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Introduction générale - univ-orleans.fr · ii ― Introduction générale ... notamment de 5 Sur la vanité des universitaires et le sentiment qu’ils ont de leur prestige à une

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Introduction générale :

À la fin de l’année 1445, un jeune homme du nom de Fernand de Cordoue arrive à

Paris, après un périple qui l’a fait s’arrêter un temps en Italie du Sud. Le moins que l’on

puisse dire est que son bref séjour dans la capitale ne passe pas inaperçu, comme en

témoignent les relations hautes en couleurs que font de l’épisode le Bourgeois de Paris

(qui est en réalité un clerc de l’université appartenant au chapitre de Notre-Dame) et

l’historiographe du règne de Charles VII, Matthieu d’Escouchy1. Ce « natif des

Espaingnes », « âgé de vingt ans ou environ », a de quoi marquer ses contemporains, et

notamment les clercs de l’université, imbus de la réputation de leur institution. Aux dires

de l’un comme de l’autre, le catalogue de ses qualités est en effet impressionnant. Non

seulement il doit à des origines nobiliaires d’être un chevalier valeureux et un maître

d’armes accompli, capable, grâce à des qualités physiques hors du commun, de faire des

sauts de plusieurs mètres pour assaillir son ennemi et de brandir une épée à deux mains

comme s’il s’agissait d’un fétu de paille ; mais il apparaît encore plus habile, par l’étendue

de son savoir, à déjouer la malice empreinte de jalousie des clercs parisiens. La gamme de

ses aptitudes intellectuelles est, pour son temps, la plus complète qui soit. Cela en fait,

selon les propres mots de Matthieu d’Escouchy, « le plus excellent en touttes sciences qui

se trouvast en tous les pays et où il repairoit, par especial en clergié ».

Voué dès son jeune âge à la cléricature, Fernand connaît en effet comme il se doit

les sept arts libéraux, véritables piliers de la pédagogie médiévale, avec un don particulier

pour la musique, nécessaire à la liturgie. En matière de grades universitaires, il ne s’est pas

contenté de la maîtrise ès-arts, puisqu’il arbore par ailleurs les titres de « maître en

médecine, docteur en lois, docteur en décret et docteur en théologie » ; le tout, selon les

chroniqueurs, à vingt ans, en réalité à vingt-quatre2, ce qui ne change pas

fondamentalement la donne, le cursus en théologie, le plus long, se terminant

habituellement vers trente-cinq ans. Si l’on suit le Bourgeois de Paris, le jeune castillan

1 Journal d’un bourgeois de Paris de 1405 à 1449, éd. C. Beaune, Paris, 1990, p. 429-432 ;

Chronique de Mathieu d’Escouchy, éd. G. Du Fresne de Beaucourt, Paris, 1863-1864, t. I, ch. VIII, p. 69-72.

Voir par ailleurs J. Havet, « Maître Fernand de Cordoue et l’Université de Paris au XVe siècle », Mémoires

de la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de-France, t. IX (1882), p. 193-222 ; T. et J. Carreras y Artau,

Historia de la filosofia española. Filosofia cristiana de los siglos XIII al XV, Madrid, 1943, t. II, p. 283-284

et 642-649 ; O. Di Camillo, El humanismo castellano del siglo XV, Valence, 1976, p. 231-247 ; E.

Wickersheimer, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen Âge, Genève, 1979 (2e éd.), t.

I, p. 148-149, et Supplément par D. Jacquart, Genève, 1979, p. 73. 2 L’épitaphe de Fernand a été retrouvé à Rome et porte sa date de naissance, 1421.

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possède en prime le don des langues, puisqu’outre le latin, il est « très subtil en grec,

hébreu, chaldéen, arabe et tous autres langues ». Enfin, en plus d’appréciables qualités de

peintre et d’enlumineur qu’il a pu acquérir dans un studium monastique ou dans un atelier

urbain, le surdoué est gratifié d’une mémoire et d’une faculté de mémorisation à faire pâlir

le plus performant des clercs : il a de ce fait appris toutes les matières du cursus scolaire

« par cœur » et connaît sur le bout des doigts « les quatre docteurs de la Sainte Église »3.

