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Hélène EYSSARTIER Sous-directrice à la direction du Budget (Ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique) Ecole polytechnique (promotion X 1987) Administrateur hors classe de l’INSEE (ENSAE 1992) Sciences politiques Paris, section économique et financière [1994] DEA d’analyse et politique économique de l’EHESS (1992) Mathieu DUFOIX Adjoint au chef du bureau transports, (Direction du budget au Ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique) Ecole Polytechnique (promotion 2000) Ingénieur des Ponts et Chaussées (2005) Sciences Politiques Paris, section affaires publiques (2006) Analyse des financements publics pour les transports et perspectives dans un contexte de maîtrise des finances publiques LES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES CONSACRENT DE MANIÈRE RELATIVEMENT STABLE ENVIRON 5 % DE LEURS DÉPENSES AUX TRANSPORTS, MAIS PRÈS DE 30 % DE LEURS INVESTISSEMENTS L’investissement public pour les transports représente de manière assez stable environ 30 % des investissements des APU. L’investissement en transports des administrations publiques (APU) représente près de 18 Mdsc courants en 2006, soit environ 30 % de leur effort d’investissement. Cette proportion est assez stable sur moyenne période, tout comme l’est par ailleurs l’effort global des APU en matière d’investissement (autour de 3 % du PIB). Dépenses d’investissements en infrastructures de transport des administrations publiques (1994-2006) 16 14 12 10 8 6 4 2 0 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Voies navigables et ports fluviaux Aéroports et navigation aérienne Ports maritimes Transports collectifs urbains Réseau ferroviaire principal hors LGV Lignes à grande vitesse (LGV) Réseau routier national Réseaux routiers départemental et local Source : commission des comptes transports de la nation. Au-delà des fluctuations conjoncturelles, la structure des dépenses d’investissement transport se déforme de manière structurelle : la part des dépenses d’investissement de l’Etat diminue de manière régulière reflétant la décentralisation pro- gressive des compétences, propres à chaque mode de transport (par exemple : la décentralisation d’une partie du réseau routier en 2004) et la volonté politique des administrations locales de participer davantage au financement des projets d’investisse- ment de transport. En matière ferroviaire par exemple, les régions apportent leur cofinancement aux projets de régénération et de développement du réseau, projets dont la compétence appar- tient à Réseau ferré de France (RFF). Les investissements routiers, qui occupent plus de 70 % des inves- tissements publics en transport, restent quasiment stables en volume sur la période 1994-2006, mais la part des dépenses d’investissement sur le réseau « national » diminue jusqu’en 2004. On peut également observer qu’exprimée en euros constants, la dépense d’investissement pour le ferroviaire est assez stable, et a tendance à se dilater sous l’effet de la croissance des projets de grande vitesse. Au total, les administrations publiques consacrent annuellement 47 Mdsg en faveur des transports. Au-delà des 18 Mdsc d’investissements transports vus précédem- ment, ces dépenses sont constituées de dépenses d’entretien et d’exploitation des réseaux existants, d’aides à l’offre de services de transports, de sécurité en matière de transport et de couver- ture de certains passifs. Comme pour les investissements, la part des transports dans le total des dépenses des APU reste globalement stable en valeur constante, autour de 5 %. Tous les Etats développés interviennent dans le financement des transports, singulièrement en matière d’infrastructures. La légiti- mité de l’intervention de l’Etat et de l’ensemble des collectivités publiques ne pose pas de difficulté compte tenu du caractère de « bien public » qui est généralement reconnu aux infrastruc- tures de transports et compte tenu de la nécessité des politiques publiques à satisfaire le besoin de mobilité exprimé par les agents économiques. L’ampleur de cette intervention publique, sa composition (qui finance quoi ? à partir de quelle source de financement et transports publics N o 2 - Février 2009 - 186

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Hélène EYSSARTIERSous-directrice à la direction du Budget

(Ministère du Budget, des Comptes publicset de la Fonction publique)

Ecole polytechnique (promotion X 1987)Administrateur hors classe de l’INSEE (ENSAE 1992)

Sciences politiques Paris,section économique et financière [1994]

DEA d’analyse et politique économique de l’EHESS (1992)

Mathieu DUFOIXAdjoint au chef du bureau transports,

(Direction du budget au Ministère du Budget,des Comptes publics et de la Fonction publique)

Ecole Polytechnique (promotion 2000)Ingénieur des Ponts et Chaussées (2005)

Sciences Politiques Paris, section affaires publiques (2006)

Analyse des financements publicspour les transports et perspectives

dans un contexte de maîtrise des finances publiquesLES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

CONSACRENT DE MANIÈRE RELATIVEMENTSTABLE ENVIRON 5 % DE LEURS DÉPENSES

AUX TRANSPORTS, MAIS PRÈS DE 30 %DE LEURS INVESTISSEMENTS

L’investissement public pour les transports représente de manièreassez stable environ 30 % des investissements des APU.

L’investissement en transports des administrations publiques (APU)représente près de 18 Mdsc courants en 2006, soit environ 30 %de leur effort d’investissement. Cette proportion est assez stablesur moyenne période, tout comme l’est par ailleurs l’effort globaldes APU en matière d’investissement (autour de 3 % du PIB).

Dépenses d’investissements en infrastructures de transportdes administrations publiques (1994-2006)

16

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1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

Voies navigables et ports fluviaux

Aéroports et navigation aérienne

Ports maritimes

Transports collectifs urbains

Réseau ferroviaire principal hors LGV

Lignes à grande vitesse (LGV)

Réseau routier national

Réseaux routiers départemental et local

Source : commission des comptes transports de la nation.

