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Infections et immunité, nouveaux concepts : cellules Natural Killer, cellules lymphoïdes innées et immunité innée

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La Revue de médecine interne 34S (2013) A19–A23

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

ynthèse de communication en séance plénière : infections et immunité, nouveaux concepts

nfections et immunité, nouveaux concepts : cellules Natural Killer, cellulesymphoïdes innées et immunité innée

. Ebboa,d, A. Gradosa,d, N. Schleinitza,d, É. Vivierb,∗,c,d,e, F. Vélyb,c,d,e

Service de médecine interne, hôpital de la Conception, Assistance publique–Hôpitaux de Marseille, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille, FranceInserm U1104, centre d’immunologie de Marseille-Luminy, université de la Méditerranée, 163, avenue de Luminy, case 906, 13288 Marseille cedex 9, FranceCNRS, UMR7280, 13009 Marseille, FranceAix Marseille université, UM2, 13009 Marseille, FranceService d’immunologie, hôpital de la Conception, Assistance publique–Hôpitaux de Marseille, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille, France

. Objectifs pédagogiques

Les objectifs pédagogiques sont :

connaître les marqueurs et caractéristiques des cellules NaturalKiller (NK) permettant de les identifier, en particulier dans le sangcirculant ;connaître les principales fonctions effectrices des cellules NK, lesconditions nécessaires à ces fonctions, et la place des cellules NKau sein de la réponse immunitaire ;savoir qu’il existe des cellules lymphoïdes innées, et connaître lesprincipales caractéristiques de ces cellules ;connaître les grands cadres nosologiques au cours desquels lescellules NK ont été impliquées, et les perspectives thérapeutiquesqui en découlent.

. Introduction

Le système immunitaire est classiquement divisé en systèmemmunitaire inné et système immunitaire adaptatif. Cette dis-inction « historique » repose, d’une part, sur une immunité innéeapable d’exercer une réponse effectrice rapide (de l’ordre deuelques heures), dans tous les tissus, en réponse à différentstimuli infectieux, physiques ou encore tumoraux, et impliquantifférents acteurs myéloïdes et lymphoïdes caractérisés par unépertoire limité de récepteurs. D’autre part, l’immunité adapta-ive implique les lymphocytes T et B, caractérisés par leur largeépertoire de récepteurs aux antigènes issus de recombinaisonsomatiques (appelés respectivement TCR et BCR), et nécessitees processus de division et de maturation au sein des organes

ymphoïdes spécialisés, à l’origine d’une réponse effectrice plusetardée (de l’ordre de jours). Depuis leur première descrip-ion en 1975 [1,2], les cellules NK ont été classées parmi lesymphocytes (morphologie, marqueurs lymphoïdes, progéniteur

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (É. Vivier).

248-8663/$ – see front matterttp://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2013.03.333

lymphoïde commun), mais sont généralement considérés commedes acteurs de l’immunité innée (absence de TCR et BCR). De nom-breuses avancées ont été réalisées ces dernières décennies dansla compréhension du fonctionnement de ces cellules et de leurrôle au sein du système immunitaire. Certaines de ces nouvellesdonnées, ainsi que leurs conséquences chez l’homme à l’état phy-siologique comme au cours de certaines situations pathologiques,seront présentées au cours de cette intervention.

