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Entre int´ egration ´ economique et coh´ esion sociale: les coop´ eratives foresti` eres et le d´ eveloppement egional au Qu´ ebec PATRICK GINGRAS ´ Ecole sup´ erieure d’am´ enagement du territoire et de d´ eveloppement r´ egional, Universit´ e Laval, Qu´ ebec, QUE, Canada, G1K 7P4 (e-mail: [email protected]) MARIO CARRIER ´ Ecole sup´ erieure d’am´ enagement du territoire et de d´ eveloppement r´ egional, Universit´ e Laval, Qu´ ebec, QUE, Canada, G1K 7P4 (e-mail: [email protected]) Cet article porte sur la relation entre la mondialisation, l’innovation ´ economique et la coh´ esion sociale au sein des coop´ eratives foresti` eres du Qu´ ebec dans une perspective de d´ eveloppement egional. Depuis une quinzaine d’ann´ ees, certaines coop´ eratives foresti` eres au Qu´ ebec tentent d’innover dans leurs fac ¸ons de g´ erer et de produire. Pour innover, ces coop´ eratives s’inscrivent dans un processus de gouvernance avec l’ensemble des acteurs de l’industrie foresti` ere dont l’ ´ Etat, la grande entreprise foresti` ere et les communaut´ es foresti` eres. Cette nouvelle gouvernance semble non seulement permettre aux coop´ eratives foresti` eres d’innover, mais aussi de dynamiser leur capacit´ e` a assurer la coh´ esion sociale au sein de leurs communaut´ es d’appartenance. La gouvernance foresti` ere apparaˆ ıt donc comme une strat´ egie de d´ eveloppement r´ egional pertinente pour les r´ egions qui, comme les r´ egions foresti` eres, sont situ´ ees en p´ eriph´ erie et souvent ´ economiquement d´ evitalis´ ees. This paper explores the relation between globalization, economic innovation and social cohesion within the forest co-operatives of Qu´ ebec from a regional development perspective. For about fifteen years, several forest co-operative in Qu´ ebec have tried to innovate their ways of managing and producing. To innovate, these co-operatives have sought to insert themselves in a process of governance with the other actors of the forest industry such as the State, the large forest company and the forest communities. This new governance structure not only improves the capacity of these co-operatives to innovate, but also their capacity to generate social cohesion in their communities. The forest governance seems to be a pertinent strategy of development for peripheral forest regions that are often economically devitalized. The Canadian Geographer / Le G´ eographe canadien 50, no 3 (2006) 358–375 C / Canadian Association of Geographers / L’Association canadienne des g´ eographes

Entre intégration économique et cohésion sociale: les coopératives forestières et le développement régional au Québec

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Entre integration economique et cohesion sociale:les cooperatives forestieres et le developpementregional au Quebec

PATRICK GINGRASEcole superieure d’amenagement du territoire et de developpement regional, Universite Laval, Quebec, QUE, Canada, G1K 7P4

(e-mail: [email protected])

MARIO CARRIEREcole superieure d’amenagement du territoire et de developpement regional, Universite Laval, Quebec, QUE, Canada, G1K 7P4

(e-mail: [email protected])

Cet article porte sur la relation entre lamondialisation, l’innovation economique et lacohesion sociale au sein des cooperatives forestieresdu Quebec dans une perspective de developpementregional. Depuis une quinzaine d’annees, certainescooperatives forestieres au Quebec tentent d’innoverdans leurs facons de gerer et de produire. Pourinnover, ces cooperatives s’inscrivent dans unprocessus de gouvernance avec l’ensemble desacteurs de l’industrie forestiere dont l’Etat, la grandeentreprise forestiere et les communautes forestieres.Cette nouvelle gouvernance semble non seulementpermettre aux cooperatives forestieres d’innover,mais aussi de dynamiser leur capacite a assurer lacohesion sociale au sein de leurs communautesd’appartenance. La gouvernance forestiere apparaıtdonc comme une strategie de developpement regionalpertinente pour les regions qui, comme les regionsforestieres, sont situees en peripherie et souventeconomiquement devitalisees.

This paper explores the relation betweenglobalization, economic innovation and socialcohesion within the forest co-operatives of Quebecfrom a regional development perspective. For aboutfifteen years, several forest co-operative in Quebechave tried to innovate their ways of managing andproducing. To innovate, these co-operatives havesought to insert themselves in a process ofgovernance with the other actors of the forestindustry such as the State, the large forest companyand the forest communities. This new governancestructure not only improves the capacity of theseco-operatives to innovate, but also their capacity togenerate social cohesion in their communities. Theforest governance seems to be a pertinent strategy ofdevelopment for peripheral forest regions that areoften economically devitalized.

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Introduction

Le present article s’inscrit dans le contexte d’unprojet de recherche visant a explorer les re-lations entre mondialisation, cohesion socialeet mouvement cooperatif au Canada.1 Dansce texte, nous tentons de mieux compren-dre les processus permettant d’articuler unestrategie de developpement regional orientee surles milieux peripheriques et economiquementdevitalises dans le cadre de la restructurationeconomique provoquee par la mondialisation etson impact territorial. Le sujet qui nous interesseconcerne les liens entre l’innovation economiquedans les cooperatives forestieres du Quebec etleur role face a la cohesion sociale dans leurscommunautes d’appartenance en tant qu’assisesa une strategie de developpement regional.

L’une des consequences fondamentales de lamondialisation economique est la plus grandeporosite des frontieres nationales face aux fluxde marchandises, de services, d’entreprises etd’investissements qui sillonnent le globe (Scott2001, 34; Coleman 2004, 6). Ce processusde �defrontierisation� signifie l’ouverture desterritoires politiques a l’ensemble des acteurseconomiques mondiaux ce qui, en bout de ligne,confronte les pays et les regions qui les com-posent, a un niveau de concurrence internationalede plus en plus intense (Scott 2001, 34; Claval2003).

Les critiques adressees a la mondialisationeconomique sont nombreuses. Parmi celles quipreoccupent davantage la geographie economiqueet les sciences du developpement regional, citonsla problematique de l’atomisation des ensem-bles regionaux, mais aussi des groupes soci-aux au sein d’une communaute, qui en viennenta se percevoir comme des adversaires encompetition, destructurant ainsi les liens so-ciaux entre les individus d’une meme com-munaute, de meme que les solidarites in-terregionales (Klein 1997, 2002; Walzer 1997;Ghorra-Gobin 2004; Vacchiani-Marcuzzo 2004).Autre critique, la mondialisation attise lesinegalites de developpement entre regions au

1 �Co-operative Membership and Globalization: Creating SocialCohesion through Market Relations�. Projet CRSH sous la di-rection de Brett Fairbairn, Center for the Study of Coopera-tives, Universite de Saskatchewan, 2002–2006.

niveau local, national et mondial en marginal-isant les regions ou les milieux devitalises, c’est-a-dire les milieux qui ne possedent pas ou quin’arrivent pas a mettre en valeur les potentialitesnecessaires pour se reseauter sur l’economiemondiale (Klein 1998, 2002; Carroue 2002; Paulet1998). A ce chapitre, les principaux milieuxdevitalises ou marginalises dans l’economie mon-dialisee sont les regions peripheriques ou enmarge des regions metropolitaines. Les regionsperipheriques sont celles qui sont situees, selonla definition de Polese et Shearmur (2003a,32) pour le Canada, a plus d’une heure ouune heure et demi de route (selon la taillede la metropole et le decoupage geographique)d’un centre metropolitain de plus de 500 000habitants.

Dans l’environnement economique mondialise,marque par une recrudescence de la concur-rence, certains espaces ou territoires deviennentplus attrayants que d’autres pour les entreprises,investisseurs et capitaux. De par les exter-nalites qu’ils offrent, c’est-a-dire la proximite desservices, des travailleurs qualifies, des reseauxd’affaires et des marches, mais aussi la fortedensite de la circulation d’informations et leseconomies sur les couts de transaction, lesgrands centres urbains ou, de facon plus large,les regions metropolitaines, apparaissent commeles nœuds de l’economie mondiale (Scott 2001;Klein 2002; Polese et Shearmur 2003a, 2003b;Proulx 2003).

