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CRÉER UNE ENTREPRISE DE COMMERCE ÉQUITABLE

Créer une entreprise de CommerCe équitable · Les acteurs belges du commerce équitable ... Les conditions de travail. Le commerce équitable promeut un environnement de travail

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Créer une entreprise de CommerCe équitable

1Commerce équitable

Introduction

Le secteur du commerce équitable est aujourd’hui en pleine évolution et il se déve-loppe dans un contexte économique difficile. Il est en outre animé par de réelles questions existentielles. Les quelques éléments repris dans l’encadré ci-joint dé-montrent que le grand public semble de plus en plus sensible au commerce équi-table même si le volume de ses achats doit encore progresser notablement pour assurer la survie de nombreuses entreprises. En conclusion de notre brochure, nous évoquerons quelques-unes de ces questions de fond et nous les placerons dans une perspective de réflexion plus globale par rapport au contexte écono-mique actuel.

Malgré des temps économiques incertains, de nombreux entrepreneurs souhaitent se lancer dans l’aventure du commerce équitable ou réorienter leur activité en ce sens. Cette brochure leur est destinée. Elle est avant tout un outil pratique. Son but est d’aider l’entrepreneur ou le candidat entrepreneur à se poser les bonnes questions avant de se lancer. Il ne s’agit donc pas d’un livre de recettes apportant des réponses toutes faites. Ces quelques pages veulent surtout aider le porteur de projet à bien structurer son action pour prendre en compte les différentes facettes des réalités auxquelles il sera confronté.

Le contenu a été élaboré par une fédération professionnelle qui s’est largement appuyée sur les expériences concrètes accumulées par ses membres. Le ton se veut donc direct et bien enraciné dans la pratique. L’objectif n’est pas de séduire et moins encore de convaincre. Le registre est celui du partage des expériences.

Dans la première partie, nous fournirons une série d’éléments qui permettront de mieux comprendre et de cerner le concept de commerce équitable. La seconde partie prendra concrètement la forme d’un outil d’aide à la réalisation du plan d’af-faires. Cet exercice de rédaction et de structuration du projet est en effet une étape très importante. C’est sur cette base que les actions concrètes vont s’articuler les unes aux autres.

La volonté de se lancer dans « l’équitable » doit être soumise à l’épreuve de la réa-lité. Il est d’ailleurs fréquent qu’une analyse rigoureuse débouche sur la décision de renoncer à mettre en œuvre le projet tel qu’il était pensé au départ.

Enfin, pour alléger le tout et donner quelques impulsions au cheminement, des petites pensées seront soumises à votre réflexion tout au long des différents cha-pitres. Elles sont le fruit de nombreux entretiens avec des entrepreneurs actifs dans le domaine du commerce équitable.

2Commerce équitable

Commerce équitable et comportement d’achat

Avez-vous déjà entendu parler du commerce équitable ?

Oui : 86%Non : 14%

Au cours des 12 derniers mois, avez-vous acheté des produits issus du commerce équitable ?

Oui : 61%Non : 39 %

Où avez-vous acheté les produits issus du commerce équitable ?

Magasins spécialisés : 37%Magasins Bio : 8 %Grands magasins : 52%Ailleurs : 4 %

Quels produits issus du commerce équitable avez-vous acheté au cours de ces 12 derniers mois ?

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Extraits du rapport d’étude : enquête d’opinion sur le commerce équitable et durable auprès de la population belge réalisée en 2009 à la demande de la CTB (Agence belge de développement). L’étude complète peut-être consultée et téléchargée sur www.befair.be

3Commerce équitable

Table des matières

Introduction ........................................................................................................1

PREMIERE PARTIE Commerce équitable, définitions et éléments de contexte ..................................4

1. Définitions du commerce équitable .................................................................52. La diversité des métiers du commerce équitable ..........................................103. La diversité des produits du commerce équitable .........................................154. Les acteurs belges du commerce équitable ..................................................18

DEUXIEME PARTIE :Créer une entreprise inscrite dans les standards du commerce équitable, réfléchir et rédiger un plan d’affaires .................................................................20

Introduction ......................................................................................................21

1. La présentation du projet dans son contexte ................................................232. Définir la meilleure stratégie ..........................................................................293. Passer de la stratégie au plan opérationnel ...................................................324. Préciser les aspects financiers du projet .......................................................375. Les bonnes adresses ...................................................................................40

TROISIEME PARTIE :Conclusions .....................................................................................................42

4Commerce équitable

PREMIERE PARTIECommerce équitable, définitions et éléments de contexte

5Commerce équitable

En 2001, quatre structures internationales de com-merce équitable (FLO, IFAT, NEWS, EFTA) ont pro-posé une définition du commerce équitable. Elle fait toujours référence aujourd’hui :

« Le commerce équitable est un partenariat commer-cial fondé sur le dialogue, la transparence et le res-pect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au dé-veloppement durable en offrant de meilleures condi-tions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, tout par-ticulièrement au Sud de la planète. Les organisations du commerce équitable (soutenues par les consom-mateurs) s’engagent activement à soutenir les produc-teurs, à sensibiliser l’opinion et à mener campagne en faveur de changements dans les règles et pratiques du commerce international conventionnel. »

Sur la base d’un large consensus impliquant WFTO et FLO, le commerce équitable prescrit par ailleurs 10 normes que ses acteurs, tant au Nord qu’au Sud, doivent appliquer quotidiennement dans leur travail. Dans le cas des membres WFTO (organisation mon-diale du commerce équitable) ou des groupes certifiés FLO (coupole mondiale des organismes de certifica-tion), différents systèmes de contrôle sont en place afin d’assurer le respect de ces normes.

1. Créer des opportunités pour les producteurs qui sont économiquement en situation de désavantage. Le commerce équitable vise à combattre la pauvreté et promouvoir le développement durable. Son but est de créer des opportunités pour les producteurs dé-savantagés ou marginalisés par le système du com-merce conventionnel.

2. La transparence et la crédibilité. Dans le com-merce équitable, les relations commerciales doivent s’inscrire dans des partenariats durables et transpa-rents avec les producteurs du Sud.

3. La capacité individuelle. Le commerce équitable contribue à développer l’autonomie des travailleurs. Les partenariats dans la durée permettent aux pro-ducteurs d’améliorer leurs capacités de gestion et leur accès aux marchés locaux et internationaux.

4. Promouvoir le commerce équitable. Les organisa-tions du commerce équitable ont pour objectif de sensibiliser leur clientèle ainsi que le grand public aux injustices du système commercial actuel. Elles doivent aussi être en mesure de fournir de l’information sur l’origine des produits, les conditions de travail des producteurs etc.

5. Le paiement d’un prix juste. Un prix juste dans un contexte local ou régional est accepté après dialogue et concertation. Cela couvre non seulement les coûts de production mais permet également une produc-tion qui est socialement juste et respectueuse de l’environnement. Un prix juste payé aux producteurs tient aussi compte du principe : à salaire égal, travail égal, tant pour les hommes que pour les femmes. Les organisations de commerce équitable assurent

1. DéfInITIons Du CoMMERCE équITAbLE

6Commerce équitable

un paiement immédiat à leurs partenaires et aident, lorsque c’est possible, leurs producteurs par un finan-cement anticipé (avant la récolte ou la production).

6. égalité entre les sexes. Les organisations du com-merce équitable valorisent le travail des femmes : celles-ci doivent toujours être payées pour leurs contributions dans le processus de production. La présence des femmes au sein de la gouvernance de ces organisations est aussi encouragée.

7. Les conditions de travail. Le commerce équitable promeut un environnement de travail sain et sûr pour les travailleurs. La participation éventuelle des enfants n’affecte pas négativement leur bien-être, leur sécurité, leurs conditions éducatives et leur besoin de jouer, con- formément à la convention des Nations-Unies sur les droits des enfants ainsi qu’aux lois et normes du pays.

8. Le travail des enfants. Les organisations du com-merce équitable respectent la convention des Nations-Unies sur les droits des enfants (voir point précédent). Les organisations qui travaillent directement avec des organisations informelles s’informent de la participa-tion des enfants dans la production.

9. L’environnement. Le commerce équitable encou-rage activement de meilleures pratiques environne-mentales et l’application de méthodes responsables de production.

10. Les relations de commerce. Les organisations de commerce équitable font du commerce en tenant compte du bien-être social, économique et environ-nemental des producteurs marginalisés et ne font pas de profit derrière leur dos. Elles maintiennent de longues relations qui reposent sur la confiance et le respect mutuel tant au Nord qu’au Sud.

1.1. standards internationaux

Les standards internationaux du commerce équitable peuvent s’appréhender de deux manières :

• Ilssontlestextesderéférencedeslabels.Ilsservent de base à la certification. Ils définissent les conditions de production et de commercialisation des produits du commerce équitable. Ils sont définis par FLO, en concertation avec les producteurs. Ils comprennent les standards génériques et des stan-dards spécifiques à chaque produit. Ils nécessitent en moyenne deux années de recherche et dévelop-pement.

• Ils formentuncadrestandardde référencedans lequel les entreprises peuvent s’inscrire. C’est le cas des organisations membres de WFTO (la fédé-ration internationale du commerce équitable).

1.2. Les labels

En Belgique, légalement, il n’existe à ce jour aucun label officiel concernant le commerce équitable. Néanmoins, plusieurs institutions et organismes pri-vés ont édicté des cahiers des charges afin de certi-fier certains produits. Il faut souligner que ces labels garantissent le respect des standards du commerce équitable, essentiellement pour la production des matières premières.

La labellisation est aujourd’hui traversée par deux grandes tendances :

• Le rapprochement et/ou l’intégration pro-gressive des cahiers des charges bio.

• L’émergencedenouveauxacteursdecertifi-cation à la fois au Nord et au Sud.

Max Havelaar

« Max Havelaar » est le plus connu et le plus ancien des labels du commerce équitable. Au départ des Pays-Bas, les initiatives de labellisation « Max Have-laar » se sont développées dans 19 pays, à commen-cer par la Belgique en 1989. Max Havelaar ne vend et n’achète aucun produit. Les produits labellisés Max Havelaar sont certifiés par FLO-Cert, un organisme international indépendant.

La notion de commerce équitable est de plus en plus connue du grand public mais le marché équitable reste très marginal.

« Le commerce équitable, c’est intégrer dans chaque prise de décision le respect des parte-naires commerciaux, des travailleurs et de l’envi-ronnement. »

7Commerce équitable

Ce label garantit que les producteurs sont payés au juste prix pour leurs récoltes et qu’ils perçoivent une prime au développement. Le label assure également que les deux parties s’inscrivent dans une relation commerciale durable. Enfin, pour obtenir la certifica-tion, le produit doit être réalisé dans des conditions décentes et respectueuses de l’environnement.

Ecocert

Initialement actif dans le domaine de l’agriculture bio-logique en France, Ecocert a peu à peu diversifié ses activités en Europe et bien au-delà, créant également son propre référentiel de commerce équitable, bap-tisé ESR, pour « équitable, solidaire, responsable ».

LeréférentielEcocert/ESRfournitauconsommateurdes garanties proches de celles de Max Havelaar : un prix minimum garanti aux producteurs, l’existence d’un fonds social pour le financement de projets de développement, l’accompagnement technique et commercial des producteurs défavorisés et de bonnes pratiques agricoles (la certification bio est exigée pour les bananes, les fleurs et le coton). Ce cahier des charges s’applique aux filières agroalimentaires, mais aussi aux produits cosmétiques et aux textiles. Le transport par voie aérienne est découragé.

Fair for Life (IMO)

Le programme de certification Fair for Life a été créé en Suisse, en 2006, par la Bio-Foundation et par l’IMO (Institute for Marketecology) avec l’intention explicite de se démarquer du système mis en place par FLO International. L’objectif était d’offrir la pos-sibilité à tous les producteurs désireux de pratiquer le commerce équitable de bénéficier d’une certifica-tion indépendante attestant le respect de critères tels que : refus du travail forcé et du travail des enfants, liberté d’association, conditions de travail sûres et décentes, etc.

Outre les 3 labels précités, coexistent une multitude d’autres labels (biologiques, durables,…). Pour des explications complètes, nous renvoyons le lecteur à la brochure « Equitable et durable : tant de labels et de systèmes de garantie… comment s’y retrouver ? » éditée par le Trade for Development Center.

En parallèle, différents systèmes de certification équi-table se sont développés dans les pays producteurs, notamment au Mexique et au Brésil. Enfin, d’autres organismes de certification s’intéressent eux aussi au commerce équitable. Il est donc fort probable que

la présence de différents acteurs débouche sur un « marché de la certification équitable », permettant aux opérateurs, au Nord comme au Sud, de choisir le référentiel ainsi que le système de contrôle qui cor-respondent à leurs attentes, à l’instar de ce qui s’est développé pour le bio.

Mais, si le fait de disposer d’un label permet aux consommateurs de bénéficier d’une garantie concer-nant les produits qu’ils achètent, le système n’est pas parfait pour autant.

• En effet, obtenir un label a un coût et denombreuses petites organisations de producteurs qui respectent les conditions du commerce équitable n’ont tout simplement pas les moyens de couvrir un tel coût supplémentaire.

• D’unautrecôté,deplusenplusd’entreprises« traditionnelles » choisissent de certifier quelques-uns de leurs produits. Ceux-ci représentent en général une part infime de leur production globale. L’obten-tion de cette certification leur permet dès lors de véhi-culer une image très positive de leur entreprise. Celle-ci rejaillit sur l’ensemble de leur image de marque même si la production en question ne représente parfois qu’un très faible pourcentage du chiffre d’af-faires global (cf. effet « greenwashing » dans le cas d’entreprises qui affichent une image superficielle de respect de l’environnement).

Le marché des organismes de labellisation s’élar-git et se complexifie et le consommateur a parfois du mal à s’y retrouver. Les labels sont de bons supports mais, ce qui compte surtout, c’est la réflexion qu’ils suscitent chez les consommateurs.

8Commerce équitable

Les producteurs, souvent regroupés en organisations en fonction de leur métier, sont les premiers acteurs de la filière. Plus encore, ils sont au cœur même des préoccupations qui ont prévalu à la mise en place et au développement du commerce équitable. Ces tra-vailleurs vivent généralement des situations très pré-caires. Leur combat quotidien est d’accéder à un niveau de vie décent et de le maintenir dignement.

