieux tolérés aura une répercussion positive sur ces étapes d’amont.

Quels sont les besoins pour les personnes co-infectées VIH-VHC ?

Deux impératifs prévalent : les traitements doivent être plus effi caces et plus simples.

Améliorer le taux de réponse virologique au traitement

Les 2 seuls nouveaux antiviraux directs actuellement disponibles sont le bocéprévir et le télaprévir, des inhibiteurs de la protéase (IP) du VHC (NS3/4A) de première génération. En pratique, ils sont actifs et utilisés seulement chez des personnes infectées par un génotype VHC 1. Selon 2 essais récents de phase II (3, 4), ils offrent aux patients co-infectés et naïfs de traitement anti-VHC une probabilité de réponse virologique soutenue (RVS) après 1 an de traitement augmentée d’environ 30 % par rapport à la bithérapie standard (74 % versus 45 % pour le téla-prévir, et 60,7 % versus 26,5 % pour le bocéprévir). D’autres essais de phase II sont en cours chez des patients co-infectés en échec d’un traitement anté-rieur (ANRS HC26 TELAPREVIH et HC27 BOCE-PREVIH), avec des taux de réponse intermédiaires encourageants : après 16 semaines de traitement (dont 12 semaines de trithérapie), l’ARN-VHC est indétectable chez 88 % des patients sous télaprévir

et chez 63 % des patients sous bocéprévir (5, 6). Dans tous ces essais, la tolérance de la trithérapie est globalement comparable à ce qui avait été observé chez les personnes mono-infectées VHC et chez celles traitées par bithérapie standard. Enfi n, des études de phase III incluant des personnes co-infec-tées VIH-VHC sont en cours, dont les résultats devraient être connus en 2014-2015.

De nombreuses molécules sont en cours de déve-loppement :

➤ IP VHC NS3/4A de deuxième vague (asunaprévir, danoprévir/r, faldaprévir, siméprévir, vaniprévir, ABT-450/r, GS-9451…), dont certains sont actifs aussi sur les VHC de type 4 (asunaprévir, danoprévir, siméprévir) ;

➤ IP VHC NS3/4A de deuxième génération (MK-5172, ACH-2684...), qui ont une activité pan-génotypique et sont encore plus puissants ;

➤ inhibiteurs de la NS5A (daclatasvir, lédipasvir, ABT-267…), également pan-génotypiques et puis-sants ;

➤ inhibiteurs de polymérase NS5B nucléos(t)idiques (méricitabine, sofosbuvir, ABT-333, BI 207127, BMS-79135, GS-9669, VX 222…), égale-ment pan-génotypiques.

Certaines de ces molécules sont en cours d’évaluation chez les patients co-infectés VIH-VHC. Les résultats intermédiaires de 2 essais de phase III (trithérapie faldaprévir + bithérapie standard, et siméprévir + bithérapie standard pendant 24 à 48 semaines) concernant des patients infectés par un virus de génotype 1, majoritairement naïfs ou rechuteurs, ont confi rmé les taux de réponse d’environ 80 % à 4 et 12 semaines de traitement, observés dans les études menées chez les mono-infectés VHC, pour une durée prévisible de traitement qui reste de 36 à 48 semaines (7, 8). L’essai ANRS HC30 QUADRIH évalue actuellement l’effi cacité et la tolérance d’une quadrithérapie associant asunaprévir, daclatasvir, interféron pegylé et ribavirine pendant 24 semaines chez des patients co-infectés VIH-VHC et répon-deurs nuls à un traitement antérieur par bithérapie standard. Au fi nal, les quelques données préliminaires dispo-nibles en juin 2013 laissent à penser que la proba-

» La guérison d’une hépatite chronique C est un objectif majeur chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH). » Comparés à la bithérapie standard, le bocéprévir et le télaprévir apportent un gain substantiel

chez les PVVIH co-infectées par un VHC de génotype 1. » Les antiviraux directs actuellement en développement devraient permettre une augmentation

de la probabilité de réponse virologique pour tous les génotypes VHC, avec une meilleure tolérance et une durée de traitement plus courte.

» Les PVVIH co-infectées par un VHC doivent être traitées avec les moyens actuels en cas de risque clinique à court terme, surtout si la probabilité de réponse attendue est bonne.

» Les essais thérapeutiques et les autorisations temporaires d’utilisation (ATU) des nouveaux antiviraux directs doivent être encouragés et facilités pour les PVVIH.

