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Mémoire original Étude de l’influence des troubles mentaux sur les difficultés de réinsertion sociale Study of the influence of mental disorders on the problems of social rehabilitation S. Combaluzier a,b, *, J.L. Pedinielli a a Centre Psy-CLE, équipe thématique III, université de Provence, 29, avenue Robert-Schuman, 13621 Aix-en-Provence cedex 1, France b CHRS Armée du Salut, 190, rue Félix-Pyat, 13003 Marseille, France Reçu le 19 septembre 2001 ; accepté le 25 octobre 2001 Résumé La grande détresse psychiatrique des personnes frappées d’exclusion sociale est maintenant un fait bien connu. L’objet de cet article est de centrer l’étude sur les difficultés d’insertion sociale à partir d’un échantillon d’hommes (n = 999) qui demandent activement à être aidés dans leur réinsertion. Les résultats relatifs aux troubles cliniques (Axe I du DSM-IV) et aux troubles de la personnalité (Axe II du DSM-IV) sont comparés aux estimations de la population générale ainsi qu’à d’autres études relatives aux SDF en France. Ces comparaisons montrent des prévalences supérieures de troubles dont la symptomatologie comporte des signes facteurs de difficulté dans la réinsertion sociale. Enfin, des mesures d’interaction et d’impact (interactions multiplicatives, rapports des cotes, fractions étiologiques) montrent que ces associations morbides augmentent grandement la difficulté pour l’individu à se réinsérer. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract The psychiatric problems of the “homeless” population are now recognized. The aim of this article is to focus the study on a sample of this population (n = 999) asking for help in their social insertion. The results on clinical disorders (Axis I of the DSM-IV) and personality disorders (Axis II of the DSM-IV) are compared to estimations on general population and to other studies on “homeless” in France. These comparisons show the prevalences of some disorders whose symptoms involve problems in social rehabilitation.At last, measures of interaction and impact (multiplicative interactions, odd ratio, etiologic fractions) shows that these morbid associations increase the problems in the attempts to social rehabilitation. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés : Épidémiologie clinique ; Exclusion sociale ; Santé mentale ; Troubles cliniques ; Troubles de la personnalité Keywords: Clinical disorders; Clinical epidemiology; Homeless; Mental health; Personality disorders 1. Introduction Toutes les études qui ont été menées sur la population des « sans domicile fixe » aux États-Unis (pour une revue de la littérature cf. [7–13]), en France [6–10] ou d’autres pays d’Europe ([14] au Royaume-Uni, [9] en Allemagne, ou [2] au Danemark) mettent en évidence une très grande souffrance psychiatrique, posant la question d’un lien entre la précarité et la maladie mentale [3]. Comme le font remarquer Cohen et Thompson [4], ce constat se prête à deux grands types d’in- terprétation : pour certains, à la suite de H. Lamb [11], la forte proportion de malades mentaux que l’on rencontre dans cette population serait la conséquence directe d’une absence * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Combaluzier). Annales Médico Psychologiques 161 (2003) 31–37 © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 0 0 0 3 - 4 4 8 7 ( 0 2 ) 0 0 2 2 4 - X

Étude de l’influence des troubles mentaux sur les difficultés de réinsertion sociale

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Mémoire original

Étude de l’influence des troubles mentaux sur les difficultésde réinsertion sociale

Study of the influence of mental disorders on the problemsof social rehabilitation

S. Combaluziera,b,*, J.L. Pediniellia

a Centre Psy-CLE, équipe thématique III, université de Provence, 29, avenue Robert-Schuman, 13621 Aix-en-Provence cedex 1, Franceb CHRS Armée du Salut, 190, rue Félix-Pyat, 13003 Marseille, France

Reçu le 19 septembre 2001 ; accepté le 25 octobre 2001

Résumé

La grande détresse psychiatrique des personnes frappées d’exclusion sociale est maintenant un fait bien connu. L’objet de cet article est decentrer l’étude sur les difficultés d’insertion sociale à partir d’un échantillon d’hommes (n = 999) qui demandent activement à être aidés dansleur réinsertion. Les résultats relatifs aux troubles cliniques (Axe I du DSM-IV) et aux troubles de la personnalité (Axe II du DSM-IV) sontcomparés aux estimations de la population générale ainsi qu’à d’autres études relatives aux SDF en France. Ces comparaisons montrent desprévalences supérieures de troubles dont la symptomatologie comporte des signes facteurs de difficulté dans la réinsertion sociale. Enfin, desmesures d’interaction et d’impact (interactions multiplicatives, rapports des cotes, fractions étiologiques) montrent que ces associationsmorbides augmentent grandement la difficulté pour l’individu à se réinsérer.

