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, -. Consultation régionale sur les industries culturelles en Afrique Cotonou, 5-8 septembre 2000 RAPPORT FINAL Convoquée à l’initiative de I’UNESCO, une réunion d’experts appelée consultation régionale, s’est tenue à Cotonou (Bénin) du 5 au 9 septembre 2000 en vue de faire le point sur l’état des industries culturelles en Afrique 8 ans après le lancement d’un plan ad hoc, le Plan de Dakar, par l’Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à la lumière des enjeux nouveaux de la mondialisation et du respect de la diversité culturelle. Ont pris part à cette rencontre des professionnels invités comme experts venant des pays de l’Afrique de l’ouest, de l’Est, du Centre et du Sud suivants: Angola, Bénin, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Côte d’lvoire, Gabon, Ghana, Malawi, Tanzanie, Togo. M. Jean-Roger Ahoyo, Conseiller régional de I’UNESCO pour la culture en Afrique de l’Ouest est venu saluer les participants à l’ouverture de la réunion. Ceux-ci ont eu par ailleurs l’honneur d’être présentés à Son Ext. Alah Asa, Ministre de l’éducation de la République du Bénin, président de la Commission nationale béninoise pour I’UNESCO, à l’occasion de leur visite d’illustration organisée à leur intention par I’Ecole du patrimoine africain de Porto-Novo. Introduction En ouvrant la réunion, M. Lupwishi Mbuyamba, Conseiller culturel régional de I’UNESCO pour la culture en Afrique de l’Est et du Sud, a défini le cadre, l’importance et les enjeux de la rencontre. Cette réunion s’imposait pour plusieurs raisons : tout d’abord, il s’agissait de répondre, pour l’Afrique, à une invitation de la 30ème session de la Conférence générale de I’UNESCO d’approfondir la problématique des la diversité culturelle à l’heure de la mondialisation sur le plan régional et en fonction des secteurs d’industries culturelles ; préluder enfin à la réunion du Comité international d’experts sur “ Le renforcement de du rôle de I’UNESCO dans le domaine de la promotion de la diversité culturelle “, prévue au Siège, les 21 et 22 septembre 2000 et à la Table ronde des ministres de la culture sur le thème ” La diversité culturelle 2000-2010 : les enjeux du marché ” fixée au Siège également, les Il et 12 décembre 2000. En particulier, la convocation prochaine de la Table ronde des ministres de la culture, décideurs politiques, nécessitait une préparation adéquate au niveau technique, sur le plan régional ; d’autre part, il était clair que la gravité du thème, la diversité culturelle, impose aux dirigeants comme aux professionnels de la culture une prise de conscience de leur responsabilité commune et de l’urgence de se doter d’un plan d’action pour faire face aux enjeux qui se présentent à tous à l’échelle mondiale et locale. A tous, en effet, une stratégie solidaire de défense de la diversité culturelle s’impose dès lors que la culture et son produit, qui n’est pas une marchandise comme une autre, se trouvent sur le marché mondial, exposés aux risques d’un nivellement, d’un ravalement global, hypothéquant l’expression libre de la créativité, centre nerveux de la culture, dans son identité fondatrice.

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Page 1: Consultation régionale sur les industries culturelles en Afrique

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Consultation régionale sur les industries culturelles en Afrique

Cotonou, 5-8 septembre 2000

RAPPORT FINAL

Convoquée à l’initiative de I’UNESCO, une réunion d’experts appelée consultation régionale, s’est tenue à Cotonou (Bénin) du 5 au 9 septembre 2000 en vue de faire le point sur l’état des industries culturelles en Afrique 8 ans après le lancement d’un plan ad hoc, le Plan de Dakar, par l’Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à la lumière des enjeux nouveaux de la mondialisation et du respect de la diversité culturelle.

Ont pris part à cette rencontre des professionnels invités comme experts venant des pays de l’Afrique de l’ouest, de l’Est, du Centre et du Sud suivants: Angola, Bénin, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Côte d’lvoire, Gabon, Ghana, Malawi, Tanzanie, Togo.

M. Jean-Roger Ahoyo, Conseiller régional de I’UNESCO pour la culture en Afrique de l’Ouest est venu saluer les participants à l’ouverture de la réunion. Ceux-ci ont eu par ailleurs l’honneur d’être présentés à Son Ext. Alah Asa, Ministre de l’éducation de la République du Bénin, président de la Commission nationale béninoise pour I’UNESCO, à l’occasion de leur visite d’illustration organisée à leur intention par I’Ecole du patrimoine africain de Porto-Novo.

