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Pratique médicale et chirurgicale de l’animal de compagnie (2010) 45, 93—98 CAS CLINIQUE Hypercorticisme d’origine hypophysaire secondaire à une surrénalectomie chez un chien Pituitary hypercorticism secondary to adrenalectomy in a dog C. Juillet a,, P. De Fornel-Thibaud b , C. De La Roche c , J.-C. Troger d a 22, avenue Jean-Jaurès, 64500 Ciboure, France b Centre de cancérologie vétérinaire, 7, avenue du Général-de-Gaulle, 94700 Maisons-Alfort, France c 4, place Convention, 89270 Vermenton, France d 41, avenue Lulli, 92330 Sceaux, France Rec ¸u le 17 septembre 2009 ; accepté le 16 juin 2010 Disponible sur Internet le 14 aoˆ ut 2010 MOTS CLÉS Hypercorticisme ; Surrénalectomie ; Tumeur hypophysaire ; Tumeur surrénalienne ; Chien Résumé Un hypercorticisme lié à une tumeur surrénalienne sécrétante (syndrome de Cushing) est diagnostiqué chez une chienne Braque allemand de huit ans. Suite à la surrénalectomie, une rémission transitoire des symptômes d’hypercorticisme est observée durant les premiers mois postopératoires mais une récidive est observée. Un hypercorticisme d’origine hypophysaire (maladie de Cushing) est alors identifié. La survenue de deux syndromes de Cushing d’origines différentes chez un même animal est rare. La discussion présentée reprend la démarche diagnostique mise en œuvre afin d’exclure une erreur sur le diagnostic éthiopathogénique des deux syndromes d’hypercorticisme ou leur possible dépendance. Les deux syndromes de Cushing décrits dans le cas présenté sont probablement indépendants. © 2010 AFVAC. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Hyperadrenocorti- cism; Adrenalectomy; Pituitary tumor; Adrenal tumor; Dog Summary An adrenocortical dependent hyperadrenocorticism in relation with an adrenocorti- cal tumor is identified in an 8-year-old German Shorthaired Pointer. The hyperadrenocorticism’s symptoms momentarily disappeared after adrenalectomy but a relapse occurred few months later. A pituitary-dependant hyperadrenocorticism (Cushing disease) is diagnosed. The deve- lopment of two hyperadrenocorticisms with two different origins in a same dog is rare. The discussion deal with the possible mistakes in the ethiopathogenic findings and the possible relation between the two hyperadrenocorticisms. In this case, the two hyperadrenocorticisms seem to be unrelated. © 2010 AFVAC. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Crédits de formation continue. La lecture de cet article ouvre droit à 0,05 CFC. La déclaration de lecture, individuelle et volontaire, est à effectuer auprès du CNVFCC (cf. Sommaire). Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Juillet). 0758-1882/$ — see front matter © 2010 AFVAC. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.anicom.2010.06.001

Hypercorticisme d’origine hypophysaire secondaire à une surrénalectomie chez un chien

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Pratique médicale et chirurgicale de l’animal de compagnie (2010) 45, 93—98

CAS CLINIQUE

Hypercorticisme d’origine hypophysaire secondaireà une surrénalectomie chez un chien�

Pituitary hypercorticism secondary to adrenalectomy in a dog

C. Juilleta,∗, P. De Fornel-Thibaudb, C. De La Rochec,J.-C. Trogerd

a 22, avenue Jean-Jaurès, 64500 Ciboure, Franceb Centre de cancérologie vétérinaire, 7, avenue du Général-de-Gaulle,94700 Maisons-Alfort, Francec 4, place Convention, 89270 Vermenton, Franced 41, avenue Lulli, 92330 Sceaux, France

Recu le 17 septembre 2009 ; accepté le 16 juin 2010Disponible sur Internet le 14 aout 2010

MOTS CLÉSHypercorticisme ;Surrénalectomie ;Tumeurhypophysaire ;Tumeursurrénalienne ;Chien

