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Mise au point Rythmologie Evolution de la prise en charge de la fibrillation atriale et nouvelles perspectives L a fibrillation atriale (FA) est l’arythmie cardiaque la plus fréquente. Elle touche environ 1 % de la population générale et jusqu’à 8 % des sujets de plus de 80 ans. Elle est responsable d’une diminution de la qualité de vie, d’une augmentation de la morbidité et d’une majoration du risque de décès, surtout en présence de comorbidités. La FA est caractérisée par une activité électrique très rapide et désordonnée, une perte de la fonction mécanique de l’oreillette et le risque de formation de thrombus. L’activité ventriculaire rapide et irrégulière en résultant peut être responsable d’une insuffisance cardiaque. Elle peut survenir sur un cœur structurellement sain mais affecte le plus souvent un patient pré- sentant une hypertension artérielle, une pathologie myocardique ou un diabète. De nouvelles avancées se sont fai- tes jour tant dans le domaine des traitements antiarythmiques et antithrombotiques que dans celui des thérapeutiques ablatives justi- fiant une mise au point et une éva- luation des perspectives dans ce domaine très évolutif qu’est la FA. Nouveautés dans le traitement antithrombotique >>> Les antivitamines K (AVK) ont un rôle majeur dans la prévention des RÉSUMÉ : La fibrillation atriale est l’arythmie cardiaque la plus fréquente. Elle touche environ 1 % de la population générale et jusqu’à 8 % des sujets de plus de 80 ans. Elle est responsable d’une diminution de la qualité de vie, d’une augmentation de la morbidité et d’une majoration du risque de décès surtout en présence de comorbidités. Elle peut être responsable de complications thrombo-emboliques ou hémodynamiques graves. Les thérapeutiques interventionnelles sont venues bouleverser la prise en charge thérapeutique depuis plus de 10 ans. De nouvelles molécules antiarythmiques et antithrombotiques sont sur le point d’être mises sur le marché en France. Cet article est une mise au point sur les nouvelles avancées qui se sont faites jour ces dernières années tant dans le domaine des traitements antiarythmiques et antithrombotiques que dans celui des thérapeutiques ablatives. A. LEENHARDT , A. MESSALI, G. MOUBARAK, I. DENJOY, F. EXTRAMIANA Service de Cardiologie et Centre de Référence des Maladies Cardiaques Héréditaires, Hôpital Lariboisière, PARIS. La fibrillation atriale : données démographiques La fibrillation atriale n’est pas seulement un trouble du rythme Evolution de la prise en charge de la fibrillation atriale et nouvelles perspectives

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Evolution de la prise en chargede la fibrillation atrialeet nouvelles perspectives

La fibrillation atriale (FA) estl’arythmie cardiaque la plusfréquente. Elle touche environ

1 % de la population générale etjusqu’à 8 % des sujets de plus de80 ans. Elle est responsable d’unediminution de la qualité de vie, d’uneaugmentation de la morbidité et d’unemajoration du risque de décès, surtouten présence de comorbidités.

La FA est caractérisée par une activitéélectrique très rapide et désordonnée,une perte de la fonction mécanique del’oreillette et le risque de formation dethrombus. L’activité ventriculairerapide et irrégulière en résultant peutêtre responsable d’une insuffisancecardiaque. Elle peut survenir sur uncœur structurellement sain mais

affecte le plus souvent un patient pré-sentant une hypertension artérielle,une pathologie myocardique ou undiabète.

De nouvelles avancées se sont fai-tes jour tant dans le domaine destraitements antiarythmiques etantithrombotiques que dans celuides thérapeutiques ablatives justi-fiant une mise au point et une éva-luation des perspectives dans cedomaine très évolutif qu’est la FA.

Nouveautés dans le traitementantithrombotique

>>> Les antivitamines K (AVK) ont unrôle majeur dans la prévention des

RÉSUMÉ : La fibrillation atriale est l’arythmie cardiaque la plus fréquente. Elle toucheenviron 1 % de la population générale et jusqu’à 8 % des sujets de plus de 80 ans. Elle estresponsable d’une diminution de la qualité de vie, d’une augmentation de la morbiditéet d’une majoration du risque de décès surtout en présence de comorbidités. Elle peut êtreresponsable de complications thrombo-emboliques ou hémodynamiques graves.Les thérapeutiques interventionnelles sont venues bouleverser la prise en chargethérapeutique depuis plus de 10 ans. De nouvelles molécules antiarythmiques etantithrombotiques sont sur le point d’être mises sur le marché en France.Cet article est une mise au point sur les nouvelles avancées qui se sont faites jour cesdernières années tant dans le domaine des traitements antiarythmiques etantithrombotiques que dans celui des thérapeutiques ablatives.