De multiples façons, ONG et pouvoirs politiques locaux ou internationaux les appuient et les sou-tiennent : enseignement, formation, soins de santé, crédit, accompagnement technique…

Pour satisfaire aux standards du commerce équitable, les organisations de producteurs doivent respecter des règles précises (voir plus haut). Le respect du « cahier des charges » fait l’objet d’un contrôle indé-pendant exercé par un organisme extérieur qui pourra alors octroyer un label. Ce service est payant et son coût doit donc être intégré à la structure générale des coûts de production.

Cet organisme de contrôle va aussi s’assurer que l’importateur, le transformateuret/ou ledistributeurfont un usage correct du label octroyé.

Les produits vont ensuite être livrés aux revendeurs finaux. A ce stade, il est intéressant de différencier deux types d’opérateurs : les acteurs de la grande distribution et les commerçants indépendants. En ce qui concerne les premiers, les produits du commerce équitable représenteront généralement une partie limitée de l’offre globale proposée aux consomma-teurs. Dans ce cadre, la présence d’un label garanti par le contrôle d’un organisme extérieur revêt une im-portance primordiale.

Dans le cas du commerce de détail indépendant, le label reste bien entendu une façon rigoureuse et fiable de garantir le respect des standards du commerce équitable, mais d’autres voies pourront aussi être ex-plorées grâce à la relation de confiance qui peut s’éta-blir entre les entrepreneurs et les différentes parties prenantes (producteurs et consommateurs en pre-mier). Nous y reviendrons plus tard.

1.3. Les approches de type « filières » (ou filières intégrées)

ONG, Coopération internationale,...

Pouvoirs publics locaux

Appui logistique,assistance technique,soutien financier...

Organisation petits producteurs

Importateurs,transformateurs

Vente au détail Boutiques spécialisées

Vente au détail Supermarchés

Citoyens Consommateurs

Acteurs de sensi-bilisation, éducation au développement,...

Organes de certification

Service payant

Certifient,contrôlent

Contrôlent la bonne utilisation du label octroyé

Information,événements...

Engagement12

3

9Commerce équitable

In fine, les produits arrivent dans le « panier de la ménagère ». C’est à ce niveau qu’intervient une autre dimension caractéristique du commerce équitable. On l’oublie trop souvent, le consommateur est aussi un citoyen et il a le pouvoir de choisir ce qu’il achète. Outre son fameux « pouvoir d’achat » pour lequel il est tantcourtisé, lecitoyen/consommateurpeutaussis’engager dans des mouvements et des associations qui vont nourrir les débats, sensibiliser et soutenir le développement des producteurs en choisissant de consommer des produits plus équitables. Ces orga-nisations sont, en général, partiellement financées par les pouvoirs publics.

Attardons-nous maintenant sur les double flèches par-tant de la droite vers la gauche (1,2,3).

1.

Le consommateur peut s’impliquer directement dans la chaine commerciale en prenant un rôle actif qui vise à soutenir concrètement le commerce équitable :

• Lafaçonlaplussimpleetlaplusdirecteestbien sûr d’acheter les produits et d’en parler autour de soi pour donner ainsi à sa consommation quoti-dienne une dimension solidaire.

• Lesconsommateurspeuventaussis’orga-niser en groupements d’achats favorisant les pro-duits du commerce équitable parallèlement à ceux des circuits économiques courts et de la production biologique.

• Ilspeuventaussis’engagerpourdesappuisbénévoles concertés avec l’organisation de com-merce équitable.

• Enfin,ilestaussipossibled’investirfinanciè-rement, par exemple en achetant des parts de socié-tés coopératives centrées sur le commerce équitable.

Dans le schéma, la flèche est exclusivement orientée vers les opérateurs indépendants. En effet, les opé-rateurs intégrés dans la grande distribution n’ont qu’une très faible marge de manœuvre pour influen-cer leurs achat soit en sélectionnant eux-mêmes quelques produits, soit en s’efforçant d’influencer les centrales d’achats qui les livrent. De plus, pour eux, le commerce équitable n’est pas le cœur de l’activité économique. Il reste, de toute façon, une préoccupa-tion marginale.

2.

L’opérateur qui pratique la vente au détail est géné-ralement confronté à un faible seuil de rentabilité en raison de ses marges qui sont très étroites. Pour remédier à ce problème, il peut, pour l’un ou l’autre produit, chercher à établir des partenariats avec cer-tains de ses fournisseurs en jouant par exemple un rôle d’intermédiaire commercial qui prospecte de nouveaux points de vente potentiels. Dans d’autres cas, il peut tenter d’installer des filières directes avec certains producteurs afin de diminuer le nombre d’intermédiaires et donc d’augmenter ses marges potentielles.

3.

Quant aux importateurs et transformateurs, ils entre-tiennent généralement des rapports étroits et inscrits dans la durée avec les organisations de producteurs. Cela les amène souvent à partager des expertises techniques mais aussi, parfois, à investir dans ces sociétés de production.

Ces flèches sont orientées dans les deux sens car les informations et les liens humains qui les composent se dirigent aussi vers les consommateurs. Bref, il s’agit de chaînes d’échanges articulées autour d’une confiance réciproque. C’est l’idéal vers lequel tend le modèle économique. L’objectif, c’est que, tout au long de la filière, l’homme et l’environnement soient respectés et qu’aucun maillon n’exige une rentabilité optimale au détriment des autres maillons. Malgré les distances, les différences culturelles et les injustices économiques, il s’agit de démontrer qu’il y a moyen de travailler ensemble et dans le même esprit.

Au cœur de la notion de commerce équitable, il y une relation de confiance à établir et à maintenir tout au long de la filière.

10Commerce équitable

2.1. Importateur et distributeur

Le métier d’importateur est très souvent lié à celui de distributeur. Il s’agit en fait de se positionner entre les organisations de producteurs dans les pays du Sud et les commerces de détail de nos régions.

Repérage, sélection et achats chez les producteurs

En Anglais, on parle aussi de « sourcing ». Il s’agit tout simplement de trouver des fournisseurs qui ré-pondent aux attentes, tant au niveau de la qualité des produits qu’à celui du respect des standards du commerce équitable.

La stratégie la plus simple est de rechercher des pro-duits labellisés. Toutefois, ce n’est pas possible pour tous les produits et dans tous les cas (ceci étant dû, notamment, au coût de la certification, tel qu’expli-qué précédemment). Il peut alors être pertinent de se référer aux organisations et plates-formes locales de commerce équitable pour trouver de nouvelles adresses. Enfin, il est toujours possible d’instaurer un contact direct avec les fournisseurs et d’évaluer avec eux dans quelle mesure il est possible de répondre aux standards du commerce équitable. C’est évidem- ment plus délicat et, parfois, le contrôle est difficile et incomplet. Seules l’inscription dans la durée et la construction progressive d’une réelle relation de con-fiance pourront fournir une garantie réelle.

Soulignons enfin qu’il existe de grandes différences entre les filières alimentaires, généralement bien struc-turées et organisées à large échelle, et d’autres filières, notamment artisanales, pour lesquelles la petite taille des ateliers ou manufactures et la grande diversité des processus et des modes de production imposent un travail au cas par cas.

Transports, frais de douane et TVA

Le transport des marchandises est, le plus souvent, pris en charge par des sociétés spécialisées implan-tées dans les pays d’origine. Certaines sont spécia-lisées dans le fret par bateau, d’autres dans le fret aérien, d’autres encore agissent dans les deux sec-teurs. Généralement, ces sociétés peuvent aussi se charger du transport routier entre le lieu de produc-tion et le lieu d’embarquement pour l’exportation.

Il faut accorder une grande importance à la qualité de l’emballage et du conditionnement des produits afin de limiter au maximum la casse ou la dépréciation. En fonction du volume, du poids et des délais des commandes, il est parfois intéressant de travailler en « groupage », c’est-à-dire de partager un container avec d’autres entreprises.

Une fois la marchandise débarquée à Anvers ou dans un aéroport belge, elle devra passer à la douane. C’est ensuite une société de logistique nationale qui pren-dra le relais pour assurer l’entreposage et la livraison jusqu’à vos locaux. Renseignez-vous précisément auprès de ces sociétés avant tout engagement : à quel moment devez-vous payer ces opérations et quelles

2. LA DIVERsITé DEs MéTIERs Du CoMMERCE équITAbLE

11Commerce équitable

seront les conditions de facturation et de livraison, quels sont les coûts de l’entreposage et les délais pour l’enlèvement, le temps de déchargement dans vos locaux (l’immobilisation du container, les condi-tions de déchargement,…).

Les frais de douane et le paiement de la TVA sont des matières assez complexes et surtout très variables en fonction des pays d’origine, des produits et de la nature de ceux-ci. Ainsi, certains produits qui n’en-trent pas en concurrence avec des productions eu-ropéennes ne sont grevés d’aucun frais de douane. D’autres, par contre, font l’objet de taxes douanières parfois élevées. Elles sont destinées à protéger les productions locales européennes. Cette question doit être posée au cas par cas et les coûts engendrés peuvent varier considérablement.

Enfin, il faut savoir que la TVA est calculée sur la va-leur estimée de la marchandise et sur les frais de douane. Notons au passage que l’administration des douanes se réserve le droit de « corriger » la valeur es-timée de la marchandise en fonction de standards qui lui sont propres. Une fois encore, en cette matière, il vaut mieux prévenir que guérir…

Ces matières requièrent donc une grande attention et le recours aux services de sociétés spécialisées peut parfois s’avérer pertinent.

Distribution : aspects logistiques et commerciaux

Nous ne nous étendrons pas sur le volet de la distri-bution en Belgique. C’est une activité dont l’évalua-tion des coûts doit être bien précise, comme nous le soulignons dans la seconde partie de ce document. La logistique est un métier à part entière et une gestion trop légère de ces questions peut générer des coûts cachés considérables en temps et en frais divers.

Enfin, l’aspect commercial doit aussi être sérieuse-ment réfléchi. En effet, les choix posés généreront aussi des coûts fixes et variables. Il est possible d’organiser un simple entrepôt ou un entrepôt qui est également un point de vente pour les professionnels (« cash and carry »). Le recours à des délégués com-merciaux posera aussi la question de leur statut et de leur mode de rémunération. Il pourra être plus ou moins proportionnel aux ventes qu’ils réalisent. Là aussi, en fonction des secteurs d’activité, il y a des usages et des standards pratiques : vendre du café, des vêtements, des cosmétiques ou une gamme complète d’épicerie ne se décline pas de la même façon.

2.2. Vente au détail

Nous ne parlerons ici que de vente au détail au sein de structures indépendantes. Plusieurs dispositifs peu-vent être mis en œuvre et un même opérateur peut en outre en développer plusieurs simultanément.

• Boutiques• Boutiquescoupléesàunpoint de dégustation Horeca• Venteviainternet• Venteàdomicile• Colisetcadeauxd’entreprise• Venteslorsdemanifestations, foires et marchés.

Sans entrer dans les détails, nous mentionnons ici quelques points d’attention.

Points d’attention transversaux

• Relevéexhaustif,évaluationetmaîtrise des charges fixes.• Volumedetravail«périphérique»: comptabilité, administration, gestion des stocks.• Politiqueetrépartitiondesresponsabilités en matière d’achat.• Attentionportéesurdesgammes de produits avec lesquels il est possible de réaliser des marges correctes.• Plancommunicationetbudgetpromotionnel.

12Commerce équitable

Points d’attention particuliers :

Boutiques

• Emplacement:lieudepassage,visibilité.• Heuresd’ouverture:fonctionduvoisinage et impact sur les charges en personnel.• Choixd’unelignedeforcepourlepointde vente et mise en scène des produits.

Boutiques liées à un point de dégustation Horeca

• Enfonctiondesservicesproposés, un accès à la profession peut s’imposer.• Demême,lerespectdesnormessanitaires (AFSCA) peut influencer considérablement la structure des coûts. • Lefaitdeproposerpareilserviceimpose un plan d’investissement bien réfléchi et la prise en compte de coûts supplémen- taires en matière de personnel.• L’intégrationàl’activité«boutique»doitêtre bien réfléchie : organisation de l’espace, gestion des odeurs.

Vente via internet

• Lacréationetlesuivid’uneboutiqueen ligne est un travail colossal. Il convient de mettre en place un système qui garantisse une maitrise efficace des coûts en matière de technique informatique : gestion de base de données, traitement graphique, back office, payement sécurisé….• Outrel’actionàmenersurlenet,cemode de vente impose une solide organisation pour la gestion de stock et la logistique des commandes, livraisons et retours.

Vente à domicile

• Pratiquéàtitreprincipalouaccessoire, ce dispositif nécessite un équipement de base professionnel pour assurer les nombreux transports et manipulations. • Ilfautaussiêtreéquipéd’unvéhicule utilitaire qui facilite les opérations de chargement et déchargement.• Enfin,sil’objectifestdedéveloppercetype de vente, il faut être conscient qu’il s’agit d’un métier à part entière qui doit intégrer des techniques précises de marketing de réseau. Mettre en œuvre un modèle « Tupperware » ne s’improvise pas.

Colis et cadeaux d’entreprise.

• Pratiquéàtitreprincipalouaccessoire, ce type de vente consiste à construire une offre diversifiée en mettant en avant une bonne connaissance des marchés équitables et la capacité de dénicher les fournisseurs équitables susceptibles de répondre aux demandes des clients. • Parfoisconçusurlemodèledes«paniers bio », il peut aussi s’agir de proposer des colis cadeaux aux entreprises qui veulent remercier des partenaires commerciaux ou leur personnel. Développer ce type de marché demande un travail très important de relations publiques et de prospection bien ciblée.

13Commerce équitable

Ventes lors de manifestations, foires et marchés

• Généralementpratiquéesencomplément d’une autre activité.• Outrelaréalisationd’unchiffred’affaires, ce type de prestation peut aussi inclure une dimension de promotion pour l’activité principale. • Pourévaluercorrectementlecoûtde pareilles opérations, outre la location de l’emplacement, il importe aussi de prendre en compte les frais de déplacement et, le cas échéant, les frais de personnel. La forte diminution, voire la suppression d’un ou plusieurs de ces postes augmentera bien évidemment l’intérêt de l’opération : emplacement gratuit ou peu onéreux, aide de bénévoles, proximité impliquant peu de frais…

Enfin, plusieurs entreprises de commerce équitable ont la particularité d’être étroitement liées à des asso-ciations qui peuvent développer des activités complé-mentaires et utiles pour la bonne santé commerciale de la société chargée de la vente : associations de consommateurs, mouvements d’éducation perma-nente, ONG de coopération au développement, etc.

