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Memoire
Enquete nationale sur la formation des internes enneurologie en France
French national survey on neurology resident training
N. Weiss a,b, V. Guiraud a,c, M. Zuber d, E. Touze c,*aAssociation des assistants et internes de neurologie de France (ANAINF), 75013 Paris, Franceb Laboratoire de biologie de l’endothelium cerebral, departement de biologie cellulaire, institut Cochin, 75014 Paris, FrancecService de neurologie et unite neurovasculaire, hopital Sainte-Anne, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis,
75674 Paris cedex 14, FrancedService de neurologie et neurovasculaire, groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, Paris, France
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i n f o a r t i c l e
Historique de l’article :
Recu le 24 juillet 2008
Recu sous la forme revisee le
28 septembre 2008
Accepte le 13 octobre 2008
Disponible sur Internet le
20 janvier 2009
Mots cles :
Education
Diplome d’etudes specialisees
Neurologie
Satisfaction
Competences
Enquete
Keywords:
Education
Neurology
Survey
Competencies
Internship and residency
r e s u m e
Contexte. – La specialite de neurologue est devenue de plus en plus complexe et diversifiee et
requiert des competences specifiques. La satisfaction des internes francais vis-a-vis de leur
formation et le niveau de connaissance et de competence qu’ils estiment avoir acquis n’ont
jamais ete evalues.
Methodes. – Nous avons realise une enquete aupres des neurologues en formation sur : (i) les
methodes utilisees pour la formation et l’evaluation, (ii) le niveau de connaissance acquis
percu par les internes, et (iii) leur satisfaction et leurs souhaits.
Resultats. – Cent huit internes ont repondu. Les principales sources de formation utilisees
par les internes sont l’enseignement pratique local (74 %), le travail personnel (61 %) et les
journaux scientifiques (57 %) ou didactiques (54 %). Les internes ne semblent pas acquerir
l’ensemble des connaissances contenues dans le programme de formation. En effet, les
internes jugeaient connaıtre bien ou tres bien seulement 14 des 29 domaines du programme
d’enseignement de la neurologie. Les domaines les moins bien maıtrises etaient la semio-
logie neurophysiologique, la neuropsychologie, les pathologies du sommeil et comas,
l’oncologie et la psychiatrie. Meme en derniere annee, ils ne maıtrisent pas bien la realisa-
tion des techniques electrophysiologiques et incompletement leur interpretation.
Cinquante-huit pour cent des internes sont satisfaits de leur formation, 16 % ne savent
pas tres bien quoi penser et 26 % ne sont pas satisfaits. Dans l’ensemble, ils sont favorables a
une harmonisation des modalites de formation et de validation de la specialite au niveau
national, a un document de travail et de suivi de type portfolio et a l’acces aux consultations.
Conclusion. – Nos resultats suggerent qu’il serait utile de mieux formaliser les competences
attendues d’un neurologue et d’utiliser des outils adaptes pour atteindre ces objectifs de
formation.
# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (E. Touze).0035-3787/$ – see front matter # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.doi:10.1016/j.neurol.2008.10.024
a b s t r a c t
Background. – Over the past 20 years, the neurology specialty has changed because of the
explosion of information and new treatment modalities that became available, and has
consequently become more complex and diversified. The satisfaction of residents concern-
ing their training and the competencies that they acquire has never been thoroughly
assessed in France.
Methods. – We conducted a national survey in order to assess (1) the methods for training
and validation; (2) the level of knowledge that residents perceived to have acquired in
different domains; and (3) their satisfaction towards training and their wishes.
Results. – One hundred and eight residents replied to the survey. The main sources of
training were local teaching (74%), personal work (61%), scientific (57%) and didactic (54%)
papers. Residents seemed unable to acquire knowledge on all domains of the curriculum
established at a national level, particularly for neurophysiology, neuropsychology, comatose
state and sleep disorders, oncology and psychiatry. Even postgraduate year four residents
were not fully competent with several technical tools, particularly neurophysiological tests.
