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c Service de néphrologie, clinique de Tournan en Brie, France d Laboratoire de biochimie métabolique, hôpital Necker, Paris, France e Laboratoire de biochimie, hôpital Necker, Paris, France Le déficit en adénine phosphoribosyl transférase (APRT) est une maladie autosomique récessive considérée comme rare, pouvant causer la formation de lithiases urinaires récidivantes et une néphropathie cristalline. Une insuffisance rénale fut découverte chez une femme de 64 ans, avec une créatininémie à 218 mmol/L, sans protéinurie ni anomalie du sédiment urinaire. Ses antécédents notables se limitaient à une HTA et un calcul rénal gauche traité chirurgicalement 30 ans plus tôt. Il n’y avait pas d’antécédent familial notable en dehors de calculs urinaires non explorés chez son frère. L’échographie montrait un petit rein gauche (8 cm). Dix mois plus tard, la créatininémie avait augmenté à 459 mmol/L. En l’absence de cause claire à cette insuffisance rénale, une biopsie rénale fut réalisée, mettant en évidence des lésions de nécrose tubulaire et une néphropathie tubulo-interstitielle chronique à un stade avancé. Il existait de nombreux cristaux intratubulaires marrons, avec une réaction macrophagique. L’analyse de la biopsie en microscopie optique avec polarisation, complétée par spectrophotométrie infrarouge, montra des cristaux caractéristiques de 2,8- dihydroxyadénine (2,8-DHA), pathognomoniques de déficit en APRT. L’étude de la cristallurie montra aussi de nombreux cristaux de 2,8-DHA. Un traitement par allopurinol fut instauré. Le diagnostic fut confirmé par la mesure de l’activité APRT érythrocytaire, nulle, et une mutation homozygote du gène aprt fut ensuite mise en évidence. La fréquence du déficit en APRT est probablement sous estimée. Certains patients peuvent présenter une néphropathie cristalline sévère avec peu ou pas de lithiases. Le diagnostic peut être réalisé à tout âge, mais une reconnaissance précoce de la maladie est cruciale, l’allopurinol prévenant efficacement la survenue des lithiases et des complications rénales. doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.421 Néphrite tubulo-interstitielle chronique compliquant une pancréatite auto-immune au cours du syndrome d’hyper IgG4 A. Pozdzik a , I. Brocheriou b , M. Depierreux c , M. Bali d , J. Deviere e , J. Nortier f a Néphrologie, dialyse et transplantation rénale, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique b Anatomie pathologique, hôpital Tenon, Paris, France c Anatomie pathologique, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique d Radiologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique e Gastroentérologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique f Néphrologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique Introduction.– Le syndrome d’hyper IgG4, maladie systémique corticosensible prédomine chez l’homme âgé. Son diagnostic est basé sur l’élévation sérique d’IgG4 se compliquant souvent par une pancréatite auto-immune (PAI) ou un aspect pseudotumoral inflammatoire du pancréas. L’atteinte rénale consiste en une fibrose rétropéritonéale ou en une néphropathie interstitielle générale- ment réversible sous traitement immunosuppresseur. Patients et méthodes.– Un homme (66 ans) est adressé en février 2009 pour prise en charge d’une insuffisance rénale chronique évolutive dans un contexte de PAI avec un syndrome d’hyper IgG4 diagnostiquée en octobre 2005 (créatininémie [Cr] normale) et traitée par méthylprednisolone (huit mois). La corticothérapie a été reprise lors d’une récidive de PAI en juillet 2007 (Cr 1,4 mg/dL). La résonance magnétique de l’époque rapportait déjà une nette altération du contour des deux reins avec des plages diffuses d’hypersignal. Lors de la 1e consultation néphrologique, on note une hypertension artérielle diastolique, une élévation de la Cr plasmatique à 2,0 mg/dL (eDFG 34 mL/min/1,73 m 2 ) concomitamment à une réaugmentation du taux d’IgG4 plasmatique (N < 126) : de 526 mg/dL (août 2007) à 807 mg/dL (février 2009). Le sédiment urinaire est normal et la protéinurie est de 0,3 g/24 h. Le bilan auto-immun complet est négatif et le dosage des fractions de complément est normal. La ponction biopsie rénale (avril 2009 ; Cr à 2,7 mg/dL) démontre une glomérulosclérose sévère, une néphrite tubulo-interstitielle chronique, un infiltrat lympho- plasmatocytaire diffus avec des polynucléaires éosinophiles, une fibrose et une atrophie tubulaire. L’immunomarquage identifie des plasmocytes exprimant IgG4 au sein du parenchyme rénal (retrouvés rétrospectivement au niveau du pancréas). Une diminution de la Cr plasmatique (2,0 mg/dL) a été observée lors de la reprise de la corticothérapie. L’adjonction d’azathioprine tout en réduisant la corticothérapie a permis de stabiliser la fonction rénale (Cr à 1,8 mg/dL, avril 2010). Discussion.