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DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ET POSITIONNEMENT CONCURRENTIEL DES ENTREPRISES : BILAN DES NOUVELLES PRATIQUES ET ÉLÉMENTS DE COMPARAISON FRANCO-ALLEMANDE Rémi Lallement De Boeck Supérieur | Innovations 2010/2 - n° 32 pages 11 à 34 ISSN 1267-4982 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-innovations-2010-2-page-11.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Lallement Rémi, « Droits de propriété intellectuelle et positionnement concurrentiel des entreprises : bilan des nouvelles pratiques et éléments de comparaison franco-allemande », Innovations, 2010/2 n° 32, p. 11-34. DOI : 10.3917/inno.032.0011 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Dalhousie University - - 129.173.72.87 - 13/11/2013 23h59. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - Dalhousie University - - 129.173.72.87 - 13/11/2013 23h59. © De Boeck Supérieur

Droits de propriété intellectuelle et positionnement concurrentiel des entreprises : bilan des nouvelles pratiques et éléments de comparaison franco-allemande

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DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ET POSITIONNEMENTCONCURRENTIEL DES ENTREPRISES : BILAN DES NOUVELLESPRATIQUES ET ÉLÉMENTS DE COMPARAISONFRANCO-ALLEMANDE Rémi Lallement De Boeck Supérieur | Innovations 2010/2 - n° 32pages 11 à 34

ISSN 1267-4982Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-innovations-2010-2-page-11.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Lallement Rémi, « Droits de propriété intellectuelle et positionnement concurrentiel des entreprises : bilan des

nouvelles pratiques et éléments de comparaison franco-allemande »,

Innovations, 2010/2 n° 32, p. 11-34. DOI : 10.3917/inno.032.0011

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur.

© De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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DROITS DE PROPRIÉTÉINTELLECTUELLE

ET POSITIONNEMENTCONCURRENTIEL

DES ENTREPRISES : BILANDES NOUVELLES PRATIQUES

ET ÉLÉMENTS DE COMPARAISONFRANCO-ALLEMANDE

Rémi LALLEMENTCentre d’Analyse Stratégique, Paris

[email protected]

Avec l’entrée progressive dans une économie de plus en plus fondée surla connaissance, les droits de propriété intellectuelle (DPI) acquièrent uneimportance grandissante en tant que clé d’accès à la nouvelle ressource pre-mière de la création de richesses. De ce fait, à travers leurs différents usages,ils constituent désormais un outil stratégique pour les entreprises, pour leursactivités d’innovation et de création ou, plus généralement, pour leur posi-tionnement concurrentiel. Sur cette toile de fond et dans le contexte de lacrise économique et financière qui ouvre la décennie nouvelle, il convientde se demander où se situent les entreprises françaises. Se sont-elles suffisam-ment emparées des outils de la propriété intellectuelle (PI) et savent-elles enjouer à bon escient, par rapport à leurs homologues d’autres pays ?

Pour en juger, adopter une perspective de comparaison franco-allemandese justifie au moins sous deux angles complémentaires. Premièrement, lessystèmes de PI existant en Allemagne et en France procèdent tous les deuxd’une même philosophie de base caractéristique du droit européen continen-tal, par opposition notamment à la common law anglo-saxonne. Ceci estainsi très clair dans le domaine du droit d’auteur, par rapport à la logique ducopyright (Geiger et al., 2007). Deuxièmement, il existe malgré tout d’impor-

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tantes différences franco-allemandes, sur ces questions. Ceci vaut notammentdans le cas du brevet, sachant qu’en la matière, le système européen est restérelativement fragmenté, de sorte que la France et l’Allemagne se distinguentnotamment par leurs jurisprudences nationales et par les procédures d’exa-men des demandes effectuées par leurs offices de brevets respectifs (Guellec,van Pottelsberghe, 2007). À en juger par une série d’indicateurs et concer-nant en tout cas les brevets, les entreprises semblent dans l’ensemble nette-ment moins habituées à recourir aux DPI en France qu’en Allemagne(Lelarge, 2009). Sur le plan de l’analyse économique, on peut dès lorss’interroger sur les raisons de tels décalages. Quel lien existe-t-il entre l’usagedes DPI par les entreprises et les performances de ces dernières en termesd’innovation et de compétitivité ? Les contrastes observés de part et d’autredu Rhin, concernant le recours aux instruments juridiques de la PI, relèvent-ils de simples différences culturelles de la part des entreprises, c’est-à-diredécoulent-ils de problèmes de sensibilisation et de formation ? Plus fonda-mentalement, peut-on les attribuer à des différences dans la capacité à inno-ver (concernant en particulier les données de brevets ou de marques) ou àcréer (notamment pour les œuvres couvertes par le droit d’auteur et les droitsvoisins) ? Ou bien existerait-il des manières différentes d’utiliser les DPIdans les deux pays considérés ? Cette dernière question se pose d’autant plusque les DPI donnent lieu à des usages de plus en plus divers, bien au-delà dela fonction originelle de protection anti-contrefaçon (Le Bas, 2007). Cesnouveaux usages sont eux-mêmes à rapprocher notamment des nouvellespratiques en matière d’« innovation ouverte » (OCDE, 2008).

En réponse à cet ensemble de questions, le présent article apporte deuxséries de réponses, en interprétant et confrontant les résultats d’une séried’enquêtes relatives à différents pays. D’une part, il montre qu’entre des payscomme l’Allemagne et la France, le recours aux DPI peut être considérécomme un reflet des structures économiques et ce, pour une série de critèrestels que les secteurs d’activité, les tailles d’entreprise, la propension moyenneà innover ou la compétitivité internationale. D’autre part et en quelquesorte en inversant la perspective, il explique en quoi les différents usages dela PI peuvent aussi être considérés comme une source d’avantage compétitifou de création de valeur, pour les entreprises, d’autant plus que les actifsintellectuels en jeu ne sont pas forcément engendrés en interne et peuventêtre loués (via des contrats de licence appropriés) ou acquis sur le marché. Enoutre, il apparaît que, si les entreprises peuvent utiliser les DPI à des finscompétitives – pour délimiter leur champ d’action par rapport à celui deleurs rivales –, elles peuvent aussi s’en servir pour des relations relevant dupartenariat ou d’un mélange de concurrence et de coopération (notion de« coopétition »).

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Dans ce but, l’article propose tout d’abord des éléments de comparaisoninternationale permettant de situer globalement les entreprises françaisespar rapport à leurs principales concurrentes, pour un certain nombre d’indi-cateurs concernant les brevets, les marques et les dessins et modèles (section 1).Il explore ensuite les principaux éléments d’explication d’ordre structurel, enapprofondissant surtout les questions de spécialisation sectorielle et les fac-teurs institutionnels (section 2). Après ces registres successivement macro-puis mésoéconomiques, l’accent est mis pour finir sur le niveau microécono-mique, à travers une analyse des différents usages des DPI, en allant des pra-tiques les plus traditionnelles (protection anti-contrefaçon, préservation dela liberté d’exploitation) vers des usages plus récents ou se développant leplus nettement, que ce soit dans une logique d’innovation ouverte (rôle decoordination d’activités partenariales) ou, plus généralement, dans une dimen-sion stratégique (brevets bloquants, logique de dissuasion, etc.) (section 3) 1.