Au-delà des fluctuations conjoncturelles, la structure desdépenses d’investissement transport se déforme de manièrestructurelle : la part des dépenses d’investissement de l’Etatdiminue de manière régulière reflétant la décentralisation pro-gressive des compétences, propres à chaque mode de transport(par exemple : la décentralisation d’une partie du réseau routieren 2004) et la volonté politique des administrations locales departiciper davantage au financement des projets d’investisse-ment de transport. En matière ferroviaire par exemple, les régionsapportent leur cofinancement aux projets de régénération et dedéveloppement du réseau, projets dont la compétence appar-tient à Réseau ferré de France (RFF).

Les investissements routiers, qui occupent plus de 70 % des inves-tissements publics en transport, restent quasiment stables envolume sur la période 1994-2006, mais la part des dépensesd’investissement sur le réseau « national » diminue jusqu’en 2004.

On peut également observer qu’exprimée en euros constants, ladépense d’investissement pour le ferroviaire est assez stable, et atendance à se dilater sous l’effet de la croissance des projets degrande vitesse.

Au total, les administrations publiques consacrent annuellement47 Mdsg en faveur des transports.

Au-delà des 18 Mdsc d’investissements transports vus précédem-ment, ces dépenses sont constituées de dépenses d’entretien etd’exploitation des réseaux existants, d’aides à l’offre de servicesde transports, de sécurité en matière de transport et de couver-ture de certains passifs.

Comme pour les investissements, la part des transports dans letotal des dépenses des APU reste globalement stable en valeurconstante, autour de 5 %.

Tous les Etats développés interviennent dans le financement destransports, singulièrement en matière d’infrastructures. La légiti-mité de l’intervention de l’Etat et de l’ensemble des collectivitéspubliques ne pose pas de difficulté compte tenu du caractèrede « bien public » qui est généralement reconnu aux infrastruc-tures de transports et compte tenu de la nécessité des politiquespubliques à satisfaire le besoin de mobilité exprimé par les agentséconomiques. L’ampleur de cette intervention publique, sacomposition (qui finance quoi ? à partir de quelle source de

financement et transports publics

No 2 - Février 2009 -186

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Etat

Régions

ODAL, syndicats, règles

Communes, EPCI

Départements

Transport routier

Investissementsnouveaux(développement)

Orientationentretienexploitation

Servicesde transport

Sécuritésûreté

Passifssociaux

Transport aérienTransport ferroviaireet collectif

Transport maritimeet fluvial

financement ?) peuvent et doivent en revanche être débattues,au regard notamment des autres politiques publiques et de lanécessité de garantir une trajectoire soutenable pour les financespubliques.

La route et le fer se partagent l’essentiel des financements publics.

On observe sur la grille d’analyse ci-dessus que ces dépenses sontessentiellement consacrées au développement des réseaux(investissement dans les infrastructures) et à l’entretien du réseauexistant. A noter que dans le ferroviaire, l’intervention publiqueest également très présente en matière sociale, avec 3,2 Mdsc

de prise en charge de régimes de retraite de la SNCF et de laRATP.

La répartition des financements entre APU reflète principalementle partage des compétences entre les collectivités publiques, etla persistance de nombreux financements croisés.

L’Etat (près de 19 Mdsg en 2007 y compris compensation auxrégions des services régionaux de voyageurs) garde une compé-tence générale en matière de transports. Il intervient donc finan-cièrement sur tous les axes de la politique des transports, desinvestissements aux passifs en passant par la sécurité et pour tousles modes de transport. Il est pratiquement le seul financeur desdépenses de sécurité / sûreté et de la couverture des passifs.L’implication de l’Etat, qui dépasse le simple cadre de sonconcours financier, répond en priorité à la demande de mobilitédes personnes (transport de voyageurs) et des biens (transportsde marchandises). La politique de financement des infrastruc-tures est ainsi un élément essentiel, avec l’organisation du servicede transport, de la consistance du service de transport proposéaux usagers : elle détermine les possibilités de mobilité au niveaunational.

L’intervention de l’Etat est nécessaire, d’un point de vue adminis-tratif (prérogatives de puissance publique pour des projetsd’intérêt national), économique (régulation des tarifs, contrôle durespect des règles de concurrence), d’ordre public (respect desnormes de sécurité, environnementales, d’utilisation des moyensde transport...) ou encore financier, la tarification de l’utilisationdes infrastructures ne pouvant que rarement assurer l’équilibrefinancier des projets sur le long terme.

Les régions (3,9 Mdsg), en application de la loi SRU (loi relative àla solidarité et au renouvellement urbains) de décembre 2000,sont compétentes en matière d’organisation régionale des trans-ports et de coordination des services régionaux non urbains detransport routier et ferroviaire. Elles sont autorités organisatrices detransport (AOT) en matière de services régionaux de voyageurs(fer). Elles reçoivent à ce titre des dotations de compensationessentiellement sous forme de DGF (dotation globale de fonc-tionnement) de la part de l’Etat, de l’ordre de 1,9 Mdc (horsIle-de-France).

Les départements (6,9 Mdsg) ont la charge de la gestion duréseau routier départemental et de l’organisation du transportscolaire depuis la première loi de décentralisation de 1982. Leurscompétences sont renforcées avec la décentralisation (routes,ports, aéroports) intervenue suite à la loi du 13 août 2004 relativeaux libertés et responsabilités locales.

Les communes et EPCI (8,1 Mdsg) ont la responsabilité de la voiriecommunale et un rôle d’AOT des transports urbains.

Les autres établissements publics locaux (9,6 Mdsg) sont desentités auxquelles une ou plusieurs APU confie une mission enmatière de transports. Il s’agit essentiellement des compétences

financement et transports publics

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de transports de voyageurs (Syndicat des transports d’Ile-de-France [STIF] en Ile-de-France) et des compétences portuaireset aéroportuaires déléguées à des chambres de commerce.