➞ A. LEENHARDT, A. MESSALI,G. MOUBARAK, I. DENJOY,F. EXTRAMIANAService de Cardiologieet Centre de Référence des MaladiesCardiaques Héréditaires,Hôpital Lariboisière, PARIS.

✗ La fibrillation atriale : données démographiques

✗ La fibrillation atriale n’est pas seulement un trouble du rythme

� Evolution de la prise en charge de la fibrillation atriale et nouvelles perspectives

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complications thrombo-emboliqueschez les patients à risque.

Cette notion a été parfaitement confir-mée par les études ACTIVE, réaliséeschez des patients porteurs d’une FA età risque thrombo-embolique (scoreCHADS2 ≥ 1), qui ont montré unesupériorité des AVK sur l’associationaspirine-clopidogrel (Active W) avecune réduction de 42 % des accidentsvasculaires cérébraux (AVC), et unesupériorité de l’association aspirine-clopidogrel sur l’aspirine seule chezles patients ne pouvant prendre unAVK (Active A) avec une réduction de28 % des AVC [1].

>>> Une avancée majeure dans ledomaine de la prévention thrombo-embolique dans la FA est apparue avecun nouvel inhibiteur direct de lathrombine, le dabigatran etexilate, quia montré une non-infériorité, voireune supériorité, sur la warfarine avecune réduction significative des AVCemboliques et hémorragiques et unebaisse significative des hémorragiesdans l’étude RELY (Randomized Eva-luation of Long term AnticoagulantTherapy). RELY est un essai de non-infériorité ayant inclus 18 113patients, recrutés dans 44 pays dans lemonde [2]. Le dabigatran, à deux poso-logies 110 et 150 mg deux fois par jour,a été comparé avec la warfarine ajustéeà l’INR et administrée en ouvert. Lescaractéristiques des patients sont équi-librées dans les trois groupes avec unscore CHADS2 moyen de 2,1.

Le critère primaire était la survenued’une embolie systémique ou d’unaccident vasculaire ischémique ethémorragique. Le taux de survenue ducritère primaire, exprimé en pourcen-tage annuel, est de 1,11 % avec ledabigatran 300 mg/j, de 1,53 % avec ledabigatran 220 mg/j contre 1,69 %avec la warfarine. Le dabigatran300 mg/j réduit de 34 % (p < 0,001) lerisque d’AVC et d’embolie systémique

chez les patients présentant une FAcomparés à des patients bien contrô-lés sous warfarine. Il existe une non-infériorité des deux posologies, laposologie de 300 mg/j atteignant leseuil de la supériorité par rapport à lawarfarine.

Il existe un bénéfice du dabigatran surles AVC hémorragiques, avec un tauxsignificativement inférieur d’événe-ments comparativement à la warfarine.Le dabigatran réduit respectivement de26 % et de 31 % le risque relatif d’AVChémorragiques avec les dosages de 150et 110 mg deux fois par jour comparati-vement à la warfarine. On note aussiune diminution de la mortalité vascu-laire avec le dabigatran 300 mg/j(réduction du risque relatif de 15 %,p = 0,04). En termes de tolérance, ledabigatran 220 mg réduit de 22 % lerisque hémorragique par rapport à lawarfarine sur l’ensemble des saigne-ments. Pour les hémorragies majeuresmenaçant le pronostic vital, la diffé-rence est de 32 % en faveur du dabiga-tran 220 mg, elle est de 29 % pour ledabigatran 300 mg. Les hémorragiesgastro-intestinales étaient plus fré-quentes avec le dabigatran, mais sansatteindre la limite de significativité.

Les infarctus du myocarde étaient unpeu plus fréquents sous dabigatran(0,7 contre 0,5 %), sans qu’une expli-cation définitive puisse être avancée.Sur le plan des effets indésirables, lesdyspepsies ont concerné 11,3 % despatients sous dabigatran 300 mg et11,8 % des patients sous dabigatran220 mg comparativement à 5,8 % despatients sous warfarine. Il sembleque la présence d’acide tartriquepuisse expliquer cet effet indésirable.La surveillance des transaminasesn’a pas montré de modificationssignificatives.

En comparant l’efficacité et la tolé-rance des deux dosages de dabigatran,on constate un gain de 27 % sur les

AVC et les embolies avec la forte doseau prix d’un surcroît d’hémorragiesmajeures de 16 %. Un bénéfice clini-que net apparaît avec les deux dosagesavec un avantage significatif de laposologie de 300 mg sur le risqueembolique et un gain substantiel du220 mg sur le risque hémorragique.

