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Enquete sur Hervé Novelli

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Enquete sur le passé d'Hervé Novelli

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GENERATION DROITE-EXTREMENOVELLI

Pour les élections régionales, le Secrétaire d'Etat au Commerce se présentera face au socialiste François Bonneau. Candidat sur une région qui n'aime pas les extrêmes, Novelli tente de se racheter une histoire en enfumant le monde avec son passé. Mouvement anti-communistes, groupuscules d'extrême-droite, club de réflexion néofascistes. Novelli a succombé dans sa jeunesse a beaucoup de tentation qui dépasse le

simple engagement contre le communisme. A quelques jours du premier tour des régionales, ce dossier spécial, comie tous les articles parus au sujet du libéral de droite, Hervé Novelli. Entre tentatives de réécriture de l'histoire et de censure, il est bon de savoir quel est le vrai portrait de ce discret tourangeau. Loin de s'en cacher son passif, espère lui apporter le suffrage de la droite extrême au second tour des régionales.

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GENERATION DROITE-EXTREMEsimple engagement contre le communisme. A quelques jours du premier tour des régionales, ce dossier spécial, comie tous les articles parus au sujet du libéral de droite, Hervé Novelli. Entre tentatives de réécriture de l'histoire et de censure, il est bon de savoir quel est le vrai portrait de ce discret tourangeau. Loin de s'en cacher son passif, espère lui apporter le suffrage de la droite extrême au second tour des régionales.

Article publié le 19 Mars 2009 :

Le secrétaire d’Etat et l’ancien pro-nazi

La rumeur, insistante, promettait ces derniers jours le départ du gouvernement d'Hervé Novelli (UMP), secrétaire d'Etat chargé des entreprises. Il a finalement échappé au remaniement ministériel du 18 mars. Ce politique proche des entreprises et du petit patronat est un libéral pur sucre. Un ancien militant d'extrême droite, aussi.

Son passé a brusquement refait surface il y a peu. L'affaire remonte au 12 décembre 2006, six mois avant qu'il ne soit appelé au gouvernement par Nicolas Sarkozy et François Fillon. Au cours d'une intervention à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) devant un parterre d'hommes politiques, d'intellectuels et de chefs d'entreprise, Hervé Novelli, alors député, a en effet dit tout le bien qu'il pensait d'un certain Guy Lemonnier.

L'homme, présent dans la salle, est l'une des figures de la collaboration pendant la guerre, puis de l'ultra-droite nationaliste dans les décennies qui ont suivi.

Ce jour de décembre 2006, l'Association pour la liberté économique et le progrès social (Aleps), un groupe de réflexion très influent chez les tenants de l'ultra-libéralisme français, voulait fêter dignement sa quarantième année d'existence. Pour célébrer l'événement, rendez-vous fut donc pris à Neuilly dans les bureaux du Groupe des industries métallurgiques de la région parisienne (GIM), une des fédérations patronales adhérentes à la désormais célèbreUIMM. Un très fidèle soutien de l'Aleps.

Sont notamment présents dans les locaux du GIM Jacques Garello, le président de l'Aleps, le chef d'entreprise Bernard Zimmern, connu pour ses écrits très virulents contre le monde syndical (il est notamment l’auteur de La Dictature des syndicats, Albin Michel, 2003), l'ancien ministre Alain Madelin, le parlementaire UMP Jean-Michel Fourgous, un des lobbyistes du Medef à l'Assemblée nationale. Et le député d'Indre-et-Loire Hervé Novelli, qui deviendra six mois plus tard secrétaire d'Etat de la ministre de l'Economie, Christine Lagarde. Hervé Novelli et Alain Madelin, côte à côte sur l'estrade, se connaissent depuis longtemps.

Dans les années 1960, ils menaient déjà des combats communs au sein du mouvement d'extrême droite Occident, auquel ils ont tous les deux appartenu – lire à ce propos Génération

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Occident, de Frédéric Charpier, Seuil, 2005.

«Père spirituel»

Dans le compte rendu de la soirée rédigé par l’Aleps, que Mediapart s’est procuré, il est indiqué qu’Alain Madelin et Hervé Novelli ont considéré dans leurs interventions Claude Harmel, co-fondateur de l'association en 1966, «comme leur père spirituel». Sous sa vraie identité, Claude Harmel fut surtout vingt ans plus tôt l'un des responsables du Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat, un parti pro-nazi qui a participé en 1944 au gouvernement Laval pendant l’Occupation.