Fifty eight percent of residents were satisfied with their training, but 16% were not and 26%
were half-hearted. Overall the residents were in favor of more standardization in their
training, national-level certification, and would be keen on having access to clinics and the
use of a follow-up monitoring chart.
Conclusion. – Our results suggest that it would be useful to better identify the competencies
that every neurologist should acquire and to use appropriate tools to reach these objectives.
# 2008 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
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1. Introduction
La specialite de neurologue a connu d’importantes evolutions
au cours des 25 dernieres annees (Elkind, 2005 ; Galetta et al.,
2006). Il y a eu des avancees en neurosciences fondamentales,
notamment en genetique et en immunologie, et les progres de
l’imagerie ont completement modifie l’approche diagnostique
d’un grand nombre de pathologies neurologiques. Des
therapeutiques efficaces sont maintenant disponibles. Ainsi,
la specialite est devenue de plus en plus complexe et
diversifiee, et les nombreuses sur-specialisations qui sont
apparues requierent des competences specifiques. Parallele-
ment aux evolutions de la specialite, la profession de medecin
a du s’adapter pour repondre aux exigences croissantes de
resultats et de qualite exigees par les patients et les pouvoirs
publics. Enfin, l’abondance de la litterature scientifique et la
generalisation d’une medecine basee sur les preuves impli-
quent une bonne connaissance de la methodologie de la
recherche clinique et une lecture critique de cette litterature.
Cependant, malgre ces evolutions recentes de la specialite de
neurologue et de la pratique de la medecine en general, les
modalites de formation theorique et pratique et de validation
du diplome de neurologue semblent avoir assez peu evolue.
En France, le titre de specialiste est sanctionne par le
diplome d’etudes specialisees (DES) et le diplome de docteur
en medecine. La specialite est obtenue apres la validation de
stages pratiques dont le nombre varie selon la specialite
(huit semestres en neurologie), d’un enseignement theorique
(environ 250 heures), d’une these d’exercice (memoire)
et parfois d’un document de synthese. Le College des
enseignants de neurologie (CEN) a redige un programme
d’enseignement du DES de neurologie qui definit les
objectifs de formation dans 29 domaines de la specialite
(www.sf-neuro.org/) (CEN, 2003). Cependant, il n’est pas verifie
de maniere systematique que l’interne a bien recu une
formation et/ou qu’il a acquis les connaissances dans tous
ces domaines pour l’obtention du diplome de specialiste. Ce
modele classique d’enseignement et de validation a toutefois
ete remis en question dans plusieurs pays, comme les Etats-
Unis et le Canada, qui ont recemment redefini les objectifs de
formation et les methodes de certification sur l’acquisition de
competences specifiques (Corboy et al., 2002 ; Galetta et al.,
2006 ; Goroll et al., 2004).
Les modalites de formation des internes en neurologie, en
France, ont ete assez peu evaluees. Une enquete menee en
2001–2002, ayant porte sur 86 repondants, avait montre que
70 % des internes etaient satisfaits de l’enseignement
(frequence et type de cours), mais que 70 % d’entre eux
n’estimaient pas avoir assez de temps dedie a leur formation
(Decavel et al., 2004). Nous avons donc mene une nouvelle
enquete nationale dont les objectifs etaient d’evaluer :
� les modalites de formation et de validation ;
� le niveau percu de connaissances et de competences
acquises ;
� la satisfaction des internes.
2. Methodes
En avril 2007, un questionnaire a ete elabore par un
neurologue senior et deux internes de Neurologie qui venaient
de terminer leur formation, a savoir le president et le tresorier
adjoint de l’Association des assistants et internes en
neurologie de France (ANAINF : http://neurologie.com.fr).