Mots-clésCo-infection VIH-VHC

Traitement

Télaprévir

Bocéprévir

Antiviraux directs

Highlights » Curing chronic hepatitis C

is a major objective in persons living with HIV (LPHIV).

» Compared with standard bitherapy, boceprevir and tela-previr have shown substantial benefits in LPHIV patients co-infected with genotype 1 HCV.

» Direct-act ing ant iv i ral agents currently being deve-loped should make it possible to increase the likelihood of virologic response in patients with all HCV genotypes, with better tolerance and shorter treatment time.

» LPHIV patients co-infectesd with HCV should be treated using currently available therapies in case of short-term clinical risk, particularly if the probability of achieving the expected response is good.

» Therapeutic tr ials and temporary use autorisations (TUA) for the new direct-acting antiviral agents should be encouraged and facilitated for LPHIV patients.

KeywordsHIV-HCV co-infection

Treatment

Telaprevir

Boceprevir

Direct acting antivirals

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Co-infection VIH-VHC : quelles stratégies thérapeutiques ?

Actualités dans LE TRAITEMENT DE L’HÉPATITE C

bilité de réponse aux nouveaux traitements VHC tend à rejoindre celle des personnes mono-infectées VHC, contrairement à ce qui était observé avec la bithérapie standard.

Simplifi er le traitement

La réduction de la durée du traitement et l’utilisa-tion de molécules bien tolérées sont les conditions d’une simplifi cation thérapeutique, ce qui revient plus clairement à défi nir des traitements courts sans interféron pégylé et sans ribavirine. Plusieurs essais explorant ce type de stratégie (associant notam-ment un inhibiteur NS5A à un IP VHC de deuxième génération et/ou à un inhibiteur de polymérase) sont en cours chez des patients mono-infectés VHC. Cette simplifi cation est loin de se faire aux dépens de l’effi cacité, puisque les taux de RVS avoisinent les 100 %, avec des durées de traitement ramenées à 12 semaines (voire moins), notamment pour l’asso-ciation daclatasvir + sofosbuvir. Chez les personnes co-infectées VIH-VHC, un essai ANRS devrait débuter prochainement, étudiant l’effi cacité d’un protocole associant sofosbuvir, lédipasvir et ribavirine chez des patients en échec d’une trithérapie par bocéprévir ou télaprévir (essai ANRS-SOFTRIH).Un autre aspect de la simplifi cation réside dans le risque de résistance aux antiviraux directs et la gestion de celle-ci. Les IP VHC de première généra-tion sélectionnent des variants arborant des muta-tions de résistance chez 53 à 74 % des patients en échec virologique, et ces mutations peuvent croiser et impacter l’effi cacité des IP VHC de deuxième génération. En effet, la sélection d’une seule muta-tion pour les génotypes 1a (R155K et/ou V36M), contre 2 pour les génotypes 1b, suffi t à conférer une résistance aux IP VHC de première génération. Ces mutations, comme la R155K (génotype 1a) ou A156T/V (1b), confèrent une résistance croisée à l’en-semble des IP VHC en cours de développement (9). Même si ces variants semblent disparaître en 2 ans dans la plupart des cas, un possible impact sur les retraitements à moyen terme par des molécules de même classe n’est pas encore clairement écarté en l’absence de données cliniques suffi santes. L’utili-sation de molécules plus puissantes et/ou avec une barrière génétique plus élevée et/ou d’autres classes devrait permettre de limiter ce risque.La simplification passe aussi par l’utilisation de traitements anti-VHC n’interagissant pas avec le traitement antirétroviral. Le bocéprévir et le téla-prévir interagissant avec le CYP3A4, les possibilités

Tableau. Interactions anti-VHC et traitements antirétroviraux.

Antirétroviraux Trithérapie avec télaprévir Trithérapie avec bocéprévir

Inhibiteurs nucléos(t)idiques de la transcriptase inverse du VIH

Zidovudine a a

Stavudine b b

Didanosine b b

Lamivudine

Emtricitabine

Abacavir

Ténofovir

Inhibiteurs non nucléos(t)idiques de la transcriptase inverse du VIH

Névirapine ? ?