Résumé Un hypercorticisme lié à une tumeur surrénalienne sécrétante (syndrome de Cushing)est diagnostiqué chez une chienne Braque allemand de huit ans. Suite à la surrénalectomie,une rémission transitoire des symptômes d’hypercorticisme est observée durant les premiersmois postopératoires mais une récidive est observée. Un hypercorticisme d’origine hypophysaire(maladie de Cushing) est alors identifié. La survenue de deux syndromes de Cushing d’originesdifférentes chez un même animal est rare. La discussion présentée reprend la démarchediagnostique mise en œuvre afin d’exclure une erreur sur le diagnostic éthiopathogénique desdeux syndromes d’hypercorticisme ou leur possible dépendance. Les deux syndromes de Cushingdécrits dans le cas présenté sont probablement indépendants.© 2010 AFVAC. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSHyperadrenocorti-

Summary An adrenocortical dependent hyperadrenocorticism in relation with an adrenocorti-cal tumor is identified in an 8-year-old German Shorthaired Pointer. The hyperadrenocorticism’s

cism;Adrenalectomy;Pituitary tumor;Adrenal tumor;Dog

symptoms momentarily disappeared after adrenalectomy but a relapse occurred few monthslater. A pituitary-dependant hyplopment of two hyperadrenocordiscussion deal with the possibrelation between the two hyperseem to be unrelated.© 2010 AFVAC. Published by Else

� Crédits de formation continue. La lecture de cet article ouvre droit àest à effectuer auprès du CNVFCC (cf. Sommaire).

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (C. Juillet).

0758-1882/$ — see front matter © 2010 AFVAC. Publié par Elsevier Massodoi:10.1016/j.anicom.2010.06.001

eradrenocorticism (Cushing disease) is diagnosed. The deve-

ticisms with two different origins in a same dog is rare. Thele mistakes in the ethiopathogenic findings and the possibleadrenocorticisms. In this case, the two hyperadrenocorticisms

vier Masson SAS. All rights reserved.

0,05 CFC. La déclaration de lecture, individuelle et volontaire,

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Figure 2. Examen tomodensitométrique initial. Coupe trans-vinc

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ne chienne Braque allemand non stérilisée âgée de huit ansst présentée lors d’une récidive de pyodermite.

L’examen clinique révèle une discrète ptose abdominalet un érythème diffus (le calque cutané montre une prolifé-ation bactérienne). Un syndrome polyuro-polydipsie (PUPD)t une polyphagie sont rapportés par le propriétaire.

L’examen biochimique sanguin réalisé (urée, créatinine,hosphatases alcalines [PAL], alanine aminotrasnféraseALAT]) est conforme aux valeurs de références. La corti-olémie une heure après stimulation à l’adrenocorticotropormon (ACTH) (synacthène ND) est anormalement augmen-ée (cortisolémies à To et To + une heure : 251—609 nmol/L ;aleurs usuelles du laboratoire : 150—400 nmol/L). Confron-és au tableau clinique, ces résultats sont compatibles avecn syndrome de Cushing.

Le test de freinage de la cortisolémie à la dexamétha-one à dose forte (0,1 mg/kg) ne permet pas de conclureur l’origine du syndrome de Cushing (absence de frei-age à quatre heures et huit heures) : cortisolémies à To,o + quatre heures et To + huit heures : 124—99—116 nmol/L.

L’examen tomodensitométrique de l’encéphale et de’abdomen crânial ne montre aucune anomalie encéphaliqueisible, mais une glande surrénale gauche de forme ovoïde,e taille augmentée (20 × 20 × 26 mm3) et présentant desésions nécrotiques et calcifiées (Fig. 1). Les contours de lalande sont bien délimités et sans contact avec les vaisseauxénaux ou la veine cave caudale.

La glande surrénale droite est atrophiée (diamètre maxi-al 4 mm) (Fig. 2). Ces images sont compatibles avec une

umeur surrénalienne gauche responsable du syndrome deushing.

igure 1. Examen tomodensitométrique initial. Coupe trans-ersale de l’abdomen, obtenue par acquisition hélicoïdale aprèsnjection de produit de contraste iodé : visualisation de la masseurrénalienne gauche. 1 : surrénale gauche ; 2 : aorte ; 3 : veine caveaudale ; 4 : rein gauche.

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ersale de l’abdomen, obtenue par acquisition hélicoïdale aprèsnjection de produit de contraste iodé : visualisation de la surré-ale droite atrophiée. 1 : surrénale droite ; 2 : aorte ; 3 : veine caveaudale ; 4 : rein droit.