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

The psychiatric problems of the “homeless” population are now recognized. The aim of this article is to focus the study on a sample of thispopulation (n = 999) asking for help in their social insertion. The results on clinical disorders (Axis I of the DSM-IV) and personality disorders(Axis II of the DSM-IV) are compared to estimations on general population and to other studies on “homeless” in France. These comparisonsshow the prevalences of some disorders whose symptoms involve problems in social rehabilitation. At last, measures of interaction and impact(multiplicative interactions, odd ratio, etiologic fractions) shows that these morbid associations increase the problems in the attempts to socialrehabilitation.

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved.

Mots clés : Épidémiologie clinique ; Exclusion sociale ; Santé mentale ; Troubles cliniques ; Troubles de la personnalité

Keywords: Clinical disorders; Clinical epidemiology; Homeless; Mental health; Personality disorders

1. Introduction

Toutes les études qui ont été menées sur la population des« sans domicile fixe » aux États-Unis (pour une revue de lalittérature cf. [7–13]), en France [6–10] ou d’autres pays

d’Europe ([14] au Royaume-Uni, [9] enAllemagne, ou [2] auDanemark) mettent en évidence une très grande souffrancepsychiatrique, posant la question d’un lien entre la précaritéet la maladie mentale [3]. Comme le font remarquer Cohen etThompson [4], ce constat se prête à deux grands types d’in-terprétation : pour certains, à la suite de H. Lamb [11], laforte proportion de malades mentaux que l’on rencontre danscette population serait la conséquence directe d’une absence

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (S. Combaluzier).

Annales Médico Psychologiques 161 (2003) 31–37

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.PII: S 0 0 0 3 - 4 4 8 7 ( 0 2 ) 0 0 2 2 4 - X

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de prise en charge par le secteur sanitaire ; pour d’autres[12–16] la précarité produirait de tels effets déstabilisateurssur le psychisme qu’elle induirait les décompensations ob-servées dans les études. Cependant, peu de travaux partent dece constat pour mesurer l’ impact des troubles mentaux (trou-bles cliniques et troubles de la personnalité) sur les difficultésde ces personnes à se réinsérer. L’objet de cet article estd’apporter quelques éléments de compréhension entre laprésence des troubles mentaux et la difficulté d’ insertion.

2. Méthodologie

2.1. Recueil des données

Chacun des 999 sujets qui constituent cette étude a étérencontré en entretien psychologique lors de sa demanded’admission dans le Centre d’Hébergement et de RéinsertionSociale (CHRS) de l’Armée du Salut de Marseille, entre lesecond semestre 1996 et le premier semestre 2000. Dans lacarte sanitaire et sociale, le CHRS est un dispositif quis’adresse à des personnes en demande active de réinsertionsociale. Contrairement aux accueils d’urgence (asiles denuit), la demande d’hébergement n’est pas une fin en soi,mais correspond à la condition sine qua non pour la réalisa-tion active d’un projet d’ insertion. Les CHRS proposent uneprise en charge à long terme (six mois renouvelables aprèsaccord de la DDASS) afin de permettre aux individus endifficulté sociale de se réinsérer. L’admission dans l’établis-sement où cette étude a été menée se fait sur la base d’unesérie d’entretiens (travailleur social, infirmière, psycholo-gue). Ces entretiens ont pour but d’évaluer la faisabilité duprojet, la motivation de l’ individu à mettre en place lesconditions de l’amélioration de sa situation et d’en cernerégalement les obstacles. Toutefois l’expérience montre quemalgré l’amélioration des conditions de vie (hébergement,repas réguliers, ouverture des droits sociaux, accompagne-ment social et psychologique), un grand nombre de person-nes (57,50 % pour l’année écoulée) ne parviennent pas, auterme de leur séjour, à une amélioration significative de leursituation.

Compte tenu des conditions (cadre institutionnel, contrat,délai parfois important avant l’admission) que les CHRSproposent, cette population d’exclus qui demandent à êtreaidés dans leur réinsertion sociale pourrait donc être a prioridifférente sur le plan psychopathologique de la populationSDF dont elle tente de s’extraire.

Sur le plan descriptif, cet échantillon est composéd’hom-mes entre 18 et 65 ans (moyenne 35 ans), originaires princi-palement de Marseille (65,3 %), ayant un niveau scolairesecondaire (48,6 %) avec une formation incomplète(49,5 %), n’ayant généralement pas travaillédepuis plus d’unan (65 %) bien qu’ayant eu un travail stable (55,6 %), vivantavant leur admission dans un logement précaire (86 %).

