Foucault et Le Pouvoir de Gilles Deleuze

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Cours de G. Deleuze sur Foucault

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Deleuze/ Foucault - Le Pouvoir Beaucoup dentre vous ont suivi ses cours, un moment ou un autre, et ont t marqus par lui, et lont aim. Je crois quun hommage lui rendre, et celui quon peut lui rendre, cest relire ses livres pour en valuer limportance, depuis la "Naissance de lhistoire". Car je crois quil a fait rellement une uvre.Alors, partir de maintenant, nous commenons comme la seconde partie de cette tude sur Foucault. Et la seconde partie, cest le deuxime axe de sa pense, et ce deuxime axe de sa pense concerne le pouvoir. Il tait exig par le premier axe, qui concernait le savoir, et tout le trimestre prcdent nous avons t comme amens en effet voir comment le domaine du savoir exigeait dans des conditions trs prcises une rponse qui devait venir dailleurs. Et nous avons juste pressenti que sans doute, cette rponse qui devait venir dailleurs, elle ne pouvait venir que dune analytique du pouvoir, que dune analyse des rapports de pouvoir. Jessaye de rsumer une fois de plus ce que nous retenons de lanalyse prcdente du savoir.- Le premier point cest que, les formations historiques se prsentent comme des strates, des formations stratifies. On va voir peut-tre que par rapport au problme du pouvoir, cette notion de strate ou de stratification, telle quelle apparait trs rapidement au dbut de Larchologie du savoir, prend une importance, prend une nouvelle importance par rapport au problme du pouvoir. Vous le sentez tout de suite, en tous cas il faut le sentir tout de suite, que la question ce serait : et le pouvoir lui, est-ce quil est stratifi ? Mais enfin, on en est pas encore l. Ces formations stratifies se prsentent comment ? Elles se prsentent comme de vritables couches sdimentaires. Couches de quoi ? Couches de voir et de parler. Les paroles sentassent, les visibilits sentassent. Des couches de voir et de parler.- Deuxime point : ces couches font appel deux formes : voir et parler, mais plus prcisment, forme du visible et forme de lnonable. Et chaque formation stratifie est faite de lentrelacement de ces deux formes. Le visible et lnonable, ou leur condition formelle, la lumire et le langage.- Troisime point : bien que ces deux formes sentrelacent pour constituer les formations stratifies, il y a htrognit des deux formes. Ce sont deux formes irrductibles,ans commune mesure. Le visible nest pas lnonable. Parler nest pas voir. Si bien que lentrelacement des deux formes est une vritable bataille et ne peut tre conue que comme treinte, corps corps, bataille. Et finalement, pratiquement, est-ce que cest pas a qui intresse Foucault et qui explique beaucoup de son style ? A savoir : tout se passe comme si pour lui il sagissait un peu dentendre sous le visible des cris, et inversement, arracher aux mots des scnes visibles. Des clairs sous les mots, des cris sous le visible, perptuelle treinte des deux . On la vu a, propos de Roussel, de Raymond Roussel, cest a quil va chercher chez Roussel. Les clairs, l, qui schappt des mots, et chez Brisset - trotteur insolite, que Foucault commente, plus brivement quil commente Roussel - et chez Brisset, il va chercher des cris sous les mots. Jouvre une parenthse trs rapide, parce que jen peu parl de Brisset, du texte sur Brisset, mais.. Brisset, ce livre sur le langage, a de trs curieuses oprations quon aurait tort de prendre pour des exercices dtymologie fantaisistes. Il y a une bellespage de Brisset sur le mot saloperie. La dmarche de Brisset... quest-ce quil nous dit Brisset ? Il dit : et bien voil, saloperie cest quoi ? cest sale, pas propre, sale ; eau, e-a-u - car leau cest lorigine universelle, cest de l que sortent les grenouilles et nous sommes tous des grenouilles, cest la grande ide de Brisset), sal-o-prie, tre pris. a veut dire que les captifs, dans la guerre, les captifs sont mis dans une espce de... de terrain, humide, ils sont jets dans de leau sale, les captifs sont mis dans leau sale : sale-eau-pris. Ils sont pris dans leau sale. Voil. Vous voyez la dmarche ? Le mot. Si ctait de ltymologie, ce serait une misrable aste mais cest mieux que a, du mot il va arracher une scne visible : le captif l qui baigne dans une espce de fosse avec de leau sale. Donc, et l-dessus, de cette scne visible, il arrache un cri : les vainqueurs, autour de cette fosse, crient normalement saloperie ! . Vous voyez, ils injurient les captifs. De a, nouveau retour une scne visible : saloperie devient salle-aux-prix. A savoir la salle, comme ici - aux, a-u-x - prix, p-r-i-x. En effet, on ne se contente pas dinjurier, les vainqueurs ne se contentent pas dinjurier les captifs en disant saloperie , cest--dire tu es pris dans leau sale, ils les achtent pour en faire des esclaves, ils les achtent dans ce qui est ds lors une salle aux (a-u-x) prix (p-r-i-x). Je marrte parce que des comme a, dans Brisset, a na pas de cesse. Mais en quoi ce nest pas un exercice tymologique ? Vous voyez, perptuellement il part des mots, il en extrait une scne visuelle, il bruite la scne visuelle. Le bruitage, le premier bruitage de la scne visuelle, induit une autre scne visuelle, et il va oprer le bruitage de la seconde scne visuelle. Cest un procd potique trs intressant qui fait les plus belles pages de Brisset et perptuellement, il y a cette espce dhistoire anime qui saute dun cri une scnvisuelle, une visibilit, dune visibilit un cri, ce pour quoi, videmment, Foucault ne pouvait pas passer ct de Brisset. Donc, htrognit des deux formes qui sont perptunt en rapport de capture, dtreinte, de corps corps, lune avec lautre.- Mais, quatrime point, mme si on dit, cest des rapports de bataille, comment le corps corps est-il possible, comment ltreinte est-elle possible ? Puisque les deux formes sont irrductibles. Et lon a vu la rponse, au niveau de ce quatrime point, finalement a ne peut pas tre autre chose que ceci la rponse, savoir : il faut bien quil y ait un rapport entre les deux formes sans rapport, le visible et lnonable, la lumire et le langage. Il faut bien quil y ait un rapport entre ces deux formes sans rapport, ds lors le rapport ne peut venir que dune autre dimension. Cest une autre dimension qui va faire surgir le rapport dans le non-rapport des deux formes. Vous voyez, si l jinsiste parce que a va tre trs important pour nous, mme avant quon corenne quoi que ce soit - jai plus le choix, il faut que cette autre dimension soit informelle et non stratifie, sinon ce serait pas une rponse au problme. Ce nest pas une rponse. Il faut que cette dimension soit une autre dimension que celle du savoir. Et quelle se distingue du savoir entre autre chose par ceci : elle ne sera pas stratifie, elle ne sera pas formelle. En dautres termes, attendez vous.. il ne peut pas y avoir de forme du pouvoir. Je veux dire, presque, il faut comprendre abstraitement avant de voir concrtement. Et on a vu en dernier point, en effet : pourquoi et comment le savoir se dpassait lui-mme vers une autre dimension. Et a a t lobjet de notre dernire sance : comment le savoir se dpasse vers une autre dimension ? Et la rponse laquelle.. et ctait lanalyse sur laquelle on a termin, de Azert. Et lanalyse de cet exemple insolite, Azert, qui tait comme la contribution propre de Foucault ct des exercices de Roussel et des exercices de Brisset, ces trs curieuses pages de Foucault quand il sbat dans Azert Azert, en disant : mais voil vous demandez un exemple dnonc, je vous le donne : Azert. Et puis allez vous faire voir. Et bien, mon avis, il savait o a le menait. A savoir, a le menait lide suivante que lfrontire, la distinction faire, ne passe pas entre lnonc et ce quil dsigne, ni mme e lnonc et ce quil signifie. Mais alors entre quoi passe la frontire ? La frontire passe entre lnonc et ce quil incarne, ou ce quil actualise. Et quest-ce quil actualise ?uest-ce que cest a, cette frontire entre lnonc et ce qui l actualise ? ... Lnonc ar une rgularit cest--dire est lanalogue dune courbe. Mais quest-ce que fait une cour ? Elle rgularise des rapports entre points singuliers, elle rgularise des rapports entre singularits. Azert rgularise des rapports entre points singuliers, cest--dire les rapports entre les lettres dans la langue franaise et les doigts, entre la frquence des lettres, les voisinages de lettres, et les rapports de doigts. Voil des rapports entre singularits. Azert est lnonc, comme la courbe qui passe des voisinages de ces singularits. En dautres termes, lnonc Azert renvoie quoi ? il actualise des rapports de force. Ces rapports de force, cest des rapports de force entre les lettres et les doigts dans la langue franaise. Je dirais exactement : voil comment le savoir se dpasse vers le pouvoir. Pourquoi ? Parce que le pouvoir est rapport, et que le rapport de pouvoir, cest strictement la mme chose quun rapport de force. Et chez Foucault, rapport de pouvoir, au singulier, et rapports de force, au pluriel, sont strictement synonymes. Si le savoir se dpasse vers le pouvoir, cest dans la mesure o les relations des deux formes, (forme du visible et forme de lnonable), cest dans la mesure o la relation des deux formes se dpasse vers des rapports de force quelle incarne. Si bien quon a la formule abstraite du rapport savoir-pouvoir, avant de comprendre concrtement de quoi il sagit dans le pouvoir. Et vous voyez limportance alors, pour tout notre avenir, de la remarque de Foucault : lnonc comme lment du savoir, lnonc est toujours un rapport avec autre chose, bien que cette autre chose sen distingue infiniment peu. a revient exactement dire : les relations de savoir sont fondamentalement en rapport avec autre chose qui sont les rapports de pouvoir. Bien que les deux, rapport de pouvoir et relations de savoir, se distinguent infiniment peu. Lautre chose, presque semblable. Seulement cest un "presque". Do notre problme devient bien : quest-ce que cest le pouvoir ? On sait dj la nse fondamentale de Foucault : le pouvoir est rapport, tout comme le savoir est relation de forme, le pouvoir est relation de forme, le pouvoir est relation de force. Vous me direz cest pas trs fort, le pouvoir est rapport de force. a dpend, a dpend on va voir. On va voir. Et puis faut quon pense, que si on avait compris ce que signifie rapport de force, la conception du pouvoir en aurait t radicalement change. Or, vous direz bon droit : Mais cest pas le seul avoir dfini le pouvoir par des rapports de force , heureusement. Si il y a de loriginalit de Foucault ce niveau, cest au de la conception du rapport de force quil faut la chercher. Voil, jai essay de regrouper notre acquis, alors l je lance un vif appel : est-ce quil y a des problmes sur tout ce qui sest pass au 1er trimestre ou bien est-ce que tout va bien ? Il y a une autre question : est-ce que dans votre lecture de Foucault vous tes en accord avec la faon dont est reprsent le problme du savoir ? mais a on va le garder pour la fin de lanne si... je sais pas. Enfin cest maintenant quil faudrait parler si vous en avez envie. Vous en avez pas envie... Bien... Ah ! ouais !