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Compte-rendu de la session Accidents de la vie quotidienne : Surveillance et prévention Paris – Centre universitaire des Saints Pères 10 juin 2015 Modérateurs : Bertrand THÉLOT et Julien BRIÈRE, InVS

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Compte-rendu de la session Accidents de la vie quotidienne :

Surveillance et prévention

Paris – Centre universitaire des Saints Pères 10 juin 2015

Modérateurs : Bertrand THÉLOT et Julien BRIÈRE, InVS

1Oèmes journées de la prévention et de la santé publique – Accidents de la vie quotidienne : Surveillance et prévention

   

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Introduction Bertrand THÉLOT Institut de veille sanitaire (InVS)

Le sujet de cette session ne concerne pas la surveillance d’un côté et la prévention de l’autre, mais bien « la surveillance et la prévention », formant un tout indissociable. Telle est, en effet, l’optique de la future agence de santé publique qui regroupera en son sein l’Institut de veille sanitaire (InVS) et l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). Par ailleurs, cette journée ne concerne pas uniquement les Accidents de la vie courante (AcVC) mais bien les « accidents de la vie quotidienne » c’est-à-dire tous les accidents pouvant survenir dans la vie d’un individu, incluant aussi les accidents de la circulation ou les accidents du travail. Il existe, en effet, des différences entre ces divers types d’accidents mais également des points communs non négligeables.

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Prévention des accidents mortels d’enfants : mise en place d’un système de surveillance adapté Linda LASBEUR Chargée de projets scientifiques, InVS

L’InVS met en place un système de surveillance des accidents mortels d’enfants. Traditionnellement, à l’InVS, la surveillance épidémiologique de la mortalité se fait à partir des données du Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc), lesquelles sont constituées à partir des certificats de décès remplis par les médecins certificateurs. Ces données sont précieuses car elles permettent de décompter et de décrire les AcVC. Grâce à ces données, nous savons, par exemple, qu’en France métropolitaine 450 enfants environ décèdent chaque année des suites d’un traumatisme, dont 220 des suites d’un AcVC. La première cause de décès est la noyade. Chez les nourrissons de moins de 1 an, la première cause de décès est la suffocation. Il y a plus de garçons qui décèdent des suites d’un accident que de filles et la classe d’âge la plus touchée par les AcVC est celle des enfants de 1 à 4 ans. Ces données permettent également de mesurer des évolutions dans le temps depuis 1979. A cette date, on dénombrait encore 1 500 décès d’enfants par AcVC par an. On en compte aujourd’hui entre 200 et 250. Toutefois, ces données ne permettent pas de comprendre précisément les circonstances de l’accident qui ont conduit au décès, ni d’en définir le caractère évitable. Une telle démarche existe à l’étranger : les coroners au Canada et en Grande-Bretagne, par exemple, mènent systématiquement une enquête pour prendre connaissance des circonstances qui ont conduit au décès, pour tous les cas de décès d’origine non naturelle. En France, cela se fait aussi dans d’autres domaines tels que l’accidentologie de la circulation ou l’aviation civile.

Enquête de Mortalité par AcVC chez les enfants de moins de 15 ans (MAC-15)

En 2009, une étude de faisabilité a été réalisée dans trois régions. Elle visait à mieux connaître les circonstances et les facteurs de risque de ces accidents mortels en testant la collecte des données ainsi que la rapidité d’accès au détail et à l’exhaustivité des informations. Dans un second temps, l’objectif de cette étude consistait à analyser les possibilités d’extension et/ou de généralisation du dispositif afin de permettre une surveillance en routine des décès par AcVC.

La méthodologie

La méthodologie a consisté à inclure tous les décès des enfants de moins de 15 ans survenus en 2009 en Île-de-France, en Provence-Alpes-Côte d’Azur et dans le Nord-Pas-de-Calais. Le signalement des décès s’est fait par l’intermédiaire du CépiDc, des Agences régionales de santé (ARS) et de la presse. Une fois ce repérage effectué, l’InVS a pris contact avec chaque médecin certificateur concerné pour lui soumettre le questionnaire MAC-15.