Claude Harmel, qui est un pseudonyme, s’appelle en réalité Guy Lemonnier, un ancien partisan de Léon Blum devenu pétainiste après le message du 17 juin 1940. Au sortir de la guerre, il a été condamné le 20 mai 1947 par la Cour de justice de la Seine à quatre ans de prison et à la dégradation nationale à vie pour ses activités collaborationnistes. Avant d’être libéré en conditionnelle la même année et de profiter, en 1951, d’une grâce.

Il est aujourd’hui âgé de 92 ans et, sollicité à de nombreuses reprises par l’intermédiaire de l’Aleps, il n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien.

L’UIMM prend, elle, ses distances avec sa fédération parisienne concernant cette affaire et indique par la voix de son service de communication que la soirée du 12 décembre 2006 a été«entièrement organisée et payée» par le GIM de la région parisienne. «L’UIMM n’a rien à voir avec cette soirée. Aucun de ses représentants n’était d’ailleurs présent», précise-t-on dans les rangs du syndicat patronal, déjà embourbé dans l’affaire Gauthier-Sauvagnac.

Contacté, le cabinet d'Hervé Novelli n’a pour sa part donné aucune suite à nos nombreuses questions sur les relations (passées et présentes) du secrétaire d'Etat avec Guy Lemonnier.

Sorte de «nazi français» qui a un jour défendu l'idée de «travailler à l'épuration de la race», Guy Lemonnier a été pendant l’Occupation un partisan pro-actif du national-socialisme. En juin 1943, à Saint-Ouen, il défendait par exemple en toute impudeur devant les jeunes de son parti les principes d’une «politique raciste», qu’il déclarait«espérer». Et de poursuivre devant son jeune auditoire, dans une veine parfaitement antisémite : «La pensée rationaliste, triturée par des cervelles talmudiques, retournait, en notre démocratie pourrissante, au fétichisme des primitifs.» Sa conclusion, sans équivoque : «Le national-socialisme est (…) sûr de vaincre.»

Lemonnier devient Harmel

Au sortir de la guerre, le national-socialisme n’ayant pas vaincu, Guy Lemonnier a dû changer d’identité et trouver une rapide reconversion. Il opte pour l’activisme à la droite de la droite. Spécialiste reconnu du syndicalisme, des mouvements anarchiques et militant anti-communiste forcené, il dirige notamment la revue Est Ouest où collabore un certain Alain Burgonde, plus connu sous le nom de Madelin.

Très actif, Guy Lemonnier/Claude Harmel décide aussi de créer en 1966 l’Aleps, un think tank avant l’heure, soutenu par le patronat et, en particulier, le Groupement des industries métallurgiques. C’est en 1969, trois ans après la création de l’Aleps, que le jeune Hervé Novelli – il a alors 20 ans et deux enfants – rejoint le cercle des proches de Claude Harmel, son «père spirituel».

Le futur secrétaire d’Etat Novelli se passionne rapidement pour les travaux de Claude Harmel et ses amis qui convergent tous vers l’Institut d’histoire sociale (IHS), fondé en 1935 par l’essayiste Boris Souvarine et dont Harmel fut un des dirigeants. Dévoué, le jeune Novelli commence par assurer les permanences de la bibliothèque de l’IHS avant d’y animer au début des années 1980 une commission consacrée aux nationalisations.

Financé en partie par les fédérations patronales de la métallurgie, l’IHS développe à marche forcée son champ d’activité en 1971 sous l’impulsion de ses responsables, dont Claude Harmel, qui créent une sorte de filiale très lucrative: l’Institut supérieur du Travail (IST), un organisme de formation financé par le 1% patronal.

Avec d’anciens compagnons de route sous Vichy (comme Georges Lefranc) et certains patrons de l’industrie métallurgique, Claude Harmel y multiplie les interventions auprès des cadres de grandes entreprises, qui n’hésitent pas à payer rubis sur l’ongle pour être informés des pratiques du syndicalisme en France. Le «gauchisme», à l’époque, effraie.