DES ÉCARTS À EXPLIQUER : ÉLÉMENTS DE COMPARAISON INTERNATIONALE

Analyser le comportement des entreprises françaises nécessite de fournir deséléments de cadrage d’ensemble, ce qui implique de commencer le raisonne-ment à l’échelle des pays.

Le cas des brevets

Tout d’abord, au vu des données de l’OMPI, l’Allemagne et la Franceétaient, en termes de pays d’origine, détentrices respectivement du qua-trième et du cinquième plus gros portefeuille de brevets au monde, en 2006-2007, derrière successivement les États-Unis, le Japon, la Corée du Sud etjuste devant la Russie, la Chine et le Royaume-Uni (WIPO, 2009). Moinssouvent commentées que les flux des dépôts de brevets, ces données de stocksont pourtant au moins autant significatives au plan économique. En effet,elles renseignent sur des brevets non seulement déjà délivrés et donc ayantfranchi avec succès la procédure d’examen des offices de brevets considérésmais aussi jugés économiquement dignes d’être conservés par leurs titulairesdans la durée, bien que le maintien de cette validité implique de payer cha-que année des taxes (annuités) aux offices concernés.

1. Cet article a bénéficié des commentaires de Francis Hagel et des évaluateurs anonymes de larevue Innovations. L’auteur reste cependant seul responsable des insuffisances ou inexactitudesqui peuvent y subsister.

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Ceci dit, les données de flux donnent malgré tout des indications pré-cieuses, notamment sur les profils d’évolution temporelle. En outre, tous lesbrevets ne se valent pas, en termes économiques. À cet égard, les brevets dits« triadiques » (graphique 1, ci-dessous) fournissent un indicateur intéressantcar ils correspondent en général à des inventions de grande valeur économi-que. Or les données les plus récentes montrent qu’en 2007, pour le nombrede brevets triadiques par million d’habitants comme par unité de PIB ou parunité de dépense en R & D, la France est dans la moyenne des pays del’OCDE2. En termes de niveaux, sur ce plan, elle se trouve distancée nette-ment par plusieurs pays tels que la Suisse, le Japon, la Suède et l’Allemagne,ainsi que d’autres pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Finlande, Danemark),les États-Unis et la Corée du Sud, même si elle reste très loin devant l’Italieet l’Espagne et, a fortiori, devant des pays émergents tels que la Chine, le Bré-sil ou l’Inde. En particulier, le nombre de brevets triadiques par habitant se révèledeux fois plus faible en France qu’en Allemagne. Qui plus est, le dynamisme enla matière est moins net en France que dans les principaux pays comparables,comme le montre notamment l’évolution enregistrée depuis 1995 (graphi-que 1, ci-dessous).

Graphique 1 – Le nombre de brevets triadiques a par million d’habitants (en 2007) : une comparaison au sein des pays de l’OCDE

(a) Brevets qui ont fait l’objet d’un dépôt aussi bien auprès de l’office européen (OEB) que de l’office américain

(USPTO) et de l’office japonais (JPO). Les données sont fondées sur le pays de résidence de l’inventeur et la première

date de priorité ; le mode de comptage est fractionnel. Source : graphique de l’auteur d’après la base de données de

l’OCDE sur les brevets.

Un diagnostic assez proche – bien qu’avec des écarts moins accentués –peut être obtenu en rapportant cette fois le nombre des brevets triadiquesaux dépenses de R & D financées par les entreprises : les pays les plus en

2. Si les brevets considérés ici sont déposés en partie par des organismes publics de recherche etdes inventeurs individuels, ils le sont quand même principalement par des entreprises, de sorteque de telles données fournissent des approximations raisonnables pour un diagnostic centré surles entreprises.

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pointe sont alors les Pays-Bas, le Japon, l’Allemagne, la Suisse et la Corée duSud, tandis que la France se situe, là aussi, à proximité de la moyenne des 27pays de l’UE. Ceci revient à dire qu’un même effort de R & D débouchegénéralement sur moins de brevets triadiques dans notre pays qu’en Allema-gne.

Le cas d’autres droits de propriété intellectuelle : les marques et les dessins etmodèles

Mis à part les brevets, qui concernent l’innovation technologique, lesclassements internationaux sont différents pour d’autres types de DPI telsque les marques et les dessins et modèles.

Dans le cas des marques, qui correspondent à l’innovation commerciale,la France occupe une place très forte. Elle se classe ainsi au deuxième rangmondial pour les marques enregistrées par la voie internationale3 ces derniè-res années, ce qui relative le fait qu’elle n’arrive qu’en sixième place pour lesmarques enregistrées par la voie communautaire4 (tableau 1, ci-après).

À ces marques internationales et communautaires s’ajoutent en outre lesmarques nationales, qui sont gérées par les offices nationaux tels que l’INPI.En termes de stock et au total, selon les données publiées par l’OMPI, laFrance constitue le 3e pays dans lequel le plus de marques étaient en vigueuren 2007 (plus de 1,10 million), derrière le Japon (1,78 million) et les États-Unis (1,33 million) et juste devant l’Allemagne (plus de 994 000) (WIPO,2009).

La situation est similaire dans le cas des dessins et modèles, qui protègentl’aspect esthétique ou ornemental des produits manufacturés. La Francearrive ainsi en 3e position pour les dessins et modèles déposés par la voieinternationale (Lallement, 2009a) comme pour les dessins et modèles com-munautaires (tableau 1, ci-dessous).

Au vu du rapport de l’OMPI déjà évoqué, la France constitue même lepays dans lequel le plus de dessins et modèles étaient en vigueur en 2007(plus de 406 000), nettement devant l’Allemagne (environ 304 000), laChine (près de 279 000), le Japon (258 000) et les États-Unis (215 000).

3. Il s’agit du « système de Madrid », qui comprend 84 pays membres dans le monde et est géréde longue date par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI, Genève).4. La marque communautaire, officiellement entrée en vigueur en avril 1996, est un titre unitairedélivré par l’OHMI (Office de l’harmonisation dans le marché intérieur) et couvrant l’ensembledu territoire de l’Union européenne. Le même OHMI a également en charge les dessins et modè-les obtenus par la voie communautaire, créés en 2002 et dont les premiers dépôts remontent audébut de l’année 2003.

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Tableau 1 – Les six principaux pays d’origine des marques enregistrées (et des dessins et modèles déposés) par la voie communautaire

et/ou par la voie internationale (données cumulées sur plusieurs années)

Sources : calculs de l’auteur d’après les données de l’OMPI (pour la voie internationale) et de l’OHMI (pour la voie

communautaire).

DES CONTRASTES REFLÉTANT DES DIFFÉRENCES STRUCTURELLES ENTRE LES PAYS CONSIDÉRÉS

Entre des pays comme la France et l’Allemagne, comment expliquer ce typed’écarts concernant la propension moyenne des entreprises à recourir au bre-vet ou à tel autre type de DPI ?