- Le terme de formation discursive na jamais figur dans votre analyse. Vous parlez de formation historique.. (question mal audible)- Cest pas faux. Jamais cest peut-tre un peu svre. Il me semble que jen ai parl, je e... jespre que a y est aussi parfois, jai plutt employ le terme rgime dnonc. Rgiis. Je vais vous dire pourquoi, je crois.. pourquoi en effet vous avez tout a fait raison. Mais enfin on fait toujours son choix dans la terminologie. En revanche, il emploie trs trs rarement le mot strate, et jy ai donn une importance essentielle strate. videmment, cest des petits choix quon fait, comme a. Mais jai une raison pour laquelle jai trs peu, en effet, parl de formation discursive : cest que je redoute un peu, en effet, lambigut cet gard. Au contraire, je suppose que Foucault aimait beaucoup lambigut a cet gard. Car, discursive a un sens prcis en franais, et dan terminologie philosophique. Cest un certain rgime de dduction, un certain rgime dductif, qui dfinit un discours. Et lui-mme reprendra le mot discours , par exemple dans un titre : Lordre du discours. Il va de soi quil se fait des discours une conception compltement nouvelle. Et en quoi consiste la nouveaut de la formation du discursif chez Foucault ? Cest que une formation discursive, cest une famille dnoncs. Alors, une fois dite, il se fait de lnonc une conception paradoxale et compltement nouvelle. Alors, discursif cest chez lui une certaine manire de faire passer sa conception de lnonciatif. Du coup, moi javais pas de raison, il me semble, de reprendre le terme discursif chez lui, parce que cest un terme de malice. Cest une espce de mot relativement neutre, o on peut mettre beaucoup de choses, et par lequel il fait passer son truc lui, savoir les noncs, la famille dnoncs, le rgime dnoncs. Maichaque fois que jai parl de famille dnoncs , vous pouviez dire formation discursivt ce que jai essay de montrer, cest en quoi une famille dnoncs chez Foucault - qui ne se dfinissait aucunement par une ressemblance des noncs entre eux, mais presque par la possibilit de prolonger les sries de singularit, ce qui est pas tout fait diffrent - tait une conception encore plus originale. Alors, en effet, formation discursive cest famille dnoncs . Mais votre remarque est tout fait juste. Dans bien dacas, il me semble, je suis amen faire... Chacun sa lecture. Je suis amen privilgier certains termes, euh.. hier citer dautres termes. Je ne sais pas, je sais pas. a se reproduira pour le pouvoir srement. Il y a un... il y a une page de Foucault o il emploie une fois un mot qui me parait tellement important, tellement claircissant pour lensemble de sa thorie, cest le mot diagramme . Et jinsisterai normment su diagramme, bien que... bien que le mot ne soit employ par Foucault que une fois mais dans une page essentielle. Alors tout dpend aussi, l vous savez, chacun de nous est comme a... Si on est amen privilgier certains termes par rapport dautres quand nous lisons, cest aussi dans la mesure o nous accordons telle page ou telle page, une importance dcisive. Un livre, il nest jamais homogne, un livre il est fait de temps forts et de temps faibles, les temps faibles tant parfois gniaux. Je parle rythmiquement, les temps faibles au sens rythmique. Alors, euh.. cest vident que deux personnes qui lisent avec passion un livre, il suffit que la passion soit l, je suis pas sr que la distribution des temps forts et des temps faibles, soit la mme dans deux lectures. Si bien que les diffrences entre lectures, elles prcdent de beaucoup, vous savez, les problmes dinterprtation. Les diffrences entre lectures, quand un livre est riche, et beau, elle se passent dj au niveau du rythme de la lecture. Et vous avez beau lire tout bas, il y a pas de lecture qui ne soit rythmique, cest dire avant mme que vous ayez compris ce dont il tait question, il y a des signaux qui vous parviennent, et ces signaux cest des trucs qui, comme des petites lampes, qui sallument et que vous vous dtes : ah l, cest quelque chose dimportant .t cest vrai que la lecture cest tout un exercice respiratoire, un exercice rythmique, avant dtre un exercice intellectuel. Et l, les critres du choix pour quelquun, pour dire : ah l, cest essentiel , cest pas parce que lauteur a mis en italique des phrases, parce que quand il met en italique, a veut dire que cest sa lecture lui, a veut dire quil est en train de se lire lui-mme, et que il sadresse son lecteur en disant : a cest important . Alors il faut lcouter, parce quil a quand mme un point de privilgi, lauteur. Cest lui qui sait, hein. Mais vous tes souvent amens dporter lesliques, alors a, il y a une question, de ce thme du rythme, la distribution des temps forts et des temps faibles, qui fait que encore une fois, linterprtation dcoule de cette rythmique. Cest mme par l que le lecteur, il participe quand mme la cration de lauteur. Cest un peu comme quand, vous savez, quand vous lisez de la philosophie, ou plus forte raison quand vous lisez de la littrature, cest trs proche de lorsque vous coutez de la musique. A la lettre, vous nentendez pas de la musique si vous ne saisissez pas le rythme. Ou mme parfois autre chose. On a souvent dit, et a me parait dune justesse vidente : on nentend pas Mozart, on nentend pas la lettre si lon est pas sensible la distribution des accents. Si vous ne rpartissez pas les accents, Mozart, la limite, est un mdiocre musicien. Cest un musicien de laccent. Vous pouvez ne pas le percevoir la lettre. Mais dans la littrature et dans la philosophie cest comme a aussi. Je pense un auteur comme Leibniz, vous prenez une page de Leibniz, mais avant mme, en la lisant, vous ne pouvez pas ne pas vous demander quelle hauteur est-ce, comme une musique, quelle hauteur, quel niveau. Comme une pense toujours plusieurs niveaux, elle sexpose plusieurs niveaux. Lire, cest assigner telle page tel niveau, telle page tel niveau.Alors, en effet, je reprends Foucault, formation discursive , je tombe sur formation discursive , moi je le mettrais au plus bas niveau, pas du tout que ce soit une mauvaise notion, mais cest une notion pige. Je conois trs bien quelquun qui, au contraire, en ferait le centre. Ce serait une tout autre distribution des rythmes, et des temps forts et des temps faibles. Cest pour a que la seule chose que je prtends moi, cest pas du tout vous imposer une lecture, cest vraiment vous en proposer une, pour que vous vous fassiez la vtre. Et comprenez que ce moment-l a servirait pas, ce que vous mavez pas dit du tout, vous avez eu cette gentillesse, a montrait que votre question tait parfaite, a servirait pas de me dire : mais l tas tort . Si vous distribuez autrement les accents dans votre lecture, videmment ya des lectures intenables, ya des lectures intenables, toujours, cest des lectures qui banalisent, cest des lectures qui transforment les choses nouvelles en choses toutes faites, voyez ce que les imbciles disent aujourdhui sur Foucault. Alors ce moment-l, faut dire, cest pas des lectures intenables, cest des non-lectures. Ils ont jamais lu, ils savent pas lire. Tout comme il y a des gens qui ne savent pas entendre de la musique (je le dis dautant plus gaiement que jen suis un), cest un sens qui vous manque. Ce qui est embtant cest de faire un livre sur Foucault lorsque toute lecture vous manque, cest fcheux. Mais sinon, toutes les lectures qui sont des lectures sont bonnes. Voil. Alors on y va. Surtout que dans cette histoire... non, je termine encore les remarques gnrales en disant : tout ce quon a trouv dune certaine manire, et l aussi cest une question de rythme ici, tout ce quon a trouv au niveau de laxe du savoir, va comme se dplacer au niveau de lautre axe, laxe de pouvoir. Et prendre de nouvelles rsonances. A savoir, au niveau de laxe du savoir, on avait trouv quoi ? On avait trouv trois choses qui concernaient les deux formes du savoir. A savoir,- premire chose : il y a diffrence de nature ou htrognit des deux formes ;- deuxime chose : a nempche qui il y ait prsupposition rciproque et treintes mutuell, le visible suppose lnonable et lnonable suppose le visible, les deux, corps corps,erptuellement ;- et la troisime chose, a nempche pas enfin quil ait pris ma place sur lautre : savr, primat de lnonc sur la visibilit. Il fallait maintenir ces trois accents toniques : htrognit, prsupposition rciproque, primat. Primat de lun sur lautre. Et bien ces thmes, ces trois accents, on va les retrouver cette fois-ci au niveau des rapports pouvoir-savoir. Et il faudra bien quentre le pouvoir et le savoir il y ait htrognit, diffrence de nature, dune certaine manire non-rapport. Il faudra bien aussi quil y ait prsupposition rciproque : pas de savoir sans pouvoir et pas de pouvoir sans savoir. Il faudra bien encore quil y ait primat de lun sur lautre, savoir que ce soit le pouvoir qui soit dterminant. Et sil y a htrognit, vous voyez tout de suite ce qu veut dire. A savoir, le pouvoir en lui-mme nest pas su, il nest pas objet de savoir. Mais dans le premier trimestre javais fait un rapprochement entre Foucault et Kant, au niveau prcisment de lirrductibilit de lhtrognit des deux formes, qui chent pas le visible et lnonable, mais taient lintuition et lentendement. L, je pourraisaire galement un rapprochement avec Kant. Car Kant est sans doute le premier avoir pos une diffrence de nature entre deux fonctions de la raison. Une htrognit radicalente deux fonctions de la raison. Et ces deux fonctions de la raison, il les appelait raison pratique et raison thorique. Et les deux taient htrognes, et pourtant la raison pratique avait le primat sur la raison thorique. Elle tait dterminante. Et le primat de la raison pratique devait tre un thme fondamental de Kant. Et pourtant, lhtrognit des deux fonctions de la raison (fonction pratique et fonction thorique)ntrainait quoi ? Que la raison pratique ne soit pas connue et ne donne rien connaitre. La raison pratique tait dtermine par la loi morale selon Kant, mais la loi morale, elle, ntait pas connaissance ni objet de connaissance. Il ny avait rien connaitre dans le domaine de la raison pratique. Chez Foucault cest diffrent parce que les deux, aussi bien le savoir que le pouvoir, se rfrent des pratiques. Pour Foucault il ny a que des pratiques. Reste que les deux pratiques, pratique du savoir et pratique du pouvoir, sont irrductibles. Si bien que le pouvoir ne peut pas tre su. Et pourtant il y a prsupposition rciproque. Ou du moins le pouvoir sera indirectement su, il sera indirectement su, il sera su, dans les relations de savoir. Cest le savoir qui nous donnera un savoir du pouvoir. Bon vous voyez tous les thmes l quon a trouvs comme rapport entre les deux formes du savoir vont se dplacer suivant lautre axe. Si bien que si javais prsenter la pense de Foucault, pour le moment, jaurais comme les deux axes, avec dplacement, dun type de problme, dun axe lautre, e du savoir, axe du pouvoir. Quest-ce quil se passe maintenant ? Apparait un troisime axe. Il aura fallu que quelque chose apparaisse insuffisant Foucault dans la distribution des deux axes, quun problme plus ou moins urgent devienne pour lui de plus en plus urgent, pour quil ajoute ce troisime axe, et fasse un remaniement de sa pense la fin. Mais on en est pas l, quoi que, on la dj abord, et ce que je voudrs cest que tout ce moment o on va rester sur le problme du pouvoir, vous