2.3. stylistes, designer, créateur

Lorsque l’on s’inscrit dans une démarche commer-ciale, l’adéquation de l’offre et de la demande est une condition de base. Dès lors, comment trouver le juste milieu entre cette adéquation nécessaire et le respect d’une tradition souvent porteuse d’un savoir et d’un patrimoine ancestraux ? Cette question est particulièrement pertinente dans le cas des produits artisanaux et manufacturés.

Par ailleurs, nos marchés occidentaux sont aujourd’hui inondés d’objets en tous genres, généralement fabri-qués en très grande série. Vêtements, objets déco, accessoires de mode, bijoux fantaisie, etc. sont pro-posés aux consommateurs soit à des prix très bas, soit sous des grandes marques aux budgets publici-taires colossaux.

En prônant des valeurs telles que le respect de l’homme et de son environnement, l’entrepreneur de commerce équitable doit donc proposer des pro-

duits séduisant tant par leur apparence que par le processus dont ils sont le fruit. De plus, il faut bien entendu rester dans une gamme de prix acceptable. Par définition, il ne pourra pas se situer au niveau des « low cost ». La créativité et la recherche permanente d’une esthétique efficace sont donc des préoccupa-tions prioritaires et, ce, tant au niveau des produits eux-mêmes que de leur emballage ou de leur présentation.

2.4. Transformateur

Dans le cadre d’une approche filière, les questions tourneront autour de la localisation de la valeur ajou-tée. Où va-t-elle se situer ? Au plus près des pro-ducteurs du Sud ? Ou, au contraire, au plus près de l’opérateur final ? La grande diversité des produits concernés interdit bien entendu toute généralisation.

Pommes de terre -> chipsGraines de tagua -> bijoux fantaisieMiel -> nougats, biscuits, bonbons, pain d’épice, etc. Coton -> fil -> étoffe -> vêtementCafé vert -> café torréfié -> padsFruits -> sirops concentrés -> jusLaine -> pelotes -> pulls, écharpes et bonnets

Outre la structure des coûts sur laquelle nous revien-drons quand nous évoquerons la question des prix et des marges, pour répondre à la question posée ci-dessus, le transformateur devra tenir compte de nombreux éléments :

• Lessavoir-faireetlamaitrise de la technologie utile• Lesnormessanitairesettechniques imposées aux produits importés• Laduréedeconservationdesproduits• Lesréglementationsenmatière de taxes douanières• Lespossibilitésdemaitriserlaqualité de la production en fin de processus

« Si tu es bon nageur n’oublie jamais de nager à contre-courant et apprête-toi à manger sou-vent des sardines.»

14Commerce équitable

2.5. Acteur de sensibilisation et d’information

Nous venons de passer en revue différents acteurs d’une même filière qui construisent ensemble des relations de confiance afin de permettre d’améliorer l’efficacité et la qualité d’un produit arrivant au con-sommateur. Parallèlement à tous ces acteurs d’une même filière, il y a tout un travail de sensibilisation destiné à changer les habitudes de consommation des personnes mais aussi des collectivités.

Par des actions diverses (campagnes etc.), les ac-teurs de sensibilisation permettent un changement de regard sur le monde. C’est un processus éducatif, dont le but ultime est le changement de comporte-ments. C’est le moyen d’inviter des groupes de per-sonnes à réfléchir aux conséquences de leurs actes quotidiens, dans le but de tendre vers un monde plus juste et solidaire. Pour ce faire, leur démarche péda-gogique de sensibilisation, aussi appelée « éducation au développement », s’articule autour de 3 axes : l’in-formation, la compréhension et l’action.

Par l’information, le public cible cerne mieux les grands enjeux de développement de notre société, il est sen-sibilisé aux réalités et enjeux socioculturels, politiques, économiques et environnementaux. Cette information permet donc d’amener une première réflexion.

Avec l’aide d’outils pédagogiques variés, les acteurs de sensibilisation visent à soutenir ensuite la réflexion du public en lui permettant d’établir des liens entre plusieurs actions, idées, et pays. Le but est de déve-lopper une vision globale. Les réalités dans lesquelles nous vivons ne sont pas une fatalité. Nos actions ont un impact direct sur le monde. Chacun dispose d’une capacité de faire changer les choses.

La troisième et dernière étape est d’encourager l’ac-tion. Les professionnels de l’éducation au dévelop-pement ont comme mission de proposer des pistes d’actions concrètes, d’informer sur les alternatives exis-tantes, d’encourager les engagements et également de soutenir l’émergence de nouvelles alternatives.

Globalement, l’éducation au développement est le moyen de renforcer les capacités de chacun à s’en-gager dans la construction d’une société plus juste et plus solidaire, un soutien à la prise de conscience, l’apprentissage du rôle de citoyen responsable. Le commerce équitable est une action concrète dans ce sens. Par ses achats, le citoyen consommateur, ou « consomm’acteur », peut donc contribuer concrète-ment au changement.

Les organisations de sensibilisation ou d’éducation au développement sont des structures associatives non marchandes généralement financées, au moins en partie, par des moyens publics. Les règles qui régissent leur fonctionnement financier sont donc dif-férentes des organisations qui participent aux filières commerciales. Mais elles n’en sont pas moins des acteurs économiques à part entière et des parte-naires potentiels pour le développement de synergies en matière de communication.

Quel que soit le métier, l’objectif central de l’en-trepreneur traditionnel est de générer un maxi-mum de profit en écrasant au maximum celui des autres. L’objectif de l’entrepreneur de com-merce équitable est que chacun soit justement rémunéré. C’est un défi colossal et atypique.

« Le commerce équitable doit générer du profit mais le but est de le partager équitablement avec ses partenaires.»

15Commerce équitable

Ces dernières années, les gammes de produits du commerce équitable se sont considérablement diver-sifiées. L’offre globale, qu’elle se situe ou non dans le champ des produits alimentaires, est animée par plusieurs grandes tendances :

• Uneoffrequiintègredeplusenplus les critères « bio ».• Uneaugmentationimportantedesventes dans la grande distribution et donc nécessité pour les circuits plus petits d’affirmer leur spécificité, de se différencier.• Letermegénérique«artisanat»est progressivement remplacé par une approche plus spécifiquement liée au type de produit : on parlera donc « d’objets déco », de vêtements, d’accessoires de mode, de cosmétiques, de jeux et jouets, de produits de soins du corps…

Il faut aussi savoir que certains produits peuvent être plus « polémiques » que d’autres auprès de certains consommateurs. C’est le cas de ceux qui sont par ailleurs développés en Belgique (asperges, miel, pommes de terres, etc.). Il peut aussi s’agir de ceux quipourraient/devraientseprêteràuneconsomma-tion dans le pays de la production (par exemple la qui-noa), ou encore de ceux qui ont des conséquences environnementales néfastes lors de leur production (parexemplelesroses)et/oudeleurtransport,sur-tout quand il est aérien. Dans ce contexte, il peut être intéressant d’imaginer des produits mixtes à base d’ingrédients venant du Sud et du Nord comme par exemple des jus multi-fruits.

Enfin, les produits issus du commerce équitable n’échappent pas à la tendance générale qui requiert un très haut niveau de qualité tout en s’inscrivant dans un processus d’accélération des modes et des tendances. Les consommateurs occidentaux sont de plus en plus exigeants et même, dans certains cas, de plus en plus « capricieux » dans la mesure où ils se lassent très vite et demandent sans cesse de la nouveauté. Cette tendance lourde est parfois difficile à concilier avec les engagements de partenariats à long terme qui caractérisent les entreprises inscrites dans les standards du commerce équitable.

3. LA DIVERsITé DEs PRoDuITs Du CoMMERCE équITAbLE

Nous sommes des consommateurs gâtés et exi-geants, hyper sensibles à l’image et au matra-quage médiatique. Nos goûts sont très chan-geants. Nous voulons toujours du neuf. Nous avons souvent perdu le sens de la valeur réelle des choses… Pas étonnant que le commerce équitable soit difficile…

« Pratiquer le commerce équitable est un vrai défi. Pour le relever, il ne faut pas hésiter à utiliser des outils professionnels.»

16Commerce équitable

3.1. Produits alimentaires : matières premières et produits transformés

Historiquement, le café, les bananes, le thé, le cacao comptent parmi les produits phares du commerce équitable et ils jouissent aujourd’hui encore d’un poids important pour soutenir la croissance des ventes. Plus récemment, la vente de riz, de quinoa et d’autres céréales utilisées pour l’alimentation de base se dé-veloppe de façon significative. Dans bon nombre de pays producteurs, cette évolution pose parfois des questions complexes : comment atteindre et mainte-nir un bon équilibre entre la nécessité d’une autosuf-fisance alimentaire et le besoin des revenus générés par l’exportation ?

Nous l’avons évoqué en parlant du métier de « trans-formateur », la gamme des produits « fair trade » se diversifie aussi par l’arrivée sur le marché de produits transformés beaucoup plus complexes dans la me-sure où ils sont composés de nombreux ingrédients. Se pose alors la question de la proportion minimale de produits issus du commerce équitable entrant dans le processus de fabrication. De nombreuses questions concrètes se posent à cet égard au sein des organismes de certification. Par exemple, des yaourts aux fruits pour lesquels seule la matière sèche (fruits lyophilisés) est labellisée, des biscuits ou des pâtes à tartiner où seule une partie des ingrédients est « fair trade »…

Rappelons aussi ici que de plus en plus de transfor-mateurs s’efforcent aujourd’hui de répondre aussi aux cahiers des charges des produits biologiques afin de pouvoir afficher les deux labels.

3.2. Vêtements et accessoires de mode

Vu leurs prix, ces produits se situent souvent dans un segment de marché très proche de celui des collec-tions de marque sans pour autant avoir des moyens promotionnels semblables. En outre, le vêtement et les accessoires de mode (sacs, bijoux, foulards, écharpes, chapeaux, bonnets, etc…) se situent dans des marchés très sensibles aux tendances, aux modes et aux saisons.

Par ailleurs, et même si, en termes de qualité, il y a des différences colossales, c’est aussi un secteur où les ventes à bas prix exercent une pression phénoménale.

Les collections de commerce équitable doivent donc se démarquer et atteindre d’emblée un niveau de qualité très élevé.

3.3. objets déco, jouets, vaisselle…

Au cœur même de ce que l’on appelait traditionnelle-ment « l’artisanat », en période de crise économique, la vente de ce type d’objets rencontre aujourd’hui de sérieuses difficultés. Il est difficile de faire la part des choses entre des objets que l’on peut acheter en va-cances et des objets que l’on peut acquérir dans une boutique près de chez soi. Le type d’achat, et donc les produits qui en font l’objet, sont fondamentale-ment différents.

De plus, là encore, la très forte concurrence des objets produits industriellement en très grande série donne au consommateur une idée fausse de la valeur des choses. Il devient alors parfois très difficile de justifier le fait que l’objet artisanal ou manufacturé en petite série dans les règles du commerce équitable coûte le double ou le triple du prix. La qualité de l’objet en lui-même et bien entendu aussi celle de la démarche dont il est le fruit ne suffisent pas toujours à justifier l’écart. Du coup, toute une série d’objets ne seront tout simplement plus proposés aux consommateurs car ils ne se vendront pas à cause de leur prix élevé…

3.4. Cosmétiques et soins du corps

Plusieurs gammes se développement aujourd’hui avec une forte tendance à proposer des produits à la fois bio et équitables. La valeur ajoutée peut être importante mais l’exigence de qualité se place à un niveau très élevé et ce tant au niveau des substances elles-mêmes qu’à celui de leur packaging et de leur présentation.

Les approches de type bio centrées sur le res-pect de l’environnement et celles du commerce équitable centrées sur le respect des droits hu-mains dessinent ensemble le commun dénomi-nateur d’une économie aux valeurs nouvelles.

17Commerce équitable

3.5 De nouveaux champs d’application pour le commerce équitable ?

Vers la production de services équitables. 

Parallèlement à la diversification des produits, d’autres mouvements se développent aujourd’hui dans des secteurs davantage considérés comme des services. Il y a d’évidents points de convergence avec les va-leurs de référence du commerce équitable. Ils ne de-mandent qu’à être formalisés.

• Letourismeéquitablequiviseàprocurer des revenus directement aux collectivités locales des pays visités et à promouvoir des échanges entre personnes. • Lamusiqueconçueetdiffuséedans un souci de respect des artistes : disques, concerts, téléchargements,…• Lecinémaetlethéâtregrâceà des réalisations centrées sur le respect et la promotion des différences culturelles et qui visent à générer une rémunération équilibrée pour chacun.

Vers un commerce équitable qui pourrait aussi être sur un axe local « nord/nord » ou «sud/sud».

En y regardant de plus près, il y a bien des points communs entre les situations que vivent les agri-culteurs ou les artisans de par le monde. Certes les contextes et les niveaux de vie sont différents mais d’un côté à l’autre de la planète, les mêmes méca-nismes ont tendance à se reproduire : de petits opé-rateurs soucieux du respect des humains et de leur environnement tentent de sauvegarder un maximum de diversité face à la tendance lourde qui pousse à la production de masse et à la standardisation.

Aux quatre coins du monde, il y a des agriculteurs et des artisans qui luttent pour survivre dans un pay-sage économique de plus en plus dominé par des sociétés multinationales prêtes à tout pour atteindre les objectifs de rentabilité fixés par leurs investisseurs.

C’est sur la base de ces constats qu’un vaste chan-tier de solidarité pourrait aujourd’hui s’ouvrir. Il y a un commun dénominateur entre les planteurs de café d’Amérique latine, les cultivateurs de coton d’Afrique, les maraîchers bio de Wallonie et les artisans actifs dans toutes les parties du monde. La formalisation et l’affirmation de ces solidarités sont certainement un des plus beaux et des plus forts enjeux pour les années et décennies à venir.

Pourquoiletravailréalisésurl’axedesolidarité«Nord/Sud » ne pourrait-il pas se décliner aussi au sein de notre tissu socio-économique local ?

Le commerce équitable est avant tout un mouve-ment. Son chemin se découvre et se crée au fil de la marche.

18Commerce équitable

4.1. Les opérateurs commerciaux en belgique

Nous l’avons souligné à plusieurs reprises, le marché du commerce équitable en Belgique est en plein dé-veloppement et l’offre se diversifie considérablement. • Denouveauxproduitslabellisésapparaissent chez des fournisseurs qui ne sont pas spé- cialisés en commerce équitable.• Aucœurde l’Europe, laBelgiqueestaussi un marché très ouvert et donc un bon obser- vatoire de ce qui se développe dans les pays voisins. • De plus en plus de produits obtiennent la double certification « bio-équitable ».• Une réflexion est en cours à propos du concept de commerce équitable développé sur une base locale dans nos régions. • De petits opérateurs, entreprises et ONG développent des filières directes avec des artisans indépendants un peu partout dans le monde.