Les questions ont ete formulees apres avoir defini les
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principaux domaines a etudier : formation (moyens et acces),
autoevaluation des connaissances theoriques et pratiques,
satisfaction vis-a-vis de la formation et souhaits (annexe S1,
voir le materiel complementaire accompagnant la version en
ligne de cet article). Un questionnaire utilise pour une enquete
similaire aupres des internes de cardiologie a servi de base
d’inspiration pour certains items (Moubarak et Leenhardt,
2008). Le questionnaire a ensuite ete valide par le president, le
vice-president et le secretaire general du CEN, puis teste
aupres de cinq internes qui ont juge l’acceptabilite bonne.
En juin 2007, le questionnaire a ete envoye par courrier
electronique a toutes les personnes de la liste de diffusion de
l’ANAINF (incluant environ 110 internes en cours de forma-
tion) et par courrier postal aux chefs de service de neurologie
des CHU et CHG (91 courriers). Les personnes eligibles pour
repondre a ce questionnaire etaient les internes (DES, AFS, et
AFSA) et les chefs de clinique assistants exercant depuis
moins de deux ans. Les personnes inscrites sur la liste de
diffusion de l’ANAINF ont ete relancees par courrier electro-
nique a deux reprises a 15 jours d’intervalle.
Ce travail a ete realise avec le soutien du CEN (http://
www.sf-neuro.org). Les donnees, saisies dans une base de
donnees, ont ete traitees anonymement.
3. Resultats
Apres exclusion de cinq questionnaires non exploitables, 108
questionnaires, dont 69 % ont ete recus par courrier electro-
nique, ont finalement ete retenus pour l’analyse (Tableau 1).
Les internes d’Ile-de-France representaient 39 % des repon-
dants.
Tableau 1 – Caracteristiques generales des internesayant repondu au questionnaire.General characteristics of the residents in neurology whoanswered the survey.
n = 108
Age (ans), moyenne (DS) 28,3 (3,0)
Femmes, n (%) 57 (53%)
Situation, n (%) DES 78 (72%)
CCA 13 (12%)
AFS(A) 10 (9%)
Disponibilite 7 (7%)
Interregion, n (%)a Ile-de-France 41 (39%)
Nord-Ouest 12 (11%)
Ouest 11 (10%)
Rhone-Alpes 10 (9%)
Sud-Ouest 8 (8%)
Nord-Est 17 (15%)
Sud 7 (7%)
Nombre total de semestres, mediane (IQ) 6 (4–8)
Nombre de semestres en neurologie, med-
iane (IQ)
4 (3–6)
DS : deviation standard ; IQ : interquartile ; DES : diplome d’etude
specialise ; CCA : chef de clinique et assistant ; AFS : attestation de
formation specialisee ; AFSA : attestation de formation specialisee
approfondie.a Donnee manquante pour 2.
3.1. Formation
Le nombre median (interquartile) de stages, toute discipline
confondue, effectues etait de 6 (4–8). Le choix de la specialite
neurologie s’etait fait majoritairement avant l’internat (n = 71,
68 %). Quatre-vingt-un pour cent des repondants (n = 87)
avaient fait au moins un stage dans une autre specialite :
psychiatrie (n = 16), medecine interne et/ou rhumatologie
(n = 16), medecine physique et readaptation (n = 15), reanima-
tion medicale (n = 14) et neuroradiologie (n = 12). Environ un
quart des internes (n = 29, 27%) avaient effectue un stage hors
CHU dont la moitie pour suivre une formation non disponible
dans leur CHU d’origine. Deux tiers des repondants (n = 71,
66 %) avaient recu une formation complementaire par un
diplome universitaire (DU) ou interuniversitaire (DIU) : neu-
rovasculaire (n = 15), neurophysiologie (n = 14), cephalees
(n = 13), mouvements anormaux (n = 12), neuropsychologie
(n = 10), et nerf peripherique (n = 9). Un tiers des repondants
(n = 36, 33 %) avait valide un Master 2, 21 % l’envisageaient et
14 % avaient une these d’universite. Apres l’internat, 44 % des
internes envisageaient une carriere hospitaliere ou hospitalo-
universitaire, 14 % une activite mixte liberale et hospitaliere et
3 % une activite liberale exclusive. Un cinquieme (21 %) des
internes n’etait pas decide.