Ce constat ne signifie pas pour autant qu’il n’yait pas de developpement ou de strategies dedeveloppement regional qui puissent s’articuleravec succes dans les regions non metropolitaines.Nombreux sont ceux qui affirment que lesregions et les acteurs regionaux peuvent met-tre de l’avant differentes strategies pour faire ensorte que leur region devienne competitive dansl’economie mondiale, notamment en developpantcertains traits distinctifs qui pourraient devenirdes atouts qui permettent a certaines regionsde se mettre en valeur dans leurs strategies deconcurrence economique (Amin et Thrift 1995;Maskell 1998; Scott 1999, 2001; Jessop 2002;Doloreux et al. 2005, 217–222). Chaque strategieest le reflet des caracteristiques d’une region,comme sa position geographique, ses ressourcesnaturelles, son histoire, sa structure economique,son niveau d’urbanisation, ses institutions de

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meme que la structure et le dynamisme de cer-tains groupes sociaux ou organisations (Manzagolet Jalabert 1999; Polese et Shearmur 2002; Fontanet al. 2003; Barneche-Miqueu et Lahaye 2005).

La litterature suggere, notamment a l’aide denombreuses etudes de cas, que les strategies quimettent en valeur une ou des caracteristiquespropres a une region puissent permettreeventuellement a celle-ci de se positionneravantageusement dans l’economie mondiale(Benko et Lipietz 2000; Grossetti 2003; Kresl2003; Pike 2003). Cependant, la demonstrationde la reussite de ces strategies pour les regionsperipheriques reste limitee. En effet, commele constatent Polese et Shearmur (2003a) pourle Canada, l’emploi manufacturier a forte etmoyenne valeur ajoutee, mais aussi l’ensemblede l’activite economique se concentrent plusque jamais autour des metropoles. De plus, larelation entre le developpement economique et ledeveloppement social, au sein de ces strategies,reste nebuleux. C’est donc sur ces deux con-siderations que nous nous inscrivons ici. Apartir de l’etude des cooperatives forestieres duQuebec, nous tenterons de savoir comment cesentreprises collectives peuvent jouer un nouveaurole economique en region peripherique, en se di-versifiant ou en innovant dans leurs pratiques degestion et de production, tout en contribuant audeveloppement social, c’est-a-dire en assumant ceque nous appellerons ici un role de vecteur de lacohesion sociale au sein de leurs communautesd’appartenance. La question qui guidera notrereflexion est la suivante: Est-ce qu’il existe un lienentre le niveau d’innovation d’une cooperativeforestiere et sa capacite a generer la cohesionsociale dans ses communautes d’appartenance?Nous fixons donc comme premier objectif desavoir comment les cooperatives forestieresinnovent. Le deuxiemement objectif est de savoiren quoi cette recherche de l’innovation permetaux cooperatives forestieres de renforcer, ounon, leur capacite a generer la cohesion socialeau sein de leurs communautes d’appartenance.

L’interet des cooperatives forestieres dans uneetude sur la relation entre innovation economiqueet cohesion sociale en tant qu’assises a unestrategie de developpement regional en milieuperipherique est triple. D’abord, les cooperativesforestieres sont creees par des acteurs locaux etelles reposent sur la volonte et la capacite du

milieu a creer localement de l’emploi a partirdes ressources disponibles (CCFQ 2002). Ellessont enracinees dans leur milieu et constituentune reponse des communautes forestieres quanta leur insertion economique. En cherchant aidentifier de nouveaux creneaux economiques,certaines cooperatives forestieres cherchent dessolutions originales qui pourraient contribuer audeveloppement economique de plusieurs regionsdu Quebec.

Ensuite, outre le developpement economique,les cooperatives forestieres du Quebec con-tribuent aussi au developpement socialpuisqu’elles peuvent constituer un vecteurde la cohesion sociale dans leurs communautesd’appartenance. La cohesion sociale peut sedefinir comme etant l’ensemble des processussociaux qui concourent a assurer la perennite desliens qui unissent les individus qui composent,de ce fait, une communaute, une collectivite,la societe (Maxwell 1996, 13; Jenson 1998, 3–5,15–22; Bernard 1999, 19–20). La cohesion socialeest donc ce phenomene qui permet de creer unecommunaute de valeurs et d’interets partagesentre les individus qui se regroupent pourparticiper, pacifiquement, a diverses entreprisescommunes dans lesquelles chacun peut tirerequitablement profit (Kearns et Forrest 2000;Noll 2002). Dans la mesure ou les cooperativesforestieres permettent l’union d’individus liesentre eux par des valeurs et des interets com-muns, du moins en ce qui a trait a leurs besoinssocio-economiques, et que cette organisation estl’instrument ou le moyen par lequel ces individusrealiseront leur entreprise commune et ce, dansune perspective d’equite entre les membres, lescooperatives forestieres peuvent donc actualiserla cohesion sociale dans leurs communautesd’appartenance.

Enfin, les cooperatives forestieres sont descooperatives de travailleurs. Elles constituentdonc des unites de production industrielle qui,si elles innovent et ajoutent davantage de valeurajoutee a leur production, peuvent imprimer uncertain dynamisme dans l’economie des regionsforestieres, d’autant plus qu’elles constituentune structure sociale et economique qui oc-cupe l’ensemble du territoire de la province. Eneffet, dans les annees 1970, le Gouvernementdu Quebec s’est assure d’avoir une cooperativeforestiere par unite de gestion publique de la

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foret (CCFQ 2002). Par consequent, s’il s’averaitque les cooperatives forestieres soient en mesured’induire le developpement economique et socialdans certaines regions habituellement devitaliseeseconomiquement, puisque eloignees des regionsmetropolitaines, cette perspective serait d’autantplus interessante dans la mesure ou le secteurforestier fait partie de la structure economiquede 535 municipalites rurales au Quebec, dontles principales sont localisees dans le BouclierLaurentien (Dugas 2000, 26).

Mise en Contexte

Les cooperatives forestieres du Quebec sont descooperatives de travailleurs. C’est donc dire qu’ils’agit de cooperatives dont l’objectif premierconsiste a fournir du travail a leurs mem-bres. En etant proprietaires de leur entreprise,les membres-travailleurs peuvent s’impliquerdans le developpement et les orientations del’organisation et avoir un plus grand controlesur les conditions d’exercice de leur travail. Deplus, les cooperatives forestieres du Quebec ontpour philosophie d’assurer une saine gestion dela foret, milieu de vie de leurs membres (CCFQ2002). Les cooperatives forestieres du Quebecconstituent donc, pour les membres, une faconde prendre en main leur avenir en stimulantl’activite economique au sein de leur collectivitea partir des ressources disponibles et ce, dansune perspective de perennite de la foret.

Le developpement des cooperatives forestieresau Quebec s’est fait en trois phases. Lapremiere phase debute a la fin des annees1930 avec les syndicats cooperatifs d’exploitationforestiere (Gaspesie, Saguenay-Lac-Saint-Jean) etles chantiers cooperatifs d’abattage et de trans-port de bois (Nord-Ouest quebecois) (CCFQ 2002).En 1970, 167 cooperatives forestieres avaientdeja ete creees, mais seulement une soixantaineetaient encore en activite. La principale difficultedes cooperatives tenait au systeme de conces-sions forestieres consenties a la grande industriequi limitait, de ce fait, leur autonomie.

La deuxieme phase du developpement descooperatives forestieres est celle de la consoli-dation. Cette periode, qui va de 1977 a 1990,est marquee par la politique gouvernementalede developpement des cooperatives forestieres

(CCFQ 2002). Principalement, cette politiquereconnaıt le role des cooperatives forestieresdans le developpement et la formation d’unemain d’œuvre sylvicole qualifiee et dont lesregions du Quebec allaient avoir besoin. Parconsequent, l’Etat fit en sorte que chaque unitede gestion de foret publique ait une cooperativeforestiere. Entre 1980 et 1985, le Gouvernementdu Quebec accorde aux cooperatives forestieresla possibilite de negocier directement avec leministere responsable des ressources forestieres,dans chaque unite de gestion, jusqu’a 50% destravaux d’amenagement devant etre realises parcelui-ci en foret publique. Cette decision gou-vernementale sera renouvelee jusqu’en 1990. Aumilieu des annees 1980, l’Etat met de l’avant unimposant programme de reboisement dans lequelles cooperatives forestieres trouveront une placeprivilegiee, notamment en s’impliquant dans laproduction de plants forestiers et en intensifi-ant leur presence en sylviculture. Ces activitess’ajoutent a celle de la recolte de bois qui de-meure toujours la plus importante. Enfin, le Gou-vernement du Quebec se montre favorable al’octroi, aux cooperatives forestieres, d’une par-tie de la recolte de bois prevue dans les contratsd’approvisionnement de certaines usines (CCFQ2002). Le tableau 1 montre les principales ac-tivites productives des cooperatives forestieresdu Quebec.

