Infections Nosocomiales Cours de Residanat 2008

Embed Size (px)

Citation preview

1 Facult de Mdecine dAlger Enseignement de Microbiologie Premire Post-Graduation Anne Universitaire 2007-2008 Pr. A. BENSLIMANI

INFECTIONS NOSOCOMIALESIntroduction Un mot dhistorique Dfinition Principales formes cliniques Critres de diagnostic Facteurs de risque infectieux Lis au malade Lis aux techniques de soins Sources dinfection lhpital Germes responsables dinfection nosocomiale Epidmiologie des infections nosocomiales Prvention des infections nosocomiales Rle du Laboratoire de Microbiologie

INTRODUCTION : Lhpital est un lieu o lon traite mais cest galement un lieu o lon peut contracter des maladies infectieuses : ce sont les infections nosocomiales, ranon du progrs en matire de techniques diagnostiques et thrapeutiques. En effet, la multiplication et la sophistication des techniques de soin devenues de plus en plus invasives, mais aussi ltat dimmunodpression profonde de certains patients, reprsentent des terrains propices ces infections ; par ailleurs, lmergence de souches multi rsistantes posant des problmes dimpasses thrapeutiques, a compliqu la prise en charge de bon nombre de ces infections acquises lhpital. Les infections nosocomiales constituent donc un srieux problme de sant publique pour lequel limpact en matire de morbidit et de surcot est aussi important , sinon plus , que celui en matire de mortalit. Si lradication des infections nosocomiales est impossible du fait que le risque de contracter de telles infections ne peut jamais tre nul, la prvention quant elle, est le crneau sur lequel il faut compter pour limiter ce flau et freiner sa progression. HISTORIQUE : Les infections nosocomiales, longtemps dnommes surinfections , infections hospitalires , infections acquises lhpital , existent depuis la cration des premires structures de soin. Certaines personnalits scientifiques sont restes clbres pour avoir tent de mieux comprendre ce phnomne et mme pour avoir recommand des mesures de lutte qui ont considrablement rduit la morbidit et la mortalit lpoque. Ainsi en est-il dIgnace Philippe SEMMELWEIS (1818-1865), obsttricien Hongrois exerant Vienne, qui a mis en place les premires recommandations concernant lhygine des mains chez le personnel soignant. Il a ainsi contraint toutes les personnes qui pratiquaient des autopsies ou des dissections de cadavre, plonger leurs mains dans une solution de chlore avant de quitter la morgue pour rejoindre les salles daccouchement. Grce cette mthode, la fivre puerprale qui faisait rage lpoque chez les post-accouches (mortalit atteignant 30%), a t mieux matrise.

2 Plusieurs noms clbres se sont ainsi succds dans lhistoire de lhygine hospitalire : Parmi eux , on citera Joseph Lister (1827-1912) avec les notions dantisepsie, POUPINEL , inventeur de l'tuve sche 180C et CHAMBERLAND, l'autoclave dans les annes 1880. Avec la dcouverte des antibiotiques au XXme sicle a dbut lre post-antibiotique , avec , dabord , un semblant de victoire, rapidement suivi de dsillusion par lmergence des BMR. Actuellement, mme si larsenal thrapeutique disponible est srieusement menac par lincroyable capacit bactrienne dvelopper des rsistances, les mthodes dantisepsie et dasepsie restent des remparts efficaces, la base de toutes les mesures prventives imaginables vis--vis des infections nosocomiales. DEFINITION : Du grec nosos =maladie ,komein = soigner , nosokomeion =hpital Infections acquises au cours de lhospitalisation et qui, par consquent, ne sont lors de ladmission, ni apparentes, ni en cours dincubation (CDC Atlanta). Maladies infectieuses (bactriennes,virales, parasitaires,fongiques, prions) cliniquement ou microbiologiquement identifiables,contractes dans une structure de soins,pouvant concerner soit le malade,soit le personnel soignant du fait de son activit. Le caractre nosocomial est bas essentiellement sur le dlai coul entre ladmission et le dbut de linfection. Ce dlai doit tre suprieur la dure dincubation de linfection. Linfection nosocomiale survient donc : - Aprs les 48 premires heures dhospitalisation : le dlai de 48h correspond la dure d'incubation minimum d'une infection aigu lie une bactrie croissance rapide. - Dans les 30 jours aprs intervention chirurgicale (si chirurgie) . - Dans lanne qui suit la mise en place de matriel chirurgical (implant ou prothse). Linfection peut se dclarer pendant le sjour lhpital ou aprs la sortie de lhpital .Exemple : Maladie de Creutzfeld-Jacob , pouvant se dclarer plus de 15 ans aprs transplantation tissulaire ou injection dhormone de croissance dorigine humaine. On ne distingue pas entre infection nosocomiale et infection iatrogne (iatros en grec= mdecin) qui est une infection acquise dans une unit de soin la suite d'une faute ou d'un accident imputable un geste ou une prescription (exemple dinfection iatrogne: infection urinaire provoque par un sondage vsical). A noter que le terme iatrogne ne s'applique pas qu'aux problmes infectieux.