Efavirenz c ? d

Étravirine e

Rilpivirine f f

Inhibiteurs de protéase VIH boostés

Atazanavir/r g

Lopinavir/r h h

Fosamprénavir/r h h

Darunavir/r i i

Inhibiteurs d’intégrase du VIH

Raltégravir

Dolutégravir

Inhibiteurs d’entrée du VIH (IE)

Maraviroc k k

Inhibiteurs de fusion

Enfuvirtide

■ Association possible ■ Association possible sous réserves ■ Association déconseillée ou contre-indiquée

a : augmentation du risque d’anémie ; b : augmentation du risque d’acidose lactique en association avec la ribavirine ; c : nécessite d’augmenter la dose de télaprévir à 1 125 mg × 3/jour ; d : diminution de la Cmin du bocéprévir de 40 %, impact en termes d’effi cacité inconnu – éviter, ou alors surveillance rapprochée (STP) des Cmin du bocéprévir et de l’efavirenz ; e : diminution de l’exposition à l’étravirine modeste (ASC de – 23 %, Cmin de – 29 %) ; effet de l’étravirine sur le bocéprévir non signifi catif ; f : renforcer la surveillance de la tolérance car augmentation de la Cmin de rilpivirine (télaprévir + 89 %, bocéprévir + 39 %) – pas d’interaction dans l’autre sens ; g : avec surveillance rapprochée (STP) de la Cmin d’atazanavir, toujours utilisé sous la forme boostée par 100 mg de ritonavir ; h : interactions réciproques avec diminutions importantes des Cmin ; i : en l’absence totale d’alternative, darunavir/r à utiliser à doses majorées en 2 prises/jour, avec surveil-lance rapprochée (STP) des Cmin de darunavir et de bocéprévir ou télaprévir car diminution de Cmin du darunavir (télaprévir : – 42 %, bocéprévir : – 59 %) ; k : nécessité de réduire la dose de maraviroc à 150 mg × 2/jour car majore de manière importante les ASC, Cmax et Cmin du maraviroc – pas d’interaction du maraviroc sur bocéprévir et télaprévir.

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Figure. Indications thérapeutiques pour le traitement des hépatites chroniques C chez les patients co-infectés par le VIH (actualisé, juin 2013).

Présence de manifestations extrahépatiques (vascularites, etc.)Risque de transmission du VHC (mère-enfant, etc.)

Oui Non

Fibrose hépatique ≥ F2

G1G non 1

Décision au cas par cas

* incluant l’interféron pégylé et la ribavirine, à réévaluer.

Prétraités

Bithérapie* Trithérapie* Privilégier les essais thérapeutiques

Attente possible traitement sans IFN

décision au cas par cas

IL28B CC et fi brose ≤ F2 et CV VHC < 600 000 UI/ml Autres cas Rechuteurs

Répondeurs partielsRépondeurs

nuls

Naïfs

Fibrose hépatique F0/F1

Prétraités Naïfs

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Actualités dans LE TRAITEMENT DE L’HÉPATITE C

thérapeutiques antirétrovirales en association avec une trithérapie anti-VHC actuelle s’en trouvent donc réduites (tableau). Dans les rares cas où il serait impossible d’adapter le traitement antirétroviral, le choix d’une période d’interaction limitée et/ou le monitorage pharmacologique peuvent contribuer à limiter le risque d’échappement virologique, tant pour le VIH que pour le VHC.

Quelle stratégie adopter en juin 2013 ?La décision de mise en route d’un traitement anti-VHC chez une personne co-infectée VIH-VHC dépend de sa volonté d’être traitée, de l’urgence et/ou du bénéfi ce clinique attendu, de l’historique thérapeu-tique, des médicaments disponibles (notamment selon le génotype VHC) et, bien sûr, de l’attente d’un ˝toujours mieux˝. La complexité vient de la discor-dance qu’il peut y avoir entre urgence et espérance de gain thérapeutique d’une part, et probabilité de succès virologique d’autre part. Ainsi, dans l’étude REALIZE, les patients cirrhotiques mono-infectés VHC et répondeurs nuls à la bithérapie standard ont une probabilité de réponse à une trithérapie à base de téla-prévir de 14 %, contre 10 % sous bithérapie standard.Cette complexité a conduit à une prise de position d’experts de la Société de pathologie infectieuse