Introduction

En ouvrant la réunion, M. Lupwishi Mbuyamba, Conseiller culturel régional de I’UNESCO pour la culture en Afrique de l’Est et du Sud, a défini le cadre, l’importance et les enjeux de la rencontre.

Cette réunion s’imposait pour plusieurs raisons :

tout d’abord, il s’agissait de répondre, pour l’Afrique, à une invitation de la 30ème session de la Conférence générale de I’UNESCO d’approfondir la problématique des la diversité culturelle à l’heure de la mondialisation sur le plan régional et en fonction des secteurs d’industries culturelles ; préluder enfin à la réunion du Comité international d’experts sur “ Le renforcement de du rôle de I’UNESCO dans le domaine de la promotion de la diversité culturelle “, prévue au Siège, les 21 et 22 septembre 2000 et à la Table ronde des ministres de la culture sur le thème ” La diversité culturelle 2000-2010 : les enjeux du marché ” fixée au Siège également, les Il et 12 décembre 2000. En particulier, la convocation prochaine de la Table ronde des ministres de la culture, décideurs politiques, nécessitait une préparation adéquate au niveau technique, sur le plan régional ;

d’autre part, il était clair que la gravité du thème, la diversité culturelle, impose aux dirigeants comme aux professionnels de la culture une prise de conscience de leur responsabilité commune et de l’urgence de se doter d’un plan d’action pour faire face aux enjeux qui se présentent à tous à l’échelle mondiale et locale. A tous, en effet, une stratégie solidaire de défense de la diversité culturelle s’impose dès lors que la culture et son produit, qui n’est pas une marchandise comme une autre, se trouvent sur le marché mondial, exposés aux risques d’un nivellement, d’un ravalement global, hypothéquant l’expression libre de la créativité, centre nerveux de la culture, dans son identité fondatrice.

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Sur la base d’une stratégie régionale, le Plan de Dakar, le continent est invité à témoigner de son expérience en vue de définir son apport au débat universel sur le respect de la diversité culturelle dans le commerce mondial.

Après cette introduction, les participants ont mis en place un bureau pour la réunion (composé comme suit : président: M.L. Mbuyamba (UNESCO) ; vice-président: M.Simao Souindoula (CICIBA, Gabon) ; rapporteur: M.Mvuezolo Vozo (CEPROCOM, République démocratique du Congo) et adopté l’ordre du jour et le calendrier de travail annexés au présent rapport.

Point 1: le Plan d’action de Dakar sur les industries culturelles: rapport sur la mise en oeuvre

Adopté en 1992 et diffusé largement en Afrique, le Plan de Dakar est une première dans le domaine sur le continent.

Rassembler en un seul document les projets de chacun des produits culturels, décanter la démarche préconisée pour les stratégies spécifiques et présenter le résultat global comme guide pour l’action est un objectif précieux qui a été atteint. Mais c’est davantage dans sa mise en oeuvre que la pertinence de ce plan sera jugée. A cet égard, l’examen de la synthèse des rapports nationaux et sous-régionaux qui ont été faits à l’initiative de I’UNESCO appelle les observations suivantes:

1” Ce rapport doit être davantage synthétisé pour devenir un document de lecture facile

2” Mais cet effort de synthèse ne se fera pas aux dépends d’un enrichissement équilibré pour sa substance

3” Dans la recherche de l’équilibre de son contenu on gagnerait à veiller à intégrer tous les apports, de toutes les sous-régions d’Afrique.

4” La publication d’une plaquette pour chaque secteur peut être envisagée.

5” Enfin la publication d’un ouvrage scientifique pourrait être recommandée afin de soutenir une réflexion de fond.

Au demeurant, différentes initiatives à prendre seront une occasion pour enrichir le Plan de Dakar désormais en face du défi de la problématique des nouvelles technologies de la création et de la communication.

Point 2: Culture, commerce et mondialisation: libre circulation des biens culturels et promotion de la diversité culturelle

Introduction

Un état de la question sur ce point central de la rencontre a été présenté aux participants à partir du document préparé, au nom de la Division des arts et de l’entreprise culturelle du Secteur de la Culture de I’UNESCO, par M. Georges Poussin, Chef p.i. de la Section du livre et des industries culturelles.