Pour chaque entretien, seules ont été retenues, dans cetravail, les indications du principal trouble clinique et duprincipal trouble de la personnalité, établies selon les critères

du DSM-IV [1], classification à laquelle le clinicien a étéformé. Les données concernant les troubles psychosociaux etenvironnementaux (axe IV) ont été écartées du fait que « lademande d’hébergement » constitue 100 % des motifs d’en-tretien.

2.2. Recueil des informations

Nous présenterons tout d’abord les résultats relatifs auxtroubles cliniques (prévalence de chaque trouble) que nouscomparerons à trois sources issues de la littérature : étudemenée à Paris par V. Kovess et C. Mangin-Lazarus [10]auprès d’un public de personnes « sans domicile fixe » ; uneétude menée à Lille par V. Garcin et E. Riu [6] auprès d’unmême public d’usagers des services sociaux ; et enfin à desestimations que le DSM-IV [1] permet d’avancer pour cha-que catégorie de troubles de l’axe I, par addition des troublesqui les composent.

Si les deux premières estimations nous permettent d’envi-sager une éventuelle spécificitéde la population accueillie enCHRS, la troisième source (estimation de la population géné-rale américaine) a pour but de comparer les prévalencesobservées à la probabilitéde présenter tel ou tel trouble àunmoment donné de sa vie.

Nous envisagerons alors en quoi les troubles cliniquessur-représentés dans l’échantillon peuvent constituer un freinà la réinsertion.

Nous présenterons ensuite les résultats relatifs aux trou-bles de la personnalité (prévalence de chaque trouble) quenous comparerons aux estimations fournies par De Girolamoet Reich [5] pour la population générale. Cela nous permettrade comparer la prévalence des troubles de la personnalitéobservée dans notre échantillon à la population générale ;nous envisagerons alors en quoi les troubles sur-représentéspeuvent constituer un frein à la réinsertion.

Nous présenterons enfin les résultats relatifs à l’associa-tion des troubles cliniques et des troubles de la personnalitéafin de pouvoir mesurer, pour les liaisons significatives, lepoids de leurs interactions dans la difficulté de réinsertion,évaluée qualitativement par la demande d’admission dans lefoyer.

2.3. Traitement des données

Sur le plan du traitement des données, les comparaisonsavec la population générale et les populations d’exclus s’ef-fectueront selon la méthode du v2 (khi 2).

Pour ce qui concerne l’association entre les troubles men-taux et les troubles de la personnaliténous calculerons, selonles méthodes épidémiologiques classiques [17], la fractionétiologique évaluant l’effet combinéde ces deux troubles surles difficultés de réinsertion sociale que rencontre notre co-horte, puis nous mesurerons pour chaque liaison significativel’ interaction multiplicative entre le trouble clinique et letrouble de la personnalitéen fonction de la répartition obser-vée.

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3. Présentation des résultats

Les résultats relatifs aux prévalences des troubles clini-ques sont résumés dans le Tableau 1.

Les résultats relatifs aux prévalences des troubles de lapersonnalité sont présentés dans le Tableau 2.

Les résultats relatifs à l’association des troubles cliniqueset des troubles de la personnalité sont présentés dans leTableau 3.

4. Commentaires des résultats

4.1. Commentaires concernant les troubles cliniques

Les résultats précédents (Tableau 1) montrent que cettepopulation en demande de réinsertion sociale présente desprévalences des troubles cliniques différentes de celles ob-servées dans la population générale et dans la population« sans domicile fixe ».

Tableau 2Comparaisons de la prévalence des troubles de la personnalité

Troubles de la personnalité % observés en CHRS Estimations OMSPrévalence* 81,78 % 10 %Personnalitéantisociale* 18,52 % 4 %Personnalitéborderline* 13,21 % 4 %Personnalitédépendante* 10,41 % 1,50 %Personnalité évitante* 3,20 % 1 %Personnalitéhistrionique 3,30 % 2 %Personnaliténarcissique* 1,80 % 0,40 %Personnalitéobsessionnelle* 1,10 % 4 %Personnalitéparanoïaque 4,90 % 7 %Personnalitéschizoïde 4,90 % 5 %Personnalitéschizotypique 3,10 % 5 %

*Différences statistiquement significatives (p = 0,001).