PRINCIPALES FORMES CLINIQUES : On distingue cinq types dInfections nosocomiales: 1- Infection urinaire : La plus frquente. Souvent asymptomatique. Principal facteur de risque : le sondage vsical +++ (le risque augmente en fonction du type et de la dure du sondage). Diagnostic pos par la clinique et lECB des urines.

3 Germes les plus frquents: Escherichia coli , entrocoque,Pseudomonas aeruginosa, Klebsiella sp Enterobacter sp 80 % des infections urinaires nosocomiales sont associes des gestes effectus sur l'arbre urinaire, essentiellement lors de la mise en place de sondes vsicales. 20 % concernent les interventions urologiques plus spcialises. Comme environ 15 % des patients hospitaliss auront une sonde vsicale au cours de leur hospitalisation, on imagine le nombre de patients concerns par cette pathologie. La physiopathologie de l'infection est la suivante : - Les germes des mains de l'oprateur peuvent tre introduits directement dans la vessie. Ceci est rare depuis que les oprateurs mettent des gants striles. - La sonde perturbe le cycle de fonctionnement normal de la vessie. Ni la vessie, ni l'urtre ne peuvent se collaber (se fermer) du fait de la prsence du ballonnet de la sonde dans la vessie et de la sonde elle-mme dans l'urtre. De plus, l'limination des germes lors de la miction grce l'augmentation de pression, ne peut se faire puisque l'urine s'coule en continu. Par ailleurs, la sonde provoque des microtraumatismes muqueux urtraux et vsicaux qui favorisent les bactrimies. - L'infection se dveloppe par voie ascendante extraluminale partir de la flore urtrale du patient en s'infiltrant le long du manchon. L'infection endoluminale est plus rare depuis l'introduction du systme de drainage vsical clos. 2- Pneumonie nosocomiale : 1re place en Ranimation ,1re cause de dcs dans ce service 2me infection nosocomiale la plus frquence dans les tudes pidmiologiques Principal facteur de risque : la ventilation assiste. Mais galement des facteurs lis au patient lui-mme tels ltat de conscience Infection gnralement pluri microbienne. Pseudomonas sp, staphylocoques Prlvements:Aspiration bronchique, lavage broncho-pulmonaire,Prlvements distaux protgs, Expectorations Diagnostic: Signes cliniques + radiologiques + microbiologiques. Le poumon s'infecte selon deux modes : par inhalation des scrtions et par arosolisation. En effet, la flore oropharynge est trs riche (1010 bactries/mL) de mme que la flore digestive. Chez les sujets fragiliss il y a souvent colonisation par les bacilles Gram ngatif partir des germes du systme digestif ; ce processus est favoris par la position couche. On estime que la frquence de colonisation de l'oesophage puis du tractus respiratoire chez les patients en ranimation atteint 100 % aprs 5 10 j d'hospitalisation. Les facteurs de risque sont donc : - dabord les dispositifs invasifs : ventilation mcanique, intubation trachale, mais aussi les sondes gastriques alimentaires nasales qui favorisent les sinusites. Ces sondes provoquent des troubles de la dglutition ce qui favorise les inhalations de germes dans les voies ariennes. Ces troubles peuvent durer jusqu' 1 semaine aprs une seule intubation.