Cette faculté à retenir sans trop de difficulté le contenu du moindre des livres qui lui

tombe sous la main est corroborée par un bourgeois allemand de Neubourg-sur-le-Danube,

dans une lettre adressée au chancelier de Brabant Goswin van der Ryt : Fernand aurait

avoué avoir appris dans sa jeunesse en sept jours le Doctrinal d’Alexandre, une grammaire

latine comptant pas moins de 2645 hexamètres, composée par le chanoine d’Avranches

Alexandre de Villedieu (vers 1170-vers 1250). Assurément, la performance est belle !

Si le Bourgeois de Paris et Matthieu d’Escouchy font preuve d’une tendance à

l’exagération, l’extraordinaire savoir de Fernand est bien réel. Une telle somme de talents

à un âge si tendre4 nécessitait pour le moins un examen attentif et sans concessions de la

part des membres de l’université, soucieux de préserver leurs prérogatives dans le monde

des études. Ce fut chose faite en deux temps, et l’affaire ne fut pas loin de mal tourner

pour le jeune érudit. Celui-ci passe tout d’abord devant une commission d’élite de

cinquante clercs qui se tient au collège de Navarre. On lui pose alors, comme il convient à

Paris, des questions de théologie auxquelles Fernand répond si bien qu’il est mis aux arrêts

au terme de la dispute. Son savoir est en effet trop étendu et trop parfait pour pouvoir être

naturel, et c’est probablement, pense-t-on, en raison de quelque commerce avec le diable

que le jeune présomptueux parvient à mystifier les plus savants hommes de son temps.

L’affaire ne pouvant en rester là, il comparaît alors devant une assemblée extraordinaire

de « 3000 autres clercs » à Saint-Bernard et s’en sort une nouvelle fois avec brio. Certains

théologiens parisiens s’empressent dans le même temps d’établir, à grand renfort

d’auctoritates, le parallèle avec l’Antéchrist afin de lui ménager une fin des plus funestes.

Mais fort de son succès, Fernand est relâché. Il fait une nouvelle démonstration de son

savoir et de son talent devant le Parlement qui est un plein succès. Fernand a toutefois

3 Journal, op. cit., p. 430-431. L’identité de ses quatre docteurs reste incertaine. Il pourrait s’agir

des quatre plus grands docteurs de l’Église, Augustin, Thomas d’Aquin, saint Bernard et Pierre Lombard. 4 La précocité intellectuelle n’est guère reconnue à une époque où les autorités en matière de

savoir, de sciences, de lettres sont toujours représentées par des hommes ayant atteint l’âge mûr, voire l’état

de vieillesse. Seul le Christ et certains saints incarnent la sagesse dès l’enfance. Cf. M. Pastoureau, « Enfants

prodiges, enfants du diable », dans Le printemps des génies. Les enfants prodiges, éd. M. Sacquin, Paris,

1993, p. 27-33.

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senti passer le vent du boulet et, sagement, préfère quitter Paris pour joindre la Flandre et

la cour du duc de Bourgogne. En 1446, il est de nouveau inquiété à Cologne, avant de

rallier l’Italie, où il enseigne la médecine en 1447 à Bologne.

Au-delà de l’anecdote, l’aventure parisienne de Fernand de Cordoue illustre à

merveille l’enjeu de pouvoir que représente l’accession au savoir pour l’élite cléricale de

la société et montre à quel point trop sortir de la norme engendre chez ses tenants une

envie qui se meut vite en suspicion et en rejet. Fernand était parvenu à maîtriser en

quelques années ce que d’autres ne pouvaient apprendre en une vie (en cent ans disent les

textes) et il avait court-circuité par la force des choses un cursus dont les règles et les

programmes étaient pourtant fixés par les statuts universitaires. Il provoqua ainsi une très

grande frayeur car il en savait « plus que ne peut savoir nature humaine ». L’étrangeté du

personnage est d’autant plus grande que l’on ne sait pas exactement en quel lieu il a mené

à bien ses brillantes études. Humiliés à domicile par un blanc-bec, les clercs parisiens,

dont la fama ne saurait être mise à mal, penchent vite pour l’interprétation surnaturelle, en

l’occurrence diabolique5. La haute idée qu’ils se font des écoles de la capitale du royaume

très chrétien, même à une époque où le rayonnement de celles-ci commence à s’amoindrir,

et le puissant ressentiment qu’engendre la savante démonstration de Fernand les poussent

sans difficulté dans cette voie6 ; leur formation de théologiens aussi, à une époque où les

procès en sorcellerie commencent à battre leur plein aux marges du royaume et où les

traités de démonologie, teintés d’inquiétudes eschatologiques, fleurissent. Le Bourgeois de

Paris ne cautionne pas pleinement l’interprétation théologique et plus spécifiquement

antéchristique qui est élaborée par certains des docteurs de l’université ; mais le cas de

Fernand, aux limites du naturel et du surnaturel, lui pose un difficile problème d’analyse et

laisse en définitive libre court à toutes les supputations.