Tableau 1Comparaisons de la prévalence des troubles cliniques

Troubles cliniques % observés en CHRS Estimations DSM-IV pourla population générale

V. Kovess etC. Mangin-Lazarus (1997)

V. Garcin et E. Riu (1997)

Troubles psychotiques 9,01 % *2,03 % *5,80 % 8,50 %Troubles de l’humeur 12,11 % *21,10 % *23,70 % *17 %Troubles liés àune substance 34,33 % *19,60 % *21,30 % *16 %Troubles du contrôle des impulsions 7,61 % *≈ 0 %Troubles anxieux 13,11 % *28 % *13,30 %Autres troubles cliniques 6,01 %Aucun trouble clinique 17,82 % *44,24 %Nombre de sujets 999 838 270

* Différences statistiquement significatives (p = 0,001).

Tableau 3Associations entre les troubles cliniques et les troubles de la personnalité

Troubles cliniques-troubles de la personnalité

Troublespsychotiques

Trouble del’humeur

Troublesliés àunesubstance

Troubles ducontrôle desimpulsions

Troubleanxieux

Autrestroublescliniques

Absence dediagnostic enaxe I

Total %

Antisociale 10 16 106* 27* 14* 4* 8* 185 18,52 %Borderline 6 22 70* 12 15 3 4* 132 13,21 %Dépendante 7 18 30 8 18 11* 12 104 10,41 %Évitante 3 2 12 2 4 4 5 32 3,20 %Histrionique 0 6 8 2 7 3 7 33 3,30 %Narcissique 0 6* 2* 4* 0 2 4 18 1,80 %Obsessionnelle 1 1 5 2 2 0 0 11 1,10 %Paranoïaque 11 4 22 4 0* 2 6 49 4,90 %Schizoïde 4 9 25* 4 6 0 1 49 4,90 %Schizotypique 12* 2 16* 0 0 0* 1* 31 3,10 %Troubles de la personnaliténon spécifiés

30* 17 43* 4* 27 20* 32 173 17,32 %

Absence de trouble de lapersonnalité

6* 18 4* 7* 38* 11 98* 182 18,22 %

Total 90 121 343 76 131 60 178 999% 9,01 % 12,11 % 34,33 % 7,61 % 13,11 % 6,01 % 17,82 % 100 %

Liaisons statistiquement significatives (p = 0,05).

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4.2. Comparaisons avec les estimations de la populationgénérale

Sur le plan global, les résultats montrent la très grandesouffrance sur le plan psychiatrique puisque 82,18 % de cettepopulation présentent des troubles cliniques.

Concernant les troubles de l’axe I, les résultats mettent enavant que notre échantillon présente, par rapport aux estima-tions américaines sur la population générale, une plus grandefréquence de troubles psychotiques, de troubles liés à unesubstance et de troubles du contrôle des impulsions.

Le fort taux (9,01 %) de sujets présentant un troublepsychotique pourrait s’expliquer, en partie, par le fait que ceCHRS travaille en partenariat avec le secteur psychiatriquedans le sens d’une aide à la réinsertion. Mais àune époque deréduction des lits, ce chiffre pose la question du devenir deces personnes « stabilisées » qui s’avèrent incapables, pourdes raisons psychologiques et économiques, de s’assumerd’une manière autonome et de se réinsérer.

Le fort taux (7,61 %) de personnes présentant un troubledu contrôle des impulsions peut également s’expliquer par lacomposition de cette catégorie qui comprend majoritaire-ment des personnes ayant été incarcérées suite à un troubleexplosif intermittent. Le fait qu’à leur sortie de prison nom-bre d’entre eux se retrouvent sans solution d’hébergementn’est pas sans relation avec les problèmes généraux de laréinsertion des détenus.

Pour ce qui concerne les troubles liés à une substance(principalement alcool, opiacés et benzodiazépines), les en-tretiens mettent en évidence deux cas de figure. Pour cer-tains, l’usage de la substance est la conséquence du troublesocial et pour d’autres elle en est la cause. Toutes catégoriesconfondues, ces troubles arrivent en seconde position (der-rière les troubles de la personnalité) des troubles mentauxdiagnostiqués dans cet échantillon. Sur le plan descriptif, unsujet sur trois présente un trouble lié àune substance.

En revanche, les résultats montrent une plus faible pré-sence des troubles de l’humeur et des troubles anxieux. Cesprévalences significativement inférieures aux estimations dela population générale sont à comprendre, comme le mon-trent parfois les entretiens, comme la difficulté àposer desactes d’ insertion (comme demander un entretien d’admissiondans un CHRS) lorsque la symptomatologie induit une perted’élan vital (trouble de l’humeur) ou une anxiété socialeinvalidante. Cette interprétation semblerait d’autant plusplausible au regard de la prévalence de ces deux troublescliniques publiés dans d’autres travaux portant sur la popula-tion en grande précarité.