4 - La position couche est favorisante. Les patients doivent tre installs en position semi couche. - L'antibiothrapie prophylactique (prventive) favorise les surinfections Pseudomonas aeruginosa dont on connat les difficults de traitement. 3- Infection du site opratoire : ISO = abcs de paroi (Infection du Site Opratoire) Prsence de pus et/ou inflammation au niveau de lincision, ou entre laponvrose et la peau, ou en provenance du drain. Germes : surtout Gram+; Staphylocoques, souvent association poly microbienne. Diagnostic avant tout clinique. Bactriologie confirme (si le prlvement est effectu!!!). Les infections postopratoires reprsentent 10,6 % des infections nosocomiales, jusqu' 20 % si on inclue les infections de la peau et des tissus mous. 7 % des plaies s'infectent dans les jours qui suivent l'infection, mais les variations sont trs fortes selon que l'on s'intresse de la chirurgie propre (1,5-6,9 %), propre contamine (8-12 %), contamine (13-17 %) ou sale (10-40 %). 4- Infection sur cathter : Inflammation et/ou suppuration au niveau du site dinsertion du cathter (KT). Diagnostic microbiologique: Technique semi quantitative de MAKI ou quantitative de BRUN- BUISSON Les signes locaux et gnraux de linfection disparaissent souvent lors de lablation du KT. Germes responsables :Staphylocoque Coagulase- , entrobactries, Pseudomonas, Acinetobacter 5- Bactrimies nosocomiales : Souvent suite des infections de cathters vasculaires Mais aussi par perfusion de solutions contamines (seringues lectriques) Peuvent se compliquer de sepsis. Bacilles Gram ngatif tels Entrobactries ou Pyocyanique , Staphylococcus coagulase Diagnostic microbiologique : Hmocultures. Les bactrimies nosocomiales sont frquentes, reprsentant 10% des infections nosocomiales. Elles peuvent tre primaires (portes dentre vasculaires) ou secondaires ( partir dun foyer tissulaire). Les bactrimies primaires nosocomiales sont le plus souvent lies l'infection de cathters : les cathters cutans sont plus rarement infects que les cathters poss aprs acte chirurgical. Les cathters priphriques sont plus rarement infects que les cathters centraux (sous-claviers). Les bactrimies secondaires le sont partir de pneumopathies et dinfections intra abdominales. Concernant les bactrimies sur cathter, les Cocci Gram positif, sont en augmentation et reprsentent de 45 52 % des cas. Les infections levures (par ordre dcroissant :Candida albicans, tropicalis, glabrata, guillermondi) sont galement en augmentation. Les infections entrobactries et autres bacilles Gram ngatifs sont en diminution, mais restent quantitativement importantes.

5 6- Les autres localisations infectieuses Elles reprsentent environ 20 % des infections nosocomiales. On trouve des infections de l'oeil et O.R.L. (5,7 %), mais aussi des escarres infects, des infections gnitales aprs interruption de grossesse, des infections de la bouche chez les leucmiques en aplasie mdullaire, des infections du systme nerveux central, des abcs crbraux et des mningites d'inoculation. Tableau 1 : Donnes de prvalence des Infections nosocomiales par site infectieuxDhainaut Infection urinaire Pneumonie ISO Bactrimie Infection sur KT 1994 49.9 20.3 16.3 10.7 3.7 (1) Pilly 2004 40 20 15 15 5 (2) Semep CHU BLIDA (3) 33 25 36 2.6 2.6

(1) Dhainault et all 1994. (2) Pilly.E Maladies infectieuses et tropicales 15 dition 2004. (3) SEMEP Blida Enqute de prvalence 2001 --> 2005 (source : L. Bendali JFC Hpital de Zeralda 2006)

