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DG/92/10

ORGANISATION DES NATIONS UNIESPOUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE

Discours prononcépar

M. Federico Mayor

Directeur généralde

l'Organisation des Nations Uniespour l'éducation, la science et la culture

(UNESCO)

à l'India International Centre

(IIC)

"L'éducation pour une société mondiale"

New Delhi, 22 mars 1992

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DG/92/10

Monsieur le Président,Mesdames, Messieurs,

La tâche dévolue à l'UNESCO par la Convention qui l'a créée - "atteindregraduellement, par la coopération des nations du monde dans les domaines del'éducation, de la science et de la culture, les buts de paix internationale et deprospérité commune de l'humanité" - est une vaste source d'inspiration pour quis'adresse à des assemblées comme la vôtre. L'ample programme de coopérationinternationale de l'Organisation en matière d'éducation, de science, de culture et decommunication peut être abordé sous de multiples angles, entre lesquels le choix n'estpas facile. Si j'ai décidé de vous parler aujourd'hui de l'éducation pour une sociétémondiale , c'est parce que ce thème touche pratiquement à tous les centres d'intérêt del'UNESCO et qu'il suscite en outre des interrogations vitales pour comprendre notretemps et façonner notre avenir commun

Nous vivons une époque de grand espoir et de profonde perplexité. La cessationeffective de la guerre froide, la déroute des idéologies totalitaires (parmilesquelles, disons-le, l'odieuse doctrine de l'apartheid), la proclamation de laliberté, des droits de l'homme et de la démocratie dans des régions du monde où ilsn'avaient pas droit de cité, l'attachement réaffirmé de la communauté mondiale à lacoopération internationale par l'entremise de l'Organisation des Nations Unies - tousces faits nouveaux et d'autres événements politiques encore ont ouvert desperspectives nouvelles à l'esprit humain. Simultanément, les difficultés inhérentes àl'apprentissage de la liberté et de la démocratie, la persistance ou la réapparitionde conflits fondés sur les différences religieuses, culturelles et ethniques et pardessus tout cela le dilemme du développement durable, ce sont là autant de source deprofonde inquiétude.

Le flux et le reflux des transformations politiques permettent souvent mal d'endiscerner la signification ou l'orientation générale. Pourtant, il me paraît clair -surtout, peut-être, depuis le déferlement des dernières mutations politiques - que,fondamentalement, nous tendons vers la mondialisation, vers un univers dont lesparties sont de plus en plus organiquement liées. Certes, l'ingénieur a joué un rôleplus important à cet égard que l'homme politique. En un peu plus d'un siècle, leprogrès des transports et - singulièrement - des communications a radicalement modifiénotre cadre de vie. La radiodiffusion sonore et la télévision par satellite àl'échelle mondiale, les réseaux internationaux de téléphone, de télex, de télécopie etde transmission de données, les liaisons par câbles à fibres optiques, toutes cestechnologies et beaucoup d'autres voisines ont virtuellement supprimé les contraintesdu temps et de l'espace qui ont conditionné les cultures et les mentalités à traversles âges.

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Les changements apportés par cette évolution sont aussi radicaux que finalementimprévisibles. La conscience de l'homme a certainement subi une subtile transformationà considérer notre planète terre comme un espace limité. Son attitude à l'égard de laguerre ne peut pas ne pas avoir été influencée par la diffusion "en temps réel" desinformations relatives au conflit du Golfe. Le rôle actif joué par les médiasétrangers lors de la tentative de coup d'Etat contre le Président Gorbatchev a mis enlumière la perméabilité des frontières à l'ère de la radiodiffusion par satellite. Lesimages de dénuement et de souffrance que retransmettent nos écrans de télévision deslieux les plus reculés du globe font qu'il nous est de plus en plus difficile d'éludernos responsabilités mondiales.

Ces incitations à une vision universelle des choses sont à l'heure actuelle grandementrenforcées par la sensibilisation croissante à des problèmes écologiques communs quipourraient menacer la survie de l'espèce. Par ailleurs, il est de mieux en mieuxcompris que le règlement de ces problèmes passe par la lutte contre l'ensemble desfléaux - pauvreté, analphabétisme, maladie, surpopulation - dont souffre le mondesous-développé. Il est de la plus haute importance que la Conférence des Nations Uniessur l'environnement et le développement qui doit avoir lieu à Rio de Janeiro en juinparvienne à associer ces deux facettes des préoccupations mondiales de façon à jeterles bases d'une action internationale concertée et efficace pour assurer la protectionde l'environnement et un développement durable à l'échelle du monde.