4.3. Comparaisons avec deux études sur la populationSDF

Si nous nous intéressons aux comparaisons avec les autresétudes sur les « sans domicile fixe », nous voyons que notreéchantillon présente des différences significatives avec

l’étude de Kovess et Mangin-Lazarus [10], pour ce quiconcerne l’absence de trouble (17,82 % contre 44,24 %), cequi laisserait entendre que la population en demande deréinsertion sociale présente plus de troubles cliniques que lapopulation SDF dont elle tente de s’extraire en demandant àentrer dans un foyer. Cela impliquerait que pour une per-sonne sans domicile, la demande d’entrée dans un foyers’ inscrit dans le cadre d’une plus grande détresse psycholo-gique.

Pour ce qui concerne les troubles psychotiques, nousvoyons une différence significative (9,01 % contre 5,80 %)avec l’étude de V. Kovess et C. Mangin-Lazarus [10] tandisque notre échantillon présente une répartition équivalente(9,01 contre 8,50 %) àcelle observée àLille par Garcin et Riu[6]. La différence entre l’étude menée à Paris et celles me-nées à Lille et Marseille peut se comprendre du côté durecrutement. Ainsi, V. Kovess et C. Mangin-Lazarus avan-cent que 184 personnes (hommes et femmes confondus) surles 838 de l’étude (soit 21,96 %) évoluent en hébergementnon-provisoire alors que dans l’étude à Lille, 71,50 % (193sur 270) des sujets sont des hommes vivant en CHRS, soitune population comparable à celle de notre étude. Nous nepouvons interpréter ce constat que dans le sens d’une psy-chiatrisation du CHRS.

Pour ce qui concerne les troubles de l’humeur, les résultatsmontrent une différence significative entre notre échantillonet la population étudiée àParis (12,11 % contre 23,70 %). Lafaible différence (d’ailleurs non significative à 0,05) avecl’étude à Lille laisserait entendre que la population SDFprésentant des troubles de l’humeur demande moins àentreren CHRS, alors que ce dispositif figure une échelle supé-rieure dans l’ insertion. Certains symptômes des troubles del’humeur (notamment la perte d’élan vital) pourraient expli-quer ce phénomène.

Nous pouvons faire la même interprétation pour ce quiconcerne les troubles anxieux, dans la mesure où les résultatsne mettent pas en avant de différence significative entre notreéchantillon et la population SDF étudiée à Lille.

Mais la différence la plus importante entre notre étude etles travaux publiés par Kovess et Mangin-Lazarus et ceux deGarcin et Riu porte sur les troubles liés àune substance. Si ladifférence de répartition de ces troubles dans les deux étudesest significative, les résultats montrent tout de même unrapport du simple au double entre notre échantillon et l’étudemenée à Lille. La question se pose toutefois de savoir com-bien, parmi les personnes (34,33 %) qui ont recours à unesubstance dans notre échantillon, sont celles qui utilisent leseffets psychotropes des différents produits (alcool, opiacée,benzodiazépine) pour faire face àun état dépressif ou un étatanxieux. Faute de pouvoir évaluer ce fait, nous ne pouvonsapporter à ce jour aucune autre interprétation à la sur-représentation des troubles liés à une substance que celled’un biais dans la constitution de notre échantillon.

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4.4. Commentaires concernant les troublesde la personnalité

Sur le plan des troubles de la personnalité, les résultatsprécédents (Tableau 2) mettent en avant des prévalencesdifférentes des estimations relatives à la population générale.

Le fait que 81,78 % de notre échantillon présente untrouble de la personnalité illustre à lui seul le grand état dedétresse psychologique dans lequel se trouve cette popula-tion. Cela pourrait s’expliquer par la symptomatologie destroubles de la personnalité, notamment par les critères B(envahissement du trouble dans les situations sociales) et C(altération du fonctionnement social ou professionnel). Ilsemblerait donc que cette population présente des troublesqui entravent leur insertion sociale d’une façon durable.

La forte proportion des troubles de la personnalitépourraitalors s’expliquer par la sur-représentation de certains trou-bles de l’axe II au sein de cet échantillon. Ainsi, les troublesde la personnalité antisociale, borderline, dépendante, évi-tante et narcissique représentent à eux seuls 47,14 % destroubles de la personnalité, soit près des deux tiers de ladifférence observée entre notre échantillon et la populationgénérale. Il est à noter que parmi ces troubles de la person-nalitésur-représentés, certains comportent dans leur sympto-matologie des facteurs d’exclusion sociale.

