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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 325, Sbrie I, p. 415-418, 1997 Topologie/Topology Formes d’enlacement des 3-va&t& et U( l)-invariants de Murakami-Ohtsuki-Okada Catherine GILLE Dhpartement de MathCmatiques, Universitt de Nantes, 2, rue de la HoussinGre, B.P. 92208, 44322 Nantes CEDEX 3, France. E-mail : gilleQmath.univ-nantes.fr R&urn& Abstract. Nous montrons que les invariants Z,v de Murakami-Ohtsuki-Okada d’une 3-variCtC orientCe connexe fermCe A4 dkterminent la forme d’enlacement de M lorsque la composante 2-primaire du premier groupe d’homologie de M est connue. Linking pairings of S-manifolds and Murakami-Ohtsuki-Okada’s U( 1)-invariants We show that the Z,h, invariants of Murakami-Ohtsuki-Okada of a closed connected oriented 3-manifold M give the linking pairing of M, when the 2-component of the first homology group of M is known. 1. Introduction Dans [6], Murakami, Ohtsuki et Okada d&in&sent une sCried’invariants des variCtCs de dimension 3 ?Ipartir de leur presentation de chirurgie, qui correspondent aux U( I)-invariants de la thtorie de jauge. Pour toute 3-variCtC orientCe connexe fermCe iVl obtenue par chirurgie sur un entrelacs parallClis& L, on pose pour tout N E N* : oti n est le nombre de composantesde L, BL la matrice d’enlacement de L, CT(BL) sa signature (nombre de valeurs propres positives moins nombre de valeurs propres nigatives), q = e% (resp. q = e%) si N est impair (resp. pair) et GN(q) = xLEZINZ q k2. 11s montrent que 2~ (M) est dktermink par le premier nombre de Betti de A4, et par la classe d’isomorphisme de la forme d’enlacement Note p&ent&e par Jean-Pierre SERRE. 0764~4442/97/03250415 0 Academic des ScienceslElsevier, Paris 415

Formes d'enlacement des 3-variétés et u(1)-invariants de Murakami-Ohtsuki-Okada

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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 325, Sbrie I, p. 415-418, 1997

Topologie/Topology

Formes d’enlacement des 3-va&t& et U( l)-invariants de Murakami-Ohtsuki-Okada

Catherine GILLE

Dhpartement de MathCmatiques, Universitt de Nantes, 2, rue de la HoussinGre, B.P. 92208, 44322 Nantes CEDEX 3, France. E-mail : gilleQmath.univ-nantes.fr

R&urn&

Abstract.

Nous montrons que les invariants Z,v de Murakami-Ohtsuki-Okada d’une 3-variCtC orientCe connexe fermCe A4 dkterminent la forme d’enlacement de M lorsque la composante 2-primaire du premier groupe d’homologie de M est connue.

Linking pairings of S-manifolds

and Murakami-Ohtsuki-Okada’s U( 1)-invariants

We show that the Z,h, invariants of Murakami-Ohtsuki-Okada of a closed connected oriented 3-manifold M give the linking pairing of M, when the 2-component of the first homology group of M is known.

1. Introduction

Dans [6], Murakami, Ohtsuki et Okada d&in&sent une sCrie d’invariants des variCtCs de dimension 3 ?I partir de leur presentation de chirurgie, qui correspondent aux U( I)-invariants de la thtorie de jauge. Pour toute 3-variCtC orientCe connexe fermCe iVl obtenue par chirurgie sur un entrelacs parallClis& L, on pose pour tout N E N* :

oti n est le nombre de composantes de L, BL la matrice d’enlacement de L, CT(BL) sa signature (nombre de valeurs propres positives moins nombre de valeurs propres nigatives), q = e% (resp. q = e%) si N est impair (resp. pair) et GN(q) = xLEZINZ q k2. 11s montrent que 2~ (M) est dktermink par le premier nombre de Betti de A4, et par la classe d’isomorphisme de la forme d’enlacement

Note p&ent&e par Jean-Pierre SERRE.

0764~4442/97/03250415 0 Academic des ScienceslElsevier, Paris 415

C. Gille

de M sur la torsion du premier groupe d’homologie. 11s exhibent kgalement un exemple montrant que les invariants ZN ne determinent pas la forme d’enlacement. Cependant, nous montrons ici la rCciproque partielle suivante :

THI~OR~ME. - Deux 3-varie’tk connexes fermkes orient&es M et M’ ont m2me premier nombre de Betti et des formes d’enlacement isomorphes si et seulement si Z,(M) = Z,(iW) pour tout N E N*, et TorszH,(M, Z) z Tors2H1(M’: 7).