3. Cellules Natural Killer

3.1. Comment identifier les cellules Natural Killer ?

Les cellules NK correspondent morphologiquement à des grandslymphocytes granuleux. Elles sont caractérisées au point de vuephénotypique par l’absence d’expression de CD3, et l’expressionde différents marqueurs de surface dont CD56 (NCAM) et NKp46.On distingue classiquement les NK exprimant fortement CD56(CD56bright) des NK l’exprimant plus faiblement (CD56dim). Cesdernières représentent généralement près de 90 % des cellulesNK du sang et expriment le récepteur activateur au fragmentconstant des IgG Fc�RIIIA (ou CD16) à un niveau plus élevé.CD16 est le récepteur de la cytotoxicité dépendante des anti-corps (ADCC). De nombreux autres récepteurs sont exprimés àla surface des cellules NK [3], parmi lesquels : des récepteursaux cytokines (dont interleukine [IL]-15R, IL-2R, IL-21R) impliquésdans le développement, la maturation, la survie et les fonctionseffectrices de ces cellules ; des récepteurs activateurs associésà des polypeptides transmembranaires à motifs immunorecep-tor tyrosine-based activation motifs (ITAMs), dont les récepteursdits de cytotoxicité naturelle (NCR : NKp46, NKp44, NKp30) ; desrécepteurs à des molécules de stress comme NKG2D ; des récep-teurs inhibiteurs, reconnaissant en particulier les molécules declasse I du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH), avec

certains killer cell immunoglobulin-like receptors (KIRs) ou encorel’hétérodimère CD94/NKG2A, contenant des motifs immunorecep-tor tyrosine-based inhibition motifs (ITIMs) ; ou enfin des récepteursaux chémokines, impliqués dans le trafic de ces cellules. Certains
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Fig. 1. Régulation dynamique des fonctions effectrices Natural Killer (NK). Les cellules NK intègrent, grâce à leurs récepteurs activateurs et inhibiteurs, la densité de différentesmolécules exprimées à la surface des cellules avec lesquelles elles interagissent, ce qui dicte la qualité et l’intensité de leur réponse. Les cellules NK « épargnent » les cellulessaines exprimant le complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe I et de faibles taux de molécules de stress (A), alors qu’elles lysent spécifiquement les celluless s de sD

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tressées qui sous-expriment le CMH de classe I (B) ou sur-expriment des molécule’après Vivier et al. [3].

acteurs de transcription, dont E4BP4, TOX, T-bet et Eomes, sontécessaires au développement et à la maturation des cellules NK.nfin, du point de vue fonctionnel, les cellules NK sont caractéri-ées par la capacité de production de cytokines, activatrices avecn particulier la production d’IFN-�, mais également inhibitricesIL-10). Leur cytotoxicité est soit médiée par les anticorps (ADCC),oit dite naturelle (en présence de cellules « stressées », sous-xprimant les molécules de classe I du CMH et/ou sur-exprimantes molécules de stress) [3]. Les conditions nécessaires et lesécanismes impliqués dans ces fonctions, ainsi que leurs rôles au

ein de la réponse immunitaire seront précisés plus loin dans cetxposé.

.2. Où se localisent les cellules Natural Killer ?

Les cellules NK sont largement présentes au sein des organesymphoïdes et non lymphoïdes. Les précurseurs des cellules NKont issus de la moelle osseuse. Un processus complexe de matu-ation a lieu au niveau médullaire, menant à l’acquisition desifférentes fonctions effectrices des cellules NK, ainsi qu’à desodifications d’expression d’intégrines et de récepteurs aux ché-okines, à l’origine de leur redistribution de la moelle osseuse

t des ganglions vers le sang circulant, la rate, le foie ou encorees poumons. Chez la souris, les proportions les plus impor-antes de cellules NK parmi les lymphocytes sont retrouvées auiveau du poumon et du foie, même si le nombre absolu le plus

mportant est retrouvé au niveau de la rate [4]. Au niveau splé-ique, les cellules NK se situent à l’état basal essentiellement auiveau de la pulpe rouge, principalement au sein des capillairesinusoïdes, et en contact avec les macrophages et les cellulesendritiques, avec une redistribution vers la zone marginale enondition inflammatoire [4]. Chez l’homme, le nombre de cel-ules NK est dix fois plus important au niveau des ganglionsue dans le sang circulant [5]. Une augmentation importante duombre de cellules NK au niveau de l’utérus a été rapportée auours de la grossesse, où elles pourraient contribuer au dévelop-

ement de l’embryon [6]. Des cellules NK ont été détectées auiveau de la peau en faible nombre chez le sujet sain [7], ainsiu’en nombre plus important au cours de dermatoses inflamma-oires.

tress (C).