Le bilan d’extension abdominal et pulmonaire ne montreas de métastase tomodensitométriquement décelable.

Le dosage de l’ACTH plasmatique effondré (< 5 pg/mL ;aleurs usuelles : 8—58 pg/mL) conforte le diagnostic de syn-rome de Cushing d’origine surrénalienne.

En raison du bilan d’extension favorable, le traitemente choix est chirurgical.

raitement

ne surrénalectomie gauche est réalisée par abord ventralédian et n’est suivie d’aucune complication.L’examen histologique conclut à un adénome cortico-

urrénalien sans signe de malignité.

volution et suivi

uatre jours après la surrénalectomie, l’ionogramme estormal et la cortisolémie une heure après stimulation à’ACTH est mesurée à 70 nmol/L. Trois semaines après, lesésultats du test de stimulation de la cortisolémie à l’ACTHont les suivants : 118—115 nmol/L. La polyuro-polydipsie,a polyphagie et les signes cutanés régressent en quelquesemaines.

Les résultats des contrôles (examen clinique, ECGt ionogramme) réalisés dans les premiers mois suivant’intervention sont normaux.

Huit mois après la surrénalectomie, le chien est présentée nouveau pour pyodermite et alopécie diffuse, une PUPDt une polyphagie modérés étant rapportés à nouveau. Deouveaux dosages hormonaux sont réalisés sur la base de cesymptômes et des antécédents de l’animal.

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Hypercorticisme d’origine hypophysaire chez un chien secondaire 95

Figure 3. Second examen tomodensitométrique. Coupe trans-versale de l’encéphale, perpendiculaire au plan du palais osseux,obtenue après injection de produit de contraste iodé : fixation hypo-

Figure 4. Second examen tomodensitométrique. Coupe trans-versale de l’abdomen, obtenue par acquisition hélicoïdale aprèsin4

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régulées par l’axe hypothalamo-hypophysaire (HHS). Cette

physaire de produit de contraste délimitant une petite masse de4 mm de diamètre transversal.

La thyroxinémie et la concentration sérique de TSHsont normales (thyroxinémie libre : 15 pmol/L ; TSH :0,14 ng/mL), mais une réponse excessive de la cortisolé-mie après stimulation à l’ACTH est obtenue (cortisolémies àTo et To + une heure : 77—456 nmol/L — valeurs usuelles dulaboratoire : 150—400 nmol/L).

Un test de freinage de la cortisolémie à la dexamé-thasone à dose faible (0,01 mg/kg) montre un freinagerelatif quatre heures après l’injection, mais aucun freinagen’est constaté huit heures après l’injection : cortiso-lémies à To, To + quatre heures et To + huit heures :77—25—80 nmol/L.

Ce résultat confirme le diagnostic de syndrome deCushing et est compatible avec une origine hypophysaire.

Un nouvel examen tomodensitométrique révèle unemasse hypophysaire de 4 mm fixant le produit de contraste(Fig. 3). La glande surrénale droite a un aspect normal.Sa taille a augmenté par rapport à l’examen tomodensi-tométrique initial ; elle est mesurée à 6 mm de diamètre(pour un diamètre de l’aorte sur la même coupe de 8 mm)(Fig. 4).

Le dosage de l’ACTH plasmatique est alors de 117 pg/mL(valeurs usuelles : 8—58 pg/mL). L’ensemble de ces résultatsconfortent l’origine hypophysaire du syndrome de Cushingnouvellement diagnostiqué.

Un traitement au trilostane (vétoryl ND) à la dose de60 mg/j associé à un traitement dermatologique appro-prié (céfalexine trois semaines et topiques antiseptiques)ont permis la rémission des symptômes. Deux ans après le

diagnostic du premier syndrome de Cushing, la chienne seporte bien et les résultats des contrôles réguliers par stimu-lation à l’ACTH sont normaux sous trilostane.

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njection de produit de contraste iodé : visualisation de la surré-ale droite. 1 : surrénale droite ; 2 : aorte 3 : veine cave caudale ;: rein droit.

iscussion

e syndrome de Cushing se définit comme un ensemble deymptômes secondaires à une hypercortisolémie chronique ;l est rencontré principalement chez le chien âgé [1].