Notation. - Si G est un groupe abelien fini et p un nombre premier, on dCsigne par G, la composante p-primaire de G.

Remarque. - D’apri?s le thkorkme 6.1. de [ 11, toute forme d’enlacement (G, 4) est rCaliste par une 3-variCtC orientCe connexe fermCe. Un corollaire de notre thCor&me est done que les invariants ZN et le groupe G2 classifient les formes d’enlacement.

2. Les formes d’enlacement sur les groupes abkliens finis

DEFINITIONS. - Une forme d’enlacement est un couple (G, $), oh G est un groupe abelien fini et 4 une forme bilindaire symCtrique non-singuli&re sur G B valeurs dans Q/Z. On dit que deux formes d’enlacement (G? 4) et (G’, 8) sont isomorphes s’il existe un isomorphisme de groupes

f : G - G’ tel que ~(z,Y) = #(f(z), f(y)) P our tous z, y E G. Soit B une matrice entikre

symktrique de taille n, et soit la suite exacte 0 --f Ker B A Z” -% Z” A Coker B --i 0. On d&init (Tors CokerB! 4) f orme d’enlacement associke Li B de la man3re suivante : soient u et u’ deux ClCments de Tors Coker B. On suppose que N’u’ = 0. Soient z et z’ Clkments de Z” tels que u = S(z) et ‘1~’ = S( 2). Alors le systhme IinCaire N’z’ = By’ a une solution y’ E Z”, et on pose

q5(u,u’) = $b’z E Q/Z.

La forme d’enlacement (Tom HI (M, 22): XM) d’ une 3-variCtC M est dCfinie comme suit : la suite exacte courte 0 - Z - Q -+ Q/Z -+ 0 induit une suite longue en homologie :

. . . i H,(A4, Q) i Ha(M, Q/z) L Hl(M, Z) - Hl(A4, Q) - . . . .

Remarquons que Im/? = Tors HI(M) Z). Pour deux Cl&ments u et u’ de Tors Hl(M, Z), on pose XM(u, u’) = u . z’ E Q/Z, oti 5’ E Hz(M, Q/Z) est tel que 7~’ = /?(z’), et oti la notation . dCsigne la forme d’intersection.

Deux variCtCs iVl et 111’ qui ont mCme type d’homotopie ont m&me forme d’enlacement (2 isomorphisme p&s). On montre que la forme d’enlacement d’une 3-variCt6 prCsentCe par chirurgie sur l’entrelacs L est la forme d’enlacement associCe B la matrice d’enlacement BL.

3. D6monstration du thbor&me

La dkmonstration de la rCciproque du thCor&me utilise la classification des formes d’enlacement obtenue par Kawauchi et Kojima dans [l]. Rappelons que si (G, 4) est une forme d’enlacement, elle se dCcompose en somme directe orthogonale epEP (G,, &), oti P dCsigne l’ensemble des nombres premiers et & est la restriction de $ B G,. Pour tout p premier, les iinvariants

~7 E N* determinent G, (- emEN* (Z/P”Z)‘.~). Pour tout p premier impair, les invariants x,” E {+l, -l} dkterminent &, (xr = (det +7/p), oti 4,” est la forme bilinkaire symCtrique

non-singulikre sur l’espace vectoriel (Z/pZ)‘.p”‘, canoniquement induite par &, et oti la notation (./.) dCsigne le symbole de Legendre). Enfin, les invariants CT, E 2/82 U 00 dkterminent 42

(GL = CuLEG2p; e 2zT2m-i~(u,u) = IGSr,Ile~u-, oh GT = {u E G2127n~ = O}, et si (:S, = 0,

on pose grn = cc).

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Formes d’enlacement des 3-vari&Ss et U(l)-invariamts

Pour toute forme d’enlacement (G, 4) et pour tout m E N*, posons GS:,(@) =

c UEG $i7i2 “-‘o(u,u).

Alors GSA(+) = npEp GSL(&). Or, GSA(4,) = IGyI CUEG2,c; e2i712n’~‘@(1L~U), et par suite

GS’,(4 = I~%Wd9 lYIpEp\r2> GS/,, (4,). Les sommes de Gauss GS’,,($,) pour p premier

impair, sont connues et non nulles (voir [3], IV, 53), de mCme que (??;I. L’invariant a,($) est done entikrement dCterminC par la somme de Gauss GS’,(4).

Soient M une 3-variCt6 connexe fermCe orientee, 1 son premier nombre de Betti et (Tors HI, X) sa forme d’enlacement. On veut dCterminer 1 et les invariants de Kawauchi-Kojima de (Tors HI, X) connaissant les invariants 2.~ et Torsa H1 (c’est-B-dire les invariants r;“).