L'émergence d'une civilisation universelle suppose logiquement la promotion d'uneéducation à vocation universelle encore que l'on puisse se demander si la tendance àla mondialisation, dans la mesure où elle est aussi forte que je le crois, doit êtresoutenue par l'éducation. Je répondrai premièrement, que l'existence d'une tendance nenous dispense pas de comprendre ses incidences, afin de pouvoir en orienter ourectifier le cours et, deuxièmement, que la tendance à la mondialisation ne laisse pasde poser des problèmes : la pression qu'elle exerce inévitablement sur les différentspeuples et leurs cultures ne peut que provoquer de graves tensions et de fortesréactions. De fait, l'un des graves problèmes du prochain siècle sera de préserver ladiversité face à l'uniformité culturelle qui nous envahit déjà dans de nombreuxdomaines. Enfin, l'éducation à vocation internationale est une nécessité puisque lasensibilisation au monde qu'elle vise à créer est indispensable pour résoudre denombreux problèmes qui pourraient bien atteindre un point de non-retour si l'on nes'en préoccupe pas immédiatement. L'éthique - comme je ne cesse de le répéter - aaussi une dimension temporelle.

Cela étant dit, la notion d"'éducation à vocation mondiale" n'a pas encore été biendéfinie. L'éducation à vocation internationale encouragée par l'UNESCO depuis sacréation a toujours fait une large place à la coopération et à la paixinternationales, reflétant en un sens les tensions de la guerre froide. Elle a étédotée d'une base normative par la recommandation au titre un peu pesant que laConférence générale de l'UNESCO a adoptée en 1974, sur l'éducation pour lacompréhension, la coopération et la paix internationales, et l'éducation relative auxdroits de l'homme et aux libertés fondamentales. La recommandation énonçait une sériede principes et de pratiques visant à renforcer la contribution de l'éducation "à lacompréhension et à la coopération internationale, au maintien et au développementd'une paix juste, à l'instauration de la justice sociale, au respect et àl'application des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'éliminationdes préjugés, des conceptions erronées, des inégalités et de toutes les formesd'injustice qui entravent la réalisation de ces fins".

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La recommandation de 1974 a été largement acceptée et a pendant de nombreuses annéesinspiré l'action internationale menée dans ce domaine. L'évolution récente de lapolitique internationale et l'apparition de nouvelles préoccupations mondiales onttoutefois fait apparaître qu'il était temps de revoir ce texte pour le rendre plusconforme à l'esprit des temps nouveaux et focaliser l'attention sur les conditionsd'une "paix positive". Cette intention était en germe dans la déclaration du Congrèsinternational sur la paix dans l'esprit des hommes, tenu à Yamoussoukro (Côted'Ivoire), en 1989, qui invitait la communauté internationale à promouvoir "une culturede la paix, sur le fondement des valeurs universelles du respect de la vie, de liberté,de justice, de solidarité, de tolérance, des droits de l'homme et d'égalité entrefemmes et hommes" et à "faire mieux prendre conscience du destin commun de l'humanité,de manière à favoriser la mise en oeuvre de politiques communes qui garantissent lajustice dans les rapports entre les êtres humains ainsi qu'une relation harmonieuseentre l'humanité et la nature". A ses deux dernières sessions, la Conférence généralede l'UNESCO - tout en réaffirmant l'importance de la recommandation de 1974 - s'estprononcée dans le même sens en demandant que soit élaboré un "plan d'action intégrépour le développement de l'éducation à vocation internationale visant à engloberl'éducation relative aux droits de l'homme et l'éducation pour la paix et à instaurerune nouvelle approche intégrée de l'éducation à vocation internationale".

La Commission internationale sur l'éducation pour le XXIe siècle, qu'à sa dernièresession la Conférence générale de l'UNESCO m'a invité à réunir, sera un instrumentutile pour l'élaboration de directives en vue de l'éducation à vocation mondiale.Vingt ans après la publication du rapport, si riche d'enseignements, de la CommissionFaure, Apprendre à être , il incombera à cette nouvelle commission de réfléchir àl'éducation et à l'apprentissage pour le XXIe siècle et notamment aux moyens defaciliter l'évolution des contenus et des méthodes de l'éducation de manière à élargirla place faite aux valeurs humanistes et culturelles et à la compréhensioninternationale et mutuelle.

