Comment la gentrification est devenue, de phénomène marginal, un projet politique global

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  • 7/30/2019 Comment la gentrification est devenue, de phnomne marginal, un projet politique global

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    revue AgoneHistoire, Politique & Sociologie

    Numros

    38-39 | 2008Villes et rsistances sociales

    Comment la gentrification est devenue, dephnomne marginal, un projet politique global

    MATHIEU VAN CRIEKINGEN

    p. 71-88

    Rsum

    la faveur du tournant nolibral des annes 1980, la gentrification sest hisse au rang de projet politique et de vision normative du futur de laville que gouvernements urbains et partenaires privs sactivent mettre en uvre. Pas plus les agglomrations de vieille industrie lourdetelles Manchester, Bilbao ou Liverpool que des villes rgionales telles Lyon, Malm, Ljubljana ou Leipzig nchappent aujourdhui au

    phnomne.

    Texte intgral

    LANOTIONDE GENTRIFICATION est apparue dans le lexique des sociologues et gographes urbains au dbut des annes 1960.Cest une sociologue marxiste, Ruth Glass, qui cra ce nologisme en regard de la colonisation progressive des quartierspopulaires entourant la City de Londres par une population nantie 1. Le processus tait le fait de fractions de la petite bourgeoisieaux valeurs pro-urbaines qui entreprenaient des oprations individuelles de rnovation du bti ancien, souvent dans desquartiers bourgeois dlaisss au fil du temps par les classes suprieures. Parfois, ce rinvestissement rsidentiel profitait dunenouvelle image donne aux quartiers concerns par linstallation pralable de groupes en marge des normes sociales dominantes,artistes bohmes ou communauts homosexuelles, par exemple. Dans certains cas, des investisseurs immobiliers plus puissants

    prenaient le relais des oprations individuelles de rnovation, si bien quune clientle encore plus nantie redcouvrait son

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    Quand lintrt des plus pauvres sert dalibi

    Il faisait chaud Bruxelles durant lt 2006. Temps idal pour louverture de la quatrime dition de Bruxelles-les-Bains sur lesberges du canal reliant Bruxelles Anvers, copie bruxelloise de Paris-Plage ou de Tokyo-plage, Strand aan de Maas Rotterdam, Harbour baths Copenhague, Quai des Guinguettes Lyon, Budapest-plage, Tevere village Rome, Lille-plage, Ligesur sable, Zomerbar Anvers, Hasselt beach, etc. Ctait le bon moment pour annoncer la ralisation prochaine dune piscine

    ciel ouvert dans le mme site. Selon Pascal Smet, ministre bruxellois en charge des travaux publics, il sagira dune pierre de plusapporte au projet global de revitalisation de cette partie de la ville, raison dun investissement public dau moins20 millions deuros, dont une bonne partie paye, par le programme FEDER de lUnion europenne, au titre de la cohsionterritoriale .

    Que la cohrence de ce projet global implique le dplacement forc de quatre entreprises en activit et employant unepetite centaine douvriers est une donne explicitement assume par les promoteurs du projet. La motivation du ministre encharge du dossier est sans faille et, lentendre, de nature profondment sociale : Il y a un manque crucial despaces verts danscette zone forte densit de la ville, dont des milliers de jeunes qui nont pas dendroit pour se dtendre pendant les vacances. []Beaucoup de gens nont pas les moyens daller deux ou trois fois par an Cannes ou Nice pour se dtendre la plage. [] Denombreux jeunes dans cette ville nont pas suffisamment de moyens pour se dtendre lorsquil fait beau, et nont mme pas les

    moyens daller la plage belge, puisque le train cote cher. [] Je me proccupe galement de ces jeunes kets

    I

    de Bruxelles, quiont le droit de se dtendre. [] Nous devons donner de lespace nos jeunes Bruxellois. II

    Ces arguments rappellent en tous points les motivations mises en avant pour lopration Bruxelles-les-Bains, soit offrir un espacede dtente aux personnes qui ne partent pas en vacances. Une enqute ralise lors de ldition 2007 de la plage bruxelloise rvlepourtant que six visiteurs sur dix sont des Bruxellois revenus ou sur le point de partir en vacances, soit une proportion identique la part des vacanciers parmi lensemble de la population du pays III. y regarder de plus prs, le public de Bruxelles-les-Bains a,de fait, peu voir avec les jeunes kets de Bruxelles ; cest davantage le public bobo qui prdomine. Le projet global derevitalisation prend ici tout son sens : organiser le sponsoring public dinfrastructures de consommation branches dans uncadre urbain o lactivit industrielle (prsente) est rduite un dcor de carte postale (ancienne). Et au passage donner un signedencouragement aux oprateurs immobiliers misant sur la revalorisation foncire de cette partie de la ville. Car ce nest pas unhasard si, depuis dj un moment, plusieurs investisseurs immobiliers dveloppent proximit, des complexes rsidentiels haut

    de gamme.

    tour ces quartiers, y achetant des biens rnovs cls en mains.Comme le terme lindique, la notion de gentrification fait explicitement rfrence une dimension de classe. Pour Ruth Glass,

    elle avait valeur de mtaphore, comme si une petite noblesse la gentry britannique sappropriait une portion de la ville laissejusque-l, comme en dpt, des ouvriers, des familles immigres, des petits pensionns au prix de lviction de ces derniers.