Il peut être d’origine hypophysaire, lié à la présence’une tumeur hypophysaire produisant de facon déréguléee l’ACTH (maladie de Cushing), ou directement lié à unxcès de production de cortisol par une tumeur surréna-ienne [1].

L’originalité du cas présenté tient au développement suc-essif de deux syndromes de Cushing d’origine différentehez un même animal.

Le développement de deux syndromes indépendants estare, aussi plusieurs questions sont soulevées par ce cas :

a-t-il eu réellement deux syndromes de Cushing ou unnique syndrome d’origine hypophysaire diagnostiqué pri-itivement à tort comme surrénalien ? Le développement’une tumeur hypophysaire peut-il être la conséquenceu premier syndrome de Cushing ? Le second syndrome deushing peut-il être la conséquence d’une métastase de laumeur surrénalienne primitive ?

hysiopathogénie

e syndrome de Cushing est défini par les changementshysiques et biochimiques liés à un excès chronique de glu-ocorticoïdes (cortisol) dans le sang [1,2].

Les glandes surrénales, qui produisent le cortisol, sont

égulation fait intervenir plusieurs hormones dont la cortico-ropin releasing hormon (CRH) sécrétée par l’hypothalamus,’ACTH secrétée par l’hypophyse et le cortisol lui-même qui

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igure 5. Axe hypothalamo-hypophysaire surrénalien.

xerce un rétrocontrôle négatif sur son axe de régulationFig. 5A).

Le syndrome de Cushing est d’origine hypophysaire dans5 % des cas (maladie de Cushing HCH). Une tumeur (situéeour 80 % des cas dans le lobe antérieur de l’hypophyse)roduit de manière déréglée l’ACTH, conduisant à une sti-ulation des surrénales (Fig. 5B). Cette tumeur répond peu

u rétrocontrôle négatif exercé par le cortisol. Il peut s’agir’un microadénome ou d’un macroadénome [3].

Le syndrome de Cushing est d’origine surrénalienne dans5 % des cas (HCS). Une tumeur (adénome ou adénocarci-ome en proportions égales) du cortex surrénalien produite cortisol de manière autonome. Cette sécrétion est doncndépendante de la stimulation hypophysaire. Le rétro-ontrôle négatif exercé par l’excès de cortisol conduit

l’effondrement de la sécrétion d’ACTH hypophysairet à l’atrophie de la surrénale controlatérale (Fig. 5C).ans 10 % des cas d’HCS, la tumeur sécrétante peut êtreilatérale [2].

Exceptionnellement l’hypercorticisme peut être induitar une tumeur non hypophysaire secrétant de l’ACTH [4].

iagnostic de l’hypercorticisme et de sonrigine

ans le cas décrit ici, plusieurs examens biologiques et’imagerie ont été mis en œuvre pour confirmer l’existence

es deux syndromes de Cushing et déterminer leur origineespective. À l’occasion de sa première visite, l’animal pré-entait des signes cliniques attribuables à un syndrome deushing : ptose abdominale, polyuro-polydipsie, polyphagie.es facteurs d’orientation diagnostique ont été recherchés

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ar analyse biochimique sanguine (urémie, créatinémie,esure de la concentration sérique des PAL et ALAT). Cesaramètres étaient normaux bien qu’il soit décrit fréquem-ent une augmentation de la concentration sérique deshosphatases alcalines (dans 90 % des cas), une diminutione l’urémie et une hyperglycémie (diabète sucré associéans 10 % des cas).

Une analyse d’urine aurait pu venir étayer la suspicion cli-ique, celle-ci étant généralement modifiée : hyposthénuriedensité < 1,012 dans 85 % des cas) et parfois leukocyturie,rotéinurie et hématurie (souvent témoins d’une immuno-uppression induite).

La suspicion clinique de syndrome de Cushing a toute-ois justifié la réalisation en première intention d’un teste stimulation à l’ACTH. Ce choix est discutable. Ce testst couramment employé car facile à mettre en œuvre. Ilst le seul à autoriser un diagnostic différentiel entre unyndrome de Cushing spontané et un hypocorticisme iatro-ène. Néanmoins ses performances ne sont pas excellentesuisque toute maladie chronique concomitante peut fausserositivement ses résultats. Un test de freinage de la corti-olémie à la dexaméthasone à dose faible aurait pu êtrenvisagé bien que l’existence d’une affection concomitantenterfère tout autant avec la réponse.

