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Diplômé en 1980 (promotion Voltaire), Jean-Luc Déchery est aujourd’hui CEO de la maison de maroquinerie Camille Fournet. Fort de ses expériences dans le public et dans le privé, il encourage les futurs énarques à s’ouvrir au monde de l’entreprenariat. Rencontre avec un ancien élève visionnaire. Pourquoi vous avez choisi l’ENA… « C’est l’envie de poursuivre une formation après mes études (l’ESSEC) qui m’a encouragé. Dans les années 70, l’ENA avait une position très enviable, à la fois comme fin de cursus universitaire et comme porte d’entrée à la fonction publique. C’était aussi une époque où l’Etat avait plus de rennes dans les mains, par sa présence aussi bien que par la réglementation. La décentralisation n’avait pas eu lieu et des réglementations fortes régissaient l’économie. Je garde un très bon souvenir de mes années dans le public mais j’ai été profondément influencé par un grand-père entrepreneur. Il avait une usine de jumelles dans l’Oise. Vous voyez, la culture familiale nous rattrape souvent !» Si vous n’aviez pas fait l’ENA… « J’avais préparé deux autres possibilités : Etudier l’économétrie au MIT ou rentrer directement dans le monde des affaires.» Si vous pouviez réformer l’ENA… « Ce que j’ai apprécié à l’ENA c’est la partie stage. En général, on y rencontre des hommes et des femmes très intéressants et on nous donne AAEENA – 70 ans de l’ENA – Portraits d’anciens élèves – Les énarques et l’entreprenariat

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Diplômé en 1980 (promotion Voltaire), Jean-Luc Déchery est aujourd’hui CEO de la maison de maroquinerie Camille Fournet. Fort de ses expériences dans le public et dans le privé, i l encourage les futurs énarques à s’ouvrir au monde de l’entreprenariat. Rencontre avec un ancien élève visionnaire.

Pourquoi vous avez choisi l’ENA… « C’est l’envie de poursuivre une formation après mes études (l’ESSEC) qui m’a encouragé. Dans les années 70, l’ENA avait une position très enviable, à la fois comme fin de cursus universitaire et comme porte d’entrée à la fonction publique. C’était aussi une époque où l’Etat avait plus de rennes dans les mains, par sa présence aussi bien que par la réglementation. La décentralisation n’avait pas eu lieu et des réglementations fortes régissaient l’économie. Je garde un très bon souvenir de mes années dans le public mais j’ai été profondément influencé par un grand-père entrepreneur. Il avait une usine de jumelles dans l’Oise. Vous voyez, la culture familiale nous rattrape souvent !»

Si vous n’aviez pas fait l’ENA… « J’avais préparé deux autres possibilités : Etudier l’économétrie au MIT ou rentrer

directement dans le monde des affaires.»

Si vous pouviez réformer l’ENA… « Ce que j’ai apprécié à l’ENA c’est la partie stage. En général, on y rencontre des hommes et des femmes très intéressants et on nous donne

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beaucoup de responsabilités. Pour un jeune, c’est vraiment enthousiasmant. Il faudrait faire de même dans des secteurs de la société que l’ENA ne connaît pas ou n’a pas vocation à connaître. Il serait bon de familiariser les futurs sortants de l’Ecole à l’entreprenariat, en encourageant les stages dans l’entreprenariat, que ce soit auprès d’entrepreneurs aguerris ou auprès de startups. Je trouve que la France manque cruellement d’entrepreneurs et que la classe politique ne les connaît pas assez. Donc, quoi de mieux pour de futurs dirigeants de la sphère publique que de se former auprès d’eux ! »

Managements public et privé, y-a-t-i l une différence ? « Les deux partagent un souci d’efficacité. Certes, l’un vise principalement la rentabilité financière pour se développer quand l’autre doit assumer des objectifs de politique publique. La différence principale réside à mes yeux dans la formation des équipes et dans la manière de les gérer. Dans le privé, c’est un peu comme à l’armée. Les équipes doivent être formées et dédiées, en osmose avec le chef. Dans le

public - du moins c’est mon souvenir - il y a plus d’anonymat et de non- individualisation des responsabilités. On assume une fonction au delà de sa personne et c’est beaucoup plus protecteur. C’est la première chose qui m’a frappé lors de mon passage du public au privé. »

L’Etat, pour vous c’est … « C’est avant tout les fonctions régaliennes. »

La maîtrise de l’Anglais, pour un candidat à l’ENA, c’est… « Absolument indispensable. Mais avec d’autres langues ! »

L’anglicisme que vous refusez d’employer… « Le mot ‘meeting’ par exemple. Je le trouve un peu fade. Je lui préfère de loin ‘réunion’ ou alors ‘séance ‘ comme chez les Suisses. Chez Camille Fournet, on s’efforce de bannir les mots anglais mais ce n’est pas toujours facile car ils ont envahi le monde du marketing. ‘benchmarking’, ‘brainstorming’… la liste est longue ! ».

Avez vous des héros ? « J’en ai plusieurs à vrai dire. Toutes les personnes, dans l’Histoire, qui ont su résister à

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des pressions considérables – politiques, sociales, culturelles… - et qui, par leur seule trajectoire, ont symbolisé quelque chose de fort. Je pense en particulier à de grands résistants ou à Gandhi. »

Si vous aviez pu inventer quelque chose… « Comme je me situe plutôt sur des biens frivoles, je dirais un produit qui améliore la santé ou satisfasse la curiosité intellectuelle. Un nouveau médicament ou une découverte scientifique… Mais c’est un peu tard pour moi…! »

Pourquoi ? Je ne connais pas de limite d’âge au concours Lépine… « Je veux parler de recherche fondamentale ! Et cela représente une vie. Un de mes amis de lycée est un des spécialistes mondiaux les plus reconnus des neutrinos. Ce sont des particules sans masse et les recherches à ce sujet ont aujourd’hui principalement lieu au Japon. Il y est souvent après avoir été chercheur en France, en Californie et en Suisse. Je pense souvent à lui. »

A défaut d’être un grand inventeur, êtes-vous un geek ? « Pas vraiment. Je me tiens plutôt à l’arrière-garde. Mais je

reconnais que les nouvelles technologies sont des outils admirables. Les avantages l‘emportent sur les inconvénients ! »

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