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    Le contraste est saisissant avec le vocabulaire employ aujourdhui ad nauseam pour dsigner les transformations desquartiers populaires. Quil soit question de renaissance urbaine , de revitalisation , de renouveau , les termes employspartagent la caractristique dtre socialement lisses et porteurs de leur propre lgitimation qui pourrait tre, a priori, en

    faveur de la dvitalisation de la ville ? De plus, lusage quasi-systmatique du prfixe re- est porteur de limage dun retour la normale ou du dbut dun nouveau cycle dans lvolution naturelle du tissu urbain. La dimension de classe duchangement urbain est de la sorte compltement vacue et toute critique des transformations urbaines en cours est anesthsie.Il sagit de susciter ladhsion du plus grand nombre, classes populaires y compris, un projet de remodelage de facto litiste delespace urbain.

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    Gentrification & nouvelles classes aises

    Lre du sponsoring public de la gentrification

    Jusquau milieu des annes 1980, lusage de la notion de gentrification reste largement limit au monde anglo-saxon. Dansle monde francophone ( lexception du Qubec) et, plus largement, dans le reste de lEurope continentale, lintrt acadmiqueet politique se porte avant tout sur les quartiers priphriques de relgation sociale (banlieues, cits, grands ensembles, etc.).Mme si elle pique lattention de certains chercheurs, la gentrification fait alors figure de dynamique dampleur limite, limportance relativement marginale en regard de la marque bien plus consquente laisse sur les paysages urbains par la

    migration en priphrie des classes moyennes phnomne dit suburbanisation . Un auteur amricain rsume ce constat enune formule : la gentrification ne concerne que des les de renouveau dans des mers de dlabrement 2.

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    Les cas de gentrification de quartiers populaires anciens se multiplient partir des annes 1980, en Amrique du Nord commeen Europe. Ce dveloppement traduit lascension sociale de groupes dont la russite est intimement lie lessor du capitalismenolibral : cadres de multinationales, consultants ou avocats daffaires, experts financiers, entrepreneurs des mdias, de lapublicit ou dautres industries culturelles , etc. En mme temps quelles accdent une position sociale favorable, cesnouvelles classes moyennes ou suprieures intellectuelles construisent leur place dans lespace. Les mdias les dsignent enrecourant au lexique de la segmentation des clientles tabli par le marketing : yuppies : young urban professionals [jeunescadres urbains] , bobos [bourgeois bohmes 3 ou encore jupes [jeunes urbaines professionnelles mancipes et seules] .Habiter au centre dune grande ville est souvent le sommet de leurs aspirations rsidentielles. Il en va bien sr de la proximitavec les fonctions de pointe du capitalisme, dit post-industriel , qui les emploient. Mais des facteurs socio-dmographiques

    psent galement en faveur dun habitat urbain central. En effet, ces groupes aiss privilgient souvent des formes de vie nonfamiliales (hommes ou femmes seuls, couples sans enfant), ce qui les amnent rejeter les strotypes organiss autour de lamaison unifamiliale dans les priphries aises des villes. Ils valorisent au contraire bien davantage des critres de densit et devarit des fonctions urbaines (loisirs, commerces, infrastructures culturelles, etc.) et des usages individualistes de la ville (paropposition des styles de vie familiaux). Ce ne sont pas tant les quartiers historiquement bourgeois qui attirent leur convoitiseque les quartiers populaires limitrophes des centres daffaires ou les espaces frapps par le recul industriel. Il y a donc bien unedistinction faire entre gentrification des quartiers populaires et embourgeoisement accru des beaux quartiers . Les choixrsidentiels des grands bourgeois demeurent en effet extrmement focaliss sur les quartiers hupps. La pr occupation premirede ces derniers nest certainement pas de faonner leur image des quartiers ouvriers mais bien de prserver un entre-soirsidentiel haut de gamme, dans des cadres privilgis permettant la transmission du patrimoine social et immobilier accumulpar les gnrations prcdentes 4.

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    Les annes 1980 marquent la transition vers une nouvelle configuration. Dsormais, la gentrification ne peut plus treseulement pense comme le produit de laddition de choix rsidentiels individuels en faveur de certains quartiers anciens aucentre des plus grandes mtropoles occidentales. Sa dynamique se trouve, dune part, dans les stratgies dinvestissement et despculation doprateurs immobiliers denvergure (stratgies souvent adosses des acteurs financiers internationaux) et, dautrepart, dans les politiques de renaissance ou de revitalisation urbaines. la faveur du tournant nolibral des annes 1980,la gentrification sest hisse au rang de projet politique et de vision normative du futur de la ville que gouvernements urbains et partenaires privs sactivent mettre en uvre 5. Pas plus les agglomrations de vieille industrie lourde telles Manchester,

    Bilbao ou Liverpool que des villes rgionales telles Lyon, Malm, Ljubljana ou Leipzig nchappent aujourdhui au phnomne.

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    Promouvoir la gentrification, assumer son cot social

    La gentrification parat de plus en plus assume en tant quobjectif explicite des politiques urbaines. La prsentation du nouveauplan du gouvernement nerlandais en matire de politique du logement, damnagement du territoire et denvironnement en

    donne un tmoignage clairant. Au chapitre intitul Des villes fortes et des campagnes dynamiques , le plan affiche sesambitions : Dans les villes, il y a besoin de dvelopper loffre de logements haut de gamme. Cela vite que les classes moyenneset les populations hauts revenus quittent la ville. Mais le propos ne sarrte pas l, et on envisage dores et dj une solutiontechnique au cot social prvisible dune telle option (lviction des populations pauvres des zones urbaines rinvesties) : Maisles villes ne peuvent grer seules leurs problmes. Les municipalits environnantes doivent la fois tirer bnfice du dveloppement urbain et aider les villes trouver des solutions aux problmes. Par exemple, il est important que ces municipalitscontribuent fournir des logements pour les mnages plus faibles revenus. IV Aux municipalits priphriques, donc, de seprparer accueillir les mnages pauvres chasss des centres-ville.