Il ressort du débat que s’il est un droit fondamental pour l’homme au-delà de son existence physique en effet, c’est bien celui de s’exprimer c’est-à-dire, de poser un acte culturel. C’est cet acte qui fonde ses relations autour de lui, y compris les relations d’intérêt, économiques, commerciales. C’est donc son expression qu’il présente au monde. Et cette relation essentielle de l’homme dans le monde est fondamentalement culturelle, identitaire et donc fondée sur la différence. Les manifestations de cette différence fondamentale s’affirment dans les produits culturels souvent artistiques. Leur présentation, la préservation de cette différence est essentielle à l’homme au risque de le voir robotisé, standardisé et donc déshumanisé.

C’est tout l’enjeu du commerce mondial, en ce qui touche à l’échange des produits culturels, dans un monde dominé par une seule culture et qui a l’ambition de tout ramener à lui, à ses concepts, à ses canons, à ses lois. Un véritable péril pour l’humanité! Comment pourra-t-on l’éviter dans un monde globalisé qui est là, un fait ? Comment l’Afrique pourra-t-elle défendre sa survie ?

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Des pistes d’action ont été tracées :

1” Constituer un front commun, les entités culturelles économiques et politiques sous-régionales et régionales devant être mobilisées.

2” S’assurer une expertise à toute épreuve en accordant une priorité à la formation des cadres compétitifs, pour la conception et la commercialisation.

3” Ne pas hésiter à s’entourer des services conseils.

4” Etudier le marché en fonction de sa pertinence, de sa rentabilité, de sa compétitivité.

5” Réorganiser le marché local en augmentant la capacité de production, en améliorer la qualité et veiller à préserver la spécificité esthétique des produits.

6” Aborder le marché mondial avec des critères précis parmi lesquels la nécessité d’une étude préalable du marché et donc l’importance de la recherche, le partenariat et donc la coopération, et la mise en réseaux.

7” Mobiliser les Etats, les pouvoirs publics, autour de:

la définition des politiques culturelles globales des media publics et de l’éducation en particulier; la création des infrastructures de production et de présentation; la mise sur pied des structures officielles d’encadrement telles que les ministères des petites et moyennes entreprises et de l’industrie; l’adoption d’une législation nationale contre les monopoles et la reconnaissance des espaces commerciaux régionaux comme la CEDEAO (communautés de développement de l’Afrique de l’Ouest) la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe) la COMESA (marché commun de l’Afrique de l’Est) et CEMAC (communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale); le renforcement de la lutte acharnée contre la piraterie dans les pays et en dehors y compris sur les sites WEB.

Cet aperçu stratégique global devait ensuite être suivi par un examen approfondi des situations concrètes au regard de certaines catégories de produits culturels relevés dans le plan de Dakar et représentés par des professionnels à la consultation.

1. Enjeux dans le domaine de l’artisanat

A l’examen de l’expérience de Espace Plus, une entreprise du Bénin diverses situations se sont présentées.

Ont été déplorés :

l’absence d’une véritable évaluation l’absence d’une législation adéquate le manque d’une autonomie financière l’absence de structures adéquates et performantes l’inexistence de véritables partenaires, des antennes extérieures.

Ont été appréciés :

les efforts des initiatives locales dans la promotion des matériaux et produits locaux le soutien à la créativité l’échange d’informations

Sont à encourager :

l’élaboration de politiques nationales des taxes la matérialisation de l’intégration régionale dans les structures de décision

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la production en grande quantité des oeuvres davantage de professionnalisme dans le marketing le développement d’un marché tourné vers l’extérieur avec une mention spéciale pour le SIAO (salon international de l’artisanat de Ouagadougou) et les chambres de métiers créés dans certains pays.

