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L E F R A N C E F fiche technique France - 1959 - 1h27 Réalisateur : Jean-Luc Godard Scénario : François Truffaut et Jean-Luc Godard Musique : Martial Solal Interprètes : Jean-Paul Belmondo (Michel Poiccard) Jean Seberg (Patricia Franchini) Van Doude (le journaliste) A bout de souffle de Jean-Luc Godard FICHE FILM Résumé Michel Poiccard, ancien stewart d’Air France devenu marginal, vole une voiture américaine sur le vieux port à Marseille. Il part rejoindre son amie américaine, Patricia Franchini, à Paris. Sur la Nationale 7, il tue un motard et s’enfuit. Arrivé dans la capitale, il retrouve Patricia, vendeuse de journaux sur les Champs-Elysées. La police le traque. Critique De tous les films de la "nouvelle vague" celui-ci est le plus féroce, le plus intransi- geant, celui où la révolte et l’irrévérence sonnent le plus juste. Le héros de l’histoire est un voyou, trafiquant sans envergure de voitures... Encore une histoire crapuleuse, dira-t-on. Oui, mais le réalisme, ici, n’est pas artificiel, ni le sordide gratuit. Le héros d’A bout de souffle n’est pas un héros du crime. C’est un gosse perdu dont nous devinons qu’il a un coeur, une âme, toute une épaisseur humaine qui nous le rend proche et même sympathique. Sa folie, sa brutalité, son cynisme, ses brusques élans 1 Jean - Paul Belmondo et Jean Seberg

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L E F R A N C E

Ffiche technique

France - 1959 - 1h27

Réalisateur :Jean-Luc Godard

Scénario : François Truffaut etJean-Luc Godard

Musique :Martial Solal

Interprètes :Jean-Paul Belmondo(Michel Poiccard)

Jean Seberg(Patricia Franchini)

Van Doude (le journaliste)

A bout de souffle

de Jean-Luc GodardFICHE FILM

Résumé

Michel Poiccard, ancien stewart d’AirFrance devenu marginal, vole une voitureaméricaine sur le vieux port à Marseille.Il part rejoindre son amie américaine,Patricia Franchini, à Paris. Sur la Nationale7, il tue un motard et s’enfuit. Arrivé dansla capitale, il retrouve Patricia, vendeusede journaux sur les Champs-Elysées. Lapolice le traque.

Critique

De tous les films de la "nouvelle vague"celui-ci est le plus féroce, le plus intransi-geant, celui où la révolte et l’irrévérencesonnent le plus juste. Le héros de l’histoireest un voyou, trafiquant sans envergure devoitures... Encore une histoire crapuleuse,dira-t-on. Oui, mais le réalisme, ici, n’estpas artificiel, ni le sordide gratuit. Le hérosd’A bout de souffle n’est pas un héros ducrime. C’est un gosse perdu dont nousdevinons qu’il a un coeur, une âme, touteune épaisseur humaine qui nous le rendproche et même sympathique. Sa folie, sabrutalité, son cynisme, ses brusques élans

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Jean - Paul Belmondo et Jean Seberg

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de tendresse et d’espoir, ce besoind’autre chose : autant de signes exacer-bés du vieux mal de la jeunesse, d’unéternel romantisme... Une prodigieuseimpression de vérité se dégage du film.On en suit littéralement à la trace lesprotagonistes, on se mêle à leur existen-ce, il s’en faudrait de peu qu’ils ne ces-sent d’être des personnages fictifs.Ce qui contribue également à donnercette impression de vie, c’est la désin-volture avec laquelle Godard se sert dulangage cinématographique. Son style .se moque des leçons apprises, de ce qui"se fait" ou de ce qui "ne se fait pas"...Désinvolture qui se souvient sans doutede certains américains, mais peut-êtreaussi de Sacha Guitry dont Godard,quand il était critique, fut toujours unacharné défenseur.