De manière générale, et preuve de l’importance qu’il accorde au sujet, le

Bourgeois est très enclin à faire état de la science de ses contemporains, notamment de

5 Sur la vanité des universitaires et le sentiment qu’ils ont de leur prestige à une époque où

l’horizon de l’université parisienne se rétrécit fortement, cf. M. Mollat, Genèse médiévale de la France

moderne, Paris, 1970, p. 92-93. Cette analyse doit toutefois être tempérée par le sentiment que les

universitaires ont alors de la crise de leur institution. Leur raidissement est sans doute lié au fait qu’ils

sentent leur position sociale remise en cause : cf. J. Verger, « Les universités françaises au XVe siècle : crise

et tentatives de réforme », dans Ead., Les universités françaises au Moyen Âge, Leyde-New York-Cologne

(Brill), 1995, IX, p. 228-255, en part. p. 232-233. 6 S. Lusignan, « Verité garde le roy ». La construction d’une identité universitaire en France

(XIIIe-XVe siècle), Paris, 1999, p. 261-277, not. p. 262, où sont rapportés, entre autres, les propos du

chancelier Jean Gerson tirés de son célèbre sermon Vivat rex (1405) : « L’université de Paris premiere et

principale des estudes inspiree au premier homme de l’encommencement du monde en paradiz terrestre,

descendue par succession aux Hebreux par Abraham en Egipte, comme dit Josephus, puys de Egipte a

Athenes, puis de Athenes a Romme, puis de Romme a Paris. »

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ceux qui ne sont que de passage dans la cité et qu’il ne côtoie donc pas directement. Ainsi,

peu avant que n’apparaisse Fernand de Cordoue sur la scène parisienne, il relate la venue

du prédicateur Jean Creté en des termes qui font écho au portrait qu’il brosse du Castillan ;

mais, malgré son jeune âge, le talentueux Franciscain doit à son origine moins exotique et

à sa qualité d’homme de foi reconnu de ne pas faire l’objet de suspicions et de critiques. À

l’évidence, la possession d’un savoir encyclopédique est d’autant plus suspecte qu’elle est

utilisée à mauvais escient, à des fins jugées futiles ― le savant n’est pas un homme de

foire ― ou pleines d’orgueil, ce qui n’est pas le cas de ce prédicateur, docteur en théologie

apprécié de ses pairs :

« Item, en celui temps [vers août-septembre 1445], vint un jeune cordelier à Paris

de la nation de Troyes en Champagne, ou d’environ, petit homme, très doux regard, et était

nommé Jean Creté, âge de 21 ans ou environ, lequel fut tenu à un des meilleurs prêcheurs

qui oncques eut été à Paris depuis cent ans ; et vraiment on ne vit oncques homme lire

plutôt qu’il disait son sermon, et semblait proprement qu’il sut tout le Vieil Testament et le

Nouvel, et toute la Légende Dorée et tous les anciens livres de toutes nations du monde, et

oncques on ne le vit faillir de revenir à son propos, et partout où il prêchait, le moutier était

tout plein de monde. »7

Matthieu d’Escouchy, lui, n’est pas un clerc. Par conséquent, il n’est pas tenté de

faire la comparaison, même de manière implicite, entre son parcours et celui du jeune

ibère et il ne nourrit pas le ressentiment de celui qui, au fond, a vécu une injustice. Mais il

rend compte, en des termes équivalents à ceux employés par le Bourgeois de Paris, des

inquiétudes, voire de la colère des clercs parisiens, tout en ajoutant un détail qui n’est

peut-être pas innocent : en plus d’établir la comparaison avec l’Antéchrist, les « plus

saiges » des membres de l’université se seraient demandés si le Castillan n’avait pas

acquis sa science « par art magicque »8. On ne sait à quel type de magie il est ici fait

allusion, et peut-être n’est-ce qu’un simple jeu sur l’origine espagnole de Fernand, la

péninsule ibérique (mais en réalité plus Tolède que Cordoue) étant perçue comme la patrie

des arts magiques depuis les traductions arabo-latines amorcées au XIIe siècle. Par

ailleurs, bien des arts magiques qui circulent en Occident au milieu du XVe siècle ont

