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Eléments de corrigé : les géographes aiment-ils encore la campagne ? PREMIERE PARTIE La formulation du sujet suppose qu’ils se sont tant aimés… et que ce n’est sans doute plus le cas. L’exposé doit donc dire quelque chose de cet amour, de ce désamour et bien entendu nuancer cette thèse. L’introduction doit partir d’une image forte du désintérêt des géographes pour les campagnes (aucune thèse de géographie rurale à la fin des années 90). Il faut également souligner la difficulté à définir les objets dont il s’agit. La campagne ? Le terme évoque d’abord le paysage et les hommes qui l’habitent et le façonnent : les paysans. Qu’est ce que la campagne pour les géographes ? –un paysage – un territoire peuplé de paysans qui définissent des genres de vie – un type d’espace (rural) qui s’oppose à la ville (urbain) – le domaine de la production agricole ce qui impose l’étude des structures agraires, des modes de production et des productions – tout cela à la fois. Le mot lui-même a quelque chose de désuet, il renvoie à Vidal de la Blache, à Demangeon bien plus qu’à une géographie contemporaine…

I. Géographes et campagnes : le désamour ? [les géographes n’aiment plus les campagnes] - le rejet d’une certaine géographie des campagnes considérée comme ringard. Dans un contexte où la population rurale était dominante, la géographie rurale est restée jusqu’en 1950 une des pièces maîtresses de la géographie humaine (doc 1). Elle s’intéresse particulièrement aux paysages agraires (résultat de l’aménagement d’un espace par les agriculteurs) c.à d. entre autres à :

- la morphologie agraire : la forme et l’organisation des parcelles et le mode de culture

(paysages d’enclos/ paysages d’openfield).

- L’habitat rural c. à d. l’agencement des espaces habités : répartition (dispersé/ groupé) –cf.l’indice de dispersion de Demangeon- site et forme (nucléaire, en ligne, en étoile, amorphe), matériaux et plan des habitations (maison-bloc/

maison-dissociée).

Cette organisation est considérée comme dépendant du milieu naturel et des structures agraires (définition floue : ensemble des conditions juridiques, foncières et agricoles qui conditionnent le paysage agraire). Les structures agraires comprennent à la fois les structures sociales agraires (mode de propriété, faire-valoir, répartition des richesses, structures sociales) et le système de culture.

A cette géographie des campagnes il est fait plusieurs reproches : celui d’être représentative de la géographie classique : définition floue des concepts, méthode inductive qui rend difficile la généralisation, forte dépendance vis-à-vis de l’histoire (M Bloch, L Febvre et plus tard F Braudel influencent la géographie des campagnes) qui empêche l’ouverture sur d’autres sciences des sociétés, et vis-à-vis de la cartographie et au travail de terrain, considérés comme peu scientifique.

- le contexte de modernisation de l’agriculture française (reconstruction puis marché commun agricole) et d’urbanisation,la « fin des paysans » pronostiquée en 1967 par Henri Mendras, ainsi que le rejet idéologique du ruralisme plus que suspect de Vichysme, autant que le renouvellement de la géographie française par les apports anglo-saxons plutôt centrés sur l’urbain – cf le poids de l’école de Chicago) ont contribué à marginaliser cette géographie (« culturelle » avant l’heure) des campagnes. Dans les années 50-60 la géographie des campagnes a mué en géographie économique et sociale, étude des structures agraires (R Lebeau) et des systèmes de production (P George), nombre de géographes qui ont déserté les campagnes s’intéressent par exemple ‡ la question de la rente foncière et de l’appropriation de la terre (ex R Brunet) engageant ainsi la géographie dans la question des rapports ville-campagnes mais l’approche économiste est à son tour démodée. Elle s’est longtemps maintenue

comme un passage obligé de la géographie scolaire au déclin de laquelle elle s’est ainsi trouvée associée.