– Les présentations radiologiques classiques (lésions hypodenses, masse pseudotumorale, hydronéphrose, néphromégalie) sont rapportées dans environ 35 % des cas de PAI. Dans notre cas, les lésions d’hypersignal à l’IRM démontrant une néphropathie sous-jacente ont précédé de deux ans l’avis néphrologique. Vue la sévérité de l’atteinte tubulo-interstitielle associée à une glomérulosclérose avancée, la corticothérapie n’a amélioré que partiellement la fonction rénale. Conclusion.– L’atteinte rénale est à rechercher systématiquement au cours d’évaluation radiologique de PAI. Cette démarche facilite l’instauration plus précoce d’une immunosuppression. doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.422 Une pseudotumeur inflammatoire rétro-orbitaire révélatrice d’une glycosurie normoglycémique I. Brochériou, A. Duquesne, L. Garderet, M.C. Verpon, P. Rouvier, J.-P. Rougier, P. Aucouturier, J.J. Boffa, P. Callard, P. Ronco Services d’anatomie pathologique, de néphrologie et de biochimie de l’hôpital Tenon et service d’hématologie de l’hôpital Saint-Antoine, AP–HP, Paris, France Nous rapportons le cas d’une femme de 63 ans suivie depuis deux ans pour une dystrophie cornéenne avec tuméfaction périorbitaire qui consulte devant une altération de l’état général, sans autre anomalie clinique. Le bilan biologique réalisé met en évidence une protéinurie de faible débit, une fonction rénale normale, un pic IgG kappa avec excrétion de chaînes légères kappa dans les urines, un syndrome de Fanconi incomplet et la présence de 4 % plasmocytes médullaires sur le myélogramme. La protéinurie et le contexte de gammapathie monoclonale de signification indéterminée motivent la ponction biopsique rénale. Des lésions mineures sont observées, se limitant à une discrète fibrose interstitielle (5 %) non inflammatoire et des lésions artérielles de néphroan- giosclérose. Devant l’absence d’argument de spécificité rencontré en microscopie optique, une étude en microscopie électronique est lancée et l’on observe dès les coupes semi-fines colorées par le bleu de Toluidine, des cristaux de forme et de taille variés présents dans le cytoplasme des cellules épithéliales tubulaires et dans les histiocytes interstitiels. Les mêmes anomalies sont observées dans la moelle osseuse, alors que la masse périorbitaire est composée exclusivement d’histiocytes riches en cristaux sans plasmocytes. La patiente est traitée par bortézomib puis autogreffe de moelle. Les anomalies biologiques sériques et urinaires régressent ainsi que la masse orbitaire. Une soixantaine de cas sont décrits dans la littérature. La chaîne légère est pratiquement toujours de type k avec le plus souvent un sous-type Vk1. Cette chaîne présente une bonne résistance à la protéolyse in vitro par la cathepsine B, ce qui altèrerait leur catabolisme lysosomal et expliquerait leur accumulation intracytoplasmique. Les modifications moléculaires, substituant des acides aminés non polaires ou hydrophobes dans les zones hypervariables des chaînes légères, favorisent leur agrégation, première étape de la cristallisation. Cette pathologie est d’évolution lente. Notre cas est particulier du fait de sa révélation à l’occasion d’une manifestation ophtalmologique, de la réaction macrophagique périorbitaire régressive sous traitement par bortézomib, de la discrétion des lésions rénales en microscopie optique et de la faible densité en cristaux. doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.423 Dysfonction rénale discrète et histoire familiale de néphropathie chronique F. Hubert, K. Dahan, J.-P. Cosyns, O. Devuyst, Y. Pirson Service de néphrologie et service d’anatomie pathologique, cliniques universitaires Saint-Luc, université catholique de Louvain, Bruxelles, Belgique Cas clinique.– Une femme âgée de 31 ans s’est présentée avec une insuffisance rénale modérée caractérisée par une créatininémie à 1,5 mg/dL et une clairance de la créatinine à 55 mL/mn (Formule de Cockcroft). Une microalbuminurie lui Vie des sociétés / Néphrologie & Thérapeutique 8 (2012) 64–67 66