3.3. Comment « fonctionnent » les cellules Natural Killer ?

Les fonctions effectrices des cellules NK sont régulées de facondynamique (Fig. 1). En effet, les cellules NK sont capables de détec-ter la densité de différentes molécules de surface exprimées parles cellules avec lesquelles elles interagissent. L’intégration del’ensemble de ces différents signaux, par le biais des différentsrécepteurs inhibiteurs et activateurs, va dicter la qualité ainsi quel’intensité de la réponse NK. Ainsi, les cellules NK épargnent les cel-lules saines exprimant les molécules du CMH de classe I et de faiblesquantités de molécules de stress (situation de « tolérance » NK). Àl’inverse, les cellules NK tuent de manière sélective les cellules enétat de « stress », sous-exprimant les molécules du CMH de classe Iet/ou sur-exprimant des molécules de stress [3]. Longtemps réser-vée au système immunitaire adaptatif, la notion d’« éducation »semble pourtant également pouvoir s’appliquer aux cellules NK.En effet, selon les conditions environnementales dans lesquelleselles se développent, les capacités de réponse des cellules NK sontvariables. Ainsi, l’absence d’engagement des récepteurs inhibiteurs(absence de détection des molécules du CMH de classe I ou absenced’expression de récepteur au CMH de classe I) lors de leur déve-loppement est à l’origine d’un état « hyporéactif » à l’état basal.De la même facon, l’engagement chronique de différents récep-teurs activateurs (comme NKG2D ou KIR2DS1) peuvent entraînerune anergie des cellules NK. À l’inverse, une éducation des cel-lules NK par le CMH de classe I via leurs récepteurs inhibiteurset l’engagement de leurs récepteurs aux cytokines (IL-15R, IL-12R,IL-18R) permettent une capacité de réponse plus importante de cescellules.

Les fonctions biologiques des cellules NK sont multiples, et par-ticipent au faconnement de la réponse immunitaire (Fig. 2). Ainsi,les cellules NK sont capables de reconnaître toute une variété decellules « stressées » (lésions de l’ADN, transformation tumorale,infections intracellulaires. . .) en présence ou non d’anticorps. Cettereconnaissance est à l’origine d’une activation des cellules NK,conduisant à la lyse de la cible, et à la production de cytokines et de

chémokines. Les cellules NK interagissent directement ou indirec-tement avec de nombreux autres acteurs du système immunitaire.Ainsi on citera par exemple leurs capacités : à lyser les cellules den-dritiques immatures et de promouvoir la maturation des cellules
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Fig. 2. Fonctions biologiques des cellules Natural Killer (NK). Les cellules NK reconnaissent différentes cellules « stressées » en présence ou non d’anticorps. Cette reconnaissanceentraîne l’activation des cellules NK et la lyse des cellules cibles, ainsi que la production de cytokines (le plus souvent activatrices [IFN-�] mais aussi inhibitrices [IL-10] dansc s dendm ps.D

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endritiques (via la production d’IFN-� et de TNF-�), à l’origine’une augmentation de la présentation antigénique aux cellules T ;moduler les réponses des macrophages et des cellules T via la

roduction d’IFN-� (stimulation) ou d’IL-10 (inhibition) selon lesonditions.

. Quel rôle pour les cellules Natural Killer in vivo chez’homme ?

.1. Déficit en cellules Natural Killer chez l’homme

La description de déficits immunitaires sélectifs des cellules NKhez l’homme n’a été qu’exceptionnellement rapportée [8]. Danses quelques cas extrêmement rares chez l’homme, on note uneusceptibilité à des infections microbiennes, notamment virales.hez la souris, il a été montré le rôle important des cellulesK dans la lutte précoce contre les infections virales, en parti-ulier à herpes virus [9], ainsi que dans l’immuno-surveillancentitumorale [10]. Cependant, les patients présentant des déficitsmmunitaires combinés sévères liés à l’X (SCID-X1) et présentant unéficit NK persistant en post-allogreffe de cellules souches hémato-oïétiques ne semblent pas présenter de manifestations cliniquesajeures [11]. Il a récemment été identifié au sein de familles