Ainsi, des stages particuliers dédiés aux «relations avec les syndicats» sont organisés. Les dirigeants des principales entreprises françaises (Peugeot, Air France, Renault, Usinor…) défilent à l’IST, qui gagne beaucoup d’argent. Dans son ouvrage Enquête sur la droite extrême (Le Monde éditions, 1992), le journaliste René Monzat écrira à propos de l’IHS : «Le passage par cet institut blanchit de jeunes néo-fascistes de leur passé.»

L'aide précieuse de Pasqua

L’IHS et l’IST, qui n’ont plus de liens formels depuis deux

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décennies, défendent aujourd’hui l’image d’organismes beaucoup plus respectables. «Je suis un opposant à tous les extrêmes. Ce à quoi vous faites référence, ce sont de vieilles histoires», affirme à Médiapart Bernard Vivier, le directeur de l’IST. «Nous sommes un centre de recherches et une bibliothèque para-universitaire ouverte à tous. Le reste appartient à un passé très ancien», abonde Pierre Rigoulot, directeur depuis deux ans de l’Institut d’histoire sociale (IHS).

La "normalisation" de l’IHS a notamment été rendue possible il y a une quinzaine d’années grâce à l’interventionnisme politique du Conseil général des Hauts-de-Seine, alors présidé par Charles Pasqua. En 1992, la collectivité commence en effet par acquérir l’immense fonds bibliothécaire de l’IHS, puis accepte de loger gracieusement l’institut dans des locaux à Nanterre, au sein de l’immeuble Le Quartz.

Via l’Association des Amis de l’IHS, elle finance aussi à hauteur de 100.000 euros par an l’organisme. Et, depuis 2002, le Conseil général met à disposition de l’IHS du matériel et du personnel. Des aides précieuses accordées par Charles Pasqua et pérennisées par ses héritiers à la tête du département le plus puissant de France : Nicolas Sarkozy, président du conseil général de 2004 à 2007, puis Patrick Devedjian, actuel secrétaire général de l’UMP et ancien membre d’Occident. Lui aussi.Article publié le 27 Mars 2009 :

Novelli et l'extrême droite: les documents qui accusent

Cela ressemble fort à un passé qui ne passe pas. Alors que le secrétaire d'Etat chargé au commerce, Hervé Novelli, vient d'annoncer son intention de déposer plainte pour dif famation contre France 3 qui a récemment consacré un reportage à ses antécédents au sein de l'extrême droite, Mediapart publie une série

de documents attestant les liens passés – et parfois même présents – de ce membre du gouvernement avec des mouvements et des figures de l'ultra-droite nationaliste française.

Ainsi, le candidat de l'UMP dans le Centre pour les élections régionales de 2010 estime-t-il, à en croire la définition de la diffamation dans le code pénal, que son «honneur» ou sa «considération» ont été atteints par les «allégations ou imputations» de France 3.

Que reproche exactement Hervé Novelli (photo), qui est allé jusqu'à faire retirer le reportage de France 3 du site de la chaîne, aux journalistes trop curieux? Le secrétaire d'Etat ne

souhaite pas répondre personnellement à la question mais un de ses proches, cité anonymement par l'agence Reuters, a expliqué qu'«on ne peut pas dire n'importe quoi sur le passé de M. Novelli», tout en ne niant pas son passage à l'extrême droite.

Car les faits sont là. Hervé Novelli a été membre dans les années soixante du mouvement ultra-nationaliste et adepte de la barre de fer Occident, fondé en 1964 et dissous quatre ans plus tard en conseil des ministres en vertu de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées. A moins de renier ce passé-là, Hervé Novelli pourrait avoir du mal à contester la véracité des faits allégués.

En voici au moins une preuve: le 3 décembre 1973, le «journal d'action nationaliste» Faire Front!, alors empêtré dans une guerre interne entre pro et anti-Le Pen, publiait un courrier d'Hervé Novelli, qui se présentait lui-même comme un «ancien d'Occident». Suivait la mention «Carte du Front national n° 2524». Dans ce document, Hervé Novelli, qui a alors 24 ans, raille les«gauchardises dont nos rues sont pleines», traite Le Pen de«lâche» et dit, dans un post-scriptum, tout le bien qu'il pense de François Brigneau et Alain Robert, «les vrais, les bons».

