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30 pratique conseil Actualités pharmaceutiques n° 482 Février 2009 La constipation est un symptôme bénin, souvent passager qui fait néanmoins l’objet de nombreux conseils au comptoir. S ouvent secrète, la constipation concerne pourtant une personne sur cinq en France. Maladie psycho- somatique pour les uns, héréditaire pour les autres, ses causes sont multiples. Définition et épidémiologie La constipation se définit par l’émission de moins de trois selles par semaine ou par une difficulté à les évacuer. Elle affecte près de 30 % de la population générale, de façon occasionnelle ou permanente. Elle survient trois fois plus fréquemment chez la femme que chez l’homme et sa prévalence aug- mente avec l’âge. Dans la majorité des cas, les demandes for- mulées au comptoir concernent la consti- pation dite de transit, qui correspond à un ralentissement du transit colique et se mani- feste par une raréfication des selles et une diminution de la sensation de besoin. Origines de la constipation - Cer- taines constipations résultent d’un ralentisse- ment de la progression des aliments le long du côlon (gros intestin). D’autres sont liées à des difficultés d’évacuation des selles au niveau du rectum (partie terminale du côlon) et de l’anus (“constipation terminale”). Par- fois, enfin, les deux types de problèmes sont associés. - telles un alitement prolongé, le man- que d’exercice, des boissons en trop faible quantité, une alimentation déséquilibrée ou insuffisamment riche en fibres apportées par les céréales, les légumes et les fruits. favorisent tout particulièrement l’apparition de ce trouble comme les voyages, en particulier à l’étran- ger. Interviennent, à ce niveau, tant l’absence d’activité que les modifications du régime alimentaire. peuvent égale- ment contribuer au développement d’une constipation, notamment ceux destinés à lutter contre la maladie de Parkinson, la dépression, l’hypertension, les pathologies cardiaques ou la douleur (morphine). - , sujet aux ballonnements et aux douleurs. Il n’est alors pas rare qu’elle alterne avec des diarrhées. Complications de la constipation Les complications de la constipation sont exceptionnelles. Néanmoins, un interroga- toire de qualité est nécessaire afin d’éviter des troubles secondaires pouvant être assez graves. , une véritable “impaction” rectale peut se pro- duire, en particulier chez le nourrisson et la personne âgée. Ainsi, un fécalome, caracté- risé par la présence de matières dures dans l’ampoule rectale, peut se former. En effet, sous couvert d’utiliser des produits “naturels”, certains consomment des laxatifs stimulants pouvant être à l’origine d’alternances de constipa- tions et de diarrhées violentes. est une des com- plications les plus importantes de la constipa- tion. Elle est due à la consommation massive de laxatifs, en particulier chez les personnali- tés dites “pathologiques”. Cette maladie psy- chiatrique fait souvent courir des troubles du rythme secondaires à l’hypokaliémie induite par la prise massive de laxatifs. Conseils hygiénodiététiques Lorsqu’une personne se plaint de constipation passagère, les conseils hygiénodiététiques occupent une place importante au comptoir. Le régime alimentaire préconisé comprend un apport suffisamment important en bois- sons et en fibres que l’on trouve dans les céréales (son de blé, pain au son), les fruits frais, les légumes verts et les fruits secs (pru- neaux, figues). En cas d’intolérance au son (ballonnements, gaz), la prise de mucilages, dont les effets sont semblables mais dont le coût est peut-être un peu plus élevé, peut être conseillée. Il faut en revanche éviter des aliments tels que le riz, le céleri, le chou, les carottes cuites, les bananes et le chocolat. Il est nécessaire d’insister sur l’importance de bien mastiquer les aliments au moment des repas qui doivent être pris dans le calme et à heures fixes. Il est conseillé de boire un verre d’eau ou de jus d’oranges frais au réveil pour stimuler le réflexe colique et, d’une façon générale, de consommer au moins 1,5 à 2 litres d’eau par jour. Enfin, il convient de pratiquer une activité physique régulière, de prendre le temps d’aller à la selle quoti- diennement, si possible à heures fixes, et de ne pas se retenir trop longtemps. Prise en charge Si les conseils hygiénodiététiques ne sont pas suivis d’effets, certains produits peuvent être proposés. , dont l’utilisation doit être occasionnelle lors des périodes de fortes constipations (tableau 1), peuvent être délivrés. Aux personnes âgées, chez lesquel- les une composante nerveuse peut limiter la défécation, des suppositoires ou des micro- lavements qui jouent le rôle de starter de la défécation, peuvent être proposés. En finir avec la constipation Certaines constipations sont dues au développement d’une tumeur digestive ou d’une maladie inflammatoire qui entrave le passage des aliments dans le tube digestif. C’est pourquoi, si ce trouble est d’apparition récente, si un amaigrissement ou l’émission de sang sont constatés, il est préférable d’orienter le patient vers un médecin. À noter © Fotolia.com/Raphotography

