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Dermatites de contact aux produits d’hygiène

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Page 1: Dermatites de contact aux produits d’hygiène

Dermatites de contact aux produits d’hygiène§

Contact dermatoses to health care products

E. Collet *, G. Jeudy, S. DalacService de dermatologie, hôpital du Bocage, CHU de Dijon, 2, boulevard Mar-de-Lattre-de-Tassigny, 21000 Dijon, France

Disponible sur Internet le 28 avril 2009

Résumé

La consommation des produits d’hygiène est actuellement en augmentation. En général bien tolérés, ils peuvent être parfois à l’origine dedermatites d’irritation ou d’hypersensibilité de contact à type d’eczéma, d’urticaires ou de photodermatoses. Tensioactifs, conservateurs et parfumsfigurent parmi les agents responsables les plus fréquents. Quelques allergènes plus récents comme les glucosides, les hydrolysats de protéines deblé ou les huiles essentielles méritent d’être recherchés. Les tests allergologiques sont indispensables au diagnostic. La batterie standardeuropéenne seule est insuffisante. L’exploration doit faire appel aux batteries complémentaires à orientation cosmétologique et aux produitsapportés par le malade. Pour ces derniers, les tests semi-ouverts et repeated open application tests (Roat) sont d’un grand intérêt.# 2009 Publié par Elsevier Masson SAS.

Mots clés : Produits d’hygiène ; Cosmétiques ; Eczéma de contact ; Urticaire de contact ; Tensioactifs ; Parfums ; Conservateurs

Abstract

The use of health care products is currently increasing. Generally well tolerated, they sometimes can be the cause of irritation dermatitis oreczematoid contact dermatitis or photodermatitis. Surface-active agents, preservatives and perfumes are identified as being the substances mostoften responsible. Certain of the newest allergens, such as glucosides, wheat protein hydrolysates and essential oils, deserve to be considered.Allergy tests are indispensible for the diagnosis. The standard European battery alone is insufficient. The workup should include complementarycosmetic batteries and products used by the patient. Concerning the latter, semi-open tests are very important.# 2009 Published by Elsevier Masson SAS.

Keywords: Contact dermatoses; Health care products; Surface-active agents; Perfumes; Preservatives

Revue française d’allergologie 49 (2009) 360–365

La consommation des cosmétiques et produits d’hygiène esten nette augmentation, favorisée par la pression des médias et lafacilité des achats par internet. Aux arguments marketingd’ordre esthétique s’ajoutent maintenant ceux du « bien-être »ou du « naturel » permettant de cibler de nouveaux groupes deconsommateurs. Les produits d’hygiène proposés sont de plusen plus élaborés et diversifiés. Ils peuvent être à l’origine deréactions cutanées irritatives ou immuno-allergiques. Lafréquence de ces dermatites est probablement sous-estimée.Leur nombre reste faible si on considère le nombre de produitsvendus mais elles doivent être connues car à l’origine de

§ Conférence donnée au 4e Congrès francophone d’Allergologie 2009.* Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (E. Collet).

1877-0320/$ – see front matter # 2009 Publié par Elsevier Masson SAS.doi:10.1016/j.reval.2009.02.015

réactions locales parfois graves ou d’aggravations inattenduesde dermatoses préexistantes.

1. Qu’est-ce qu’un produit d’hygiène ?

C’est un produit cosmétique destiné à nettoyer, à protéger lasurface de la peau et à supprimer les odeurs désagréables. Sontexclus de ce groupes, les produits modifiant l’aspect corporel(maquillage) ainsi que les nettoyants antiseptiques [1,2].

1.1. Les savons et syndets, solides ou liquides

Un savon est obtenu par hydrolyse d’un corps gras en milieualcalin (saponification). Ce sont des tensioactifs anioniques,émulsionnants, détergents et moussants. Leur prix de revientest faible mais ils sont irritants pour la peau car alcalins. Pour

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Tableau 1Composition d’un savon (d’après M. Baspeyras [1]).

Agents nettoyants = savon Corps gras + baseChélateurs EDTAConservateurs et antioxydantsSubstances augmentant la cohésion et la viscositéAgents surgraissants Huile amande douce,

onagre, avocat, argan,glycérine, lanoline. . .