Le premier est un célèbre journaliste et écrivain d'extrême droite, ancien de la Milice, membre fondateur du Front national et adepte des dérapages antisémites. François Brigneau a notamment été condamné le 18 mai 1989 par la dix-septième chambre du tribunal correctionnel de Paris pour «provocation à la haine raciale». Un an plus tôt, dans les colonnes du journal National-Hebdo, il avait traité les journalistes Philippe

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Alexandre de «marchand de bretelles à RTL, juif assimilé de tendance centriste» etAnne Sinclair de«marchande de soutiens-gorge à TF1 juive (moins assimilée)».

Le second, Alain Robert, fut le fondateur en 1970 du mouvement ultra-nationaliste Ordre nouveau, puis futur conseiller technique en 1986 au cabinet du ministre délégué à la police, Robert Pandraud.

Comme un certain nombre d'anciens militants d'extrême droite, à commencer par l'ancien ministre Alain Madelin qu'il a fréquenté dans les rangs d'Occident, Hervé Novelli s'est petit à petit reconverti politiquement au sein de diverses formations: l'UDF, le RPR, le Parti républicain et l'UMP aujourd'hui.

Les antécédents extrémistes de M. Novelli ne se conjugueraient dès lors qu'au passé composé si l'actuel secrétaire d'Etat chargé du commerce n'avait pas rendu un vibrant hommage en 2006 à son«père spirituel», un certain Claude Harmel, ancien responsable du Rassemblement national populaire (RNP), parti pro-nazi sous l'Occupation. Mediapart avait consacré à cet épisode une enquête publiée il y a un an et dont les informations ont été largement reprises par le reportage de France 3 aujourd'hui incriminé.

Il y a un an, notre enquête sur le passé pas si passé de M. Novellin'avait pas suscité ses foudres judiciaires. France 3 Centre, qui a diffusé son reportage en pleines primaires UMP pour les élections régionales, n'a pas eu cette chance-là.

Un pro-nazi pour «père spirituel»

Un pro-nazi, «père spirituel» d'un actuel membre du gouvernement français? Là encore, des documents peuvent attester les faits avancés. L'affaire remonte au 12 décembre 2006, six mois avant que M. Novelli ne soit appelé par Nicolas Sarkozy. Ce jour-là, l'Association pour la liberté économique et le progrès social (Aleps), un groupe de réflexion ultra-libéral fondé en 1966 par Claude Harmel, célébrait son quarantième anniversaire, à Neuilly, dans les bureaux du Groupe des industries métallurgiques de la région parisienne (GIM), une des fédérations patronales adhérentes à l'UIMM.

Voici l'invitation:

Plusieurs hommes politiques sont présents dans la salle: le député UMP Jean-Michel Fourgous, Alain Madelin et Hervé Novelli. Ces deux derniers sont appelés à venir témoigner sur les «temps forts»de l'Aleps, comme en témoigne le document ci-dessous:

Dans le compte rendu de la soirée rédigé par l’Aleps, que Mediapart s’est procuré, il est indiqué qu’Alain Madelin et Hervé Novelli ont considéré dans leurs interventions Claude Harmel, co-fondateur de l'association en 1966, «comme leur père spirituel».

Voici la capture d'écran:

Cet hommage serait parfaitement anodin s'il n'avait été adressé à Claude Harmel, de son vrai nom Guy Lemonnier. Celui-ci fut l'un des plus hauts responsables du Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat, un parti pro-nazi qui a participé en 1944 au gouvernement Laval pendant l’Occupation.

Claude Harmel a été condamné le 20 mai 1947 par la Cour de justice de la Seine à quatre ans de prison et à la dégradation nationale à vie pour ses activités collaborationnistes, avant d’être libéré en conditionnelle la même année et de profiter, en 1951, d’une grâce. Il est aujourd’hui âgé de 92 ans et, sollicité à de nombreuses reprises par l’intermédiaire de l’Aleps lors de notre enquête, il n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien.

«La pensée rationaliste, triturée par des cervelles talmudiques»...

Celui qu'Hervé Novelli considère en 2006 comme son «père spirituel» est connu par tous les historiens comme une sorte de nazi français qui a un jour défendu l'idée de «travailler à l'épuration de la race». Mediapart a retrouvé le compte-rendu d'une intervention publique de Claude Harmel devant les Jeunesses nationales populaires, à Saint-Ouen, en 1943. Lors de sa prestation,

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retranscrite dans l'ouvrage La Nation et le Patriotisme, il a notamment défendu les principes d’une«politique raciste», qu’il déclarait «espérer».