En finir avec la constipation

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Page 1: En finir avec la constipation

30pratique

conseil

Actualités pharmaceutiques n° 482 Février 2009

La constipation

est un symptôme bénin,

souvent passager qui fait

néanmoins l’objet de nombreux

conseils au comptoir.

Souvent secrète, la constipation concerne pourtant une personne sur cinq en France. Maladie psycho-

somatique pour les uns, héréditaire pour les autres, ses causes sont multiples.

Définition et épidémiologieLa constipation se définit par l’émission de moins de trois selles par semaine ou par une difficulté à les évacuer. Elle affecte près de 30 % de la population générale, de façon occasionnelle ou permanente. Elle survient trois fois plus fréquemment chez la femme que chez l’homme et sa prévalence aug-mente avec l’âge.Dans la majorité des cas, les demandes for-mulées au comptoir concernent la consti-pation dite de transit, qui correspond à un ralentissement du transit colique et se mani-feste par une raréfication des selles et une diminution de la sensation de besoin.

Origines de la constipation-

Cer-taines constipations résultent d’un ralentisse-ment de la progression des aliments le long du côlon (gros intestin). D’autres sont liées à des difficultés d’évacuation des selles au niveau du rectum (partie terminale du côlon) et de l’anus (“constipation terminale”). Par-fois, enfin, les deux types de problèmes sont associés.

-telles un alitement prolongé, le man-

que d’exercice, des boissons en trop faible quantité, une alimentation déséquilibrée ou insuffisamment riche en fibres apportées par les céréales, les légumes et les fruits.

favorisent tout particulièrement l’apparition de ce trouble comme les voyages, en particulier à l’étran-ger. Interviennent, à ce niveau, tant l’absence d’activité que les modifications du régime alimentaire.

peuvent égale-ment contribuer au développement d’une constipation, notamment ceux destinés à lutter contre la maladie de Parkinson, la dépression, l’hypertension, les pathologies cardiaques ou la douleur (morphine).

-, sujet aux

ballonnements et aux douleurs. Il n’est alors pas rare qu’elle alterne avec des diarrhées.

Complications de la constipationLes complications de la constipation sont exceptionnelles. Néanmoins, un interroga-toire de qualité est nécessaire afin d’éviter des troubles secondaires pouvant être assez graves.

, une véritable “impaction” rectale peut se pro-duire, en particulier chez le nourrisson et la personne âgée. Ainsi, un fécalome, caracté-risé par la présence de matières dures dans l’ampoule rectale, peut se former.

En effet, sous couvert d’utiliser des produits “naturels”, certains consomment des laxatifs stimulants pouvant être à l’origine d’alternances de constipa-tions et de diarrhées violentes.

est une des com-plications les plus importantes de la constipa-tion. Elle est due à la consommation massive de laxatifs, en particulier chez les personnali-tés dites “pathologiques”. Cette maladie psy-chiatrique fait souvent courir des troubles du rythme secondaires à l’hypokaliémie induite par la prise massive de laxatifs.

Conseils hygiénodiététiquesLorsqu’une personne se plaint de constipation passagère, les conseils hygiénodiététiques occupent une place importante au comptoir. Le régime alimentaire préconisé comprend un apport suffisamment important en bois-sons et en fibres que l’on trouve dans les céréales (son de blé, pain au son), les fruits frais, les légumes verts et les fruits secs (pru-neaux, figues). En cas d’intolérance au son (ballonnements, gaz), la prise de mucilages, dont les effets sont semblables mais dont le coût est peut-être un peu plus élevé, peut être conseillée. Il faut en revanche éviter des aliments tels que le riz, le céleri, le chou, les carottes cuites, les bananes et le chocolat. Il est nécessaire d’insister sur l’importance de bien mastiquer les aliments au moment des repas qui doivent être pris dans le calme et à heures fixes. Il est conseillé de boire un verre d’eau ou de jus d’oranges frais au réveil pour stimuler le réflexe colique et, d’une façon générale, de consommer au moins 1,5 à 2 litres d’eau par jour. Enfin, il convient de pratiquer une activité physique régulière, de prendre le temps d’aller à la selle quoti-diennement, si possible à heures fixes, et de ne pas se retenir trop longtemps.