Dysfonction rénale discrète et histoire familiale de néphropathie chronique

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Page 1: Dysfonction rénale discrète et histoire familiale de néphropathie chronique

Vie des sociétés / Néphrologie & Thérapeutique 8 (2012) 64–6766

c Service de néphrologie, clinique de Tournan en Brie, Franced Laboratoire de biochimie métabolique, hôpital Necker, Paris, Francee Laboratoire de biochimie, hôpital Necker, Paris, France

Le déficit en adénine phosphoribosyl transférase (APRT) est une maladieautosomique récessive considérée comme rare, pouvant causer la formation delithiases urinaires récidivantes et une néphropathie cristalline.Une insuffisance rénale fut découverte chez une femme de 64 ans, avec unecréatininémie à 218 mmol/L, sans protéinurie ni anomalie du sédiment urinaire.Ses antécédents notables se limitaient à une HTA et un calcul rénal gauche traitéchirurgicalement 30 ans plus tôt. Il n’y avait pas d’antécédent familial notable endehors de calculs urinaires non explorés chez son frère. L’échographie montraitun petit rein gauche (8 cm). Dix mois plus tard, la créatininémie avait augmenté à459 mmol/L. En l’absence de cause claire à cette insuffisance rénale, une biopsierénale fut réalisée, mettant en évidence des lésions de nécrose tubulaire et unenéphropathie tubulo-interstitielle chronique à un stade avancé. Il existait denombreux cristaux intratubulaires marrons, avec une réaction macrophagique.L’analyse de la biopsie en microscopie optique avec polarisation, complétée parspectrophotométrie infrarouge, montra des cristaux caractéristiques de 2,8-dihydroxyadénine (2,8-DHA), pathognomoniques de déficit en APRT. L’étudede la cristallurie montra aussi de nombreux cristaux de 2,8-DHA. Un traitementpar allopurinol fut instauré. Le diagnostic fut confirmé par la mesure de l’activitéAPRT érythrocytaire, nulle, et une mutation homozygote du gène aprt futensuite mise en évidence.La fréquence du déficit en APRT est probablement sous estimée. Certainspatients peuvent présenter une néphropathie cristalline sévère avec peu ou pasde lithiases. Le diagnostic peut être réalisé à tout âge, mais une reconnaissanceprécoce de la maladie est cruciale, l’allopurinol prévenant efficacement lasurvenue des lithiases et des complications rénales.

doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.421

Néphrite tubulo-interstitielle chronique compliquant

une pancréatite auto-immune au cours du syndrome

d’hyper IgG4A. Pozdzik a, I. Brocheriou b, M. Depierreux c, M. Bali d, J. Deviere e, J. Nortier f

a Néphrologie, dialyse et transplantation rénale, hôpital Erasme, université Libre deBruxelles, Bruxelles, Belgiqueb Anatomie pathologique, hôpital Tenon, Paris, Francec Anatomie pathologique, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles,Belgiqued Radiologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgiquee Gastroentérologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgiquef Néphrologie, hôpital Erasme, université Libre de Bruxelles, Bruxelles, Belgique