Le rôle des différences dans la propension à innover

Il est possible d’invoquer des différences structurelles, à commencer par lesdifférences observées en termes de propension à innover. Cette explicationvaut en tout cas en matière d’innovation technologique et pour la comparai-son franco-allemande. À cet égard, en effet, la proportion d’entreprises inno-vantes est globalement deux fois plus faible en France (32,6 %) qu’en Allemagne(65,1 %), dans l’ensemble de l’industrie et des services, selon la 4e enquêtecommunautaire sur l’innovation (Eurostat, 2008). Ceci étant, cette enquêtemontre aussi qu’au sein des seules entreprises innovantes, la propensionmoyenne à breveter est plus faible en France qu’en Allemagne, alors que la

Marques enregistrées par la voie internationale

(2004-2008)

Marques enregistrées par la voie communautaire (1997-2008)

Dessins et modèles déposés par la voie communautaire

(2003-2009)

Pays d’origine Nombre % Pays

d’origine Nombre % Nationalité du déposant Nombre %

1 Allemagne 28 740 16,6 1 États-Unis 96 503 20,92 1 Allemagne 110 608 24,5

2 France 18 468 10,7 2 Allemagne 77 091 16,71 2 Italie 66 234 14,7

3 États-Unis 14 330 8,3 3 Royaume-Uni 52 425 11,37 3 France 38 248 8,5

4 Italie 12 953 7,5 4 Italie 37 227 8,07 4 États-Unis 37 574 8,3

5 Benelux 12 372 7,1 5 Espagne 35 665 7,73 5 Royaume-Uni 30 468 6,8

6 Suisse 12 251 7,1 6 France 31 602 6,85 6 Espagne 28 031 6,2

Total mondial 173 228 100 Total

mondial 461 227 100 Total monde 451 066 100

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propension à recourir soit aux marques, soit aux dessins et modèles est aucontraire plus élevée de ce côté-ci du Rhin (Lelarge, 2007 ; Lallement,2009a). Notre question de base reste donc posée, même si l’on tient comptedu fait que les entreprises françaises sont dans l’ensemble moins innovantesque leurs consœurs allemandes.

Le rôle des différences sectorielles

Un deuxième type d’explication concerne les différences de compositionsectorielle. Le fait est que les questions de PI ne jouent pas avec la mêmeintensité et de la même manière selon les secteurs considérés et en particu-lier selon leur intensité technologique.

Dans le cas des entreprises allemandes, il a ainsi été montré que si la tailledes portefeuilles de brevet influe positivement sur la rentabilité dans les sec-teurs de haute technologie, ceci n’est pas le cas dans le domaine des moyenneset basses technologies. Dans le cas des basses technologies, ceci s’explique enpartie par l’idée que les entreprises en question ne disposent pas des ressourceset des compétences nécessaires pour gérer efficacement un portefeuille debrevet de taille relativement importante. Ceci peut aussi vouloir dire quemême les entreprises à intensité technologique moyenne ou basse peuventutilement tirer profit de la constitution d’un portefeuille de brevets mais à lacondition que ces derniers ne soient pas trop nombreux. En outre, pour assu-rer leurs positions compétitives, les entreprises à intensité technologiquemoyenne ou basse ont le plus souvent intérêt à miser moins sur l’innovationtechnologique que sur d’autres leviers tels que l’innovation commerciale(Lichtenthaler, 2009).

Concernant la France, il est de même clair que, dans les secteurs du luxe,de l’agro-alimentaire ou des biens culturels, où notre pays est plutôt spécia-lisé et dans l’ensemble davantage que l’Allemagne, les activités d’innovationet de création sont dans l’ensemble protégées beaucoup moins par des bre-vets que par d’autres types de DPI : marques, dessins et modèles, indicationsgéographiques, certificats d’obtention végétale, droit d’auteur, etc. (encadré 1,ci-dessous).

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Encadré 1 : L’importance économique plus ou moins grande du brevet ou d’autres types de DPI, selon les secteurs considérés

Industries du luxe : le rôle des marquesDans l’industrie du luxe (vêtements de mode, parfums et cosmétiques, vins et spiri-tueux, maroquinerie, joaillerie, etc.), l’innovation n’a bien souvent pas de caractèretechnologique et ne passe donc guère par le brevet d’invention, alors que la créativitéou l’originalité y est pour l’essentiel protégée par des marques commerciales, les des-sins et modèles, voire le droit d’auteur (cas des parfums). Or la France détient une partde marché mondial d’environ 34 % dans ce secteur et y conserve une balance com-merciale très excédentaire (Comité Colbert, 2008).Agriculture et agro-alimentaire : le rôle des indications géographiques et des certificatsd’obtention végétale (COV)Dans le cas des industries agro-alimentaires, qui constituent le premier secteur indus-triel en France pour différents critères (valeur ajoutée, emplois) et le seul grand secteurindustriel ayant créé des emplois nets dans notre pays, sur la période 1995 et 2008 (Lefe-bvre, 2010), les importants enjeux en matière de PI concernent notamment les indica-tions géographiques (appellations d’origine contrôlée, etc.). En outre, un autre mode deprotection moins connu passe par le certificat d’obtention végétale (COV), qui protègele travail des obtenteurs de nouvelles variétés de semences, tout en permettant d’utilisergratuitement les variétés en question à des fins de recherche, à la différence des États-Unis, où les nouvelles variétés végétales peuvent être brevetées, au risque de restreindrel’accès à la ressource génétique. Rappelons que la France constitue le premier produc-teur de semences en Europe, le troisième dans le monde et que la force des positionsfrançaises, dans ce domaine, résulte d’un important effort de recherche : les dépenses enR & D y représentent en moyenne entre 12 et 17 % du chiffre d’affaires du secteursemencier, secteur qui, mis à part la coopérative Limagrain (4e rang mondial pour lessemences commercialisées), repose sur de nombreuses PME 5.Biens culturels et informationnels : le rôle du droit d’auteur et des droits voisinsDans le cas des industries de la culture et de l’information, les activités d’innovation etde création peuvent avoir un fort aspect technologique (cas des jeux vidéo, où la Francefait partie des leaders mondiaux) mais la protection passe en grande partie par le droitd’auteur et les droits voisins. Les données chiffrées sont rares en la matière car de telsdroits couvrent automatiquement toute œuvre originale et ne nécessitent donc aucuneprocédure d’enregistrement. Il est cependant clair que le droit d’auteur et les droits voi-sins jouent un rôle particulièrement considérable pour le cœur des biens culturels etinformationnels (livres, journaux, revues, émissions de radio et de télévision, disques etenregistrements sonores, fi;lms de cinéma, jeux vidéo, spectacles théâtraux, publicité,logiciels), qui se caractérise par de considérables enjeux économiques. Ainsi définies,selon l’International Intellectual Property Alliance (IIPA), les industries du copyrightconstituent aux États-Unis depuis 1996 le premier poste à l’exportation – devantl’automobile, l’agriculture et l’aérospatiale – et y font preuve d’un rythme de croissanceplus rapide que celui de l’ensemble de l’économie (Siwek, 2004). À son échelle, laFrance se trouve sans doute dans une situation comparable, même s’il manque unebase statistique précise pour l’affirmer plus nettement.

5. Cf. le site Internet du Groupement national interprofessionnel de semences et plants (GNIS)et l’article « Quel statut pour les variétés végétales ? », dans l’hebdomadaire La Terre, 22 août2006, p. 10-11.