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Les résultats

En 2009, 76 décès par AcVC ont été recensés dans ces trois régions. La moyenne d’âge des enfants était de 4,2 ans et la majorité d’entre eux étaient des garçons : 1,6 garçon pour 1 fille, précisément. La noyade était la première cause de décès.

Intérêt de la démarche

Pour illustrer l’intérêt de cette démarche, il faut comparer ce que le médecin certificateur avait noté sur le certificat de décès avec ce qu’il a indiqué dans le formulaire MAC-15. Dans le cas d’un décès accidentel dans une baignoire, par exemple, le certificat de décès indiquait : « submersion accidentelle dans une baignoire ». Le formulaire MAC-15 a permis d’obtenir beaucoup plus de détails : nous savons désormais qu’il s’agissait d’un enfant de 9 mois installé dans un siège baignoire adapté et stable ; qu’il a été laissé 15 minutes dans la baignoire remplie d’eau sous la surveillance de son grand frère, un mineur de 16 ans présentant un handicap lourd qui ne lui permettait pas de surveiller ni de porter assistance au nourrisson ; que les parents étaient à l’étage inférieur, fortement alcoolisés et que l’enfant a été retrouvé par eux flottant sur le ventre dans la baignoire. Dans un autre cas, le certificat de décès indiquait : « Accident de literie. Suffocation. Asphyxie. Mort subite du nourrisson ». Le médecin certificateur, qui était, en l’occurrence, un médecin légiste, a précisé sur le questionnaire MAC-15 que cet accident concernait un enfant de 10 mois, que l’enfant a enfoui sa tête entre le matelas et le lit parapluie car les parents avaient ajouté un matelas dans le lit dont la taille n’était pas adaptée et laissait un espace de 7 à 8 cm dans lequel l’enfant s’est coincé la tête. D’une manière plus générale, MAC-15 a permis de montrer que le comportement dépend principalement de l’âge de l’enfant. Les tout-petits ne sont pas conscients du danger qu’ils encourent, tandis que chez les plus grands, à partir de 9 ou 10 ans, on observe parfois une prise de risque délibérée mais dont les conséquences ne sont pas bien mesurées. Les médecins certificateurs ont également noté un manque de surveillance évident concernant les plus jeunes. Le comportement des parents atteste parfois d’une méconnaissance de certains risques d’accidents. Des produits sont impliqués dans la moitié des accidents jusqu’à l’âge de 10 ans. On peut citer plusieurs types de produits dangereux ou détournés de leur utilisation première comme, par exemple, une barrière de protection pouvant causer une strangulation, une brosse à dents pouvant causer un étouffement lorsque le manche se désolidarise, une cacahuète donnée à un enfant de moins de 2 ans pouvant causer l’obstruction des voies respiratoires. Au-delà de 10 ans, les produits ne sont plus impliqués que dans 18 % des accidents et il s’agit généralement de produits inadaptés ou détournés de leur usage tels qu’une arme à feu ou un foulard lorsqu’un enfant pratique le jeu du foulard.

Analyse détaillée des décès par traumatisme (ADT) chez les enfants de moins de 15 ans

Les conclusions de Mac-15 étant très positives et riches d’enseignements, l’InVS a décidé de poursuivre en mettant en place une enquête avec des objectifs similaires. Il s’agit également d’une surveillance épidémiologique détaillée des traumatismes mortels de l’enfant par la description