e nomades irlandais un nouveau déficit familial en cellules NKdéficit partiel en MCM4 [12–14]), associé à une présentation syn-romique avec insuffisance surrénalienne et retard de croissance.hez les 24 enfants présentant ce syndrome génétique réperto-iés dans la littérature, on notait une disparition spécifique de laous-population NK CD56dim, associée à des anomalies de prolifé-ation et de maturation de la population NK CD56bright. Au pointe vue clinique, ces patients présentaient dès l’enfance des épi-

odes infectieux viraux à répétition, en particulier à Herpes simplexirus et Varicella-Zoster Virus, associés à des épisodes infectieuxespiratoires à répétition, avec apparition de bronchiectasies, debrose pulmonaire et d’insuffisance respiratoire. Un syndrome

ritiques (DC), les lymphocytes T (LT) et les macrophages (M�) et participent à la

lymphoprolifératif associé au virus d’Epstein-Barr (EBV) était éga-lement noté chez l’un d’entre eux. L’ensemble de ces observationssemblent plaider pour l’importance des cellules NK dans lesdéfenses antivirales chez l’homme.

4.2. Cellules Natural Killer et réactivation à cytomégalovirus

Parmi les autres observations plaidant en faveur d’un rôle dans lalutte contre les infections virales des cellules NK chez l’homme, onpeut noter, dans un travail récent, que des patients avec réactivationpour le cytomégalovirus (CMV) au cours de leur hospitalisation enréanimation présentaient, avant la survenue de cette réactivation,un défaut fonctionnel de leurs cellules NK, avec défaut de produc-tion d’IFN-� par rapport à des patients de réanimation appariéssans réactivation pour le CMV [15]. Ce type d’observations pourraitouvrir la voie à des projets d’immunomonitoring NK, afin d’identifierplus précocement les patients les plus à risque de réactivation àCMV dans ces populations.

4.3. Cellules Natural Killer et cancer

Outre leur rôle dans les défenses anti-infectieuses, en parti-culier virales, les cellules NK semblent également jouer un rôleimportant dans la lutte antitumorale chez l’homme. Ainsi, dansune cohorte prospective japonaise de 3625 patients suivis sur unepériode de 11 ans, il existait une diminution significative du risquede cancer chez les sujets avec une activité cytolytique NK élevéeou moyenne (risque relatif respectivement de 0,63 et 0,59) parrapport aux sujets avec faible activité cytolytique [16]. Les prin-cipaux récepteurs impliqués dans la lyse des cellules tumoraleschez l’homme sont, en fonction du type de tumeur, NKp46, NKp30,

NKp44, DNAM1 ou encore NKG2D. Ils reconnaissent différentsligands exprimés ou sur-exprimés à la surface des cellules ciblestumorales. Des mécanismes d’échappement à cette « immuno-surveillance » antitumorale ont d’ailleurs été mis en évidence et
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onstituent un facteur de mauvais pronostic au cours de certainsancers (libération de ligands solubles de NKG2D par exemple auours du mélanome ou du cancer de la prostate) [17].

L’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques constitue unutre champ important dans lequel l’intérêt des cellules NK dans lautte antitumorale a été démontré. En effet, au cours d’allogreffese cellules souches hématopoïétiques avec greffons déplétés enellules T chez des patients atteints de leucémie aiguë myéloblas-ique, il était noté une importante amélioration du pronostic enas d’incompatibilité entre un haplotype HLA du receveur et lesIR exprimés par des cellules NK du donneur contenues dans lereffon (KIR mismatch) [18]. La reconnaissance du « soi-manquant »missing-self) à la surface des cellules leucémiques du receveur pares cellules NK alloréactives du donneur serait à l’origine d’unffet « greffon contre la leucémie » (GVL), tout en améliorant larise de greffe et en diminuant le risque d’effet « greffon contre

’hôte » (GVH). Dans ce contexte, des alternatives thérapeutiquesaisant appel à ce concept du missing-self ont été développées, dont’utilisation d’anticorps monoclonaux anti-KIR, pour lesquels desssais de phase II sont actuellement en cours dans des indicationsomme la leucémie aiguë myéloïde ou le myélome multiple. Desrotocoles de thérapie cellulaire avec transfert adoptif de cellulesK, éventuellement couplés à l’utilisation d’anticorps monoclo-aux, sont également actuellement en cours [19].