sentiez plusieurs occasions, comment se profile, mais de manire mme trs confuse, la ncessit dun troisime axe. Mais pour le moment on va se battre avec les deux axes, cest dire cette espce dexcroissance sur le savoir : laxe du pouvoir, qui vient donc recouper laxe du savoir. Ce sera de plus en plus une pense en trois dimension, ds quil aura trouv trois dimensions.Et bien, quest-ce que le pouvoir ? L je voudrais aujourdhui que, presque, on en reste ce que Foucault na pas fait. A savoir un expos des principes du pouvoir. Et pourquoi il na pas fait un expos des principes ? Parce que dune certaine manire, cest vident, dune certaine manire toute sa pense consiste dire : le pouvoir na pas de principe. Mais enfin, dire le pouvoir na pas de principe... Et en plus il voulait, et lui a choisi alors, dans la rdaction de ces livres, il a choisi le point de vue de limmanence. A savoir le pouvoir est pris dans des rapports de savoir. Donc il faut le saisir dans son immanence au savoir. Mais, on la su depuis le dbut, limmanence nempche pas la diffrence de nature entre pouvoir et savoir. Si bien que si moi je prends lautre possibilit, je mettrai laccent sur la diffrence de nature entre pouvoir et savoir. Et ce moment-l, je suis en droit dessayer, partir des textes de Foucault, de dgager des principes du pouvoir. Simplement, la seule tache pour moi ce sera de ne pas oublier, chaque instant, que tout a cest trs bien, mais a nempche quee pouvoir nexiste que dans ces relations dimmanence au savoir. Vous voyez, Foucault dans ses textes, je crois, privilgie les relations dimmanence au savoir mais nen maintient pas moins quil y a diffrence de nature entre pouvoir et savoir. Moi je voudrais, pour claircir la pense de Foucault, et uniquement dans ce but, je voudrais faire linverse. Mettre laccent sur la diffrence de nature, sans oublier une fois quil y a limmanence. Et bien quand je dis.. donc, principe du pouvoir a revient dire quoi ? Cest dj, quest-ce que le pouvoir ? Est-ce que cest une question lgitime ? Je veux dire, le pouvoir, est-ce quil est justiciable de la question quest-ce que ? Une fois dit que le pouvoir cest comme le savoir, cest une pratique. En dautres termes, pour le prendre au srieux, le pouvoir a se pratique. Vous me direz la savoir aussi, oui, daccord, mais on la vu, le savoir a se pratique, cest voir et parler, et rien ne prexiste voir et parler. Et bien le pouvoir aussi a se pratique, simplement cest deux pratiques qui diffrent en nature. Il suffit de dire que la que la question quest-ce que le pouvoir ? renvoie une pratique. Il faut que linspiration de la question soit elle-mme pratique. Linspiration de la question est elle-mme pratique, a veut dire quoi ? a veut dire : quen est-il aujourdhui ? Et l, on touche quelque chose sur la mthode de Foucault. Jamais Foucault na pos, dune certaine manire, na posutre chose que des problmes historiques. Et pourtant, jamais Foucault na pos un problme historique sans que le centre de sa pense ne concerne aujourdhui, ici et maintenant. Pourquoi admire-t-il Kant ? Sans doute il admire Kant pour lensemble de sa philosophie. Mais il admire particulirement Kant parce que Kant, selon Foucault, a t sans doute un des premiers philosophes poser la question du sujet dans les coordonnes ici maintenant. Et que le sujet transcendantal, le sujet universel chez Kant, est insparable dun sujet ici et maintenant, cest dire : quen est-il aujourdhui, au moment de Kant, quen est-il au sicle des lumires ? Et il oppose Kant Descartes en disant : Descartes en restait un moi universel. Le sujet du cogito cest un sujet quelconque, tandis que le sujet kantien sera toujours un sujet du moi au sicle des lumires. Et pourquoi est-ce que le problme historique pour Foucault est fondamentalement li la question quen est-il aujourdhui ? ? Prcisment par la notion de ique. Cest la notion de pratique, cest la pratique, qui est la seule continuit de lHistoire jusqu maintenant, jusqu prsent. Cest lenchanement des pratiques qui est la s continuit historique. Compte tenu des ruptures, des mutations de pratiques, etc., cest llment pratique qui va de lancien temps, qui va du pass au maintenant.Ce qui me permettrait de rpondre une question, moi qui mintresse beaucoup, cest : En quel sens ce qui ne fait pas partie explicitement dune oeuvre - ctait une question que Foucault avait trs bien pose, Klossowski aussi propos de Nietzsche - en quel sens les lettres de Nietzsche par exemple font-elles partie de loeuvre ? ... Est-ce quelles en font partie, est-ce quelles en font pas partie ?... La question que je poserais cest en quel sens les entretiens de Foucault font-ils ou ne font-ils pas partie de son oeuvre ? Si se posait le problme dune publication des entretiens... quel sens est-ce quils ont ? a me parat vident. Les entretiens dveloppent toujours le ici-maintenant qui correspond un livre. Le livre lui portant sur une priode historique. Si bien quil y a une corrlation stricte entre les entretiens et les livres. Et cest la ce que je voudrais commencer avant mme de commencer vraiment mon analyse, cest a que je voudrais dvelopper : limportance de ces deux questions : Comment a se passe telle poque ? Quen est-il aujourdhui ?Il y aura continuit mais une espce de continuit souterraine. Et il y a que la pratique qui peut faire saisir cette continuit - cest pas une continuit rflexive. Cest pour a quil nen parlera pas dans ses livres. Mais lactualit de ses livres vient de ce que le ici-maintenant simpose de toute vidence. Si bien que la cohrence de Foucault du point de vue de sa vie, de son oeuvre, mapparat trs claire. Quest-ce qui se passe ? Je prends Surveiller et Punir. Surveille et Punir, on la vu, traite dune dure courte (fin du 18me dbut du 19me sicle). Il sagit de quoi ? Il sagit du droit pnal et dea prison. Bon. Parrallellement, dans les entretiens de cette poque, de quoi soccupe Foucault ? La prison aujourdhui. Pratiquement, Surveiller et Punir peut tre considr comme le livre auquel rpond quelle pratique ?Foucault forme cette poque-l, autour de 70, un groupe dit gauchiste qui je crois a eu beaucoup dimportance parce que a a t la seule formation aprs 68, il me semble, avoir fonctionn ou a avoir propos un fonctionnement trs particulier - l aussi cest une question de pratique - et ce groupe cest le Groupe Information Prison (GIP). Je dis que cest le seul groupe gauchiste qui ait fonctionn, peut tre que jexagre - il a essaim en tout cas, puisque sur le modle du GIP sest constitu un Groupe Information Psychiatrie, des Groupe Information migrs. et ce moment l il y a eu de grands foisonnements.Ce quil ny a de pas bien, nest-ce pas, chez ceux qui parlent aujourdhui de Mai 68, cest quils en font un espce de phnomne intellectuel en oubliant que ce fut un phnomne mondial et de pratique mondial. Et que mai 68 a a t lexpression en France de quelque chose... qui se passait ou qui se passerait en Italie au japon, en Amrique etc. et quon ne peut maintenant penser cette priode si on ne la mondialise pas. Or, je dis que, aprs 68, quest ce qui se passe ? Il y avait re-formation de groupes relativement centraliss. Je me rappelle la gauche proltarienne tait trs centralise. Il y avait des chefs l dedans. (rires) Des chefs qui voulaient du sang. Quest-ce qua fait Foucault cette poque ? Je parle de pratique mais je crois que cest pas manire de faire une parenthse, cest que cest trs difficile de comprendre, de vivre aujourdhui si vous avez pas un peu le pressentiment que cest ce qui est toujours rest pour nous problme pratique. Jai le sentiment que il y a eu dabord une valuation chez Foucault : savoir - valuation pratique : "quelque chose va se passer dans les prisons". Bon ; cest une valuation politique. mon avis cest trs difficile de comprendre quoi que ce soit en politique sans tre travers par ces valuations : quest-ce qui va se passer hein ? Limpression que quelque chose allait se jouer, se passer dans les prisons ... Vous me direz "cest pas difficile, il y avait eu des mouvements". Oui les mouvements commenaient. Mais je recommence la mme chose que pour la lecture : ce qui est difficile, cest de dire : "ah bah oui a cest important"... "a a va pas avorter". Il y a eu une grande valuation de Foucault se disant "l il y a quelque chose". Comme si dans la torpeur de laprs 68, bizarrement, un foyer se rallumait mais dans les prisons. a avait t prcd par le grand mouvement des prisons en Amrique. Foucault traillait sur les prisons, travaillait thoriquement sur la prison ou il avait lair de travailler thoriquement sur la prison au 18me / 19me, il tait trs sensible au mouvement des prisons en Amrique, il tait trs sensible laffaire Jackson qui a lpoque avaiune grande importance, et il pressentait... quelque chose va se passer en France.Et son ide de la formation du GIP cest quoi ? Et bien cest faire un groupe non centralis. Bon. Par l cest une descendance de 68. 68 se prsente comment ? un mouvement non centralis, qui se voulait un mouvement non centralis. Disons tout de suite : un nouveau type de lutte. Guattari avant 68 avait lanc, ce qui tait une interprtation dj de formes de luttes qui surgissaient, lide de luttes "transversales", par opposition aux luttes centralises de type classique (cest dire centralises autour dun syndicat, autour dun parti - il sagissait videmment du parti communiste et de la CGT). Les luttes transversales... il semble que mai 68 a t lclatement dun rseau transversal o les luttes cessaient dtre centralises. Donc un nouveau type de lutte, on va voir limportance que a a quand on va revenir la thorie. Et le GIP sest form comment, quest-ce que cest une lutte transversale par opposition aux luttes centralises ? Cest une lutte o il ny a pas de reprsentants. Personne ne se fait reprsenter. Personne ne peut dire je reprsente ceux-ci. Comprenez... si vous croyez la philosophie, vous ne penserez jamais que - lorsquon parle dune critique de la reprsentation aujourdhui - vous penserez pas que cest une affaire dintellectuels. On ne peut pas critiquer la reprsentation si on est pas sensible la pratique quentrane une telle critique. Et la pratique quentrane une telle critique est trs simple, elle veut dire "je ne parlerai jamais pour les autres", "je ne me croirais jamais le reprsentant de quelquun". Alors a ctait trangement nouveau. Foucault je crois - il y a des gens qui nont pas le droit de critiquer la reprsentation, parce que quand ils critiquent la reprsentation cest vraiment du bout des lvres et ils critiquent la reprsentation en prtendant reprsenter quelque chose ou quelquun. Je dirais que cest la critique acadmique de la reprsentation. Il ny a de critique que pratique. Si je critique en tant que philosophe la reprsentation je mengage quelque chose aussi : ne faire partie daucune commission. Cest aussi simple que a. Cest dire ne jamais rien reprsenter ; sinon a va plus. comment voulez vous dun ct dire "la reprsentation a va pas, faut faire une philosophie qui nest pas une philosophie de la reprsentation", et puis continuer tranquillement reprsenter ? (rires) Cest pas bien srieux. Je veux dire, si on pose la question de la vie et de loeuvre - cest pas quil faille tre cohrent tout prix, mais ct quon peut pas avoir de trs bonnes ides, nest-ce