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précise des circonstances de leur survenue. La différence est que cette surveillance se fera désormais de façon continue afin de mieux identifier les facteurs de risque de traumatismes mortels ainsi et contribuer à la mesure en routine de leur évitabilité. L’ambition de cette enquête ADT, « Analyse détaillée des décès par traumatisme chez les enfants de moins de 15 ans », consiste à effectuer un recueil continu et exhaustif de données détaillées sur les circonstances de ces décès. Le dispositif a également été élargi à l’ensemble de la France métropolitaine. L’organisation de la remontée des informations est la même que pour MAC-15, elle repose sur une simple déclaration du médecin certificateur ou de toute autre personne étant intervenue auprès de l’enfant : pompier, médecin du Service d’aide médicale urgente (SAMU), policier ou gendarme. Les informations recueillies sont : - les caractéristiques sociodémographiques ; - les date et lieu du décès ; - le lieu de résidence de l’enfant. En texte libre, le médecin certificateur a la possibilité de noter toutes les informations dont il dispose sur les circonstances de l’accident, portant notamment sur : - l’environnement social et familial de l’enfant ; - sa fratrie ; - son mode de vie ; - son type d’habitat ; - les caractéristiques socioéconomiques de ses parents ; - les circonstances détaillées du traumatisme (chronologie, événements et éléments ayant conduit au décès, conditions de survenue du décès, produit impliqué dans l’accident, activité au moment de l’accident, etc.). Les données sont ensuite soumises à trois séries d’analyse : - des statistiques descriptives ; - des études de cas permettant de catégoriser les facteurs de risque et d’établir une typologie des traumatismes mortels ; - des mesures de l’évitabilité de ces accidents. Parallèlement à la mise en place de ce dispositif, une réflexion est en cours sur la mise au point d’une échelle de mesure de l’évitabilité des accidents graves chez les enfants. L’objectif du projet consiste, dans un premier temps, à disposer d’une documentation et d’une synthèse des connaissances sur l’évitabilité de la survenue des accidents graves chez les enfants pour, dans un second temps, construire une échelle de mesure de l’évitabilité applicable aux cas de décès. A terme, il s’agira d’appliquer en routine cette échelle à partir des cas d’ADT. La revue de la littérature n’ayant pas permis de trouver d’échelle directement applicable aux AcVC, on s’est inspiré d’échelles et d’outils existants dans d’autres domaines, tels que la méthode Hazard analysis critical control points (HACCP), mise en place par la National aeronautics and space administration (NASA) pour tester la qualité de la sécurité des éléments lors des premiers vols spatiaux. Ce dispositif repose sur l’identification des six facteurs de risque impliqués dans le diagramme d’Ishikawa : - l’exposition au risque ; - la prévention ;

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- la rapidité de la survenue de l’événement ; - le comportement ; - la réglementation ; - l’agent vulnérant, c’est-à-dire le produit.

Figure 1 – Diagramme d’Ishikawa

La méthode HACCP est complétée par la méthode d’Analyse des modes de défaillance, de leurs effets et de leur criticité (AMDEC) qui consiste à affecter une note à chaque facteur de risque. Sur une échelle de 0 à 6, le comportement, par exemple, sera coté 0 si le parent ou l’adulte responsable avait un comportement préventif et il sera coté 6 si cet adulte a enfreint une loi. Enfin, l’InVS ambitionne de construire une échelle qui rende compte du contexte de l’enfant en indiquant son âge, son contexte familial, socioéconomique et sociodémographique, le niveau d’éducation et d’étude des parents, l’activité des parents, ainsi que son environnement social et familial. Cette approche complète les données du CépiDc qui restent indispensables, mais peu détaillées. Elle permet : - une connaissance fine des circonstances des AcVC ; - l’identification de facteurs de risque différents selon l’âge de l’enfant ; - la mise en évidence d’un défaut de surveillance, très souvent cité pour les plus jeunes. Ces travaux sont un appui essentiel à la mise en place des programmes de prévention parce qu’ils permettent de cibler des situations à risque, des mécanismes accidentels, des produits dangereux, des comportements à risque de la part des adultes ou des adolescents et des enfants ainsi que des populations à risque selon l’âge et le milieu de vie. Enfin, ils permettent de mesurer finement l’impact des campagnes de prévention, donc leur ajustement et leur actualisation. De la salle N’existait-il pas déjà, dans la littérature anglo-saxonne notamment, des échelles d’évitabilité ?

