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297 J. AppL Cryst. (1975). 8, 297 Contribution h l'Etude de l'Ionicit6 des Liaisons dans le Rutile PAR R. PUGET ET L. GODEFROY Laboratoire de Di~lectriques, Equipe de Physique des SoBdes, AssociOe au CNRS, UniversitO de Dijon, France (Recu le 19 ]uin 1974, acceptd le 26 septembre 1974) Knowledge of both ionic dielectric susceptibility and ionic displacements induced by an electric field allows one to evaluate the effective charges on the ions. To determine the ionic displacements a method involving differential photometry of X-rays and anomalous scattering has been used. The dielectric susceptibility is well known but its ionic part has not been measured, so that one can give only the maximum possible value (f= 0-78) of the ionicity factor. In addition, it is shown that the effect of the local electric fields uoon the atomic scattering factors is not significant. I. Introduction Sous l'action d'un champ 61ectrique statique E ° un cristal de rutile se polarise par d6placement des ions et par d6formation des couches 61ectroniques. Le vecteur polarisation Pest reli6 5` E ° par: P = e0xE° o/l Zest le tenseur de susceptibilit6 di61ectrique. Com- me le cristal appartient au syst~me quadratique carac- t6ris6 par a et e, X est donn6 par: Z-- Z. C " Pour expliquer le m&anisme de la polarisation, nous proposons un module simplifi6 en supposant les liaisons Ti-O non enti~rement ioniques: pour cela, nous at- tribuons respectivement aux ions Ti 4+ et 0 2. les charges vraies 6gales 5` +4re et -2re par l'introduction du facteur d'ionicit6 f compris entre 0 et 1, ce qui assure par ailleurs la neutralit6 61ectrique. Afin de s~parer les polarisations 61ectroniques et ioniques, posons: X =Xe + Xl off Xe est le tenseur de susceptibilit6 61ectronique statique correspondant 5. la polarisation par d6for- mation des couches 61ectroniques, X~ est le tenseur de susceptibilit6 ionique correspondant 5` la polarisation due aux d6placements relatifs des ions Ti par rapport aux ions O. La contribution de la polarisation due au seul d6placement des ions peut donc &re caract6ris6e par les rapports: Za Zc appel6s taux de polarisation ionique. Pour 6valuer les d6placements relatifs dr des ions, les hypotheses 5. consid6rer sont les suivantes: - les composantes du champ appliqu6 E ° soit E ° d'une part et E °, E ° d'autre part, se transforment respectivement selon les repr&entations irr6ductibles A2. et E. du groupe ponctuel de sym&rie du cristal; on peut donc 6tudier s6par6ment les deux directions particuli~res du champ: E ° parall~le 5` c et E ° perpen- diculaire 5` c. -5` ces deux directions il correspond des modes normaux de d6placement de l'ensemble des ions Ti par rapport aux ions O suppos6s fixes; ces d6place- ments se transforment 6galement selon les m~mes repr&entations irr6ductibles A2, et E,. - les deux cas 6tudi6s sont donc ceux pour lesquels la polarisation Pet les d6placements Jr sont colin6aires 5` E °. Dans ces conditions, 6tablissons la relation qui existe entre les d6placements, le taux de polarisation ionique, le facteur d'ionicit6 et le champ appliqu6; nous en- visageons successivement les deux cas: (a) E ° et P parall~les dte Jz s'6crit: dz = JzC • En consid6rant deux groupements TiO2 par maille 616mentaire, le nombre de dipoles p par unit6 de volume est: 2 N = ......... a2¢ et IPl vaut: pz=4fedze . La polarisation ionique par d6placement est donc: P~ ..... 8f-e d= . a- Comme r¢ = P~/P~ et P~ = eoX~E ° on en d6duit" dz "Ce e°a2Xc _ EO. f" 8e

Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

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Page 1: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

297

J. AppL Cryst. (1975). 8, 297

Contribution h l'Etude de l'Ionicit6 des Liaisons dans le Rutile

PAR R . PUGET ET L. GODEFROY

Laboratoire de Di~lectriques, Equipe de Physique des SoBdes, AssociOe au CNRS, UniversitO de Dijon, France

(Recu le 19 ]uin 1974, acceptd le 26 septembre 1974)

Knowledge of both ionic dielectric susceptibility and ionic displacements induced by an electric field allows one to evaluate the effective charges on the ions. To determine the ionic displacements a method involving differential photometry of X-rays and anomalous scattering has been used. The dielectric susceptibility is well known but its ionic part has not been measured, so that one can give only the maximum possible value ( f= 0-78) of the ionicity factor. In addition, it is shown that the effect of the local electric fields uoon the atomic scattering factors is not significant.