Il est donc très difficile de donner un aperçu exhaustif des entreprises qui pratiquent le commerce équitable que ce soit à titre principal ou à titre accessoire.

Pour rester dynamique, l’entreprise de commerce équitable devra donc développer une politique d’achat caractérisée par une grande attention portée aux in-novations. Voici quelques site sur lesquels il est pos-sible de trouver des informations intéressantes.

www.befair.be

Le Trade for development centre de la CTB (Agence belge de développement) a pour objectif l’émancipation écono-mique et sociale des petits producteurs du Sud, à travers leur professionnalisa-tion et l’accès aux marchés. Il travaille

sur trois axes : l’appui aux producteurs, le centre d’expertise qui constitue une plate-forme d’échange et de diffusion d’informations, et la sensibilisation. Le site fournit une multitude d’informations sur le commerce équitable dont les listes des systèmes de garantie du commerce équitable, des organisations belges de commerce équitable ainsi que des maga-sins et réseaux de distribution engagés.

www.equidurable.be

Annuaire en ligne du commerce équitable et durable. Tous les com-merçants qui proposent des articles

issus du commerce équitable ou des services de commerce durable s’y trouvent. Le site propose en plus un lien vers la politique de l’Union européenne en matière de commerce équitable.

www.maxhavelaar.be

Fairtrade Max Havelaar est un orga-nisme de certification du commerce équitable. Le label Max Havelaar est octroyé aux produits qui répondent aux critères internationaux du com-

4. LEs ACTEuRs bELgEs Du CoMMERCE équITAbLE

19Commerce équitable

merce équitable. Le site possède une base de données avec les listes des produits labellisés Max Havelaar ; des détaillants et boutiques Fairtrade ainsi que des fournisseurs de produits issus du commerce équitable.

www.salonyourchoice.be

Ce salon a pour objectif de faire dé-couvrir la diversité et la qualité des

produits équitables, bio et locaux aux collectivités qui veulent s’engager pour une alimentation durable. La liste des fournisseurs et associations présents au salon est disponible sur le site.

www.laguilde.be

La Guilde des commerçants pour le développement durable et solidaire est un rassemblement de commerçants et d’entreprises qui développent une activité économique basée sur la so-lidarité, le respect de l’homme et de

l’environnement. Le site propose une liste de ses membres.

www.saveurspaysannes.be

Saveurs Paysannes assure la pro-motion et la défense de l’agriculture paysanne, à travers des réseaux lo-caux. Producteurs paysans, artisans, restaurateurs, consommateurs sont

associés dans une démarche de réflexion et d’action pour un commerce plus équitable, de qualité et de proximité, qui privilégie le circuit court. Une de ses missions est de mettre les fournisseurs en réseau.

www.bioforum.be

BioForum Wallonie rassemble les représentants des produc-

teurs, transformateurs, distributeurs, points de vente et consommateurs bio et coordonne leurs initiatives. Elle est reconnue depuis 2004 comme conseil de filière représentant l’agriculture biologique. Une base de données des opérateurs belges bio est disponible sur le site, ainsi qu’une liste des labels.

www.ecoconso.be

Réseau d’associations actives, les unes dans le domaine de

l’environnement, les autres en matière de protection des consommateurs. Ecoconso aide concrètement les consommateurs à adopter des comportements plus durables et équitables. L’approche par produit peut permettre de découvrir des fournisseurs intéressants.

www.btft.be

The Belgian Fair Trade Federation est la Fédération belge du com-merce équitable. Elle est la plate-

forme d’échange et l’organisme représentatif du sec-teur. Elle regroupe actuellement des organisations francophones de commerce équitable répondant aux standards WFTO. Elle fonctionne via un processus d’adhésion volontaire. Comme son nom l’indique, sa volonté est de travailler aussi avec des organisa-tions flamandes.

4.2. Les structures institutionnelles belges et internationales

Les sites ci-dessous sont des portes d’entrée inté-ressantes, ils vous donneront aussi accès à d’autres adresses.

Trade for Development Centre : au sein de la CTB, l’agence belge de développement www.befair.be

Belgian Fair Trade Federation : fédération belge (section francophone) des organisa-tions de commerce équitable – www.bftf.be

Max Havelaar Belgique : labellisateur historique en Belgique www.maxhavelaar.be Membre belge de FLO (Fairtrade Labelling Organi-zations International), coupole internationale de la labellisation

Ecocert :certification équitable – www.ecocert.com

World Fair Trade Organization : réseau mondial d’organisations de commerce équi-table – www.wfto.com

19Commerce équitable

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DEuXIEME PARTIECréer une entreprise inscrite dans les standards du commerce équitable, réfléchir et rédiger un plan d’affaires

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21Commerce équitable

Introduction

La création d’une entreprise ou la réorientation d’une entreprise existante com-mence par une réflexion et une structuration théorique : qu’est-ce que je veux faire, quel métier vais-je pratiquer, avec qui vais-je travailler, dans quel but, avec quels moyens. Quelles sont les opportunités et les menaces que je suis susceptible de rencontrer dans mon environnement ? Quelles sont mes forces et mes faiblesses internes ? Il s’agit en fait de démontrer que l’idée qui sous-tend le projet d’entre-prise est pertinente et économiquement viable. Il s’agit aussi de prouver que le porteur de projet a réfléchi aux implications de son initiative et qu’il est bien armé pour atteindre les objectifs qu’il se fixe.

Très souvent, l’entrepreneur en commerce équitable est animé par une volonté idéologique forte et il doit donc prendre garde à accorder toute l’importance méri-tée à la viabilité économique de son projet. Il en va de même pour le choix et la présentation des produits : le fait qu’un objet soit produit dans un cadre intéressant au point de vue humain n’est pas une condition suffisante pour le vendre.

Le plan d’affaires est le document qui va développer tout cela. Il est le document qui présente et analyse les choix posés et les conclusions de faisabilité. Ce sera la première carte de visite de la future entreprise. Il servira à convaincre partenaires ou investisseurs potentiels. Le plan d’affaires sera aussi utile pour négocier des crédits avec les banquiers ou d’autres bailleurs de fonds. Bien entendu, et c’est probable-ment là l’essentiel, il sera aussi très utile au gestionnaire de l’entreprise pour mettre en œuvre son projet, prioriser les actions à mener et se souvenir dans le futur de la raison des choix qu’il a effectués. En outre, cet exercice de rédaction est un excel-lent moyen pour clarifier et organiser ses propres idées ou celle d’un petit groupe.

L’élaboration d’un plan d’affaires est un travail exigeant et parfois de longue haleine. Sa réalisation est un processus fait d’essais et d’erreurs où plusieurs révisions sont parfois nécessaires avant d’obtenir un document cohérent.

Un plan d’affaires est aussi un document professionnel. Nous vous conseillons donc de le développer en suivant une approche :

• claire et précise : évitez les généralités ou le jargon trop technique. • concise : concentrez-vous sur les points importants et complétez votre texte par des annexes. Essayez de vous limiter à 20-40 pages.• concrète et rigoureuse : expliquez, au niveau opérationnel, quand et comment vous allez vous lancer.• convaincante : votre document doit séduire le lecteur tout en restant objectif.

22Commerce équitable

Il est souvent tentant d’être délibérément optimiste et de partir du principe que tout se déroulera exactement comme prévu. La réalité montre toutefois que c’est rarement le cas. Soyez donc prudent :

• Faitesuneanalysesérieusedesrisquesdevotreprojetetprévoyezdes marges de sécurité dans vos budgets et votre calendrier. • Vouspouvezaussidéfinirvosobjectifsenhypothèses(hautesetbasses). Cela donne alors une « fourchette » dans laquelle vous vous efforcerez de rester. Ce type d’évaluation peut montrer un certain réalisme économique, ce qui est toujours une bonne chose.• Avotreusage,imaginezégalementun«scénariocatastrophe»etexami- nez-en toutes les conséquences, en particulier financières, pour mesurer le risque maximum encouru et le circonscrire.

Comme nous l’avons développé dans la première partie de notre document, la création d’une entreprise inscrite dans les standards du commerce équitable est un défi supplémentaire et la prise de risque en est donc renforcée. Cet état de fait doit être compensé par une grande rigueur et un grand professionnalisme dans l’analyse du projet, ses prévisions financières et bien sûr finalement dans la gestion à venir de l’activité. Via des agences-conseil en économie sociale ou même en faisant quelques recherches sur Internet, il est possible de trouver des modèles de plans d’affaires qui reprennent les grands titres et donnent des explications générales très utiles sur le processus d’étude d’un projet économique. Le présent document ne reprendra donc pas systématiquement l’entièreté de ces éléments, laissant à l’entrepreneur le soin de choisir lui-même le canevas qui convient le mieux à son entreprise.

Par contre, nous mettrons l’accent sur les éléments spécifiques au commerce équitable dans la mesure où ils impliquent des choix de gestion particuliers. Enfin, un plan d’affaires n’est pas un document qui s’écrit et se pense façon stric-tement chronologique. Au fur et à mesure de l’écriture, les idées se modifient. Ce sont donc de nombreux aller-retour et des réécritures successives qui donneront in fine un document cohérent et complet. Bien évidemment, toutes ces explica-tions ont un caractère confidentiel et il est d’ailleurs parfois plus prudent, dans un premier temps, de n’en montrer qu’un résumé. L’ordre dans lequel nous avons choisi de vous présenter nos réflexions est aussi un choix rédactionnel qu’il vous appartient bien entendu de modifier.

La création d’une entreprise ins-crite dans les standards du com-merce équitable est un défi sup-plémentaire et la prise de risque en est donc renforcée.

« En phase de démarrage, il est généralement assez difficile de vivre complètement de son acti-vité de commerce équitable. »

23Commerce équitable

1.1. Le résumé du projet

Le résumé est une partie essentielle du plan d’affaires. Beaucoup de lecteurs ne se donneront pas la peine de lire l’entièreté de votre plan ! Ils commenceront toujours par chercher le résumé. En deux pages maxi- mum, il s’agit donc de convaincre le lecteur de la qua-lité de votre projet. Vous y résumerez les faits saillants et les chiffres clés de votre entreprise.

Bien que placé en tête du plan d’affaires, le résumé s’écrit bien sûr à la fin de la démarche, lorsque l’en-semble des données du problème sont connues.

Derrière les objets vendus, il y a des valeurs fonda-mentales que vous voulez développer. Dans vos dé-monstrations vous devez à la fois faire preuve de pro-fessionnalisme et de réalisme. Les entrepreneurs qui posent le choix du commerce équitable ont souvent tendance à négliger les impératifs économiques lors de la présentation de leur projet. Ce genre de déséqui-libre peut nuire à la crédibilité du projet.

1.2. Le(s) promoteur(s)

Les promoteurs ou les porteurs du projet sont un des éléments fondamentaux puisque le succès de l’entre-prise repose sur leurs épaules. Leurs compétences, leurs motivations, leurs complémentarités feront donc l’objet d’une analyse pointue et d’une présentation complète.

• Qui va diriger ou coordonner le projet : ges- tion quotidienne, partage des responsabilités, processus de décision ?• Quellessontlesqualificationsetexpériences utiles du ou des porteurs ? • Pourquoi et comment ferez-vous appel à des ressources extérieures ?• Comment est évaluée la prise de risque ? Tous les promoteurs sont-ils bien au fait ? • Commentsituez-vouscenouveaudéfipar rapport aux autres pôles de votre vie privée : famille, amis, loisirs, formation ? ,…

1. LA PRésEnTATIon Du PRojET DAns son ConTEXTE

L’entreprise repose avant tout sur les épaules de ceux qui la font vivre.

24Commerce équitable

1.3. Les fournisseurs et partenaires privilégiés

La notion de partenariat se trouve au cœur même du concept de commerce équitable. L’accès à de meil-leures conditions d’existence pour les petits produc-teurs actifs dans les pays du Sud est un objectif priori-taire pour l’entrepreneur qui agit dans les standards du commerce équitable. De plus, les liens commer-ciaux avec les producteurs s’inscrivent dans la durée. La fixation des prix fera donc l’objet d’une négociation qui visera à établir, et à maintenir, des liens durables entre les partenaires. Bien entendu, en fonction de leur positionnement au sein de la filière commerciale, tous les opérateurs ne sont pas, pour tous leurs pro-duits, en lien avec des producteurs actifs dans les pays du Sud. Mais dans tous les cas, ce choix a des répercussions importantes pour chacun, notamment en matière de prix et de délais de livraison.

Outre ladimensionNord/Sud, ledéveloppementdepartenariats doit aussi concerner les dynamiques mises en place dans nos régions. La densité et la qualité du tissu social et économique dans lequel la société va se situer revêt donc aussi une grande im-portance. La richesse de ce tissu est aussi un gage de cohérence.

• Comment intégrez-vous les standards ducommerce équitable dans vos partenariats commer-ciaux (préfinancement, délais et volumes de com-mandes…) et quelles conséquences concrètes cela peut-il avoir sur votre gestion quotidienne ?

En vous référant aux standards internationaux énon-cés dans la première partie de ce document, il est essentiel de décrire concrètement la nature et le fonc-tionnement des différents partenariats qui seront mis en place. Il est par ailleurs important d’insister sur le réalisme économique des partenariats établis. Affir-mer l’objectif « humaniste » de l’entreprise est impor-tant, mais cela ne doit pas se faire aux dépens de l’équilibre économique de l’entreprise. Nous y revien-drons plus loin, mais nous pouvons d’ores et déjà pointer trois éléments auxquels il faut accorder une attention particulière :

• L’impactdupréfinancementsurlatrésorerie de la société.• Les procédures de contrôle qualité pour garantir une fiabilité dans la durée.• Ladifficilequestiondesmargesbénéficiaires qui doivent permettre une viabilité de l’entre- prise malgré les lourdes charges qui pèsent sur elle.

• EnBelgique,quelssont lespartenariatssur lesquels vous allez vous appuyer ? De quel réseau disposez-vous ? (clients, fournisseurs, partenaires techniqueset/ou financiers, fa- mille, amis…) • Quepeutvousapporterceréseau?• Oùetcommentirez-vouschercherlescom- pétences qui vous seront nécessaires ?