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Pour le seul brevet, les spécialisations par domaines technologiquesexpliquent une partie des contrastes franco-allemands. Ainsi, la France serévèle surtout spécialisée dans les domaines « spatial-armement » et « phar-macie-cosmétiques », qui ne figurent pas parmi ceux où les brevets se multi-plient le plus, ces dernières années, au vu des données européennes etaméricaines publiées par l’OST (2008), qui permettent d’identifier le pays derésidence des inventeurs concernés. L’Allemagne, par contraste, est surtoutspécialisée dans les domaines des « composants mécaniques » et des « moteurs-pompes-turbines », où les volumes de brevets sont plus nombreux et où elledétient de très importantes parts mondiales. Certes, ces différences intra-industrielles ne jouent pas de façon massive. « L’insuffisante propension desentreprises à déposer des brevets dans les secteurs d’activité où ils sont le plusutilisés joue beaucoup plus que la moindre spécialisation de l’industrie fran-çaise dans ces mêmes secteurs » (Lelarge, 2007). Ceci dit, il existe par ailleursune différence sectorielle beaucoup plus considérable, concernant cette foisla taille relative de l’industrie dans son ensemble. En effet, sachant que la pro-portion d’entreprises recourant au brevet est, partout en Europe, bien moin-dre dans les services que dans l’industrie manufacturière (Eurostat, 2007 ;Kremp, Tessier, 2006), il est évident qu’une économie française très tertiari-sée produit bien moins de brevets qu’une économie allemande restée beau-coup plus industrielle.

Le rôle des différences de taille d’entreprises

Il demeure que le facteur sectoriel n’explique pas tout. Concernant les facteursstructurels, en effet, un rôle similaire incombe également aux différences detaille d’entreprises. Il est désormais bien connu que le tissu d’entreprises est enFrance composé surtout de PME de taille généralement réduite, alors qu’outre-Rhin, il fait la part plus belle aux entreprises indépendantes de taille inter-médiaire, celles qui composent le fameux Mittelstand. Or, toutes choses éga-les par ailleurs, les entreprises de faible taille recourent en général – àl’exception d’une minorité de jeunes pousses à forte intensité technologiques(start-up) – beaucoup moins à l’outil du brevet que les entreprises de tailleintermédiaire ou grande, pour une série de raisons : moins de compétencesen interne pour maîtriser cet outil, plus grande difficulté à supporter le coûtdes procédures d’obtention des brevets, moindre capacité à tirer parti d’uneaction en justice en cas de litige, etc. (Lallement, 2009a).

Si la propension moyenne des entreprises à recourir au brevet est ainsi(positivement) liée à leur taille, ce n’est par contre guère le cas pour leur pro-pension à déposer des marques (Lallement, 2009a ; Lelarge, 2009). Ainsi, encomparaison avec l’Allemagne, ce facteur de la taille contribue lui aussi à

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expliquer tant la « moindre » performance française pour le brevet que, acontrario, la relative absence de contraste franco-allemand en matière demarques.

Le rôle des différences institutionnelles

Enfin, les facteurs institutionnels peuvent également jouer, pour expliquer leplus grand recours au brevet dans des pays comme l’Allemagne ou le Japon.Ceci vaut en particulier dans le cas de ce dernier pays, où les entreprises sonttraditionnellement incitées à déposer un plus grand nombre de brevets queleurs concurrentes dans d’autres pays, à quantité égale d’invention. L’unedes raisons en est qu’au sein du système nippon, la législation a longtemps(jusqu’en 1988) limité très fortement le nombre de revendications pardemande de brevet et l’étendue de chaque revendication 6, ce qui y a pousséles inventeurs à multiplier les dépôts de brevet (Le Bas, 2002 ; Guellec, vanPottelsberghe, 2007). Bien que supprimée, cette disposition semble avoirlaissé des traces car, au début des années 2000, le nombre moyen de revendi-cations par brevet restait nettement plus réduit au Japon (environ 7) qu’enEurope (autour de 18) et aux États-Unis (près de 23) (van Pottelsberghe,François, 2006). De même, l’important volume de dépôts de brevets en pro-venance d’Allemagne (et du Japon) tient en partie à certains aspects dusystème juridique des inventions de salariés. Outre-Rhin, en effet, si uneentreprise n’exerce pas son droit de protéger une invention, l’inventeur-salarié qui en est à l’origine peut, en tant que personne physique, le faire lui-même à sa place en déposant un brevet, ce qui risque de mettre l’employeuren difficulté ultérieurement. En Allemagne, en outre, une entreprise qui nedépose pas de brevet sur l’invention réalisée par l’un de ses salariés empêchece dernier de bénéficier du système d’intéressement existant. Tout ceci con-tribue à expliquer qu’une entreprise allemande effectue en moyenne près dedeux fois plus de dépôts qu’une entreprise française.

Soulignons enfin que cette hétérogénéité des systèmes de DPI vaut ausein même de l’Europe, où subsistent d’importances différences systémiques,malgré l’harmonisation de certaines procédures ou normes juridiques. Sur ceplan, la force du système allemand tient en grande partie à la qualité de sapartie juridictionnelle (haut degré de spécialisation des juges, efficacité desprocédures judiciaires, etc.) (CGP, 2006).

Peut-on pour autant affirmer que le régime général des DPI est plus pro-tecteur en Allemagne qu’en France ? Une certaine prudence s’impose car, à

6. Les revendications constituent la partie centrale des brevets ; elles délimitent la protectiondemandée par les déposants.

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en croire certaines évaluations, l’indice général de protection par le brevetest légèrement plus élevé en France qu’en Allemagne, tout du moins tel étaitle cas à la fin des années 1990 (cf. Lelarge, 2009). Ceci étant, il est possibleque ce type d’indice synthétique ne reflète malgré tout qu’une partie dutableau d’ensemble. En somme, il se confirme qu’entre l’Allemagne et laFrance, les décalages observés en termes de recours à la PI découlent engrande partie de facteurs structurels propres aux pays considérés, du fait dedifférences à la fois dans la proportion d’entreprises innovantes et en termesde composition sectorielle, de taille d’entreprises et de cadre institutionnel.

LES DPI COMME SOURCE D’AVANTAGE COMPÉTITIF OU DE CRÉATION DE VALEUR

Ceci dit, les pratiques en matière de DPI ne se limitent pas à refléter passive-ment des activités de création et d’innovation. Pour les entreprises, les DPIconstituent également une source d’avantage compétitif ou de création devaleur. À cet égard, existe-t-il entre des pays comme la France et l’Allema-gne des différences dans la manière qu’ont les entreprises d’utiliser les DPI ?Ceci conduit à distinguer plusieurs sortes d’usages, en allant des plus tradi-tionnels – tels que la protection anti-contrefaçon – à des pratiques soit plusrécentes – notamment dans une logique d’innovation partenariale –, soitplus controversées – comme dans le cas du brevetage dit « stratégique » (bre-vets « bloquants », brevet utilisé comme outil de dissuasion, etc.).