.4. Génétique et biologie Natural Killer : apports de lautagenèse au N-éthyl N-nitrosurée (ENU)

L’induction de mutations ponctuelles par la N-éthyl N-

itrosurée (mutagenèse à l’ENU) chez des souris sauvages, ensuiteeproduites entre elles permet l’obtention de mini-pedigreesomozygotes, hétérozygotes ou non porteurs des mutations aléa-oires causées par la mutagenèse à l’ENU.

ig. 3. Classification des cellules lymphoïdes innées (ILCs) selon leurs caractéristiques foncinding protein 3 ; IFN-� : interféron-� ; IL : interleukine ; LTi : lymphoid tissue-inducer ; Nrphan receptor-�. Pour chaque groupe sont précisés : les facteurs de transcription régulanes cytokines produites (seconds rectangles) ; les rôles rapportés en physiologie et en pat’après Spits et al. [22].

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Ainsi, un nouveau pedigree de souris obtenues par cette stra-tégie de mutagenèse à l’ENU, baptisées Genista, présentait unehyporéactivité NK avec un défaut de dégranulation et de productiond’IFN-� [20]. Ce déficit fonctionnel était extrinsèque aux cellulesNK, puisque le transfert adoptif des cellules NK Genista dans dessouris sauvages était à l’origine d’une restauration des fonctionsNK. En revanche, on notait chez ces souris Genista l’absence depolynucléaires neutrophiles matures, en rapport avec l’existencechez ces souris d’une mutation du gène du facteur de transcriptionGfi-1, nécessaire au développement des polynucléaires neutro-philes. Ces travaux ont ainsi permis de mettre en évidence queles polynucléaires neutrophiles étaient nécessaires à la maturationdes cellules NK et à l’acquisition de leurs fonctions effectrices. Lamise en évidence d’un défaut des fonctions NK chez des patientsatteints de neutropénies congénitales sévères et de neutropéniesauto-immunes a également confirmé le rôle des polynucléairesneutrophiles dans le développement et les fonctions des cellulesNK chez l’homme [20].

À l’inverse, un autre pedigree de souris obtenues selon la mêmestratégie de mutagenèse à l’ENU, baptisées souris Noé, présen-tait une hyperréactivité NK, avec augmentation de la productiond’IFN-� et de la dégranulation en présence de cellules tumorales[21]. Cette hyperréactivité NK était à l’origine d’une augmenta-tion de la survie des souris Noé suite à une infection par le MCMVpar rapport aux souris sauvages. Un séquencage pangénomiqueréalisé chez ces souris a permis de mettre en évidence une muta-tion ponctuelle dans le gène codant pour NKp46, à l’origine del’absence d’expression de ce récepteur à la surface des cellulesNK des souris Noé. L’expression transgénique de NKp46 humainpar les cellules NK des souris Noé restaurait des fonctions NK et

une survie après infection par le MCMV comparables à celles dessouris sauvages. L’utilisation d’anticorps monoclonaux bloquantsanti-NKp46 chez des souris sauvages reproduisait le phénotype dessouris Noé avec une hyperréactivité NK. Ainsi, ces travaux ouvrent

tionnelles. AHR : aryl hydrocarbon receptor ; EOMES : eomesodermin ; GATA3 : GATA-CR : natural cytotoxicity receptor, dont NKp46 ; ROR� : retinoic acid receptor-relatedt leur différenciation, leur développement et leurs fonctions (premiers rectangles) ;hologie, principalement dans des modèles murins (rectangles en italique).

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a voie de l’utilisation potentielle d’anticorps monoclonaux anti-Kp46 pour stimuler l’activité NK en thérapeutique (par exempleu cours de déficits immunitaires T en post-allogreffe de cellulesouches. . .).