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Linda LASBEUR Non, il n’existe pas d’échelle de ce type pour les AcVC. De la salle Dans le cadre de l’étude ADT, d’autres professionnels que les médecins pourront être sollicités pour caractériser le contexte. Cela était-il également le cas pour l’étude MAC-15 ? Linda LASBEUR Oui. De la salle Les informations fournies par ces professionnels sont-elles pertinentes ? Linda LASBEUR Elles sont très pertinentes. Pour les deux tiers des 76 décès par accident, l’enquête a permis d’obtenir beaucoup plus d’informations que celles mentionnées sur le certificat de décès. Il n’y a pas du tout de biais de mémoire et il est aisé d’identifier la personne ayant pris en charge l’enfant. De la salle Comment l’information est-elle récupérée en routine auprès des médecins certificateurs ou des autres professionnels ? Linda LASBEUR ADT n’a pas encore démarré. Nous attendons encore l’autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Au début, pour lancer l’enquête, l’InVS sollicitera systématiquement les médecins au sujet des 400 décès par an. Cela représente beaucoup de travail mais ce n’est pas irréalisable. De la salle Les médecins devraient-ils, à terme, être sensibilisés ? Linda LASBEUR En effet. L’InVS s’est d’ailleurs rapproché de l’Ordre des médecins et a lancé une démarche de sensibilisation auprès des pédiatres. De la salle Tout cela ne doit-il pas aboutir à des dispositifs de prévention renforcés ? Linda LASBEUR L’étude ADT vient seulement de débuter mais ses résultats auront, bien entendu, un impact sur la prévention.

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Mise au point d’indicateurs de surveillance des accidents de circulation liés au travail en France Julien BRIÈRE Département santé travail, InVS

Définitions

Pour l’accident de la circulation, nous retenons la définition de la sécurité routière : il s’agit d’un accident corporel impliquant au moins une victime, qui survient sur une voie ouverte à la circulation publique, et implique au moins un véhicule. L’accident de circulation lié au travail, quant à lui, est un accident de circulation qui survient soit au cours d’un déplacement professionnel pour l’employeur soit au cours d’un trajet entre le domicile et le lieu de travail.

Contexte

Les accidents de la circulation liés au travail sont un risque professionnel important. Il s’agit de la première cause d’accidents mortels au travail. Ces dernières années, on observe une augmentation de l’exposition aux risques, en particulier pour les déplacements domicile – travail, qui ont tendance à augmenter en nombre et en distance moyenne parcourue. Pour autant, nous disposons de peu de données au niveau national sur ce risque professionnel. Les données concernant les accidents non mortels, notamment, sont très mal connues, en France comme dans la plupart des pays.

Objectif

L’objectif de ce travail consistait à mettre au point des indicateurs nationaux pour la surveillance des accidents de la circulation liés au travail en utilisant les deux sources de données nationales disponibles, à savoir : – les données 2004 de réparation des accidents du travail de deux régimes de sécurité sociale (le régime général et le régime des salariés agricoles) ; – les données 2004 des forces de l’ordre, qui remplissent un bulletin d’analyse d’accident corporels (BAAC) chaque fois qu’elles se rendent sur le lieu d’un accident.

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Méthode

Types de données utilisées

Dans les données des deux régimes, il n’est pas évident de repérer les accidents de circulation liés au travail. Il faut les approximer à partir des variables enregistrées par ces régimes. Les donnés BAAC, quant à elles, ont permis d’extraire trois ensembles de données : - des données sur les victimes, conducteurs et piétons, effectuant un trajet professionnel ; - des données sur les victimes passagers d’un conducteur effectuant un trajet professionnel ; - des données permettant d’estimer la part des accidents de circulation liés au travail dans l’ensemble des accidents de circulation.

Indicateur de fréquence des accidents

L’indice de fréquence retenu consiste à rapporter le nombre de victimes à la population source pour l’année considérée. Cet indice de fréquence a été calculé de manière différente dans les deux sources de données. Pour les donnés BAAC, le nombre de victimes a été rapporté à l’effectif des travailleurs. Pour les donnés des régimes de sécurité sociale, le nombre de victimes a été rapporté aux effectifs des salariés affiliés aux deux régimes. Ces indices de fréquence sont des indices bruts : ils ne tiennent pas compte de la durée d’exposition au risque routier.

Résultats

Nombre de victimes en 2004

Les deux sources de données utilisées, étant de nature distincte, présentent des écarts importants. Ainsi, le nombre de victimes d’accidents de la circulation liés au travail s’établit, pour 2004, à un peu plus de 100 000 dans les données des deux régimes et à moins de 20 000 dans les données des forces de l’ordre. L’un des éléments qui permet d’expliquer cet écart est le fait que, dans les données des forces de l’ordre, les accidents les moins graves sont sous-représentés.