La troisieme phase est celle de la diversi-fication et du developpement des cooperativesforestieres. Depuis le debut des annees 1990,certaines cooperatives forestieres ont commencea investir le secteur de la transformation. Cescooperatives procedent a la construction de nou-velles usines de sciage, a la modernisation de sci-eries existantes et a l’acquisition, en partenariatavec les secteurs industriel et cooperatif, d’unites

Tableau 1Principales activites des cooperatives forestieres du Quebec en 2002

Production de plants 15 millions de plantsReboisement 51, 7 millions de plantsTravaux sylvicoles (preparation 55 000 hectares

de terrain compris)Voirie forestiere 3 500 kilometres

(construction et entretien)Recolte de bois 5, 03 millions de m3

SOURCE: www.ccfq.qc.ca

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de production. Ainsi, plusieurs cooperativesforestieres s’orientent sur la deuxieme et latroisieme transformation du bois en misant surla valeur ajoutee pour creer des emplois. D’autrescooperatives optent pour l’adoption d’expertisesnouvelles, notamment en ce qui concerne la plan-ification forestiere, la gestion multi-ressources etla gestion de projets de developpement forestierau niveau international (CCFQ 2002).

Ce virage vers la diversification semble deplus en plus necessaire en raison des nom-breux bouleversements qui touchent l’industrieforestiere quebecoise. Evidemment, il y a le lit-ige entre le Canada et les Etats-Unis, dans lecadre de l’Alena, sur les droits compensatoiresimposes au bois d’œuvre canadien exporte au sudde la frontiere. Cette mesure affecte durement lescooperatives forestieres qui font de la premieretransformation. Cependant, les reductions de 20a 25% des coupes forestieres dans le domainepublic, ordonne recemment par le Gouvernementdu Quebec suite aux recommandations de laCommission Coulombe,2 remettent serieusementen question la relation entre l’industrie forestiere,dont les cooperatives forestieres, et leur princi-pale ressource. Pour les cooperatives qui font dela premiere transformation, il devient difficile demaintenir les niveaux de profit et d’emploi alorsque les intrants de l’entreprise doivent diminuer.Pour les cooperatives qui effectuent des travauxsylvicoles et d’amenagement forestier pour lecompte d’une grande entreprise forestiere quidoit, elle aussi, ralentir certaines de ses activitesfaute d’intrants suffisants, l’avenir ne s’annonceguere plus facile. Dans ce contexte, il ne resteplus comme option que de miser sur une trans-formation plus poussee de la matiere ligneuse etnon ligneuse qui reste de facon a ce que la nou-velle valeur ajoutee puisse maintenir, voire sus-citer le dynamisme de l’industrie forestiere et dela, des cooperatives forestieres.

Methodologie

L’articulation d’une strategie de developpementregional repose, comme nous l’avons explique

2 Commission gouvernementale d’etude scientifique, technique,publique et independante chargee d’examiner la gestion desforets du domaine de l’Etat quebecois et ayant deposee sonrapport en decembre 2004.

en introduction, sur la mise en valeur d’un en-semble de ressources environnementales, institu-tionnelles, economiques et sociales pouvant etremobilisees et mises en valeur par des acteursindividuels ou collectifs. Comme le rappellentFontan et Klein (2004, 139–140), ces acteurs sontporteurs de visions de developpement en fonc-tion de leurs connaissances et de leurs interets.Par consequent, pour comprendre comment lescooperatives forestieres innovent, nous feronsreference a un cadre theorique qui rend comptede ces interactions entre divers groupes d’acteursqui se coordonnent pour mettre en valeur lesdifferentes ressources dont ils disposent pourarticuler leur strategie de developpement. Cecadre theorique se trouve dans un ouvrage col-lectif dirige par Hollingsworth et Boyer (1997)et porte sur la regulation du capitalisme con-temporain. Les outils analytiques developpes parHollingsworth et Boyer sont particulierementutiles pour saisir les modes de gouvernanceeconomique entre acteurs sociaux et sont tresutilises en sociologie economique (Levesque et al.2001, 163–168). La litterature en developpementregional temoigne aussi de la large diffusion deces outils, notamment dans l’etude des systemeslocaux d’innovation et de production (Amableet al. 1997; Benko et Lipietz 2000; Fontan et al.2003).

Cette perspective theorique avance qu’il existeplusieurs mecanismes qui coordonnent le capi-talisme contemporain soit l’Etat, les marches, lescommunautes, les reseaux, les associations et lahierarchie privee ou la grande entreprise. Lesmodes de gouvernance entre ces mecanismes decoordination dessinent les modes d’organisationdes personnes et des relations sociales for-malisees dans un ensemble de regles. Cesregles etant imposees ou negociees par lesacteurs economiques, contribuent a structurerle developpement du capitalisme contemporain(Levesque et al. 2001, 163–168; Hollingsworthet Boyer 1997, 15–20). Ainsi, les modes de gou-vernance qui se dessinent entre les differentsmecanismes de coordination du capitalisme con-tribuent a creer des systemes sociaux de pro-duction. Les systemes sociaux de productionconstituent les patterns ou les facons de fairequ’empruntent les institutions, les organisationset les individus, c’est-a-dire les mecanismesde coordination, pour configurer les relations

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Tableau 2Les mecanismes de coordination: regles d’echange et regulation

Mecanismesde coordination Structures organisationnelles Regles d’echange

Marches Liberte d’entree et de sortie Lieux d’echanges volontairesEchanges bilateraux et echanges sur les marches

boursiers (Wall Street)Communautes Membership informel evoluant sur une longue periode

de tempsEchanges volontaires bases sur les solidarites sociales

et sur un niveau eleve de confianceReseaux Membership plus ou moins formel

Echanges bilateraux ou multilaterauxEchanges volontaires a travers une longue periode

de tempsAssociations Membership formel Reservees aux membres

Echanges multilateraux Opposition entre ceux qui font partie d’une associationet ceux qui n’en font pas partie

Hierachies privees Organisations complexes qui tendent a devenirbureaucratiques

Reservees aux membres, echanges bases sur unpouvoir asymetrique, regles bureaucratiques

Etat Hierarchie publique Action unilateraleMembership impose, inherent a la citoyennete Echanges economiques et politiques globaux et

indirects

SOURCE: Hollingsworth et Boyer, 1997, 15–16, traduction libre

de nature industrielle, c’est-a-dire relatives audeveloppement industriel et economique, au seind’une region ou collectivite. Le tableau 2 faitla synthese du fonctionnement de chacun desmecanismes de coordination du capitalisme con-temporain tels que definis par Hollingsworth etBoyer.

Ces mecanismes de coordination sont mus,selon les auteurs, par deux axes. Il s’agit d’abordde l’axe des motivations, qui oppose les interetspersonnels, soit les mecanismes du marche etde la hierarchie privee, aux interets collectifs,soit les mecanismes de l’Etat et de la commu-naute. L’axe du pouvoir quant a lui oppose lemarche et la communaute, ou les individus in-teragissent librement sur une base volontaire, ala hierarchie privee et a l’Etat, ou il existe unestructure de distribution du pouvoir. Enfin, les as-sociations et les reseaux sont des mecanismes hy-brides puisque, selon les auteurs, ces mecanismespeuvent poursuivre a la fois des interets person-nels et collectifs et se caracteriser par une distri-bution du pouvoir variable. Ainsi, la perspectivetheorique de Hollingsworth et Boyer nous per-mettra d’analyser les systemes sociaux de pro-duction et les mecanismes de coordination descooperatives forestieres dans leur processus dediversification ou d’innovation.

L’application de notre cadre theorique s’estfaite a partir d’entrevues realisees au sein d’un

echantillon de douze cooperatives forestieres.Ces cooperatives font toutes partie d’une as-sociation qui les represente. La Conferencedes cooperatives forestieres du Quebec (CCFQ)regroupe la grande majorite des cooperativesforestieres de la province (40 sur 44). Lescooperatives de notre echantillon sont distribueesdans six regions forestieres, soit la Gaspesie(3 coops) la Mauricie (3 coops), les Laurentides(1 coop), la Cote-Nord (1 coop), le Saguenay-Lac-St-Jean (3 coops) et Chaudiere-Appalaches(1 coop). Hormis la region de Chaudiere-Appalaches, ces regions comptent parmicelles qui offrent les plus grandes possibilitesforestieres en foret publique. Quant a la region deChaudiere-Appalaches, celle-ci presente les plusgrandes possibilites forestieres en foret privee(MRNFP 2005). Le tableau 3 fournit plusieursinformations concernant la representativite denotre echantillon. Principalement, nous consta-tons, dans ce tableau, que le poids de notreechantillon est considerable, puisqu’il representeplus de la moitie de tout les membres descooperatives forestieres de la CCFQ, et qu’ilpese pour plus de 70% des activites relativesaux variables que nous avons mesurees, hormiscelles des travaux sylvicoles.