2. Enjeux dans le domaine de l’Art

Sur la base des expériences de la biennale de l’art contemporain bantou du CICIBA (Centre international des civilisations bantou) au Gabon, des éléments ont été proposés pour être considérés dans l’étude du marché, à savoir :

la valeur intrinsèque de l’œuvre d’art sa qualité pour l’exportation (en fonction des critères esthétiques extérieurs) la demande touristique locale les possibilités de reproduction en série

Après un débat de fond sur la préservation de l’originalité de l’art africain, des recommandations ont été faites en vue d’assurer un marché rentable sans sacrifier la qualité des oeuvres. Ainsi :

1’ des ateliers permanents sur les critères et l’esthétique de l’art africain devraient toujours accompagner les expositions;

2” la mise sur pied des associations professionnelles ou syndicats nationaux devrait être encouragée;

3” le développement d’une industrie, d’un marché continental de l’art devrait être une préoccupation pour tous les promoteurs (une “place” pourrait être envisagée à l’initiative des promoteurs);

4” la reproduction des oeuvres en numérique sur l’Internet aiderait la diffusion et la promotion

3. Enjeux dans l’industrie du livre

Le débat qui a suivi la présentation de la démarche de I’APNET (réseau africain des éditeurs) s’est focalisé sur les domaines de priorité, les conséquences d’une politique incohérente, la part de l’initiative privée, les relations réciproques entre les domaines voisins comme le développement du livre et celui de l’art, le développement du marché et donc de la lecture, l’organisation des expositions et salons, le marketing et l’expertise.

Des recommandations sur cette base ont été formulées visant à renforcer ce secteur, témoin de la vitalité de la culture et particulièrement exposé aux fluctuations du marché :

1” Mettre en place une politique nationale du livre destinée à favoriser la production locale, visant la privatisation et réglementant la levée des taxes en conséquence;

2’ Favoriser le développement d’un marché régional conformément à une politique que I’OUA pourrait définir et évaluer périodiquement;

3” Reconnaître la place des industries culturelles dans les Protocoles entre Etats membres de la CEDEAO, de la SADC, du CEMAC, de la COMESA et de la COI (Commission de l’océan indien);

4” Accroître et renforcer la coopération entre les politiques gouvernementales en matière de la production et de la circulation du livre et les initiatives privées d’une part, et d’autre part, celles-ci entre elles et favoriser la coopération entre éditeurs;

5” Faciliter les coûts de production;

6” Lutter contre la piraterie et assurer la surveillance du marché électronique;

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7” Renforcer la production locale et adopter une stratégie pour augmenter le taux de lecteurs;

8” Promouvoir les foires et salons régionaux du livre et faciliter la participation africaine aux salons internationaux en organisant un système d’expositions collectives;

9” Promouvoir la “ Journée mondiale du livre et du droit d’auteur ” (23 avril);

10” Adopter une vision globale et intégrée des industries culturelles.

4. Enjeux dans le domaine de la musique et des arts du spectacle.

Les participants ont suivi la présentation des expériences tour à tour du MASA (marché des arts du spectacle africain) et de la TRANSAC (trans- africaine des arts et de la culture).

Le MASA, organisé tous les 2 ans à Abidjan depuis 1993, est un grand rassemblement des professionnels de la scène. Pour 40 compagnies de théâtre, de danse et de musique inscrites au programme, près de 400 diffuseurs internationaux se présentent à la recherche de la qualité à sélectionner, à “acheter”. A terme, environ 65% des groupes présentés reçoivent un contrat de production.

La TRANSAC est un réseau continental qui a pour but d’imposer les arts et la culture comme un domaine exploitable pour une industrie africaine de professionnels capable de générer des emplois et des revenus. Elle est en particulier préoccupée en ce moment de la mise sur pied d’un marché du disque (MADEM).

Après un échange sur les conditions de promotion et de protection des oeuvres, le débat s’est poursuivi sur la qualité des oeuvres à présenter insistant sur la qualité et l’authenticité comme critères pour le soutien à la créativité.

Voici énumérés ci-après, les points importants qui peuvent être retenus de ce débat:

1” II est indispensable que la qualité de l’œuvre constitue le premier critère de sélection. Cette qualité est à établir sur la base d’une esthétique interne, de la fidélité de l’œuvre à elle-même, de son origine, de son environnement.

2” La formation à cet égard est une donnée contraignante: formation dans les écoles spécialisées mais formation permanente également dans des ateliers de création; I’UNESCO est ici interpellée.

3” Cette formation s’étendrait aux promoteurs et diffuseurs, aux animateurs et aux journalistes spécialisés, aux gestionnaires et aux directeurs des festivals enfin.

4” L’identification des opérateurs culturels, des structures de production, devrait également retenir l’attention, leur évaluation devrait permettre une structuration, une mise en réseaux pour une rentabilité rationnelle des moyens existants; la contribution de I’UNESCO est à cet égard souhaitée.