I. I n t r o d u c t i o n

Sous l'action d'un champ 61ectrique statique E ° un cristal de rutile se polarise par d6placement des ions et par d6formation des couches 61ectroniques. Le vecteur polarisation P e s t reli6 5̀ E ° par:

P = e0xE °

o/l Zest le tenseur de susceptibilit6 di61ectrique. Com- me le cristal appartient au syst~me quadratique carac- t6ris6 par a et e, X est donn6 par:

Z-- Z. • C "

Pour expliquer le m&anisme de la polarisation, nous proposons un module simplifi6 en supposant les liaisons Ti-O non enti~rement ioniques: pour cela, nous at- tribuons respectivement aux ions Ti 4+ et 0 2. les charges vraies 6gales 5̀ +4re et - 2 r e par l ' introduction du facteur d'ionicit6 f compris entre 0 et 1, ce qui assure par ailleurs la neutralit6 61ectrique.

Afin de s~parer les polarisations 61ectroniques et ioniques, posons:

X =Xe + Xl

off Xe est le tenseur de susceptibilit6 61ectronique statique correspondant 5. la polarisation par d6for- mation des couches 61ectroniques, X~ est le tenseur de susceptibilit6 ionique correspondant 5̀ la polarisation due aux d6placements relatifs des ions Ti par rapport aux ions O.

La contribution de la polarisation due au seul d6placement des ions peut donc &re caract6ris6e par les rapports:

Za Zc

appel6s taux de polarisation ionique. Pour 6valuer les d6placements relatifs dr des ions,

les hypotheses 5. consid6rer sont les suivantes:

- les composantes du champ appliqu6 E ° soit E ° d'une part et E °, E ° d'autre part, se transforment respectivement selon les repr&entations irr6ductibles A2. et E. du groupe ponctuel de sym&rie du cristal; on peut donc 6tudier s6par6ment les deux directions particuli~res du champ: E ° parall~le 5̀ c et E ° perpen- diculaire 5̀ c.

- 5 ` ces deux directions il correspond des modes normaux de d6placement de l'ensemble des ions Ti par rapport aux ions O suppos6s fixes; ces d6place- ments se transforment 6galement selon les m~mes repr&entations irr6ductibles A2, et E,.

- les deux cas 6tudi6s sont donc ceux pour lesquels la polarisation P e t les d6placements Jr sont colin6aires 5̀ E °.

Dans ces conditions, 6tablissons la relation qui existe entre les d6placements, le taux de polarisation ionique, le facteur d'ionicit6 et le champ appliqu6; nous en- visageons successivement les deux cas:

(a) E ° et P parall~les dte Jz s'6crit:

dz = JzC •

En consid6rant deux groupements TiO2 par maille 616mentaire, le nombre de dipoles p par unit6 de volume est:

2 N = . . . . . . . . .

a2¢

et IPl vaut: pz=4fedze .

La polarisation ionique par d6placement est donc:

P~ ..... 8f-e d= . a -

Comme r¢ = P~/P~ et P~ = eoX~E ° on en d6duit"

dz "Ce e°a2Xc _ EO. f " 8e

Page 2: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

298 L ' I O N I C I T E DES L I A I S O N S DANS LE R U T I L E

(b) E ° et P perpendiculaires dt c

Un raisonnement analogue pour la composante fix conduit ~t:

ra ~oaCZa x=f. 8e E°"

II en r6sulte qu'une mesure exp6rimentale des d6- placements relatifs des ions en fonction du champ appliqu6 E ° d6terminera directement les valeurs des rapports ra/fet rJf; les d6placements 6tant tr~s faibles par rapport aux dimensions de la maille, la technique qui s'impose est celle de la photom6trie diff6rentielle des rayons X propos6e par Godefroy (1963).* Succes- sivement nous pr6sentons la m6thode mise en oeuvre et nous en discutons les r6sultats.