Indice de fréquence et taux de mortalité selon l’âge chez les hommes (2004)

On observe que l’indice de fréquence diminue avec l’âge chez les hommes, en 2004, à la fois pour les déplacements professionnels et pour les trajets domicile – travail. Cette tendance s’observe à la baisse pour les deux sources de données. Le taux de mortalité diminue également avec l’âge pour les trajets domicile – travail. En revanche, le taux de mortalité est globalement stable avec l’âge pour les déplacements professionnels.

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Figure 2 – Indice de fréquence et taux de mortalité selon l’âge en 2004 (hommes)

Indice de fréquence selon le secteur d’activité agrégé chez les hommes en 2004

On observe un indice de fréquence beaucoup plus élevé dans le secteur des transports : il est de 6,6 victimes pour 1 000 salariés en 2004. Il est trois fois plus élevé que l’indice de fréquence tous secteurs d’activité confondus qui est de 2,2.

Figure 3 – Indice de fréquence par secteur d’activité agrégé

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Discussion

Limite des indicateurs testés

Les indicateurs des régimes de sécurité sociale sont restreints à deux régimes de Sécurité sociale. L’information enregistrée par les régimes de Sécurité sociale est imparfaite pour identifier les accidents de circulation. De plus, il existe un phénomène de sous déclaration des accidents du travail à la Sécurité sociale. Les indicateurs issus des données des forces de l’ordre souffrent d’une sous-représentation des accidents les moins graves. Ce sont les forces de l’ordre qui jugent si un accident a lieu au cours d’un déplacement privé ou d’un déplacement lié au travail. Des erreurs peuvent donc être commises. Enfin, pour rappel, les dénominateurs utilisés pour calculer les indices de fréquence sont des indices bruts qui ne tiennent pas compte de la durée d’exposition au risque routier et, de ce fait, il est difficile d’interpréter les différences observées entre les indices de fréquence.

Intérêt

Toutefois les indicateurs testés permettent de disposer d’angles de vue inédits sur ce risque professionnel et notamment de résultats par secteur d’activité à un niveau très détaillé ainsi qu’une distinction entre hommes et femmes. Il a été possible d’extraire de ces données des indicateurs utiles pour la surveillance des accidents de circulation liés au travail en France et de nouvelles exploitations sont prévues avec des données plus récentes. De la salle Quid des facteurs favorisants, comme la conduite en situation de stress ou le harcèlement moral ? Julien BRIERE Nous ne disposons pas de ces données dans les informations enregistrées par les régimes de sécurité sociale et les forces de l’ordre. Evidemment, nous aimerions disposer de ces informations. De la salle Le facteur « consommation d’alcool » est renseigné dans les BAAC mais non dans les données des régimes de Sécurité sociale. Julien BRIERE Il est renseigné dans les BAAC, en effet, mais uniquement pour les décès. De la salle Est-il envisagé de croiser les données recueillies avec les données issues, par exemple, de l’enquête de Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels (SUMER) ? Julien BRIERE Les données de l’enquête SUMER pourraient permettre, en effet, de corriger les indices de fréquences bruts de l’exposition au risque routier puisque dans cette enquête, des informations sur la durée d’exposition au risque routier des salariés sont recueillies.

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De la salle Certaines entreprises, en France, cherchent à adapter le rythme de travail de leurs salariés par rapport aux risques auxquels ils sont exposés, en particulier au risque routier. Ces indicateurs pourraient-ils permettre de mesurer le niveau d’exposition au risque ? Julien BRIERE Ils ne permettent pas de mesurer le niveau d’exposition aux facteurs de risque.

Barbara CHARBOTEL Unité mixte de recherche épidémiologique et de surveillance transport travail environnement (UMRESTTE)

Il s’agit de simples indicateurs de suivi. Nous nous contentons d’utiliser les données disponibles pour assurer une surveillance du phénomène.