Les usages traditionnels de sécurisation des positions concurrentielles

Il n’existe malheureusement que peu de données empiriques permettant deconfronter directement, faute d’enquête strictement comparable, la manièredont les entreprises se servent des DPI dans différents pays. Ceci étant, il estclair que la principale raison d’être des DPI, pour les entreprises de la plupartdes pays, reste de protéger contre l’imitation et de préserver leur libertéd’exploitation, c’est-à-dire de ne pas se voir interdire par un concurrentd’utiliser tel ou tel actif intellectuel.

Ceci est notamment confirmé par l’étude française sur les « moyens etmodes de gestion de l’immatériel ». Cette enquête de l’INSEE a l’avantaged’être très englobante : elle porte sur les entreprises de tous secteurs et detoutes tailles, y compris les très petites entreprises (employant moins de 10salariés) et elle concerne a priori toutes les formes de DPI. Il en ressort que lesentreprises déclarant protéger leurs innovations le font principalement pour

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« dissuader les imitations, bloquer les concurrents » ou pour « exploiter éco-nomiquement une invention » (graphique 2, ci-dessous).

Graphique 2 – Les justifications avancées par les entreprises déclarant protéger leurs innovations, en France

(% des réponses jugeant le motif assez ou très important)

Champ sectoriel : industrie (y compris le BTP), commerce et services, en France. Tailles d’entreprises considérées :

toutes tailles, y compris les entreprises de 0 à 9 salariés. Données de l’enquête sur les moyens et modes de gestion de

l’immatériel, menée par l’INSEE et des services statistiques tels que le SESSI, fin 2005. Source : graphique de l’auteur

d’après Kremp et Tessier (2006).

De même, une enquête menée en 2008 par l’INPI et Oséo montrequ’aussi bien les PME que les entreprises de taille intermédiaire déposent desbrevets avant tout pour « se protéger des attaques, garantir la liberté d’exploi-tation » et « empêcher l’imitation », selon les dirigeants interrogés à ce sujet,en France (Abitbol et al., 2009).

Ceci vaut aussi très largement pour les entreprises allemandes : elles bre-vètent principalement, dans l’ordre, pour se « protéger contre l’imitation »,« sécuriser les marchés européens » et « bloquer les concurrents de façondéfensive », c’est-à-dire pour préserver leur propre marge de manœuvre sur leplan technologique (tableau 2). Ceci conduit à souligner que, dans l’enquêtede l’INSEE également, le souci de « bloquer les concurrents » a sans douteici une signification défensive et ne correspond pas forcément à l’idée de« brevet bloquant » au sens offensif, c’est-à-dire avec pour but d’empêcherles concurrents de développer certaines technologies7.

7. Ce dernier aspect est développé plus loin, dans le point 3.3. Pour en rester à l’aspect défensif,une autre stratégie réside dans le « clôturage » (fencing) : l’ayant droit déjà titulaire d’un brevetrelativement important dépose « des brevets de moindre importance […] autour de l’inventionde base, pour renforcer le pouvoir du brevet central » (Le Bas, Mothe, 2010).

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Tableau 2 – Les 15 principaux motifs sous-jacents au brevetage, en Allemagne (part d’entreprises jugeant le motif important ou très important)

Champ : plus de 500 entreprises interrogées en 2002 sont à l’origine de plus de 40 % des dépôts allemands de brevets

auprès de l’Office européen des brevets en 1999. Un probable biais en faveur des grandes entreprises est signalé.

Source : Blind et al. (2006).

Ces enquêtes françaises et allemandes convergent aussi très largement surle point suivant : les brevets – et, plus largement, les DPI – servent très sou-vent à conforter certaines positions compétitives sur les marchés étrangers.Ce constat est également corroboré par d’autres études, notamment dans lecas allemand (encadré 2).

Une évolution plus récente : les DPI au centre de la logique d’innovation ouverte

Les enquêtes françaises et allemandes déjà évoquées confirment aussi lamontée en puissance d’une deuxième grande catégorie d’usages des DPI, dela part des entreprises. « Améliorer la position dans les partenariats » – pourreprendre les termes de l’enquête de l’INSEE – résume le propos. Plus géné-ralement, il s’agit de diverses pratiques s’inscrivant dans la logique de ce qu’ilest convenu d’appeler l’« innovation ouverte » (OCDE, 2008). Cette notionrenvoie à une double réalité : celle de l’innovation dans sa dimension à la foisdistribuée et partenariale, dès lors qu’une entreprise innove en général demoins en moins de façon isolée et de plus en plus en agrégeant des élémentsissus de provenances diverses et combinés de façon plus ou moins concertée.

1Protéger contre

l’imitation84 % 9

Améliorer la position dans des coopérations

39 %

2Sécuriser les marchés européens

75 % 10 Incitations à l’adresse des salariés 32 %

3Bloquer les concurrents de façon défensive

72 % 11« Monnaie d’échange » (i.e. cross-licensing)

28 %

4Sécuriser le marché natio-nal

71 % 12 Accéder au marché financier 26 %

5Améliorer l’image techno-logique

69 % 13 Indicateur interne de performance 22 %

6Bloquer les concurrents de façon offensive

69 % 14 Engendrer des revenus de licences 21 %

7Sécuriser les marchés hors d’Europe

57 % 15Influencer la formation de normes techniques (standardisation)

20 %

8Accroître la valeur de l’entreprise

51 %

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Encadré 2 : Le lien entre les DPI et l’internationalisation des entreprises allemandes

Il existe un lien positif, pour les PME allemandes, entre le fait d’être actives (et compéti-tives) sur les marchés étrangers et le fait de breveter. Ceci est en particulier attesté par uneétude portant sur environ 3 700 PME allemandes et dont les résultats sont indiqués parrapport à une entreprise dite de référence, entreprise médiane dans l’échantillon à l’égardd’une série de variables : secteur d’appartenance, taille en fonction des effectifs employés,âge, etc. Il en ressort ainsi que, pour les PME allemandes et toutes choses égales par ailleurs,le fait d’être active sur les marchés internationaux est associé à la fois à une plus grandepropension à innover et à une plus grande propension à déposer des brevets ; de plus, ilexiste un lien positif et statistiquement significatif entre la propension à breveter et leniveau du taux d’exportation (Zimmermann, 2008). Soulignons que la méthodologie éco-nométrique utilisée, qui tient compte des autres effets déjà indiqués, permet ainsi d’isolerl’effet spécifique de la performance des entreprises allemandes à l’international sur leuractivité de brevetage. Ceteris paribus, en d’autres termes, une PME est d’autant plus activeen matière de brevetage qu’elle détient une position compétitive forte à l’international.Une autre étude, concernant cette fois le rapport des entreprises allemandes au marchéchinois, permet d’illustrer ce propos. L’enquête porte sur un échantillon représentatifd’environ 650 entreprises présentes en Chine à travers des activités de production ou decommercialisation. Elle montre que plus d’un tiers de ces entreprises y sont victimes detelles pratiques de contrefaçon mais que seulement 48 % de ces victimes y ont déposédes brevets ou d’autres formes de DPI. Cette situation est imputée à un déficit d’infor-mation concernant le marché chinois : les entreprises allemandes concernées (surtoutdes PME) supposent souvent, à tort, qu’un dépôt en Allemagne procure également uneprotection à l’étranger ou bien qu’il ne sert à rien de se protéger en Chine. L’étude sou-ligne cependant que s’il est en pratique difficile d’affronter – sur place – la concurrencechinoise sur la base de DPI, la difficulté est bien plus grande encore sans la protectiondes DPI et les dégâts potentiels sont alors considérables, voire ruineux pour l’entreprisetouchée (DIHK/APM, 2007).