LES DÉPENSES DE L’ÉTATPOUR LES TRANSPORTS REFLÈTENT

L’IMPORTANCE DES RÉSEAUXD’INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT

EN FRANCE

L’essentiel des financements à la charge de l’Etat (près de19 Mdsg) se concentre sur le secteur ferroviaire qui représenteenviron 10 Mdsg. En effet, contrairement au secteur routier dontl’essentiel du réseau national a été transféré aux départementsau gré des lois de décentralisation, les 29 000 kilomètres de réseauferré restent, à travers RFF, de compétence nationale. Seulel’organisation des services régionaux de voyageurs a été trans-férée aux régions en 2002 mais son financement fait l’objet d’unecompensation budgétaire (cf. supra).

Sur le réseau ferroviaire comme sur le réseau routier, l’enjeu prin-cipal consiste à assurer une répartition adéquate des effortsfinanciers publics entre le développement et l’entretien. Les ins-truments de fiscalité pétrolière (TIPP), écologique ou de tarifica-tion de l’usage du réseau (péages, taxe poids lourds) mis en placepar l’Etat permettent d’ajuster la répartition du financement destransports entre le contribuable (qui finance en dernier ressort lesapports publics) et l’usager (dont la contribution, lorsqu’elle existe,ne reflète en général qu’une partie du coût complet du servicede transport) et d’orienter (en théorie) la demande de transportde manière intermodale.

Or les réseaux existants sont denses à l’échelle du territoirenational : avec ses 29 000 kilomètres de lignes ferroviaires, laFrance dispose du réseau par habitant le plus développéd’Europe, mais près de la moitié de ce réseau correspond à deslignes faiblement circulées (circulées à 80 % par moins de 20 trainspar jours), soit 6 % du trafic, alors que près de 80 % de l’activitéferroviaire est réalisée sur 30 % de ce linéaire. Comme l’a relevél’audit réalisé par l’Ecole polytechnique de Lausanne, fin 2005, ily a lieu de s’interroger sur le maintien d’un tel réseau conçu pourle transport de masse, là où les trafics sont si faibles. En effet, lafaiblesse du trafic, concentré de surcroît sur le fret ferroviaire dontles péages acquittés ne couvrent même pas le coût marginald’usage du réseau, reporte de facto l’essentiel du financementde ce réseau sur le contribuable à travers les concours publics del’Etat.

En l’absence de stratégie claire sur l’évolution du réseau et de saconsistance, face à l’appétence générale pour les projets nou-veaux, et dans un contexte de dépenses de l’Etat contraintes parla nécessité de maîtriser les déficits publics, le risque est d’allervers une répartition durablement non optimale de ces finance-ments publics en faveur du développement, au détriment del’entretien du réseau existant. La Cour des comptes a à plusieursreprises souligné l’insuffisance, selon elle, des crédits d’entretienroutier. L’audit de l’Ecole de Lausanne a souligné l’urgence d’uneremise à niveau des crédits de régénération du réseau ferroviaire.

Il convient de signaler à cet égard que le volet performance despolitiques de transports de l’Etat, associé à la loi de finances,formalise de manière explicite un objectif d’amélioration del’entretien et de la qualité des infrastructures de transports, assissur des indicateurs de coût d’entretien, d’état et de qualité desinfrastructures de transport.

Transport routier

Investissementsnouveaux(développement)

Orientationentretienexploitation

Servicesde transport

Sécuritésûreté

Passifssociaux

Transport aérienTransport ferroviaireet collectif

Transport maritimeet fluvial

Agence de financementdes infrastructures

de transports de France (AFITF)

Crédits budgétaires

Procédure d'affectation (CAS, BA, etc.)

Dépense fiscale

Financements assurés par l'AFITF

financement et transports publics

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Par nature de dépense, la grille ci-dessus met en évidence unautre poste important de dépenses de l’Etat qu’est la prise encharge de passifs sociaux du secteur des transports : il s’agit,au-delà des mécanismes de solidarité et de compensationdémographique entre régimes de retraite, des subventionsd’équilibre aux régimes spéciaux de retraite de la SNCF(2,8 Mdsc), de la RATP (0,4 Mdc) ou aux régimes de retraite et desécurité sociale des transports terrestres (FONGECFA : 0,1 Mdc) etdes marins (ENIM : 0,7 Mdc). La nature des prestations servies etl’équilibre démographique de ces régimes, hérités du statutd’entreprise publique des grands opérateurs nationaux de trans-port, rendent en effet nécessaire un tel subventionnement.

Au-delà de la compensation aux Régions de la décentralisationdes services régionaux de voyageurs, l’essentiel du soutien finan-cier de l’Etat aux services de transport est réalisé par dépensefiscale (environ 2 Mdsc au total) : allégement de TIPP pour lestransporteurs routiers, aide à la flotte de commerce, exonérationde TIPP sur les carburéacteurs. Ces aides, autorisées par la Commis-sion européenne, visent à soutenir l’offre de transport dans undomaine d’activité fortement capitalistique, en cohérence avecun aménagement du territoire équilibré.

Dans le secteur aérien, dont l’offre de transport est en voie delibéralisation complète, l’aide de l’Etat est dédiée à la compen-sation d’obligations de service public, sur des dessertes économi-quement non rentables, maintenues pour des motifs d’aména-gement du territoire.

L’ORGANISATION DES PAIEMENTSDE L’ÉTAT ET DE L’AFITF

Les instruments disponibles pour organiser les financements à lacharge de l’Etat sont de diverses natures : crédits budgétairesportés par le budget de l’Etat, dépenses fiscales ou bien dedépenses sur comptes d’affectation spéciale ou budget annexe,auxquelles sont affectées certaines ressources « dédiées » auxtransports. Par ailleurs, l’AFITF (Agence de financement des infra-structures de transport de France) porte l’essentiel de la part Etatdes dépenses d’investissements en infrastructure.

