5
' ! ' DG/92/36 ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE Discours de M. Federico Mayor Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) devant l'Assemblée générale de l'Association interaméricaine de la presse (SIP) Madrid (Espagne), le 1er octobre 1992 Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister. Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.

DG/92/36 ORGANISATION DES NATIONS UNIES …unesdoc.unesco.org/images/0009/000930/093079f.pdf · Directeur général de l'Organisation des Nations ... les directeurs des chaînes de

  • Upload
    ngolien

  • View
    213

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

' ! '

DG/92/36

ORGANISATION DES NATIONS UNIESPOUR L'EDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE

Discoursde

M. Federico Mayor

Directeur généralde l'Organisation des Nations Unies

pour l'éducation, la science et la culture(UNESCO)

devant l'Assemblée généralede l'Association interaméricaine de la presse (SIP)

Madrid (Espagne), le 1er octobre 1992

Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister.Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.

DG/92/36

Si l'on veut renforcer les systèmes de libertés publiques, corriger les intolérables déséquilibressociaux et économiques à l'échelle nationale et internationale, permettre à toutes et à tous d'exercerleurs droits sans restriction et d'assumer leurs devoirs et leurs responsabilités, il est indispensableque votre voix, la voix de la presse, la force la plus importante avec laquelle doit compter la raison,s'élève, à la fois respectée et vigoureuse, pour qu'enfin l'on puisse mettre en évidence, réduire etsupprimer les immenses obstacles - nés d'intérêts, d'habitudes routinières et de préjugés - quis'opposent à des changements aussi urgents qu'inéluctables. Ce qu'il reste à faire, nous le savons: laQuatrième stratégie des Nations Unies pour le développement et la CNUCED ont exposé avecclarté les objectifs du développement humain et leurs implications éthiques, écologiques etéconomiques. Mais le temps presse. Certes, nous disposons des ressources méthodologiques ettechniques nécessaires, et nous avons pris suffisamment de hauteur pour pouvoir entrevoir ce quepourrait être un avenir plus équitable, mais nous avons aussi des pieds d'argile. Nos démocratiessont fragiles et nos convictions sociales manquent de force. Pourtant tous ensemble, nous pouvonscréer les fondements solides dont cette époque de transition historique a besoin.

Monsieur le Président,

Je tiens avant tout à exprimer ma gratitude à toutes les personnes présentes et en particulierremercier M. James McClatchy de m'avoir invité en leur nom à participer à cette quarante-huitièmeAssemblée générale de la SIP.

Avant d'aller plus loin, je voudrais vous faire part de deux considérations d'ordre général. Enpremier lieu, et ce n'est pas par simple politesse, je saisis cette occasion pour exprimer ma sincèregratitude à l'Association interaméricaine de la presse. Cette reconnaissance s'explique par laconstance avec laquelle la SIP a donné pendant tant d'années l'image d'une organisation solidaire etsoudée, ferme dans ses institutions et fidèle à ses principes au niveau de l'action tout en sachant serenouveler et dialoguer sans complexe avec une réalité toujours plus mouvante et difficile. C'est cedont témoigne son combat incessant et résolu pour défendre la liberté d'expression etl'indépendance de la presse et protéger ses membres quand ceux-ci sont persécutés, censurés,emprisonnés, harcelés, voire même assassinés, pour le seul délit d'avoir exercé leurs droits dejournalistes et d'êtres humains.

En deuxième lieu, je voudrais rappeler les engagements incontournables de l'UNESCO dansle domaine de la communication qui constitue une part très importante de ses activités, comme lementionne expressément notre Acte constitutif: "Les Etats signataires de cette Convention, résolusà assurer à tous (...) la libre poursuite de la vérité objective et le libre échange des idées et desconnaissances, décident de développer et de multiplier les relations

Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister.Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.

DG/92/36 - page 2

entre leurs peuples en vue de se mieux comprendre et d'acquérir une connaissance plus précise etplus vraie de leurs coutumes respectives".

Ce mandat constitue, avec l'Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (quigarantit à tout individu le droit à la liberté d'opinion et d'expression), ce qui implique le droit derecevoir et de répondre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelquemoyen d'expression que ce soit) et l'alinéa 2 de l'Article 19 du Pacte international relatif aux droitscivils et politiques approuvé par l'Assemblée générale des Nations Unies et entré en vigueur enmars 1976 (en vertu duquel toute personne a droit à la liberté d'expression, droit qui comprend laliberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sansconsidérations de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique ou par tout autremoyen de son choix), le fondement initial de l'engagement et de l'action de l'UNESCO dans cedomaine essentiel à tous égards pour assurer à l'humanité un avenir meilleur.