5” Ces réseaux pourraient être étendus au-delà de la région, intégrer la diaspora et se brancher sur les grands réseaux mondiaux.

6” Un marché du disque africain pourrait voir le jour en Afrique. Il constituerait un grand rendez-vous pour la présentation et la diffusion ; de même constituerait-il une référence.

5. Enjeux dans le domaine du cinéma

L’expérience du ZIFF (Festival international du film de Zanzibar) a constitué la référence technique pour introduire le débat sur ce thème sans oublier. Les autres festivals en Afrique notamment le FESPACO (Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou), le SAFF

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(Festival du film de l’Afrique australe) et le marché du film et de la télévision de Cape Town (SITHENGI).

Le débat alors a porté sur les questions relatives à la qualité du film africain et sa diffusion sur le marché international, de l’expertise des auteurs et des producteurs, sur la pertinence de son esthétique vis-à-vis du public local africain, des coûts de production et sur la rentabilité, les infrastructures adéquates et les salles de projection, les relations entre le cinéma et la télévision, le marché régional et finalement la place de l’industrie cinématographique dans la démarche globale pour le développement.

Comme conclusion à ce débat riche et animé, les participants ont retenu les priorités suivantes:

1” Le film africain a une mission globale de développement: sa contribution à la connaissance générale et à la diffusion de la culture africaine est attendue.

2” Le public africain voudrait s’y reconnaître, à charge pour l’auteur d’y veiller tout en gérant la modernité

3” Cette modernité exige une infrastructure adéquate et les pouvoirs publics ont là un devoir de soutien à la création et à la consommation.

4” Ce faisant un marché se crée que les entrepreneurs devraient organiser et développer sur le plan local, national mais aussi régional, les festivals régionaux de cinéma favorisant le développement solidaire de la culture tout en offrant une opportunité pour consolider ce marché.

5” Enfin une école de cinéma pourrait systématiser la formation des cadres compétents et de véritables professionnels qui renforceront la crédibilité du cinéma africain et achever de doter l’Afrique d’acteurs essentiels, négociateurs et défenseurs décomplexés, capables de propulser le film africain dans les grands circuits mondiaux.

6” C’est dans cet ordre d’idées que I’UNESCO a été invitée à sponsoriser un atelier sur le marché du cinéma en Afrique qui est inscrit à la session 2001 du ZIFF à Zanzibar et auquel seront invités MNET, SAFF, FESPACO, SITHENGI.

6. Enjeux du patrimoine culturel

L’importance du patrimoine dans le développement culturel de l’Afrique et la nécessité de former des cadres compétents pour sa promotion ont été soulignées à l’intention des participants lors d’une visite de travail à I’Ecole du patrimoine africain (EPA) de Porto-Novo organisée à l’occasion de l’ouverture du cours régional de I’ICCROM. La démarche visant la revalorisation du patrimoine culturel implique des opérations d’identification et de recherche, de restauration, de conservation et de promotion. Parmi les manifestations les plus connues de l’industrie autour du patrimoine culturel physique, on trouve le montage et la présentation des expositions, la production audiovisuelle et le tourisme culturel.

Le tourisme culturel est également soutenu par la promotion du patrimoine culturel immatériel d’importance nationale ou mondiale sous diverses formes: la production à grande échelle des produits audiovisuels pour la grande diffusion, l’utilisation de l’Internet et la création des sites particuliers sur les monuments, les institutions, les chercheurs les événements marquants, entre autres.

Des échanges libres entre les participants et les conservateurs de près de 20 pays, les participants ont retenu

1” à propos de la recherche: la nécessité d’intensifier des campagnes d’identification des sites et monuments de signification historique et de veiller à intégrer ces résultats dans le processus de valorisation;

2” à propos de l’analyse et de la gestion des données: l’urgence de veiller à conserver la maîtrise de leur substance et de leur distribution;

3” à propos du tourisme culturel: l’utilité de préparer des études en profondeur sur les immenses possibilités offertes par un secteur capable de générer d’énormes ressources financières en même temps qu’elles assureraient

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l’aménagement d’un environnement répondant aux aspirations des populations, tout en préservant l’authenticité des créations monumentales des peuples.

7. Défi des technologies nouvelles

L’examen de ce point de l’ordre du jour a amené la réunion 4 se déplacer au siège d’un projet du PNUD “Réseau de communication pour le développement humain durable”. Là, elle a assisté à une présentation par le Chef du projet, Monsieur Pierre Dandjinou, également participant à la consultation, sur les industries culturelles et les technologies de l’information en Afrique.