Malgré de nombreuses questions surles modalités d’utilisation, il apparaîtque le dabigatran constituera certaine-ment un progrès important dans laprise en charge de la FA.

>>> On ne peut pas en dire autant desdispositifs endocavitaires tels leWatchman, destinés à occlure l’auri-cule gauche, afin de prévenir le risquethrombo-embolique et ainsi potentiel-lement de remplacer un traitementAVK. L’étude PROSPECT AF [3] amontré que ce dispositif entraînaitmoins de complications hémorragi-ques que la warfarine et une non-infé-riorité par rapport à la warfarine en cequi concerne les accidents vasculairestoutes causes et la mortalité toutescauses. Des questions restent néan-moins en suspens liées à la méthodo-logie inhabituelle (étude de non-infé-riorité comparant un médicament etune prothèse implantée) utilisée danscette étude, l’utilisation d’antiagré-gants plaquettaires, le choix depatients à plus faible risque d’AVC(score CHADS2 1 ou 2) et les compli-cations secondaires à l’implantationde la prothèse. La FDA a récemmentdemandé à la société Atritech,constructeur du Watchman, une étudecomplémentaire avant d’autoriser sonutilisation. Ainsi, on ne peut guèreespérer d’information définitive sur laplace de ces procédés dans l’arsenalthérapeutique avant 1 ou 2 ans.

Les antiarythmiques

La question de la FA comme un mar-queur indépendant de risque cardio-

Mise au pointRythmologie

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vasculaire est très délicate et noncomplètement tranchée. Les donnéesde la littérature laissent penser que laFA isolée sur cœur sain, entité assezrare en pratique sauf chez les patientsjeunes, ne constitue pas un facteur derisque indépendant de mortalité. Enrevanche, lorsqu’elle est associée à sescomorbidités habituelles (HTA, car-diopathie, insuffisance cardiaque…),la FA constitue un facteur aggravantdu pronostic tant en termes de morbi-dité que de mortalité. Les antiarythmi-ques actuels peuvent-ils modifier cetétat de fait ? Ils ont une efficacitémodérée en termes de maintien durythme sinusal sur le long terme etn’ont pas montré de réduction de lamortalité des patients en FA [4].

>>> Dans le cadre du débat sur la stra-tégie de contrôle du rythme atrial ou dela fréquence ventriculaire, l’étude AFCHF [5] était très attendue après lesrésultats d’AFFIRM. Le but de cetteétude était de déterminer si le rétablis-sement et le maintien du rythme sinu-sal permettaient de diminuer la morta-lité d’origine cardiovasculaire chez despatients insuffisants cardiaques (FEVG< 35 %) présentant une FA. AF CHF estune étude multicentrique randomiséeayant comparé le contrôle du rythmeatrial au contrôle de la fréquence ven-triculaire chez 1376 patients (682 dansle groupe contrôle du rythme atrial et694 dans le groupe contrôle du rythmeventriculaire) suivis en moyenne37 mois. Aucune différence significa-tive n’a été mise en évidence favorisantl’une ou l’autre stratégie dans les diffé-rents sous-groupes.

Les conclusions tirées de cette étudepar ses auteurs sont que, chez lespatients en insuffisance cardiaque,présentant une FA, la stratégie decontrôle du rythme atrial ne réduitpas l’incidence de décès d’originecardiovasculaire comparée à la stra-tégie de contrôle de la fréquence ven-triculaire.

Néanmoins, ce résultat ne signifie pasque le maintien en rythme sinusaln’est pas une bonne stratégie pour lespatients en insuffisance cardiaque. Ilfaut, en effet, se souvenir que le main-tien du rythme sinusal n’est assurédans cette étude que grâce à des anti-arythmiques (essentiellement l’amio-darone) et que des facteurs confon-dants tels qu’une efficacitéthérapeutique limitée ou une inci-dence élevée d’effets secondaires ontpu avoir une influence importante surle résultat final.

>>> C’est pourquoi les travaux sur ladronédarone ont soulevé beaucoupd’intérêt et ont renvoyé en arrièreplan ce “débat réduire ou ralentir”.C’est particulièrement le cas de l’étudeATHENA [6], publiée en février 2009,qui a montré, pour la première fois,l’efficacité d’un antiarythmique pourdiminuer la mortalité cardiovasculairedans la FA. Il s’agit d’une étude multi-centrique randomisée sur un nombreimportant de patients (4628) porteursd’une FA et de facteurs de risque demortalité. En effet, tous devaient avoirau moins l’un des facteurs de risquesuivants : âge > 70 ans, HTA, diabète,AVC, AIT, antécédent thrombo-embo-lique, FEVG < 40 %, diamètre oreil-lette gauche > 50 mm. Ils pouvaient nepas avoir de facteurs de risque en casd’âge > 75 ans. Les patients ont été ran-domisés entre dronédarone 400 mgdeux fois par jour et placebo.