Monsieur le Président,

Les Etats membres ont approuvé à l'unanimité la stratégie de la communication de l'UNESCO quivise à "promouvoir et garantir la libre circulation de l'information dans les domaines aussi bieninternational que national et sa diffusion plus ample et mieux équilibrée, sans aucun obstacle à laliberté d'expression". Cette stratégie s'articule autour de plusieurs axes: premièrement, encouragerla libre circulation de l'information aux niveaux national et international; deuxièmement,promouvoir la diffusion plus large et mieux équilibrée de l'information sans aucune entrave à laliberté d'expression; troisièmement, créer tous les moyens appropriés pour renforcer les capacitésde communication des pays en développement pour accroître leur participation au processus decommunication; quatrièmement enfin, favoriser la connaissance et la compréhension mutuelle desnations en prêtant le concours de l'UNESCO aux organes d'information et en recommandant tousaccords internationaux qu'elle juge utile pour faciliter, conformément à l'Article premier de l'Acteconstitutif de l'UNESCO "la libre circulation des idées par le mot et par l'image".

En même temps qu'ils confirmaient leur appui à cette nouvelle stratégie, les Etats membres ontadopté, lors de la dernière session de la Conférence générale qui s'est tenue en octobre 1991, uneDéclaration sur la promotion de la liberté de la presse dans le monde où il est rappelé qu"'unepresse libre, pluraliste et indépendante est une composante essentielle de toute sociétédémocratique". Cette importante déclaration s'inscrivait dans le droit fil du séminaire organisé parl'UNESCO, les Nations Unies et d'autres organisations et institutions internationales à Windhoek(Namibie) en avril 1991 pour le développement d'une presse libre, indépendante et pluraliste enAfrique.

La Déclaration invite entre autres le Directeur général à "étendre aux autres régions du monde lesefforts entrepris jusqu'ici en Afrique et en Europe pour encourager la liberté de la presse,promouvoir l'indépendance et le pluralisme des médias et à célébrer l'anniversaire de laDéclaration de Windhoek, adoptée le 3 mai 1991." Conformément à cette Déclaration, le ConseilIntergouvernemental du Programme international pour le développement de la communication(PIDC), qui est l'un des rouages essentiels de sa mise en application, a souligné, à sa treizièmesession qui s'est tenue à Paris du 17 au 24 février 1992, que l'orientation du PIDC relative à laliberté de la presse, au pluralisme et à l'indépendance des

Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister.Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.

DG/92/36 - page 3

médias constituerait une préoccupation prioritaire et a décidé qu'à l'avenir les projets émanantd'institutions privées seraient acceptés.

A l'occasion du premier anniversaire de cet événement - le 3 mai, proclamé par les Nations Unies"Journée internationale de la liberté de la presse" - j'ai adressé un message qui a été largementdiffusé. J'espère qu'à l'avenir tous les médias auront à coeur de contribuer à la célébration du 3 maipour lui donner un retentissement à la mesure de sa valeur symbolique.

L'UNESCO a consacré une attention particulière au renforcement - parfois à la renaissance ou à lanaissance - de la presse indépendante en Europe centrale et en Europe de l'Est. En février 1990,quelques mois seulement après la chute du mur de Berlin, des journalistes de la région ont purencontrer au Siège de l'UNESCO à Paris leurs collègues des Etats-Unis d'Amérique, du Canada etd'Europe occidentale. Deux mois après, j'ai convoqué, également à Paris, les directeurs des chaînesde radio et télévision récemment créées en Europe et leurs collègues d'Amérique du Nord avec lemême objectif en vue: établir un réseau de relations personnelles ou internationales, afin de mieuxse connaître et de s'entraider.

La réunion de février avait bénéficié de l'appui de l'Institut international de la presse (IIP), de laFédération internationale des éditeurs de journaux, du Comité mondial pour la liberté de la presse,de l'Association d'Amérique du Nord et de la Fédération internationale de la presse périodiquealors que celle d'avril était organisée avec l'appui de l'Université radiophonique et télévisuelleinternationale (URTI). L'un des résultats concrets de ces rencontres a été la création et la mise enroute à Varsovie par l'UNESCO, en coopération avec le PNUD, les Pays-Bas, la Pologne, lesEtats-Unis d'Amérique et un nombre non négligeable d'organisations non gouvernementales, d'uncentre régional de formation des journalistes.