Après avoir évoqué l’insignifiance de l’apport de l’Afrique au réseau Internet, il a dégagé quelques domaines cibles autour desquels pourraient se constituer des bases de référence: bibliothèques, artistes et personnalités, fondations et ONG, festivals etc. De ce qui existe comme les annuaires, l’art africain et des produits commercialisables sur Internet comprenant les livres, la musique etc., il a rappelé la nécessité d’en assurer la protection.

II y a pour Afrique un devoir de défendre sa propriété intellectuelle et son identité.

Enfin il a fait des propositions d’organisation que les participants ont adoptées et dont les grandes lignes sont les suivantes:

1” Répondre au besoin de maîtriser l’usage des sites créés à l’extérieur de l’Afrique par les organisations internationales ou des structures privées.

2” Reprendre toutes les informations existantes et les placer en site Web.

3” S’impliquer dans le commerce électronique en se constituant en réseaux d’entreprises pour défendre et protéger ses droits.

4” Entreprendre une évaluation en amont de la création d’un site sur les industries culturelles en Afrique en liaison avec les initiatives en cours dans les organisations régionales.

5” Créer dès à présent des organes de liaison entre spécialistes tels que les bulletins de liaison, des “ list- serveurs “.

Point 3: Protection et législation

A partir de l’expérience nationale du Malawi et du programme régional de la SADC et avec les informations et expériences vécues par chacun dans son domaine propre de la profession, les participants ont discuté de :

- la nécessité de renforcer les potentialités des industries culturelles ; - la promotion des produits culturels comme biens pour l’exportation ; - l’intégration régionale comme catalyseur du développement des industries culturelles ; - l’extension du commerce régional aux produits de la culture ; - l’assistance à fournir aux Etats convaincus de l’importance de ce secteur et déterminés à le promouvoir ; - l’impact du commerce des biens culturels sur le commerce extérieur général.

Après ce débat, ils ont souhaité à l’intention des gouvernements que la stratégie suivante soit adoptée dans le domaine du droit d’auteur et des droits voisins:

1” Définir clairement à l’intention de tous ce qu’on entend par droit d’auteurkopyright,

2” Préciser la période et la durée de sa validité et indiquer les peines encourues,

3” Préciser l’institution ou le Ministère en charge de veiller à son respect,

4” Aider à la création des organisations évoluant dans le même domaine pour une action collective,

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5” Protéger les artistes individuels et les créateurs populaires,

6” Faciliter l’information et l’adhésion aux conventions internationales,

7” Intégrer dans les préoccupations traditionnelles la nouvelle donne du commerce électronique.

Point 4: les problèmes de financement

Les participants ont été informés d’une réunion spéciale organisée en juin 2000 par I’OUA sur le financement de la culture. Le suivi concret de cette réunion, la restructuration du Fonds culturel africain, étant en chantier avec l’assistance des bailleurs de fonds internationaux, il était convenable de disposer de l’ensemble des informations avant de formuler d’autres propositions. Néanmoins dans le prolongement de cette initiative, ils ont suggéré qu’à l’instar de l’environnement, la culture puisse être dotée d’un fonds mondial et que les Nations- Unies prennent une initiative dans ce sens.

A cet égard ils ont pensé qu’il serait utile d’entreprendre une étude sur l’apport des industries culturelles aux économies nationales et en particulier à l’effort de réduction de la pauvreté.

Parallèlement, un appel a été lancé aux Etats pour qu’ils accordent au budget de la culture une attention particulière pour l’investissement dans la création des infrastructures de base.

Enfin, les participants ont reconnu que c’est en définitive une affaire d’imagination, de dynamisme et de professionnalisme, la mise sur pied, le développement et la rentabilisation d’une entreprise culturelle. Car c’est dans l’investissement privé, que réside l’avenir du développement de l’entreprise culturelle.

Point no 5: Recherches, études et stratégies

L’examen de ce point de l’ordre du jour a permis aux participants d’entendre tour à tour les expériences du CRAC (Centre régional pour l’action culturelle) et du CICIBA.

Au regard de la tradition africaine, le jeune apprenait les métiers dès son initiation, l’éducation familiale étant une donnée de base. Mais cette initiation n’était pas une séance privée, elle était un exercice communautaire. De ce fait le sens de la coopération se développait dès le départ autour de cette formation spécialisée adaptée au milieu.