    Le schma de base du Plan de dveloppement international prsent en septembre 2007 par le chef du gouvernementbruxellois un parterre doprateurs immobiliers est plus explicite encore : La mixit sociale doit galement tre un des filsconducteurs du dveloppement urbain Bruxelles. Il sagit dassurer des flux sortants des zones dinterventions prioritaires [lesquartiers centraux populaires] pour viter le confinement de la pauvret dans des ghettos sociaux et dassurer des flux entrants enstimulant linstallation des classes moyennes dans les zones dinterventions prioritaires. V Mettre la porte les habitants enplace ( assurer des flux sortants ), les remplacer par d autres ( flux entrants ), le tout au nom de la mixit sociale .

    Urban Renaissance

    En outre, la gentrification est dsormais dactualit sur les cinq continents, de Melbourne Moscou, Istanbul, Soul, Le Cap ouSao Paulo.

    Certes, la gentrification tait dj favorise par des programmes publics au cours des annes 1960 ou 1970. Lincitation prenaitla forme de primes individuelles la rnovation octroyes dans des quartiers centraux populaires devenus secteurssauvegards (en France, depuis 1962) ou General Improvement Areas (en Grande-Bretagne, depuis 1969). Soho ne serait pasdevenu lemblme du march des lofts ds les annes 1970 sans la suppression par la Ville de New York des rglementationspesant sur les btiments industriels anciens (changement des plans de zonage, allgements des contraintes en matire

    dincendie, etc.) et des programmes doctroi de primes la reconversion rsidentielle de ces btiments. Mais cetinterventionnisme a acquis aujourdhui une toute autre envergure. Il ne sagit plus daccompagner la marge une dynamiqueporte par des choix individuels mais dinitier et dencourager vigoureusement le rinvestissement des marchs immobilierscentraux partir de la construction de complexes rsidentiels haut de gamme, de grands muses, de centres de congrs, decasinos, de marinas, etc. En outre, la gentrification est de plus en plus assume par ses promoteurs publics comme objectif atteindre. Ainsi, les rticences encourager (en connaissance de cause) des processus menant lviction des classes populairesrgressent en mme temps que sont dmanteles les politiques keynsiennes, notamment en matire de logement social.

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    Ce changement de cap des politiques urbaines a t particulirement explicite en Grande-Bretagne. Une premire ruptureintervient avec la mise en uvre, au dbut des annes 1980, du modle libral anti- tatique cher Margaret Thatcher. Lastratgie de reconqute des centres-ville fut alors confie aux promoteurs immobiliers tandis que ltat levait une une les

    rglementations pesant sur les perspectives de profit et les opportunits de spculation. La vague de gentrification qui en dcoula

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    De la thorie la pratique : la thorie de la classe crative , ou la gentrification cls en mains

    Lanne 2002 a vu la cration dune nouvelle petite entreprise prospre, la R. Florida Inc. . Acte de naissance de celle-ci, lapublication par un professeur dconomie initialement bas Pittsburgh et dsormais install Toronto, Richard Florida, dunlivre devenu best-seller,Lmergence de la classe crative. Comment elle transforme le travail, les loisirs, les relations socialeset la vie quotidienneVI. Sous cet en-tte pour le moins ambitieux, lauteur dveloppe lide que la croissance conomique des

    villes et des rgions dpend dsormais, avant toute autre chose, de leur capacit attirer (et retenir) un groupe

    fut chaotique, marque par la succession de booms et de crises du march immobilier. Le mga-complexe de bureaux, decommerces et de rsidences de Canary Wharf Londres est le principal symbole de cette priode. Avec louverture de lre duNew Labour (1997), un modle dUrban Renaissance plus directement pilot par ltat est initi 6. Sa mise en uvre repose sur lasystmatisation de nouveaux schmas de bonne gouvernance urbaine, nologisme qui cache mal un dplacement du champde laction publique vers la sphre prive via le recours aux partenariats publics privs (PPP) dans pratiquement tous lesdomaines de la gestion publique, y compris la scurit. Parmi les autres leviers du modle de la renaissance urbaine labritannique abondamment copis depuis figurent galement les campagnes de promotion vantant la qualit de vie en ville

    et les opportunits dinvestissement dans le tissu ancien, les travaux dinfrastructures visant lattraction de nouvelles clientles(requalification des espaces publics, conversion de vieilles zones portuaires en espaces de loisirs, etc.), la cession prix casss deterrains industriels ou portuaires des dveloppeurs privs chargs dy riger de nouveaux ensembles rsidentiels, daffaires oude chalandise (et loctroi de multiples subventions pour ces projets) ou encore les modifications des plans de zonage pourpermettre ces dveloppements (rduisant de fait les possibilits dextension des activits industrielles). Les rsultats ont souventt spectaculaires, Londres bien sr, mais aussi dans les centres-ville dagglomrations telles que Liverpool, Manchester ouGlasgow. Les acteurs de la promotion immobilire ne cachent dailleurs pas leur enthousiasme au vu des rcentes volutions ducentre de ces agglomrations, comme en atteste cette conclusion tire par un courtier en 2005 au sujet de Leeds, Liverpool,Manchester, Newcastle et Sheffield : De notre point de vue, le renouveau de la vie urbaine a t un succs encore plus grand quetout ce quon aurait pu imaginer il y a dix ans. Des milliards de livres dinvestissements ont fondu sur les villes qui se cherchaientun nouveau destin aprs le dclin industriel, des centaines de logements sont sortis de terre, qui ont trouv acqureurs et, enmoins de dix ans, un march de lhabitat rsidentiel totalement indit a vu le jour. 7 Grce dnormes investissements publics,la construction de logements neufs par des dveloppeurs immobiliers privs est en train de supplanter la rnovation individuellecomme levier principal de gentrification rsidentielle.