pas, si on saperoit pas quon est enre en reprsentation quand on dit bas la reprsentation ... Quest-ce quil a saisit Fcault ? Il a saisit quelque chose de crucial travers les prisons. Il a saisit que les gens ne cessaient pas de parler pour les prisons. Mais que les prisonniers ils ne parlaient jamais. Il faut quand mme vous remettre, cest pourtant pas vieux, les choses elles ont beaucoup boug, en pas tellement dannes, parce que maintenant ce nest plus vrai, ya les petites annonces de Libration par exemple. Les prisonniers ils parlent pour leur compte. Bon. Mais vous savez, mme aprs 68 ctait effarant ! la tl il y avait tout le temps des missions sur les prisons puisque ctait dj un sujeta mode. Et on faisait parler strictement tout le monde : les avocats de gauche, les avocats de droite, les visiteuses de prison, elles taient patantes, ctait souvent des dames merveilleuses et tout a, des juges, des gens de la rue, la concierge... nimporte qui sauf les prisonniers. Bien plus : sauf les anciens prisonniers. Yavait que une personne qui navait pas le droit de parler de la prison, ctait celle qui y tait ou qui y avait t. La critique de la reprsentation, a voulait dire : les prisonniers, ils avaient pas besoin de reprsentants pour dire ce quils ont dire. Simplement, il fallait organiser un groupe. Un groupe transversal. Un groupe non centralis. On part dune hypothse de travail : Foucault et dautres, ils avaient labor un questionnaire - ctait pas marrant hein - jessaie de dire ce qua t une pratique pour Foucault - cest pas marrant parce que le questionnaire, o est-ce quil allait le placer ? O il allait le placer son questionnaire ? Dabord il fait son questionnaire, une srie dhypothses, et puis il sagissait que ce soit les prisonniers qui rpondent et qui remanient le questionnaire. Il tait pas visiteuse de prison Foucault ! Comment se constitue un rseau ? Cest pas secret vous savez un rseau, fallait faire la queue, fallait aller dans les queues pour passer le questionnaire aux femmes et aux parents qui faisaient la queue pour voir les prisonniers. Ils se demandaient ce que ctait les gens. Et puis il est vident que les gardiens, ils ont vite compris... et que, ds quil ont eu un exemplaire du questionnaire, a a commenc mal tourner. Bon, se constituait une pratique et Foucault constituait sa pratique. Et il a commenc aux queues des prisons, dans les dfils de gens qui faisaient la queue, et souvent, bah ils sont comme tout le monde, ils veulent pas dhistoire, ils comprennent pas comment, cest bizarre ce quon leur demande l, et puis, si on leur demandait de passer le papier aux prisonniers mmes ou bien de rpondre eux-mme... et puis, petit petit, a a march. Il a fallu des quipes ... a sest fait, ctait pas du tout centralis, pas pyramidal, l, un groupe, un autre groupe : rapport transversal, les gens qui faisaient la queue aux prisons. Bon et puis les groupes a a essaim, savoir : troisime groupe. Foucault et les autres ont joint danciens dtenus. a, a a t un apport formable, avec des tensions, des rapports de pouvoir, ctait pas simple, il fallait chaque fois... il y avait, je disais tout lheure, des ractions de panique des personnes qui faisaient la queue aux portes de prisons parce quelles voulaient pas dhistoire. Mais quand les anciens prisonniers parlaient : il y avait des tensions entre eux, il y avait des rapports de pouvoir - a donnait dj raison Foucault ! - il y avait des rapports de pouvoir partout. Il y avait un prisonnier qui arrivait, il arrivait le premier. Bon. Il avait un prestige, et Foucault avait son prisonnier (rires) en mme temps ctait la grande parade tout a - il y avait le prisonnier... le dpartement de philosophie avait son ouvrier (rires) et yavait le prisonnier Foucault. Et quand le second prisonniers est arriv il tait jaloux du premier ! alors yavait des conversations entre eux qui taient trs trs curieuses : ils se toisaient et puis a allait pas fort ils disaient toi tas fait combien ? et puis lautre il disait jai fait huit ans , o a ? , Melun et puis lautre le mprisait parce que le prvait fait 15 ans et puis dans des centrales plus dures... - Il y avait une question de la duret des maisons des prisons tout a - alors a faisait des petits foyers... et Foucault savait trs bien tout a, il arrangeait tout. Mais ctait trs fatigant. Nouveau rapport transversal avec un nouveau groupe, les anciens dtenus. Et puis chercher les avocats , les magistrats. Alors dans le syndicat de la magistrature le rseau se dplaait, chaque fois avec des rapports de forces, des rapports de pouvoir, tout a. Fallait dborder un moment, il y a eu des mouvements dans des pays voisins ; et puis dborder en province. Et il fallait pas restituer une organisation pyramidale, comment faire ? comment faire par exemple pour que le GIP Lyon soit absolument matre de ses initiatives, recueillir largent, les brochures, tout a ? Et puis surtout que ce soit les prisonniers qui parlent. Pas facile daller chercher les prisonniers dans les prisons pour que les prisonniers parlent , cest pas facile du tout.Il y a eu une inspiration Foucault, qui a fait ensuite les groupes denqutes sur les asiles, les asiles psychiatriques, sur les Hpitaux Psychiatriques . Tout a sest dvelopp. Et moi je crois, je fais lhypothse que lune des raisons du silence, de lespce dbattement, de baisse despoir qua eu Foucault, plus tard, bien plus tard, a t ce quon peut appeler lchec de ce mouvement ; en appelant chec de ce mouvement le fait que, vers 71-72, beaucoup de gens ont eu limpression que quelque chose allait changer tant la pression avait t grande, que quelque chose allait changer dans le rgime pnitentiaire. Et puis aprs a a fait partie de laprs 68, lorsque le couvercle sest referm, a t, a a t... il y a eu des changements, on peut pas dire quil y ait pas eu des changements. Je pense quil y en a eu beaucoup plus que Foucault le pensait, mais Foucault, qui aurait voulu, lui, quil y en eut encore plus, a t assez abattu par ce quil a considr, mon avis tord, comme un chec. Reste qu un moment, bon , jajoute - vous a voir o je veux en venir - tout a un moment il a fallu, il y avait un vif intrt, faire un lien avec les mouvements amricains. Fallait que ce rseau du GIP se dveloppe, pousse la lettre une espce de transversale, toujours une espce de rapport de transversalit, vers lAmrique. Quest-ce qui arriva ? Cest l que je retrouve des mtaphores sntanistes : a a fait presque tout seul, voil que surgit : Genet. Voil que surgit Jean Genet. Jean Genet qui tait trs li aux Panthres Noires, qui avait pour son compte - qui ntait pas un intellectuel rflchissant sur les prisons- mais qui avait une exprience notoire et solide de prisonnier... il arrive l dedans, trs bien. Et il joue son rle l, cet espce de rle de charnire, et Jean Genet nagit pas dans le GIP titre dar prestigieux ou dintellectuel, sans doute il y avait du prestige, videmment, mais il est actif et en tant quil est actif et pas en tant quintellectuel. Cest en tant quintermdiaire avec les Panthres Noires. Je veux en venir ceci : il y a trois problmes pratiques du ici-maintenant. Et sans cette longue parenthse sur le GIP, je ne pourrais pas dgager les trois problmes. Il me semble quil y a trois problmes pratiques pour tout ici-maintenant. Cest :- Quel nouveau type de luttes, sil y en a, quel nouveau type de rsistance au pouvoir. Vous me direz "mais tu parles de rsistance au pouvoir avant davoir parl du pouvoir". Oui, a na pas dimportance. Il y a des foyers de pouvoir, il y a des foyers de rsistance au pouvoir, et les foyers de rsistance au pouvoir sont des foyers de pouvoir. Cest vident. Bon. Quand je dis rsistance au pouvoir je dis aussi bien pouvoir. Donc : tel nouveau type de vie. Aujourdhui, ici et maintenant, quel que soit le temps.- Deuxime question : y-a-t-il un rle particulier aujourdhui, ici et maintenant, qui serait celui de lintellectuel ?Y-a-t-il encore une autre question ? Ah peut-tre mais quest-ce que ce serait...- Ici et maintenant, quest-ce que signifie tre sujet ?Pourquoi je dis que ce sont les trois questions ? Laissez-moi aller doucement.Dabord, si vous regardez bien ces trois questions, je dirais : lune concerne videment le pouvoir (quel nouveau type de luttes aujourdhui). La seconde concerne videmment le savoir (quel est le rle de lintellectuel). Tout a, cest pas dans la tte de Foucault. Pas plus que mai 68 nest dans la tte dintellectuels. Cest quoi alors ? Il faut remonter ya longtemps, a fait partie de notre histoire. Ce qui fait partie de notre histoire je crois - l je fais de lhistoire trs sommaire mais... - cest que tout a se met bouger, partir et autour de 1950. En fonction de quoi ? en fonction de lexprience et de la rupture yougoslave.Cest la grande date de la premire mise en question il me semble en pays communiste du centralisme. Ce qui se prsente ce moment l comme lexprience de lautogestion yougoslave. Avec un thoricien-praticien : Djilas, qui ce moment l est un compagnon de Tito (et que Tito devait mettre en prison plus tard). Cest la rupture yougoslave qui a t un grand dtonateur. Et partir de la rupture yougoslave, la question qui sans doute tait sous-jacente a clat sous la forme : une nouvelle politique non centralise, et la chance, en pays capitaliste, dinstaurer des luttes dun nouveau type. Le thme de la transversalit commence natre aprs 1950. Et si le foyer de dpart - enfin de gros dpart - a t lexprience yougoslave, par quels chemins elle a essaim ? Elle a pas essaim par un mouvement du haut en bas, elle a essaim par rseaux, par lignes brises. Cest pass par lItalie, et la rinterprtation du marxisme par les italiens, notamment par un italien, on verra - parce que cest assez li Foucault tout a - par un italien que je crois trs important qui sappelle Mario Tronti, qui tait un membre du parti communiste et qui a tent une rinterprtation du marxisme en fonction des conditions italiennes. Quest-ce que ctait que les conditions italiennes ? Les conditions conomiques italiennes taient trs diffrentes des conditions yougoslaves mais lexistence dune espce de double march dans lconomie italienne, dun secteur noir, de travail intrimaires, dun travail noir etc. qui avait pris en Italie, trs tt, une espce de forme institutionnelle, a t fondamentale pour la formation dun thme de lautonomie . Et lautonomie, le thme de lautonomie, est partie de Tronti qui tait travers aussi par lide dune noulle forme de lutte non centralise. Or ds le dbut, ce thme des luttes transversales, des luttes non centralises, inspires par lautogestion yougoslave, puis par lautonomie italienne, a t ml une question plus confuse, plus difficile, et qui tait quelque chose comme : "vers une nouvelle subjectivit".Est-ce que nous sommes sujets de la mme manire quil y a 40 ans, 50 ans ? Que signifie tre sujet ? Peut-on tenter de se dgager de la centralisation sans tre sujet dune nouvelle faon, sans quil y ait un nouveau style de subjectivit ? Et Tronti allait trs loin dans la rintroduction dune nouvelle subjectivit dans le marxisme. Et pour lui le marxisme ctait la promotion dune nouvelle subjectivit. Se faisait par Tronti, videment, un certain lien avec lcole de Francfort. Tout a est trs minutieux. Mais en mme temps quen Italie, et lun dailleurs influenant