La dépense budgétaire

Le programme 203 « Infrastructures et services de transports » (IST)[4 349 Mc de crédits de paiement en LFI 2009] porte la majorité desconcours budgétaires de l’Etat en matière d’infrastructures et ser-vices de transports (routiers, ferroviaires, fluviaux, portuaires et mari-times), de sécurité, de sûreté et de régulation des secteurs écono-miques concernés, à l’exception de la sécurité du transportmaritime qui relève du programme « Sécurité et affaires maritimes ».

A l’image de la réorganisation du ministère qui a créé la DGITM(cf. article précédent) compétente sur l’ensemble des politiquesde transports terrestres et maritimes (non compris donc le secteuraérien qui reste du domaine de la Direction générale de l’Aviationcivile [DGAC]), le programme (IST) constitué en LFI 2009, enregroupant les moyens y afférents, répond à des finalités qui ins-crivent la politique des transports dans la perspective du déve-loppement durable : il s’agit notamment de favoriser la complé-mentarité et le rééquilibrage des modes et de développer ladesserte des territoires par les différents modes de transport. Il faitappel aux financements de l’AFITF, dont une partie lui est reverséesous forme de fonds de concours (cf. infra).

Le programme 207 « Sécurité et circulation routières » (61 Mc enLFI 2009) retrace l’action et les moyens mis en œuvre par l’Etat pourréduire le nombre d’accidents de la circulation, à l’exception desmoyens liés au système de contrôle automatisé des infractions quifigurent dans le programme « Radars » du compte d’affectationspéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions auCode de la route ». Les enjeux sont humains et sociétaux (diminuerle nombre de tués et accidentés sur la route) et économiques (la

charge financière de l’insécurité routière était estimée en 2006 à24,9 Mdsc, dont 11,6 pour les accidents corporels).

Le programme 205 « sécurité et affaires maritimes » (134 Mc en LFI2009) permet d’assurer la visibilité de la politique maritime de l’Etat,dans un environnement très ouvert internationalement, en regrou-pant notamment les moyens dédiés à la sécurité et sûreté maritimes(CROSS, signalisation, phares et balises...), à la formation des gensde mer et à l’enseignement maritime, à la flotte de commerce afinde développer le pavillon français, et l’emploi dans ce secteur.

Les dépenses « sociales » du secteur des transports sont portéesdans la mission « régimes sociaux et de retraite » par les pro-grammes 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports ter-restres » (3 722 Mc en LFI 2009) et 197 « régime de retraite et desécurité sociale des marins » (747 Mc en LFI 2009) : ces pro-grammes apportent un concours financier aux régimes de retraitedes agents de la SNCF et de la RATP et des marins affiliés à l’ENIM.

La compensation versée aux régions hors Ile-de-France suite à laloi SRU de décembre 2000 (environ 1,9 Mdc en 2008) résulte dela combinaison de deux instruments budgétaires :– la part correspondant à l’exploitation des services transférés estversée sous forme de DGF (dotation globale de fonctionnement)[1,5 Mdc en 2008] au sein du prélèvement sur recettes de l’Etatau profit des collectivités territoriales ;– la part correspondant aux droits complémentaires de compen-sation est versée sous forme de DGD (dotation globale de décen-tralisation) : 0,4 Mdc en 2008 à partir du programme 121« Concours financiers aux régions » de la mission « Relation avecles collectivités territoriales ».

S’agissant de la région Ile-de-France, les flux, d’un total d’environ0,7 Mdc en 2008, sont plus complexes, et différents des autresrégions. Ils combinent :– le reversement direct à la région et au STIF (1) de 75 % du produitdes amendes de circulation encaissées par l’Etat ;– des transferts de fiscalité (Taxe spéciale sur les conventionsd’assurance et TIPP) à la région et aux départements ;– de la DGD versée directement au STIF pour l’organisation destransports scolaires (qui relèvent en province des départements).

Contrairement aux autres régions, la compensation des transfertsde compétence en matière de transport collectif n’est pas réa-lisée par la DGF, mais prioritairement par transfert de fiscalité(notamment la TIPP pour plus de 0,4 Mdc).

Le budget annexe du contrôleet de l’exploitation aériens

La mission « Contrôle et exploitation aériens » retrace, dans lecadre d’un budget annexe (1,9 Mdc en LFI 2009), les activités deproduction de biens ou de prestation de services de la DGAC :fourniture de services de surveillance et de contrôle aériens per-formants, prescription de normes techniques de sécurité décou-lant des engagements internationaux et européens de la France,dépenses de formation aéronautique et d’investissement en sys-tème de contrôle.

Le financement des dépenses du budget annexe est assuré pardes recettes, tirées à titre principal de son activité, qui lui sontdirectement affectées :– redevances de navigation aérienne perçues en contrepartiedes services rendus aux usagers et dont l’évolution des tarifs doitrester en cohérence avec le taux d’inflation prévisionnel et laqualité du service rendu aux usagers (application du régime deperformance) ;– une fraction de la taxe de l’aviation civile ;– redevances de contrôle et certification.

(1) STIF : Syndicat des transports d’Ile-de-France.

financement et transports publics

- No 2 - Février 2009 189

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Le compte d’affectation spéciale« Contrôle et sanctions automatiséesdes infractions au Code de la route »

Au sein de cette mission, le programme 751 « Radars » (202 Mc enLFI 2009) retrace l’action et les moyens mis en œuvre par l’Etat liés :– au déploiement des nouveaux dispositifs de contrôle traduisantl’engagement pris de déployer 500 radars par an en moyenne de2008 à 2012 : radars, dispositifs de contrôle du respect des feuxrouges et du respect des distances de sécurité dans les tunnels ;– à leur maintien en condition opérationnelle : maintenance pré-ventive et curative et traitement du vandalisme ;– au développement et à l’exploitation du centre national de trai-tement (CNT) de Rennes ;– aux frais d’éditique et d’affranchissement ;– à l’expérimentation de la verbalisation assistée par ordinateur(VAO).