- L’innovation dans sa dimension distribuée (et marchande)

L’idée de fond est tout d’abord l’émergence de marchés du savoir (technolo-gique). Ces derniers découlent eux-mêmes d’une nouvelle sorte de divisiondu travail, dans laquelle certains acteurs du processus d’innovation acquiè-rent notamment – sur le marché des licences – le droit de se servir d’actifsintellectuels qu’ils n’ont pas eux-mêmes les moyens ou le temps de concevoiret de développer en interne (licensing in), alors qu’inversement, d’autres ven-dent sur ce même marché le droit d’utiliser des technologies qu’ils détien-nent mais dont ils n’ont pas eux-mêmes l’usage (licensing out). Ces derniersutilisent ainsi les DPI pour « percevoir des revenus », selon les termes del’enquête de l’INSEE.

Cet aspect est bien analysé par une récente enquête de l’OCDE sur la ges-tion des licences, de la part des détenteurs de brevets (licensing out) en Europeet au Japon. Il apparaît que, mis à part les échanges intervenant dans un cadreintra-firme, les entreprises qui se livrent le plus à ce type de pratique sont soit

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des entreprises de petite taille (moins de 10 salariés), qui n’ont en général pasles moyens d’exploiter elles-mêmes leurs inventions mais sont désireuses d’entirer des ressources financières, soit des grandes entreprises, qui souvent jouentun rôle d’intégrateur de technologies ou utilisent la gestion des licences pouraccroître ou préserver leur pouvoir de marché face aux concurrents, notammentvia des accords de licence croisée (cross-licensing) 8. L’étude montre en tout casqu’en la matière, les entreprises françaises et allemandes sont globalementmoins actives que leurs homologues britanniques (Zuniga, Guellec, 2009).

Outre les accords de licence croisée, un autre usage similaire réside dansles paniers de brevets (patents pools), qui permettent à certains ayants droitde mettre en commun un ensemble de brevets, surtout de façon à éviter cer-tains coûts de transaction, lorsqu’un produit donné repose sur un nombreélevé de technologies brevetées et détenues par une grande variété d’acteurs.

En outre, les droits de PI facilitent – et, au fond, permettent – les trans-ferts technologiques, notamment en contribuant au transfert non seulementde savoirs codifiés protégés par les brevets mais également de savoirs nonbrevetés car informels, tacites et protégés par le secret, via les contrats delicence de savoir-faire qui accompagnent souvent les transferts de technolo-gie (Cohendet et al., 2009 ; Hagel, 2009).

- L’innovation dans sa dimension partenariale

Au-delà des marchés du savoir (technologique) et des transferts technologi-ques, qui portent sur l’échange ou le partage de savoirs (technologiques)existants, les DPI participent aussi à la création de savoirs nouveaux, sur unmode partenarial.

Le brevet, en particulier, constitue un moyen de faciliter la coordinationau sein du processus d’innovation car il permet d’améliorer les interactionsentre les différents acteurs impliqués. À cet égard, il a en effet pour rôlemoins d’exclure les tiers que de les « inclure » (voir l’encadré 3, ci-après) : ilcontribue à identifier les interlocuteurs pertinents (partenaires, fournisseurs,clients, intermédiaires financiers, etc.) et à en organiser la coopération. SelonCohendet et al. (2009), il s’agit là d’un nouveau rôle pour le brevet, qui aideà structurer un mode collectif de création de savoir. Concrètement, en lamatière, le brevet renforce le pouvoir de négociation des titulaires, sécurisece type de négociation sur le plan légal et, de la sorte, le rend possible. Ilconstitue un ingrédient particulièrement indispensable au lancement d’un

8. Ceci rejoint donc en partie la question des usages stratégiques, développée ci-après. Ceci dit,un accord de licence croisée correspond à un comportement plus défensif qu’offensif : les entre-prises concernées utilisent alors les brevets comme une sorte de monnaie d’échange, pour éviterde s’exclure mutuellement d’un marché.

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26 innovations 2010/2 – n° 32

projet commun et pendant la phase initiale du processus d’innovation, aucours de laquelle les acteurs concernés ont besoin de développer une basecognitive commune et de converger vers des objectifs partagés. Au fond, iljoue un rôle tout du long des partenariats car – un peu comme les normestechniques – il permet aux différents acteurs de parler le même langage(Cohendet et al., 2009 ; Le Bas, Mothe, 2010).

Encadré 3 : Exclure ou inclure : le double rôle du brevet pour structurer le processus d’innovation

Si la PI constitue bien un droit de réservation, son caractère exclusif est loin d’êtreabsolu, notamment en pratique9. En termes économiques, comme le souligne Abello(2005), l’exclusivité n’existe en général qu’afin de permettre aux ayants droit d’utiliserles PI et d’en organiser la circulation, dans leur relation avec des tiers. Ceci vaut enparticulier dans le cas du brevet, d’autant plus que déposer un brevet implique dedivulguer la connaissance sous-jacente à l’invention concernée. Ipso facto, l’alterna-tive que constitue le secret des affaires correspond bien souvent à un moyen plus radi-cal de maintenir les concurrents à distance de la connaissance ainsi protégée, tout dumoins quand le secret est bien gardé. En ceci, la PI a le plus souvent vocation à êtrepartagée10. Ce lien entre la PI et les tiers est particulièrement net dans le cas de la mar-que commerciale car cette dernière n’a de sens que dans la relation aux tiers, c’est-à-dire à la clientèle. De même, le droit d’auteur et les droits voisins ont vocation às’appliquer à des œuvres mises en circulation.Comme l’expliquent Cohendet et al. (2009), le fait qu’un brevet soit utilisé pour« exclure » ou au contraire pour « inclure » dépend en partie du type de technologieconcerné (tableau 3 ci-après). Pour une technologie dite « simple », au sens d’unetechnologie protégée par un brevet unique ou par un petit nombre de brevets – commedans le domaine de la chimie –, le titulaire a surtout besoin d’exclure les tiers, c’est-à-dire d’empêcher que les tiers n’utilisent l’invention. Il n’en est pas de même pour lestechnologies complexes, qui font au contraire intervenir – en les combinant – de mul-tiples composants et mettent en jeu un grand nombre de brevets, comme dans ledomaine de l’électronique. Le brevet sert alors très largement à permettre l’accès à latechnologie des tiers car ce qui prime alors est souvent davantage le risque d’être exclude l’utilisation des inventions des tiers que la capacité à exclure soi-même des tiers enles tenant à l’écart de tel ou tel brevet. De même, le rôle du brevet comme instrumentde coordination est d’autant plus important que le champ technologique concerné estémergent, alors qu’à l’inverse, les stratégies relatives à des technologies plus matures,plus stabilisées, reposent davantage sur une logique d’exclusion.Pour le brevet, ce pouvoir exclusif et, inversement, cette capacité à inclure constituentévidemment les deux faces d’une même médaille. À la fois instrument d’exclusion etélément de diffusion et de mise en relation, le brevet rappelle la fonction des frontiè-res, qui servent à la fois à séparer et à permettre l’échange (cf. Morin, 1977). Au croi-sement de la pression concurrentielle et des besoins de la coopération, le brevetconstitue un instrument de « coopétition » (Corbel, 2005).