Toutefois, si l’on regarde dans le détail les comparaisonsavec les estimations fournies par l’OMS [5] pour la popula-tion générale, on s’aperçoit que les troubles de la personna-lité histrionique, paranoïaque, schizoïde et schizotypique(ces trois derniers troubles constituant les personnalités dugroupe A) présentent une répartition équivalente au risque$ = 0,001 à celle de la population générale. Or, ce sontprincipalement les personnalités du groupe A qui présententle plus grand degréde détachement par rapport aux relationssociales et qui donc pourraient ressentir des difficultés dansleurs démarches de réinsertion. Toutefois, si l’on entend lademande d’entrée en CHRS comme un premier pas vers laréinsertion sociale, la sous-représentation des troubles de lapersonnalitédu groupe A devient alors plus compréhensible.

La sous-représentation des troubles de la personnalitéobsessionnelle pourrait quant àelle s’expliquer par le fait quecertains traits qui caractérisent cette personnalitécadrent malavec l’exclusion sociale. En effet, le DSM-IV [1] met enavant dans la personnalité obsessionnelle-compulsive despréoccupations pour l’ordre, le perfectionnisme et le contrôlemental et interpersonnel qui, si elles cadrent mal avec lecaractère imprévisible de la réalitéde la rue, ne devraient pasêtre, à priori, un frein à la réinsertion.

Le fort taux de troubles de la personnalité [1,15] laisseraitentendre qu’un dysfonctionnement en axe II serait facteur dedifficultédans l’ insertion sociale du fait de l’ inadaptation deces sujets aux situations sociales les plus courantes. Cetteinterprétation pourrait expliquer les deux tiers de la compo-sition de l’effectif.

Ainsi sur le plan clinique, la personnalité antisociale pré-sente pour caractéristique principale « un mode général de

mépris et de transgression des droits d’autrui » (DSM-IV,758), la personnalitéborderline « un mode général d’ instabi-lité dans les relations interpersonnelles » (DSM-IV, 763), lapersonnalité narcissique « un mode général de grandiosité,de besoin d’être admiré et de manque d’empathie » (DSM-IV, 772), la personnalité évitante « un mode général d’ inhi-bition sociale » (DSM-IV, 776), la personnalité dépendante« un besoin envahissant d’être pris en charge » (DSM-IV,779).

Rappelons que ces caractéristiques ne servent qu’à spéci-fier une catégorie de troubles qui, comme nous l’avons envi-sagéplus haut, dans sa symptomatologie (critères A, B et C)présente des facteurs de difficulté face àdes situations socia-les. Les différents styles selon lesquels cette difficulté semanifeste, tels que le mépris de l’autre, l’ inhibition sociale,l’ instabilité relationnelle, la mégalomanie, ou les demandesd’aide, viendraient d’autant plus renforcer cette difficulté às’adapter à « la société » que, dans notre échantillon, lestroubles de la personnalité sont majoritairement associés àdes troubles cliniques qui entraînent eux-mêmes une diffi-culté dans l’établissement d’une dynamique de réinsertionsociale.

4.5. Association des troubles mentaux étudiés dans cetravail

Cette population apparaissant différente dans sa composi-tion de la population générale et de la population « sansdomicile fixe », il apparaît alors intéressant d’évaluer l’ in-fluence de l’association des troubles cliniques et des troublesde la personnalitésur les difficultés de réinsertion sociale quiprésident à la demande d’admission en CHRS.

Les résultats mettent en avant une liaison entre les troublescliniques et les troubles de la personnalité. Cette liaison est àcomprendre comme un effet cumuléde la présence des trou-bles de l’axe I et des troubles de l’axe II sur la difficulté àseréinsérer. Ce cumul peut se comprendre soit comme l’addi-tion des effets, soit comme une multiplication des effetsnégatifs. Les résultats nous invitent à suivre ce dernier mo-dèle (modèle multiplicatif) que nous présenterons (Tableau4). À partir de la répartition que nous fournit le Tableau 3,nous voyons également que la présence simultanée d’untrouble de l’axe I et d’un trouble de l’axe II multiplie par10,75 le risque de difficultéd’ insertion sociale. Il nous faudracalculer, pour chaque interaction positive dans le Tableau 4,le rapport des cotes (RC) et la fraction étiologique (FE). Cedernier point sera présenté dans le Tableau 5.