Seulement 22 % des repondants avaient connaissance d’un
programme officiel d’enseignement du DES de neurologie.
Quatre vingt internes (75 %) avaient rencontre le coordonna-
teur regional et/ou interregional au moins une fois dans leur
formation (86 % au-dela de 6e semestre).
Comme le montre la Fig. 1, les principales sources de
formation jugees comme importantes ou tres importantes par
plus de la moitie des internes etaient l’enseignement local
pratique (incluant la formation au lit du patient) (74 %), les
journaux scientifiques (57 %), les journaux ou ouvrages
didactiques (54 %) et le travail personnel (61 %). Trois sources
d’information etaient considerees comme peu utiles : les sites
web des societes savantes, les congres internationaux, les
cours regionaux. Cinquante-sept pour cent des internes ont
Fig. 1 – Importance relative des differentes sources de
formation.
Relative importance of the different training resources.
Fig. 2 – Disponibilite et acces des internes a la formation.
Resident’s time availability and access to training modalities.
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repondu qu’ils avaient un enseignement regional et/ou
interregional obligatoire ou « percu » comme obligatoire.
L’accessibilite des sources de formation est presentee dans
la Fig. 2. L’acces aux revues scientifiques et a Internet etait juge
tres bon (87% des internes avaient facilement acces a Internet
sur leur lieu de stage). Respectivement 31 et 38 % des internes
etaient tout a fait d’accord ou d’accord sur l’item « Je n’ai
aucun probleme pour apprendre sur des documents ecrits en
anglais ». La majorite des repondants estimait manquer de
temps pour se rendre aux cours et aux congres nationaux ou
internationaux. Cinquante-deux pour cent des internes
n’avaient pas la possibilite d’assister a des consultations.
Trois quarts (75 %) des internes faisaient des gardes de
neurologie et 66 internes (62 %) d’entre eux etaient autorises a
prendre un repos compensateur.
3.2. Connaissances
Les internes jugeaient connaıtre bien ou tres bien 14 des
29 domaines de la neurologie (Fig. 3). Au-dela du 6e semestre,
cette proportion augmentait assez peu. Par exemple, dans les
Fig. 3 – Niveau de connaissance percu dans les 29 domaines du
Self-assessed knowledge in the 29 domains of the official French tra
domaines les moins bien maıtrises, cette proportion passait de
32 a 47 % pour la semiologie neurophysiologique, de 39 a 47 %
pour la neuropsychologie, de 32 a 45 % pour les pathologies du
sommeil et comas, de 23 a 35 % pour l’oncologie et de 34 a 44 %
pour la psychiatrie. Par ailleurs, la majorite des internes
estimait avoir une bonne ou tres bonne maıtrise de la
recherche Medline (82 %), de l’outil Power Point (98 %), de la
communication orale en francais (95 %), de la redaction d’un
article didactique en francais (51 %) et de la lecture critique
d’articles (69 %). Une minorite maıtrisait la communication
orale et la redaction d’un article scientifique en anglais (27 %).
La realisation d’une ponction lombaire etait l’acte technique
le mieux maıtrise par 98 % des internes (Fig. 4). La realisation et
l’interpretation d’examens complementaires electrophysiolo-
giques et neuropsychologiques etaient mal maıtrisees. En fin
d’internat, on observait une legere augmentation du nombre
des internes aptes a realiser ou interpreter ces explorations :
realisation d’unEMG (41 % versus27 %), interpretation d’unEMG
(36 % versus 24 %), interpretation d’un EEG (32 % versus 21 %) et
realisation ou interpretation d’un examen neuropsychologique
(49 % versus 37 %).
Les internes declaraient avoir une bonne maıtrise des
traitements dans les principaux domaines de la neurologie
(Fig. 5). En restreignant l’analyse aux internes en 6e semestre
ou au-dela, la proportion d’interne se jugeant aptes a prescrire
seuls etait plus importante : epilepsie (64 %), phase aigue de
l’accident vasculaire cerebral (96 %), prevention secondaire de
l’accident vasculaire cerebral (97 %), maladie de Parkinson
(59 %), cephalees (62 %), demences (76 %), sclerose en plaques
(55 %) et douleurs neurogenes (79 %).