- l’hégémonie de la géographie urbaine et spatialiste dans les années 80, a pu ainsi s’épanouir en négligeant les campagnes passées ainsi du statut de chouchou des géographes à celui de l’épouse négligée…

II. un retour à la terre ?

Ce tableau d’une géographie de campagnes désertée n’est cependant pas tout à fait vrai.

- c’est de l’étude des campagnes normandes qu’Armand Frémont, discipline d’André Cholley, faisait naître le concept d’espace auquel la géographie culturelle française allait bientôt se référer systématiquement. L’histoire du paysage français de JR Pitte fait également la part belle aux campagnes. La notion de « modes d’habiter ƒ proposée par N. Mathieu en 1996 dans le cadre d’une géographie rurale très axée sur le développement durable s’apparente également à ce retour en grâce de la tradition vidalienne.

- Si les études urbaines étaient plus prisées en métropole, la géographie des campagnes conservait toute sa vigueur dans le monde colonial en grande partie considéré comme rural par nature. Pierre Gourou (thèse sur les riziculteurs du Tonkin) et ses élèves comme Jean Gallais (thèse sur les paysans du delta du Niger) puis une génération post-coloniale, Joel Bonnemaison dont les premiers travaux portaient sur les paysans de Madagascar firent le lien entre cette géographie tropicaliste et l’anthropologie (autre science sociale développée dans le contexte colonial), contribuant ainsi à sortir la géographie française de son isolement mortifère.

- le renouveau de la géopolitique autour d’Yves Lacoste (thèse sur les campagnes de Haute-Volta) dans le contexte d’émergence du tiers-mondisme donne à la géographie des campagnes du tiers-monde une légitimité politique très forte : dans les années 70 dans le sillage ou par opposition aux travaux engagés de l’équipe de Lacoste les travaux de géographie sur le développement se multiplient de l’Amérique latine par exemple autour du thème de la réforme agraire : A Musset, (plus classique) A Birou (plus politique : force paysage et politiques agraires en Amérique latine, ed ouvrières 1970) de l’Inde autour de th…me de la Révolution verte (Durand Dastes) de la Chine (J Delvert, P Gentelle). La géographie de la faim de Josué de

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Castro (1953) portait en germe des travaux autour du concept d’écodéveloppement –Jean Bitoun, Françoise Plet…) et une géographie très impliquée (l’école J Bitoun dans l’etat brésilien du Pernambouc cf : Planète terre janvier 2009).

- Les programmes du collège et du lycée se font l’écho de ces préoccupations : études des paysages ruraux sous l’angle du développement en 6ème, étude des relations entre population et production agricole dans le chapitre sur l’Asie en 5ème, thème « nourrir les hommes » dans le programme de seconde que l’on retrouve au capes et dans les documents 2 et 3. Le thème est ici décliné dans l’espace des pays développé et sous l’angle « développement durable » (critique pour le document 3,

- Le renouveau des études sur le paysage témoigne également du fort intérêt des géographes pour les campagnes : car si « ma société n’a plus besoin d’agriculteurs, mais d’espaces vides » selon Jacques Lévy, 1994), les mutations des paysages ruraux (G. Bauer et J-M ROUX. La rurbanisation ou la ville éparpillée; Edition du Seuil, Paris 1976) voir par exemple les travaux de Jacqueline Bonnamour (Marcilly-Ogny, regards sur un village, ENS Jv 2005). Ces approches entre ethnographie et géographie rassemblent dans les campagnes des chercheurs venus d’horizons très variés (comme dans les années 1960, avec notamment l’opération de recherche sur Plozévet qui a connu une forte notoriété (Morin E., 1967 ; Mathieu N., 1973). Mais la géographie y court le risque de se diluer et les campagnes n’y sont souvent plus considérées en elles-mêmes mais comme des espaces de vie . Parallèlement, un parti « urbain » comprenant des géographes, des urbanistes, des sociologues, des paysagistes, postule que l’espace, aujourd’hui, n’est constitué que de formes d’occurrences de la ville, en se fondant sur l’idée que seuls seraient (encore) « rurales » des sociétés à dominante de population agricole où l’on retrouve, sans que les nouveaux auteurs s’y réfèrent, l’urbanisation des campagnes (M Lussault).

conclusion : 1. les géographes n’ont jamais cessé de s’intéresser aux campagnes ! Mais ils ont changé avec les campagnes qu’ils étudient. 2. La fin annoncée des campagnes est un lieu commun aussi faux que la fin de la géographie !