Jean de BaroncelliLe Monde Mars 1960

Dés la première image, Jean-Luc Godardva parler sans fard et si contrebande il ya, c'est dans le discours lui-même quenous allons la trouver : il va parler avecdésinvolture et une certaine gouaille, dechoses graves (sur lesquelles il ne ces-sera de s'interroger tout au long de sonoeuvre). En fait, Godard, dés son premierfim va au coeur de son propos sur leplan social, l’adéquation de l’homme aumonde ; sur le plan individuel, les rap-ports de l’homme et de la femme.Malgré la désinvolture du ton, qui n’estautre que pudeur, le propos sera desplus pessimistes : c’est en ce sens qu’About de souffle est un des films lesplus désespérés de ce temps.Michel Poiccard ira jusqu’à la mort pourse prouver qu’il n’a pas tort. Et rien n’estplus douloureux que le dialogue desourds entre Michel et Patricia.

Jean WagnerA bout de souffle, Balland, 1974

L E F R A N C E

Vous avez l’impression qu’à certainsmoments j’abandonne le scénario puisl’histoire, que je me laisse aller au purplaisir de filmer. En fait, c’est ça quej'essaie de faire à l’intérieur de tout lefilm. Une fois que l’on s’est donné unthème, certains personnages, ensuite jeme mets dans une position telle quelogiquement je ne peux faire que cer-taines choses, que ma manière de mon-trer les choses. Exemple : la promenaded’Anna dans Bande à part . A cemoment-là, il n’y avait pas d’autreschoses à montrer que l’existence mêmedes gens. Leur existence se confondavec l’existence même du film. Le filmn’est pas un objet qui filme la nature, lacaméra n’est pas seulement un appareilreproducteur qui filme la nature, lesdeux ensemble ne font qu’un. Le cinéman’est pas un art qui filme la vie. Le ciné-ma, c’est ce qui est entre l’art et la vie.Et c’est ce qui fait que la vie est moinsou plus que l’art ou quelquefois que lavie et l’art sont à égalité. Le cinéma, parrapport à la peinture, à la littérature quieux existent en tant qu’art au départparce qu’il y a un choix, une existence,le cinéma au contraire, à la fois donneet reçoit de la vie et c’est ce quej’essaie de rendre sensible dans mesfilms : qu’on ne puisse plus séparer l’unou l’autre. C’est ce qui explique que sou-vent ou bien on les rejette ou bien on lesaccepte en bloc.

Jean-Luc GodardCinéma 1965

Remarquons que la forme du film esttout entière à l’image du comportementdu héros, voire de l’héroïne. Mieux, ellejustifie ce comportement. Michel, etencore plus Patricia, sont dépassés parle désordre de notre temps et les perpé-tuels accroissements et changementsmoraux et physiques absolument parti-culiers à notre époque. Ils sont victimesdu désordre, et le film sera donc unpoint de vue sur le désordre, intérieurautant qu’extérieur...

Cahiers du Cinéma n° 106

Fossoyeur du cinéma ? Génie novateur ?Le débat autour de ce réalisateur d’origi-ne suisse venu à Paris où il fréquentadavantage la Cinémathèque que laSorbonne, se liant à Bazin, Truffaut,Rivette, Domarchi et se lançant dans lacritique cinématographique aux Cahiersdu cinéma et à Art, sous le pseudonymede Hans Lucas, n’est pas près des’éteindre. Passons sur les légendes quientourent les années difficiles deGodard quand sa famille, vers 1951, luicoupe les vivres, sur la virulence de sacritique portant aux nues de petits réali-sateurs américains et sur ses premierscourts métrages. En 1959, il frappe ungrand coup avec A bout de souffle qui futle véritable manifeste de la " NouvelleVague". Un gangster, Belmondo, essayaitd’échapper à la police, avec la complicitéd’une Américaine, Jean Seberg. Maisc’était moins l’histoire qui importait icique la manière de bousculer les vieillestechniques et d’apporter un air nouveaudans un cinéma français corseté par leclassicisme des Delannoy et autresCayatte. Le pelil soldat qui suivit, tropancré dans la guerre d’Algérie, eut desennuis avec la censure. Avec Vivre savie, Godard aborde un autre sujet brûlant,la prostitution, un thème qu’il reprendraà plusieurs reprises. Le mépris, filmdans lequel il fait jouer Fritz Lang,montre qu’il sait parfaitement maîtriserun sujet. Peut-être les remous qu’il sus-cite tendraient-ils à s’apaiser, lorsqu’illance en 1965 un véritable coup depoing à l’égard des tenants du classicis-me : Pierrot le Fou, hommage auxPieds Nickelés à travers un tour deFrance violent et picaresque, celui deBelmondo, le romantique, à la recherched’un passé culturel, et d’Anna Karina quine rêve que de terrorisme et d’armes àfeu. Pierrot le Fou suscita de vifsremous dans les salles où il était proje-té. Du coup, la Chinoise, qui suivit,passa inaperçue. Tout mai 68 était pour-tant dans ce film prophétique. Ce quiavait échappé aux mandarins de laSorbonne, censés être à l’écoute de