II. M6thode exp6rimentale (1) Prhtcipe

Lorsque le cristal est soumis au champ E °, la polari- sation se traduit b. la lois par une modification de la g6om6trie de la maille 616mentaire due au d6placement des ions et par une alt6ration de leur structure 61ectro- nique. Dans les conditions pr6cis6es ci-dessous ce chan- gement de structure induit une variation relative r/ de pouvoir r6flecteur X r6sultant de l 'introduction d'un d6phasage suppl6mentaire entre les ondes dif- fract6es et de la modification du facteur de diffusion

r/s'6crit : IF~zl2- lF~Tktl z

r/~kz = l 0 z , Fi, ktl

F°kt 6tant le facteur de structure en l'absence de champ. L'examen de Ft~t montre que r/ a une valeur non

nulle d6pendant de 0r seulement dans le cas h + k + l pair.

Dans les conditions de la diffusion normale off les facteurs de diffusion fTi e t fo sont r6els, quelle que soit la parit6 de h + k +/, on a:

F~z = (Fl~t)* ;

le module du facteur de structure 6tant ind6pendant du sens de g, (ou de E°), cela entraine que r/est nul.

Utilisant la diffusion anomale des ions Ti et O avec le rayonnement Cr K7 et n6gligeant pour l'instant l'influence du champ 61ectrique sur la diffusion a- tomique, les facteurs fTi et fo deviennent:

fTi =fT~ +jAfT'~; f o = f o + jA fo

Dans le cas h + k + l pair, r/est obtenu par un d6velop- pement au 1Cr ordre par rapport aux d6placements, ceux-ci 6tant faibles par rapport aux dimensions de la maille:

~hkl = 16n(hfi,, + k fi~, + lgz)Gt, kl avec:

(A f T'tf o - - f T t4fo) cos 2rrhx cos 2rckx as, k, = (fTi + 2 f o COS 2rchx COS 2tckx) z + (AfT~ + 2Af o COS 2nhx cos 2rckx) 2"

atomique des ions plac6s le champ local; nous mon- trerons que l'influence du champ sur la diffusion atomique peut ~tre n6glig6e et que r/ ne d6pend en premi6re approximation que des d6placements.

(2) Expression de la variation relative t 1 du pouvoh" r~flecteur X

Les param6tres cristallins de la maille 616mentaire publi6s par Grant (1959) sont donn6s sur la Fig. 1.

Sous raction du champ E ° provoquant le d6place- ment fir (fix, fir 6--) des ions Tiles coordonn6es modifi6es sont:

~.~ 0 , 5 + ~ Ti(1) fir Ti(2) 0,5+fi r

~ 0,5+~...

Le facteur de structure est alors F~z selon que le champ est dirig6 dans un sens (signe +) ou dans l 'autre (signe - ) :

F~ , =fr~{1 + ( - -1 ) ~'+*+' exp [T-2rcj(h6x+kfiy+l~)]}

+ 2fo[cos 2zc(hx+kx) + ( - 1) h+k+z cos 2rc(hx-kx)] .

* Th6se, Paris: Photom&trie Diff~rentielle des Rayons X. Une copie de cette th~se a 6t6 d6pos6e au d6p6t d'archives de la British Library Lending Division (Supplementary Publica- tion No. SUP 30733 : 74 pp., 2 microfiches). On peut en obtenir des copies en s'adressant b.: The Executive Secretary, Interna- tional Union of Crystallography, 13 White Friars, Chester CH 1 1 NZ, Angleterre.

Exprimons alors r/i,~z pour les deux directions par- ticuli6res du champ E ° appliqu6; les plans r6ticulaires envisag6s sont tels que E ° soit perpendiculaire ~ ces plans, h + k + l 6tant pair.

(a) E ° et P parallkles ~ c

En tenant compte de l'expression de 6~, r/s'6crit:

2" c r/oo, = f Ko0,Eo0,,

off E00z est l'intensit6 du champ dans la direction [001] avec:

gool = 2nle°a2zc Gool . e

(b) E ° et P perpendiculaires d c

On obtient de m~me:

z,, KhkoEhko ~hkO = f avec:

Knko = 2re(h! + kZ)l_/_!e_oacX,, Ghko . e

Ainsi les mesures des d6placements ioniques se ram6nent/t l'6tude des variations du pouvoir r6flecteur X en fonction du champ appliqu6, permettant de d6- duire les valeurs des deux rapports rc/fet ra/f.