SECONDE PARTIE

Quelle citoyenneté dans la ruralité ? il faut interpréter la question à la lumière du document : comment développer une citoyenneté active en secteur rural. Le document illustre à la fois le dynamisme de la démocratie « participative » et du fait de la faible assistance signalée par le compte rendu sa difficulté.

1) Montrer qu’il s’agit d’une question d’éducation civique à laquelle on est d’abord tenté de répondre que la question ne devrait pas se poser et que la République étant une et indivisible il n’y a pas de citoyenneté particulière à la ruralité. Un court passage historique peut être fait pour dire que les territoires ruraux ont longtemps été l’objet d’une attention particulière des Républicains qui y voyaient des foyers possibles de « réaction » (chouannerie, poujadisme) et des terres de mission républicaine (maîtres d’école de la IIIème République) alors qu’ils ont tout autant été des territoires de défense de la République (cf La République au village de M Agulhon et les maquis de la Résistance). Mais la République tend à moins s’intéresser à la ruralité du fait de la « désertification » des campagnes, de la « fin des paysans ». Ainsi la fonction de Ministre de l’Agriculture qui était autrefois très importante dans le gouvernement est devenu quasi marginale. Même le salon de l’agriculture » n’est plus, depuis le départ de J. Chirac, le lieu d’une célébration de l’union de la République avec ses campagnes…. Ensuite il faut s’appuyer sur le document pour expliquer ce qu’est la démocratie locale : la commune, l’intercommunalité, la démocratie participative (assemblées de citoyens, enquêtes d’utilité publique…). Chacune de ces modalités de l’exercice de la citoyenneté peut être définie. 2) Enumérer les questions que cela pose : une en commençant par la mise en évidence (à partir du document) du clivage entre anciens et néo ruraux et l’impossible conciliation entre les attentes des deux populations en terme d’aménagement et de développement durable (on pourrait donner d’autres exemples, puisqu’on est dans l’espace montagnard pourquoi pas l’ours et le loup...). Il faut aussi la relation entre le local et le niveau national qui est suggérée dans la demande de services publics. Ce qui amène à aborder la question des services publics dans le maintien d’un lien social, et citoyen dans les zones de faible densité. Envisager la question en terme de citoyenneté c’est considérer que les services publics sont, au-delà des « services » qu’ils rendent, des point d’ancrage de la relation entre les citoyens et l’Etat dans les territoires. Enfin il faut faire une place au développement possible des comportements de type NIMBY qui peuvent être associés à l’isolement et aux demandes de préservation de l’environnement. Une dernière forme de la participation des «ruraux » à la citoyenneté est l’engagement souvent spectaculaire des agriculteurs dans des formes de protestation contre la PAC (de façon massive) ou contre la mondialisation (de façon minoritaire mais bruyante). 3) On peut donc terminer en énumérant les occasions de traiter ces questions dans les programmes d’EC : 6ème commune, démocratie locale, agenda 21… ; 5ème égalité sous l’angle de l’égalité entre les territoires. 3ème et 1ère République et exercice de la citoyenneté ; Terminale : Europe (PAC) et mondialisation (Bové…). Ceci peut être, intégré aux deux parties précédentes et/ou faire l’objet en fonction du temps qui reste ou pas de suggestions d’études de cas qui pourrait accompagner l’approche de ces thèmes par la ruralité.