Introduction.– Le syndrome d’hyper IgG4, maladie systémique corticosensibleprédomine chez l’homme âgé. Son diagnostic est basé sur l’élévation sériqued’IgG4 se compliquant souvent par une pancréatite auto-immune (PAI) ou unaspect pseudotumoral inflammatoire du pancréas. L’atteinte rénale consiste enune fibrose rétropéritonéale ou en une néphropathie interstitielle générale-ment réversible sous traitement immunosuppresseur.Patients et méthodes.– Un homme (66 ans) est adressé en février 2009 pour priseen charge d’une insuffisance rénale chronique évolutive dans un contexte de PAIavec un syndrome d’hyper IgG4 diagnostiquée en octobre 2005 (créatininémie[Cr] normale) et traitée par méthylprednisolone (huit mois). La corticothérapiea été reprise lors d’une récidive de PAI en juillet 2007 (Cr 1,4 mg/dL). Larésonance magnétique de l’époque rapportait déjà une nette altération ducontour des deux reins avec des plages diffuses d’hypersignal. Lors de la 1econsultation néphrologique, on note une hypertension artérielle diastolique,une élévation de la Cr plasmatique à 2,0 mg/dL (eDFG 34 mL/min/1,73 m2)concomitamment à une réaugmentation du taux d’IgG4 plasmatique (N < 126) :de 526 mg/dL (août 2007) à 807 mg/dL (février 2009). Le sédiment urinaire estnormal et la protéinurie est de 0,3 g/24 h. Le bilan auto-immun complet estnégatif et le dosage des fractions de complément est normal. La ponctionbiopsie rénale (avril 2009 ; Cr à 2,7 mg/dL) démontre une glomérulosclérosesévère, une néphrite tubulo-interstitielle chronique, un infiltrat lympho-plasmatocytaire diffus avec des polynucléaires éosinophiles, une fibrose et uneatrophie tubulaire. L’immunomarquage identifie des plasmocytes exprimant

IgG4 au sein du parenchyme rénal (retrouvés rétrospectivement au niveau dupancréas). Une diminution de la Cr plasmatique (2,0 mg/dL) a été observée lorsde la reprise de la corticothérapie. L’adjonction d’azathioprine tout en réduisantla corticothérapie a permis de stabiliser la fonction rénale (Cr à 1,8 mg/dL, avril2010).Discussion.– Les présentations radiologiques classiques (lésions hypodenses,masse pseudotumorale, hydronéphrose, néphromégalie) sont rapportées dansenviron 35 % des cas de PAI. Dans notre cas, les lésions d’hypersignal à l’IRMdémontrant une néphropathie sous-jacente ont précédé de deux ans l’avisnéphrologique. Vue la sévérité de l’atteinte tubulo-interstitielle associée à uneglomérulosclérose avancée, la corticothérapie n’a amélioré que partiellement lafonction rénale.Conclusion.– L’atteinte rénale est à rechercher systématiquement au coursd’évaluation radiologique de PAI. Cette démarche facilite l’instauration plusprécoce d’une immunosuppression.

doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.422

Une pseudotumeur inflammatoire rétro-orbitairerévélatrice d’une glycosurie normoglycémiqueI. Brochériou, A. Duquesne, L. Garderet, M.C. Verpon, P. Rouvier,J.-P. Rougier, P. Aucouturier, J.J. Boffa, P. Callard, P. RoncoServices d’anatomie pathologique, de néphrologie et de biochimie de l’hôpital Tenonet service d’hématologie de l’hôpital Saint-Antoine, AP–HP, Paris, France

Nous rapportons le cas d’une femme de 63 ans suivie depuis deux ans pour unedystrophie cornéenne avec tuméfaction périorbitaire qui consulte devant unealtération de l’état général, sans autre anomalie clinique. Le bilan biologiqueréalisé met en évidence une protéinurie de faible débit, une fonction rénalenormale, un pic IgG kappa avec excrétion de chaînes légères kappa dans lesurines, un syndrome de Fanconi incomplet et la présence de 4 % plasmocytesmédullaires sur le myélogramme. La protéinurie et le contexte de gammapathiemonoclonale de signification indéterminée motivent la ponction biopsiquerénale. Des lésions mineures sont observées, se limitant à une discrète fibroseinterstitielle (5 %) non inflammatoire et des lésions artérielles de néphroan-giosclérose. Devant l’absence d’argument de spécificité rencontré enmicroscopie optique, une étude en microscopie électronique est lancée etl’on observe dès les coupes semi-fines colorées par le bleu de Toluidine, descristaux de forme et de taille variés présents dans le cytoplasme des cellulesépithéliales tubulaires et dans les histiocytes interstitiels. Les mêmes anomaliessont observées dans la moelle osseuse, alors que la masse périorbitaire estcomposée exclusivement d’histiocytes riches en cristaux sans plasmocytes. Lapatiente est traitée par bortézomib puis autogreffe de moelle. Les anomaliesbiologiques sériques et urinaires régressent ainsi que la masse orbitaire.Une soixantaine de cas sont décrits dans la littérature. La chaîne légère estpratiquement toujours de type k avec le plus souvent un sous-type Vk1. Cettechaîne présente une bonne résistance à la protéolyse in vitro par la cathepsineB, ce qui altèrerait leur catabolisme lysosomal et expliquerait leur accumulationintracytoplasmique. Les modifications moléculaires, substituant des acidesaminés non polaires ou hydrophobes dans les zones hypervariables des chaîneslégères, favorisent leur agrégation, première étape de la cristallisation. Cettepathologie est d’évolution lente.Notre cas est particulier du fait de sa révélation à l’occasion d’une manifestationophtalmologique, de la réaction macrophagique périorbitaire régressive soustraitement par bortézomib, de la discrétion des lésions rénales en microscopieoptique et de la faible densité en cristaux.

doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.423

Dysfonction rénale discrète et histoire familiale denéphropathie chroniqueF. Hubert, K. Dahan, J.-P. Cosyns, O. Devuyst, Y. PirsonService de néphrologie et service d’anatomie pathologique, cliniques universitairesSaint-Luc, université catholique de Louvain, Bruxelles, Belgique

Cas clinique.– Une femme âgée de 31 ans s’est présentée avec une insuffisancerénale modérée caractérisée par une créatininémie à 1,5 mg/dL et une clairancede la créatinine à 55 mL/mn (Formule de Cockcroft). Une microalbuminurie lui

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Vie des sociétés / Néphrologie & Thérapeutique 8 (2012) 64–67 67

était découverte sans autre anomalie urinaire. Les reins étaient plutôt de petitetaille (rein droit = 9,5 cm et rein gauche = 9,2 cm) avec une échogéniciténormale et l’absence de kystes. L’examen par Doppler était normal.À l’anamnèse familiale, on notait que le père de la patiente avait présenté durantune vingtaine d’années une insuffisance rénale lentement progressive, devenueterminale à 58 ans. Un scanner révélait des reins de petite taille et des kystes. Unmois avant la prise en dialyse, une néphrectomie bilatérale pour carcinome rénalavait été réalisée. Il avait par ailleurs présenté des crises de goutte. Le grand-père paternel était décédé à 60 ans d’urémie après une histoire de goutte et demaladie cardiaque.Discussion.– Tout cela suggère qu’il s’agisse d’une néphropathie tubulo-inters-titielle chronique, qui de plus est probablement héréditaire avec une transmissionautosomique dominante. L’histoire de goutte chez le père et le grand-père estcompatible avec le diagnostic de néphropathie familiale hyperuricémique juvénile(NFHJ). La cause la plus fréquente en est une mutation concernant le gène UMODcodant pour l’uromoduline. L’étude génétique de cette famille identifia unemutation « faux sens » (Cys170tyr) dans l’exon 4 du gène UMOD.Il était alors intéressant d’évaluer la distribution de l’uromoduline dans le seultissu rénal disponible dans cette famille : la néphrectomie du père réalisée en

raison de la découverte d’un carcinome rénal. En dehors de cette tumeur, ilexistait une néphropathie tubulo-interstitielle chronique avec des kystes. Lescolorations spécifiques ont montré la présence d’uromoduline en grandequantité dans le cytoplasme des cellules tubulaires appartenant à des tubeshypertrophiques ou sièges de dilatations kystiques alors que dans le reinnormal, l’uromoduline est présente au pôle apical des cellules du tube distal etde façon faible dans le cytoplasme de ces mêmes cellules.Conclusion.– L’histoire familiale était la clé pour établir le diagnostic de NFHJ liéeà une mutation du gène codant pour l’Uromoduline. Chez un jeune patientprésentant une néphropathie tubulo-interstitielle chronique, même avec uneuricémie normale, et une histoire familiale de néphropathie tubulo-interstitiellecompatible avec une transmission autosomique dominante, il faut rechercherune mutation du gène codant pour UMOD afin de pouvoir donner un éventuelconseil génétique et d’envisager une transplantation rénale.Pour en savoir plusHubert F, Dahan K, Cosyns JP, Devuyst O, Pirson Y. Mild chronic renal failurewith a family history of kidney disease. NDT Plus 2009;2:415–417.

doi: 10.1016/j.nephro.2011.07.424