De nombreuses entreprises de commerce équitable s’appuient sur des liens particuliers et des collabora-tions de toutes sortes pour atteindre leurs objectifs. Bien entendu, il n’y a pas de recette miracle, mais les expériences développées par d’autres peuvent don-ner des idées :

• Unesociétécoopérativedontundesfonda- teurs est une ASBL chargée de faire de l’in- formation et de la sensibilisation au commerce équitable ou à la consommation responsable. • Plusieurspetitesstructures indépendantes qui rassemblent leurs forces pour mettre en place un point de vente commun.• Unesociétéquis’adosseàungroupeplus fort actif dans un pays voisin et qui déve- loppe le marché belge.• Desadministrateursbénévolesquiviennent en appui des travailleurs salariés.• Uneéquipedebénévolesquiappuiediffé- rentes actions de façon ponctuelle, au travers d’une ASBL, le cas échéant, pour rechercher des budgets d’animation. • Unesociété«mécène»quisoutientledéve- loppement d’une entreprise à finalité sociale.• L’obtention d’aides publiques spécialisées pour l’économie sociale en développant une structure qui réponde à ces critères, les philo- sophies d’action étant liées.• Lechoixd’une rémunération trèsmodeste posé par des entrepreneurs « militants ».

Certains de ces éléments doivent probablement faire partie de vos « plans B ». A vous de juger s’il est inté-ressant de les mentionner dans votre plan d’affaires.

La notion de partenariat se trouve au cœur même du concept de commerce équitable.

25Commerce équitable

1.4. La forme juridique

Le choix d’une forme juridique se pose bien enten-du pour toute entreprise, mais il peut prendre des accents particuliers lorsqu’il s’agit d’une entreprise de commerce équitable. Quelle dimension collective la société veut-elle mettre en œuvre ? Souhaite-t-elle rentrer aussi dans les critères de l’économie sociale ? Selon quelles priorités les futurs profits seront-ils répartis ?

La forme juridique qui sera choisie aura des consé-quences importantes en matière de prise de décision, de responsabilité, de fonctionnement et d’évolution potentielle de l’entreprise. Cette question demande une réflexion approfondie.

Le choix de la forme juridique commence avec un choix philosophique sur la nature et la finalité du projet (fina-lité de profit ou sociale ?), mais le besoin d’investisse-ments et de fonds de roulement jouera lourdement (si vous devez faire des investissements, comment faire pour trouver l’argent nécessaire en ASBL ? Comment capitaliser en fonction du besoin identifié dans le plan financier ?). Le nombre de partenaires sera également un facteur d’influence (projet individuel ou collectif), mais aussi le secteur d’activité (dans certains secteurs la SA est une nécessité de crédibilité, dans d’autres elle sera un gage de méfiance).

La question de base tourne par ailleurs autour de la notiondepouvoir/gouvernanceauseindel’entre-prise : qui va décider, comment et avec quelle légi-timité ? Le pouvoir de décision sera-t-il strictement

proportionnel au montant investi ? Chaque forme juri-dique aura un impact sur cette question car certains modèles ont des spécificités, des dispositifs particu-liers, des contraintes, etc.

Du fait de la proximité philosophique avec le secteur de l’économie sociale, une réflexion pourra être enta-mée sur la manière dont votre entreprise ou associa-tion entend intégrer statutairement et concrètement l’ensemble des critères de l’économie sociale ou encore ceux de la société à finalité sociale (Code des Sociétés – Livre X). Cette décision engendrera le cas échéant d’autres questions sur le modèle de gestion de l’entreprise et vous permettra, ou non, d’accéder à des institutions financières dédiées à l’économie sociale.

Comparaison des principales formes juridiques

ASBL SCRL SCRL FS SPRL SA

Constitution Sous seing privé Acte authentique (notarié)

Nbre minimum d’associés

3 membres 3 3 3 ou 1 (SPRLU - star-

ter)

2

Capital - 18.550 € 6.150 € 18.550 € 61.500 €

Activités Ni commerciale ni industrielle - commerciale accessoire - De plus en plus de reclassement ISoc

Toutes Toutes, mais à vocation sociale

Toutes Toutes

26Commerce équitable

Finalement, le choix de la forme révèle surtout un nombre important de complexités et surtout d’impli-cations. A nouveau, pour cette question, adressez-vous à une agence-conseil en économie sociale pour qu’elle vous aide à choisir au mieux le modèle qui vous convient et qu’elle vous en explique les incidences. Une autre option est bien entendu de vous tourner vers les spécialistes du droit que sont les notaires et les juristes/avocats. Ilestenoutre intéressantderappeler qu’en principe, les conseils dispensés par les notaires sont gratuits.

Economie sociale

Ni secteur privé classique, ni secteur public, l’économie sociale est généralement considérée comme un troisième secteur, un espace hors des étiquettes traditionnelles où économique rime avec éthique, solidarité et humanisme.

Selon la définition du Conseil wallon de l’écono-mie sociale, « Le secteur de l’économie sociale recouvre les activités économiques exercées par des sociétés, principalement coopératives, des mutualités et des associations, dont l’éthique se traduit par le respect de quatre grands principes :

1. la finalité de service aux membres ou à la collectivité plutôt que le profit ;2. l’autonomie de gestion ;3. le processus de décision démocratique ;4. la primauté des personnes et du travail sur le capital dans la répartition des revenus.»

Si on ajoute à ces critères le respect de l’envi-ronnement, on peut parler de développement durable.

• Quelleformejuridiqueetpourquoi?Indépen- dant (personne physique) ou société (SPRL, SA, SC, ASBL). Finalité sociale ou pas ?

1.5. Le marché

Quel est le contexte dans lequel l’entreprise va évo-luer et sur quel marché serez-vous actif ? Comment se positionne la concurrence et quelles sont les grandes tendances (évolution des attentes et des comportements du public-cible, multiplication des concurrents,…)?

Il faut donc réaliser une analyse précise du marché. C’est elle qui, dans un premier temps, va évaluer la faisabilité du projet. Commencez par une brève des-cription qualitative du marché de façon à fixer les balises de l’environnement dans lequel vous allez évoluer. Ensuite, vous devrez entrer plus dans les détails, en commençant par une analyse de la taille et de la croissance historique et potentielle du marché en question. Vous en retirerez ensuite les grandes tendances. Des justificatifs viendront en appui, dé-crivant la situation présente et extrapolant les évo-lutions futures à court et moyen terme. L’utilisation de graphiques peut aider à réaliser des synthèses pertinentes.

« Entreprendre en commerce équitable, c’est construire une équipe et pêcher un maximum d’informations, par exemple auprès des acteurs existants. »

27Commerce équitable

27Commerce équitable

La sympathie bienveillante des passants est vaine si elle ne se traduit pas par des actes concrets d’achat.

Pour bien préciser qui est qui…

Le consommateur, c’est le citoyen que l’on considère par rapport au rôle de consom-mation qu’il joue dans la filière économique.

L’acheteur, c’est le consommateur qui a décidé de passer à l’action : il dépense de l’argent pour obtenir en échange un bien ou un service.

Le client, c’est l’acheteur qui, en accom-plissant son acte d’achat a choisi les biens et/oulesservicesproposésparlevendeur.Il entre ainsi dans un lien avec ce dernier qui l’appellera d’ailleurs « son » client.

Le prospect, c’est, du point de vue du vendeur, un consommateur qu’il souhaite informer afin qu’il achète ses biens et/ouservices et qu’il devienne ainsi son client.

Votre offre correspond à un besoin, qui concerne ra-rement l’ensemble de la population. Précisez les cri-tères de sélection de vos prospects, avec leur poten-tiel d’achat et la manière dont vous allez opérer pour les sensibiliser. Une fois le besoin déterminé, vous allez alors décrire le processus de vente.

Attention, dans une description de marché, vous de-vez aussi inclure un panorama précis de la concur-rence, en y indiquant le niveau de concurrence et de compétition. Vous devrez faire apparaître les avan-tages compétitifs dont disposent vos concurrents, leurs volumes et leurs prix de ventes, les caractéris-tiques de leurs produits, leurs publics-cibles et leur positionnement.

Dans la mesure du possible, il est bien entendu pri-mordial d’avoir des informations précises sur leurs marges, le chiffre d’affaires généré lors du dernier exercice, leurs objectifs, etc. Il est bien évident que de futurs éventuels concurrents ne vont pas vous donner ces renseignements sur simple demande… Pour obtenir pareilles informations, de futurs fournis-seurs, des opérateurs actifs dans d’autres régions ou des agences-conseil peuvent être de bonnes sources d’information.

Cette analyse devra indiquer les forces et les faiblesses de chacun d’entre eux, leurs chances et leurs risques, leurs stratégies, leurs parts de marché et leur méthode de marketing. S’inspirer du meilleur de chaque entre-prise peut être une façon judicieuse de s’imposer.

Le volet « équitable » est bien entendu un élément im-portant de cette analyse, mais il faut prendre garde à ce qu’il n’occupe pas toute la place. L’approche « produit » et l’évaluation la plus juste possible des perspectives réelles de marché sont essentielles. Le fait d’entrer dans les standards du commerce équi-table n’est en rien une garantie de réussite. Bien qu’encourageante, la sympathie bienveillante des pas-sants est vaine si elle ne se traduit pas par des actes concrets d’achat.

Il sera aussi nécessaire pour le porteur d’un projet en commerce équitable de bien analyser la concurrence indirecte. Par concurrence indirecte, il faut entendre toutes les opportunités que peut avoir le client de dépenser de l’argent ailleurs que chez vous soit dans des gammes de produits proches ou dans le cadre d’une proximité géographique. Les entrepreneurs en général et ceux du commerce équitable en particulier ont souvent tendance à sous-estimer ce type d’effet.

De nombreuses sociétés de services proposent de réaliser des études de marché et un regard profes-sionnel bien calibré peut effectivement être un plus. Si l’on a les moyens de recourir à pareil service, il est dif-ficile de faire le tri car les tarifs pratiqués, la pertinence des prestations proposées et le sérieux des entre-prises en question peuvent être très variables. Le recoursàdesconseilsextérieurset/oudescontactspréalables avec d’autres clients peuvent aider à po-ser le bon choix.

Le marché

Taille, état de développement (en émergence, crois-sance, maturité ou déclin), fonctionnement, ten-dances…

Les clients

Il faut essayer de cerner leurs préférences (leur « goût »), leur localisation. S’agit-il d’une clientèle pri-vée, publique, associative ? Espérez-vous des clients plus importants, comment allez-vous essayer de les fidéliser ? Vente directe ou facturation ?

28Commerce équitable

La concurrence

Il est toujours utile de collecter un maximum d’infor-mations à propos de ses concurrents. Qui sont-ils ? Que font-ils ? Où sont-ils situés ? Quelles sont leurs forces ? Leurs faiblesses ? En cette matière, il s’agit véritablement de mettre en place en place un dispositif de veille active tout au long de la vie de l’entreprise.

1.6. Votre offre

Pourquoi choisir votre entreprise plutôt qu’une autre ? Il faut mettre en avant tous les éléments qui vous dé-marquent des concurrents et la façon dont ils seront mis en avant. C’est ici que vous devez placer votre conception du commerce équitable et la façon dont vous allez communiquer à cet égard.

un produit de qualité

• Descriptiondétailléeduserviceoudespro- duits, en quoi sont-ils originaux ?• Qu’est-cequiledifférencie?• Comment allez-vous mettre en valeur ses avantages ? • Commentpourra-t-ilévoluerets’adapteràla demande des consommateurs ?

un produit de qualité… inscrit dans les standards du commerce équitable

• Comment allez-vous affirmer votre volonté d’intégrer les standards du commerce équi- table ? • Cette référence fera-t-elle partie intégrante de votre promotion ou, au contraire, allez- vous choisir une approche plutôt centrée sur le produit ou le service proposé en plaçant la référence au commerce équitable en seconde ligne ? • Si vous intégrezdesproduits locaux,com- ment allez-vous argumenter ces choix ?

Pourquoi choisir votre entreprise plutôt qu’une autre ?

« Une bonne campagne de communication pour faire connaitre l’image de l’entreprise et faire vendre ses produits est un atout essentiel. »

29Commerce équitable

2.1. La stratégie et le positionnement de l’entreprise

Quelle est la stratégie de l’entreprise, quels objectifs veut-elle atteindre ? Vous devez inscrire la vision à moyen terme du projet, ce qui va vous permettre d’en déduire la stratégie commerciale, en précisant les res- sources et mesures qui vont être retenues afin d’at-teindre ces objectifs. Il s’agit aussi ici de préciser votre spécialité, la spécificité de votre projet à partir notam-ment de l’analyse de la concurrence.

Pour mener une analyse rigoureuse des forces et fai-blesses de l’entreprise conjuguées avec celles des menaces et opportunités générées par son environ-nement, il existe un petit outil simple à utiliser. En an-glais, les spécialistes parlent de la « SWOT analysis » (Strengths - forces, Weaknesses - faiblesses, Oppor-tunities - opportunités & Threats - menaces). Pour une lecture facile, on présente généralement cette analyse en cases disposées en carré.

Grâce à cette grille et en la soumettant à d’autres personnes bienveillantes de votre entourage pour la compléter, il est possible de mieux identifier ses points forts, mais aussi de mesurer l’ensemble des risques. Cela permet de mieux anticiper, de prévoir ou de contourner certains problèmes.

Par définition, une entreprise est directement confron-tée à des changements qui peuvent affecter son pro-cessus de fonctionnement ou le marché sur lequel elle est active. Elle devra donc sans cesse adapter sa stratégie commerciale. L’entrepreneur en commerce équitable doit être doublement attentif : d’une part, il doit suivre les évolutions du métier et du marché dans lequel il est actif ; d’autre part, il doit aussi rester attentif au secteur du commerce équitable qui, lui-même, vit des évolutions importantes comme nous l’avons souligné dans la première partie.

L’analyse SWOT permet de bien visualiser les diffé-rents éléments à un moment donné. Pour la rendre pleinement efficace, il faudra bien sûr l’utiliser comme base pour mettre en œuvre une réelle stratégie.

2. DéfInIR LA MEILLEuRE sTRATégIE

UTILEpour atteindre l’objectif

NEFASTEpour atteindre l’objectif

INTERNE(attributs du domaine d’activité stratégique)

Forces Faiblesses

EXTERNE(attributs de l’environnement)

Opportunités Menaces

30Commerce équitable

2.2. La stratégie marketing

Nous l’avons déjà souligné, vendre des produits ou des services issus du commerce équitable est un métier particulier. En effet, vous vous différenciez de vos concurrents du marché traditionnel par l’esprit dans lequel vous travaillez. Vous devez donc trouver le moyen de mettre en évidence la qualité du proces-sus et du contexte dans lequel vous travaillez.