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Les chutes des personnes âgées : un enjeu majeur de santé publique Gaëlle PEDRONO Chargée d’études scientifiques, InVS

Contexte démographique

En 2014, la population française comportait 18 % de personnes de plus de 65 ans, ce qui représentait plus de 12 millions d’habitants. L’espérance de vie pour les hommes était de 79,2 ans et de 85,4 ans pour les femmes. L’espérance de vie à 60 ans était de 23,1 ans pour les hommes et de 27,7 ans pour les femmes. En 2010, l’espérance de vie en bonne santé était de 61,8 ans pour les hommes et de 63,5 ans pour les femmes. L’entrée en institution se fait de plus en plus tardivement : elle se faisait à 82 ans en moyenne en 1994 contre 84,5 ans en 2011. Parmi les personnes de 65 ans et plus, 10,5 millions vivent à leur domicile, et 15 à 20 % de ces personnes vivant à domicile sont considérées comme fragiles donc soumises au risque de chute. En 1954, la France comptait 42 millions d’habitants. En 2015, nous sommes près de 65 millions et la part des personnes âgées de 65 ans et plus a beaucoup augmenté. Une projection de l’Institut national d’études démographiques (INED) montre qu’en 2065, la France comprendra plus de 75 millions d’habitants et toujours plus de personnes de 65 ans et plus : la pyramide des âges ressemblera alors de plus en plus à un cube.

Figure 4 – Evolution de la pyramide des âges en France métropolitaine

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Contexte de santé publique

La chute des personnes âgées est une préoccupation de santé publique très prégnante ces dernières années, comme en témoignent les différents plans et lois de santé publique mis en œuvre à ce sujet : – la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004, dont l’objectif 99 était de diminuer les chutes de 25 % chez les plus de 65 ans entre 2004 et 2008 ; – les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) de 2006 sur la prévention des chutes accidentelles des personnes âgées ; – le plan national Bien Vieillir 2007-2009, qui avait pour objectif de favoriser un vieillissement réussi, tant sur le plan individuel que des relations sociales ; – le rapport 2013 de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) pour l’Adaptation du logement et l’autonomie des personnes âgées.

Données disponibles

Une revue de la littérature internationale révèle que le risque de chute augmente avec l’âge et que le risque relatif de chuter augmente de 5 % par année supplémentaire. Le risque de se blesser lors d’une chute augmente également avec l’âge puisque la fragilité augmente. Ce risque est estimé à 10 ou 15 %. La chute provoque la plupart du temps des lésions telles que la fracture du col du fémur et parfois des traumatismes crâniens. Les chutes peuvent aussi avoir d’autres conséquences que la blessure, notamment : – la limitation des activités de la personne due à la peur de tomber ; – le déclin fonctionnel ; – la baisse de la qualité de vie ; – la dépression ; – l’isolement social. Le problème auquel est confronté l’InVS pour calculer les incidences de chute est que ces événements sont souvent sous-déclarés. Les personnes perçoivent en effet la chute comme un symptôme du vieillissement et ont peur que cette chute puisse provoquer une perte d’indépendance ou une institutionnalisation. On estime à moins de la moitié le nombre de chutes qui seraient reportées aux praticiens de santé. Ces chutes ont également un coût financier. Une étude menée aux États-Unis a montré qu’un chuteur vivant à domicile coûterait entre 2000 et 3 000 dollars par an et qu’un chuteur vivant en institution coûterait environ 7 000 dollars par an.

Importance des chutes chez les 65 ans et plus

Une enquête menée au Québec en 1998 a montré que, parmi les personnes de 65 ans et plus, 30 % au moins auraient chuté dans l’année, 5 % ont consulté pour blessures, 1,25 % ont été hospitalisées et 0,6 % sont décédées suite à cette chute.

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Figure 5 – Importance des chutes chez les 65 ans et plus au Québec en 1998

Décès par chute (données CépiDc)

Les chutes sont la première cause de décès accidentel en France métropolitaine. En 2011, on recensait plus de 9 000 décès par chute dont 90 % survenus chez les 65 ans et plus. Ces chutes surviennent plus fréquemment chez les femmes que chez les hommes : le sex ratio est de 0,6 homme pour une femme. La proportion de décès liés à une chute indique une surreprésentation des personnes de 75 ans et plus. Chez les personnes de 85 ans et plus, les effectifs sont encore plus importants.

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Figure 6 – Nombre de décès par chute selon l’âge en France métropolitaine (2010)

Les résultats du Baromètre santé 2010 de l’INPES montrent que 21,6 % des 55-85 ans déclarent être tombés au cours des 12 derniers mois, et que la prévalence des chutes est plus importante chez les femmes.. Dans 30 % des cas, la chute est suivie d’une consultation médicale. Suite à cette chute, 20 % ont limité leurs déplacements par peur de retomber.