Les entrevues effectuees au sein de notreechantillon de cooperatives forestieres sont detype semi-dirige. Elles ont ete realisees en

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Tableau 3Comparaison entre les cooperatives forestieres de l’echantillon et l’ensemble des cooperatives forestieres membres de la CCFQ en 2005

Nombre de Nombre de Travauxcooperatives membres Reboisement sylvicoles Recolte Bois d’œuvre

Total des cooperatives 40 3 275 45,6 millions de plants 30 426 ha 4,4 millions de m3 323 millions de pmp∗

membres de la CCFQTotal dans l’echantillon 12 1 689 33,1 millions de plants 14 934 ha 3,3 millions de m3 228 millions de pmp

51,6% 72,6% 49,1% 75,0% 70,6%

SOURCE: www.ccfq.qc.ca

personne, sur les lieux de travail des repondants,entre avril et septembre 2004. Les entrevues ontune duree variant entre 75 et 135 minutes. Lesentretiens ont ete enregistres sur cassette audiodans tous les cas. Le directeur-general est la per-sonne dans la cooperative qui connaıt dans lesdetails les questions de gestion, d’administration,de strategie productive et de managementau sein de l’organisation. C’est donc avec ledirecteur-general de chacune des cooperativesde notre echantillon que nous avons fait nosentrevues.

La grille utilisee pour faire les entrevues por-tait sur les aspects fondamentaux touchant lagestion d’une entreprise. Par consequent, cettegrille permet d’analyser les elements suivants:evolution des produits et services, strategiesd’innovation ou de diversification, localisationdes marches, usines, partenaires et filiales,reseautage d’affaires et partenariats et, enfin,vie cooperative et conditions de travail desmembres.

Nos recherches documentaires et nos entre-vues nous ont permis d’identifier trois types decooperatives selon le niveau d’innovation. Deuxcriteres nous ont permis de cerner ces types decooperatives que nous avons definies comme suit:cooperatives innovantes, cooperatives moyen-nement innovantes et cooperatives tradition-nelles. Quatre cooperatives se trouvent danschacune de ces categories. Le premier critere del’innovation est celui des activites productives. LaCCFQ met a la disposition du public une sub-stantielle documentation portant sur les activitesproductives de toutes les cooperatives forestieresmembres de l’association. A partir de l’analysede ces documents, il a ete possible d’identifierles activites qui sont communes a l’ensemble

des cooperatives forestieres. Ces activites sont:la recolte de bois, la production de plants, lereboisement et l’amenagement forestier, c’est-a-dire l’ensemble des travaux sylvicoles et la voirieforestiere. Toutes les cooperatives forestieresmembres de la CCFQ maintiennent, en tout ou enpartie, ce registre d’activites. Nous avons pu aussiidentifier les activites productives qui sont pro-pres a une cooperative ou qui se retrouvent dansun nombre limite de cooperatives forestieres. Cesactivites sont: la premiere, deuxieme et troisiemetransformation du bois, le service conseil en ges-tion forestiere et en foresterie, l’application deprocedes respectueux de l’environnement pour larealisation de travaux forestiers, la gestion mul-tiressources et l’amenagement recreotouristique.Ces activites ne concernent qu’une minoritede cooperatives forestieres. Nous les avonsrepertorie dans 14 cooperatives. Nous avons iden-tifie ces cooperatives comme etant hors norme ence qui concerne les activites productives.

Notre deuxieme critere de l’innovation est celuide la valeur ajoutee. La valeur ajoutee est con-stituee par la contribution humaine a un pro-duit, quel qu’il soit. Elle correspond directementa l’ingeniosite et aux efforts apportes par le tra-vail (salarie), et indirectement aux innovationspassees incorporees dans le capital (Polese etShearmur 2002, 53). Les cooperatives forestieresdont les activites productives et les processus degestion accentuent la valeur ajoutee de leur pro-duction, c’est-a-dire qui transforment de plus enplus la matiere ligneuse et non ligneuse, serontdonc considerees plus innovantes que les autres.

Notre echantillon de 12 cooperatives a etetire a partir des 14 cooperatives forestieres con-siderees comme hors norme quant aux activitesproductives. L’application de notre deuxieme

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Tableau 4Types de cooperatives forestieres selon le niveau d’innovation

Activites traditionnellescommunes a

Types de cooperatives Activites innovantes toutes les coops

Cooperatives innovantes Premiere transformation : Production de bois d’œuvre – Production de plantsDeuxieme transformation: Produits finis pour la construction domiciliaire

et industrielle, l’ameublement, l’outillage, equipement recreatif, etc.– Reboisement

Troisieme transformation: Huiles essentielles, produitspharmaceutiques, biofuel, etc.

Service -conseil -formation: Services de support technique et en gestionpour l’amenagement forestier, pour l’implantation des normes ISO, miseen place des procedes environnementaux de recolte de bois

– Travaux sylvicoles etamenagementsforestiers

Cooperatives moyennementinnovantes

Premiere transformation: Production de bois d’œuvre – Voirie forestiere

Cooperatives traditionnelles Aucune activite de transformationGestion multiressource, amenagement recreotouristique

– Recolte de bois

critere de l’innovation, a partir de nos entrevues,dans cet echantillon, nous a permis de definirles trois classes de cooperatives comme suit:les cooperatives forestieres innovantes sontcelles qui tentent de developper une capacitemanufacturiere en investissant le champ de latransformation, mais aussi en mettant sur pieddes projets de valeur ajoutee aux produits dubois. Les cooperatives forestieres innovantespenetrent meme le secteur tertiaire, puisqu’ellespeuvent se specialiser dans des activites deservice-conseil en gestion et en foresterie etdevelopper une expertise en formation dansle domaine environnemental. Les cooperativesforestieres moyennement innovantes se limitentsurtout a la premiere transformation du bois ou,autrement dit, a la production de bois d’œuvre.Enfin, les cooperatives forestieres traditionnelles,bien que leur nom soit imparfait, puisqu’ellesfont quand meme partie des cooperativesforestieres hors norme etant donne certainesde leurs activites productives, ne font aucuneoperation de transformation. Elles orientent leursactivites productives sur l’extraction de la matiereligneuse, de meme que sur la sylviculture, lesautres travaux forestiers, la gestion multires-source et l’amenagement recreotouristique. End’autres termes, les cooperatives forestierestraditionnelles sont les cooperatives les moinsinnovantes, au regard de nos deux criteres,des cooperatives forestieres hors norme. Letableau 4 montre les caracteristiques propres a

chacune des classes d’innovation descooperatives forestieres.

Nous considerons que cette nomenclaturedes cooperatives forestieres selon le niveaud’innovation, de meme que les resultats denos entrevues exposes a la section suivante,sont generalisables dans la mesure ou notreechantillon est representatif. D’abord, notreechantillon couvre la presque totalite descooperatives forestieres (12 sur 14) dites �horsnorme� en ce qui a trait a leur registred’activites productives. Nous avons donc faitdes entrevues jusqu’a saturation, c’est-a-direjusqu’a ce qu’aucune nouvelle donnee ne vienneenrichir l’analyse de ce groupe de cooperatives.Ensuite, aucune cooperative forestiere membrede la CCFQ n’effectue des activites productivesou des operations de transformation que lescooperatives forestieres de notre echantillonn’effectuent deja.

Innovation, Systeme Sociaux deProduction et Cohesion Sociale:Analyse des Observations Empiriques

Nous nous consacrons ici a l’analyse des entre-vues realisees au sein des cooperatives forestieresde notre echantillon. En conformite avecnotre cadre theorique, cette analyse permettrad’identifier les mecanismes de coordination quicomposent les systemes sociaux de production

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366 Patrick Gingras et Mario Carrier

des cooperatives forestieres etudiees dans leurprocessus d’innovation. Nous verrons aussi quelsmoyens les cooperatives forestieres mettent enœuvre pour generer la cohesion sociale.