Tableau 2 : Critres de diagnostic de linfection nosocomiale (selon le CDC) :Localisation Infection urinaire Critres 1 des 4 critres suivants : 1) signe urinaire* + uroculture 105 germes/ml 2) signe urinaire* + uroculture 103 germes /ml + leucocyturie 104 /ml 3) sonde urinaire demeure dans les 7 jours prcdents + uroculture105 germes/ml (pas plus de 2 germes isols) 4) pas de signes urinaires, pas de sondage mais 2 urocultures conscutives105 germes/ml ( mme germe retrouv aux 2 analyses ). Infection du site Infection de cicatrice opratoire (abcs de paroi) : infection dans les 30 jours post-opratoire ou dans lanne post-opratoire en cas dimplant ou de opratoire prothse et prsence de pus au niveau de lincision mme en labsence disolement de germes ou germe isol par culture de lcoulement dune plaie ferme bactrimie Au moins 2 hmoculture positive un germe rput pathogne (Staphylococcus aureus ou Pseudomonas aeruginosa) ou Plus de 2 hmocultures prleves lors de ponctions diffrentes et positives lun des germes suivants: - Staphylococcus coagulase (-) - Corynebacterium sp. - Micrococcus sp. - Pseudomonas sp. ainsi que dautres bactries contaminant la peau. Pneumonie Diagnostic radiologique dune ou plusieurs opacits parenchymateuses anormales, rcentes et persistantes + lun des critres suivants : - identification dun germe sur liquide de ponction trans-trachale - identification dun germe dans un lavage broncho alvolaire (LBA) - culture quantitative de LBA 104 UFC/ml - culture quantitative dun prlvement bronchique distal protg 103 UFC/ml * Brlures mictionnelles, Pollakiurie, Dysurie.

6 FACTEURS DE RISQUE INFECTIEUX : 1) services haut risque infectieux (catgorie des malades recruts, dure dhospitalisation et agressivit des thrapeutiques administres) : - Ranimation Polyvalente ou chirurgicale - Diabtologie, - Nonatologie, - Oncologie). Les infections sont plus importantes dans les services mdicaux lourds : ranimation et soins intensifs. Les infections nosocomiales sont ainsi naturellement corrles aux pathologies importantes. Les taux de prvalence confirment cette conclusion : Ranimation (28,1%) , Chirurgie ( 7,4%), Mdecine ( 7,2%) Gyncologie (2,7%), Pdiatrie (1,4%). 2) les autres facteurs de risque peuvent tre distingus en 2 catgories : - Lis au malade et la nature de la pathologie ayant motiv lhospitalisation - Lis aux techniques diagnostiques et thrapeutiques A- Les facteurs lis au malade ou la pathologie ayant motiv son hospitalisation : 1-Les pathologies prexistantes : - Diabte - Insuffisance rnale - Insuffisance hpatique - Incontinence urinaire (facteur de risque dinfection urinaire nosocomiale) - Leucopnie, cancer (Immunodpression) 2- la pathologie lorigine de lhospitalisation : - Polytraumatisme (Accident de la circulation, chute dune hauteur) - Brlures tendues 3- Ltat nutritionnel non satisfaisant : la dnutrition est un facteur favorisant important des infections nosocomiales car elle provoque une atrophie de toutes les muqueuses. A loppos, lobsit peut reprsenter un facteur de risque en favorisant les abcs paritaux post-opratoires. 4- Lge : Avant 1 an et aprs 65 ans, le risque infectieux est major. B- Les facteurs lis aux techniques diagnostiques et thrapeutiques : La nature et la qualit des soins influent sur le taux dinfections nosocomiales : - Certains traitements agressifs tels les perfusions, cathtrismes, sondes demeure , constituent des portes dentre faciles pour lagent infectieux. - Lencombrement du service , le dfaut disolement des malades infects et des antibiotiques administrs abusivement comme couverture augmentent le risque infectieux en favorisant la slection de bactries multirsistantes , au sein de la flore hospitalire . 1. Le traitement chirurgical : Le type de chirurgie est un important facteur de risque. Le taux dinfection paritale est diffrent selon quil sagisse dune chirurgie propre , propre-contamine , contamine ou sale.

7 Tableau 3 : Taux dinfection paritale en fonction du type de chirurgie description Type de chirurgie Chirurgie propre Pas douverture de viscre creux Pas dinflammation note Pas de faute dasepsie Ouverture dun viscre creux Sans contamination significative