Le critère primaire de jugement com-prenait une première hospitalisationpour un événement cardiovasculaireou le décès. Les critères secondairesétaient les décès toutes causes, lesdécès de cause cardiovasculaire et leshospitalisations pour un événementcardiovasculaire.

Le suivi moyen a été de 21 ± 5 mois, ladronédarone étant stoppée prématu-rément chez 696 patients (30,2 %) etle placebo chez 716 patients (30,8 %)

le plus souvent en raison d’effetssecondaires.

Le critère primaire a été atteint chez734 patients (31,9 %) dans le groupedronédarone et chez 917 patients(39,4 %) dans le groupe placebo avecune réduction significative de 24 %des hospitalisations pour un événe-ment cardiovasculaire ou des décèssous dronédarone (p < 0,001). La mor-talité totale n’était pas différente entreles deux groupes : 116 (5,0 %) dans legroupe dronédarone et 139 (6,0 %)dans le groupe placebo (HR : 0,84 ;IC 95 % : 0,66-1,08 ; p = 0,18). Parcontre, la mortalité cardiovasculaire aété significativement inférieure dansle groupe dronédarone (2,7 %) par rap-port au groupe placebo (3,9 %) (HR:0,71 ; IC 95 %: 0,51-0,98 ; p = 0,03), enraison essentiellement d’une réduc-tion de la mortalité rythmique sousdronédarone. En ce qui concerne leseffets secondaires, les incidences de

POINTS FORTS

Les antivitamines K ont un rôlemajeur dans la prévention descomplications thrombo-emboliques chez les patients àrisque. Des molécules nouvellessont susceptibles de bouleversertrès prochainement les schémasthérapeutiques actuels.

Les traitementsantiarythmiques actuels sontd’efficacité modérée en termesde maintien du rythme sinusalsur le long terme et n’ont pasmontré de réduction de lamortalité des patients en FA. Lesrésultats obtenus avec ladronédarone font envisager denouvelles perspectives entermes de gestion du traitementantiarythmique, en dehors del’insuffisance cardiaque.

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bradycardie, les allongement de QT,les troubles digestifs et les élévationsde la créatinine plasmatique étaientsupérieures dans le groupe dronéda-rone par rapport au placebo alors quel’incidence d’effets secondaires thy-roïdiens et pulmonaires n’était pas dif-férente entre les deux groupes, témoi-gnant d’une faible toxicité cardiaque etextra-cardiaque de cette molécule.

>>> L’étude ANDROMEDA [7],publiée quelques mois plus tôt, com-parait dronédarone et placebo chezdes patients hospitalisés pour insuffi-sance cardiaque (stades III et IV de laNYHA), avec une altération marquéede la fonction systolique (FEVG< 35 %). Cette étude a montré une sur-mortalité dans le groupe dronédaroneaprès un suivi médian de 2 mois :25 patients dans le groupe dronéda-rone (8,1 %) et 12 patients dans legroupe placebo (3,8 %) (p = 0,03).Cette surmortalité a été rapportéepour l’essentiel à une aggravation del’insuffisance cardiaque : 10 décès

dans le bras dronédarone versus 2dans le bras placebo. Cette étude a eupour conséquence la contre-indica-tion de l’utilisation de la dronéda-rone en cas de dysfonction systoliquemarquée ou chez des patients symp-tomatiques sévères.

L’arrivée de la dronédarone ouvre doncde nouvelles perspectives thérapeuti-ques avec à la fois une action sur lerythme et la fréquence permettant uneapproche différente dès la primo-pres-cription chez des patients ayant unecardiopathie sans dysfonction ventri-culaire gauche sévère et peut-être aussichez des patients à cœur sain malgré lemanque de données scientifiquesobjectives chez ces derniers.

Les méthodesinterventionnelles

L’ablation de la FA constitue une thé-rapeutique dont l’utilité n’est plus àdémontrer, même si les indicationsrestent encore incomplètement préci-sées dans les formes persistantes etpermanentes. Sa place se situe claire-ment dans des formes symptomati-ques et résistantes à au moins un trai-tement antiarythmique loyal,c’est-à-dire selon les recommanda-tions actuelles de l’ESC/AHA/ACC [8]en deuxième intention.