Les systemes sociaux de production descooperatives forestieres innovantes

Les cooperatives forestieres innovantes sont, auregard de nos donnees empiriques, celles qui sontles plus imbriquees dans leur environnement so-cial et economique, puisqu’elles mettent a profitplusieurs mecanismes de coordination qui leurpermettent d’exploiter les ressources et les poten-tialites de cet environnement. Les mecanismes decoordination qui interviennent dans les strategiesd’innovation des cooperatives forestieres inno-vantes sont les reseaux, la hierarchie privee, oula grande entreprise forestiere, la communaute etl’Etat.

Les reseaux. Les reseaux des cooperativesforestieres innovantes etudiees sont constituesde partenariats entre elles et d’autres PMEforestieres, par des liens de confiance oude reconnaissance entre les cooperativeset leurs clients, et enfin par les relationsd’interdependance strategique entre lescooperatives et leur systeme de filiales. Ence qui a trait aux cooperatives qui ont desrelations de partenariat avec des PME forestieres,notons que ces partenariats peuvent se situer al’echelle locale et regionale. Cependant, pour unedes cooperatives innovantes, ce type de parte-nariat peut s’etendre a l’echelle internationale.Ces partenariats permettent aux cooperativesconcernees ici de trouver l’expertise ou lesavoir-faire necessaire pour transformer le boiset/ou de trouver les ressources financieres pourrealiser ce projet. Par exemple, une cooperativepeut s’entendre avec une scierie pour investirdans une entreprise de transformation du boiset devenir ensemble les principaux actionnaires.Une autre cooperative innovante s’est entendueavec une scierie pour repondre a une de-mande specifique. Cette cooperative, qui assurel’approvisionnement en billons (longueur de 6pieds et plus) et billonnettes (entre 2 et 4 piedsde longueur), a developpe un partenariat avecune scierie qui produit des barreaux de chaise

ou des madriers d’echafaudage. Comme autre ex-emple, citons le cas d’une cooperative innovantequi entretient des relations d’affaires avec uneautre cooperative forestiere en Amerique du sud.Ce partenariat permet a la cooperative forestierequebecoise de tester la qualite et eventuellementle potentiel commercial d’une essence d’arbresud americaine. Le projet pour cette cooperativeforestiere est de transformer cette nouvelleessence pour en faire des produits finis destinesaux marches d’Amerique du Sud.

Concernant les relations de confiance etde reconnaissance qu’ont certaines entreprisesclientes pour les cooperatives forestieres inno-vantes, rappelons que celles-ci s’appuient surla reconnaissance d’un savoir-faire ou d’unequalite specifique propre a ces cooperatives.Ces cooperatives forestieres peuvent etre re-connues pour leur gestion environnementale ef-ficace ou pour leur expertise dans une ouplusieurs operations forestieres (travaux sylvi-coles, amenagement, voirie forestiere, recolte).Sur la base de ces relations de confiance ou dereconnaissance, les cooperatives forestieres inno-vantes peuvent etre sollicitees pour effectuer cer-tains travaux ou pour dispenser de la formationdans leurs champs d’expertise. A titre d’exemple,notons que pour une cooperative forestiere in-novante, les liens de proximite qu’elle entretientavec ses clients, mais aussi avec ses partenairesd’affaires, lui permettent d’obtenir des informa-tions tres utiles pour orienter ou financer sesoperations de modernisation. Autre exemple, lareconnaissance de l’expertise d’une cooperativedans la gestion environnementale des procedesde production par les entreprises de son milieului a permis de developper une activite de con-sultant dans le domaine environnemental.

Enfin, les filiales et les entreprises possedeespartiellement par les cooperatives forestieres in-novantes combinent leurs savoir-faire et leursressources permettant ainsi aux cooperativesd’atteindre des objectifs qu’elles n’atteindraientpas, ou du moins, difficilement sans leur con-cours. Par le systeme des filiales, les cooperativesforestieres innovantes creent un partenariatstrategique qui lie les parties pour l’atteinted’objectifs communs.

A partir de leurs filiales, les cooperativesforestieres innovantes poursuivent deux objectifs

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Entre integration economique et cohesion sociale 367

specifiques. Premierement, a l’aide de ce reseaud’entreprises, les cooperatives peuvent s’assurerun debouche pour leurs propres activites (pourle bois qu’elles coupent, pour leurs travaux sylvi-coles, de plantation, etc.). Les entreprises quifont partie de leur actionnariat sont reliees aune ou plusieurs activites de transformationdu bois. Par consequent, ces entreprises ontbesoin d’intrants (bois, billots) ou de servicesnecessaires a leur fonctionnement (sylviculture,voirie forestiere, plantation, amenagement, etc.).Ces intrants et services sont evidemment as-sures par les cooperatives. Deuxiemement, dansleurs filiales, les cooperatives forestieres peu-vent developper une expertise particuliere ous’engager dans les differentes operations detransformation du bois et ce, en minimisant lesrisques financiers pour la cooperative. En fait, lesentreprises detenues en tout ou en partie parles cooperatives innovantes sont, comme nousle disions plus haut, des entreprises specialiseesdans un domaine quelconque lie a la trans-formation du bois. En etant specialisees de lasorte, ces entreprises ont developpe une exper-tise qui beneficie aux cooperatives, puisque cesont ces entreprises qui seront habilitees a ef-fectuer les operations de transformation que lescooperatives veulent mener pour se diversifier.De plus, les risques inherents lies aux operationsde transformation, notamment la mise en marchedes produits, les fluctuations des marches, ledemarrage d’une nouvelle activite, etc. peuventetre externalises et ainsi ne pas mettre en perilles avoirs de la cooperative.

La hierarchie privee ou la grande entre-prise. Au-dela des relations de sous-traitance,les cooperatives forestieres innovantes interagis-sent d’une autre facon avec la grande entrepriseforestiere. En effet, trois des quatre cooperativesinnovantes etudiees ici sont activement engageesdans des relations de partenariat avec la grandeentreprise forestiere. Ces partenariats visent es-sentiellement a creer une nouvelle entreprise detransformation (une PME), dans laquelle chacundes deux partenaires detient un pourcentage ducapital-action. Ces partenariats permettent aussiaux cooperatives innovantes de mener des pro-jets de diversification de grande envergure et debeneficier du large reseau de distribution de lagrande entreprise. Ces partenariats permettent de

partager les risques financiers, particulierementlourds pour les cooperatives, et les couts elevesqu’entraınent le developpement d’un produit exis-tant ou la mise en marche d’un nouveau produitcomme, par exemple, le biofuel, qui est un car-burant ou un combustible obtenu a partir de labiomasse issue de la decomposition du bois.

L’Etat. Dans les annees 1970 et 1980, l’Etatquebecois redefinit le regime forestier de laprovince. L’une des principales consequencesde cette redefinition est l’accroissement del’interventionnisme de l’Etat (CCFQ 2002).Par exemple, L’Etat a modifie les regles dumarche en regissant certaines actions desacteurs de l’industrie forestiere. Ce typed’intervention s’est fait en partie au profitdes cooperatives forestieres. Le fait que l’Etatait oblige certaines usines, en vertu de leurcontrat d’approvisionnement, a se ravitailler enmatiere ligneuse chez les cooperatives forestieresconstitue un exemple de l’interventionnismede l’Etat qui joue en faveur des cooperativesforestieres. C’est dans cette perspective quedeux des cooperatives forestieres innovantesetudiees ici attachent une certaine importanceau maintien d’un dialogue constant et proactifavec des representants de certains ministeresou leur depute. Par ce type de reseautage, lescooperatives exercent une sorte de lobbyingaupres de l’Etat pour faire valoir ses pointsde vue, donner de l’information face aux en-jeux a venir de la cooperative et, dans certainscas, developper des projets d’expansion quinecessiteront un appui financier de la partdu gouvernement ou d’organismes gouverne-mentaux. Ce type d’appui financier a d’ailleurspermis a une cooperative innovante de demarrerune nouvelle filiale de transformation.