    Il faut bien sr largement relativiser ce succs . Au plan factuel, dabord, la nouvelle attractivit des quartiers urbainscentraux auprs de classes moyennes ou suprieures nimplique pas de retour en ville proprement parler. Bien au contraire,les bilans migratoires des grandes villes par rapport aux priphries urbaines restent souvent ngatifs, indiquant que lemouvement de suburbanisation nest pas du tout tari. En outre, et plus fondamentalement, lenthousiasme des acteursimmobiliers prts mordre pleines dents dans le gteau de la renaissance urbaine ne peut dissimuler la natureprofondment ingalitaire de telles dynamiques. Quarente ans de recherches empiriques dans une grande varit de contextesurbains ont montr plus qu suffisance lampleur et la diversit des effets destructeurs de la gentrification sur les quartierspopulaires, leurs habitants et leurs usagers 8. Selon le contexte et le moment, revitalisation va de pair avec viction (directe ouindirecte 9) des habitants ou usagers initiaux, marginalisation sur place des populations (ds lors que les quartiers sont mis enspectacle destination dun nouveau public 10) ou mise sous surveillance des classes populaires dans lespoir de normaliser leurs usages de la ville. Dans ce cadre, la tolrance zro ne reprsente que la norme maximale dintolrance des promoteurs dela gentrification lgard des autres modes dappropriation de lespace urbain notamment vis--vis des stratgies de survie despersonnes sans logement, victimes les plus visibles de la gentrification.

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    gographiquement trs mobile : la classe crative . Sont regroupes sous ce label des catgories dactifs (supposment)employs des fonctions de conception, de design ou de gestion tels que scientifiques, crivains, acteurs, architectes, diteurs,journalistes, analystes financiers, avocats, managers, etc. Selon les calculs de Richard Florida, cette classe crative reprsenterait aujourdhui prs dun tiers de la population active des tats-Unis. Richard Florida parle de talents : cest selonlui la dotation des villes en talents qui est la cause et le moteur de leur prosprit conomique. Il sintresse ds lors comprendre pourquoi certaines villes (San Fransisco ou Boston, par exemple) parviennent aimanter plus que dautres(Memphis, Las Vegas, etc.) les talents de la classe crative . Sa rponse tient en une formule-choc, reprise tant et plus dans

    les mdias : Pourquoi les villes qui nont pas de groupes de rock ni de communauts gay perdent-elles la course audveloppement conomique ?

    La contribution de Richard Florida aux thories de la socit de la connaissance est particulirement maigre tant sesaffirmations sont peu (voire pas du tout) tayes au plan empirique et tant son approche mthodologique est boiteuse VII. Pire,des tests srieux de la thse de Richard Florida en ont dmontr la vacuit : affirmer que la croissance conomique rgionale estattribuable un seul facteur lattraction des talents est faux. Il ny a, de fait, pas de thorie de la classe crative VIII.

    Les thses de Richard Florida sont pourtant reprises tant et plus dans les grands mdias tasuniens et ses partisans enthousiastessont lgion parmi les dirigeant urbains, les technocrates du dveloppement conomique ou les milieux daffaires, en Amrique deNord et aussi, de plus en plus, en Europe. Ce succs tient, dune part, la rhtorique employe et, dautre part, au messagepolitique quil vhicule. La rhtorique de lauteur est mille lieues des formats classiques de la littrature acadmique. Le propos

    est enjou, le style narcissique, limage de lcriture des essayistes succs, tel David Brooks, pre du nologisme bobo IX.Selon Richard Florida, nous sommes dsormais entrs dans l ge de la cration : autant comprendre comment en profiter.Cette rhtorique est mise au service dun message inlassablement martel. En termes daction politique, en effet, la thorie de la classe crative a une dclinaison trs simple : les villes doivent adapter leur amnagement, leurs infrastructures et jusquleurs modes de fonctionnement administratif pour rpondre aux attentes dune lite jeune, dynamique, entreprenante, trsmobile et aux revenus confortables. En bref, les pouvoirs publics doivent avant toute chose aider les riches trouver, en ville, lecadre et le style de vie auquel ils aspirent. Chaque ville se doit doprer une mtamorphose branche pour quy bourgeonnentrestaurants, bars ou clubs cools , groupes rocks et produits culturels sortant de lordinaire, quartiers gay-friendly, bonnescoles, espaces publics festifs et conviviaux, etc. linverse, les barrires la crativit doivent tre leves, dont notamment labureaucratie et la pauvret X.

