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Consommation collaborative : deux mots pour des pratiques multiples
Francis KAROLEWICZ
La consommation collaborative recouvre de nombreuses pratiques marchandes et non marchandes qu’il est
essentiel d’identifier pour en comprendre le sens.
De nombreux utilisateurs de la plateforme communautaire monECOCITY nous interpellent sur la terminologie
utilisée par les acteurs de l’économie collaborative utilisant tour à tour des mots comme : "consommation
collaborative", "économie du partage, du don, de l'échange, du troc" et bien d’autres termes, qui semblent
aller dans la même direction. Le vocable consommation collaborative englobe pour de nombreux auteurs tout
ce qui va permettre d’optimiser la durée de vie d’un produit, son usage via différents utilisateurs, sa
propriété ainsi que ses différentes formes de distribution et d’acquisition. Plus nous consommons sans
chercher à posséder, plus nous partageons nos biens avec d’autres utilisateurs, plus nous développons une
attitude collaborative.
monECOCITY a pris le parti de proposer à ses utilisateurs une palette large de pratiques collaboratives.
Quelles soient marchandes ou non, ils pourront choisir le type de transaction collaboratif qui correspond le
mieux à leurs besoins et valeurs.
A travers des exemples simples, illustrons chacune d’entre elles et tentons de les différencier pour mieux
comprendre les composantes de cette économie du partage.
La consommation collaborative monétarisée
Nous pourrions dire qu’une personne propriétaire d’un bien, d’un objet uniquement pour sa propre utilisation
développe une attitude « dite » individualiste. C’est le cas d’un automobiliste conduisant le plus souvent
seul, ne prenant aucune personne en stop, ne pratiquant ni le co-voiturage, encore moins l’auto-partage. Il
est propriétaire d’une voiture pour sa propre utilisation comme des millions de personnes. Il y a aussi ceux qui
possèdent une voiture et qui pratiquent le co-voiturage. Cela leur permet à la fois de transporter des
personnes tout en partageant les frais de transport. De la même manière, des automobilistes utilisant leur
voiture uniquement le week-end décident de la mettre à disposition la semaine sur un site d’auto-partage.
Cela rend service à un automobiliste qui va la lui louer tout en lui permettant d’en amortir l’achat. Ces deux
cas de co-voiturage et d’auto-partage illustrent une pratique concrète de consommation collaborative,
mettant en scène des propriétaires qui partagent leur bien moyennant une transaction financière et des
utilisateurs préférant payer uniquement l’usage plutôt que de posséder le bien.
Qu’en est-il de la vente de produits d’occasion lors d'un vide-grenier ou d'un vide-dressing, tels qu'ils sont
pratiqués dans nos communes ou via des sites spécialisés ? Est-ce une attitude collaborative, une posture anti-
gaspillage, un moyen de récupérer de l’argent ou d’en dépenser moins ? Sans doute un peu des trois. C’est
une relation de particulier à particulier, qui permet de rallonger la vie et l’usage d’un produit sans augmenter
son empreinte écologique, tout en évitant la fabrication de nouveaux.
Donner une nouvelle vie à un produit dormant dans un recoin de chez soi, même en demandant une
participation financière, participe à cette économie collaborative. Il existe également des échanges
collaboratifs non financiers qui enrichissent la vie du collectif par la valeur des liens créés.
La consommation collaborative non marchande basée sur le partage
Il existe de nombreux modes de consommation collaborative sans monétarisation. Certaines personnes, même
si elles sont aussi propriétaire d’un véhicule, favorisent le contact humain en prenant gratuitement des auto-
stoppeurs. Elles développent une posture de partage comme le font les « couchsurfers » hébergeant
gratuitement des voyageurs chez eux. Toujours dans cette notion de partage sans flux financier, nous trouvons
de nombreuses pratiques et attitudes humaines et économiques.
Prenons l’exemple de Paul et de son voisin Eric : ce dernier a besoin d’une remorque, Paul lui prête la sienne
en toute sympathie. Il pratique le prêt gratuit. Quelques jours plus tard, la voiture de Paul tombe en panne,
alors qu’il a un RDV important. Eric fait un détour pour le déposer. Il fait preuve d’entraide. La maison d’Eric
brûle. La famille de Paul l’héberge le temps pour lui de trouver une solution et lui donne des vêtements. Elle
fait preuve de solidarité.
Paul prête à Eric sa remorque, lequel, en retour, met sa tondeuse à la disposition de Paul. Ils font un
échange.
Paul offre sa remorque à une association humanitaire, il fait un don. Il échange sa remorque contre une
tondeuse et pratique ainsi le troc.
Paul, Eric et leurs voisins décident ensemble d’acheter une tondeuse pour leur zone pavillonnaire ; ils
développent une attitude « dite » collectiviste et deviennent tous propriétaires de la machine.
Paul amène sa remorque, Eric sa tondeuse et Marc sa voiture, afin de tondre les différentes parcelles de
jardin. Ils adoptent une posture coopérative.
La distinction entre attitude coopérative et attitude collaborative ne paraît pas si évidente que cela. Dans
l’approche coopérative chacun a une tâche déterminée mais la réussite du groupe va dépendre de la manière
dont les acteurs vont être capables de travailler et de coopérer ensemble pour atteindre l’objectif collectif
final. Dans le collaboratif, il faut rajouter une notion de co-création collective qui permet à chacun
d’interagir sur l’ensemble de l’édifice à bâtir. C’est le principe du logiciel libre ou du wiki dans lesquels
chaque intervenant apporte sa réflexion et sa création. De toute manière, les deux notions sont intimement
reliées. Coopérer et co-créer sont les clés de cette nouvelle économie du partage.
En conclusion, nous constatons qu’il y a un éventail d’attitudes entre individualisme et le collectivisme.
Certaines sont monétarisées, d’autres basées sur le partage et le don. Dans tous les cas, cette nouvelle
posture de consommation collaborative, notamment vers plus d’usage et moins de possession, est à la fois
bénéfique pour l’écologie (moins de déchets et de production de CO2), positive pour son budget en diminuant
les coûts d’acquisition et participe à une plus grande solidarité.
Contact : Nadine FLAVI – [email protected] – 0603 930 963