Prise en chargeSi les conseils hygiénodiététiques ne sont pas suivis d’effets, certains produits peuvent être proposés.

, dont l’utilisation doit être occasionnelle lors des périodes de fortes constipations (tableau 1), peuvent être délivrés. Aux personnes âgées, chez lesquel-les une composante nerveuse peut limiter la défécation, des suppositoires ou des micro-lavements qui jouent le rôle de starter de la défécation, peuvent être proposés.

En finir avec la constipation

Certaines constipations sont dues

au développement d’une tumeur digestive

ou d’une maladie inflammatoire qui entrave

le passage des aliments dans le tube digestif.

C’est pourquoi, si ce trouble est d’apparition

récente, si un amaigrissement ou l’émission

de sang sont constatés, il est préférable

d’orienter le patient vers un médecin.

À noter

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conseil

Actualités pharmaceutiques n° 482 Février 2009

irritants doit être limité en raison du risque de survenue de troubles hydro-électriques et d’aggravation de la constipation que fait courir leur utilisation prolongée. Cependant, il est difficile de les éviter dans les constipa-tions sévères. Il convient d’évaluer les cau-ses et la durée de la constipation avant la mise en place de ce type de traitement.

peuvent être utilisées suivant le type de constipation et les symptômes associés. Ainsi, en cas de constipation chronique, peuvent être conseillées Bryonia alba 5 CH (selles volumineuses, dures et sèches), Gra-phites 5 CH (selles volumineuses, parfois accompagnées d’hémorroïdes ou de fissu-res anales) ou Opium 9 CH (aucune envie, aucune gêne, selles petites).Lorsque le patient se plaint de constipations accompagnées de faux besoins inefficaces, Nux vomica 5 CH (avec transit irrégulier) peut être proposée.En cas d’efforts intenses pour aller à la selle, Alumina 7 CH (selles douloureuses à expul-ser, parfois fissures anales) et Thuya 9 CH (sel-les douloureuses à expulser) sont indiquées.

sont connues pour leurs propriétés laxatives drastiques impliquant de les utiliser avec précaution. La graine de lin (1 ou 2 sachets de graines de lin par jour) accélère le transit, lubrifie et aug-mente le volume des selles. Ce laxatif doux mais efficace permet de traiter également les colites et les douleurs abdominales.La bourdaine (1 ou 2 gélules matin et soir, au moment des repas, pendant 10 jours maxi-mum) stimule le péristaltisme intestinal et a un effet laxatif stimulant. Déconseillée chez la femme qui allaite, elle est utilisée unique-ment dans la constipation occasionnelle.

Le séné (1 à 2 gélules matin et soir, au moment des repas, pendant 8 à 10 jours au maxi-mum) a une action laxative, même purgative, selon les doses administrées. Il produit une augmentation du volume des selles et une meilleure hydratation de celles-ci. Comme la bourdaine, il est utilisé en cas de constipation occasionnelle. Réservé à l’adulte, il ne doit pas être conseillé en cas d’allaitement.L’ispaghul (1 gélule ou 1 sachet matin, midi et soir, au moment des repas ; boire dans l’heure qui suit) a une action laxative. Son effet “fibre” est particulièrement adapté en cas de constipation chronique.

La constipation est un trouble courant chez la femme enceinte, en particulier lors des deux derniers trimestres de grossesse.Certains conseils permettent de l’éviter : – consommer des légumes et des fruits frais en abondance, de la compote de pommes et des pruneaux ;– préférer des aliments laxatifs doux au petit déjeuner (blé soufflé, jus d’orange) ;– boire beaucoup d’eau, particulièrement riche en magnésium (Hépar®).Si besoin, un traitement homéopathique (Nux vomica, Sepia, Opium) peut être proposé avant de recourir, en cas d’échec, à un traitement par laxatif osmotique. Si cela n’est toujours pas effi-cace, un laxatif par voie rectale sera conseillé.