Adoucissants Avoine, amidonAntiseptiques – déodorants Triclosan, triclocarbanPigments et colorantsAgents blanchissants Dioxyde de titaneOpacifiantsParfumsEau

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pallier cet inconvénient, sont ajoutés des chélateurs (EDTA) oudes agents surgraissants (glycérine, huile d’amande douce. . .)ou adoucissants (Tableau 1). Les syndets (ou pains dermato-logiques) sont fabriqués à partir de tensioactifs de type sulfate,comme les glycérides sulfates et les alkylsulfates associés à desagents tensioactifs amphotères plus doux. Leur compositionest complexe : agents plastifiants, stabilisateurs de mousse,conservateurs, acides organiques faibles visant à obtenir un pHacide. . . Ce sont de bons nettoyants, au pH plus proche de celuide la peau, utilisables sur le cuir chevelu, moins irritants que lessavons mais ils ne moussent pas, sont chers et peuvent êtreirritants par certains tensioactifs anioniques [1,3,4].

1.2. Les émulsions

Les émulsions existent sous plusieurs formes :

� les laits sont des émulsions huile dans eau. La phase lipidique(20 à 30 %) permet d’éliminer les salissures lipophiles et laphase aqueuse (70 à 80 %) les impuretés hydrosolubles. Àces deux phases s’ajoutent des tensioactifs non ioniques. Leslaits sont très bien tolérés. Ils doivent être rincés (eau oulotion) mais ils sont chers et donc réservés à la toilette duvisage ;� les crèmes nettoyantes sont des émulsions, additionnés

d’agents moussants (tensioactif est anionique ou amphotère) ;� les compacts sont des laits solides dont la phase aqueuse est

reconstituée par l’eau utilisée pour la toilette. D’aspectsolide, ils ne moussent pas, ont la facilité d’emploi d’unsyndet et la douceur d’un lait [1,4].

1.3. Les lotions

De rinçage ou toniques ou eau démaquillantes, sontessentiellement composés d’eau, parfois aromatique (fleurd’oranger, rose, bleuet) à laquelle peut être ajoutée un agenthumectant, de l’alcool éthylique, des conservateurs. Certaineslotions assurent à la fois nettoyage et rinçage et comportentdonc des tensioactifs non ioniques et des agents hydratants[1,4].

1.4. Autres nettoyants cutanés

Les autres nettoyants cutanés sont :

� les gels : ils sont actuellement très en vogue (entretien despeaux acnéiques par exemple). Ils sont transparents,composés de 95 % d’eau et se transforment enmousse sous effet de l’eau et du massage. Ils comportentdes tensioactifs doux et des agents gélifiants (dérivésde cellulose ioniques, polymères carbovinyliques ouacryliques) ;� les lingettes : ce sont des tissus non tissés imprégnés de

liquide nettoyant comportant tensioactifs doux, parfums,conservateurs. . . Leur aspect « pratique » les rend trèsséduisant et il sont notamment très utilisés pour la toilette dunourrisson [1,4].

2. Les aspects cliniques des dermatites de contact (DC)aux produits d’hygiène

Tous les tableaux cliniques des DC peuvent être observés :dermatite d’irritation, eczéma de contact, photodermatose eturticaire de contact [1,2,5]. Quelques points toutefois méritentd’être précisés :

� il est souvent difficile de faire la différence cliniquemententre eczéma et irritation. Sur les paupières, par exemple,l’eczéma prend plus volontiers un aspect d’érythème fripéavec sensation de tiraillement ou de brûlure que celui d’uneéruption vésiculeuse suintante [2] ;� la topographie de l’éruption doit orienter en priorité sur les

topiques appliqués directement sur la zone atteinte. D’autresmodes de sensibilisation sont possibles : dermatitesmanuportées, aéroportées, par procuration ou produitsappliqués à distance (dermatite des paupières liées àl’utilisation d’un shampooing par exemple) [5] ;� sur le corps, les DC aux produits d’hygiène apparaissent avec

prédilection sur les zones de pression ou de frottement(ceinture) ou dans les plis. Elles sont favorisées parl’hypersudation, une hygiène excessive et un mauvaisrinçage des savons [2]. Elles peuvent débuter sur le site oùle malade à l’habitude de commencer sa toilette (bras,abdomen) [5] ;� quelques aspects atypiques de DC aux produits d’hygiène

rincés sont rapportés : pseudo dermatites séborrhéiques,eczémas « en cape » des épaules et de la nuque dus auxshampooings [5].

La plupart des études épidémiologiques concernentles DC aux cosmétiques et non spécifiquement auxproduits d’hygiène. Elles montrent une prédominanceféminine sauf pour les allergies aux déodorants [6,7]. Leszones préférentiellement touchées sont le visage et notam-ment les paupières et les mains [2,7]. La grande majorité desréactions sont des irritations [6,7]. L’étude très récente deWarshaw et al. ne montre aucun lien avec le terrain atopique[6].