En recettes, il est alimenté par une fraction du produit des amendesinfligées en raison d’infractions au Code de la route et perçues parla voie de systèmes automatisés de contrôle-sanction, dans la limitede 212 Mc (ce qui équilibre les dépenses du CAS qui comporteégalement un programme de 10 Mc consacré à la modernisationdu fichier national du permis de conduire).

Le produit des amendes automatisées étant aujourd’hui supérieurà la dépense radars, l’article 25 du PLF 2009 prévoit l’affectationdu produit des amendes perçues par la voie de systèmes auto-matiques de contrôle et sanction :– en recettes du CAS à hauteur de 212 Mc, dont 201,7 Mc pourle P751 et 10,3 Mc pour le P752 ;– pour les collectivités locales à hauteur de 100 Mc pour lescommunes et de 30 Mc pour les départements ;– à l’AFITF pour le solde des recettes (200 Mc estimés).

Avec la montée en puissance des charges de maintien en étatdu parc de radars et le tassement usuel des recettes sur les radarsdéjà installés (effet d’apprentissage des conducteurs) ce surcroîtde recette pourrait s’amenuiser, voire disparaître totalement endépit de la poursuite du déploiement de nouveaux radars sur leréseau routier.

Les dépenses fiscalesbénéficiant aux transports

Le second type d’outil financier utilisé par l’Etat est constitué desdépenses fiscales. Dans le secteur des transports, elles représen-tent 2 Mdsc environ par an.

L’aide au transport routier est de 0,5 Mdc environ. Elle prend laforme de dégrèvement de taxe professionnelle en faveur desentreprises disposant de véhicules routiers, ainsi que du rembour-sement d’une fraction de la TIPP pour les véhicules de transportroutier de marchandise.

Dans le domaine maritime et fluvial, les dépenses fiscales repré-sentent près de 0,3 Mdc. Il s’agit de dégrèvement de taxe pro-fessionnelle (minoritaire, pour 0,05 Mdc) et en très grande partiede la taxe au tonnage, dispositif appliqué depuis 2004 qui permetd’opter pour une taxation dérogatoire au calcul de droitcommun de l’impôt sur les sociétés.

Le secteur aérien bénéficie des dépenses fiscales les plus impor-tantes, sous forme d’exonération de TIPP pour les carburéacteurs.Cette dépense fiscale représente 1,4 Mdc par an.

L’AFITF

Un dernier type d’instrument financier vient compléter les outils àla disposition de l’Etat pour le financement des transports. Il s’agitde l’Agence de financements des infrastructures de transport de

Organisation des financements publics (Etat) des infrastructures de transport

1 Financement direct des dépenses d'entretien / exploitation

2 Financement via l'AFITF des investissements en maîtrise d'ouvrage Etat et des constats de plan Etat-régions

Routes

Entretiendes

routes

Maîtres d'ouvragedélégués

(concessions)

Gestionnairesd'infrastructures

= maîtres d'ouvragedélégués

Maîtrised'ouvragedéléguée :

Maîtrised'ouvrage

Etat :

Nouveauxprojets

Recettesaffectées

Fonds de

concours

Participation directe de l'AFITF pour le comptede l'Etat dans les grands projets d'infrastructuresde transports (LGV, autoroutes concédées, etc.)

Modes non routiers Tous modes de transports

Budget général de l'Etat en matière de transports

Autres programmesTRANSPORTS

Programme IST(infrastructures et services de transports)

Dotations pour lesROUTES

Dotations pour lesAUTRES MOYENSDE TRANSPORTS

AFITF

financement et transports publics

No 2 - Février 2009 -190

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France (AFITF), établissement public à vocation financière chargéd’apporter le financement de l’Etat aux grands projets d’investis-sement en matière de transports.

L’agence a été créée en 2004 afin d’isoler et de suivre les créditsde l’Etat consacrés aux projets annoncés par le Gouvernementdans le cadre du Comité interministériel d’aménagement et dedéveloppement du territoire (CIADT) de décembre 2003. Le pla-fond pluriannuel des dépenses a été fixé à 7,5 Mdsc sur 2005-2012,en cohérence avec le niveau prévisionnel des ressources del’agence.

Le périmètre des projets financés via l’agence a néanmoins étéprogressivement étendu à la majeure partie des grands projets,y compris hors CIADT. En 2006, le domaine d’intervention a étéétendu au financement des contrats de plan Etat-régions et desprocédures contractuelles assimilées. En 2007 et 2008, ont étéinclus dans le périmètre de l’agence les nouveaux contrats deprojets, ainsi qu’un certain nombre de projets d’investissementssur les réseaux routier, ferroviaire et fluvial, les ports maritimes, desoutien aux services d’autoroutes ferroviaires ou de la mer et enfin,de relance des transports collectifs.

Sur la totalité de ce périmètre, l’AFITF permet à l’Etat de se posi-tionner de façon simple et souple parmi les cofinanceurspublics des projets, désormais multiples. Le coût important desgrands projets d’infrastructure et leur intérêt local, commenational, justifient l’implication politique et la participation finan-cière des différentes collectivités publiques concernées. Dansce contexte, il y a un réel intérêt pour l’Etat à ce qu’une structureunique et dédiée assure le rôle de caisse financière dans cedomaine.

Par ailleurs, l’agence assure une grande transparence de l’utili-sation de l’argent de l’Etat dans le domaine des infrastructuresde transport. La détermination des crédits à l’intérieur de sonbudget unique, la systématisation de ses interventions sous formede conventions de financement et le contrôle précis des appelsde fonds permettent un suivi clair et un contrôle efficace du finan-cement du grand nombre de projets relevant du périmètre del’agence. L’agence permet également une transparenceaccrue vis-à-vis du Parlement, notamment grâce à la présencede parlementaires au conseil d’administration.