3.3. Satisfaction
Plus de la moitie des internes (58 %) etaient satisfaits de leur
formation, 26 % n’en etaient pas satisfaits et 16 % ne savaient
pas « tres bien quoi penser ». Les domaines dans lesquels
les internes semblaient les moins satisfaits etaient la
formation theorique (44 %), la perception que la formation
etait une priorite des enseignants (39 %), l’organisation de
programme officiel.
ining program.
Fig. 4 – Realisation et interpretation des examens
complementaires.
Performing and analyzing complementary tests.
Fig. 5 – Maıtrise des modalites therapeutiques.
Skills in therapeutic modalities.
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l’enseignement (33 %), la possibilite de se former dans tous les
domaines (41 %), l’information sur la formation (33 %) et la
maquette du DES (49 %).
3.4. Souhaits
Les internes etaient majoritairement favorables a un livret
pedagogique de type portfolio, (71 %), a une harmonisation
nationale de l’enseignement theorique (82 %), a un ouvrage de
reference (95 %), a des cours accessibles « en ligne » (91 %), a
une evaluation reguliere de l’enseignement (64 %), a une
harmonisation des modalites de validation du DES (60 %), a
une participation active des internes dans les enseignements
(78 %), a la possibilite d’acceder a des consultations (93 %) et a
un tutorat (60 %). En revanche, seuls 48 % des internes etaient
favorables a un controle des enseignements suivis.
4. Discussion
Cette etude montre que les internes de neurologie sont
globalement satisfaits de leur formation, que leurs principales
sources de formation sont l’enseignement pratique local, les
journaux scientifiques ou didactiques et le travail personnel.
Cependant, cette satisfaction contraste avec des lacunes
avouees dans 14 des 29 domaines de competence du
programme officiel. La maıtrise et l’interpretation des exa-
mens complementaires, notamment electrophysiologiques et
neuropsychologiques, sont globalement faibles, meme en
derniere annee de formation. En revanche, les internes
semblent bien maıtriser les strategies therapeutiques majeu-
res dans la specialite. Ils souhaitent avoir un role plus actif
dans l’enseignement, sont favorables a une harmonisation
des modalites de formation et de validation de la specialite au
niveau national, a l’utilisation d’un portfolio et a l’acces a des
consultations. Cette enquete a porte sur un nombre important
de neurologues en formation. Le nombre de participants etait
superieur a celui de l’etude realisee en 2001 (86 reponses)
(Decavel et al., 2004) et cette enquete a pris en compte des
domaines non evalues jusqu’a present.
L’enseignement au chevet du malade et les visites des
seniors sont generalement consideres comme d’un interet
pedagogique majeur (Hooker et al., 2003). Le taux de satisfac-
tion que nous avons observe confirme l’importance des stages
pratiques comme source de formation. A l’inverse, les internes
ne sont pas tres satisfaits de leur formation theorique. De plus,
66 % des internes avaient valide un DU ou un DIU. Cette
proportion est en accord avec l’enquete de 2001 qui montrait
que 77 % des internes souhaitaient s’inscrire en DU ou DIU. Ce
resultat pourrait refleter un souhait de sur-specialisation,
mais aussi un sentiment d’insatisfaction vis-a-vis de l’ensei-
gnement theorique dans le cadre du DES. Certains internes
semblent capables d’adapter leur formation a leurs attentes.
Par ailleurs, 27 % realisent un inter-CHU principalement pour
acquerir une connaissance non accessible dans leur CHU
d’origine. La majorite des internes declare manquer de temps
pour leur formation theorique en raison des difficultes pour se
liberer des activites cliniques.