Dans un premier temps, vous devez essayer de définir les objectifs marketing de votre société. Il faut donc indiquer ce que vous souhaitez atteindre, notamment en ce qui concerne les parts de marché que vous pensez conquérir, le nombre d’unités qui vont être vendues, le niveau de notoriété que vous aimeriez atteindre, etc. La base de définition des objectifs dé-pendra bien entendu de la nature de votre offre. Dans un second temps, vous devez décrire la manière con-crète par laquelle vous atteindrez vos objectifs.

• Quelleestlapartdemarchéquevousvou- driez occuper ? Quel niveau de notoriété aimeriez-vous atteindre ?• Dansquellegammedeprixallez-voussituer votre offre ? Quelle est le positionnement par rapport à la concurrence ?• Quelestlelienentrevotrepolitiquedeprixet les standards du commerce équitable ?• Commentorganisez-vousvotreforcedevente et sur quels arguments commerciaux s’ap- puiera-t-elle ?

2.3. L’accès au marché

faire connaître son offre

Lors de l’introduction d’un nouveau service ou pro-duit sur le marché, une simple hypothèse négligée peut entraîner un échec total, malgré des conditions a priori très favorables. L’offre peut répondre parfaite-ment aux besoins des consommateurs, si ces derniers ne la connaissent pas, ils ne pourront pas acheter.

Il s’agit donc de développer et argumenter un pro-gramme de promotion et de publicité :

• typedemessage,• supports,• budgets,• planning…

De même il faut s’efforcer de suivre les retombées de cette publicité. C’est difficile, mais certains outils Internet comme, par exemple, les modules statis-tiques fournis avec certains logiciels de gestion de la caisse ou attachés au site internet, peuvent ici s’avé-rer très utiles. Il est aussi possible de simplement sys-tématiser le fait de demander aux nouveaux clients le moyen par lequel ils ont connu votre activité.

Choisir le bon emplacement

Bien entendu, la localisation, la surface et l’aménage-ment de votre entreprise auront une grande impor-tance. Tous ces éléments doivent être mis en œuvre en fonction de vos objectifs. Ce sujet est particuliè-rement sensible si vous faites de la vente au détail. Dans ce dernier cas, le montant des loyers est sou-vent étroitement lié aux taux de fréquentation des rues en question. Il s’avère souvent utile de procéder à des sondages de comptage pour se faire une idée réelle des taux de passage.

Etre présent sur Internet

Enfin, créer un site internet est aujourd’hui quasi in-contournable. Une réflexion approfondie s’impose quant à l’usage que l’on peut faire de cet outil. Du site d’information, « vitrine virtuelle », au site interactif avec forum de discussion et ventes en ligne, il y a toute une gamme de services possibles. La réalisation et la mise en ligne sont assez facilement accessibles, la gestion des mises à jour et le back office pour gérer les contacts avec les internautes demandent par contre une analyse précise car ils nécessitent un investisse-ment en temps souvent sous-estimé.

• Quelle sera votre politique de communica- tion ? de promotion ? Quels moyens y met- trez-vous ? Quels supports utiliserez-vous (média, tracts, affiches, vitrines, etc.) ? Avez- vous un calendrier de mise en œuvre ?• Comment avez-vous choisi votre implanta- tion professionnelle ? • Quelleattractivitéetquellecomplémentarité d’autres commerces proches (présence d’un site ou d’un commerce locomotive attirant

L’offre peut répondre parfaitement aux besoins des consommateurs, si ces derniers ne la con-naissent pas, ils ne pourront pas acheter.

31Commerce équitable

beaucoup de monde, galerie commerçante, parc industriel adapté, etc.) ; • Volumeettypedefluxnatureldespassants (on ne se positionne pas à l’entrée d’une gare comme dans une rue commerçante en zone piétonne) ; • Attraitd’unepopulationsusceptibledeconsti- tuer les acheteurs potentiels vivant ou venant dans un certain périmètre autour du point de vente ; • Surfacedel’établissementparrapportàvotre activité et au stock de départ ;• Localisation en fonction des impératifs de l’activité et du personnel.

« Entreprendre en commerce équitable pour moi, c’est se lever tous les matins en se disant qu’on va travailler pour un monde plus juste. »

« La transparence et la proximité tant avec ses clients qu’avec ses fournisseurs sont des points forts pour le commerce équitable. »

32Commerce équitable

3.1. Rester attentif aux évolutions du secteur

Le commerce équitable n’est pas un « secteur » au sens où on l’entend habituellement, il s’agit plutôt d’une façon alternative de pratiquer les différents métiers du commerce. Les acteurs belges du com-merce équitable ont d’ailleurs créé une fédération professionnelle qui les regroupe autour de leur « com-mun dénominateur ». Plusieurs questions se posent aujourd’hui et il est important de rester attentif à leurs développements :

• Evolutiondeslabels:rapprochementsavec les cahiers des charges bio, émergences de nouveaux labels gérés par les pays d’origine, …• Approche«filière»entantqu’alternativeaux labels • Rapprochementaveclesproducteursdenos régions:commerceéquitable«nord/nord»• Recherches et émergence de nouveaux produits.

Pour que votre offre reste dynamique et en phase avec la réalité, vous devez toujours avoir des « chan-tiers exploratoires » en cours. Mais il faut toutefois prendre garde à rester cohérents dans l’évolution de cette offre. Mieux vaut se centrer sur ce que l’on maî-trise et le développer petit à petit. Bien entendu, cela n’empêche pas de rester ouvert aux opportunités nouvelles qui seront à évaluer en fonction de l’exis-tant en évitant de s’éparpiller dans trop de choses différentes énergivores et chronophages…

3.2. se positionner au sein de la filière de commerce équitable

Il est intéressant de commencer par une présenta-tion des fournisseurs, des éventuels sous-traitants et, le cas échéant, des autres partenaires comme, par exemple, pour un commerce de détail, des entre-prises avec lesquelles vous allez travailler dans une formule de dépôt de marchandises ou, dans le cas d’un transformateur, une entreprise avec laquelle vous développez un produit ou une gamme en commun. Il est utile de préciser leurs rôles, leurs engagements, leurs références, les relations établies avec votre so-ciété, leur utilité, etc.

Dans un projet de commerce équitable, vous serez souvent amené à gérer des importations de produits. Il faut alors être très attentif aux fluctuations des taux de change et, si on en a les moyens, il est important de se couvrir au bon moment. De même, avant de passer des commandes fermes, il est important de se renseigner sur les frais de douane. Ceux-ci peuvent varier considérablement en fonction des types de produits et des pays d’origine. (www.figus.fgov.be)

3. PAssER DE LA sTRATégIE Au PLAn oPéRATIonnEL

Mieux vaut se centrer sur ce que l’on maîtrise et le développer petit à petit.

33Commerce équitable

Enfin, il est important de bien positionner votre en-treprise de commerce équitable par rapport à une question cruciale : comment ménager des marges suffisantes pour amener et maintenir votre entreprise à l’équilibre financier sans remettre en cause votre volonté de soutenir au mieux les producteurs ? Cette question est réellement une préoccupation centrale pour les entrepreneurs de commerce équitable.

Même si notre regard analytique est d’avantage posé sur les entreprises actives dans nos régions, sans nous attarder, nous souhaitons mentionner ici un élé-ment important pour une appréhension correcte de la filière. Les structures de production des matières premières, des produits finis ou semi-finis gèrent la question des marges avec une palette de réponses très variée. Sans entrer dans les détails, soulignons simplement que s’il fallait encore le démontrer, c’est souvent l’occasion de constater que nos référentiels occidentaux ne sont pas universels et que, dans bon nombre de cas, il faut beaucoup d’ouverture d’esprit pour appliquer intelligemment les standards du com-merce équitable. C’est probablement là un des inté-rêts majeurs de la démarche.

Importateurs, transformateurs, distributeurs

Suivant toujours notre schéma, passons à l’étape suivante, celle des importateurs, transformateurs et distributeurs. Qu’ils jouent un ou plusieurs de ces rôles, d’un point de vue économique, ces opérateurs doivent trouver une place, c’est-à-dire une façon cor- recte de gagner leur vie. Ils doivent veiller à ce que les producteurs, en amont, et les revendeurs, en aval, puissent eux-mêmes générer une valeur ajoutée suffisante pour survivre. Sans prétendre à l’exhaus-tivité, citons plusieurs éléments qui devront être pris en compte pour tenter de concevoir et maintenir un dispositif économiquement viable.

Approvisionnements :

• Nature et fonctionnement dumarché inter- national traditionnel,• Risquesliésauxmodesetconditionsspéci-

fiques de production : conditions pour le respect : - des délais, - des quantités - de la qualité,• Risquesdefluctuationdestauxchanges.• Conditionsetcoûtsdestransports.• Contrôlesqualitésurplaceavantexpédition.• Certificationoulabellisationrelativesaures- pect des standards du commerce équitable : - Modalités concrètes des contrôles : fré- quence, ampleur et cible - Coûts fixes et variables• Contexte social et politique dans lesquels évoluent les partenaires.• Taxesdouanièresparticulières.• Miseenconformitéaveclesrèglessanitaires et de sécurité sur nos marchés.

Les réponses à nombre de ces questions vont géné-rer des coûts qu’il faudra intégrer à l’étude de faisa-bilité avant de passer à l’analyse de l’aval de la filière.

Valeur ajoutée

Les différentes fonctions de la filière peuvent être remplies par le même opérateur, mais elles peuvent aussi faire l’objet de partenariats ou de contrats de sous-traitance. D’emblée, il importe donc de bien cerner le positionnement de l’entreprise car la struc-ture de ses coûts sera le reflet de ces choix.

• Transportsetlogistiquedelivraison.• Entreposage :volumeet typedemarchan- dises, rotation des marchandises, durée de conservation.• Gestiondesstocks:tampons,“justintime”…• Transformation:processus,synchronisation des différents approvisionnements.• Choix enmatière de labellisation et coûts engendrés. • Packaging:conceptionetdesign.• Conditionnement.• Prospectioncommerciale• Facturation, suivi des paiements, recouvre- ment de créances…

Comment ménager des marges suffisantes pour amener et maintenir votre entreprise à l’équilibre financier sans remettre en cause votre volonté de soutenir au mieux les producteurs ?

34Commerce équitable

Clients/revendeurs

L’organisation de l’entreprise sera aussi fonction de la clientèle visée : boutiques indépendantes, grande distribution, vente par internet, … Il s’agira de recher-cher un équilibre, toujours délicat, entre : grands et petits clients qui vont impliquer :

• Desvolumesdecommandesplusoumoins volumineux• Une charge de travail variable et plus ou moins d’économie d’échelle• Une fragilité plus oumoins importante des carnets de commande (peu de gros clients simplifie la gestion mais augmente le risque de fortes fluctuations parfois imprévisibles)

Vente au détail

Une étude française développée en 2010 (voir encart) met en évidence la grande difficulté que revêt la pra-tique de ce métier. Une étude semblable n’existe pas pour la Belgique, mais il est néanmoins permis de penser que la situation ne doit pas être fondamenta-lement différente.

freins et leviers au développement économique des boutiques de commerce équitable

Etude réalisée en 2010 à la demande de la Plate Forme Française de Commerce équitable.

Les résultats complets de cette étude peuvent être consultés en ligne via :

www.commercequitable.org

Les boutiques de commerce équitable : des situations financières hétérogènes

• La majorité des boutiques dégage un chiffre d’affaires par mètre carré inférieur à la moyenne nationale du commerce de détail.• La marge commerciale est similaire à celle dégagée par le secteur du bio et de l’habillement pour la moitié des boutiques de notre échantillon.• LaValeurAjoutée(VA)estsouventinsuf- fisante, la conséquence en est que l’activité est majoritairement pas ou peu rémunérée.• Le FondsdeRoulement (FR) nepermetpas de financer l’activité ou la croissance de l’activité.•Pourlesboutiquesassociatives,lessub-ventions varient de 0 à 30% du chiffre d’af-faires.

Concentrons-nous donc sur le cœur du problème, à savoir les marges bénéficiaires qu’il sera possible de pratiquer sur les différentes familles de produits. Pour élaborer son offre, le détaillant va s’adresser à des fournisseurs spécialisés et, nous l’avons dit, ces der-nières années, l’éventail des choix s’est considéra-blement élargi. A titre indicatif, le tableau ci-dessous donne une fourchette des marges pratiquées pour quelques grandes familles de produits.

Les coefficients multiplicateurs pour le calcul des marges, vente au détail

TVA 6%

1,4 1,6 1,8 2,0 2,2 2,4 2,6 2,8 3,0 3,2

Prix achat HTVAx multiplicateur= Prix de vente TVAC

Exemple : j’achète un paquet de biscuit 10€ HTVA et je vends 14€ TVAC

Epicerie (hors frais)

TVA 21%

Articles déco

Accessoires de mode

Vêtements

Vins, bières, alcools

« Agir en professionnel, c’est être rigoureux pour la négociation des contrats et se ménager des marges correctes. Le commerce équitable n’échappe pas à ces règles. »

35Commerce équitable

Ces fourchettes sont purement indicatives car de nombreux facteurs peuvent influencer les marges ef-fectivement pratiquées :

• L’environnementimmédiatdupointdevente comme par exemple le quartier ou la rue. Notons aussi à cet égard qu’il y a un lien étroit avec la part de charges fixes que représente le loyer : il est logique de ne pas pratiquer les mêmes prix si l’on se trouve à proximité de la Grand Place de Bruxelles plutôt que dans une rue à faible passage d’un quartier populaire… • Lagammedeprixdans laquellesesituent les concurrents directs à qualité de produit similaire. Le but ne sera jamais de concur- rencer les « low cost.. »• Le«risquedestock»,c’est-à-direl’hypothèse selon laquelle il ne sera peut-être pas pos- sible de tout vendre, en tous cas au prix plein (soldes, promotions, péremption etc…).

Pour se donner l’opportunité d’augmenter sensible-ment leurs marges, quelques opérateurs spécialisés dans la vente directe tentent de jouer un rôle d’impor-tateur pour un produit ou une petite gamme. C’est en effet peut-être une piste intéressante, mais un tel choix induit aussi un volume de travail très important comme nous le soulignions sous le titre précédent.