Via l’AFITF, les cofinancements de l’Etat empruntent deux typesde circuits financiers complémentaires des circuits budgétaires etfiscaux (cf. schéma page précédente).

� L’AFITF établit une convention et verse son concours financierdirectement aux maîtres d’ouvrage, que la maîtrise d’ouvragesoit déléguée (concessionnaires d’autoroutes ou gestionnairesd’infrastructures) ou directement de la compétence de l’Etat(comme dans le cas de projets sur le réseau routier national nonconcédé). Dans ce dernier cas, les financements sont versés parl’agence au budget général de l’Etat, sous forme de fonds deconcours.

� L’agence verse son concours de façon indirecte aux maîtresd’ouvrage, en passant par le budget de l’Etat. C’est alors avecl’Etat que l’agence conclut une convention de financement etc’est à l’Etat qu’incombe la charge de verser les fonds reçus del’agence, par fonds de concours, aux maîtres d’ouvrage. Lecaractère indirect de ce circuit, qui lui ajoute une complexitéparfois critiquée mais en réalité très relative, se justifie par la mul-tiplicité des maîtres d’ouvrage pouvant exister dans certains cas(l’exemple le plus significatif est celui des contrats de projet) : seull’Etat possède les moyens d’assurer la gestion contractuelle deces situations.

D’un point de vue financier, les perspectives de l’Agence ont étémodifiées par rapport à ce qui était anticipé au moment duCIADT de 2003. L’élargissement de son périmètre et les perspec-tives d’investissement suite au Grenelle de l’environnement ontnécessité une redéfinition de son équilibre pluriannuel.

Le tableau suivant présente l’équilibre pluriannuel (2005-2012) del’AFITF en comparant les estimations qui peuvent être faitesaujourd’hui [colonnes (b)] et celles du CIADT de décembre2003 (a).

Recettes cumulées sur la période2005-2012 (Mdg)

Dépenses cumulées sur la période2005-2012 (Mdg)

(a) (b) (a) (b)

Recettes récur-rentes sur 2005-2012 ........................ 1,4 7,88 Grands projets

CIADT fin 2003 ..... 7,5 6,18Dividendes sociétésd’autoroutes .......... 4 Autres projets

(hors CIADT) ......... 2,02Cession dessociétés d’auto-routes ..................... 4 CPER routiers ........ 3,3Subvention budgé-taire 2006 ............... 0,06 PDMI 2007-2013 ... 1,382009 ........................ 1,2 CPER 2007-2013 ... 2,552010 ........................ 1,1 Matériel roulant

SNCF Ile-de-France .................. 0,28

2011 ........................ 0,2 Transports publics . 0,88Taxe poids lourds .. 1,8 1,76 Téléphonie ferro-

viaire ..................... 0,3Nouvelles recettes . 0,71

Total (Mdsg) .......... 7,2 16,9 Total (Mdsg) ......... 7,5 16,9

Si un nouvel équilibre financier a pu être trouvé pour l’AFITF àl’horizon 2012, la présence d’une subvention budgétaire d’équi-libre, d’un montant fluctuant selon les années, atteste de la diffi-culté à définir une trajectoire financière stable sur le long termepour les recettes de cette agence : à partir de 2012, après miseen place de la taxe poids lourds, les recettes annuelles pérennesdevraient être de l’ordre de 2,2 Mdsc. La montée en puissancedes paiements relatifs aux projets du Grenelle et aux grands pro-jets ferroviaires LGV (SEA, CNM, BPL) [2] nécessitera, au-delà de2012, la recherche de nouveaux financements stables. En toutétat de cause, la soutenabilité de la trajectoire de l’AFITF, mêmerenforcée par de vraies ressources financières supplémentaires(ne pesant pas sur le budget de l’Etat) et la maîtrise des dépensespubliques dont les paiements de l’AFITF font partie, nécessiterontun effort de programmation étalée dans le temps des nouveauxprojets d’infrastructure.

UN EFFORT FINANCIER MAJEURDES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

POUR LES TRANSPORTSDONT L’EFFICIENCE N’EST PAS DÉMONTRÉE

Tout ceci témoigne d’un effort financier majeur, notamment dansle contexte des dix dernières années où les efforts de maîtrise dela dépense publique (et notamment de la dépense de l’Etat) ontété renforcés, alors même que les charges « rigides et passives »(dette + pensions) du budget ont augmenté.

La dette publique est aujourd’hui supérieure à 66 % du PIB, et, ausein du budget de l’Etat, la charge de la dette est passée de moinsde 5 % des dépenses en 1980 à 16 % en 2009. Continuer sur unetelle voie aurait des conséquences évidentes en matière d’évic-tion sur les dépenses les moins rigides, notamment celles d’inves-tissement qui préparent l’avenir. C’est notamment pourquoi l’Etats’est donné des objectifs extrêmement ambitieux de redressementdes finances publiques malgré un contexte fortement contraint.

(2) SEA : Sud Europe Atlantique ; CNM : contournement de Nîmes-Montpellier ; BPL :Bretagne-Pays de la Loire.

financement et transports publics

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Les marges de manœuvre financièrespour les dépenses de transportsresteront faibles à moyen terme

En l’absence de choix sur le niveau optimal d’infrastructures detransports, ces marges seront intégralement consommées par lebesoin d’entretien des réseaux existants qui sont parmi des plusdenses des pays les plus développés (notamment ferroviaire).Compte tenu des arbitrages qui ont été systématiquement rendusdans le passé en faveur de leur développement, pour un niveaude dépense transports relativement stable en points de PIB (cf.1re partie), ces besoins d’entretien iront croissant : d’une part, levolume d’infrastructures à entretenir augmente, d’autre part, lescoûts unitaires d’entretien augmentent en raison d’insuffisancescumulées de maintenance.