Page 3: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

R. P U G E T ET L. G O D E F R O Y 299

Les valeurs num6riques des termes K ~ relatifs aux plans satisfaisant les conditions pr6c6dentes sont pr6- sent6es dans le Tableau 1. Elles sont calcul6es 5. l'aide des facteurs de diffusion atomique extraits des articles de Cromer & Mann (1968) et Cromer & Liberman (1970); les valeurs des susceptibilit6s di61ectriques sont donn6es par Grant (1959):

Z~=88 Z~= 172.

Tableau 1. Valeurs num&iques de ghk I et des facteurs de structure

hkl 002 200 110 220 130 Khk~( X 109V/m) 0,91 -- 1,77 0,06 0,33 - 0 , 6 6 IFg~,l ~ 1306 209 1138 1001 301

A A

O~ c

i0) ~ 0.5 x -x /0.5.x r 0 r,(~) 0.~0~ 0<3)~ ~ 0" 0(~0.~-,,~0.5

Fig. 1. Structure du rutile TiO2.

• Ti

(i) o

a : t,, 59&

c : 2 ,959

x : 0,309

J 0.5-x 0(6) 0 5 . x

05

(a)

(b)

(d)

(f)

(g)

lill IIIII II!ii IIIII IIII IIILI

,E °

- - 't

IV

~V

.v _-_-- J l

il[ll _ _ IIII Jlllll Tt

(ml ~, I

IIW _ _ _ I1[1[ , ,

T t

Fig. 2. Pr inc ipe de la pho tom6t r i e diff6rentielle des rayons X; (a) a l imenta t ion du tube g6n6rateur, (b) impuls ions d6tect6es, (c) c h a m p 61ectrique E ° appl iqu6 au cristal, (d) tension por te de l '6chelle E~, (e) tens ion por te de l '6chelle E2, ( f ) tension por te c o m m u n e h E~ et E2, (g) impuls ions enregistr6es par E~, (h) impuls ions enregistr6es par E~.

Le champ 61ectrique maximum pouvant ~tre appliqu6 au cristal de rutile 6tant environ 3 × 105 V/m il appa- raR que r/ est de l'ordre de 10 -4. L'utilisation de la m6thode de photom6trie diff6rentielle pour la mesure d'une variation aussi faible du pouvoir r6flecteur X est donc justifi6e.

(3) Influence des champs locaux sur la diffusion X Buckingham (1964) a montr6, par une m6thode de

perturbation au 1 ~ ordre que le facteur de diffusion atomique d'un atome plac6 dans un champ 61ectrique local E se met sous la forme:

f=f(o) -4nj. ~:oE~Xe.2Sin 0 =f(o) _ j d f

off f(0) est le facteur de diffusion non perturbS, e est la polarisabilit6 61ectronique de l'ion, e est la charge 616mentaire de l'61ectron, 2 est la longueur d'onde X, 0 est l'angle de diffusion suppos6 faible.

A l'aide de cette hypoth~se 6valuons la valeur cor- rig6e r/~kZ de la variation relative de pouvoir r6flecteur des plans (hkl) envisag6s pr6c6demment.

Les facteurs de structure F~,k~ s'expriment alors en fonction des facteurs de diffusion:

fTi =fTi +j(AfT'i -+ 0fTi)

f o = f o +J( Jf o -7-6fo) .

Nous obtenons finalement, dans le cas h + k + l pair:

off le terme correctif vaut:

ehkl = Mhkl • 6fTi + 2fifo COS 2nhx cos 2nkx 4n(h6x + k~y + 16z)

avec"

Af~'l + 2Afo cos 2nhx cos 2nkx i . k , = -f o ) cos 2 hX os 2 , k x "

En exprimant 8fa-i, Ofo et 6x,Oy,6z respectivement en fonction du champ local Ehk~ (suppos6 iclentique pour les deux sortes d'ions) et du champ E°k~ appliqu6 dans la direction [hkl] nous obtenons:

8(c~Ti + 2%) sin 0 f E°0t ~001 = Moot • ................................ 2la2zc rc Eoot

et: 8(~ri + 2% cos 2nhx cos 2nkx) sin a

= i k0. .................. 2 ÷ k b - i - ; 2 a c z . ..............

f E°k0 X .............

7: a ghkO

Les valeurs num6riques permettant d'6valuer le terme correctif ehkZ sont pr6sent6es dans le Tableau 2. Les polarisabilit6s 61ectroniques eTi = 0,186 A 3 et eo = 2,39 A 3 sont donn6es par Slater (1950) dans BaTiO3.