La communaute. La communaute joue un roleimportant dans le developpement de deux desquatre cooperatives forestieres innovantes denotre echantillon. Pour l’une de ces cooperatives,c’est la relation de confiance entre l’organisationet sa communaute d’appartenance qui est asouligner. Cette relation a ete, jusqu’a recemmentdans l’histoire de la cooperative, d’une impor-tance capitale pour la survie de l’organisation. Eneffet, la communaute fut directement impliqueepour financer la cooperative afin de redresser sa

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Tableau 5Systeme sociaux de production des cooperatives forestieres innovantes

MecanismesCooperatives de coordination Relations de nature industrielle Objectifs

Cooperative 1 Reseaux Partenariats avec au moins deux PME forestieres Acces a de l’expertise, du financement, a del’information

Grande entreprises Partenariats avec deux grandes entreprise Acces a un reseau de distribution., partagede risques et de couts

Communaute Relation de confiance avec la communaute locale

Cooperative 2 Reseaux Systeme comptant 7 filiales Acces a de l’expertise, du financement, a del’informationPartenariats avec cooperatives d’Amerique du Sud

Communaute Relations avec communautes autochtones locales Acces a un reseau de distribution, partagede risques et de couts

Grande entreprise Partenariat avec une grande entreprise forestiere Economies d’agglomerationInformations sur les differents marches

Etat Relations soutenues avec le depute de la regionet avec des organismes de developpementregional

Positionnement strategique

Cooperative 3 Reseaux Systeme comptant 3 filialesPartenariats avec deux PME forestieres

Acces a de l’expertise, du financement, a del’information

Relations avec les clients Acces a un reseau de distributionGrande entreprise Partenariats avec une grande entreprise Partage de risques et de couts

Cooperative 4 Reseaux Systeme comptant 7 filialesPartenariats avec deux PME forestieres

Acces a de l’expertise, du financement, a del’information

Partage de risques et de coutsEtat Relations regulieres avec depute local, voire avec

Ministre des ressources naturellesSensibilisation aux enjeux de la cooperative

situation financiere. Fondamentalement basee surune relation de confiance entre la communaute etles dirigeants de la cooperative, ces derniers ontpu, grace a ce financement, demarrer un plan derelance pour la cooperative. Encore aujourd’hui,cette relation perdure puisque le developpementde la cooperative est intimement lie aux besoinsde la communaute. Par exemple, aucun des pro-jets de partenariat ou de developpement n’estentrepris par la cooperative si ces projets sontsusceptibles de faire perdre des emplois oud’enlever du pouvoir a la cooperative face a sonavenir dans sa communaute. Il ne s’agit pasici d’un engagement explicite, mais plutot d’uneforme de responsabilisation de l’organisation facea sa communaute, une sorte de volonte des’enraciner dans son milieu et d’œuvrer a saprosperite. Dans le deuxieme cas, la commu-naute a permis a la cooperative de trouver leseconomies d’agglomeration dont elle avait besoinpour prendre de l’expansion et se developper.Le milieu fut mis a contribution afin d’offrir ala cooperative des avantages strategiques dont

elle avait besoin pour construire et exploiterune nouvelle usine de transformation du bois.Ces avantages etaient necessaires pour assurerla competitivite de l’usine, de meme que saprosperite dans la region d’appartenance de lacooperative. Les economies d’agglomeration dontavait besoin la cooperative prenait essentielle-ment deux formes. D’abord, un reseau routier etferroviaire efficace pour acheminer les intrants del’usine, mais aussi pour desservir ses differentsmarches. Ensuite, la cooperative cherchait un sited’implantation, en l’occurrence, un parc industrieldont la construction et l’amenagement ont eteinities par les autorites publiques locales. Ce sited’implantation devait posseder des infrastruc-tures suffisamment developpees pour achemineret exploiter les differentes sources d’energie (gaznaturel, electricite) necessaires au fonctionnementde la future usine de transformation. Le tableau 5fait la synthese des relations de nature indus-trielle qui se deploient a travers les mecanismesde coordination des cooperatives forestieres inno-vantes que nous venons d’analyser.

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Entre integration economique et cohesion sociale 369

Les systemes sociaux de production descooperatives forestieres moyennementinnovantes

A l’instar des cooperatives forestieres innovantes,les cooperatives forestieres moyennement inno-vantes presentent des relations de nature indus-trielle complexes. Cependant, a la difference descooperatives forestieres innovantes, ces relationscomplexes n’interpellent que deux mecanismesde coordination: les reseaux et la grandeentreprise.

Les reseaux. Les reseaux ici se limitent auxseules relations que les cooperatives moyen-nement innovantes entretiennent avec des PMEforestieres et avec leur systeme de filiales. Seule-ment deux des quatre cooperatives moyennementinnovantes etudiees ici sont engagees dans despartenariats avec des PME forestieres et troisd’entre elles ont mis en place un systemed’echanges et de relations productives en com-mun avec un reseau de filiales.

Les relations entre les deux cooperativesforestieres moyennement innovantes et desPME forestieres visent essentiellement a met-tre sur pied des partenariats financiers, dontl’objectif est de creer une filiale qui constituera

Tableau 6Systemes sociaux de production des cooperatives forestieres moyennement innovantes

MecanismesCooperatives de coordination Relations de nature industrielle Objectifs

Cooperative 1 Reseaux Systeme de 3 filiales Acces a de l’expertise, du financement, del’information

Partenariat avec une cooperative et unesociete d’investissement

Acces a un reseau de distribution, partage derisques et de couts

Cooperative 2 Reseaux Relations de confiance avec les fournisseurs Meilleure utilisation des ressources forestieresGrande entreprise Partenariat avec une grande entreprise Acces a de nouvelles sources d’intrants pour

developper une activite de transformation

Cooperative 3 Reseaux Systeme de 3 filiales Acces a de l’expertise, du financement, del’information

Grande entreprise Partenariat avec une grande entreprise Acces a un reseau de distribution, partage derisques et de couts

Collaboration pour l’implantation des normes ISO

Cooperative 4 Reseaux Systeme de 3 filiales Acces a de l’expertise, du financement, del’information

Partenariat avec une PME forestiere Acces a un reseau de distribution, partage derisques et de couts

Grande entreprise Partenariat avec une grande entreprise Collaboration pour l’implantation des normes ISO

une usine de premiere transformation.En ce qui concerne les reseaux de filiales,ceux-ci poursuivent sensiblement les memes ob-jectifs que ceux observes dans les cooperativesinnovantes. Il s’agit de se doter d’organisationsqui sauront effectuer diverses operations detransformation, comme le sciage, le rabotage etle sechage du bois en minimisant les risquespour les avoirs des cooperatives concernees.

La hierarchie privee ou la grande entre-prise. Trois des quatre cooperatives forestieresmoyennement innovantes se sont engagees dansun partenariat avec la grande entreprise. Ils’agit essentiellement ici aussi de partenariats fi-nanciers qui ont pour objectif de creer une filiale.Comme pour le cas des cooperatives forestieresinnovantes, la creation d’une filiale permet auxcooperatives moyennement innovantes d’assurerun debouche pour le bois qu’elles recoltent. La fil-iale transforme leur bois et les ventes qu’elles ef-fectuent sont encouragees par le vaste reseau dedistribution de la grande entreprise. Le tableau 6fait la synthese des relations de nature indus-trielle qui se deploient a travers les mecanismesde coordination des cooperatives forestieresmoyennement innovantes.

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Tableau 7Systemes sociaux de production des cooperatives forestieres traditionnelles

RelationsCooperatives Mecanismes de coordination de nature industrielle Objectifs

Cooperative 1 Relations traditionnelles avec la grande entreprise Sous-traitance Contrat de travailCooperative 2 Relations traditionnelles avec la grande entreprise Sous-traitance Contrat de travailCooperative 3 Relations traditionnelles avec la grande entreprise Sous-traitance Contrat de travailCooperative 4 Relations traditionnelles avec la grande entreprise Sous-traitance Contrat de travail

Reseaux Une filiale possedee Expertise

Les systemes sociaux de production descooperatives forestieres traditionnelles

Les quatre cooperatives forestieres tradition-nelles de notre etude montrent que ce type decooperative est le moins imbrique dans son en-vironnement economique et social. Essentielle-ment, les relations que les quatre cooperativesforestieres traditionnelles entretiennent au seinde leurs systemes sociaux de production concer-nent la grande entreprise. Une seule des qua-tre cooperatives traditionnelles deborde quelquepeu de ce cadre, puisque sa filiale lui per-met d’augmenter son expertise pour les travauxsylvicoles.