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3. Les agents responsables de dermatites de contact auxproduits d’hygiène

3.1. Les tensioactifs ou surfactants

Ces molécules amphiphiles naturelles ou synthétiques ontdes propriétés détergentes, mouillantes, moussantes, disper-santes, émulsionnantes suivant leur formule (Tableau 2).Certains d’entre eux sont à usage industriel et non cosméto-logiques. Ils sont surtout irritants parfois responsablesd’eczémas [3,4,8].

La cocamidopropylbétaïne (CAPB) est un surfactif ampho-tère très employé dans les produits rincés tels que shampooings,gels pour bains et douches, produits d’hygiène intime, savonsliquides. Il est composé d’acides gras d’huile de coco etd’aminopropylbétaïne. Le potentiel allergénique n’est pas dûaux huiles de coco mais à la présence d’alkylaminobétaïnes et àdeux contaminants de fabrication : la diméthylaminopropyla-mine (DMAPA) et la cocaminopropyldiméthylamine. L’inci-dence des réactions allergiques à la CAPB est estimée entre 3 et9 % [9]. Ces DC touchent surtout la tête et le cou, plus rarementles mains [8–11]. Certains cas de « head and neck dermatitis »

Tableau 2Classification des tensioactifs d’après MC Martini [4].

Classe chimique Divers types Étiquetage I

Tensioactifs ioniquesAnioniques Savons Na stéarate

Alkylsulfates Na dodécylsAlkyléthersulfates Na laureth sOléfines sulfonates Na C30 C40Alkyarylsulfonates NH4 dodécyIséthionates Na oléyl isétAcyltaurates Na méthylcoAlkylsarcosinates NH4 cocoylsAlkylsulfoacétates Na laurylsulAlkylsulfosuccinates NH4 laurylsDérivés phosphatés Na laurylpho

Na steareth-4Cationiques Dérivés amoniums quaternaires Quaternium

Sels alkylpyridinium CétylpyridinAminoxydes Cocaminoxy

Amphotères Dérivés de la bétaine CocamidoproAmphoacétates Na lauroampAmphosulfonates Na lauroamp

Tensioactifs non ioniquesEsters De sorbitane Sorbitane lau

Sorbitane stéPEG80 sorbi

De glycérol Glycéryl stéaDe polyglycérol PolyglycérylDe glycol Ethylèneglyc

PEG 25 propDe méthylglucose Méthylgluco

MéthylglucoEthers Alcools éthoxylés Laureth 20

Céteth 20Copolymères OE-OP Stéareth 20

Alkanolamides Amide de coco CocamideAmide de ricin Ricinolamid

INCI : International nomenclature des ingrédients cosmétiques.

ont été imputés à la CAPB [8]. Quelques observations récentesde chéilites et stomatites avec des dentifrices contenant de laCAPB sont rapportés [10,11]. Le lauryl sulfate de sodium estirritant, très rarement allergisant [8].

Le cocamide diéthanolamine (DEA) et lauramide DEA sontdes surfactants des shampooings et savons liquides utilisés pourleurs propriétés stabilisantes. Ils sont à l’origine de quelques casd’eczémas de contact [8,12].

3.2. Les conservateurs

Le chlorométhylisothiazolinone/méthylisothiazolinone estun allergène classique des produits de toilette rincés. Lesmultiples sensibilisations à ce produit rapportées entre 1990 et2000 ont entraîné une réglementation de sa concentration(inférieure à 15 ppm dans les produits rincés et 7,5 ppm dans lesproduits non rincés) [5]. Une étude multicentrique récenteanglaise montre une stabilité des DC à ce conservateur [13].Cette étude révèle également une diminution des sensibilisa-tions au méthyldibromoglutaronitrile (ou Euxyl K400 lorsqu’ils’associe au phénoxyéthanol), dont la concentration est elleaussi limitée à 0,1 % dans les produits rincés. La sensibilisation

NCI Propriétés

Moussantsulfate Détergentsulfate Mouillantssulfonate Mouillantslbenzensulfonate Mouillantshionate Détergents douxcoyltaurate Détergents douxarcosinate Détergents doux

foacétate Détergents douxulfosuccinate Détergents douxsphate Émulsionnantsphosphate