Page 4: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

300 L ' I O N I C I T E DES L I A I S O N S D A N S LE R U T I L E

Tableau 2. Valeurs num#riques du terme correctif %k~ dft d l'influence du champ ~lectrique sur la diffusion

atomique

hkl 002 200 110 220 130 r E °

e~t" f • ~- ( x 103) 0 ,56 0,59 -0,24 -0,75 0,78

Si l'on consid6re que le fac teur f / r . E/E ° n'est jamais tr6s sup6rieur 5. 10, nous constatons que l'influence du champ 61ectrique sur la diffusion atomique peut fitre n6glig6e dans le calcul de la variation de pouvoir r6flecteur caus6e par les d6placements ioniques.

Dans le cas h + k + l impair les facteurs de structure sont, pour la diffusion anomale:

F~ + = - 4 [ f o + j ( A f o + fifo)] sin 2nhx sin 2nkx .

La variation de pouvoir r6flecteur ne provient que de l'influence du champ local sur la diffusion et vaut:

16nAfo eo~o sin 0 E, kl • ~l'*~= f o z + A f o ~ " e2

Num6riquement q" est tr~s faible; par exemple pour le plan (111) :

r/~lt =0,35 × 10-t3Ettt .

Au champ appliqu6 E ° maximum, r/" est donc au plus de l 'ordre de 10-6: il est faible vis 5. vis des effets mesur6s par ailleurs et inaccessible avec l'appareillage utilis&

(4) Technique expOrimentale

Le monocristal de rutile est taill6 puis poli sous forme de plaquettes dont les grandes faces sont les plans (hkl): des couches minces d 'or d6pos6es sous vide forment les 61ectrodes.

Le principe de la m6thode de photom6trie dif- f6rentielle est sch6matis6 par la Fig. 2. Le tube g6n6- rateur de rayons X est aliment6 par une haute tension sinusoidale 5. la fr6quence 50Hz; l'6mission X s'effec- tuant lorsque cette tension est sup6rieure 5, un seuil donn6, les impulsions d6tect6es sont group6es en 'paquets' et distribu6es 5, la m~me fr6quence.

Le champ E ° a la forme de cr6neaux sym6triques 5. la fr6quence de 25Hz; sa phase est telle que le rayon- nement soit requ par le cristal lorsqu'il est polaris6 dans un sens ou dans l 'autre; cette distribution des impulsions 61imine doric l'influence des r6gimes tran- sitoires au cours du renversement de la polarisation.

GrS, ce 5. un syst6me de deux portes en opposition de phase les impulsions mises en forme sont aiguill6es sur deux 6chelles de comptage Et et E2; l 'ouverture ou la fermeture de ces 6chelles est command6e simul- tan6ment par une porte s61ectionnant le m~me nombre de paquets sur chaque vole pendant toute la dur6e T de la s6quence, kes 6chelles E~ et E2 enregistrent ainsi p6riodiquement les nombres d'impulsions N~ et N2

correspondant respectivement aux deux sens de polari- sation.

La valeur de ~1 est alors donn6e par la limite vers laquelle tend le rapport 2(N~- N2)/N1 + N2).

Pour mettre en 6vidence un effet r/de l 'ordre de 10 -4 en tenant compte du caract6re al6atoire de l'6mission X, il faut un nombre minimal d'impulsions N tel que r/ _> 1/~ N, soit N > 108. Afin d'obtenir une pr6cision suffisante sans allonger exag6r6ment la dur6e du comp- tage qui peut atteindre plusieurs semaines, il faut tota- liser un nombre d'implusions au moins 6gal 5. 3N.

Le choix des conditions exp6rimentales est d6ter- min6 par les facteurs suivants:

- a u g m e n t a t i o n du hombre moyen d'impulsions d6tect6es par unit6 de temps; elle est obtenue grfice 5. un fonctionnement continu, enti~rement automatis6 et par l'utilisation d'un goniombtre sous vide primaire 61iminant ainsi l 'absorption de Fair sur une partie du faisceau; le taux de comptage est alors multipli6 par cinq pour l'6mission Cr Ks.