L’utilisation de stratégies d’analyse pan-génomique dans desopulations de patients pourrait aboutir, dans un futur proche, auxême types de travaux de liaison entre phénotype et mécanismes

iologiques impliqués chez l’homme.

. Concept de cellules lymphoïdes innées

Les cellules NK représentent, avec les cellules inductrices duissu lymphoïde (lymphoid tissue-inducer cells [LTi]), le prototype deellules d’identification récente et occupant une place émergenteans le champ de l’immunologie : les cellules innées lymphoïdesinnate lymphoid cells [ILCs]). Ces cellules innées lymphoïdes,ont l’étude ne fait que commencer, pourraient représenter’importants effecteurs de l’immunité innée avec notamment unôle central dans le remodelage tissulaire. Ces cellules innées lym-hoïdes sont définies par une morphologie lymphoïde, l’absence dearqueur phénotypique myéloïde ou dendritique et l’absence de

écepteur à l’antigène RAG-dépendant. Une nomenclature a récem-ent été proposée [22], en fonction des facteurs de transcriptions

xprimés ainsi que des cytokines produites par ces différentes cel-ules innées lymphoïdes (Fig. 3). On distingue ainsi :

les cellules innées lymphoïdes du groupe 1, caractérisées par leurproduction d’IFN-�, l’absence de production de cytokines de typeTH2 ou TH17 et l’expression du facteur de transcription T-bet, etauxquelles appartiennent les cellules NK ;les cellules innées lymphoïdes du groupe 2, qui produisent descytokines de type TH2 (dont l’IL-5 et l’IL-13) et sont dépendantesdes facteurs de transcription GATA3 et ROR� pour leur dévelop-pement et leurs fonctions ;les cellules innées lymphoïdes du groupe 3 regroupant tous lessous-types produisant de l’IL-17 et/ou de l’IL-22, et dépendant dufacteur de transcription ROR�t pour leur développement et leurfonction.

L’implication de ces cellules innées lymphoïdes a été rapportéeu cours de différentes situations pathologiques, principalementhez la souris. Ainsi, les cellules innées lymphoïdes de typesemblent contribuer de manière protectrice aux défenses anti-arasitaires (infections à helminthes ou à nématodes) et auxéparations tissulaires pulmonaire après une infection grippale ;

l’inverse, elles participent à la physiopathologie de l’asthmellergique. Au sein des cellules innées lymphoïdes de type 3, lesellules inductrices du tissu lymphoïde jouent un rôle crucial dansa formation des organes lymphoïdes secondaires au cours de’embryogénèse et la formation des cryptopatches et follicules lym-hoïdes isolés dans l’intestin. D’autres cellules innées lymphoïdese type 3 (dont certaines expriment NKp46), produisant égalemente l’IL-22, ont un rôle dans la défense contre certaines bactériesigestives (par exemple : infections à Citrobacter), alors que d’autresous-types de cellules innées lymphoïdes du groupe 3 (n’exprimantas de NCR) sont impliqués dans des modèles murins de colite

nflammatoire. Avec la meilleure caractérisation de ces différentesopulations cellulaires, ce champ d’étude de l’immunologie devraitapidement se développer, en particulier en pathologie humaine.

. Conclusion

La meilleure compréhension de la biologie du compartimentK ouvre la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques, comme

[

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l’utilisation d’anticorps monoclonaux ou encore des stratégies dethérapie cellulaire, en particulier dans le domaine de l’oncologie.La réactivité des cellules NK paraît bien plus « plastique » qu’onne le pensait, avec des capacités d’éducation, d’adaptation et demémoire, longtemps réservées au système immunitaire adaptatif.Les interactions étroites des cellules NK avec de nombreux acteursdu système immunitaire adaptatif, ainsi que l’orientation de cedernier par le compartiment NK pourraient amener dans un futurproche à s’intéresser à ces acteurs de l’immunité innée au coursd’autres cadres nosologiques, comme les maladies inflammatoireset dysimmunitaires.

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