1 Bactéricides, conditionneurs, mouillantsium Boosters de moussedespylbétaine Détergentshoacétatehohydroxy propylsulfonate

rate Solubilisantarate Émulsionnanttan palmitate Émulsionnantrate Émulsionnant4 caprate Émulsionnantol distéarate Émulsionnantylèneglycol stéarate Base autoémulsionnable

se dioléate Émulsionnantse isostéarate Émulsionnant

ÉmulsionnantÉmulsionnantÉmulsionnantViscosant

e Viscosant

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aux parabènes reste très faible [2,7,13]. En revanche, leformaldéhyde et les libérateurs de formol : DMDM hydantoïne,buthylhydroxytoluène, quaternium-15, imidazolidinylurée,diazonidinylurée, bronopol, restent d’actualité dans lesallergies aux produits d’hygiène [6,7,13]. Un certain nombred’observations ont d’ailleurs été signalées récemment au réseauRevidal-Gerda. Le quaternium-15, notamment, est l’allergènele plus fréquent dans la série américaine de DC auxcosmétiques publiée récemment [6]. Quelques autres con-servateurs sont ponctuellement mis en cause dont lechloracétamide [2,8], le chloroxylénol et la chlorphénésine[8,13].

3.3. Les parfums

Les parfums sont presque incontournables dans les produitsd’hygiène [8]. La fréquence des sensibilisations à ce grouped’allergènes est actuellement en constante augmentation [14].Dans une étude récente sur plus de 2000 patients allergiquesaux cosmétiques, Warshaw et al. montrent que Fragrance mix Iet Baume du Pérou viennent en deuxième et troisièmepositions du « best of » des allergènes. L’utilisation desparfums est limitée à 100 ppm dans les produits rincés et10 ppm dans les produits non rincés [2]. L’étiquetage desproduits d’hygiène doit obligatoirement mentionner laprésence des 26 molécules parfumantes les plus allergisantes.Les marqueurs des allergies de contact aux parfums sont leFragrance mix 1, le baume du Pérou et la colophane auxquels aété ajoutée le fragrance mix 2 (citral, lyral, coumarine,citronellol, farnesol, alphahexylcinnamaldéhyde) [2,14]. Lapertinence d’un test positif à un parfum est facile à affirmerlorsqu’il entre dans la composition d’une crème, d’un lait oud’un démaquillant. Elle est beaucoup plus difficile à établirdans le cas des produits rincés. En cas de patch-test positif,l’éviction des parfums dans les savons, gels douches estpresque toujours recommandée sans que nous en connaissionsla réelle implication clinique. Les données de la littérature surce sujet sont très limitées [8,5].

Les huiles essentielles ont fait leur entrée dans les produitsd’hygiène, y compris ceux destinés aux enfants. Leurréputation d’innocuité en matière d’allergie de contact esttotalement usurpée (présence limonène, cinamaldéhyde,géraniol. . .). Par ailleurs, il n’existe le plus souvent aucuneinformation sur la provenance d’une huile essentielleincorporée à la cosmétique, sa composition et ses possibleseffets secondaires. Un groupe de travail de l’Afssaps estactuellement chargé d’établir des recommandations pour lebon usage de ces produits.

3.4. Autres allergènes

3.4.1. Les excipientsLa lanoline (wool alcohols en nomenclature International

nomenclature des ingrédients cosmétiques [INCI]) etl’Amerchol L101demeurent des sensibilisants classiques descosmétiques le plus souvent non rincés [2,6,8]. Quelquesobservations d’eczémas généralisés sont rapportées après

utilisation de savons [15]. Le propylèneglycol, proposé en2005 comme « ajout » à la batterie standard, a ensuite été retiréen raison du faible taux de sensibilisation. Cette molécule, plusirritante qu’allergisante entre dans la composition de quelquesproduits d’hygiène [2].

3.4.2. Les glucosides (cétéaryl, coco, décyl,laurylglucoside)

Ils résultent de la condensation d’alcool gras et de glucose etsont utilisés comme tensioactifs, émulsifiants et agentsnettoyants. Plusieurs cas d’eczémas de contact ont récemmentété imputés au décylglucoside incorporé dans le filtre solaireTinosorb1. Ces molécules sont également à l’origine de DC àdes shampooings et savons liquides [16,17].

3.4.3. Les hydrolysats de protéines de bléIls ont parfois remplacé les protéines d’origine animale dans

les cosmétiques. Plusieurs observations d’eczémas aigus oud’urticaires généralisées après application de crèmes ou laitcorporel pour peau sèche et/ou atopique contenant deshydrolysats de protéines de blé ont été décrites. Dans certainscas étaient associées des réactions anaphylactiques alimentairesavec présence de gluten modifié dans les aliments suspects. Unetrès grande prudence est recommandée lors de la réalisation destests avec les cosmétiques en cause ainsi qu’avec leshydrolysats [18–20].