lautre, ctait rciproque, autour de re en France. Autour de Sartre se formait le thme de "vers une nouvelle classe ouvrire". Notamment avec un proche de Sartre dont lun des pseudonymes tait Gorz. Et avec Gorz surgissait "vers une nouvelle classe ouvrire", double sens de nouvelles luttes, de nouvelles formes de luttes et de rsistance au pouvoir et dune nouvelle subjectivit. Et en France mme, dautres groupes avant 68 dveloppaient ces question. Cette triple question : nouvelles formes de lutte, nouveau rle de lintellectuel, nouvelle subjectivit. Ctait les trois. Il me semble les trois grands ples de ce qui tourne autour de 68, de ce qui clatera en 68 - et encore une fois ce ne sont des question thoriques que si vous voyez pas quelles nattendent pas des rponses thoriques, quelles se font pratiquement. Elles se dessinaient pratiquement dans lhistoire. Et en France, ce sera aussi les trois questions - doses diversement, ctait trs subtile, les groupes se hassaient dj en eux - il y a avait donc Sartre, mais il y avait aussi Socialisme et Barbarie qui tournait tout fait autour de ces trois questions, yavait aussi le situationnisme, il y avait enfin les dissidents du PCF savoir "La voie communiste", il y avait Guattari, qui lanait son thme de la transversalit et qui lanait dj son thme dune micro-politique du dsir. Il y aura videmment un cho cheucault lorsque Foucault lancera son thme dune micro-physique du pouvoir. Voyez en quoi prcisment les luttes transversales non centralises dgagent une espce dlment, quudra analyser, mais microphysique, une microlitique.Si bien que je veux en venir ceci : les trois questions rpondent assez aux trois clbres questions kantiennes - toutes proportions gardes : Que puis-je connatre (Critique de la Raison Pure) ? Que dois-je faire (Critique de la raison pratique) ? Que puis-je esprer ? Il faut admirer la perspicacit de Kant lorsquil a pens que ctait les trois questions fondamentales puisque tant dannes aprs nous voyons... Que dois-je faire ? cest dire "quels sont les nouveaux types de luttes aujourdhui, quels sont les nouveaux foyers de rsistance au pouvoir" ? ; Que puis-je connatre ou savoir ? cest dire quel est le rle de lintellectuel ? Que puis-je esprer : cest dire l une nouvelle subjectivit ? .Peut-tre est-ce que vous sentez que mon troisime axe, il est plant l : il se plante l-dedans, il est en train de pousser sur ce terrain-l. Alors quest ce que fera Foucault ? Ce nest en rien diminuer je crois la profondeur de son originalit que dire : Foucault est cet gard le dernier avoir repris lensemble de ces questions pour les porter un point o elles navaient pas t portes. Mais ces questions elles ont leur origine partir de 1950 et elles traversent aussi bien le marxisme italien, yougoslave, les milieux sartriens, les milieux mai 68. Foucault va leur donner un cho aprs 68 et peut-tre que, sur la premier question (nouveaux types de luttes), il napportera pas - il exprimera ce thme de manire trs forte - mais peut-tre il napportera pas une nouveaut trs radicale, et a aura t beaucoup plus de lavoir fait pratique, cest-re davoir constitu le GIP sur le mode dun nouveau type de lutte. Mais les luttes transversales dont Foucault la fin de sa vie refera encore rcapitulera encore les caractres principaux, je crois que ce nest pas le plus nouveau chez lui. En revanche, les deux autres questions (rle de lintellectuel, renouvellement), en proposant le schma suivant qui me semble dune grande valeur historique : nous en avons fini avec lpoque o lintellectuel tait le gardien de valeurs. En fait on en avait pas fini puisque devait se rveiller, devait ressusciter la vieille figure de lintellectuel gardien de valeurs sous la forme de lintellectuel gardien des droits de lhomme. Mais Foucault pouvait penser un certain moment que cette figure de lintellectuel tait partie. Et il opposait cette vieille figure de lintellectuel (lintellectuel universel) ce quil appelait lintellectuel spcifique. Ou quon pourrait aussi bien appeler lintellectuel singulier si vous avez retenu le thme de la singularit chez Foucault.Ce ntait plus au nom de son universalit que lintellectuel agissait. Ctait au nom de sa spcificit ou sa singularit. Quest-ce que a veut dire a ? ... En effet si vous demandez : quand est-ce que lintellectuel commence tre un porteur duniversel ? L il faudrait faire de lhistoire trs trs bien et je sais pas, est-ce quon peut le dire dj de la renaissance ?Que lintellectuel de la renaissance est porteur dune espce duniversalit ? je sais pas, parce que luniversalit cest dabord le catholicisme. Alors est-ce que lintellectuel catholique, est-ce que le clerc catholique est dj une figure de lintellectuel de luniversel ? peut-tre, je sais pas, cest trop compliqu mais enfin... Au 18me sicle, si vous prenez les interventions retentissantes de Voltaire en politique, il y a quelque chose l comme un intellectuel porteur duniversalit. Il se mle daffaires juridiques au nom de quoi ? des Lumires, de la justice... les Lumires... si je fais un grand bond dans lhistoire, je saute Zola, dans son intervention clbre pour laffaire Dreyfus, se prsente explicitement comme gardien des valeurs duniversalit, savoir : aucune raison nationale ne peut justifier un faux jugement, un trafic de preuves... cest au nom de luniversel... mais il faudrait suivre, si je prend encore ceux-l qui ont eu un grand rle dintellectuel, Andr Gide, quand il dnonce les conditions dun jury dans un procs clbre lpoque, les conditions de la justice, du travail lonial : ce sont des interventions de grands intellectuel et qui ont un grand retentissement, qui ne seront jamais pardonnes Gide : son homosexualit, on lui aurait pardonn mille fois lpoque, mais lhistoire du Congo a ctait plus difficile lui per. Et puis, plus rcemment Sartre. Sartre cest pas faux, de dire comme on la dit, et a na rien dhostile, que chez Sartre il y avait quelque chose de relativement proche de Voltaire, ou de Zola. Que le courage de cet homme est pass par... peut-tre quau niveau de Sartre yavait les deux : la naissance dun nouveau rle de lintellectuel et le maintien et laboutissement de la vieille figure de lintellectuel gardien des valeurs de luniversel. Mais dans lanalyse de Foucault il y a un moment o il se situe au niveau de la bombe atomique... Lorsque les physiciens sont intervenus contre la bombe atomique. Ils ont fait en effet un acte trs curieux. ctait pas au nom des valeurs de luniversel, ctait au nom de leur situation spcifique, eux, les physiciens. "Nous qui savons de quoi nous parlons nous vous disons que...". Lintellectuel ne se rclamait pas de valeurs, (justice, etc.), mais de sa situation spcifique, savoir : "nous qui avons fait cette bombe nous savons que et voil ce quon vous cache". partir de sa situation singulire, partir du fond du laboratoire o il tait.... ctait une toute nouvelle figure de lintellectuel que Foucault a trs bien dgage. Et si Genet allait parler des prisons, ctait pas au nom du droit et de valeurs ternelles.Ctait au nom de son exprience singulire lui, qui pouvait se lier lexprience singuldes Panthres noires en Amrique, qui pouvait se lier lexprience singulire des Franaisn prison etc. Ctait au nom de la singularit, de sa propre singularit dintellectuel, que lintellectuel allait pouvoir parler. Dune certaine manire ce ne serait plus jamais au nom des droits, mme si ctait les droits de lhomme, ce serait toujours au nom de la vie, et dune vie singulire. Alors je crois rellement que chez Foucault, les trois questions se sont runies. Pour la dernire fois actuellement, pas pour la dernire fois pour toujours, mais la priode est trs mauvaise aujourdhui donc les questions se sont nouveau dsunies dans une espce de nuit de la non-question, mais l, elles se sont runies pour la dernire fois de la manire la plus forte chez Foucault - et encore une fois il sagissait pas de rflexions abstraites. A lhorizon de la question "nouveau types de luttes" il y a lexprience du GIP. lhorizon de "y a t il des chances pour une nouvelle subjectivit", ya surement lattrait quil prouvait pour les communauts amricaines, lintrt quil prouvait pour des formes, tantt des formes solitaires, tdes formes communautaires, o il marquait trs bien que pour lui en effet le problme de la formation dune nouvelle subjectivit, concrtement, ctait une manire de se droberdentification. Les manires de se drober lidentification ctait aussi bien des maniresommunautaires que des subjectivits de groupe. Est-ce que les groupes amricains aujourdhui laborent... - Vous savez, les choses qui slaborent, a slabore dans la mdiocra nullit aussi bien que la grandeur, cest, comme disait lautre, cest toujours de la saloperie (rires)... Alors est-ce que dans les communauts amricaines, est-ce que dans les communauts aujourdhui, est-ce que slabore une nouvelle forme de subjectivit ? il est bien malin celui qui rpondrait... en tout cas il faut bien, et l aussi cest pas des questions thoriques, faut aller y voir. Donc il se peut trs bien que dans sa vie mme, Foucault soit pass dune question lautre, quil ait dcouvert trs tardive les question pratiques : les nouvelles subjectivits (il fallait quil le comprenne sa manire et je crois quil a compris le plus profondment cela). La ncessit dune noulle situation dintellectuels. Do les rapports trs ambigus de Foucault et de Sartre. Les rapport trs ambigus - je veux dire, ils taient trs bien ces rapports, Foucault avait srement une trs grande admiration pour Sartre mais aucune affinit avec la pense de Sartre ; il avait une trs grande affinit, on le verra plus tard, a je crois, avec Heidegger, mais pas avec Sartre ; et a nempche pas quil avait pour Sartre un trs grand respect, et puis, ctait trs bien entre eux - mais lambiguit, elle venait de ce que Foucault considrait que Sartre tait la dernire figure de lintellectuel, et que Foucault personnellement devait se vivre comme - dans la mesure o il se prenait pour un intellectuel, o il acceptait de se prendre pour un intellectuel - Foucault devait se vivre sous une autre image - pas meilleure, mais autre chose.... je suppose quil ne veut pas dire en fonction de soi , en fonction de soi comme individu, de soi comme personne. Non. Je peux considrer que jincarne des singularits, mais, les singularits, je ne fais jamais que les incarner. Euh... alors jincarne un petit lot de singularits, on est tous comme a, hein, quest-ce que a veut dire un sujet ? Sans doute quun sujet cest une incarnation de singularits. Alors, cest dj par-l que je voudrais que vous sentiez que le troisime axe, qui se rvlera bien plus tard pour nous, mais il est dj l. Cet axe de la subjectivation... comment euh... il est en train de... et pourtant on en est bien loin. Do, enfin, maintenant, on est comme prt, ds lors vous voyez que, ce que je reviens dire, cest que la seule continuit historique qui irait des temps passs maintenant, cest quoi ? Cest la pratique, en quel sens ? Pratique de lutte, pratique de savoir, pratique de subjectivit. Cest a qui tablit la corrlation entre les formations historiques et le ici-maintenant.Car, aprs tout, on peut se dire, du coup, quand on a pos la question du ici-maintenant, on peut se dire : mais est-ce que lhistoire na pas t perptuellement faite par des