Dans une veine parfaitement antisémite, il a aussi déclaré: «La pensée rationaliste, triturée par des cervelles talmudiques, retournait, en notre démocratie pourrissante, au fétichisme des primitifs.» Sa conclusion fut sans sans équivoque : «Le national-socialisme est (…) sûr de vaincre.»

Au sortir de la guerre, Guy Lemonnier change d’identité et opte pour l’activisme à la droite de la droite. Spécialiste reconnu du syndicalisme, des mouvements anarchiques et militant anti-communiste forcené, il dirige notamment la revue Est Ouest où collabore un certain Alain Burgonde, plus connu sous le nom de Madelin (photo).

En 1966, il crée l’Aleps, un think tank avant l’heure, soutenu par le patronat, et, en particulier, le Groupement des industries métallurgiques. C’est en 1969, trois ans après la création de l’Aleps, que le jeune Hervé Novelli – il a alors 20 ans et deux enfants – rejoint le cercle des proches de Claude Harmel.

Le futur membre du gouvernement Fillon se voit rapidement confier les permanences de la bibliothèque de l'Institut d'histoire sociale (IHS), fondé en 1935 par l’essayiste Boris Souvarine et dont Harmel fut un des dirigeants. Au début des années 1980, Hervé Novelli prend du grade et anime au sein de l'IHS une commission consacrée aux nationalisations, comme en témoigne ce document interne:

Financé en partie par les fédérations patronales de la métallurgie, au sein desquelles Hervé Novelli a été chargé de mission, l’IHS développe à marche forcée son champ d’activité en 1971 sous l’impulsion de ses responsables – dont Claude Harmel – qui créent une sorte de filiale très lucrative: l’Institut supérieur du travail (IST), un organisme de formation financé par le 1% patronal, comme le rappelle Frédéric Charpier dans son ouvrage Génération Occident(Seuil, 2005).

La blanchisseuse des néo-fascistes

Avec d’anciens compagnons de route sous Vichy (comme Georges Lefranc) et certains patrons de

l’industrie métallurgique, Claude Harmel y multiplie les interventions auprès des cadres de grandes entreprises, qui n’hésitent pas à payer rubis sur l’ongle pour être informés des pratiques du syndicalisme en France. Le «gauchisme», à l’époque, effraie.

Ainsi, des stages particuliers dédiés aux«relations avec les syndicats» sont organisés. Les dirigeants des principales entreprises françaises (Peugeot, Air France, Renault, Usinor…) défilent à l’IST, qui gagne beaucoup d’argent. Dans son ouvrage Enquête sur la droite extrême (Le Monde éditions, 1992), le journaliste René Monzat écrira à propos de l’IHS: «Le passage par cet institut blanchit de jeunes néo-fascistes de leur passé.»

Depuis maintenant vingt ans, l’IHS et l’IST n’ont plus de liens formels et défendent aujourd’hui l’image d’organismes beaucoup plus respectables. «Je suis un opposant à tous les extrêmes. Ce à quoi vous faites référence, ce sont de vieilles histoires», affirme à Mediapart Bernard Vivier, le directeur de l’IST. «Nous sommes un centre de recherches et une bibliothèque para-universitaire ouverte à tous. Le reste appartient à un passé très ancien», abonde Pierre Rigoulot, directeur depuis deux ans de l’Institut d’histoire sociale (IHS).

La "normalisation" de l’IHS a notamment été rendue possible il y a une quinzaine d’années grâce à l’interventionnisme politique du Conseil général des Hauts-de-Seine, alors présidé par Charles Pasqua. En 1992, la collectivité commence en effet par acquérir l’immense fonds bibliothécaire de l’IHS, puis accepte de loger gracieusement l’institut dans des locaux à Nanterre, au sein de l’immeuble Le Quartz. Via l’Association des Amis de l’IHS, elle finance aussi à hauteur de 100.000 euros par an l’organisme.

Et, depuis 2002, le Conseil général met à disposition de l’IHS du matériel et du personnel. Des aides accordées par Charles Pasqua et pérennisées par ses héritiers à la tête du département le plus puissant de France: Nicolas Sarkozy, président du conseil général de 2004 à 2007, puis Patrick Devedjian, actuel ministre en charge de la relance et ancien membre d’Occident. Lui aussi.