L'éducation à vocation mondiale va de pair avec l'universalisation de l'éducation debase, en particulier avec l'élimination de l'analphabétisme qui touche actuellement unmilliard de personnes dans le monde, dont deux tiers de jeunes filles et de femmes.C'est une tâche à laquelle l'UNESCO, en association avec la Banque mondiale, le PNUD etl'UNICEF et en coopération avec ses Etats membres et les ONG, se consacre aujourd'huiavec une énergie redoublée. D'autre part, un programme d'enseignement à vocationmondiale ne saurait être novateur à moins de tenir compte des impératifs suivants :respecter les valeurs - y compris les valeurs spirituelles - qui font ressortirl'unicité essentielle des êtres humains et leur symbiose avec la nature ; inculquer lesens d'une solidarité active entre tous les membres de la famille humaine, impliquantune répartition équitable des ressources nationales et internationales ; centrerl'attention sur les problèmes mondiaux qui marquent ou menace la qualité de la vie,notamment dans le domaine de l'environnement ; développer un "patriotisme planétaire" -pour reprendre l'expression percutante de Javier Pérez de Cuellar - qui transcende lesfrontières nationales et les allégeances ; préparer à une participation active à la viedémocratique, considérée comme la condition préalable du développement personnel etsocial ; promouvoir la compréhension et l'exercice des droits de l'homme, substratindispensable de la sensibilisation au monde ; encourager l'appréciation des autrescultures et l'apprentissage du pluralisme culturel. On pourrait ajouter que, pourrépondre aux intuitions et aux besoins du monde moderne, ce programme devrait être deconception holistique et interdisciplinaire et refléter l'interdépendance organique desproblèmes.

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Les questions écologiques devront y occuper une place correspondant à leur importancecruciale pour l'avenir de notre planète. Elles devront en outre être abordées du pointde vue de la protection de l'environnement mais aussi dans le contexte plus large del'interaction des sociétés et de la nature, c'est-à-dire du développement durable. Latâche est naturellement immense et complexe mais la sensibilisation instinctive de laplupart des élèves à l'environnement sera au départ un gros avantage. Il incombera àl'enseignant d'inculquer à chaque enfant l'idée simple et forte que les êtres humainsfont partie de la nature et que nous devons aimer nos arbres et nos rivières, nosterres et nos forêts, comme nous aimons la vie elle-même. L'école, au niveau du villageet du quartier, est un instrument exceptionnel pour établir un lien entre les problèmesmondiaux et la vie locale. Les arbres seront coupés et brûlés, le sol sera mis à nu,l'eau sera polluée si l'enseignement ne génère pas des solutions nouvelles et pratiquespour les problèmes de l'existence. Les maîtres peuvent être formés à ancrer lesprogrammes scolaires dans la connaissance du milieu, du sol, des eaux et des forêts etdans la réflexion que ces sujets inspirent. Il faut que les enfants, en apprenant àlire, apprennent aussi à lire l'environnement.

L'éducation relative aux droits de l'homme, pour la démocratie et pour le pluralismeculturel, est aussi appelée à jouer un grand rôle dans le nouveau programmed'enseignement. Le respect des droits de l'homme - la reconnaissance du droit de toutepersonne à la vie, à la liberté et à la sécurité (y compris la protection contre lesdangers qui menacent l'environnement) - est le fondement d'une ouverture aux problèmesdu monde. Il est en outre aujourd'hui plus que jamais évident que la démocratie estindispensable au plein respect de ces droits de même qu'à la pleine réalisation despossibilités de chacun et celles de la société. De plus, seule la démocratie est à mêmede fournir le cadre où les cultures minoritaires peuvent s'exprimer, où le dialogueinterculturel peut effectivement se nouer et où la tolérance - conçue pas seulementcomme une mentalité mais aussi comme une manifestation de la sensibilité - peut régner.L'UNESCO, sous les auspices de laquelle ont été tenues dernièrement un certain nombrede réunions sur le thème de la démocratie (Conférence "Culture démocratique etdéveloppement" à Montevideo, en novembre 1990 ; Forum international "Culture etdémocratie", à Prague, en septembre 1991), doit organiser à Tunis en novembre prochainune conférence qui examinera le contenu à donner à une véritable éducation pour ladémocratie. L'UNESCO a son rôle à jouer pour préparer les sociétés à vivre dans ladémocratie, condition politique de l'apparition de la mentalité nouvelle quel'ouverture au monde suppose.