    La thse de la classe crative offre une justification pare dun vernis (vaguement) scientifique aux tenants dune rorientationdes politiques urbaines vers le sponsoring public de la gentrification. ceux qui le taxent dlitisme, Richard Florida a unerponse bien rode : au bout du compte, lensemble de la population bnficiera des retombes conomiques de la croissanceapporte par la classe crative . Il ne semble pourtant pas troubl par le fait que ses propres observations empiriques montrentexactement linverse : les villes qui attirent le plus la classe crative sont celles qui connaissent les vagues les plus fortes dehausse des cots de limmobilier rsidentiel (do lviction des mnages faibles revenus de ces villes) et celles dans lesquellesles ingalits sociales sont les plus fortes. Il est vrai que lauteur fait tat de ces observations de manire trs discrte, au titre de pistes de recherches explorer lavenir mais sans doute pas par lui-mme.

    Stratgies & lgitimation

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    Bruxelles invente la gentrification durable

    Le centre historique de Bruxelles fait lobjet, depuis le milieu des annes 1990, defforts particuliers de revitalisation urbaine

    formuls en termes de convivialit , de mixit sociale et de dveloppement durable . Les politiques menes visent

    Comment lgitimer un projet aussi ingalitaire que la gentrification ? Dabord, on la dit, en naturalisant les transformationsurbaines en cours, ce quindique bien lemploi de mtaphores organiques telles que renaissance , revitalisation ou renouveau . La ville apparat ainsi tel un organisme vivant mais moribond, que partenaires publics et privs sattelleraient soigner en bonne intelligence. Que ces derniers annoncent la renaissance ou la revitalisation de la ville, ils signifientsubrepticement qu leurs yeux les quartiers populaires (et donc leurs habitants) sont dvitaliss , sinon morts . Il sagit,plus largement, de construire une tension entre, dune part, une rhtorique du dclin urbain (dsindustrialisation,appauvrissement, dgradation environnementale, etc.) et, dautre part, la promesse dun sauvetage de quartiers longtemps

    dlaisss grce au retour de la puissance publique et dinvestisseurs clairs. Tout contradicteur de la revitalisation de la villeest alors trs aisment brocard comme partisan forcment irresponsable du dclin urbain et de la constitution de ghettos etse trouve pris au pige de dbats poss en termes binaires, gentrification ou abandon , dichotomie absurde sil en est. Carlinverse de la gentrification nest pas lappauvrissement, labandon et le ghetto mais bien, notamment, la socialisation du marchdu logement, lappropriation collective de lhabitat, la rnovation des quartiers populaires aux bnfices de leurs habitantsactuels, etc. La gentrification nest pas non plus une nouvelle phase dans un cycle naturel dvolution des villes. Construire decette manire la prsentation du problme et de sa solution permet de camoufler les consquences sociales effectives des actionsde revitalisation et de dissimuler sa propre incapacit traiter des problmes de pauvret urbaine.

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    Dans ce cadre, les notions de mixit sociale , de cohsion urbaine (plutt que de solidarit) ou de dveloppementdurable (plutt que de protection de lenvironnement) constamment mobilises dans les discours cherchant susciterladhsion aux stratgies de renaissance urbaine paississent efficacement le vernis appos sur ce projet de normalisationlitiste des usages de la ville.

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    Par exemple, comment comprendre autrement la fonction de la mixit sociale dont les vertus qui lui sont attribues dansles discours pro- gentrification nont plus court ds lors quil sagirait, linverse, douvrir des espaces bourgeois trs peu mixtes dautres populations 11 ? Dans ce cas, il est plutt question du danger de voir troubler un entre-soi rsidentiel prementdfendu par ses bnficiaires. En outre, mme lorsque la mixit est clbre dans les discours, la ralit du mlange social rsistesouvent trs mal lanalyse des modes de cohabitation dans les quartiers concerns. Souvent, manires de vivre et aspirations desnouveaux venus ont peu en commun avec celles des habitants dorigine 12. Bien plus que de mlange social, cest de sgrgation micro-chelle quil est question, dindiffrence lgard des autres , dvitement, voire de conflit. Lide simpliste que laproximit spatiale rduit automatiquement les distances sociales est infirme par nombre de travaux de sociologie urbaine. En finde compte, le plus solide fondement de limagerie contemporaine de la mixit sociale applique lespace urbain est ancrdans la lgitimation de la gentrification : il sagit dembellir limage des quartiers populaires lattention dune populationdynamique, instruite, consommatrice que lon verrait bien sy installer en nombre croissant. Et de clbrer alors lidal de laville mixte de festivals urbains conviviaux en happenings exotiques , douverture de centres dart contemporain eninauguration de plages urbaines ou de pistes de roller mais sans pour autant sinterdire de prsenter loccasion les quartierspopulaires comme des espaces dangereux ou sensibles dans lesquels simposerait un investissement scuritaire accru.

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    ct des mcanismes dexclusion de la sphre du travail stable et intgrateur, de rduction des assurances sociales et deprivatisation des biens publics, la gentrification signifie la restriction du droit la ville, notamment la possibilit de disposer dunlogement et des espaces publics. En ce sens, elle est intimement lie au projet politique no-libral. Cest devenu un projetpolitique de transformation litiste des espaces urbains prtendant lhgmonie sur la vision du futur de la ville.