- 61imination des causes d'erreurs de comptage dues 5. l'imperfection de l'61ectronique; l'incertitude A N / N introduite par le d6coupage 61ectronique au cours du temps est r6duite 5. 10-7; par contre, la dissym6trie des deux voies d'acheminement des impulsions et l'in6galit6 de r6ponse des 6chelles provenant de leur temps mort se manffestent par un effet parasite % non n6gligeable mesur6 en l'absence de champ E ° (Fig. 3). La valeur mesur6e en pr6sence du champ E ° (Fig. 4) est donc un effet apparent %; l'effet r6el recherch6 est alors:

r/= r/a - % •

, q x l O 4

4 .

2. - ... .....

" : _ "

- 2 • 3 ~ - " - ' - - . . . . . N ( x l O - ~ )

- 2

Fig. 3. Effet parasite r/0 en l'absence de champ appliqu6 pour la r6flexion 002.

, rla X104 6, .

4 -

--.k-- -_(3 .... N(xlO -8) O:

Fig. 4. Effet apparent r/a dO au champ appliqu6 E°=2,51 V/m pour la r6flexion 002.

Page 5: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

R. P U G E T ET L. G O D E F R O Y 301

- 61imination des rayonnements parasites (2/2, ray- ons cosmiques, fluorescence) et du bruit de fond par la m6thode classique de s61ection d'amplitude.

- limitation du taux horaire de comptage; ce taux doit ~tre inf6rieur au seuil au delS. duquel le compteur n'est plus lin6aire.

- suppression des fluctuations anormales provenant des d6rives lentes de l'intensit6 du faisceau X au cours du temps dont les causes sont le manque de stabilit6 du g6n6rateur X et la variation de l 'absorption de l'air ambiant en fonction de la pression atmosph6rique.

pente des droites repr&entatives peut ~tre ajust6e avec une pr6cision satisfaisante ~t l'aide d'une m6thode de moindres carr6s.

Tableau 3. Valeurs expdrimentales de rl/E ° et r / f hkl 002 200 220

tlhkl EO (× 109m/V) 0,85 -0 ,97 0,21

T ,~ 0,93 0,55 0,63 J

H I . R ~ s u l t a t s e t d i s c u s s i o n

Les courbes r /=f (E °) sont trac6es en tenant compte de l'incertitude li6e b. chaque mesure: cette incertitude est importante et, pour une dur6e de comptage d6termin6e, elle est d 'autant plus grande que l'effet ~t mesurer ainsi que le pouvoir r6flecteur sont plus faibles.

Les Figs. 5, 6, 7 pr6sentent les courbes ~l=f(E °) respectivement pour les r6flexions 002 (Puget, 1967), 200 et 220.

Si l 'on admet que le rapport rl/E ° est constant la

qoo2X104

i 2 t 3 E°xlO -5 V/m~

Fig. 5. Effet r/002 mesur6 en fonction de E °.

q200x104

1 2 E°xlO-5V/m

Fig. 6. Effet l/coo mesur6 en fonction de E °.

Le Tableau 3 donne les valeurs de rl/E ° d6termin6es exp6rimentalement ainsi que les rapports z / f calcul6s en fonction de Kkkt (Tableau 1) ~t l'aide des expressions:

Vc 1 ~loot

f /Coot "E°o, et:

7~ a 1 ~hkO

f Khko "E°ko "

Les deux autres r6flexions 110 et 130 mentionn6es dans le Tableau 1 conduisent 5. des r6sultats non satisfaisants" r /ou IFh°kZl 2 6tant trop faible la dur6e de la mesure n6cessaire pour avoir une pr6cision suffisante est excessivement longue [40 ans pour le plan (110)].

Dans le cas h + k + l impair l'influence du champ 61ectrique sur la diffusion atomique laisse pr6voir l'effet r/" calcul6 ci-dessus. Exp6rimentalement pour la r6flexion 111 il n 'a pas 6t6 possible de mettre un effet en 6vidence" r/l'n reste donc inf6rieur 5. la r6solution limite de l'appareillage utilis6, ce qui 6tait pr6visible d 'apr& l'6valuation faite ci-dessus.

Les r&ultats obtenus pour les r6flexions 200 et 220 montrent une 16g~re divergence pour la valeur %/f que nous prendrons 6gale ~t 0,59. Pour d6terminer %If une seule r6flexion est possible: nous admettrons donc sans discussion la valeur 0,93.