Il est à noter que la présence d’un seul trouble (qu’ il soitde l’axe I ou de l’axe II) ne semble pas àelle seule augmenterle risque relatif. Si nous nous centrons sur les liaisons que lesv2 ont mises en évidence, le Tableau 3 met également enavant plusieurs liaisons significatives au risque $ = 0,05 entrecertains troubles de l’axe clinique et certains troubles de lapersonnalité qu’ il nous faut interpréter en termes de cumuldans la difficulté às’ insérer et d’autres qu’ il nous faut com-prendre comme des interactions antagonistes (interactionsnégatives). Pour des raisons de clarté, les calculs du poids de

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l’ interaction entre les troubles de la personnalité et les trou-bles cliniques sont présentés dans le Tableau 4.

La liaison entre l’absence de trouble clinique et l’absencede trouble de la personnaliténous permet de garder à l’espritque dans cet échantillon, seuls 9,8 % des sujets n’ont aumoment de l’entretien ni trouble clinique, ni trouble de lapersonnalité. Les difficultés de réinsertion pour cespersonnes-là ne devraient donc pas, sauf décompensationtoujours possible, être liées à un trouble mental. Leurs diffi-cultés à se réinsérer devraient donc tenir, au risque 0,05 %,uniquement à un contexte social.

Le Tableau 5 nous permet de présenter, pour chacune desinteractions positives, le rapport des cotes (RC) et la fractionétiologique (FE).

5. Discussion

Une question se pose relative au dernier résultat com-menté. Quel est le devenir de ces 9,8 % des personnes quin’ont aucun trouble mental ? Notre étude ne permet pas d’yrépondre.

Tableau 4Mesures des interactions entre les troubles cliniques et les troubles de la personnalité

Liaisons significatives entre axe I et axe II v2 interaction multiplicativeEnsemble des troubles de la personnalitéversus ensemble des troubles cliniques 486,15 positive 10,748Troubles de la personnalitéantisociale versus troubles liés àune substance 53,1 positive 3,267Troubles de la personnalitéantisociale versus troubles du contrôle des impulsions 15,77 positive 2,668Troubles de la personnalitéantisociale versus troubles anxieux 6,13 négative 0,486Troubles de la personnalitéantisociale versus autres troubles cliniques 5,94 négative 0,299Troubles de la personnalitéantisociale versus absence de trouble clinique 28,23 négative 0,171Troubles de la personnalitéborderline versus troubles liés àune substance 23,58 positive 2,457Troubles de la personnalitéborderline versus absence de trouble clinique 22,71 Négative 0,124Troubles de la personnalitédépendante versus autres troubles cliniques 4,29 positive 2,042Troubles de la personnaliténarcissique versus troubles de l’humeur 6,40 positive 3,765Troubles de la personnaliténarcissique versus troubles liés àune substance 4,38 Négative 0,235Troubles de la personnaliténarcissique versus troubles du contrôle des impulsions 5,57 positive 3,607Troubles de la personnalitéparanoïaque versus troubles anxieux 7,78 Négative 0,000Troubles de la personnalitéschizoïde versus troubles liés àune substance 6,36 positive 2,070Troubles de la personnalitéschizotypique versus troubles psychotiques 34,43 positive 7,206Troubles de la personnalitéschizotypique versus troubles liés àune substance 6,36 positive 2,091Troubles de la personnalitéschizotypique versus autres troubles cliniques 11,44 Négative 0,000Troubles de la personnalitéschizotypique versus absence de trouble clinique 4,65 Négative 0,149Troubles de la personnaliténon spécifiés versus troubles psychotiques 17,72 positive 2,678Troubles de la personnaliténon spécifiés versus troubles liés àune substance 8,34 Négative 0,580Troubles de la personnaliténon spécifiés versus troubles du contrôle des impulsions 8,35 Négative 0,248Troubles de la personnaliténon spécifiés versus autres troubles cliniques 34,16 positive 2,569Absence de trouble de la personnalitéversus troubles psychotiques 8,86 Négative 0,297Absence de trouble de la personnalitéversus troubles liés àune substance 101,94 Négative 0,032Absence de trouble de la personnalitéversus troubles du contrôle des impulsions 4,48 Négative 0,611Absence de trouble de la personnalitéversus troubles anxieux 9,76 positive 2,054Absence de trouble de la personnalitéversus absence de trouble clinique 203,36 positive 10,748