D O C U M E N T S

SALLE D'ART ET D'ESSAI

CLASSÉE RECHERCHE

8, RUE DE LA VALSE42100 SAINT-ETIENNERÉPONDEUR : 77.32.71.71

77.32.76.96Fax:77.25.11.83

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leurs étudiants, Godard l’avait captéWeek-end dénonçait la frénésie de lavoiture dans des scènes d’une extraordi-naire violence. Godard est alors au som-met de son art. Il va remettre tout encause : disparaître pour laisser place àun cinéma didactique, professeur derévolution dans des films à la techniquerudimentaire, conçus par des collectifsVertov ou Medvedkin qui regroupent deschapelles gauchistes. Un seul film com-mercial au cours de cette période : Toutva bien, qui réunit Montand et JaneFonda. Le film fut mal accueilli par lessyndicats ouvriers et Godard jugé irres-ponsable. Vidéo et télévision semblentalors passionner Godard. Retour au ciné-ma première manière, en 1980, avecSauve qui peut la vie, trois portraitsde personnages, Nathalie Baye,Jacques Dutronc et Isabelle Huppert,excellente, oscillant entre la campagneet la ville. Nouveau scandale avec Jevous salue Marie, qui reprend le pro-blème du mystère de l’incarnation en leplaçant dans notre monde moderne etsuscite l’indignation des intégristes. Sielle ne procure pas toujours aux yeux debeaucoup un plaisir cinématographiquecomparable aux films de Truffaut et deChabrol par exemple, même lorsqueGodard fait appel à Delon pourNouvelle vague, son œuvre n’en restepas moins, il est devenu banal de ledire, un exact reflet des contradictionset des modes de notre temps. Historiensà vos visionneuses !

Jean Tulard Dictionnaire des réalisateurs

Filmographie

Nombreux courts métrages.

Longs métrages :

A bout de souffle (1959)

Une femme est une femme (1961)

L E F R A N C E

Les sept péchés capitaux(1962, un sketch)

Rogopag (1962, un sketch)

Vivre sa vie (1962)

Le petit soldat (1963)

Les carabiniers (1963)

Les plus belles escroqueries du monde (1963, un sketch)

Le mépris (1963)

Bande à part (1964)

Une femme mariée (1964)

Paris vu par (1965, un sketch)

Alphaville (1965)

Pierrot le Fou (1965)

Masculin-féminin (1966)

Deux ou trois choses que je sais d'elle(1967)

Le plus vieux métier du monde(1967, un sketch)

Loin du Vietnam(1967)

La chinoise (1967)

Week-end (1968)

Un film comme les autres (1968)

La contestation (1969, un sketch)

Le Gai Savoir (1969)

One plus one (1969)

British Sounds (avec Gorin, 1969)

Le vent d'est (avec Gorin, 1969)

Pravda (avec Gorin, 1969)

Lotte in Italia (avec Gorin, 1970)

Jusqu'à la victoire (avec Gorin, 1970)

Vladimir et Rosa (avec Gorin, 1970)

Tout va bien (avec Gorin, 1972)

Letter to Jane (avec Gorin, 1972)

Investigation of a still (avec Gorin,1972)

Moi je (1973)

Numéro deux (1976)

Sur et sous la communication (1976)

Comment ça va ? (1976)

Ici et ailleurs (1977)

France-Tour-Détour-Deux enfants(1978)

Sauve qui peut (la vie) (1980)

Lettre à Freddy Buache (1981)

Passion (1982)

Prénom Carmen (1983)

Je vous salue Marie (1985)

Détective (1985)

Soigne ta droite (1987)

Aria (1987, un sketch)

Nouvelle vague (1990)

Allemagne neuf zéro(1991)

Hélas pour moi (1993)

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