Nous avons donc:

"fie

Za f = 0 , 9 3 ma= ~. =0,59; me=

off Za et zc ont 6t6 d6finis par les relations:

Z~a . Z ~ T a : , T c - -

Z~ Z~

• ~a ~ X i a -~'Xea ~ Xc - ~ i c -]-,~ec •

Ces donn6es ne permettent ~videmment pas de trouver les valeurs des inconnues; nous pouvons simplement calculer le rapport:

.... -Z~a = 0,324. Zic

Cette valeur indique que la polarisation par d6place- ment des ions est plus importante dans la direction c que dans la direction a.

Page 6: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

302 L ' I O N I C I T E DES LIAISONS DANS LE R U T I L E

La polarisation 61ectronique d6finie par les suscep- tibilit6s 2'~, et 7.e~ 6tant proportionnelle aux champs locaux agissant sur les ions, nous pouvons caractGriser l'anisotropie de champ local par:

~ea U ~ ,

Xec

u repr6sente donc approximativement le rapport des modules des champs locaux cr66s par des champs ext6rieurs de m~me intensit6 mais appliqu6s dans les directions a ou c. ke cristal 6tant fortement anisotrope (c/a=0,64, 7.,,/X~=0,51) on peut pr6voir que u est cer- tainement inf6rieur ~t 1.

Le facteur d'ionicit6fs'exprime alors simplement en fonction des grandeurs connues: m,, m~, ;(,, Zc et du param&re u:

1

mc Zc rncZc !

Les variations de f e n fonction de u sont repr6sent6es sur la Fig. 8; la limite inf6rieure du param6tre est"

IV. Conclusion

Dans le but de d6terminer le facteur d'ionicit6 du rutile nous avons 6tudi6 la variation de pouvoir r6flecteur X d'un monocristal soumis /t l'influence d'un champ 61ectrique.

En effet, la polarisation d6forme le motif cristallin entrainant une modification du facteur de structure; la cons6quence est une variation de pouvoir r6flecteur si l'on utilise la diffusion anomale. L'analyse en sens inverse permet de remonter aux d6placements ioni- ques.

Par ailleurs, les mesures purement di61ectriques donnent le produit des ddplacements des ions par leur charge effective.

ka comparaison des deux r6sultats devrait permettre de d6terminer le facteur d'ionicit6.

En fait la polarisation 61ectronique se superpose celle qui est due aux d6placements et il est difficile de s6parer les deux effets.

Nous n'avons donc obtenu que la valeur maximale 0,78 pour le taux d'ionicit6; mais nous avons montr6

urn= X a =0,51 Zc

pour laquelle" fm= 0. La limite sup6rieure de u 6tant uM = 1 pour laquelle"

fM = Zc-Z, , =0,78 mczc - max,,

la valeur maximale d e f e s t donc 0,78. Ce r6sultat est b. rapprocher de ceux de Dick &

Overhauser (1958) obtenus /t partir des relations de Szigeti (1945, 1950) a'ppliqu6es aux halog6nures alcalins (Tableau 4).

21 r1220x104

i

'1 . I-

,,I-

C : 2 3 E°x10-5 Vlm

Fig. 7. Effet rh20 mesur6 en fonction de E °.

Tableau 4. Valeurs expdrimentales de e*/e obtenues par Dick (1958) d'aprks Szigeti (1945, 1950)

e*/e e*/e LiF 0,87 KBr 0,76 NaF 0,93 KI 0,69 NaCI 0,74 RbCI 0,84 NaBr 0,69 RbBr 0,82 NaI 0,71 RbI 0,89 KCI 0,80

Les donn6es exp6rimentales pr6c6dentes ne permet- tent donc que de d6terminer la valeur limite sup6rieure de fmon t ran t ainsi que l'ionicit6 est partielle; pour en d6duire la valeur exacte, il serait n6cessaire de connaitre les champs locaux en chaque site, en tenant compte de l'anisotropie du cristal; ce calcul fera l'objet d'une publication ult6rieure.

I

078

0.5

0 0 /

0.5 1,5 2 u

Fig. 8. Variations du facteu~ d'ionicit6 f en fonction de u= Xe,,IZec.

Page 7: Contribution à l'étude de l'ionicité des liaisons dans le rutile

R. P U G E T ET L. G O D E F R O Y 303

que la connaissance pr6cise des champs locaux per- mettrait de pr&iser nos r&ultats.

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