• Quelssontlesdifférentsfournisseursetpar- tenaires potentiels disponibles sur le marché ? Avec lesquels allez-vous travailler ? Leurs avantages et inconvénients ? Avez-vous déjà conclu des partenariats ? Quelles en sont les raisons ? Avez-vous un plan clair ? Evolu- tions à court ou moyen terme ?• Avecquelquesexemplesàl’appui,comment allez vous faire pour vous garantir des marges suffisantes tout en respectant votre volonté d’optimaliser la rémunération de vos parte- naires producteurs ?• Sivoustransformezdesproduits,quelleest votre capacité ? Le processus ? Quel est l’effectif alloué ? Quels sont les équipements et les technologies à développer, à acheter ? Avez-vous une politique de sous-traitance ? Avez-vous des partenaires spécifiques pour certaines activités ?

3.3. La gestion des Relations Humaines

Pour commencer, vous devez vous intéresser à l’or-ganisation de la structure interne de l’entreprise, et pour cela, un organigramme, précisant les rôles et la répartition des responsabilités envisagés, sera sou-vent le plus parlant.

Vous poursuivrez bien sûr par la description du per-sonnel, en les regroupant par postes occupés (mana-ger, employés, dirigeants, etc.) et en expliquant les qualifications, carrières et expériences. Suite à cela, vous prendrez soin de rajouter la définition des rému-nérations en détail (CP, barèmes, salaires et autres avantages). En dernier lieu, quelques explications à propos du conseil d’administration peuvent mettre en valeur le sérieux de l’entreprise. Comment les déci-sions y sont-elles prises ? De quelle autonomie de gestion dispose-t’elle ?

Soulignons que nous parlons ici de « relations hu-maines » plutôt que de « ressources humaines » car nous souhaitons souligner le fait que le succès d’une entreprise repose grandement sur les hommes et femmes qui la font vivre. Renforcer le travail d’équipe en mettant l’accent sur les complémentarités de fonc-tions est probablement une des bonnes recettes pour réussir. Notons au passage que de nombreuses entre-prises de commerce équitable font partiellement appel à des prestataires bénévoles pour remplir certaines tâches. Cette hybridation des ressources nécessite une grande clarté dans l’organisation et la répartition des tâches et des responsabilités ainsi que dans l’or-ganisation des circuits de communication.

Même dans l’hypothèse d’une petite structure, il est intéressant de tracer un organigramme et d’y men-tionner tous les acteurs, même, le cas échéant, quand il s’agitdeprestationsponctuelleset/oubénévolescomme le sont parfois, par exemple, celles des admi-nistrateurs.

• Qui fait quoi (direction, secrétariat, produc- tion, vente, etc.) ? Pour chaque membre de votre personnel, quelle est sa fonction, ses tâches, sa formation, son expérience ?• Quel est l’organigramme du personnel de votre entreprise ? Quelle commission pari- taire?Typedecontratde travail (CD/CDI, tempsplein/partiel, intérimaires, stagiaires, subsides) ?• Ferez-vousappelàdesconseillersexternes (comptable, notaire, avocat, réviseur, etc.) ?• Comments’organise laprisededécision?• Leconseild’administration:qui?Combien?

« Pour survivre en commerce équitable, il faut se spécialiser et proposer des produits que le client ne trouve pas ailleurs. »

36Commerce équitable

Est-ce que le périmètre de décision du CA est clairement défini ? Est-il fortement impli- qué dans la gestion courante de l’activité ou plus dans la réflexion stratégique ? Quels sont lesdomainesdecompétence/d’expertisede chacun des membres ?• Lagestionsera-t-elleparticipative?Comment cela se traduit-il ? A quel niveau : gestion quo- tidienne, stratégie, définition d’objectifs ? Y a- t-il une charte ou un document le précisant ?

3.4. Mettre en œuvre un plan de communication

Pour transformer le potentiel de l’entreprise en dé-veloppement effectif, il faut que les consommateurs soient correctement informés de l’offre qui leur est faite. Il faut que les prospects deviennent des clients. Dire cela, c’est bien entendu « enfoncer une porte ouverte » mais il est néanmoins étonnant de consta-ter à quel point cet élément essentiel est parfois sous estimé dans les plans de développement et dans les budgets des entreprises.

Nous résumons ici rapidement les étapes néces-saires à la construction d’un plan de communication :

• Préciserunoudespublicscibles.• Choisir une «ligne de force» autour de la- quelle la communication va s’articuler : une idée, une phrase qui synthétise les objectifs de la société, un slogan.• Choisirunelignegraphiquequiseradéclinée sur les différents supports : concevoir un logo.• Rédigerundossierdeprésentationgénéral (une dizaine de pages) et une version résu- mée (1 à 2 pages).• Créerunsiteinternet,unblog,uneadresse dans un réseau social…• Etablirunpland’action:choixdesmédias, événement de lancement, échéancier• Choisir les supports : folder, flyer, vidéo, bande son…• Budgéter les opérations en fonction des phases précisées dans l’échéancier.

Un plan de communication avec des échéances pré-cises et un budget bien ajusté seront les gages d’un démarrage réussi. Quels que soient les choix posés, les contacts personnalisés et une attention au profes-sionnalisme et à la précision de la présentation sont essentiels.

Même avec peu de moyens, il est possible de construire d’emblée une image et un message soignés et cohé-rents. Les formes, les couleurs et les mots doivent être conçus en harmonie. N’hésitez pas à vous faire aider par des personnes de votre entourage. La sensibilité artistique peut apporter des idées créatives.

Evoquant ici les canaux de communication et le choix des supports média, la question de la présence sur la toile est incontournable. La création d’un site ou d’un blog est devenue quasi indispensable, c’est un fait. Par contre, pour le courrier à adresser aux clients, la situation se complique de plus en plus. Il faudra poser des choix et les évaluer au fur et à mesure :

• Lecourrierpostalcoûtedeplusenpluscher et implique de lourdes charges (impression, manutention, expédition).• Les e-mails tombent dans des boîtes aux lettres virtuelles de plus en plus surchargées et ont tendance à passer inaperçus. • La présence dans les réseaux sociaux im- plique une fonction de veille et de suivi assez exigeante et il n’est en outre pas évident de choisir les réseaux au sein desquels on veut être présent (Facebook, Twitter,…)• LesactionsdepromotionparSMSsontpra- tiques mais provoquent parfois une sensa- tion de harcèlement chez les clients, surtout quand elles sont cumulées avec celles d’autres supports. • Leboucheàoreilleet lecontactpersonna- lisé par téléphone prennent beaucoup de temps et imposent une sélection plus stricte, mais peuvent se révéler assez efficaces.

Les autres canaux choisis le seront en fonction des publics cibles et des objectifs poursuivis :

• Presse écrite générale, locale ou «supplé- ments » thématiques• Radiogénéraleetlocale• Télévisionslocales• Emissionstéléviséesthématiques(magazines)• Pressespécialisée(technique,culturelle,...)• Presseassociative• Pressegratuite(Métroettoutesboîtes)

Enfin, pour toutes ces matières, ce sera surtout la capacité de mobiliser des contacts personnalisés qui jouera un rôle décisif.

Renforcer le travail d’équipe en mettant l’accent sur les complémentarités de fonctions est proba-blement une des bonnes recettes pour réussir.

37Commerce équitable

S’il faut garder à l’esprit que l’entreprise de commerce équitable est soumise aux mêmes règles économiques que les entreprises traditionnelles, il est évident que le choix de « l’équitable » aura des conséquences très concrètes tant sur la structure financière à mettre en place que sur la gestion quotidienne.

Il conviendra notamment d’anticiper une série de situations en prévoyant une capitalisation solide dès le début de l’activité. En effet,

• Pratiquerunpréfinancement,mêmepartiel, des commandes implique la prévision d’une trésorerie suffisante.• S’inscrire dans une relation de confiance durable avec des structures de petites tailles (souvent situées dans des pays lointains aux cultures aussi différentes que variées) néces- site un temps de travail important.

Aussi, la mise en place du projet implique l’utilisation de moyens qu’il conviendra de chiffrer et de présen-ter au travers de tableaux qui évolueront bien enten-du au fil du temps.

Le financement des moyens requis trouvera sa source tant au niveau de l’activité proprement dite (vente de produits/servicesetdéveloppementdumarché)quedes apports personnels ou de tiers, des emprunts contractés ou des aides diverses qui auront pu être mobilisées (aides à l’installation, aides à l’emploi, aides régionales, fédérales ou locales).

A nouveau, la difficulté résidera dans l’objectivité apportée par le promoteur dans l’établissement ou l’analyse des données récoltées, mais aussi dans l’ap-

préhension du degré de certitude qui lui permettra ou non de comptabiliser par exemple des aides poten-tielles dans ses prévisions financières.

Il faudra dresser une liste exhaustive des charges à supporter et des rentrées potentielles et valoriser ensuite chacun des postes identifiés de la manière la plus juste et précise possible.

Le calcul du chiffre d’affaires prévisionnel est sans doute un des éléments les plus difficiles à approcher, sachant que, si des concepts « standards » existent (calcul du panier moyen, comptage des passants, par exemple), il vous faudra in fine décider de l’estima-tion du nombre de clients et de leur consommation moyenne. L’analyse antérieure du marché et de la concurrence doivent vous aider à ce stade à prévoir vos ventes. Enfin, l’utilisation d’une hypothèse basse et haute vous permettra également sans doute de mieux approcher la réalité.

Pour toutes ces questions, nous vous renvoyons aux plans d’affaires généralistes (quelques adresses in-ternet en annexe dans la partie « bonnes adresses »).

4. PRéCIsER LEs AsPECTs fInAnCIERs Du PRojET

Le choix de « l’équitable » aura des conséquences très concrètes tant sur la structure financière à mettre en place que sur la gestion quotidienne.

38Commerce équitable

une présentation financière de l’entreprise

1. Les besoins de l’entreprisea - Frais d’établissementb - Investissements (matériels et immatériels)c - Délais de paiement accordés et les créances qui en découlentd - L’encaisse de trésorerie

2. Les ressources de l’entreprisea - Apports personnelsb - Apports extérieursc - Aides et subventionsd - Emprunts

3. Les comptes de résultats prévisionnelsa - Charges Coût des matières et de la sous-traitance Coût des rémunérations Frais de fonctionnement Amortissements et provisions Autres charges Charges financièresb - Produits Prévisions de vente (chiffre d’affaires) Autres produits (financiers, etc.) Stocks produits finis et encours

4. Plan de trésorerie

Nous l’avons vu : une estimation précise des besoins à moyen terme est indispensable. Pour arriver à vos fins, il vous faudra développer deux éléments princi- paux : un bilan prévisionnel, qui précisera la somme investie à court et moyen terme et la manière dont elle sera financée, et un compte de résultat prévi-sionnel, qui va s’appuyer sur l’estimation des ventes ou des prestations que l’entreprise va effectuer, donc aux produits qu’elle va réaliser, en soustrayant l’en-semble des charges.

Le bilan prévisionnel vous permettra d’identifier les ressources nécessaires à court et moyen terme et de planifier les investissements et leurs financements (engagement de fonds propres, fonds issus de tiers (coopérateurs, actionnaires), endettement long terme, subsides, etc.).

De même, un compte de résultat prévisionnel sera établi dans le but de planifier à moyen terme le pro-duit des ventes (le chiffre d’affaires), le montant des charges (fixes et variables) et une prévision du résul-tat d’exploitation afin d’évaluer la génération d’un bénéfice. Ces deux prévisionnels se font la plupart du temps en projection sur 3 ou 5 ans.

Deux documents complémentaires découlent des prévisions bilantaires et du compte de résultat. Le premier est le plan de trésorerie, qui présente les encaissements et décaissements prévus au cours de la 1ère année d’exploitation (entrées et sorties de liqui-dité). La gestion de la trésorerie mérite une attention particulière et le plan devra vous permettre d’identifier clairement quels sont les besoins de décaissements mensuels et comment ils seront couverts. Vous devez également réfléchir à des solutions d’urgence en cas de difficulté de paiement. Le second est le plan d’in-vestissement, qui décrit les investissements qui vont être réalisés et la politique d’amortissement mise en œuvre. Les investissements sont des charges plus importantes, mais aussi plus durables, qui ne seront pas directement prises en compte dans leur totalité en année 1 mais amorties en fonction de la durée de vie du bien considéré. Il conviendra également de se pen-cher sur le mode de financement proposé et son coût.

Des modèles de bilan, compte de résultat, plan de trésorerie et plan de financement sont disponibles sur Internet – sachant qu’ils répondent à une classifica-tion des postes et un mode de présentation standar-disés. (Quelques liens utiles dans le chapitre « bonnes adresses »)

Enfin, des outils, tels que les calculs de ratios type, pourront aussi vous aider à appréhender de manière générale la structure financière de l’entreprise. Ces ratios peuvent vous aider à conforter - ou infirmer -

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vos choix. Ce type de travail recèle un certain degré de complexité qui varie fortement en fonction des cas.

Quel que soit votre niveau de connaissance des tech-niques comptables et financières, il est important que vous réalisiez les premières projections vous-même avec votre bon sens et votre vision personnelle du projet que vous voulez construire.

En outre, même si vous êtes un professionnel de la gestion, dans un second temps, il est toujours inté-ressant de soumettre votre travail à un professionnel extérieur. Le volume de son intervention sera bien entendu fonction de la quantité et de la qualité du travail que vous aurez déjà réalisé.

Il existe sur le marché des logiciels qui vous permettent de réaliser des projections financières et de sortir des bilans et des comptes de résultats agrémentés de beaux tableaux et graphiques. Ces outils sont à utili-ser avec la plus grande prudence car, en pratique, ce qui importe, c’est que vous vous soyez approprié les chiffres et les équilibres financiers de votre entreprise en manipulant vous-même les données. Un logiciel, fût-il magnifique, ne dirigera jamais votre entreprise à votre place.

En ce qui concerne l’accès aux financements pu-blics, il n’existe rien de spécifiquement prévu pour le commerce équitable. Comme nous l’évoquons plus haut, selon certaines conditions, une entreprise de commerce équitable peut toutefois affirmer son ap-partenance au secteur de l’économie sociale et il est alors possible d’accéder à des fonds dédiés à ce secteur.

Il est donc parfois possible de glaner ci ou là l’une ou l’autre aide financière publique ou privée pour initier un tel projet. Toutefois, le plan d’affaires ne peut pas s’appuyer sur ce type d’aide. Ces aides doivent res-ter des apports ponctuels susceptibles d’améliorer le quotidien, mais pas des supports sur lesquels repose la viabilité de l’entreprise.

Le paysage des aides publiques est en perpétuelle évolution, la démarche la plus efficace est donc de se mettre en contact avec une agence-conseil spé-cialisée (Voir les bonnes adresses) ou de surfer sur les sites spécialisés alimentés par les gouvernements régionaux et les pouvoirs locaux.