9. Voir ci-après, à propos des brevets « bloquants ».10. Les tiers, certes, ne peuvent sans l’accord de l’ayant droit utiliser à leur guise l’invention bre-vetée mais ils peuvent légalement s’en inspirer eux-mêmes, en « inventant autour ».

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Tableau 3 – Exclusion vs. inclusion : les différents rôles du brevet selon le contexte sectoriel

Parallèlement à ce rôle de langage commun, le brevet sert aussi parfoisd’outil de signalisation à certaines entreprises en mal de financement. Ceciconcerne surtout les jeunes entreprises très innovantes sur le plan technolo-gique (start-up), qui n’ont guère d’autres actifs que leur PI à faire valoir, pourobtenir des financements sous forme de capitaux propres – de la part desociétés de capital-risque – ou de prêts bancaires (European Commission,2006). Ce diagnostic est confirmé et complété par l’étude déjà évoquée con-cernant les PME allemandes (cf. supra l’encadré 2). Il apparaît en effet que,pour une de ces PME et toutes choses égales par ailleurs, le fait d’être unejeune entreprise est associé non pas à une plus grande propension à innovermais à une plus grande propension à déposer des brevets, par rapport à ce quiest le cas chez une PME établie depuis plus longtemps. Il en est de mêmepour le fait d’être une filiale de groupe – au sens d’entreprise appartenantpour au moins 25 % à une autre entreprise : aux termes de la spécificationretenue et ceteris paribus, les PME filiales de groupes ne sont pas plus innovan-tes mais brevètent davantage que les PME indépendantes. Selon l’auteur, cecitient non seulement à des considérations de coût mais aussi au fait qu’au seind’un groupe d’entreprise, les dépôts de brevet peuvent être utilisés comme unindicateur de performance (Zimmermann, 2008).

Cette étude et d’autres enquêtes menées outre-Rhin (cf. supra, le tableau 2)montrent ainsi que, de manière générale, le brevet sert parfois à l’entreprisepour améliorer sa réputation, notamment en termes d’image technologique.Comme ces sources allemandes, des travaux menés en France (dont ceux deCorbel, 2005) confirment également l’existence de deux autres manièresd’utiliser le brevet, cette fois à usage interne : le brevet peut aussi servir soitd’instrument de motivation des salariés impliqués dans des activités de

Technologies simples (« discrètes »)Technologies complexes

Configuration émergente

1Fort usage à visée d’exclusion

Fort usage à visée de coordinationExemple : secteur biotechnologique

2Faible usage à visée d’exclusion

Fort usage à visée de coordinationExemple : secteur du logiciel

Configuration stabilisée

3Fort usage à visée d’exclusion

Faible usage à visée de coordinationExemple : secteur pharmaceutique

4Fort usage à visée d’exclusion

Fort usage à visée de coordinationExemple : secteur de l’électronique

Tableau de l’auteur, d’après Cohendet et al. (2009). Plus précisément, ces derniers placent les biotechnologies à cheval sur les cadrants 1 et 2.

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recherche et d’innovation, soit encore d’instrument interne de mesure de laperformance, pour ce type d’activités.

Enfin, un dernier usage peut-être mentionné, souligné par certains experts(Le Bas, 2007 ; Hagel, 2008), mais qui reste peut-être trop récent pour queles enquêtes lui fassent jouer davantage qu’un rôle marginal : le brevet peutaussi servir aux entreprises d’outil de veille technologique. Le fait est que lesbases de données de brevets permettent désormais, par voie électronique,d’identifier à un coût modéré le contenu des brevets déposés par les concur-rents 11 et, par ce biais, leurs positions technologiques. Enfin, cette connais-sance peut aussi permettre aux entreprises de s’inspirer de la somme de cesavoir public pour développer elles-mêmes des solutions nouvelles et inven-tives.

En somme, le brevet et plus largement les DPI permettent ainsi de struc-turer un large champ de relations économiques, notamment concernant lesmarchés du savoir (technologique) et les activités d’innovation partenariale.Dans cette perspective et par analogie avec le monde du bâtiment, ils four-nissent le socle ou le ciment d’une logique modulaire et coopérative del’innovation.

Le rôle ambivalent des usages stratégiques

À côté de ces usages plutôt « nobles », il existe cependant une série de pra-tiques plus problématiques, surtout dans le cas du brevet. Il s’agit en particu-lier des brevets dits « bloquants » ou « dormants », qui correspondent à desbrevets pouvant être qualifiés de nuisibles ou au mieux d’inutiles, si l’on s’entient à un premier niveau d’analyse et au risque d’être caricatural. La notion de« brevetage stratégique » est aussi souvent utilisée pour désigner ces pratiquesmais ce qui est ici en cause est principalement leur dimension « offensive » 12.

- La question des brevets « bloquants »

Les brevets bloquants, tout d’abord, renvoient en première approche auxbrevets utilisés de façon anticoncurrentielle, pour profiter d’un pouvoir demonopole et bloquer les concurrents (Lelarge, 2009). À ce niveau de géné-ralité, tout brevet est potentiellement bloquant car il représente pour sontitulaire un droit de monopole. Ceci dit, un droit de monopole n’est pas for-

11. Les informations contenues dans les demandes de brevet sont rendues publiques 18 moisaprès le dépôt du brevet et sont accessibles via diverses bases de données souvent gratuites. Enprincipe, l’information technologique contenue dans le brevet permet à une personne de l’art dereproduire l’invention considérée.12. La dimension défensive rejoint très largement la fonction de protection examinée supra.

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cément un monopole de fait. En effet, outre que la validité d’un brevet peutêtre annulée dans un tribunal, le droit exclusif conféré par le brevet n’est pasabsolu et un brevet ne confère au fond à son titulaire qu’un « droit à essayerd’exclure » (Lemley, Shapiro, 2005), en menaçant de traîner les contrefac-teurs présumés devant les tribunaux 13. La ligne de partage entre brevets blo-quants et non bloquants est d’autant plus floue que l’éventuel blocage nesaurait être que transitoire (Le Bas, Mothe, 2010).

La notion de brevet bloquant (dit aussi « brevet de barrage ») n’en cor-respond pas moins à une réalité concrète. Il s’agit de brevets qu’une entre-prise dépose non pas pour protéger des inventions qu’elle souhaite mettre enœuvre elle-même ou qu’elle souhaite licencier à des tiers mais fondamenta-lement pour faire obstacle à certains axes de recherche des concurrents, enleur barrant la route. À titre d’exemple, la stratégie dite d’entourage (sur-rounding) consiste à entourer d’une série de brevets plus ou moins mineurstelle invention importante brevetée par un concurrent, afin d’empêcher cerival de valoriser son brevet de façon conséquente et donc pour limiter sonefficacité commerciale (Le Bas, Mothe, 2010).