Quand nous pensons à l'éducation, nous nous demandons peut-être trop ce qu'il fautfaire et pas assez qui doit le faire. Si l'on veut que l'éducation soit synonymed'apprentissage, un maître est indispensable - un maître qui soit capable d'établirune relation avec l'élève afin de susciter et de former son intérêt pour la matièreenseignée. Je crois que le métier d'enseignant est le plus difficile qui soit, à partcelui de parent ; or précisément les enseignants doivent travailler en associationétroite avec les parents. Pour que l'éducation à vocation mondiale devienne uneréalité, nous devons trouver le moyen - par l'intermédiaire des écoles normalesévidemment mais aussi de bien d'autres façons - de faire de tous les maîtres des"éducateurs à vocation mondiale".

L'UNESCO a cherché à promouvoir et à expérimenter le concept d'éducation à vocationinternationale notamment par son programme des Ecoles associées. Ce réseau unique eten constant essor d'établissements d'enseignement (on en compte actuellement plus de2.500 dans 105 Etats membres) a pour vocation de préparer les enfants et les jeunesgens à vivre dans une société mondiale. Le

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programme comprend une participation pratique, essentielle, à l'action internationale :par exemple, les Ecoles associées sont invitées à aider la communauté internationale àcélébrer les journées, les années et les décennies internationales, à contribuer àl'élimination de l'analphabétisme au sein de la collectivité et à s'intéresseractivement à la protection de l'environnement. C'est ce qu'atteste le texte rédigédernièrement par des élèves d'une Ecole associée indienne qui formulent en ces termesleurs espoirs pour l'avenir : "Nous attendons de la science et de la technologiequ'elles servent à l'amélioration de l'existence, qu'elles soient considérées non pascomme un instrument réservé à quelques-uns mais comme un ensemble de moyens propres àaccroître le bien-être de l'homme et la qualité de vie en général. Il ne faut en aucuncas les laisser altérer la nature, sa beauté ou son équilibre. Nous voulons que nosverts pâturages et nos forêts, notre flore et notre faune restent intacts. Nous voulonsque les oiseaux chantent et nichent dans les arbres. Nous voulons que les poissonsnagent dans les rivières et dans les mers et nous voulons que la pluie abreuve la terredesséchée ... Nous ne pouvons rien à ce qui est arrivé dans le passé mais nous pouvonsfaire mieux dans le présent pour rendre notre avenir aussi radieux que nous lesouhaiterions."

Les Ecoles associées constituent, au sens le plus noble du terme, des entreprisespilotes - qui balisent la voie que nous aimerions voir suivre par d'autresétablissements. Pour toucher partout les écoles, dans les villages et dans les lieuxles plus reculés du globe, il nous faut exploiter les prodigieuses ressources que latechnologie moderne des communications met à notre disposition et qui - je l'ai dit -concourent elles-mêmes à faire l'unité de la planète. Il n'est pas question que lespays en développement aient à se contenter de mécanismes insuffisamment développés. Lesprincipes de l'égalité et de la solidarité et - si nous sommes assez prévoyants - notresimple intérêt exigent précisément le contraire. Par le miracle du satellite decommunication, on peut pour un coût modéré envoyer dans les localités les pluslointaines des messages téléphonés, radiodiffusés ou télévisés susceptibles derévolutionner l'éducation tout autant que les pratiques sanitaires, la démographie,l'agriculture et la prévention des catastrophes. L'électronique peut être enl'occurrence - pour utiliser une expression militaire - un extraordinaire"multiplicateur de force" et accroître l'impact de la charge grâce à la perfection dusystème de transmission. Je sais que l'Inde a fait des expériences dans ce domaine avecson projet expérimental de télévision scolaire par satellite (Satellite InstructionTelevision Experiment - SITE) et il m'intéresserait d'en connaître les résultats.L'UNESCO, pour sa part, étudie les possibilités qu'offre la communication par satellitepour étendre la portée de ses programmes et c'est manifestement un domaine qui serad'une importance cruciale dans le proche avenir. Précisons que les médias privés etpublics - la presse écrite, la radio et la télévision - ont un rôle de premier plan àjouer à cet égard. L'éducation - y compris l'éducation à vocation mondiale - ne peutplus rester confinée dans des limites formelles, elle doit durer toute la vie etcouvrir tous les aspects de la vie , en ayant des ramifications dans tous les secteursde la communication sociale.