En février 2005, dans un entretien au Monde, Hervé Novelli déclarait au sujet de son passage à Occident: «Je n'ai pas un regret, Occident, c'était un engagement anticommuniste dans lequel je me reconnais toujours [...] Ne tombons pas dans le piège de la béatification de l'extrême gauche et de la diabolisation de l'extrême

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droite.»

Article publié le 15 Mars 2009 :

«Claude Harmel n'a jamais renié son passé»

MEDIAPART : Claude Pennetier, vous êtes historien (chercheur au CNRS) et spécialiste du monde ouvrier et syndical. Il apparaît historiquement que le patronat et l'extrême droite ont souvent entretenu des liens étroits en France. Qu’est ce qui les a unis ?

CLAUDE PENNETIER : Dans les années 1920, avec l'apparition du bolchevisme, ce qui les fédère c'est la lutte contre le communisme dans les banlieues ouvrières et, notamment, la banlieue Ouest de Paris où de grandes entreprises de la métallurgie comme Renault sont présentes. C'est par exemple le patronat qui a financé la fameuse affiche du bolchevique avec le couteau entre les dents. Ensuite, ils aident financièrement la presse locale pour des entreprises de déstabilisation. Vient à la suite l'épisode Vichy. Beaucoup de patrons de la métallurgie se sont rangés du côté de l'occupant nazi qui avait besoin de leurs usines. Et au sortir de la guerre, certaines figures de Vichy comme Georges Albertini [ex-bras droit de Marcel Déat] ou Guy Lemonnier, qui sont de grands savants dans le domaine social et historique, se sont reconvertis dans l'anti-communisme professionnel. Leur grande astuce est d'avoir réussi à récupérer un certain nombre d'anciens communistes grâce à leur rencontre avec Boris Souvarine, qui s'en méfiait toutefois.

Pourquoi la métallurgie a-t-elle joué un rôle si particulier ?Parce qu'elle est très riche et plus confrontée que les autres aux grèves ouvrières et aux revendications sociales. En s'associant avec des gens comme Albertini ou Lemonnier, dont l'ambition est de s'immiscer dans le milieu syndical, les patrons cherchent à avoir une connaissance du monde ouvrier.

Comment les choses évoluent dans les années 1960, puis 1970 ?Les choses évoluent au gré des changements de visage du communisme. Rapidement, le patronat, Albertini et Lemonnier voudront aussi casser la dynamique d'union de la gauche qui se forme. Dans le même temps, ils joueront quelques rôles non négligeables dans certains règlements de compte au sein de la droite. Puis il

prendront la tête d'un organisme comme l'Institut d'Histoire sociale (IHS), dont Guy Lemonnier fut le directeur entre 1976 et 1983. Rapidement, l'IHS devient l'une des filières de reconversion pour d'anciens d'Occident qui trouvent là un salaire et des bureaux.

En 1971, l'IHS créé l'Institut supérieur du Travail (IST). Que s'y passe-t-il ?L'ambition est de former des cadres d'entreprises au fonctionnement du monde syndical. On y apprend à fluidifier les relations sociales, dirons-nous. Toujours dans un esprit anti-communiste forcené. On peut constater qu'à cette époque, la filière résistante n'a jamais été représentée à l'IST contrairement aux anciens compagnons de route de Vichy.

Guy Lemonnier/Claude Harmel a-t-il renié son passé de pro-nazi ?Non.

Quel regard portez-vous sur l'affaire de l'UIMM ?C'est stupéfiant ! Comment autant d'argent liquide peut-il circuler comme ça ? On voit bien la continuité historique. Mais j'ai l'impression que le système se gangrène. Peut-être que l'omerta n'y est pas aussi forte qu'avant.

Il est beaucoup dit que la « caisse noire » de l'UIMM aurait servi au financement occulte des syndicats...Cela me paraît tellement grossier. Que certaines fédérations aient touché de l'argent, c'est possible. Mais de manière généralisée, non, je ne le crois pas. Pour l'essentiel, l'argent de la métallurgie a servi à financer des filières anti-syndicales.

Qu'en est-il de la piste dite politique ?Historiquement, on a vu dans les années 1920 un débat qui a agité l'Assemblée nationale où il était question du financement de partis de droite par la métallurgie. Ce qui a posé un certain nombre de problèmes à la démocratie. Ensuite, avec l'arrivée du Cartel des gauches, il a fallu faire les choses plus discrètement.

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