- La question des brevets « dormants »

Dans le cas des brevets « dormants », ensuite, la dimension « agressive »peut n’être que latente ou potentielle. Là aussi, il s’agit de brevets exploitésni par l’entreprise qui les détient ni par des tiers titulaires d’une licenceappropriée. Il en découle qu’un brevet dormant peut dans certains cas êtreun brevet bloquant. Il ne l’est pas nécessairement car un brevet dormant peutn’être qu’un brevet dont le titulaire ignore encore l’usage qu’il peut en faire,lorsque l’invention brevetée n’est pas encore mûre sur le plan de la techno-logie ou du marché, de sorte que l’entreprise dépose avant tout le brevet pourprendre date et pour éviter d’être devancée par un concurrent.

- Le rôle controversé des patent trolls et des « marchés dérivés »

Enfin, dans sa dimension stratégique, le brevet remplit désormais parfoisaussi des fonctions relevant de la prédation ou de la spéculation financière.Ceci est en particulier le cas des patent trolls, qui sont des entreprises dotéesde larges portefeuilles de brevets mais qu’elles n’exploitent pas elles-mêmeset dont l’activité principale consiste à réclamer aux tiers le versement deredevances en les menaçant d’être accusées de contrefaire les brevets en

13. L’appropriabilité effective conférée par le brevet dépend donc de la capacité et de la volontédu titulaire à assurer cette mise en œuvre effective à travers une action en justice (Cimoli, Primi,2008).

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question et de devoir payer de considérables frais de justice (dommages-inté-rêts et frais d’avocats). Cette activité relève d’une forme d’extorsion, selonleurs nombreux détracteurs, mais elle est fondamentalement légale (Lalle-ment, 2008).

Par suite, et alors que, dans le cas des marchés du savoir au sens habituel,les brevets sont utilisés de façon classique pour protéger, commercialiser ettransférer le savoir technologique, il existe désormais également ce que Cimoliet Primi (2008) appellent des « marchés dérivés », dans lesquels les brevetsne correspondent guère à une volonté de mettre en œuvre les inventionsprotégées et servent plutôt à des usages stratégiques : brevets bloquants, bre-vets dormants utilisés pour accroître le pouvoir de négociation dans desaccords de licences croisées ou dans la perspective d’une fusion-acquisitionentre entreprises, brevet servant d’arme de dissuasion face à la menace deprocès de la part de concurrents, brevets utilisés comme de purs signauxvisant à asseoir une réputation technologique, etc. Sur ces marchés dérivés,la valeur des brevets est en grande partie déconnectée de celle des technolo-gies sous-jacentes.

En ce sens et surtout dans le contexte institutionnel des États-Unis con-cernant les frais de justice, déposer un brevet s’apparente en grande partie àacheter un ticket de loterie : la mise de fond se révèle rarement très payantemais, le cas échéant, les gains peuvent être considérables (Lemley, Shapiro,2005). Étant donné le degré d’incertitude sur la valeur des brevets considéréset compte tenu de la hauteur des coûts d’entrée et des éventuels frais de liti-ges, des tels marchés dérivés sont très concentrés et dominés par des entre-prises de grande taille (Cimoli, Primi, 2008).

Sur le plan empirique, l’ampleur de ces usages stratégiques plus ou moinsoffensifs est difficile à évaluer précisément. Si ces pratiques sont particulière-ment répandues outre-Atlantique, elles existent désormais aussi en Europe.L’importance relative des brevets bloquants et des brevets dormants est ainsiattestée par l’enquête PatVal, qui a été menée entre 2003 et 2004 auprèsd’entreprises situées dans six pays européens dont l’Allemagne et la France.Tous types de détenteurs confondus, plus de 36 % des brevets considérésseraient bloquants ou dormants 14. Outre cette enquête, d’autres travauxrécents concernant l’Allemagne (Blind et al., 2006) et la France (Le Bas,Mothe, 2010) confirment que ces pratiques sont davantage le fait des entre-prises de grande taille que des PME mais, globalement, sont de plus en plusfréquentes.

14. Cf. Giuri et al. (2006) et, pour une version synthétique, Lallement (2008).

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CONCLUSION

Cet aperçu d’ensemble des pratiques des entreprises montre la diversité crois-sante des rôles joués par le système des DPI et notamment des brevets. Selonles cas, les entreprises utilisent ces droits soit pour leur pouvoir exclusif –c’est-à-dire pour s’approprier certaines ressources intellectuelles – soit plutôtpour leur capacité à « inclure » – afin de sécuriser certaines transactionsmarchandes ou relations partenariales, dans leurs activités d’innovation etde création. Cette dualité se retrouve également, à propos des usages straté-giques des DPI, concernant la distinction entre les stratégies défensives et lesstratégies offensives. Au fond, si ces clivages schématiques sont nécessairespour l’analyse, la réalité relève plutôt du mélange des genres, de l’intricationdes rôles car ces différentes dimensions sont le plus souvent complémentai-res dans la pratique. Ceci est aussi le cas pour certains usages des DPI enmatière de « technologies vertes », qui combinent incitation à l’innovationet logique de partage (Lallement, 2009b).

Sur le plan empirique, les éléments de comparaison internationale issusdes diverses études disponibles font dans l’ensemble plutôt apparaître unmouvement de convergence entre pays, concernant les poids relatifs des dif-férents usages des DPI (Blind et al., 2006). Cette situation se retrouve enparticulier concernant l’Allemagne et la France : les pratiques en question ysemblent largement similaires, pour autant que les données empiriques dis-ponibles permettent d’en juger.

Dans ces deux pays comme dans les autres pays comparables, les usagestraditionnels en termes de protection restent généralement primordiauxmais leur poids relatif tend à diminuer. Symétriquement, les diverses prati-ques d’ordre stratégique au sens large – c’est-à-dire tous les autres usages –montent en puissance, bien qu’à des degrés variés. Il en découle qu’entre despays tels que la France et l’Allemagne, les différences observées dans la fré-quence du recours aux principaux types de DPI (brevets, marques, dessins etmodèles, etc.) tiennent sans doute essentiellement à des facteurs structurelstels que non seulement l’appartenance sectorielle, la taille des entreprises etle cadre institutionnel mais aussi la propension moyenne à innover et ledegré de présence sur les marchés étrangers.

Quelles qu’en soient les raisons et au-delà des multiples difficultés demesure et d’interprétation, la position relative de la France en termes de recoursaux DPI n’est cependant pas qu’un simple reflet des performances des entreprisesfrançaises en matière d’innovation, d’exportation, etc. L’analyse montre en effetque la capacité à gérer les DPI est elle-même cruciale en termes de compétitivité et,plus généralement, pour le dynamisme d’entreprises cherchant à se positionner aumieux par rapport à leurs concurrentes ou partenaires. À travers leurs différents

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usages, de fait, les DPI permettent non seulement de sécuriser des positionsconcurrentielles déjà établies mais aussi d’en créer ou d’en améliorer certai-nes, sur des marchés tant nationaux qu’étrangers. Ce constat, d’ordre micro-économique et portant sur les usages, mérite évidemment d’être prolongé parune réflexion plus macroéconomique sur les effets induits, notamment dansla mesure où la tendance à la prolifération des brevets (Lallement, 2008)pose de sérieux problèmes d’intérêt général.

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Rémi Lallement

34 innovations 2010/2 – n° 32

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