Expertise collective de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) – 2014

L’expertise collective de l’INSERM est très complète et donne beaucoup d’informations. Elle montre que les principaux facteurs de risque connus sont : – la sédentarité, car le faible niveau d’activité physique augmente le risque de chute ; – les pathologies comme la dénutrition, l’obésité, la dépression, l’ostéoporose et l’arthrose ; – les déficits sensoriels et cognitifs ainsi que l’incontinence urinaire ; – la consommation de médicaments psychotropes et la polymédication ; – l’isolement, le niveau d’éducation, l’environnement et le mode de vie ; – la peur de chuter. L’expertise a émis plusieurs recommandations d’actions : – informer les patients et les professionnels de santé sur les chutes et sur la nécessité d’identifier les personnes âgées à risque de chute ; – agir face à la consommation excessive de médicaments psychotropes chez les personnes âgées ; – assurer une prise en charge post-chutes des patients accueillis aux urgences ; – développer des programmes d’activité physique adaptés à l’état de santé des personnes âgées ; – sensibiliser les collectivités à la nécessité d’un environnement favorable à la pratique d’activités physiques. L’expertise pointe également des manques dans les connaissances épidémiologique, que ce soit en termes d’incidence ou en termes de facteurs de risque.

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Projet d’enquête Chutes des personnes âgées à domicile (ChuPADom)

L’enquête ChuPADom a pour objectif d’identifier les profils de chuteurs, notamment par leurs caractéristiques sociodémographiques et socioéconomiques, leurs maladies chroniques et/ou polypathologiques, leur santé mentale, leur médication, leur degré d’autonomie avant la chute, etc. Il s’agira également d’étudier les facteurs de risque que sont les caractéristiques de l’habitat, les produits impliqués dans la chute, l’activité au moment de la chute, etc. Un suivi à un an permettra de décrire les séquelles et le handicap en fonction de la gravité initiale et du profil du chuteur. Les données ainsi obtenues pourront contribuer à la mise en place d’actions de prévention ciblées. De la salle Recueillir, par exemple, des informations sur l’aménagement du domicile lors d’un passage aux urgences est assez compliqué. Comment s’effectuera ce recueil ? Gaëlle PEDRONO Il est prévu d’interroger les patients, ou les aidants si les personnes âgées ne sont pas en mesure de répondre, mais aussi de contacter le médecin généraliste et d’identifier un référent, qui peut être un voisin, susceptible de décrire les conditions de logement de la personne. De la salle Est-il prévu de travailler, dans le cadre d’une deuxième enquête, avec des personnes non-chuteuses mais potentiellement chuteuses, pour pouvoir étudier les facteurs de risque de manière plus générale ? Gaëlle PEDRONO Non. Le mode d’inclusion dans l’enquête est l’événement. De plus, il n’est pas simple, en épidémiologie, de repérer les personnes à risque en amont, avant l’événement. Toutefois, l’Observatoire MAVIE, mis en place par l’INSERM et Calyxis, a pour objectif de recruter des volontaires susceptibles de décrire leurs conditions de vie au domicile et leurs accidents. Cette enquête vient seulement de démarrer mais son objectif, à terme, sera d’obtenir des informations en amont de l’accident.

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Surveillance épidémiologique des victimes de brûlures Anne PASQUEREAU InVS

Définitions

La surveillance épidémiologique des victimes de brûlures s’appuie principalement sur deux sources de données : - des données sur la mortalité issues du CépiDc (500 décès par feu-flammes chaque année) ; - des données d’hospitalisation issues du Programme médicalisé des systèmes d’information (PMSI – environ 12 000 hospitalisations pour brûlures par an).

Objectifs

Le premier objectif de la surveillance à partir des données d’hospitalisations consiste à décrire le profil démographique des victimes de brûlures ainsi que leur prise en charge. Le second vise à établir des taux d’incidence et des indicateurs de gravité.

Méthode

Les hospitalisations en France métropolitaine pour brûlure sont comptabilisées à partir des données du PMSI, qui sont des données nationales et exhaustives.