luttes transversales ? Est-ce que lhistoire na pas t perptuellement un tissu, un rseau de luttes transversales, avant que ces luttes soient centralises ? Est-ce que tout ne sest pas pass comme a ? Est-ce que, chaque fois, le centralisme nest pas venu recouvrir, recouvrir de sa pyramide et touffer tout ce qui avait t riche et ce qui stait cr sous une forme de transversalit, sous une forme transversale ? Je ne souhaite pas vous convaincre, je dis juste que, comme a...l, jai pas de sympathie pour le mouvement surraliste et jai pas de sympathie pour le surralisme parce que jy vois une sale organisation centralise, avec tribunal, excommunication etc. Quest-ce quil y avait eu avant ? On voit trs bien la succession ? Il y avait eu Dada, il y avait eu le dadasme et, le dadasme, cest un rseau. Le dadasme, cest un rseau transversaet qui affecte tous les pays, tous les pays, de lEurope euh... de lEurope de lest lAmrique, euh... le dadasme traversera le monde entier. Prcisment parce quil nest pas centralis. Et quest-ce que fait Andr Breton ? Ceux qui aiment Andr Breton, vous corrigez de vous-mmes, hein ! Quest-ce quil fait, Andr Breton ? Il remet de lordre. Il remet de lordre et il fait un truc national, un truc bien franais. Le surralisme sent le franais. Et il tablit ses tribunaux, et il lance ses excommunications, et il mettra tout le monde au travail forc savoir les pages dcriture automatique et les petits jeux dbiles euh... et tout a. Bon. Il remet de lordre. Et il en fait un centralisme franais. Bon : Dada ne sen remettra pas, je veux dire, l, sil y a une politique dans lart ou dans la littrature, vous pouvez prendre cet exemple parce que a a t vraiment une lutte politique. a a t une lutte politique, savoir : Dada sest fait absolument manger, dvorer, Dada ntait plus possible cause de la remise en ordre opre par le surralisme.Bon, sil en est bien ainsi, on peut le dire, mais, aprs tout, a ne date pas de 68 les luttes transversales. Alors, faisons un grand saut dans lhistoire. Cest ce que Foucault, dailleurs, pressentait trs fort : au moment de la Rforme, mais avant que Luther fasse son surralisme lui, cest--dire fasse sa recentralisation, les luttes de la Rforme ont t, mais an niveau aussi bien de la paysannerie, avant quil fasse sa rforme appuye par les Seigneurs, il y a eu toutes sortes de mouvements de luttes transversales engageant les gens des villes, les gens de la campagne etc. et la priode de la Rforme a t un trs trs grand moment de luttes transversales.Alors, finalement, peut-tre est-ce quon dcouvrirait que les trois questions :- les nouveaux types de lutte,- la situation de lintellectuel,- les nouveaux modes de subjectivit, mais, nont pas cess de se faire dans lhistoire et que cest a la vraie continuit de lhistoire, mais seule la pratique est la continuit de lhistoire.Alors, en vertu de tout ceci, on peut se dire, ds lors, a nous donne les prcautions ncessaires pour pouvoir poser la question : et ben alors, quels sont les principes du pouvoir en gnral ? On ne risque plus, en effet, de tomber dans des rponses par centralisation. Ce que jai essay de... de... comment on dit... pour chasser le diable, l, quel est le mot ? Lucien Gouty :" dexorciser" Deleuze : dexorciser ! Ce que jai essay dexorciser, l, cest une rponse quest-ce que le pouvoir ? qui serainse centrale. A la question quest-ce que le pouvoir ? , ne peut convenir quune rponse transversale qui miette le pouvoir en une multiplicit de foyers. Alors, quest-ce que ce sera ? Est-ce quil y a des principes de cette multiplicit ? Le pouvoir...... sur Rivire, sur Pierre Rivire qui avait gorg sa famille euh... Comment est-ce quil a distribu ce qui revient au cahier - image crite ou sonore - et le crime lui-mme - image visuelle ? Que, l, il y aurait un rapport entre lnonc et la visibilit et savoir sil y a lieu o trouver une solution originale, une fois dit que les solutions trs originales ont t trouves au cinma pour rendre compte de ces rapports entre le visible et lnonc. Surtout que, dans le cas du meurtre de Pierre Rivire, des meurtres faits par Pierre Rivire,..., le cahier o il raconte toute son histoire a un rle trs mobile, tantt est conu comme venant aprs le crime, tantt comme venant avant etc. a pose toutes sortes de questions. Donc pour le problme des rapports voir/parler, moi mintresse beaucoup de revoir le film sur la base de : comment Allio at- il trait cinmatographiquement de ces rapports entre voir et savoir ? Mais il faut pas que vous soyez trop nombreux parce quil ny aurait plus de place.Rponse dun tudiant : cest comme a [ ???]Deleuze : cest comme a, alors vous pouvez tre trs nombreux. Et ben nous continuons, mais je crois que tout ce qui prcde tait absolument indispensable en tant que pratique, dj, et pratique de pouvoir. Et maintenant, alors, on fait comme si on revenait la question : les principes, quest-ce que cest que... Quest-ce que le pouvoir ? Et ben, si principes il y a, ce sera videmment des principes de pratique. Mais si principes il y a, le principe que rappelle tout le temps Foucault, cest quoi ? Et ben, cest, bizarrement, que, dans les textes de Foucault, il ny a pas de longue tude au niveau des principes, je vous le disais. Si vous voulez vous y reprer, il y a quelques pages au dbut... deux ou trois pages qui vont trs vite, au dbut de "Surveiller et punir", page 30-33, a va pas loin, au niveau des principes je dis, et, dans "La volont de savoir", pages 108..., cest un peu plus long, l, 108-112. Cest dire que..., et ben, nous, on va faire linverse, on va dcentrer un peu mais uniquement dans lide que cest bien pour tre plus clair et on va, au contraire, sattacher assez longtemps cette question des principes sous lesquels on peut penser le pouvoir.Or le plus grand de ces principes chez Foucault, il me semble, il va le rappeler tout le temps dans ses analyses concrtes, cest : il ne faut pas partir des grands ensembles. Il ne faut pas partir des grands ensembles. Quest-ce que cest, a, des grands ensembles ? Ben, dans le monde moderne, cest, par exemple, les grandes institutions. Vous voyez tout de suite ce que a veut dire, pour valuer le pouvoir, il ne faut pas partir de grandes institutions toutes faites, du type : lEtat, la loi, les classes. Finalement Foucault est le seul avoir fait une thorie gauchiste du pouvoir ; je crois. Il ne lest pas le seul se ltre propos, mais lavoir fait... Bonfaut pas partir des grands ensembles, pourquoi ? Sans doute parce que les grands ensembles se donnent tout faits. Ce dont il faut montrer et la gense et lexercice. La loi, lEtat, les classes sont dj des entits, comment dire, beaucoup trop grosses. a explique immdiatement son appel une - ds le dbut de "Surveiller et punir" - une microphysique. Une fois dit que la microphysique a consist dire, dans le domaine de la science physique, que, au del des grands ensembles, les grands ensembles tant statistiques - si je donne un rsum trs grossier de la microphysique - et bien, au-del des grands ensembles qui taient des ensembles statistiques, il fallait atteindre et constituer une science des molcules corpuscules.Quest-ce que cest, alors, des corpuscules ? Il faut saisir le pouvoir au niveau des molcules et corpuscules et pas au niveau des grandes institutions. Voil ce que veut dire avant tout microphysique du pouvoir . a veut dire une chose trs simple en apparence, mais quest-ce que cest que ce pouvoir molculaire ? lEtat, les classes, la loi, ce sont des pouvoirs quon appellerait molaires. Et ben non. Pour saisir le pouvoir, il faut aller jusquaux molcules. Cest une mtaphore. Bon. "Volont de savoir", p.120 : Lanalyse en termes de pouvoir ne doit pas postuler comme donnes initiales la souverainet de lEtat, la forme de la loi ou lunit globale dune domination . En dares termes la thorie du pouvoir doit tre locale et non pas globale, elle doit tre molculaire et non pas statistique. ... Celles-ci (la souverainet de lEtat, la forme de la loi ou lunit globale dune domination) ne sont que des formes terminales . Cest pas quil ny ait pas dEtat, cest pas quil ny ait pas de loi, cest que ce sont des exprsions statistiques dune agitation dune autre nature. Le pouvoir est une agitation molculaire avant dtre une organisation statistique. Do, encore une fois, je ne fais que justifier le terme microphysique du pouvoir . Mais, si le mot microphysique doit tre pris au srieux, cest quon y trouvera la grande unit microphysique, savoir : onde, corpuscule. Le pouvoir nest pas affaire de grands ensembles, cest une affaire dondes et de corpuscules. Il y a des ondes et des corpuscules politiques. Du coup, a doit nous rappeler quelque chose ou quelquun dont Foucault, pourtant, ne parle jamais. Je raconte une histoire, aujourdhui, ce sera..., a va aider .... une reprise, cest--dire une srie dhistoires. Je raconte une histoire.A la fin du XIXme et au dbut du XXme sicle, deux sociologues sopposent dans une guerre inexpiable. Diable ! Si je dis a, cest que cest vrai la lettre. Cest quil faut croire quil y avait non seulement la question de savoir, mais question de pouvoir. Lun sera cras par lautre, mais, comme toujours, celui qui a t cras est le meilleur. Il st... il sagit de Durkheim, le grand Durkheim et de Gabriel Tarde. Et Gabriel Tarde est le fondateur de la microsociologie qui disparatra de France et qui ira en Amrique, o elle reviendra en France, par la voie de lAmrique, sans quon sache que lAmrue ne faisait que nous rendre ce quelle nous avait pris. douleur ! Bon, quest-ce qui se passait entre Durkheim et Tarde ? L encore je crois que cette parenthse est ncessaire. Quand je dis Durkheim a cras Tarde, a a t une vritable guerre et cest unequte qui a fait gagner Durkheim, conqute de lenseignement primaire, la morale laque et conqute de luniversit. Les doyens taient des durkheimiens. Je veux dire, statistiquement, le nombre de doyens de facults qui taient des durkheimiens, croire que..., ctait des grands commis dEtat. Tarde, il ntait pas universitaire de formation, il tait juge de paix, euh... Heureusement il avait t recueilli par le Collge de France - il y avait une trs forte opposition, ce moment-l, Sorbonne / Collge de France - il faisait ses cours, qui devaient tre des cours merveilleux, mais, euh..., bon, son influence.., ses disciples non-durkheimiens taient massacrs, au point quils se repliaient sur le droit et, trs bizarrement - jabonde en anecdotes aujourdhui - trs bizarrement les disciples de Tarde ont t trs importants dans la formation des mouvements europens et aussi dans des disciplines juridiques, par exemple un trs grand juriste qui sappelait Aurioux, pas un Aurioux rcent, mais le pre du Aurioux rcent, le vieil Aurioux euh... le vieil Aurioux... qui a eu beaucoup dimportance au moment des accords de Matignon, qui a eu une influence politique..., tait un disciple direct de Tarde. Et il a t dans deux directions, Tarde, du ct des accords de Matignon et du ct de lEurope, trs bizarre. Ctait un fdraliste, il annonait lEurope fdrale trs bizarre, trs curieux. Peu importe !Mais, tout a pour dire que : quest-ce quil faisait Durkheim ? Sil y a eu une sociologie des grands ensembles, cest bien celle-l. Et comment Durkheim fondait-il la sociologie comme science ? Il disait : cest tout