La hierarchie privee ou la grande en-treprise. Les relations de nature industrielle en-tre les cooperatives forestieres traditionnelleset la grande entreprise sont fondamentalementmarquees par le role de sous-traitant pour lescooperatives et de donneur d’ordres pour lagrande entreprise. Pour les quatre cooperativesforestieres traditionnelles etudiees ici, leur raisond’etre est liee a leur statut de sous-traitant pourune ou quelques grandes entreprises forestieres.Les travaux de sous-traitance que les cooperativesde cette section effectuent sont essentiellementceux relatifs a la sylviculture, au reboisement, ala foresterie et a la recolte de bois.

Les reseaux. Comme nous le disions plushaut, les reseaux, en tant que mecanismede coordination, ne s’appliquent qu’a uneseule des cooperatives forestieres tradi-tionnelles etudiees. Pour cette cooperativespecialisee dans les travaux sylvicoles, saparticipation dans le capital-action d’uneentreprise de consultants forestiers lui a

permis d’accroıtre son expertise en sylviculture,notamment en offrant une gamme de servicesplus complete dans ce domaine. Principalement,cette filiale permet a la cooperative d’obtenirde nouveaux contrats de sous-traitance enamenagement forestier pour la grande entreprise,mais aussi pour une autre cooperative forestierede sa region administrative. Le tableau 7 montrecomment les mecanismes de coordination descooperatives forestieres traditionnelles struc-turent leurs relations industrielles.

Innovation et cohesion sociale

Parallelement a l’etude sur l’innovation, nousavons constate une correlation entre la capacited’innover chez les cooperatives forestieres denotre echantillon et leur capacite a generer lacohesion sociale. En fait, plus les cooperativesforestieres de notre echantillon innovent, pluselles semblent activement impliquees dans lapromotion de la cohesion sociale. Au sein del’organisation, les cooperatives forestieres in-novantes et moyennement innovantes mettentsur pied differents comites (de travailleurs, desante-securite, d’amelioration continue, etc.). Cescomites sont des espaces a l’interieur desquelsles membres peuvent s’impliquer dans differentsdomaines touchant de pres le developpement deleur cooperative, comme l’organisation du tra-vail, la modernisation, la securite, la formation,l’equite salariale, etc. Les cooperatives innovanteset moyennement innovantes multiplient aussi lesrencontres entre les membres et les administra-teurs afin de communiquer de l’information,faire le point sur les orientations de lacooperative, ses investissements et les change-ments a venir. Certaines cooperatives forestieresinnovantes et moyennement innovantes

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Tableau 8Principales initiatives quant a la cohesion sociale a l’interne

NombreInitiatives et structure de coops

Comites de la cooperative: 4 innovantes– Comites dedies a un aspect strategique de la cooperative (amelioration continue, equite salariale, 4 moy. innovantes

sante-securite, formation, etc.); 2 traditionnelles– Les membres peuvent s’impliquer dans ces comites et formuler des recommandations a la direction et aux

administrateurs de la coop;

Reunions entre membres et administrateurs: 4 innovantes– Assemblee generale annuelle, rencontres fixees regulierement ou au besoin, convocations, 4 moy. innovantes

seances d’information; 2 traditionnelles– La direction de la coop consulte les membres et communique de l’information concernant les orientations,

les finances, la production, les investissements et l’avenir de la cooperative;

Formation: 2 innovantes– Programme ou activites de formation dediees aux membres et mises sur pied par la cooperative; 2 moy. innovantes– Ameliorer la comprehension du fonctionnement d’un cooperative et de certains de ses outils de gestion 0 traditionnelle

mettent en place des programmes ou desactivites de formation permettant aux membresde mieux connaıtre les principes cooperatifs,la gestion d’une entreprise cooperative et lespostes nevralgiques de l’entreprise. En ce quiconcerne les cooperatives forestieres tradi-tionnelles, nous n’avons note que l’existencedes comites de membres, en sante-securiteseulement, et la mise en place de differentesrencontres d’information entre administrateurs etmembres des cooperatives. Cependant, contraire-ment aux cooperatives forestieres innovanteset moyennement innovantes, ce ne sont pastoutes les cooperatives traditionnelles qui sontconcernees par ces mesures. Seulement deuxdes quatre cooperatives traditionnelles que nousavons etudiees accordent de l’importance a detelles mesures. Le tableau 8 fait la synthese desprincipales initiatives quant a la cohesion socialedes cooperatives forestieres de notre echantillonau sein de leur organisation.

Au sein de leurs communautes d’appartenance,les cooperatives forestieres innovantes et moyen-nement innovantes participent a la cohesionsociale en faisant des dons ou des actions debenevolat, comme financer la renovation d’uneecole, offrir un appui materiel et ses competencesen gestion, par exemple, a des organismes com-munautaires ou d’interet public. Les cooperativesforestieres innovantes et deux cooperativesmoyennement innovantes s’impliquent aussi,avec differents acteurs sociaux, dans divers

projets qui contribuent au developpement deleurs communautes. Par exemple, certainesd’entre elles investissent dans de jeunes PMEforestieres de leur region et les parrainent dansleurs premieres annees d’activite. D’autres col-laborent avec leur municipalite et differentsacteurs prives au developpement et a lamise en valeur du potentiel touristique etforestier de leur region. Enfin, les cooperativesforestieres innovantes essaient d’assurer unecertaine adequation entre le developpementde la cooperative et les besoins exprimes parleurs communautes d’appartenance. Par exemple,ces cooperatives tentent de creer des emploispour certains groupes sociaux en situation deprecarite, comme les femmes et les jeunes. Lescooperatives forestieres traditionnelles quant aelles, ne se limitent qu’aux activites de benevolatet aux dons. De plus, ces mesures ne concernentque deux des quatre cooperatives forestieres tra-ditionnelles etudiees. Le tableau 9 fait la synthesedes initiatives quant a la cohesion sociale descooperatives forestieres de notre echantillon ausein de leurs communautes d’appartenance.

Conclusion

Les resultats que nous venons d’exposer dans cetarticle permettent quelques eclairages nouveauxen matiere de developpement regional. Nousles resumerons en trois points. Premierement,

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Tableau 9Principales initiatives quant a la cohesion sociale au sein des communautes d’appartenance

NombreInitiatives et structure de coops

Adequation entre le developpement de la cooperative et les besoins des communautes : 4 innovantes– Cibler les categories d’individus en demande d’emploi; 0 moy. innovante– Insertion a l’emploi de certains groupes (femmes, autochtones, jeunes, etc.); 0 traditionnelle– Devenir un � champion de l’emploi �Dons et benevolat : 4 innovantes– Appui financier, implication dans divers organismes; 3 moy. innovantes– Supporter la municipalite dans divers projets; 2 traditionnelles– S’engager dans des causes humanitaires– Supporter des projets ou organisations communautaires;– Partager ses competences et ses equipements

Implication de la coop dans des projets avec la communaute : 4 innovantes– Soutenir les entreprises de la region en y investissant ou par la creation de partenariats dans le but de 2 moy. innovantes

partager des connaissances; 0 traditionnelle– Creer des partenariats avec la municipalite et des organismes de developpement economique pour developper

des projets economiques (touristiques et forestiers)– Partager l’interet pour les principes cooperatifs et etablir des relations d’affaires et d’echanges economiques

soucieuses de l’equite;– Implanter Internet a l’ecole

l’article montre, qualitativement, qu’il existe, dansnotre echantillon, un lien de correlation entrela capacite d’innovation dans les cooperativesforestieres du Quebec et leur capacite a genererla cohesion sociale dans leurs communautesd’appartenance. Nous avons effectivement vudans les pages precedentes, a l’aide, notamment,du cas des cooperatives forestieres innovantes,que plus une cooperative forestiere innove dansses pratiques productives et de gestion, plus ellepromeut la cohesion sociale. Cette realite nouspermet de considerer autrement l’opposition, quenous avons notee en introduction, qui sem-ble difficile a cerner entre le developpementeconomique et le developpement social au seinde la mondialisation actuelle.