>>> Parmi les travaux prospectifs réa-lisés dans ce domaine, l’étude A4 [9]est venue compléter les premières étu-des prospectives, randomisées etcontrôlées, comparant deux stratégiesthérapeutiques : ablation ou antiaryth-miques dans la FA paroxystique résis-tante à au moins un traitement anti-arythmique. L’objectif principal étaitl’absence de récidive de FA détectéeentre les mois 4 et 12 après l’inclusion(épisode de FA documenté ou rapportépar le patient durant au moins 3 minu-tes). Un total de 112 patients (18 fem-mes [16 %]; âge moyen 51,1 ± 11,1 ans)

a été inclus, randomisé vers l’ablationou un “nouveau” traitement antiaryth-mique. Après 1 an de suivi, 13 des55 patients (23 %) et 46 des 52 patients(89 %) du groupe antiarythmique et dugroupe ablation respectivementn’avaient pas présenté de récidives deFA (p < 0,0001). Dans le groupe abla-tion, le nombre moyen de procéduresétait de 1,8 ± 0,8. Les paramètres dequalité de vie, de capacité d’exercice etde symptômes étaient améliorés dansle groupe ablation comparativement augroupe antiarythmique.

Cette étude démontre donc quel’ablation par cathéter de la FAparoxystique récidivante entraîne unmeilleur contrôle du rythme sinusal,une amélioration des symptômes, dela qualité de vie et de la capacitéd’exercice comparé à de nouveauxessais de traitements antiarythmi-ques. Cette étude confirme les don-nées d’études antérieures sur despatients relativement jeunes avec destechniques ablatives pratiquées pardes équipes très entraînées et avec defréquentes reprises d’ablation, lamédiane étant à 2.

Néanmoins, ces études sur de petitesséries avec un faible recul ne permettentpas de conclure que l’ablation est supé-rieure au traitement antiarythmique.

Ces réserves sont levées par la méta-analyse de Calkins et al. [10] publiéeen 2009 qui met en évidence un tauxde succès de l’ablation d’environ71 % après plusieurs procédures, àcomparer avec 52 % sous antiarythmi-ques, avec un taux de complicationsplus élevé pour ces derniers maismoins sévères que pour l’ablation.Avec toutes les réserves liées à ce typed’étude, le registre internationalpublié récemment par R. Cappato etal. [11] montre une efficacité de 80 %après 1,3 procédure (20825 procédu-res chez 16309 patients) avec un tauxde complications de 4,5 %.

Mise au pointRythmologie

POINTS FORTS

L’ablation de la FA constitue unethérapeutique dont l’utilité n’estplus à démontrer dans desformes paroxystiques etpersistantes, symptomatiques etrésistantes à au moins untraitement antiarythmiqueloyal, c’est-à-dire selon lesrecommandations actuelles endeuxième intention.

La stratégie thérapeutique doitêtre adaptée à chaque patient,tenant compte de son histoire,ses antécédents, sescomorbidités, ses objectifsfonctionnels sur la based’informations objectives etcomplètes.

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Les questions actuellement non réso-lues concernent l’effet de l’ablationsur la mortalité, l’incidence des acci-dents thrombo-emboliques et la possi-bilité de proposer l’ablation commetraitement de première intention. Surce dernier point, l’étude CABANAdevant inclure 3000 patients dans lemonde devrait permettre de répondreà cette question dans les 2 à 3 ans.

Perspectives pratiques

Durant ces dernières années se sontproduits de profonds changementsdans la stratégie de prise en charge dela FA avec l’arrivée de l’ablation, l’im-portance de la prise en compte descomorbidités et actuellement de nou-veaux antiarythmiques et antithrom-botiques. A l’instar du développe-ment durable qui est très en vogue, onpeut parler d’une stratégie plus pro-che du patient, plus adaptée à sessymptômes, aux risques encourusavec les méthodes ablatives ou lestraitements médicamenteux.

L’introduction de la notion d’amélio-ration du pronostic cardiovasculaireest une petite révolution dans lemonde du traitement antiarythmique.

Tout cela contribue à rechercher unestratégie adaptée à chaque patientaprès une analyse minutieuse et per-

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L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflit d’in-térêt concernant les données publiées danscet article.

sonnalisée de sa situation actuelle etpassée, de sa demande sur le planfonctionnel et fonction également deson pronostic global. Cette approchenécessite du temps, de l’expérience etparfois un certain recul par rapportaux recommandations qui sont certesimportantes à prendre en compte maisqui ne constituent pas des règlesintangibles.

Les évolutions thérapeutiques sontrapides et les recommandations inévi-tablement en retard de sorte que desadaptations sont parfois nécessairespour autant que le prescripteur puisseles argumenter et les expliquer objecti-vement et complètement à son patient.

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