Les études à entreprendre, les recherches à faire gagneraient, à l’exemple de la tradition africaine, à coller à la réalité du marché et la fabrication des produits devrait être préparée par un exercice orienté de pratique professionnelle sur le terrain. Ainsi, à l’étude de l’art, on pourrait joindre l’apprentissage, le design et la manufacture et à l’analyse des traditions musicales et à I’organologie, ajouter la fabrication des instruments de musique, l’artiste devenant en même temps un artisan.

Quant au CICIBA, c’est à la stratégie à adopter pour susciter les études sur le développement des industries culturelles qu’il a centré sa contribution. C’est dans la recherche de la compétitivité, la création et l’alimentation des réseaux de la distribution et l’occupation du terrain de la publicité qu’il voit cette stratégie s’orienter.

A l’issue de leurs travaux, les participants, appréciant le bien fondé de la stratégie proposée et les soucis de pragmatisme dans la recherche et l’étude, ont reconnu que c’est le professionnalisme qui permettra aux entreprises africaines de reconquérir le marché africain. Ce professionnalisme est au bout d’une recherche attentive, pragmatique et innovante.

Conclusion

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En guise de conclusion, les participants ont été invités à envisager l’avenir proche et lointain.

D’emblée, ils ont formulé des recommandations portant sur tous les sujets abordés constituant un appel en vue d’une action concrète.

A terme, ils ont envisagé le lancement d’un forum périodique des industries culturelles qui serait un cadre d’échange, de négociation et de promotion des entrepreneurs culturels.

Enfin ils ont attiré l’attention des responsables, des créateurs, des professionnels et des entrepreneurs culturels sur les défis lancés par l’environnement international marqué par la globalisation et la mondialisation et recommandé qu’une action intense de conscientisation permette une participation populaire de tous à la défense et à l’illustration d’une civilisation africaine contemporaine.

RJXOMMANDATIONS

A l'issue de leurs travaux, les participants à la consultation régionale de Cotonou sur les industries

culturelles en Afrique ont lancé l'appel suivant sous forme de recommandations

1. Aux Etats et pouvoirs publics

1.1. Mettre en place des politiques nationales tenant compte

- d’une législation de soutien notamment en matière de taxes ;

- de l’implantation nécessaire des infrastructures culturelles de base, halls d’expositions, Musées salles de spectacles, studios spécialisés.

- de la lutte indispensable contre la piraterie sous toutes ses formes assurant ainsi la protection des créateurs nationaux et la promotion des oeuvres nationales.

1.2 Se doter d’une politique nationale globale accordant à la culture et aux produits culturels une attention digne de leur place réelle: témoin et guide pour l’action publique et donnée stratégique pour la défense de la nation.

1.3 Prévoir à cet effet des actions d’une politique cohérente visant la formation des entrepreneurs, le soutien aux initiatives privées, la mise en place d’un système de micro-crédit et la promotion des produits locaux.

1.4 Mobiliser les organisations économiques régionales et sous-régionales pour un soutien solidaire élargi pour la présentation et l’écoulement des produits tout en préparant déjà à ce stade, une stratégie commune de défense.

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1.5 Engager au niveau de I’OMC (organisation mondiale du commerce) de façon solidaire, des négociations pour un traitement particulier des biens et produits culturels.

1.6 Mettre en place le suivi des accords culturels auxquels ils ont souscrit.

2. Aux opérateurs culturels

2.1 Réaliser l’importance de leur mission dans la préservation des identités culturelles, s’informer sur celles-ci et entreprendre des études et des recherches préalables à la production.

2.2 Se former, se perfectionner et observer les expériences des autres;

2.3 Assurer la formation de leurs promoteurs et diffuseurs.

2.4 Avoir de grandes ambitions dans la production en visant la qualité et la compétitivité et s’associer en créant des réseaux professionnels en vue d’un véritable marché qui compte.

2.5 Intégrer les grands réseaux mondiaux de productions, de distribution et diffusion et notamment avec la diaspora africaine et assurer une présence africaine significative sur le marché mondial.

2.6 Avoir de l’imagination et être inventif, en particulier créer et s’approprier des initiatives de promotion et de commerce électronique en accédant à I’lnternet.