simple, il y a deux sortes de reprsentations. Il y a la reprsentation individuelle, cest laffaire de la psychologie, qui vaut rien, dailleurs, euh... et puis, il y a les reprsentations collectives. Les deux diffrent en nature. Les reprsentations collectives ne sont pas de mme nature que les reprsentations individuelles, la sociologie, cest la science des reprsentations collectives. Bon. Je simplifie beaucoup. Mais la notion de reprsentation collective est fondamentale chez.... Je peux dire que cest de la sociologie typiquement molaire. Cest de la sociologie de grand ensemble. Et ctait merveilleux, cest trs beau la sociologie de Durkheim, enfin pour ceux qui aiment a quoi.Tarde, quest-ce quil disait ? Tarde, il disait : ben oui, cest trs bien ce quil dit, Durkheim, cest bien intressant, mais enfin, ces reprsentations collectives, ces grands ensembles, quand mme, ils ne naissent pas tout faits, do a vient un truc comme a ? Alors, l, Durkheim entrait dans une colre, la question do a vient ? navait pas se, peut-tre quil avait raison. Mais, Tarde revenait la charge, il disait : non, non, vous savez, tout ce qui se fait socialement, a prsuppose pas les grands ensembles, il y a toujours... Quest-ce quil y a toujours ? Et ben, euh..., sous les grands ensembles, il y a des..., il y a des courants dimitation et puis il y a des moments dinvention. Et puis il disait : vous voyez, moi, ce qui mintresse, cest la manire dont un employ de ministre ... fait son paraphe. Il y a un moment, par exemple, il y a une poque o a change, le type de paraphe dun employ de ministre et il dit : a t bon, Tarde, cest un petit truc, une petite invention sociale. La socit, elle se forme par courants dimitation et mouvements dinvention et cest toujours des petites imitations et des petites inventions. Vous voyez, l, je fais mme pas de la thorie, je vous dis ce qui intressait Tarde. Vous me direz : bon, quest-ce que cest que tout a ?L-dessus tombe le jugement inexorable de Durkheim et des durkheimiens qui est : mort Tarde ! Il veut ramener la sociologie une psychologie . En effet il veut expliquer les reprsentations collectives, cest--dire les phnomnes sociaux par des imitations et des inventions. Cest--dire : il veut expliquer le social par lindividuel ; un individu en imite un autre, un individu invente. Vous voyez ? Tarde ne sen est jamais relev en France. Et pourtant... et pourtant Tarde disait quelque chose qui navait absolument rien voir avec ce que lui faisait dire Durkheim car, chez Tarde, limitation sociale ne va pas dun individu un autre individu et linvention sociale ne dpend pas dun individu. Alors quest-ce quil appelle imitation et invention ? Cest l que a devient trs beau. Mais vous comprenez, il faut... Bon, ben, il avait beau le dire, le rpter, rien ny ferait : on lui ferait toujours dire : le social sexplique par le psychologique. Il y a des contresens quon ne peut pas remonter. Cest triste hein ? Cest triste.Il tait trs triste, Tarde. Alors quest-ce quil voulait dire ? Il voulait dire ceci, il voulait dire : limitation cest une onde ou un courant de propagation. Cest un courant de propagation.Bon, acceptons, on peut comprendre vaguement, on va voir ce que a donne. Cest une onde de propagation. Linvention, cest quoi ? Linvention, cest une rencontre entre deux courants imitatifs diffrents. Bon. Linvention, elle se fait toujours au croisement de deux ordres. Donc limitation cest une onde de propagation quelconque, linvention cest le point de rencontre entre deux courants, deux ondes de propagation. Alors, videmment, la question... Cest encore rien, a. La question qui devient srieuse, cest : daccord, mais entre quoi et quoi se fait limitation ? Do va, do part le court de propagation, o va-t-il ? Et on lattend l et Durkheim lui dit : ben, vous voyez bien, a va dun individu un autre individu, vous faites donc de la psychologie. Vous aurez beau dire : limitation est un courant de propagation, ce courant de propagation ne peut aller que dun individu un autre individu, puisque vous rcusez les reprsentations collectives .Or, Tarde disait ceci : un courant dimitation ou de propagation ne va pas dun individu un autre individu. Il va do o ? Il va dun tat de croyance un tat de croyancn tat de dsir un tat de dsir. Ce qui se propage, cest croyance ou dsir. Vous voyez o veux en venir. Il ne sagit pas de faire une sociologie de la reprsentation, il sagit de faire une sociologie de ce quil y a sous les reprsentations et que les reprsentations supposent ; et ce que la reprsentation suppose, cest la croyance et le dsir. Et une reprsentation ne se propage pas, cest pour a quil faut que Durkheim se la donne toute faite. Mais les croyances et les dsirs sont insparables dondes de propagation et faire de la vraie sociologie, cest--dire de la microsociologie, faire de la microsociologie, cest faire ltude des ondes de propagation de croyances ou de dsirs qui parcourent un champ social. a devient une trs grande ide qui na rien voir avec de la psychologie, mais qui a bien voir avec de la microsociologie. Les croyances et les dsirs sont les corpuscules sociaux. Vous voyez la force de la critique contre Durkheim : Durkheim en reste aux reprsentations, il ne voit pas ce quil y a sous la reprsentation. Ce quil y a sous la reprsentation... La reprsentation est un grand ensemble, cest une instance molaire. Sous les reprsentations, il y a les corpuscules de croyance et de dsir et les corpuscules de croyance et de dsir sont insparables dondes de propagation et londe de propagation de la croyance et du dsir, cest limitation.Alors cest secondairement, on peut dire que le croyant imite quelquun, cest la conversion. Quelquun se convertit au Christianisme aux premiers moments de lEglise, a veut dire que le Christianisme comme croyance, cest--dire comme molcule, comme particule sociale, se rpand suivant une onde de propagation. Cest a limitation. Et, linvention, ce sera la formation dun nouveau dsir au point de rencontre de deux courants de propagation de croyance ou de dsir, ou la formation dune nouvelle croyance. Jen dis pas plus parce que ce serait... je rve de faire un an un cours sur Tarde, mais.... Cest trs beau, trs beau, Tarde. Cest de la vraie microsociologie, cest- dire les amricains, ils nont jamais atteint ce point de non-psychologie. Oui, il ny a que Tarde qui ait su maintenir une microsociologie sans le moindre ... avec son histoire, l, des... notamment son grand thme cest notamment : les reprsentations ne sont jamais quantifiables tandis quil y a une quantification sociale des croyances et des dsirs et il fait une grande thorie de la quantification sociale qui engage toute une logique et il dit aussi : jusqu moi, il dit... il refait tout alors, partir de sa microsociologie, parce quil va reprocher la logique dtre une logique de la reprsentation, au lieu dtre, comme il aurait fallu ltre, une logique de la croyance et du dsir, mais seulement, si la logique devient une logique de la croyance et du dsir, ce moment-l, il faut introduire de nouveaux quantificateurs en logique. Et il esquisse une tonnante logique de la croyance et du dsir.Donc cest dire limportance... Or, l, je crois - je veux pas dire du tout quil y ait eu influence - quil y a souvent chez Foucault un vritable ton "Tardien". Je dirais la lettre que, vous voyez, limitation et linvention chez Tarde correspondent tout fait - vous ne pouvez comprendre ce que je veux dire que un peu plus tard - correspondent tout fait ce que Foucault appelle des rapports de force, car, je dis tout de suite, pour viter tout contresens, pour Foucault et il est formel cet gard, les rapports de forces nont rien voir avec la violence, en dautres termes ils ne se ramnent pas, ils ne se rduisent pas la violence. Ils ont une tout autre nature. Pourquoi les appeler rapports de force puisquils ne sexpliquent pas par la violence ? On verra, on verra pourquoi, [ ???] rapports de forces quelque chose qui excde la violence de toutes parts, mais, vous comprenez que, si les rapports de forces excdent la violence, je peux trs bien dire : limitation est un rapport de forces, linvention est un rapport de forces, cest vident. Cest vident. Limitation implique un rapport de forces entre ce qui imite et ce qui est imit. Linvention implique un rapport de force entre les courants la rencontre desquels se fait linvention, etc. Bien. Et je dis que, trs souvent, le ton de Foucault rappelle trangement Tarde. Foucault a un got extraordinaire, par exemple, pour ce quil appelle lui-mme..., une fois..., il y a un passage de "Surveiller et punir" o il parle de..., des petites inventions sociales et il dit : la voiture pnitentiaire, on nen parle jamais, dit-il, mais cest une drle de petite invention. Evidemment on parle du haut-fourneau, on parle des grosses inventions techniques et on ne parle pas des petites inventions sociales. a, jai le sentiment que... je sais pas si Foucault connaissait Tarde, je pense quil devait le connatre, mais, mme sil ne le connaissait pas, cest une rencontre tonnante. Parce que, l, cest la lettre presquun texte qui serait sign par ... La voiture pnitentiaire comme petite invention sociale, par opposition aux grosses inventions techniques, ben cest ..., cest du pur Tarde. Alors tout ceci uniquement comme point de dpart. Vous voyez : les rapports de force sont des rapports molculaires, des micro-rapports entre lments qui fonctionnent comme des corpus. Bon, cest avec a quil va falloir se dbrouiller.Alors, en essayant de bien classer les textes de Foucault, je dirais que, partir de l, sa microphysique du pouvoir se prsente sous... ou on pourrait en abstraire six principes. Six. a fait beaucoup. Et ces six principes sont autant de dnonciations de ce quil considre comme des postulats dans les thories classiques du pouvoir. Donc, on pourrait dgager six postulats dnoncs par Foucault. Allons-y. Ah je croyais que ctait une montre...cest un... tu vois, jai cru que ctait un bracelet a... cest erreur, merci beaucoup.- premier : on appellerait a le postulat de la proprit. Foucault nous dit : les thories politiques font comme si le pouvoir tait la proprit de quelque chose ou de quelquun. Or le pouvoir nest la proprit de personne. Proprit de quoi ? Ben, par exemple, mme les marxistes, premire vue en tout cas, ils font du pouvoir la proprit de la classe dominante. "Surveiller et punir" p.31 : Ltude de cette microphysique suppose que le pouvoir qui sy exerce ne soit pas conu comme une proprit, mais comme une stratgie. Cest la premire fois que nous rencontrons ce mot qui va prendre une importance de plus en plus grande chez Foucault.- Le pouvoir nest pas une proprit, mais une stratgie.En dautres termes il y a un fonctionnalisme absolu du pouvoir. Le pouvoir ne se possde pas, ce nest pas une proprit, il sexerce. Il sexerce. Il ne se possde jamais, cnest pas une proprit. Si vous avez compris dj tout ce quon a dit, a ne doit pas vous ner, parce que - quitte devancer, sil est vrai que le pouvoir est fondamentalement rapport - rapport, il ne peut pas tre une proprit. Un rapport nest pas une proprit. Si le pouvoir est rapport et si lon prend au srieux lexpression rapport de forces et si lon dit le pouvoir cest le rapport mme , il ne peut pas tre une proprit mme d?]