De surcroît, tant en matière ferroviaire que routière, l’essentiel deslignes à forte valeur ajoutée ont d’ores et déjà été construites surle sol national, concentrant l’essentiel de la capacité contributivedes usagers des transports. Les nouveaux projets concernentdésormais des segments à plus faible valeur ajoutée écono-mique et sont motivés essentiellement par des objectifs politiquesde développement durable du territoire national, que ce soit pourtenter d’accroître la part des modes de transport « doux » d’unpoint de vue environnemental (objectifs du Grenelle de l’environ-nement) ou pour des motifs d’aménagement du territoire.

La décision de leur lancement doit donc être appréciée auregard de la capacité des finances publiques à assurer durable-ment le financement de leur construction, mais aussi et surtout deleur entretien, sans pouvoir compter de manière significative surune contribution de leurs usagers.

La contrainte financière s’est principalement exercée ces der-nières années sur la dépense de l’Etat (respect de la norme d’évo-lution à 0 % en volume), la dépense des collectivités territorialeset notamment des régions étant très dynamique (plus de 10 %par an pour ces dernières) notamment en faveur des transports :développement de projets de transports collectifs en sites propres(TCSP) urbains comme les tramways parmi les solutions les pluscoûteuses, cofinancement de projets de LGV, CPER et au-delà,négociations de plans « rail » pour remise en état de lignes ferréesjusqu’à présent peu circulées, développement du cadencementpour les TER... Certaines régions commencent toutefois às’inquiéter de la croissance de leurs engagements financierspluriannuels notamment pour les transports.

Enfin, les charges de pension des régimes spéciaux de la RATP etde la SNCF vont continuer à progresser de manière dynamique,en dépit des éléments de réforme qui ont pu être mis en œuvreen 2008, entraînant, de manière inéluctable, un maintien, voireun accroissement, des subventions de l’Etat à ce titre.

Dans ce contexte, et afin de permettre un retour à l’équilibre desfinances publiques, il convient de s’attacher à la meilleure utilisa-tion possible des concours publics dont le maintien à ce niveaupour les transports ne pourrait se justifier que pour autant que l’onpuisse en garantir l’efficience. A défaut, une partie de ces finan-cements publics, notamment celle consacrée aux projets dedéveloppement, devrait être redéployée vers d’autres politiquesplus performantes.

Or plusieurs sources d’inefficienceexistent dans la conduite de cette politique

Les objectifs ultimes de la politique des transports sont tellementvastes (soutien à l’emploi dans ce secteur, croissance écono-mique, désenclavement des territoires, satisfaction du « droit à lamobilité » des citoyens...) qu’ils ne sont pas explicités de manièreprécise et les objectifs intermédiaires qui sont mis en avant (sélec-tion des projets, respect des coûts, des calendriers, qualité desinfrastructures en place) ne sont globalement pas tenus. Dans lemême temps, le contexte financier de cette intervention de l’Etat

est potentiellement explosif, dès lors que l’usager ne paie qu’unefaible partie de ses coûts et où toute demande de transportsemble devoir être assouvie. Les raisons de cette probable ineffi-cacité (partielle) de l’intervention de l’Etat peuvent certainements’expliquer par :– le caractère trop « technique » des outils de l’analyse socio-économique qui devraient pourtant permettre d’éclairer leschoix de dépense publique et de donner des objectifs clairs à lapolitique de l’Etat. Ces outils ne permettent par ailleurs que demanière imparfaite de valoriser certains objectifs politiquescomme la priorité au développement durable ou à l’aménage-ment du territoire. Les comparaisons entre modes de transportdifférents sont par ailleurs peu significatives. Dans ces conditions,la notion de valeur économique et sociale d’un projet n’estjamais prise en compte dans le débat public et encore moinsmise au regard de celle apportée par d’autres emplois possiblesde la ressource publique ;– la complexité des circuits de financements et la multiplicité descofinancements rendent délicat pour l’Etat tout arbitrage condui-sant à reporter la réalisation d’un projet, compte tenu des consé-quences qu’une telle décision pourrait avoir sur d’autres projetsdans un contexte de multiplication des financements croisés. Ceconstat est vrai tant pour les financements communautaires quela Commission souhaiterait concentrer sur des projets binationauxqui ne constituent – pour la France en tout cas – pas la premièrepriorité, que pour les CPER qui contiennent en matière routière ouferroviaire de nombreux projets auxquels l’Etat ne se serait pasintéressé, si les collectivités n’en avaient pas fait la demande, etqui ont une très faible utilité collective.

Par ailleurs, en présence de financements croisés, l’analyserationnelle de la rentabilité socioéconomique du projet estbiaisée, car chaque cofinanceur la considère usuellement auregard sa seule contribution financière, sans percevoir la réalitédu coût de ce projet pour la collectivité (en l’occurrence, lecontribuable qui est le même au niveau local, national ou mêmeeuropéen...). La sélectivité des projets et donc l’efficience de ladépense publique s’en trouvent naturellement affectées.

DES LEVIERS EXISTENTPOUR RATIONALISER LES CHOIX

EN MATIÈRE DE TRANSPORTET LES RENDRE COMPATIBLES

AVEC UNE TRAJECTOIRE MAÎTRISÉEDES FINANCES PUBLIQUES

Des pistes peuvent être esquissées, consistant essentiellement àrationaliser les choix en matière d’offre de transports et clarifierles rôles (tant en termes de compétence que de financement)des différents acteurs.

Clarifier les modes de financementet faire baisser les coûts

� S’interroger au cas par cas sur la contribution financière descollectivités territoriales. Il est fort probable que les collectivitéslocales auront de plus en plus de mal à prendre en charge lescoûts croissants des infrastructures dont elles demandent par ail-leurs la réalisation, notamment des LGV. Il conviendra de ne pri-vilégier que les projets qui sont susceptibles de responsabiliser cesdernières à travers une clé de répartition cohérente avec leurvolonté de réalisation de l’investissement, afin que la contributionde l’Etat ou la dette de RFF en matière ferroviaire, ne soit pas lavariable d’ajustement de dernier ressort.