III Aux organisations et organismes internationaux et régionaux

3.1 Adopter une attitude d’équité vis à vis des produits de la culture en créant un cadre juridique et réglementaire qui tienne compte de leur spécificité.

3.2 Inscrire la culture au regard de son rôle fondamental pour le développement, dans les documents de planification des Nations-Unies et des communautés économiques régionales, et articuler son insertion dans les stratégies d’action.

3.3 Mettre en place un fonds mondial pour la culture à l’instar du fonds mondial pour l’environnement.

3.4 Faire figurer les industries culturelles sur la liste des domaines prioritaires et prévoir des mécanismes de coordination et d’harmonisation, favorisant l’émergence de projets sous-régionaux structurants.

IV A I’UNESCO, de façon particulière, il est demandé :

4.1 de procéder au recensement des opérateurs et entrepreneurs culturels dans différents domaines culturels en Afrique;

4.2 de contribuer à la publication des plaquettes à jour sur l’état actuel des différents secteurs des industries culturelles;

4.3 de préparer un rapport comprenant le chiffrage de la valeur présente du domaine de la culture et de son impact sur le développement dans le monde;

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4.4 de mettre en place à court terme un programme de formation à la création, à la gestion et au management des entreprises culturelles et d’aider à la créanon des écoles spécialisées;

4.5 de faciliter la création d’un marché africain du disque;

4.6 d’assumer pleinement sa mission de leader mondial pour la défense du droit de la culture à un traitement particulier pendant les négociations à la CNUCED et à I’OMC;

4.7 d’aider à la mise en place d’un forum régional permanent des entrepreneurs culturels et d’initier dans ce cadre la création d’un site Internet sur les industries culturelles en Afrique.

Annexe 1

ORDRE DU JOUR

1. Lecture et commentaire de la synthèse des rapports nationaux et études réalisés au niveau régional sur les industries culturelles

2. Culture, commerce et mondialisation: libre circulation des biens culturels et promotion de la diversité culturelle, les enjeux pour l’Afrique:

Page 12: Consultation régionale sur les industries culturelles en Afrique

I .

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3.

4.

5.

Enjeux dans l’artisanat Enjeux dans l’art Enjeux dans le domaine de l’industrie musicale et des arts du spectacle Enjeux dans le domaine de l’industrie du livre Enjeux dans le domaine de l’industrie du film et de l’audiovisuel Défi des technologies nouvelles Enjeux du patrimoine culturel

Protection et Législation: taxes, textes, rôle des pouvoirs publics

Les problèmes de financement

1. les pouvoirs publics 2. les secteurs privés

Recherches, études et stratégies

1. - Production 2. - Marketing 3. - Distribution

Conclusion: Forum permanent des industries culturelles

Annexe 2

CALENDRIER DES TRAVAUX

Mardi 5 :

l- Le plan d’action de Dakar sur les industries Culturelles et sa mise en oeuvre

a- Présentation des rapports nationaux et régionaux b-Evaluation

Page 13: Consultation régionale sur les industries culturelles en Afrique

, Y

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Mercredi 6: Le plan d’action: suite

Jeudi 7:

2- Culture, commerce et mondialisation: libre circulation des biens culturels et promotion de la diversité culturelle, les enjeux pour l’Afrique:

Introduction (LMbuyamba) a- Enjeux dans le domaine de l’art et de l’artisanat (V.Kossou, S.Souindoula) b- Enjeux dans le domaine du livre (R.Crabbe, 1. JC. Arlindo) c- Enjeux dans le domaine de l’industrie musicale et des Arts du spectacle (R.Sissoko,

T.Manou-Yablais) d- Enjeux dans le domaine de l’industrie du film et de l’audiovisuel (I.Bakari) e- Défi des technologies nouvelles (P.Dandjinou): atelier au PNUD

Vendredi 8:

Visite d’un projet, 1’Ecole du patrimoine africain: présentation des enjeux du patrimoine culturel (Godonou)

3- Protection et législation: taxes, textes, rôle des pouvoirs publics (S.W.D.Chavula)

4- Les problèmes de financement (B.Lefèvre)

t : par les pouvoirs publics par le secteur privé

5- Recherches, études et stratégies (S.Souindoula, C.A.d’Almeida)

;: Production Marketing

C. Distribution

Conclusion: Forum Permanent des industriels : défis régionaux et internationaux (L.Mbuyamba)

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