L'un des éternels problèmes de l'éducation à vocation internationale, qui reflète lacomplexité de la mondialisation, résulte de la tension qui existe en permanence entrenos attaches locales et notre approche planétaire. Toute conception de l'éducation àvocation mondiale doit être fondée sur un profond respect de la pluralité et de ladiversité de nos cultures, de nos convictions et de nos histoires. L'uniformisation oula normalisation n'est pas le but recherché. Ce n'est pas pour l'avènement du"meilleur des mondes" peuplé d'alphas et de gammas imaginé par Aldous Huxley que nousluttons, c'est pour l'affirmation de la dignité et l'épanouissement de la personnalitéde chaque

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être humain. Notre objectif doit être un véritable apprentissage, une éducationpersonnalisée, qui ait une origine et une appellation, qui soit adaptée à dessituations spécifiques et en soit le produit. Il ne saurait donc y avoir deprescriptions absolues en ce qui concerne l'éducation à vocation mondiale - ce qui mevaudra peut-être de l'indulgence pour les lacunes que pourrait comporter mon exposé.Comme la Décennie mondiale du développement culturel, dont la coordination est assuréepar l'UNESCO, l'éducation à vocation mondiale devra promouvoir la diversité culturelledans un contexte mondial ou encore, comme dans le projet de l'UNESCO relatif auxroutes de la soie, chaque culture sera envisagée comme un fil irremplaçable duprécieux tissu d'un réseau planétaire. En résumé, le monde que nous cherchons àédifier ne fera que transposer - sans la supprimer - la polyphonie originale descultures dans toute sa richesse. La question demeure de savoir si nous avons lacapacité morale spirituelle et intellectuelle de parvenir nous-mêmes à une visionmondiale des choses et de la faire partager aux autres. Je me trouve ici face à unpublic de choix, dans l'une des grandes capitales du monde, mais je pense à ceux quej'ai rencontrés au cours de mes voyages et qui ne sont pas ici aujourd'hui.

Je vois un instituteur de village, dépourvu des moyens les plus essentiels, quitravaille avec ses élèves pour leur apprendre à lire et à écrire. Je vois des parents,en Inde, en Espagne, partout, soucieux de voir leurs enfants mieux instruits etassurés d'avoir le nécessaire pour vivre. Je vois un jeune habitant des taudis etressens la frustration que provoque en lui la vaine recherche d'un emploi et ledésespoir qui le mène à la drogue. Je vois un scientifique qui dans un laboratoire maléquipé s'efforce de doter son pays de la base scientifique et technologique requisepour son développement. C'est sur ceux-là que doit être centré tout conceptd'éducation à vocation mondiale parce qu'ils sont le monde. Quand viendra le jour oùnous pourrons nous enseigner mutuellement en un processus d'échange continuel, nousaurons surmonté la méfiance séculaire inhérente à la culture de guerre et nous seronslancés dans l'aventure d'une culture de paix. Cela nous obligera à faire la liaisonentre l'homme et la nature, la ville et la campagne, le temps et l'espace, créantainsi une nouvelle culture civique pour la planète.

Ce jour viendra-t-il ? Serons-nous à la hauteur de la tâche ? Je trouve encourageantela réflexion par laquelle Arthur Clarke a terminé l'allocution qu'il a prononcée à lamémoire de Nehru ici, à New Delhi, en 1986 :

"Il y a eu une époque où (la planète) était dominée par des monstres quiessayaient de se protéger par des carapaces toujours plus encombrantes, au pointde devenir des forteresses ambulantes. Ils ne remarquaient jamais, tandis qu'ilsavançaient à l'aveuglette à travers les forêts et les marécages, les petitescréatures qui bondissaient pour les éviter : les premiers mammifères - nosancêtres. C'est l'intelligence et non une carapace qui nous a permis de gagner laterre".

Avec Arthur Clarke et au nom de l'UNESCO, je dis : "Puisse l'intelligence - alliée àla solidarité, à la compassion et à la créativité - nous permettre de gagnerl'avenir".

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