Le financement de l’entreprise

Outre la constitution du Capital, les apports financiers peuvent prendre des formes très va-riables et impliquer des coûts et des garanties qui le sont tout autant. La mobilisation de ces ressources nécessitera aussi un travail de pré-sentation et de suivi des dossiers dont il ne faut pas négliger l’importance. Les coûts étant très variables, il s’agira de choisir au plus juste les montants, les durées et les meilleures formules en terme de garantie.

Quelques pistes :

•Aidesàl’investissement•Aidesàl’emploi•Subsidesthématiques:énergie,recherche,etc.•Créditsbancairesouoctroyéspardesorga- nismes parastataux : Crédits hypothécaires, Investissement, Fonds de roulement, Crédits de pont, Crédits de caisse …

En synthèse, 3 éléments clés :

• Leplanfinancierserédiged’abordseulou en équipe en fonction du bon sens et des perspectives de développement à la fois con- crètes et réalistes.• Dansunsecondtemps,danstous lescas, il est intéressant de soumettre ce travail à un intervenant extérieur. Le recours à une agence-conseil garantit une neutralité critique. • Enfin,c’estvraipourtouteentreprise,mais ça l’est encore plus pour les entreprises de commerce équitable, il faut absolument veiller à obtenir une capitalisation suffisante en regard de l’activité choisie.

Quel que soit votre niveau de connaissance des techniques comptables et financières, il est impor-tant que vous réalisiez les premières projections vous-même avec votre bon sens et votre vision personnelle du projet que vous voulez construire.

« Générer des marges bénéficiaires suffisantes pour assurer la survie et le développement de l’en-treprise : défi majeur pour le commerce équitable. »

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Liste des agences-conseil

En Wallonie et à bruxelles :

Pour plus d’informations voir le site officiel de la fédération wallonne des agences-conseil : ApacES http://www.apaces.be

AGES Rue de Steppe 24, 4000 Liège Tél:04/227.58.89-www.ages.be

BOUTIQUE DE GESTION Rue H.Lecocq 47 Bte1, 5000 Namur Tél:081/26.21.58-www.boutiquedegestion.be

CREDAL Conseil Place de l’Université 16, 1348 Louvain-la-Neuve Tél:010/48.34.78-www.credal.be

FEBECOOP Agence-conseil Wallonie Rue du Téris 45, 4100 Seraing Tél:04/330.65.01-www.febecoop.be

NGE 2000 Rue de la Converserie 44, 6870 Saint-Hubert Tél:061/61.00.50-www.nge2000.be

PROGRESS Avenue du Coq 84, 7012 Jemappes Tél:065/56.92.62-www.progress.be

PROPAGE-S Rue de Namur, 47, 5000 Beez Tél:081/26.51.40-www.propage-s.be

SAW-B Rue de Monceau-Fontaine 42 Bte 6, 6031 Monceau-sur-Sambre Tél:071/53.28.37-www.saw-b.be

SYNECO Rue Edouard Dinot 32, 5590 Ciney Tél:083/23.13.02-www.syneco.be

WFG OSTBELGIEN QuartumbusinessCenterHütte79/20,4700EupenTél:087/56.82.16-www.wfg.be

En flandre :

Febecoop Adviesbureau Hoogstraat 28, 1000 Brussel Tel: 02 500 53 00 - www.febecoop.be

Hefboom Vooruitgangsstraat 333 bus 5, 1030 Brussel Tel: 02 205 17 20 - www.hefboom.be

Mentor consult Stasegemsesteenweg 110, 8500 Kortrijk Tel: 056 23 72 80 - www.mentorkortrijk.be

Levanto hoofdzetel Franklin Rooseveltplaats 12, 2060 AntwerpenTel: 03 270 34 00 - www.levanto.be

Web vzwSteenweg op Tielen 70, 2300 Turnhout Tel: 014 46 27 15 - www.websweb.be

5. LEs bonnEs ADREssEs

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quelques sites où l’on peut trouver des modèles de plans d’affaires

En menant quelques recherches, il est assez aisé de trouver des modèles de business plan. Nous vous proposons quelques adresses :

www.apce.comwww.hsbc.frwww.managementstar.nlwww.entreprisecreation.comwww.bcv.chwww.vlao.bewww.wallonie.bewww.fundp.bewww.easystart.nlwww.mth.nlwww.businessplanfactory.nl

Liste des importateurs et distributeurs présents en belgique

Il est par définition très difficile de prétendre à l’ex-haustivité lorsque l’on réalise pareil relevé. Nous avons donc préféré mentionner quelques sites qui vous ouvriront des portes vers des fournisseurs potentiels sachant que, d’une part, de plus en plus d’organi-sations intègrent aussi des produits bio ou issus de l’économie locale et que, d’autre part, plusieurs four-nisseurs proposent quelques produits « fair trade » au sein de leur gamme sans pour autant avoir réorienté l’ensemble de leur entreprise.

(voir page 18)

« Le Commerce Equitable est l’indispensable (r)évolution de notre civilisation pour garantir à des Humains qu’ils peuvent se nourrir, se vêtir et vivre sans exploiter d’autres Humains. »

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ConCLusIons

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Entreprendre en respectant les standards du commerce équitable, un défi colossal

« Trade not Aid », commercer plutôt qu’assister ; développer un modèle économique où chacun peut travailler dignement pour permettre aux siens de progresser vers une vie meilleure… Ce sont les fondements historiques du commerce équitable. Depuis trois décennies, ils ont été déclinés sous des formes diverses et sur tous les continents.

Leconceptdecommerceéquitables’estdéveloppésurunaxedesolidaritéNord/Sud. Son but est de forcer de nouveaux équilibres dans les échanges pour arriver à une situation plus juste, ou, en tous cas, moins injuste. C’est un choix à la fois ambitieux et modeste : ambitieux parce que cela va à contre-courant du fonde-ment même du commerce où chacun essaie d’attirer à lui un maximum de valeur ajoutée en ne laissant qu’un minimum au partenaire. Mais c’est aussi modeste car chacun sait qu’au fond, le commerce équitable est tout juste un peu moins iné-quitable que les autres. Si nous voulions vraiment être totalement « justes » et si, à productivité égale, les travailleurs africains, asiatiques ou latino-américains étaient payés au même tarif que les travailleurs de nos régions, le moins que l’on puisse dire, c’est que nos habitudes de consommation s’en verraient fortement modifiées. Nous achèterions bien moins de choses...

Historiquement, le commerce équitable fut d’abord très militant et porté par des mouvements sociaux nourris par un fort investissement de bénévoles motivés. Au fil des ans, les produits se sont améliorés et diversifiés, les filières se sont profession-nalisées et les marchés ont grandi. La notoriété croissante à fini par devenir une ten-dance, un nouvel ingrédient au goût de consommateurs de plus en plus nombreux.

Le marché s’est donc adapté : d’une part, les grandes surfaces ont intégré des gammes de produits labellisés et, d’autre part, des initiatives nouvelles ont vu le jour (boutiques, resto-boutiques, vente en ligne, développement de produits trans-formés…). Aujourd’hui, le commerce équitable séduit et attire. On publie même une brochure spécialement à l’attention des candidats entrepreneurs, à l’attention de tous ces gens qui ont envie d’entreprendre et qui ne sont pas prêts à investir et à s’investir dans le seul but simpliste, et souvent irresponsable, qui consiste à concentrer vers soi un maximum de valeur ajoutée en externalisant vers d’autres ou vers le futur un maximum de coûts.

L’entrepreneur en commerce équitable est souvent considéré comme une sorte de héros moderne, celui qui ose se lancer dans une aventure que tant de gens « au-raient bien voulu tenter mais n’ont pas osé ». « Ah oui, ce sera difficile, il faudra en baver… Mais quel beau métier, quel bel engagement, quel beau combat, il faudrait

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plus de gens comme ça… » L’entrepreneur de commerce équitable, fût-il fauché et surchargé, est la personne à inviter dans un cocktail, à présenter à ses amis… Pas étonnant donc que vous soyez occupé à lire ces lignes !

Evidemment, derrière cette image séduisante, il y a un côté « pile ». Sur le terrain, la jeune entreprise va connaître des hauts et des bas. Elle va devoir poser des choix parfois douloureux pour essayer de survivre. Parfois même, elle sera contrainte de se « compromettre » dans des actions commerciales ponctuelles qui ne sont pas parfaitement orthodoxes au regard des doctrines du secteur. L’entrepreneur va alors s’exposer à la virulence des critiques car, paradoxalement, celui qui essaie d’adopter des comportements plus respectueux de l’homme et de l’environnement s’expose bien plus que celui qui cherche simplement son profit personnel.

En outre, et c’est certainement là l’essentiel, comme tout entrepreneur, l’entrepre-neur de commerce équitable doit avant tout être attentif à ses clients pour bien se positionner sur le marché. D’une part, nous l’avons dit, les consommateurs marquent un intérêt croissant pour le commerce équitable même si cette inten-tion ne se traduit pas encore suffisamment par des actes d’achat. D’autre part, le contexte général et la structure même des marchés sont en pleine évolution. Il faudra donc être très attentif à de nombreux paramètres et faire preuve de beau-coup d’imagination pour tenter d’atteindre et de maintenir un équilibre financier. Ce ne sera possible que grâce à des marges bénéficiaires suffisantes et à une gestion quotidienne rigoureuse.

Ce qui motive surtout l’entrepreneur qui choisit la voie du commerce équitable, c’est d’avoir un impact positif sur le monde économique dans lequel il évolue. En ce début de 21è siècle, des personnes de plus en plus nombreuses ressentent et expriment un sentiment ambivalent et encore assez diffus. D’une part, notre mode de vie et le fonctionnement actuel de notre économie mènent vers des impasses inquiétantes et, d’autre part, les changements qui s’annoncent ouvrent de nou-veaux horizons en nous contraignant à inventer de nouveaux rapports avec notre environnement et la diversité des humains qui y vivent. Le commerce équitable est concrètement au cœur de ces questions.

Le modèle de développement dans lequel nous vivons est devenu intenable. Inévita-blement, il va donc changer. L’augmentation du coût de la vie modifie nos habitudes de consommation avec, parfois, des accents schizophréniques étonnants. Ainsi, elle provoque par exemple un développement important des magasins à bas prix mais, en même temps, elle provoque une surenchère des campagnes publicitaires de toutes sortes visant à relancer la fameuse « consommation des ménages », sacro-saint moteur de l’économie.

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En outre, le coût du carburant et donc celui des transports augmente sans cesse et alourdit ainsi considérablement les charges en matière d’importation (et nous ne parlerons pas ici des taxes douanières et des aléas des taux de change entre l’Euro et le Dollar). Dans le même temps, les voyages aériens deviennent de plus en plus accessibles au grand public. Globalement, les gens voyagent donc de plus en plus et de plus en plus loin. Touristes et artisans se rencontrent ainsi sur de nombreux marchés et la perception des prix développée par les uns et les autres évolue donc considérablement.

Il ne faut donc pas être un grand économiste pour comprendre que le commerce équitable vit des temps difficiles puisqu’il refuse le choix du « low cost » ou celui des « marques » avant tout soutenues par d’onéreuses campagnes publicitaires et coincées dans l’obligation de donner la priorité à une large rémunération de ses investisseurs. Cela laisse peu de marge pour le respect des travailleurs et, parfois même, pour la qualité intrinsèque des produits.

Par ailleurs, dès ses origines, le commerce équitable s’est concentré sur des mar-chés alimentaires devenus aujourd’hui ses fers de lance : café, bananes, cacao, thé, etc… Là comme ailleurs, les produits se sont diversifiés et posent aujourd’hui des questions de fond importantes. En effet, généralement, les consommateurs sensibles aux arguments du commerce équitable le sont aussi à ceux des mou-vements « bio » et à ceux des luttes contre le changement climatique en prônant le retour à une économie plus locale. Le développement des circuits courts, le renforcement des réseaux de solidarité paysanne dans nos régions et la mise en évidence du rôle actif du consommateur qui peut reprendre en main son fameux « pouvoir d’achat » sont autant de débats et de réalités dans lesquelles l’entrepre-neur de commerce équitable peut jouer un rôle.

Passant du « local » au « global », la dimension intrinsèquement internationale du commerce équitable le projette aussi au cœur des évolutions liées à la mondialisa-tion du commerce et aux changements profonds des rapports de force entre na-tions et continents. Nombre de pays hier situés dans le « Tiers-monde » sont deve-nus des « pays en voie de développement » puis des « économies émergentes » et même parfois de nouvelles « puissances économiques ». Bien sûr, ce ne sont que des mots et ils ne concernent qu’une partie de la réalité. Bien sûr, dans nombre de ces pays, il reste des décalages colossaux et injustes entre un petit nombre de détenteurs de la richesse et la grande masse des citoyens. Mais, même si l’échelle est différente, n’en est-il pas de même chez nous ?

Il n’est bien entendu pas possible d’argumenter sur tous ces éléments en quelques lignes, mais il nous semblait indispensable d’esquisser ces questions car l’entre-preneur en commerce équitable y sera inévitablement confronté. La publication que vous venez de lire a voulu être réaliste et n’a certainement pas essayé d’édul-

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corer la situation. Le secteur du commerce équitable est en pleine mutation dans un monde lui-même en plein chambardement. Investir et s’investir aujourd’hui dans un projet de commerce équitable requiert de réelles capacités de gestion doublées d’un idéal fort et d’une large ouverture d’esprit.

Comme nous l’avons dit, le défi est donc de taille, mais il est aussi passionnant. Il se situe au cœur des questions existentielles de nos vieilles économies occi-dentales logées dans des systèmes sociaux et démocratiques un peu assoupis, même s’ils furent jadis acquis de haute lutte. Comment les acteurs du commerce équitable peuvent-ils agir efficacement dans un monde en mouvement qui semble encore si peu attentif au respect de l’homme et de son environnement ?

Bref, créer et développer ici et maintenant une entreprise inscrite dans les stan-dards du commerce équitable, c’est poser un acte politique fort, fondamentalement à contre-courant. Et c’est choisir, en connaissance de cause, le terrain du com-merce, chantier séculaire des échanges humains où passions et déceptions se déchaînent à merci.

Eric Dewaele, coordinateur de Belgian Fair Trade Federation (section francophone) Samuel Poos, coordinateur du Trade for Development Centre

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ÉDITEUR RESPONSABLE Carl Michiels

RÉDACTION Eric Dewaele, Belgian Fair Trade Federation

© CTB, agence belge de développement, décembre 2011. Tous droits réservés.

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Cette publication du Trade for Development Centre ne représente pas nécessairement le point de vue de la CTB.

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