Dans le cas présent, les résultats du test de stimula-ion à l’ACTH, confrontés au tableau clinique, ont permise confirmer l’hypothèse de syndrome de Cushing.

L’origine de ce premier syndrome de Cushing a ensuiteté déterminée par différents examens : test de freinagee la cortisolémie à la dexaméthasone à dose forte, exa-en tomodensitométrique de l’encéphale et des surrénales,esure de la concentration plasmatique en ACTH.

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Hypercorticisme d’origine hypophysaire chez un chien secon

Freinage de la cortisolémie à la dexaméthasone àdose forte (0,1 mg/kg)Lors d’HCH, la dose massive de dexaméthasone injectéeconduit à un freinage absolu (cortisolémie à quatre heureset/ou huit heures < 40 nmol/l) ou relatif (cortisolémie àquatre heures et/ou huit heures < cortisolémie basale divi-sée par deux) dans 75 % des cas. Environ 25 % des tumeurshypophysaires ne répondent pas à ce test : un freinage estsynonyme d’HCH (sensibilité 100 %), mais l’absence de frei-nage ne permet aucune conclusion [5].

Dans le cas présent, en l’absence de freinage de la cor-tisolémie, aucune conclusion n’a pu être formulée quantà l’origine du syndrome de Cushing. Toutefois, ce testconfirme le diagnostic de syndrome de Cushing (un effon-drement de la cortisolémie étant attendu chez les chiensindemnes de syndrome de Cushing).

Examens d’imagerie médicaleLa tomodensitométrie permet d’identifier les masses hypo-physaires et leurs conséquences (compression des structuresencéphaliques avoisinantes) et une exploration précise dela cavité abdominale (évaluation des surrénales et biland’extension lors de masse surrénale).

En présence de signes neurologiques centraux, c’est unexamen à privilégier en première intention.

La visualisation d’une masse surrénalienne associée àune atrophie surrénalienne controlatérale est diagnostiqued’un syndrome de Cushing d’origine surrénalienne. En dépitde l’absence de paramètres tomodensitométriques précispubliés à ce jour en médecine vétérinaire, la détectiond’une masse surrénalienne de plus de 2 cm de diamètreassociée à une surrénale controlatérale de petite taille(nettement inférieure au diamètre de l’aorte au mêmeniveau) nous a paru univoque. L’absence d’envahissementvasculaire, l’absence de lésion thoracique ou abdominaleévoquant des métastases n’offrent évidemment pas d’autreargument.

Dosage de l’ACTH plasmatiqueLa sensibilité et la spécificité de ce test sont très bonnes[6,7]. La concentration plasmatique en ACTH est normale àaugmentée lors d’HCH et à l’inverse effondrée lors d’HCS.En pratique, ce dosage est peu disponible et délicat à réa-liser car l’ACTH est une hormone très labile. Le sang doitêtre centrifugé à froid immédiatement après prélèvement,le plasma séparé du culot rapidement puis congelé immé-diatement dans un tube sec avant envoi au laboratoire.Le transport jusqu’au laboratoire doit se faire dans le res-pect strict de la chaîne du froid. En cas d’impossibilité decentrifugation à froid et d’envoi congelé, l’ajout au prélève-ment d’un inhibiteur de protéases est envisageable [8]. Dansnotre cas, les conditions de prélèvement préalablementdécrites ayant été respectées, seule une rupture acciden-telle de la chaîne du froid, non suspectée lors de la réceptiondu prélèvement par le laboratoire, permettrait d’expliquer

l’effondrement de la concentration plasmatique d’ACTH, enl’absence de syndrome de Cushing d’origine surrénalienne.