Actuellement, la formation des internes de neurologie
repose sur la realisation de stages pratiques et l’acquisition
d’une liste connaissances theoriques. Cependant, moins d’un
quart des internes avait connaissance du programme officiel
de formation. Le travail personnel jouant une part importante
dans la formation, la meconnaissance de ces objectifs pourrait
partiellement expliquer que plus de 40 % des domaines de
competence sont mal maıtrises. Par ailleurs, il n’existe pas de
hierarchisation dans les connaissances, ni de niveau minimal
predefini a acquerir. Certains domaines sur-specialises,
correspondent a des pathologies rarement rencontrees en
neurologie generale et l’enseignement theorique rattache a
ces maladies est souvent deconnecte de la pratique clinique.
La difficulte d’acces aux stages d’explorations fonctionnelles
pourrait expliquer la mauvaise maıtrise des techniques, mais
n’est surement pas le seul facteur pouvant expliquer la
mauvaise maıtrise de leur interpretation. Cette difficulte
d’acces a certains domaines de la neurologie a ete egalement
bien documentee dans d’autres pays (Adair et al., 2006 ; Corboy
et al., 2002 ; Facheris et al., 2005). En Amerique du Nord, des
rotations de courte duree dans des services sur-specialises ont
ete rendues obligatoires pour pallier a ces difficultes (Corboy
et al., 2002 ; Galetta et al., 2006). A l’inverse, la bonne maıtrise
des strategies therapeutiques dans les pathologies les plus
Tableau 2 – Domaines de competences proposes par leCollege royal des medecins et chirurgiens du Canada.Medical skills proposed by The Royal College of Physiciansand Surgeons of Canada.
College royal des medecins et chirurgiens du Canada
Expertise medicale : connaissances theoriques, habiletes et
attitudes cliniques pour offrir des soins de qualite.
Erudition : developpement professionnel continu, analyse critique
de la documentation, participation a la recherche et a
l’enseignement.
Communication : aptitude a etablir des relations harmonieuses
avec
ses patients, ses collegues et les autres professionnels de sante.
Collaboration : travailler en equipe avec d’autres professionnels de
sante dans l’interet du patient.
Professionnalisme : responsabilites et reflexions ethiques.
Gestion : participation a la vie de son milieu professionnel, a
l’affectation des ressources et la gestion de la pratique
professionnelle.
Promotion de la sante : favoriser la sante publique, le bien-etre
des patients, des collectivites et des populations.
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frequemment rencontrees a l’hopital s’expliquerait par une
bonne adequation entre l’enseignement theorique et la mise
en application tres reguliere. Enfin, nous avons observe que
peu d’internes avaient la possibilite d’assister a des consulta-
tions. Au cours des dernieres annees, la prise en charge de
nombreuses pathologies neurologiques est devenue essen-
tiellement ambulatoire. Pour ces pathologies, certains aspects
comme l’annonce d’un diagnostic, la mise en route d’un
traitement et la prise en charge medicosociale ne sont donc
quasiment pas enseignes sur le plan pratique. Un des defis
futurs de l’enseignement de la neurologie sera donc de
s’adapter a cette evolution, malgre un nombre deja insuffisant
d’internes pour prendre en charge les patients hospitalises.
Nos resultats sur la satisfaction des internes sont mitiges.
Alors que les internes etaient majoritairement satisfaits de
leur formation, ils n’etaient pas tres satisfaits sur certains
aspects tels que la formation theorique, la possibilite de se
former dans tous les domaines de la neurologie, l’organisation
de l’enseignement et le sentiment que la formation etait une
priorite pour leurs enseignants. La majorite des internes etait
favorable a une harmonisation des modalites de formation et
de validation au niveau national, a un livret pedagogique, a
une participation active dans les enseignements et a une
evaluation reguliere de l’enseignement.
En fait, des etudes americaines et canadiennes ont deja
montre que l’approche fondee sur une liste exhaustive de
connaissances a acquerir presente des limites (Goroll et al.,
2004). Premierement, cette approche est souvent organisee
autour de cours theoriques dans lesquels les apprenants sont
relativement passifs. Or, il est generalement admis que
l’impact des cours dans lesquels l’etudiant est passif est tres
faible. Deuxiemement, l’organisation pratique des cours est
souvent difficile : (i) repartition des internes dans differents
hopitaux, parfois tres eloignes (interregions en France) ;
(ii) difficultes pour les internes de se liberer de l’activite
clinique ; (iii) faible nombre et disponibilite des enseignants,
qui ont de nombreuses autres taches.