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    notamment remettre sur le march danciens btiments industriels de grande taille (ce qui a donn lieu lclosion dun marchdes lofts trs vite accapar par la promotion immobilire), requalifier les espaces publics (y compris par la pose de camras desurveillance) ou encourager la rnovation qualitative des biens privs par loctroi de primes. Loption du dveloppementdurable tient alors en un raisonnement simple, quasi mcanique : La revitalisation du centre historique de Bruxelles rpondavant tout un enjeu fondamental du dveloppement durable, celui dune ville compacte et dense par opposition sa dispersion,ce qui optimalise limplantation humaine par rapport la prservation de lenvironnement (et des campagnes) et laproblmatique des dplacements. XI

    Lanalyse des rsultats des mesures de revitalisation durable par leurs promoteurs eux-mmes se passe presque decommentaires : Le dveloppement du centre a entran une relance et une revalorisation considrables sur le plan immobilier,mais difficile chiffrer. Ce dveloppement a surtout touch le secteur du logement, mais produit des effets plus globaux. Lesbiens industriels dsaffects ont par exemple quadrupl de valeur (qui tait beaucoup trop basse) ; le march immobilier a rejointles valeurs des communes du sud de la premire couronne de la Rgion [les quartiers les plus chic de la ville]. Lenjeu sera desavoir matriser les effets du succs, en continuant privilgier les interventions qualitatives sur le quantitatif. Il est sans douteutile dindiquer ici que ce succs , en labsence de tout mcanisme de contrle foncier, sest traduit par une explosion des cotsdu logement au centre de la ville, forant quantit de locataires sappauvrir sur place en consacrant une part toujours croissantede leurs revenus leur logement (souvent suprieure 50 %), ou partir.

    cet gard, un rcent rapport de la Cour des comptes tablit un bilan fort critique de ce type daction politique : Les projets de

    logement ne bnficieront probablement pas le plus aux catgories salariales les plus basses qui sont le plus mal loges. cepropos, la cration dune mixit sociale est un objectif que lon retrouve dans de nombreux projets. Dans la pratique, il sagitsouvent dattirer les classes moyennes dans les quartiers dfavoriss pour y crer une mixit sociale. Dans le cadre dune politiqueaxe sur les quartiers dfavoriss, il faut prendre en considration les effets ngatifs. Des augmentations de prix peuvent conduire lviction hors de ces quartiers des titulaires de revenus faibles. Ces effets ne sont pas pris en considration pour le moment. XIIEt les rapporteurs dindiquer encore que, dans le cadre dune politique axe sur les dfavoriss, [il faut] prendre srieusementen considration les effets ngatifs de la gentrification XIII. voir la raction des responsables politiques les plus directementconcerns, il nest pas sr que cette sage recommandation ait t entendue : La Cour des comptes [] ferait mieux dapprcierla lgalit des actes que faire de la politique en se faisant lcho du braiment de lun ou lautre sociologue franais. XIV

    La mise en concurrence des villesLe dogme nolibral selon lequel le gouvernement des villes doit dsormais favoriser les agents conomiques oprant lchelle

    internationale pour pouvoir esprer quelques retombes sociales lchelle locale a acquis, au cours des deux derniresdcennies, une puissance redoutable. Pour les lus des agglomrations et les technocrates du dveloppement conomique, il sagitdornavant de se calquer sur les mthodes de la gestion dentreprise et dendosser autant que faire se peut le costume dereprsentants de commerce de leur ville. Briller de mille feux aux yeux dentreprises multinationales, de cadres hyper-mobilesou de touristes internationaux, tous avides de jauger les atouts de chaque ville en tant que site dinvestissement, denvironnementde travail ou de cadre de loisirs, est devenu une obsession des politiques urbaines. Partout, le city marketing (ou citybranding 13) simpose comme stratgie prioritaire et on voit politiciens de tous bords se presser en rangs serrs dans lessminaires rservs aux professionnels de limmobilier international, dont les grandes foires annuelles des villes vendre

    telles le March international des professionnels de limmobilier (MIPIM) cannois ou la foire annuelle des technologies de

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    Notes

    1 La mention originelle du terme gentrification apparat dans lintroduction de Ruth Glass un ouvrage command par les autoritslondoniennes sur la structure sociale et les dynamiques de population Londres au dbut des annes 1960,London : Aspects of Change, Centerfor Urban Studies, MacGibbon and Kee, 1964.

    Hanovre (Hannover Messe). lites politiques, conomiques et mdiatiques ne lchent dsormais plus des yeux les classementsde villes tablis selon le degr dapprciation du business climate et de la qualit de vie par un panel de dirigeants ou decadres dentreprises multinationales. Grands rassemblement internationaux, classements de ville et autres tudes de benchmarking contribuent largement homogniser, voire discipliner les modes de pense en matire dedveloppement urbain. De fait, un modle mimtique de gouvernement des villes parat simposer, prnant toutes de fairereposer leur dveloppement conomique et social sur lattraction de potentiels conomiques exognes dans le cadre duneconcurrence inter-urbaine exacerbe 14.