Ces différents examens ont donc permis de conclureà une origine surrénalienne dans le cas présenté. Cerésultat a été conforté par l’analyse histologique de la

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urrénale et l’amélioration clinique de l’animal suite àa surrénalectomie : disparition complète des symptômes’hypercorticisme. Un argument supplémentaire aurait putre fourni par un test de stimulation à l’ACTH réaliséans les 24 heures après l’intervention [9]. Une absenceomplète de réponse à la stimulation est attendue aprèsurrénalectomie lors de syndrome de Cushing d’origine sur-énalienne, témoignant de la mise au repos de la surrénaleontrolatérale (suite au rétrocontrôle négatif). La réponseodeste de la cortisolémie à la stimulation à l’ACTH obser-

ée quatre jours après la surrénalectomie (le chien recevantne supplémentation en glucocorticoïdes) est très délicateinterpréter.Le diagnostic du second syndrome de Cushing (huit mois

près le premier) a suivi la même démarche : test de stimu-ation à l’ACTH, confronté à la réapparition de symptômesvocateurs (PUPD, polyphagie, alopécie). Le recours à unest offrant une sensibilité supérieure, un test de freinagee la cortisolémie à la dexaméthasone à dose faible, a per-is de confirmer la suspicion d’hypercorticisme : absencee freinage de la cortisolémie à huit heures. Ce test a delus offert une orientation étiologique forte en faveur d’unyndrome de Cushing d’origine hypophysaire : freinage tran-itoire de la cortisolémie à quatre heures. Les résultats’un nouvel examen tomodensitométrique (augmentatione taille de la surrénale en place, développement d’uneasse hypophysaire) ont conforté le nouveau diagnostic

tiologique, sans toutefois offrir un diagnostic de certi-ude de syndrome de Cushing. En effet, de telles imageseuvent être observées chez des chiens indemnes de syn-rome de Cushing, la visualisation d’une lésion hypophysaire’étant pas synonyme d’adénome corticotrope. Cependant,’évolution des lésions entre les deux examens tomodensi-ométriques est évocatrice de l’installation d’une maladiee Cushing. De même, la mesure de la concentration plas-atique en ACTH a conforté le diagnostic d’HCH. Enfin, la

égression des symptômes sous trilostane, inhibiteur de latéroïdogenèse, est un argument supplémentaire en faveure l’installation d’un second syndrome de Cushing, sansrienter sur son origine (une réponse clinique et biolo-ique favorable étant généralement observée quelle queoit l’origine du syndrome) [10].

L’ensemble de ces résultats est en faveur de deuxyndromes de Cushing distincts et successifs, excluant’hypothèse d’une métastase surrénalienne (non compati-le de plus avec le résultat de l’analyse histologique de laumeur). Ils ne permettent pas en revanche de détermineri le deuxième syndrome de Cushing est survenu indépen-amment du premier ou si la surrénalectomie a eu desonséquences dans le développement de la tumeur hypo-hysaire.

L’évolution d’une masse hypophysaire à la suite d’uneurrénalectomie unilatérale dans le cadre d’un syndrome deushing d’origine surrénalienne n’est pas documentée chez

e chien. Elle est en revanche décrite chez l’homme aprèsurrénalectomie bilatérale [9,11,12].

Le mécanisme physiopathogénique conduisant au déve-oppement d’une tumeur hypophysaire par disparition du

étrocontrôle cortisolien est questionnable. La plupart deshiens ayant subi une surrénalectomie unilatérale ne néces-itent pas de supplémentation en glucocorticoïdes au-delàe quelques semaines car la reprise de fonctionnement de
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a glande surrénale restante est généralement rapide et laégulation hypothalamo-hypophysaire est normale chez ceshiens [9,13]. On peut donc imaginer que le cortisol secrétéar la surrénale restante suffise à jouer son rôle d’inhibiteuru niveau hypothalamo-hypophysaire.

Il est donc peu probable que l’hypocorticisme transitoire,t corrigé, faisant suite à la surrénalectomie unilatéraleuisse engendrer le développement (installation puis crois-ance) d’un adénome hypophysaire.

Les deux syndromes de Cushing décrits dans le cas pré-enté sont probablement indépendants.

onclusion

a suspicion d’un syndrome de Cushing, basée sur des élé-ents cliniques et anamnestiques, doit faire l’objet d’uneémarche diagnostique rigoureuse.

Les examens complémentaires, choisis selon leurs per-ormances et leur disponibilité, permettent de confirmer’hypercorticisme chronique et de déterminer son ori-ine.

Ainsi, même dans un cas inhabituel comme celui pré-enté, le clinicien est en mesure de proposer un traitementfficace.

onflit d’intérêt

ucun.

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