Troisiemement, il peut y avoir des variations d’une region a
une autre dans les sur-specialisations des enseignants et dans
le nombre de cours dispenses. Quatriemement, comme le
montre notre enquete, le caractere trop exhaustif des
connaissances theoriques a acquerir fait que les internes se
jugent faibles, voire tres faibles, dans de nombreux domaines.
Enfin, cette approche est insuffisante pour assurer un bon
niveau d’expertise d’un specialiste. Ainsi, dans plusieurs pays,
ces limites ont conduit a repenser le mode de certification et
d’enseignement des specialistes, en l’organisant autour de
competences requises (Goroll et al., 2004). Ces competences
sont generalement separees en plusieurs domaines : prise en
charge du patient, connaissances medicales, communication,
recherche de l’information medicale et integration dans le
systeme de sante. Ceux du College royal des medecins et
chirurgiens du Canada (http://crmc.medical.org) sont pre-
sentes dans le Tableau 2.
Aux Etats-Unis, cette approche a ete progressivement mise
en place en neurologie (Elkind, 2005) et a demontre sa
faisabilite. Il est certain que les neurologues francais acquie-
rent en grande partie ces competences, notamment pendant
les stages pratiques et grace a un enseignement en partie
organise autour de ce principe. Cependant, ce qui est fait dans
ce domaine n’est pas mis en valeur, le programme de
formation des neurologues n’est actuellement pas construit
autour de competences a acquerir, et ces competences
n’apparaissent pas dans les objectifs de formation et ne sont
que partiellement evaluees. Il serait donc utile de mieux
formaliser les competences attendues d’un neurologue et de
mener une reflexion sur les modalites de formation et
d’evaluation afin d’atteindre ces objectifs. Il faudrait aussi
identifier les moments et lieux ou les internes peuvent
acquerir ces competences, valoriser ce qui est deja fait et si
besoin developper de nouveaux outils.
Un des moyens les plus simples de repondre a plusieurs de
ces objectifs est le portfolio (Carraccio et Englander, 2004 ;
Challis, 2001 ; Mathers et al., 1999). Le portfolio est un livret
individuel dans lequel l’interne compile les informations
relatives a sa formation (cours suivis, gestes realises,
situations cliniques, recherches bibliographiques, communi-
cations, publications). Il fournit des informations utiles sur la
specialite, les objectifs a atteindre et les modalites de
validation du DES. Ce document responsabilise l’interne,
favorise l’auto-apprentissage et l’autoevaluation, et pourrait
dans une certaine mesure servir d’instrument d’evaluation
(Challis, 2001 ; Facheris et al., 2005). En France, un portfolio a
deja ete mis en place avec succes dans plusieurs specialites,
comme la rhumatologie (www.lecofer.org) et la reanimation
medicale (www.srlf.org/01-formation/CNERM/0A-Presenta-
tion-cnerm.asp). Les resultats de cette enquete suggerent
que les internes francais y sont favorables.
Remerciements
Nous remercions l’ensemble des internes de neurologie et
CCA ayant repondu a l’enquete, le Dr G. Moubarak pour
l’echange reciproque lors de l’elaboration du questionnaire et
les membres du bureau du CEN qui ont soutenu ce projet et en
particulier Messieurs les Professeurs Jean Pouget, Frederic
Dubas, et Mathieu Zuber pour leur soutien et leur lecture
critique du formulaire de l’enquete.
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Annexe A. Materiel complementaire
Du materiel complementaire accompagnant cet article est
disponible sur http://www.sciencedirect.com, DOI:10.1016/
j.neurol.2008.10.024.
Annexe A. Materiel complementaire
r e f e r e n c e s
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