Tableau 5Mesures du rapport des cotes et de la fraction étiologique

Liaisons significatives entre axe I et axe II RC FEEnsemble des troubles de la personnalitéversus ensemble des troubles cliniques 10,75 90,70 %Troubles de la personnalitéantisociale versus troubles liés àune substance 3,23 69,39 %Troubles de la personnalitéantisociale versus troubles du contrôle des impulsions 2,66 62,52 %Troubles de la personnalitéborderline versus troubles liés àune substance 2,46 59,29 %Troubles de la personnalitédépendante versus autres troubles cliniques 2,04 51,03 %Troubles de la personnaliténarcissique versus troubles de l’humeur 3,77 73,44 %Troubles de la personnaliténarcissique versus troubles du contrôle des impulsions 3,61 72,28 %Troubles de la personnalitéschizoïde versus troubles liés àune substance 2 ,07 51,70 %Troubles de la personnalitéschizotypique versus troubles psychotiques 7,21 86,12 %Troubles de la personnalitéschizotypique versus troubles liés àune substance 2,09 52,17 %Troubles de la personnaliténon spécifiés versus troubles psychotiques 2,67 62,66 %Troubles de la personnaliténon spécifiés versus autres troubles cliniques 2,57 61,07 %Absence de trouble de la personnalitéversus troubles anxieux 2,05 51,32 %Absence de trouble de la personnalitéversus absence de trouble clinique 10,75 90,70 %

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Page 7: Étude de l’influence des troubles mentaux sur les difficultés de réinsertion sociale

De même, une telle étude en cohorte transversale ne per-met pas de travailler la question de l’étiologie de l’exclusionsociale. Le fait d’avoir mis en évidence l’ influence des fac-teurs psychopathologiques dans la difficultéde ces personnesà se réinsérer ne fait que renforcer la question de l’étiologiede l’exclusion sociale. Dans les faits, la difficulté psycholo-gique s’ajoute à la difficulté que rencontrent les personnes àsortir de la crise, à profiter de « la croissance » et de « lareprise » dont parlent les estimations économiques. « S’ensortir » devient alors une tâche relativement compliquée àeffectuer sans aucune aide.

Dans ce travail, nous avons mesuré l’association entre lestroubles de l’axe I et les troubles de l’axe II ; il seraitintéressant par la suite de pouvoir envisager des mesuresrelatives aux troubles psychosociaux et environnementaux(axe IV) et de tenir compte des effets du fonctionnementgénéral de la personne (axe V). Dans notre échantillon,100 % des sujets présentent en axe IV à la fois une difficultéliée aux conditions d’hébergement et une demande d’aidedans leur réinsertion sociale. Mais ce trouble psychosocial nedétermine-t-il pas un profil psychopathologique spécifique àcette population ? Les résultats montrent en effet certainesdifférences avec les études menées sur le public SDF « toutvenant », tant sur le plan de l’axe I que sur celui de l’axe II. Lefait que 17,82 % de notre échantillon, contre 44,24 % dansl’étude de Kovess et Mangin-Lazarus, ne présentent aucuntrouble clinique est à ce titre significatif. Il n’est pas sûr quecette différence soit uniquement attribuable àdes différencesméthodologiques. Même si la sensibilitéet la spécificitéd’unquestionnaire et d’un entretien clinique peuvent apparaîtredifférentes, nos résultats sont dans l’ensemble plus prochesde l’étude de Garcin et Riu menée sur un public majoritaire-ment composé d’une population homogène à la nôtre.

6. Conclusion

Cette étude met en évidence l’existence d’un effet destroubles mentaux (axe I et axe II) sur la difficulté qu’éprou-vent les sujets de notre échantillon à se réinsérer sans l’aidedu secteur social. Dans le détail, nous avons vu que tous lestroubles n’avaient pas des prévalences supérieures à cellesestimées dans la population générale. Ceux qui sont signifi-cativement supérieurs à la population générale (psychose,troubles liés àune substance, troubles du contrôle des impul-sions, troubles de la personnalité antisociale, borderline, dé-pendante, évitante et narcissique) comportent dans leur

symptomatologie des facteurs de difficultés d’ insertion so-ciale que leurs associations viennent multiplier.

Enfin, ce travail nous permet d’être attentif à un élémentclinique bien particulier : ce n’est pas tant la présence d’untrouble clinique ou d’un trouble de la personnalitéqui influesur la difficulté à la réinsertion sociale que leurs présencessimultanées. Ainsi, le travail de réinsertion peut être facilitépar une prise en charge du trouble clinique ou du trouble de lapersonnalité visant à la résorption du trouble.

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