Nous aimerions mentionner ici que, mani-festement, a la lumiere de nos resultats, iln’y a pas necessairement incompatibilite entredeveloppement economique et social au seinde la restructuration de l’economie globale. Lescooperatives forestieres innovantes et, dans unemoindre mesure, les cooperatives forestieresmoyennement innovantes, situees aussi bien enGaspesie, au Saguenay-Lac-St-Jean, en Mauricie,sur la Cote-Nord ou dans les Laurentides, ten-tent, a travers les mecanismes de coordina-tion que nous avons decrits, de s’adapter aux

nouvelles structures de regulation du capital-isme contemporain. Ces cooperatives tententd’ameliorer leur productivite, prennent le viragetechnologique dans leurs usines et developpentleur competitivite en essayant, par diversesoperations de transformation du bois, de senicher dans des marches specifiques. Pourtant,le fait que les cooperatives forestieres inno-vantes et moyennement innovantes se met-tent au diapason du developpement economiqueactuel ne les empeche pas d’assumer, mieuxque les cooperatives forestieres traditionnelles,leur fonction sociale face a la promotion de lacohesion sociale. Nous avons explique ici que lescooperatives innovantes et moyennement inno-vantes assument cette fonction a un niveau mi-cro, c’est-a-dire a travers differentes interventionsau sein de leur organisation et de leurs com-munautes. Cependant, elles assument aussi cettefonction a un niveau plus macro, a partir desmodes de gouvernance dans lesquels elles tententde s’inscrire a travers les mecanismes de coordi-nation de leur systemes sociaux de production.Dans ces modes de gouvernance, les cooperativesforestieres innovantes et moyennement inno-vantes definissent des entreprises communesavec les principaux acteurs forestiers du Quebec,soit l’Etat, la grande entreprise forestiere, les

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Entre integration economique et cohesion sociale 373

communautes forestieres et plusieurs autres ac-teurs a travers leurs reseaux d’affaires, con-tribuant ainsi a la cohesion du systeme forestierquebecois.

Evidemment, il ne faut pas perdre de vuela nature de l’entreprise que nous etudions.Rappelons-le, les cooperatives forestieres sontcreees pour repondre aux besoins d’insertionprofessionnelle et socio-economiques exprimespar une communaute. Les cooperatives re-groupent des personnes qui expriment ces be-soins communs et qui, en vue de les satisfaire,s’associent pour exploiter une entreprise collec-tive. Pour survivre, les cooperatives forestieres duQuebec se doivent de reconcilier les dynamiqueseconomiques et sociales afin de ne pas s’alienerleur membership, ce qui revient a dire une partiede leurs communautes d’appartenance, et ainsicourir le risque de s’effriter et de disparaıtre. Ilest donc evident que les cooperatives forestieressont, de par leur nature, des entreprises collec-tives enracinees dans leur milieu. Cependant, ilfaut aussi souligner, a la lumiere de nos observa-tions, que le fait de s’engager ou de s’adapter auxrealites du capitalisme moderne n’entrave pas, apriori, cette capacite de reconcilier dynamiqueseconomiques et dynamiques sociales.

Deuxiemement, l’article revele la mise enplace de la gouvernance forestiere au Quebec etson role dans le developpement des cooperativesforestieres. C’est avec sa loi sur le developpementdes cooperatives forestieres de 1977, a laque-lle nous faisions allusion en introduction, quel’Etat quebecois jette les bases de cette gouver-nance forestiere. Cette loi s’inscrit a l’aube d’unchangement important dans le regime forestierquebecois ou l’Etat veut reprendre le controle dela gestion forestiere du domaine public, laisseejusque la a la grande entreprise forestiere. Cetteloi veut faire en sorte que les cooperativesforestieres deviennent l’interface entre la foret etl’Etat pour la gestion des ressources forestieres.En favorisant, dans les annees 1970 et 1980,le developpement des cooperatives forestieres,mais aussi en forcant la grande entreprisea travailler avec les cooperatives forestieres,chez qui elle trouvera, finalement, des sous-traitants fiables et durables, l’Etat fait entrer,aux cotes d’elle-meme et de la grande entreprise,les cooperatives forestieres, mais aussi lescommunautes qu’elles representent dans la

regulation du regime forestier et de l’industriequi s’y rattache.

A travers les mecanismes de coordinationqu’elles empruntent, les cooperatives forestieresinnovantes et, dans une moindre mesure, lescooperatives forestieres moyennement inno-vantes, developpent leurs strategies de connec-tivite avec l’Etat, la grande entreprise forestiereet leurs communautes. Confrontees a la necessited’innover, les cooperatives forestieres inno-vantes et moyennement innovantes amenagentdes espaces d’interactions et d’echanges avecces principaux acteurs de l’industrie forestiere,articulant ainsi la gouvernance forestiere miseen place par l’Etat. A partir de leur imbricationdans leur environnement social et economique,les cooperatives forestieres innovantes et moyen-nement innovantes cherchent a instaurer lanegociation entre les principaux acteurs del’industrie forestiere de facon a coordonner leurscapacites strategiques pour definir et atteindredes objectifs communs. Les modes de gouver-nance entre les mecanismes de coordinationqu’empruntent les cooperatives forestieres in-novantes et moyennement innovantes reposentsur le principe que face a la diversite et a lacomplexite des problematiques auxquelles ellessont confrontees, il est preferable d’aborderces problematiques avec une pluralite d’acteurs,aux competences et aux horizons varies. Eneffet, les cooperatives forestieres les plus inno-vantes trouvent, en interagissant avec l’Etat, lagrande entreprise, les communautes forestiereset avec divers autres acteurs a travers leursreseaux, un appui financier pour articulerleurs strategies d’innovation et des parte-naires pour partager les risques et les coutsinherents a l’innovation. Elles trouvent aussi unacces aux ressources, competences et informa-tions necessaires pour orienter leurs activitesd’innovation, pour developper un nouveau pro-duit ou un nouveau procede de fabrication, pourmoderniser leurs installations ou pour prendrede l’expansion et enfin pour connaıtre leursmarches. Ainsi, par l’etude de l’innovation ausein des cooperatives forestieres du Quebec,l’article demontre empiriquement la mise enapplication de l’une des principales strategiesde developpement regional, c’est-a-dire la gou-vernance locale et regionale, dans ce cas-ci, enmilieu forestier (Stohr 2003, 131–134).

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374 Patrick Gingras et Mario Carrier

Enfin, troisiemement, pour faire reference auxobservations citees en introduction concernantles travaux de Polese et Shearmur sur la con-centration des activites economiques en regionmetropolitaine, nos resultats montrent que lescooperatives forestieres du Quebec constituent,a condition qu’elles innovent, un outil dedeveloppement regional efficace pour les regionsperipheriques ou non metropolitaines. Commenous venons de l’expliquer, c’est a l’interieurmeme de la gouvernance forestiere que lescooperatives forestieres peuvent innover et dela, participer a la promotion de la cohesion so-ciale et au developpement economique de leurscommunautes d’appartenance. Dans la mesure oul’Etat, la grande entreprise forestiere, les com-munautes et les cooperatives forestieres peu-vent, en vertu de leurs motivations, avoir intereta travailler en concertation, les processus degouvernance entre ces acteurs, a travers lesmecanismes de coordination du capitalisme con-temporain, representent un interet indeniable. Parconsequent, les cooperatives forestieres moins in-novantes doivent s’appliquer a prendre leur placedans la gouvernance forestiere afin de stimulerl’innovation au sein de leur organisation. Le casdes cooperatives forestieres innovantes et moyen-nement innovantes, que nous avons expose ici, etplus specifiquement la gouvernance forestiere, il-lustrent la nouvelle economie forestiere et doncune strategie de developpement regional pour lesregions peripheriques ou la foret occupe un placeimportante dans leur economie.

Cependant, l’industrie forestiere au Quebecest tres concentree au sein de la grande en-treprise, ce qui confine souvent les cooperativesforestieres, aussi innovantes soient-elles, a unstatut de sous-traitant et par le fait meme,a une situation de dependance. L’espace quinous est reserve dans ce texte est trop re-streint pour que nous puissions definir les nou-velles bases sur lesquelles l’Etat, instigateur dela gouvernance forestiere, pourrait renouvelercette gouvernance au Quebec. Cependant, nouspourrions commencer par observer ce que fontles cooperatives forestieres innovantes. Celles-citentent de mettre de l’avant leur expertise etleur potentiel aupres des autres organisationsforestieres. Elles le font en essayant de depasserleur statut de sous-traitant. Pour pouvoir inter-agir avec les autres acteurs de la gouvernance

forestiere, les cooperatives forestieres innovantesnous apprennent qu’elles ont besoin d’autonomiepour jouer un role actif, sur le mode dela negociation, au sein de cette gouvernance(Paquet 2005). Par consequent, c’est a partirdu principe d’autonomie pour les cooperativesforestieres, mais aussi pour les communautesforestieres, qu’il faudra peut-etre amorcer lareflexion sur un enrichissement de la gouver-nance forestiere au Quebec en tant que strategiede developpement pour les regions peripheriquesreliees aux ressources forestieres.

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