    Chantiers et grands travaux se multiplient, motivs par la volont d adapter le tissu urbain, hrit de lhistoire conomiqueet sociale locale, aux nouvelles normes de la comptitivit territoriale . La frnsie contemporaine de grands projetsurbains est la partie la plus visible de cette concurrence que se livrent les v illes prtendant un statut de mtropole rgionale,nationale, continentale ou mondiale, selon lambition. Pour ne prendre que lEurope occidentale, on voit pousser comme deschampignons centres de congrs internationaux ( Lille, Birmingham, Francfort, Lucerne, etc.), complexes daffaires clinquantsmlant bureaux, htels, commerces et rsidences haut de gamme (Canary Wharf Londres, Zuidas Amsterdam, restad Copenhague, Hafencity Hambourg, Euromditerrane Marseille, etc.), technopoles couples de nouveaux campusuniversitaires ( Barcelone, Strasbourg, Berlin, etc.), muses dart contemporain ou cits des sciences ( Londres, Bilbao, Paris,Valencia, Marseille, etc.), salles de concerts ( Copenhague, Newcastle, Porto, etc.) ou autres hauts lieux de la culturemarchandise. Un gain supplmentaire de notorit internationale sera apport par la signature dun architecte de renommemondiale les Gerhy, Rogers, Foster, Nouvel, Koolhaas, Calatrava, etc. La comptition est galement de plus en plus froce pouraccueillir un grand vnement aux retombes mdiatiques internationales. Lobjectif a alors pour nom capitale europennede la culture , exposition universelle ou, mre de toutes les batailles, jeux Olympiques 15.

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    Il ne sagit plus de chercher attirer un potentiel industriel afin de dvelopper une base productive locale (et dassurer en avalla redistribution locale des fruits de la croissance aux termes du compromis fordiste- keynsien) mais de positionner le territoireurbain en regard dinvestissements immobiliers adosss des capitaux financiers globaliss et des flux transnationaux deconsommateurs touristes, congressistes, visiteurs dun jour, etc. Le succs du muse Guggenheim de Bilbao estcouramment montr en exemple, au prix cependant dune lecture trs partiale de la distribution des cots et bnfices de cetteopration 16. Le mgaprojet en dveloppement de Gran Scala prs de Saragosse (dont lambition nest rien de moins que lacration dun Las Vegas europen , dot de trente-deux casinos-htels et de deux grands parcs thmes 17) reprsente sansdoute la version actuelle la plus dmesure de ce modle en Europe. Ailleurs, Duba offre lexemple extrme 18.

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    Dans ce cadre, limbrication des politiques publiques et des stratgies immobilires prives est trs intime ds lors que lestactiques de valorisation du foncier urbain (en particulier au centre-ville) sont au centre de la stratgie de dveloppement

    laquelle partenaires publics et privs sattellent de concert. En parallle, le champ des politiques de redistribution estprogressivement dsinvesti (en matire de production de logements sociaux notamment) ou mis la remorque des retombesescomptes de la politique dattractivit du territoire. Dans lidal-type de la ville revitalise ou rgnre ( gentrification reste un mot tabou pour nombre de ses promoteurs), les quartiers populaires et leurs habitants ont une placetrs limite. Ils y sont plus souvent indsirables et traits comme tels.

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    2 Lexpression est de Brian Berry, Islands of Renewal In Seas of Decay in Paul Peterson (dir.), The New Urban Reality, The BrookingsInstitution, 1985, p. 69-96.

    3 Le sens initial, anglo-saxon, du nologisme bourgeois bohme fait rfrence des profils sociaux gnralement bien suprieurs ceuxauquel lusage francophone renvoie habituellement. Lire David Brooks,Les Bobos, Florent Massot, 2000.

    4 Lire Michel et Monique Pinon-Charlot,Dans les beaux quartiers, Seuil, 1989 ;Les Ghettos du gotha, Seuil, 2007.

    5 Neil Smith fournit linterprtation la plus stimulante de la gentrification comme nouvelle stratgie urbaine globale lire Lagentrification gnralise : dune anomalie locale la rgnration urbaine comme stratgie urbaine globale , in Catherine Bidou-Zachariasen(dir.),Retours en ville, Descartes & Cie ; Neil Smith, The New Urban Frontier : Gentrification and the revanchist City, Routledge, 1996.

    6 Pour une analyse plus dtaille, lire Claire Collomb, Le New Labour et le discours de la renaissance urbaine au Royaume-Uni. Vers unerevitalisation durable ou une gentrification acclre des centres-ville britanniques ? , Socits contemporaines, 2006, n 63, p. 15-37.

    7 Knight Frank,Future City. The northern residential review 2005http://www.ke.knightfrank.com/ResearchReportDirPhase2/10750.pdf.

    8 Pour une revue systmatique de la littrature anglo-saxonne, lire Rowland Atkinson, Does Gentrification Help or Harm UrbanNeighbourhoods ? An Assessment of the Evidence-Base in the Context of the New Urban Agenda , ESRC Centre for Neighbourhood Research,2005 http://www.bristol.ac.uk/sps/cnrpaperspdf/cnr5pap.pdf ; galement Isabelle Berry-Chikhaoui, Agns Deboulet et Laurence Roulleau-Berger (dir.), Villes internationales. Entre tensions et ractions des habitants, La Dcouverte, 2007.

    9 Un argument rcurrent des partisans de la gentrification est de nier lexistence mme du processus sur la base du fait que la construction denouveauxlogements haut de gamme sur terrain vierge nimplique aucune viction de rsidents pralablement en place. Cest bien sr faire fides effets de contagion sur le march immobilier provoqus par les nouvelles ralisations.

    10 Lire par exemple Monika Alisch et Wolfgang Zum Felde, Rnovation et embourgeoisement du centre-ville de Hambourg. Dtresse etractions des rsidents , in Eva Lelivre et Claire Lvy-Vroelant (dir.), La Ville en mouvement : habitat et habitants, LHarmattan, 2000,

    p. 331-341, http://www2.urbanisme.equipement.gouv.fr/cdu/datas/docs/ouvr7/cilog25.htm.11 Sur lusage des valeurs de la mixit et de la convivialit dans des contextes de gentrification, lire par exemple ric Charmes, Leretour la rue comme support de la gentrification , Espaces et Socits, 2005, n 122, p. 115-135 ; galement Bruxelles : mixit sociale enthorie, sgrgation en pratique , Cahiers marxistes (Bruxelles,) 1998, n 211.