3.4.4. Les antiseptiquesIl suffit d’observer la composition des produits d’hygiène

vendus en grande surface pour constater que leur utilisationdans les cosmétiques est en nette augmentation. La fréquencedes sensibilisations aux antiseptiques par le biais de cesproduits est probablement sous-estimée. Plusieurs sont utilisés :chlorhexidine, l’hexamidine, chlorure de benzalkonium ettriclosan. Ils doivent donc être facilement incorporés à notrebatterie de patch-tests [21].

4. Comment tester les produits d’hygiène ?

Les patch-tests restent essentiels dans le bilan étiologiqued’une dermatite de contact aux produits d’hygiène. Labatterie standard européenne seule est insuffisante. Lechoix des tests empruntés à des batteries complémentaires(excipients, conservateurs. . .) est orienté par l’étiquetage desproduits d’hygiène suspects. L’exploration des produitsapportés par le malade est incontournable [14]. Le patch-test reste la référence pour les produits appliqués « telsquels » (crèmes, laits, gels). Le test semi-ouvert est indiquépour des produits moussants ou irritants (savons, gelsdouches). Le repeated open application tests (Roat) peutpermettre de redresser un faux négatif du patch-test. Il esttoutefois dépendant de la bonne observance du malade(application du produit deux fois par jour sur une même zoneau pli du coude ou à l’avant bras durant sept jours auminimum) [14]. Les huiles essentielles doivent être testées aumaximum à 2 % dans la vaseline en raison de fortes réactionsd’irritation.

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5. Quelques produits d’hygiène particuliers

5.1. Les lingettes

Elles sont de plus en plus utilisées pour la toilette des enfants(siège) ou des adultes (visage, aisselles). La plupart d’entreelles contient des agents fortement allergisants. Plusieurs casd’eczémas de contact sont rapportés. Les allergènes en causeétaient les conservateurs dont le méthylchloroisothiazolinone etle méthyldibromoglutaronitrile mais également les libérateursde formol [22,23].

5.2. Les dentifrices

Leur composition est complexe. Ils sont à l’origine dechéilites, souvent associée à une glossite, gingivite, dermatitepériorale. Leur exploration se fait en tests semi-ouverts. Lesprincipaux allergènes des dentifrices sont les parfums et arômes(cinnamaldéhyde, carvone, anéthole, spearmint oil. . .) maiségalement le laurylsulfate de sodium, la CAPB, le triclosan[11,24].

5.3. Les déodorants

Le diagnostic d’eczéma de contact à un déodorant est engénéral facile à évoquer par sa topographie. Curieusement, iln’est pas rare d’observer un relatif respect du fond du pliaxillaire. Dans un cas, le déodorant était à l’origine d’uneczéma par procuration [25]. Les eczémas de contact auxdéodorants sont souvent liés aux parfums, plus rarement auxantiseptiques et dans un cas à l’huile de ricin. Uter et al. onttesté 1468 malades avec leur déodorant « tel quel ». Les patch-tests étaient positifs dans 66 cas avec une sensibilisation aufragrance mix I dans 38 % des cas, au Baume du Pérou dans22,9 % et au lyral dans 24,5 % [26]. Signalons égalementplusieurs observations d’eczéma à un déodorant « naturel »contenant un mélange de lichens. Les quatre malades rapportésétaient polysensibilisés à des parfums et huiles essentielles[25].

6. Conclusion

La fréquence des DC aux produits d’hygiène est malconnue. Parfums, conservateurs et tensioactifs sont lesprincipales sources d’allergies et d’irritation à ces produits.La plupart de ces réactions sont bénignes mais dans quelquescas il s’agit d’eczémas généralisés, invalidants ou demanifestations d’hypersensibilité immédiate. Il est importantque le praticien, en première ligne pour les observer ou lestester, puisse les déclarer. En France, depuis plusieurs années,le réseau confraternel Revidal-Gerda, en collaboration avecl’Afssaps collige ces accidents [27]. Plusieurs réseaux decosmétovigilance sont actuellement mis en place en Europe[28]. Ils devraient aboutir à une meilleure connaissance desaccidents allergiques aux cosmétiques et produits d’hygiène età limiter l’utilisation de certains d’entre eux, notamment chezl’enfant.

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