Le développement de la réflexion sur la législation des médias en Europe centrale et en Europe del'Est constitue une entreprise particulièrement intéressante dans cette perspective. Entre autresprogrammes, on s'emploie actuellement à rassembler des instruments juridiques des paysd'Amérique du Nord et de la Communauté européenne relatifs à la liberté d'expression et à d'autresthèmes connexes comme la diffusion et la protection des sources d'information des journalistes.Les résultats seront notamment communiqués aux organisations professionnelles, auxgouvernements qui travaillent en ce moment à l'élaboration d'une nouvelle législation sur lesmédias et aux groupes de défense des droits de l'homme.

Mais nous ne négligeons pas pour autant les autres régions et les autres institutions. En associationavec les Nations Unies et dans le même esprit que le séminaire de Windhoek, nous sommes entrain d'organiser un séminaire régional sur la promotion de l'indépendance et le pluralisme desmédias qui aura lieu à Alma-Ata, au Kazakhstan, à partir du 5 octobre 1992; et, toujours avec l'IIP,l'UNESCO prévoit d'organiser un séminaire sur le même thème à Santiago du Chili en 1993 ou audébut de 1994. Je ne doute pas de pouvoir compter à cette occasion sur l'appui de votreassociation.

L'UNESCO a engagé un dialogue ouvert avec diverses organisations comme la Fédération latino-américain des journalistes (FELAP), la Fédération latino-américaine des travailleurs de la presse(FELATRAP), l'Association internationale de radiodiffusion (AIR) et l'Union latino-américaine etdes Caraïbes de radiodiffusion (ULCRA). Elle travaille aussi avec des associations de jeunesjournalistes comme "Article 19" et "Index sur la censure" (Royaume-Uni), le Comité pour laprotection du journaliste (Etats-Unis) et "Reporters sans frontières" (France).

Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister.Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.

DG/92/36 - page 4

Monsieur le Président,

La réalité politique et économique mondiale ainsi que -le développement des nouvellestechnologies imposent aux médias et en particulier à la presse des responsabilités auxquelles illeur est moralement impossible de se dérober. Nous avons la formidable tâche de perfectionner ladémocratie pour qu'elle soit davantage participative, pluraliste et vécue au quotidien par chaquecitoyen au niveau de la communauté comme de la nation. J'ai déjà eu l'occasion d'affirmer àdiverses reprises que nous devions inventer une culture pour la démocratie dont laresponsabilité incombe certes à tous mais plus particulièrement au système d'éducation et auxmoyens de communication. Assurer la diffusion des valeurs essentielles de la démocratie commela liberté d'expression et d'opinion, la tolérance et la solidarité, c'est là un engagement qui exigeune conviction et un dévouement sans faille. Il s'agit de rendre possibles les transformationssocio-économiques qui atténueront les intolérables déséquilibres actuels.

Les progrès technologiques mis au service de la presse écrite rendent d'autant plus criantecette obligation qu'il est aujourd'hui possible de la satisfaire. L'utilisation de satellites pourpermettre la parution simultanée du même journal dans différentes villes ou de l'informatique depointe pour la collecte, le traitement et la production des nouvelles et des reportages donne uneidée des moyens techniques dont nous disposons; il s'agit de les rendre accessibles aux pays lesmoins développés pour qu'ils puissent les utiliser à moindre coût mais avec la même efficacité.D'autre part, nous devons nous demander, et je m'adresse en particulier aux responsables desmédias, dans quelle mesure le progrès technologique qui permet la fabrication et la diffusion d'unepresse qui se distingue par la qualité de sa présentation est mis réellement et concrètement auservice des intérêts du public. Dans quelle mesure cela favorise l'information, dans quelle mesureces prodigieux moyens techniques créés par le génie humain permettent de mieux toucher lelecteur et de mieux l'informer afin qu'il puisse agir plus efficacement, en interaction avec sonenvironnement, et appréhender la réalité.

Aujourd'hui plus que jamais "le savoir-faire" et "le faire-savoir" s'épaulent mutuellement.Faisons donc savoir, avec tous les moyens techniques à notre disposition, que nous ne baisseronsjamais les bras dans notre lutte pour l'équité, la solidarité et la justice. C'est ainsi que, tousensemble, nous contribuerons à bâtir dans le monde entier l'édifice de la démocratie, solidementassis sur la pierre angulaire de la liberté d'expression.

Document produit par reconnaissance optique de caractères (OCR). Des erreurs orthographiques peuvent subsister.Pour accéder au document d'origine sous forme image, cliquez sur le bouton "Original" situé sur la 1ère page.