    12 Lire par exemple Damaris Rose, Proximit spatiale, distance sociale : les rapports inter-ethniques dans un secteur dfavoris Montralvus travers les pratiques de voisinage , in Alain Bourdin, Annick Germain et Marie-Pierre Lefeuvre (dir.), La Proximit. Constructionpolitique et exprience sociale, LHarmattan, 2005, p. 135-157) ; galement Ti m Butler, Living in the Bubble : gentrification and its others inNorth London , Urban Studies, n 40(12), p. 2469-2486.

    13 City branding fait rfrence la fabrication de reprsentations hgmoniques dune ville, la manire du travail sur la perception dunemarque commerciale auprs de sa clientle ; il se traduit classiquement par la cration de slogans et de logos envahissant les paysages urbainstels que Totally London , I Love New York , I Amsterdam , OnlyLyon , Edinburgh Inspiring Capital, etc.

    14 Pour un stimulant dveloppement thorique de lvolution contemporaine des politiques urbaines dans les pays occidentaux, lire DavidHarvey, From Managerialism to Entrepreneurialism : the transformation in urban governance in late capitalism , Geografiska Annaler,

    1989, 71(B), p. 3-17 ; galement Jackson Hackworth, The Neoliberal City. Governance, ideology, and development in american urbanism ,Cornell UP, 2007.

    15 Lire Les jeux Olympiques, mdaille dor des expulsions , infra, p. 127.

    16 Pour une liste dtudes qui analysent lopration Guggenheim Bilbao, lire http://www.scholars-on-bilbao.info/index.php.

    17 Pour une description plus complte (et enjoue), http://nv.parkothek.info/dossier/00000371-gran_scala_un_projet_a_grande_echelle.html.

    18 Lire Mike Davis,Le Stade Duba du capitalisme, Les Prairies ordinaires, 2007.

    Note de fin

    I Gamin en brussellair.

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    II Intervention du ministre Pascal Smet, principal instigateur du projet, devant le parlement bruxellois, le 9 mars 2007.

    III Cette enqute est le fruit dun mmoire de fin dtudes de Johanne Dendoncker, Les plages urbaines : un produit touristique? Le cas de Bruxelles-les-Bains , Universit libre de Bruxelles, Institut de gestion de lenvironnement et damnagement duterritoire, 2007.

    IV Notaruimte, 2006, http://www2.vrom.nl/notaruimte/, traduction de lauteur.

    V Plan de dveloppement international de Bruxelles. Schma de base. Rapport final , Price Waterouse Coopers, 2008, p. 73 http://www.quartier-midi.be/wp-images/PDI.pdf.

    VI Titre original : The Rise of the Creative Class. And How Its Transforming Work, Leisure, Community and Everyday Life,Basic Books, New York, 2002.

    VII En particulier son obsession interprter toute corrlation statistique entre deux variables comme relation de causalitdirecte et automatique. Ainsi, par exemple, une corrlation statistique entre prsence dartistes et localisation des firmes hi-techdeviendra Il y a des firmes hi-tech parce quil y a des artistes , puis Si vous voulez des firmes hi-tech chez vous, attirezdabord des artistes .

    VIII Lire par exemple lanalyse de Richard Shearmur, Laristocratie mobile du savoir : quelques rflexions sur les thses de

    Richard Florida , INRS, novembre 2005, working paper n 9, http://www.inrs-ucs.uquebec.ca/pdf/inedit2005_09.pdf.

    IX On trouvera une critique des rles politiques de David Brooks, auteur du best-sellerBobos in Paradise et trs conservateurjournaliste politique duNew York Times , dans le livre que Thomas Frank a consacr labandon par le parti dmocrateamricain de son lectorat populaire,Pourquoi les pauvres votent droite, Agone, 2007. [ndlr]

    X Lire http://www.creativefortwayne.net/memphis_manifesto.php.

    XI CAVID,Bruxelles Ville durable, Guide des actions, Rgion de Bruxelles-Capitale, p. 66-67, http://www.avcb-vsgb.be/fr/accueil.html?mati/dd/bp/del.htm

    XII La politique fdrale des grandes villes. Examen des contrats de ville et des contrats de logement 2005-2007 , Rapport dela Cour des Comptes transmis la Chambre des reprsentants, Bruxelles, dcembre 2007, p. 4.

    XIII Ibid., p 47.

    XIV Propos de M. Charles Picqu, ministre-prsident de la Rgion de Bruxelles-Capitale,Le Soir, 18 fvrier 2008, p. 10.

    Pour citer cet article

    Rfrence lectronique

    Mathieu Van Criekingen, Comment la gentrification est devenue, de phnomne marginal, un projet politique global , revue Agone, 38-39 |

    2008, [En ligne], mis en ligne le 03 mai 2010. URL : http://revueagone.revues.org/201. Consult le 18 dcembre 2010.

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    Auteur

    Mathieu Van Criekingen

    Gographe, charg de recherche du Fonds de la recherche scientifique (FNRS), Mathieu Van Criekingen est attach au laboratoire de

    gographie humaine de lUniversit libre de Bruxelles (ULB).

    Droits d'auteur Editions Agone

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