. Il sexerce, cest--dire le pouvoir est une stratgie. Stratgie... Bon, bon, bon. Stratgie, stratgie... Voil que ce mot nouveau doit nous faire penser quoi ? Mais quil va falloir faire trs attention et que, notamment, il va falloir ne pas confondre stratgie et strate.- Car le savoir renvoie aux strates et aux stratifications, mais le pouvoir, lui, renvoie aux stratgies.Bien plus, la stratgie apparat l o il ny a pas stratification, l o il ny a pas de pr Les couches sdimentaires, elles peuvent tre possdes, le pouvoir, il nest pas possd, est exerc. Et comment dfinir... comment Foucault dfinira-t-il la stratgie ? Points innombrables daffrontements, points innombrables daffrontements, foyers dinstabilit . Cest bien forc, mais cest pas foyers dinstabilit par plaisir pour faire le malin, t que, dans le domaine micrologique, dans le domaine microphysique, il ny a pas dquilibre, par nature, cest un domaine qui rpudie lquilibre. Les strates sont en quilibre, le non-stratifi nest jamais en quilibre. Il ny a pas dquilibre corpusculaire. Il na pas dquilibre ondulatoire. Il ny a pas dquilibre microphysique. Il ny a pas de stabilit. Il ny a de stabilit que statistique, cest- dire le stable, cest le grand ensemble. Les grands ensembles, oui, sont possds, mais vous pouvez deviner que, le pouvoir, il est fondamentalement diffus, fluent, instable, au niveau de la microphysique.a ne veut pas dire quau niveau des grands ensembles... alors comprenez : au niveau des grands ensembles, bien sr il est possd, bien sr il est stable, bien sr il est en quilibre. Mais, cest pas a la source du pouvoir. Cest pas a, il faut arriver, l, cee couche microphysique qui ne se laisse pas sdimenter, qui est pure stratgie et pas strate, points innombrables daffrontement, foyers dinstabilit, quest-ce que cest ces points innombrables daffrontement, ces foyers dinstabilit ? Cest ce quon a vu prcdeent, cest des singularits, cest pas des individus psychologiques. Tarde dirait : mais, cest des quantits de croyance et de dsir, cest des corpuscules de croyance et de dsir qui sont fondamentalement instables, fluents, pris sur des ondes etc. Points innombrables daffrontement, foyers dinstabilit, en dautres termes : les rapports de forces sont des rapports entre singularits. Ce sont les ondes de singularits, exactement comme la microphysique nous parle dondes corpusculaires, cest- dire dondes qui pilotent un corpuscule, et bien les rapports de forces pilotent des singularits.Or vous ne... vous navez encore rien fait, si vous vous en tenez aux grands ensembles que cette microphysiques va former. Il nest pas question de dire que les grands ensembles nexistent pas, les grands ensembles seront effectivement constitus par cette microphysique, en dautres termes la microphysique constitue une macrophysique. Les grands ensembles, ils ne sont rien dautre que faits composs de ces corpuscules et de ces ondes, mais, en mme temps, ils les stratifient, cest--dire ils en font de grands ensembles dont on ne considre plus que les effets globaux. Les grands ensembles sont leffet global de la microphysique.Ouais, a va ? Hein ? Alors jouvre une parenthse encore, comme a je nen ouvrirai plus aprs. Il y a une chose dont Foucault ne parle jamais, on va faire une preuve hein, on va faire une petite preuve de confirmation en prenant un exemple en dehors des exemples de Foucault. Je me dis : Foucault na jamais parl des socits primitives. Pourquoi il na jamais parl des socits quon appelle primitives ? Il nen a jamais parr une raison trs simple, je crois, cest pas du tout parce quil naimait pas lethnographie, lethnologie, cest parce quil tenait oprer sur des sries courtes et bien dtermin On la vu, ... Il avait tellement horreur de lhistoire universelle, quil craignait, videmment, que sil ne prenait pas des exemples dans une srie bien assigne, bien dtermine, il aurait lair de tomber dans une espce de vision universelle de lhistoire.Mais, si on na pas les mmes peurs, on peut toujours essayer, car la mme histoire quentre Durkheim et Tarde, si vous lavez suivie, tout lheure, je voudrais la retrouver dans lethnologie moderne, car aprs tout les mmes histoires se retrouvent. Dans lethnologie moderne, il est bien connu que les socits primitives sont dites sans Etat. Foucault pourrait dire : oui, elles sont peut-tre sans Etat, mais elles ne sont pas sans pouvoir. Bien, mais, enfin, si les socits dites primitives ne prsentent pas un grand ensemble qui les dpasse, elles prsentent quand mme de grands ensembles, cest quoi ? Cest les grandes lignes de filiation. Comme disent les marxistes, ce qui remplace lEtat dans les socits primitives, cest la parent. Bon, les grandes lignes de parent, les grandes lignes de filiation quon appelle justement les grands lignages. Je dirais que les grands lignages dans les socits primitives sont les reprsentations collectives de base ou, si vous prfrez, les grands ensembles. Dans les socits modernes, le grand ensemble, cest plutt ltat et la loi. Bon, supposons, a cest dit. Voil. Je remarque quune oeuvre aussi admirable que celle de Lvi- Strauss... Du moins je ne parle pas des "Mythologiques", parce quau niveau des "Mythologiques" peut-tre que tout change, les "Mythologiques" cest une drle dhistoire, quest-ce que... mais je parle des "Structures lmentaires de la parent", livre dj ancien. Au niveau et au moment des "Structures lmentaires de la parent", il ny a pas de doute que Lvi-Strauss fait un structuralisme fond sur les grands ensembles et, videmment, il ny a de structures que molaires. L, sentez quon en est au point o on va pouvoir peut-tre confirmer nos analyses sur la diffrence entre Foucault et le structuralisme. Les structures sont fondamentalement en quilibre. Un dsquilibre structural, et ben, a arrive, a arrive, mais un dsquilibre est toujours la structure en question. La structure en tant que structure dsigne un tat dquilibre. En dautres termes, Lvi-Strauss le dit explicitement quand il affirme que les dysfonctionnements, les dsquilibres sont des consquences, consquences dautre chose. Bon.Voil que Lvi-Strauss fait donc, au niveau des socits primitives, une macrosociologie fonde sur les grands lignages de parent, les grandes lignes de filiation. Et il nous dit quoi ? Il nous dit quil y a des rapports entre grandes lignes de filiation. Ces rapports, ce sont les alliances - dont un cas privilgi sont les mariages - alliances, mariages, et qui sont des formes dchange entre une ligne filiative, une ligne de filiation et une autre. Et il nous dit enfin que, si lon considre la totalit des changes sur un espace social suffisant, on sapercevra quil y a un change gnral- cest ce quil appelle lchange gnralis, par diffrence avec lchange restreint o lte de deux lignes, du rapport de deux lignes - et que lchange gnralis forme un cycle rm. Cycle ferm = structure. Voil. Plusieurs ethnologues ont ragi et, tout en disant que loeuvre de Lvi-Strauss, au niveau des Structures lmentaires de la parent, tait tr.., tait admirable, dans la systmatisation des donnes de lethnologie, que, leur avis, jamais une socit primitive navait fonctionn comme a. Ils ont dit, en quelque sorte, a na jamais march comme a. a marche comme a dans la tte de Lvi-Strauss, a daccordamais une socit primitive na pu marcher comme a. Vous voyez que ceux qui ont object Li-Strauss invoquaient un fonctionnalisme, une pratique : quelles sont les pratiques sociales effectives ? En dautres termes, ctait des anglais et des amricains. Et, notamment, un des plus grands ethnologues, avec Lvi- Strauss, tait un anglais qui sappelle, qui sappelle toujours Leach, un trs grand ethnologue. Et sest produit, tout comme il y avait eu une polmique Tarde-Durkheim, sest produit une autre polmique Leach-Lvi-Strauss o chacun montrait une espce de gnie dans lart de ne pas comprendre ce que disait lautre....parce que dans tous les socits que je connais, et ben, dans toutes les socits primitives, leur grand souci, cest que ce qui se passe nait pas lair dun change. a, ceston premier thme : il faut que a nait pas lair dun change et quand on leur parle dcha ils ne sont pas contents du tout. Par exemple, pour eux, une femme elle nest pas change, jamais. Une femme, elle est ou donne ou vole ou, parfois, les deux la fois. Il faut que ce soit du vol ou du don. Mais lchange, a, cest pas... Cest du don ou du contre-don, cest du don qui oblige etc. tout le thme bien connu que Leach reprend sa manire. Et vous allez voir ce quil va en tirer. Voil son premier point : ce que Lvi-Strauss, dune certaine manire, avait reconnu en disant : lchange est inconscient. Et la force de Leach cest de dire : mais pourquoi il est inconscient, lchange ? Pourquoi est-ce quils tiennent tellement... Si ctait de lchange, pourquoi est-ce quils tiendraient tellement le cacher ? Cest bizarre, a, il ny a pas de honte changer. Alors Lvi-Strauss serait forc de dire : cest parce que, sils reconnaissaient que ctait de lchange, ils comprendraient du coup que le cycle est ferm et ils ne veulent pas que le cycle soit ferm. Leach dit : mais, sils ne veulent pas que le cycle soit ferm, cest peut-tre parce quil nest pas ferm, en dautres termes parce quil ny a pas de sture. Bon, a devient intressant. Et pourquoi le cycle ne serait pas ferm ? Cest que toute lhypothse de Lvi-Strauss suppose que les relations dalliance se dduisent dune ligne de filiation et dcoulent des lignes de filiation. Il y a dabord les lignes de filiation et puis elles changent quelque chose. Elles changent des femmes, elles changent des produits, elles changent des titres, des emblmes. Lchange se fait entre deux lignes filiatives. Bon. Est-ce que lalliance est un change ? Oui, lalliance est un change sil se passe entre lignes filiatives, entre lignages. Et jamais une socit primitive na fonctionn sur base de lignage. Les lignages, personne ny croit. Je schmatise un peu, l. Jamais, jamais ils ont fonctionn comme a, dit Leach. Ils fonctionnent tout autrement. Ils fonctionnent, en effet, par alliances. Mais les alliances ne sont nullement des changes parce que les alliances ne prsupposent pas les grandes lignes de filiations, elles se font autrement et ailleurs. Les alliances ne se laissent pas dduire des lignes de filiation. Les alliances sont autonomes. Et, en effet, elles sont, la lettre, magouilles, manipules par des groupes que Leach appelle des groupes locaux, les groupes locaux de Leach, par opposition aux groupes de filiation. Et les groupes locaux ne recouvrent pas les groupes de filiation et ce sont les groupes locaux qui organisent les mariages. Ce sont les groupes locaux qui dcident des dons et des contre-dons, en dautres termes quest-ce quil faut comprendre ? Ce que beaucoup dethnologues avaient dit, mais cest Leach qui fait le... qui rassemble lensemble. Les alliances sont laffaire dune pratique. Il y a un ethnologue qui dira et qui emploiera le mot trs curieux, il dira : ce nest pas une structure, cest un procd. Cest affaire de pratique, dun procd. Disons [ peine ?] stratgie. Une socit stratgise avant de se structurer. Et Leach pose sa grande question : la position dun individu dans le champ social, est-ce quelle est due ce quil appartient aux lignages de son pre ou bien aux lignages de sa mre, ou bien aux deux l