� Ne plus recourir aux contrats de projets Etat-régions pour lesinfrastructures de transports compte tenu de la faible utilité col-lective des projets qui sont habituellement « financés » par cesCPER (cf. supra ).

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� Définir un cadrage financier de l’AFITF, sur un horizon compa-tible avec la durée de vie longue de la réalisation des projets,cadrage dans lequel doivent s’inscrire les projets (y compris ceuxissus des CIADT ou du Grenelle...), par une adaptation desdépenses aux ressources.

� Développer la mise en concurrence sur les marchés de tra-vaux, notamment en matière ferroviaire où les coûts sont parti-culièrement élevés, comme cela est convenu dans le cadre ducontrat de performance qui vient d’être signé entre l’Etat et RFF.En matière de services de transports collectifs, favoriser l’entréeen vigueur rapide du règlement européen OSP (obligations deservice public) qui ouvre à la concurrence les services de trans-ports collectifs urbains et la recommande pour les services régio-naux de voyageurs.

Développer les sources de financementautres que publiques

� Tarifer l’usage des infrastructures et des services de transportsdavantage en cohérence avec le service rendu, ce qui, au-delàdu rendement financier, a pour effet d’inciter les usagers à ratio-naliser leur propre désir de mobilité et limite donc l’apparition degoulots d’étranglement. Des marges de manœuvre existent enmatière de tarification du réseau ferré national et pour l’usagedu réseau routier non concédé (notamment mise en place de la« taxe poids lourds »), mais aussi dans les transports en communoù l’usager ne paie qu’une faible proportion du service rendu(entre 15 et 40 % selon les collectivités territoriales) ;

� Développer les outils de fiscalité environnementale pourorienter la demande de mobilité vers des modes de transportsconformes aux objectifs de développement durable, plutôt quede subventionner ces derniers ou pratiquer une politique d’offre« surcalibrée » de ces modes de transports : mise en place depéages urbains, ajustement de la fiscalité pétrolière, bonus/malusautomobile...

� Tirer pleinement parti des nouveaux outils de la commandepublique et notamment des partenariats public-privé. L’utilisationde la concession, qui a fait ses preuves dans le domaine auto-routier, permet de réduire significativement le coût pour le secteurpublic des infrastructures de transports en reportant une partie dufinancement sur les bénéficiaires finaux des projets (les usagers).Le modèle concessif sera toutefois plus difficile à mettre en œuvresur les futurs projets ferroviaires ou autoroutiers pour lesquels larentabilité financière n’est pas suffisante et limite trop fortementles possibilités d’apports de financements privés.

� Etablir un cadre d’utilisation des partenariats public-privé(PPP) afin de ne pas recourir à eux uniquement pour étaler lacharge budgétaire. Il serait paradoxal que ce mécanisme, des-tiné à optimiser les coûts, conduise à engager des projets à larentabilité socio-économique particulièrement dégradée et

place l’Etat dans une situation de croissance inéluctable de ladépense publique par « empilement » des loyers liés aux contratsde partenariats successifs, sans retour avéré pour la collectivité.

Rationaliser les choix de nouveaux projetsau regard de la consistance des réseaux existants� Redonner leur valeur aux critères de rentabilité socio-écono-mique en faisant du ratio bénéfice socio-économique par europublic investi le critère de choix entre projets dans un contextede contrainte budgétaire (c’est-à-dire en intégrant le coûtd’opportunité des fonds publics). Par ailleurs les études économi-ques préalables à l’engagement des projets devraient être réa-lisées par des entités indépendantes des maîtres d’ouvragespublics et n’ayant pas d’intérêt dans la réalisation des projets.

� Se doter d’une instance extérieure à l’administration encharge de donner un avis (public) sur les projets, sur laquellel’Etat pourrait s’appuyer, sans pour autant y être lié. Des propo-sitions similaires ont été formulées dans plusieurs rapports récem-ment, que ce soit dans le cadre de la RGPP (Révision généraledes politiques publiques) ou le rapport du CAS (Conseil d’analysestratégique) de novembre 2008.

� Introduire des seuils de trafic en deçà desquels le lancementd’un investissement (notamment ferroviaire ou de TCSP) serait defacto exclu, tant pour des raisons financières évidentes que pouratteinte non justifiée à l’environnement : en effet, là où les traficssont faibles, le bilan écologique de la route est souvent meilleurque celui du fer.

� Produire et rendre publics les coûts et bilans économiques demaintien en état de l’infrastructure de certaines lignes ferroviaires(pour le gestionnaire de l’infrastructure) et de maintien sur ceslignes de certaines dessertes (pour l’entreprise de transport) afind’objectiver le débat sur la consistance du réseau ferré. Face àun effort mieux ciblé pour la régénération de certaines lignes, lafermeture à la circulation d’autres lignes pourrait apparaître poli-tiquement plus acceptable. De même, le coût pour la collectivitéde maintien de certaines dessertes ferroviaires pour des motifs dedésenclavement des territoires, coût aujourd’hui non perçu carfondu dans les charges de la SNCF, pourrait être rationalisé etfaire, conformément au modèle aérien, l’objet d’appels d’offresavec subventionnement explicite.

Certaines de ces pistes ont d’ores et déjà fait l’objet d’arbitragesfavorables mais restent à mettre en œuvre ou à affermir dans leurdéclinaison. D’autres constituent des objectifs de plus long termecompte tenu des difficultés politiques ou opérationnelles qu’ellessupposent. Elles font néanmoins partie des conditions néces-saires pour asseoir des perspectives durables pour les dépensesde transport, cohérentes avec une trajectoire maîtrisée desfinances publiques.

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