La constipation du nourrisson est un phéno-mène fréquent et banal, entraînant une dimi-

nution du nombre des selles, qui sont dures et émises difficilement. Elle peut être source de douleurs abdominales qui provoquent des pleurs chez le bébé lors de l’exonération. Il faut la traiter au plus tôt car si la défécation est asso-ciée à la douleur, le nourrisson va tenter de rete-nir ses selles, ce qui intensifiera le problème.La constipation chez le nourrisson est la plu-part du temps fonctionnelle, essentiellement de cause diététique. Si bébé est nourri au sein, il se peut que la maman ait une alimentation pauvre en fibres. S’il est nourri au biberon, il est possible que les parents ne respectent pas correctement les proportions de poudre et d’eau lors de la reconstitution du lait. Enfin, s’il est en phase de sevrage, il est habituel de constater une constipation transitoire.Plusieurs conseils peuvent être donnés :– en cas d’allaitement, opter pour un régime plus riche en fibres, consommer plus de jus de fruits, d’eau et de légumes verts ;– en cas d’alimentation au biberon, préférer les laits infantiles qui contribuent à l’amélioration du transit intestinal de bébé (Lait Picot Consti-pation®) et, si besoin, recourir aux laxatifs rec-taux (Microlax Bébé®) ou osmotiques doux ;– en phase de diversification alimentaire, pri-vilégier les aliments riches en fibres tels que les légumes verts (épinards, haricots verts, courgettes), fruits et jus de fruits (surtout jus d’oranges et jus de pruneaux) et faire consom-mer beaucoup plus d’eau. �

Pharmacien, Angers (49)

[email protected]

Types de laxatif Principe d’action Spécialités Indications et précautionsLaxatifs de lest Fibres alimentaires, son, mucilages

(ispaghul, gomme, sterculia, psyllium...)

Augmentation des

résidus et de l’eau

fécale (apport d’eau

impératif après la prise)

Spagulax®

Normacol granulés®

Infibran®

Traitement de fond de toutes

constipations

Bonne tolérance (parfois

ballonnements et/ou flatulences)

Laxatifs osmotiques

Sucres (lactulose, lactilol, sorbitol)

Ions (sulfate de sodium, de magnésium)

Polyéthylèneglycol (PEG 3 350 ou 4 000)

Augmentation de l’eau

fécale (effet amélioré

par une prise à jeun)

Importal®, Duphalac®, Lactulose®

Eau minérale riche en magnésium

Transipeg®, Movicol® (enfants,

adultes), Forlax® (enfants, adultes)

Traitements occasionnels

des constipations sévères.

Risque de ballonnements,

flatulences avec les sucres ou

de diarrhées si dose excessive

Laxatifs stimulants

Anthraquinones (séné, bourdaine,

dantrone, tamarine, cascara)

Phénolphtaléïne

Bisacodyl

Docusate de sodium

Sécrétion d’eau et

d’électrolytes dans

le grêle et le côlon.

Effet stimulant sur

la motricité colique

Tamarine®, Sénokot®

Dulcolax®, Contalax®

Jamylène®

Risques d’effets secondaires

contre-indiquant

leur utilisation :

hypokaliémie, déshydratation,

lésions des plexus nerveux

coliques

Laxatifs émollients

Huile de paraffine

Huile de vaseline

Effet lubrifiant

(utilisation prolongée

fortement déconseillée)

Transulose®, Lubentyl®, Lansoyl®Traitement adjuvant dans

les constipations bénignes.

Risque de suintement anal

gênant, baisse de l’absorption

des vitamines liposolubles (ADEK)

Laxatifs rectaux

Sorbitol

Glycérine

Bicarbonate de sodium

Effet starter pour la défécation Microlax® (bébé/adultes)

Suppositoires

Eductyl® (adultes/enfants)

Intéressant chez les personnes

âgées et les jeunes enfants

Il arrive que des jeunes femmes ou des jeunes

filles désirent plusieurs boîtes de laxatifs et que

cette demande se renouvelle fréquemment.

Or, ces patientes sont peut-être atteintes

d’anorexie. Il convient alors de rappeler les

posologies de ces produits (2/jour pendant

10 jours maximum) et de ne délivrer qu’une

boîte (suffisante pour un traitement). En cas

d’insistance, une consultation médicale, parfois

plus propice à la discussion, peut être conseillée.

Attention