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Paris, le 11 février Monsieur le président, La prochaine réunion du bureau de l'Assemblée nationale aurait été avancée au 14 février, alors que celle-ci était prévue le 22, dans le seul but de statuer sur le "cas" de notre collègue député de la Martinique, Serge LETCHIMY, en vue de lui infliger une sanction à la suite de la question qu'il a posée le 7 février au ministre de l'Intérieur. Aucune sanction ne nous paraît devoir être prononcée. Nous, députés de tous les outre-mers, nous considérons en effet que rien dans les propos de notre collègue ne vient étayer l'interprétation qui en a été faite par le Gouvernement et le groupe majoritaire. Serge LETCHIMY n'a jamais traité le ministre de l'Intérieur de « nazi », ni de promoteur des camps de concentration. Avec sa sensibilité, avec l'héritage politique qui est le sien, il rappelait une évidence sous la forme d'un syllogisme que les tourments de l'histoire humaine illustrent sans peine : si l'on attribue une valeur différente aux civilisations, si l'on cherche à les hiérarchiser en considérant que telle ou telle serait "supérieure" à une autre, alors le pire peut advenir et le pire, plusieurs fois, est advenu. Dans les territoires de l'Outre-mer français dont nous sommes les élus et dont les liens avec la République se sont forgés le long d'un chemin tortueux, ces propos ont été ressentis comme une vieille blessure que l'on aurait cherchées à rouvrir. Les mots de Serge LETCHIMY ont été perçus comme la réponse que commandait notre dignité. S'il venait à être sanctionné pour cela, ce serait un terrible camouflet et une insondable humiliation que l'Assemblée

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Paris, le 11 février

Monsieur le président,

La prochaine réunion du bureau de l'Assemblée nationale aurait été avancée au 14 février, alors que celle-ci était prévue le 22, dans le seul but de statuer sur le "cas" de notre collègue député de la Martinique, Serge LETCHIMY, en vue de lui infliger une sanction à la suite de la question qu'il a posée le 7 février au ministre de l'Intérieur.

Aucune sanction ne nous paraît devoir être prononcée.

Nous, députés de tous les outre-mers, nous considérons en effet que rien dans les propos de notre collègue ne vient étayer l'interprétation qui en a été faite par le Gouvernement et le groupe majoritaire.

Serge LETCHIMY n'a jamais traité le ministre de l'Intérieur de « nazi », ni de promoteur des camps de concentration. Avec sa sensibilité, avec l'héritage politique qui est le sien, il rappelait une évidence sous la forme d'un syllogisme que les tourments de l'histoire humaine illustrent sans peine : si l'on attribue une valeur différente aux civilisations, si l'on cherche à les hiérarchiser en considérant que telle ou telle serait "supérieure" à une autre, alors le pire peut advenir et le pire, plusieurs fois, est advenu.

Dans les territoires de l'Outre-mer français dont nous sommes les élus et dont les liens avec la République se sont forgés le long d'un chemin tortueux, ces propos ont été ressentis comme une vieille blessure que l'on aurait cherchées à rouvrir. Les mots de Serge LETCHIMY ont été perçus comme la réponse que commandait notre dignité. S'il venait à être sanctionné pour cela, ce serait un terrible camouflet et une insondable humiliation que l'Assemblée nationale infligerait aux peuples d'outre-mer à travers son éminent représentant. Le coup serait sévère pour ce pacte républicain que, tous, nous défendons.

Monsieur le président, vous avez su faire preuve durant la législature de la hauteur de vue et de l'indépendance d'esprit nécessaires à vos fonctions. Nous voulons croire que vous saurez puiser dans ces qualités que nous vous connaissons, pour mettre un terme à cette mauvaise polémique.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le président, l'expression de notre respectueuse considération.

Victorin LUREL, Jeanny MARC Christiane TAUBIRA Louis-Joseph MANSCOURAlfred MARIE-JEANNE Annick GIRARDIN Patrick LEBRETON Chantal BERTHELOT Huguette BELLO