de langue française, de l’Association française pour l’étude du foie, de la Société nationale de médecine interne et de la Société française de lutte contre le sida (1), à partir de laquelle un algorithme de prise en charge a pu être proposé (fi gure). Globalement, les situations dans lesquelles existe un risque d’évolution clinique à court terme relèvent d’un traitement anti-VHC selon les moyens et recommandations actuelles, sauf en cas de proba-bilité très faible de réponse attendue. Les situa-tions dans lesquelles la probabilité de réponse est excellente avec les moyens actuels doivent aussi faire envisager et discuter un traitement. Dans les autres cas, l’option raisonnable semble être de différer le traitement. La trithérapie anti-VHC est le traitement de référence pour les personnes infectées par un génotype 1, et la bithérapie stan-dard pour les personnes infectées par un autre génotype. La bithérapie standard peut cependant être envisagée chez les personnes infectées par un génotype 1 présentant les principaux facteurs pronostiques de bonne réponse à la bithérapie (fi brose ≤ F2, polymorphisme de l’IL28B CC, charge virale VHC < 600 000 UI/ ml) et une réponse viro-logique rapide (ARN du VHC < seuil) à 4 semaines de bithérapie. Dans tous les cas, le traitement anti-rétroviral doit être adapté si besoin est pour limiter le risque d’interactions ou de toxicité cumulative avec le traitement anti-VHC.

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Co-infection VIH-VHC : quelles stratégies thérapeutiques ?

Actualités dans LE TRAITEMENT DE L’HÉPATITE C

Quelle évolution à court et à moyen terme ?Au-delà de la complexité actuelle liée au grand nombre de traitements en cours de développement, il est probable qu’une clarifi cation va s’ensuivre à moyen terme, avec la sélection de quelques associa-tions thérapeutiques qui devraient répondre à la très grande majorité des situations. Cette simplifi cation prévisible et souhaitable va conduire à augmenter non seulement le nombre de personnes pouvant bénéfi cier d’un traitement anti-VHC, mais aussi le nombre de prescripteurs potentiels. Les médecins infectiologues et spécialistes du VIH, qui pourraient avoir tendance à s’éloigner de la prise en charge de l’hépatite chronique C du fait de cette complexité actuelle, devraient donc jouer un rôle de plus en plus important, même si les hépatolo-gues doivent rester des référents essentiels pour la gestion des patients avec atteinte hépatique avancée (10). À cette nécessité du nombre s’ajoute en effet une “légitimité infectio-virologique” qui repose sur plusieurs aspects : l’importance de la ciné-tique virologique dans la conduite et l’adaptation du traitement, la notion de barrière génétique et thérapeutique, ou le risque de résistances croisées entre molécules, qui sont autant de notions déve-loppées dans la prise en charge de l’infection par le VIH. À tout cela s’ajoute la vision clinique globale des 2 infections VIH et VHC et de leur gestion théra-peutique.

Conclusion

Des progrès thérapeutiques majeurs sont en cours, dont bénéfi cient déjà les personnes co-infectées VIH-VHC. Les patients infectés par un génotype

VHC 1 peuvent déjà espérer un taux d’éradication virologique conséquent, pouvant aller jusqu’à 75 % chez les personnes naïves de traitement antérieur. Cependant, nombre de patients ne peuvent espérer de gain substantiel des molécules actuellement disponibles, car infectés par un génotype 4 et/ou cirrhotiques, a fortiori s’ils sont répondeurs nuls à un traitement antérieur ou intolérants à la bithérapie standard. Il est plus que jamais nécessaire que les nouveaux antiviraux directs soient évalués simul-tanément chez les personnes mono-infectées VHC et co-infectées VIH-VHC, et que les études d’inter-actions avec les antirétroviraux aient lieu très tôt dans leur développement. L’accès à ces nouveaux antiviraux directs par le biais des essais, s’il est souhaitable, ne permet pas de répondre aux besoins de certaines personnes en situation de grande néces-sité thérapeutique. Il est donc indispensable que l’accès de ces dernières aux nouveaux traitements soit facilité via des ATU. L’aspect économique ne doit pas non plus être occulté, avec un coût devant permettre l’accès au traitement pour le plus grand nombre. Enfi n, il ne faut pas oublier que la guérison de l’hépatite chronique C chez une personne infectée par le VIH ne saurait être une fi n en soi, ne serait-ce que parce qu’il faut surveiller le devenir de l’atteinte hépatique et prévenir les ré-infections VHC. ■

Remerciements. L’auteur remercie les organisateurs (D. Salmon et S. Pol) et tous les participants au Workshop sur la prise en charge des patients infectés VIH-VHC, ainsi que P. Muret, G. Peytavin et C. Solas pour leur aide dans l’éla-boration du tableau des interactions. L’auteur remercie également tous les experts du groupe de travail “Co-infections par les virus des hépatites” du rapport d’experts 2013 sur la prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH.L’auteur déclare avoir été consultant ou intervenant pour Abbott, Bristol-Myers-Squibb, Gilead, Janssen-Cilag, MSD, Pfi zer, Roche, Schering-Plough, ViiV Healthcare.

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