Résultats nationaux 2012

11 443 hospitalisations pour brûlure ont été enregistrées en 2012. Ces hospitalisations ont concerné 8 065 personnes, certaines personnes ayant été hospitalisées plusieurs fois pour brûlure dans l’année. Le taux d’incidence de personnes hospitalisées pour brûlures est de 12,7 pour 100 000 habitants. Les deux tiers des personnes concernées sont des hommes ; 214 d’entre elles sont décédées à l’hôpital des suites de leurs brûlures. Les décès survenus sur le lieu d’incendie ne figurent pas dans cette base de données. Ils figurent, en revanche, dans les données du CépiDc.

Répartition par âge des patients

Un quart des patients a entre 0 et 4 ans. La moitié des patients âgés de 0 à 4 ans a 1 an. Les cas de brûlures surviennent donc principalement quand l’enfant commence à marcher. La saisonnalité est différente selon l’âge. Pour les enfants de 0 à 1 an et pour les 50 ans et plus, le pic se situe en hiver, alors que pour les personnes âgées de 2 à 49 ans, le pic se situe plutôt en été.

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Résultats régionaux et interrégionaux 2009-2012

Les indicateurs nationaux ont été produits aux niveaux régional et interrégional. Un premier bloc d’indicateurs concerne les hospitalisations au sein d’une région ou d’une interrégion. Son objectif est de décrire la prise en charge et la mortalité hospitalière. Un deuxième bloc d’indicateurs concerne les patients résidant dans la région ou dans l’interrégion. Son objectif est la surveillance épidémiologique des victimes de brûlure.

Prévention des incendies-brûlures

L’INPES a réalisé en 2004 une campagne nationale de prévention des incendies domestiques. Un coffret pédagogique, intitulé « Léa et le feu », a été mis à disposition des enseignants. Des affiches et des dépliants ont été diffusés auprès du grand public.

Figure 7 – Illustration de la campagne de prévention « Léa et le feu » de l’INPES (2004)

Depuis 2005, la campagne « Quelques conseils de prévention pour bien vivre l’hiver » mentionne le risque d’incendie. Et depuis 2007 des campagnes spécifiques sur l’intoxication au monoxyde de carbone (CO) et sur les incendies domestiques ont été mises en place. De la salle Envisagez-vous de travailler sur des échelles plus fines, à l’échelle des Îlots Regroupés pour l’Information Statistique (IRIS), par exemple ?

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Anne PASQUEREAU Pour l’instant, il n’est pas prévu de descendre en deçà de l’échelle régionale, pour des raisons d’effectifs, tout simplement. De la salle Avez-vous une idée de la répartition des personnes hospitalisées pour brûlure dans d’autres services que les services de grands brûlés, en particulier dans les services de dermatologie où sont hospitalisés certains brûlés ? Anne PASQUEREAU Le PMSI ne nous permet pas de disposer de cette information. Pour l’instant, nous savons que les brûlés sont pris en charge en partie dans les services de grands brûlés et en partie dans d’autres services mais nous ne disposons que de peu d’informations sur ces derniers.  

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Sigles AcVC : Accident de la vie courante ADT : Analyse détaillée des décès par traumatisme chez les enfants de moins de 15 ans (enquête) AMDEC : Analyse des modes de défaillance, de leurs effets et de leur criticité ANAH : Agence nationale de l’habitat ARS : Agence régionale de santé BAAC : Bulletin d’analyse d’accident corporel CépiDc : Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès CNAV : Caisse nationale d’assurance vieillesse CNIL : Commission nationale de l’informatique et des libertés CO : Monoxyde de carbone HACCP : Hazard analysis critical control points HAS : Haute autorité de santé INED : Institut national d’études démographiques INPES : Institut national de prévention et d’éducation pour la santé InVS : Institut de Veille Sanitaire INSERM : Institut national de la santé et de la recherche médicale IRIS : Îlots Regroupés pour l’Information Statistique MAC-15 : Mortalité par AcVC chez les enfants de moins de 15 ans (enquête) NASA : National aeronotics and space administration PMSI : Programme médicalisé des systèmes d’information SAMU : Service d’aide médicale urgente SUMER : Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels UMRESTTE : Unité mixte de recherche épidémiologique et de surveillance transport travail environnement