Btape 1. - Pour tout p premier impair, les invariants .Zpnl dkterminent I et la classe d’isomorphisme de (Tors, H1, X,). Ceci rCsulte des deux lemmes suivants :

LEMME 1. - Pour tout p premier impair, on a :

Dkmonstration. - D’aprks [6], lZ,77z I = IHl(M, Z/pmZ)(i, d’&

I %,I I On en dCduit que I = pi (z+c~2-l Ti), puis le r&ultat.

i

Isi.):= [4], Pour tout entier impair z, on pose E(X) =

i si IC z 3 [4].

LEMME 2. - Pour tout p premier impair, on a : Vm E N*! $~(p)“p = .

De’monstration. - Les invariants 2,~ se calculent B partir de la matrice d’enlace-tnent BL d’une prCsentation de chirurgie de M, ainsi que les invariants de Kawauchi-Kojima de la forme d’enlacement, puisque celle-ci est induite par BL. De plus, tous ces invariants ne dependent de BL qu’g Cquivalence stable pr&s (au sens de [6]), et les deux termes de 1’Cgalite 2 dCmontrer sont multiplicatifs pour la somme directe des matrices d’enlacement (et jamais nuls).

On va d’abord montrer la formule dans le cas oti BL est de taille 1 (71 = 1). On suppose BL = (b). Si b = 0, on a Tors CokerBL = 0, d’oti pour tout m E N*, TF = 0 et xr = 1. D’autre part, pour tout N E N*, arg Z’~F = 0, ce qui donne immkdiatement le rksultat. Supposons maintenant b # 0. On Ccrit b = p”c avec Ic E N*, et c premier avec p. Alors Tors CokerBL N iZ/bZ z Z/p”Z @ Z/d et X

est dCfinie sur Z/bZ par X([c], [cl) = g. On a alors xi = (c/p) et XT = 1 si m. # k. D’autre part,

d’aprks [3], IV, $3, on a G,v(q) = fin pour tout N impair. Par suite :

Or, on vCrifie que ~(p m+l) = e(pmpl) et c e~p”cy2 =

YEZlP’Z

$$~c~p~~kE,pzMk, si I > k ‘>

4,l 7

C. Gille

z d’oh -

@+I z

Z,k&, = p+ (c/p)~(p) et F =

1 si m > k,

Pm 1 p si m < k.

On obtient alors la formule annoncee. Le resultat dans le cas oti BL est diagonale s’en deduit immediatement. Dans le cas general, on sait qu’il existe des entiers bi, . . . , b, et une matrice S E SL((n+v), Z) telle que %(BL $(bl) @. . . @(b,))S es une matrice diagonale (voir [5], Lemma t 2.2). On en deduit la formule pour BL $(bi) @. . . $(b,), puis pour BL apres simplification.

,!hp 2. - On suppose donnu Torsa Hi (et la classe d’isomorphisme de (Tors, Ht, X,) pour tout p premier impair). Alors les invariants Zani determinent la classe d’isomorphisme de (Tors;l Hi, X,). Ceci resulte du lemme suivant :

LEMME 3. - Pour tout m E N*, on a GSA = 2-y’ lTorsHt]fr z.

Dkmonstrution. - 11 existe une matrice S E SL(n, Z) et une matrice B1 entiere symQrique de determinant non nul et de taille n - 1 telles que tSB~S = B1 @ 01 (voir [2], Lemma 1). La forme

d’enlacement associee a BL est celle associee a BI. On a done GS:, = CzcfzB~ c2irr2”‘-‘tzB~‘z.

D’apres une formule d’inversion des sommes de Gauss demontree dans [4], Theorem 8.1, on a alors :

Par ailleurs, utilisant le fait que Ganh (q) = 2fey (d’apres [3], IV, §3), on a :

On en deduit que GSL = 2-p’ 1 det B1 14 G, et comme 1 det BI 1 = ]Tors Hi 1, on a le resultat.

Note remise le 30 janvier 1997, acceptee aprhs rkvision Ie 2 juin 1997

Rbfkences bibliograpbiques

[I] Kawauchi K. et Kojima K., 1980. Algebraic classification of linking pairings on 3-manifolds, Math. Ann., 253, p. 29-42.

[2] Kyle R. H., 1954. Branched covering spaces and the quadratic forms of links, Ann. Math., 59, p. 539-548. [3] Lang S., 1994. Algebraic Number Theory, Second Edition, Springer-Verlag, New-York. [4] Mattes J., Polyak M. et Reshetikin N., 1993. On invariants of 3-manifolds derived from abelian groups, Quanrum Topology,

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