7 Journal, op. cit., p. 427-428 ; H. Martin, Le métier de prédicateur en France septentrionale à la

fin du Moyen Âge (1350-1520), Paris, 1988, p. 63-64. 8 Chronique, op. cit. : « En oultre, apprez qu’il fut party de Paris, comme dit est dessus, aucuns des

plus saiges et renommez clercs de l’université, en bon nombre, se assamblèrent ensamble pour parler et

avoir advis l’un aveuc l’autre de sa science, et enfin la matiere bien debattue, ne leur sambloit point estre

possible, que, en l’espace de cent ans, ung homme peult aprendre et retenir ce qu’il savoit. Et à ceste cause y

avoit des plus saiges, qui faisoient grant doubte, qu’il n’eust acquis sa science par art magicque, et que ce ne

fust Ante-Crist, ou de ses disciples […]. »

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pour enjeu le savoir universitaire dans sa totalité ou dans certaines de ses parties. Mais dès

lors qu’il est question de maîtriser un savoir à la perfection, l’ars notoria, dont nous nous

proposons ici de faire l’étude, apparaît bien placée. De quoi s’agit-il ?

L’art notoire est une tradition de textes de magie rituelle qui fait l’objet d’un

développement spectaculaire à partir des premières décennies du XIIIe siècle, au moment

même où se structurent les premières universités médiévales, à Bologne, à Paris, à Oxford.

Cette diffusion se pérennise aux XIVe et XVe siècles et se poursuit, dans une moindre

mesure, à l’époque moderne. Elle participe d’un phénomène de plus grande envergure qui

consiste en l’introduction et en la propagation au sein de l’élite lettrée occidentale d’un

savoir magique d’une ampleur et d’une variété sans précédent, liées pour l’essentiel aux

traductions arabo- et hébraïco-latines des XIIe et XIIIe siècles9. La « magie rituelle »,

basée sur des rites et des cérémonies qui permettent d’invoquer ou de conjurer des entités

spirituelles bonnes ou mauvaises, présente certaines caractéristiques dont Claire Fanger a

récemment rappelé la teneur10

et qui la différencie, si l’on reste à un niveau très

schématique, de la magie des talismans où les influences astrologiques jouent un rôle

prépondérant11

: elle propose de longues et complexes opérations (le terme souvent utilisé

est experimenta) qui tranchent avec les courtes recettes de la magie du haut Moyen Âge et

promettent à leur utilisateur une grande variété de bénéfices ; elle émane d’un

environnement lettré ― on se situe donc, avec des nuances, à un niveau de culture élevé

― qui la distingue de la sorcellerie d’extraction plus populaire ; elle utilise, voire exploite

à sa convenance et à des degrés divers en fonction de son origine tout un fonds culturel et

religieux judéo-chrétien, parfois augmenté, selon la provenance des archétypes,

d’éléments arabes. Elle se divise schématiquement en deux branches : d’un côté, la magie

démoniaque, encore appelée « nigromancie » (les anglo-saxons continuent d’utiliser le

terme plus réducteur de necromancy, tiré du latin necromantia, à savoir la divination par

l’esprit des morts), basée sur la conjuration des esprits mauvais ; de l’autre, la magie

angélique, qui, eu égard à la nature des entités invoquées, se situe à la lisière du licite et de

9 Voir en dernier lieu J.-P. Boudet, Astrologie, divination et magie dans l’Occident médiéval. Essai

de synthèse, Mémoire d’habilitation, Paris I-Sorbonne, 2003, 3 vol., à paraître aux Publications de la

Sorbonne. 10

C. Fanger, « Medieval Ritual Magic : What it is and why we need to know more about it », dans

C. Fanger (éd.), Conjuring Spirits. Texts and Traditions of Medieval Ritual Magic, Stroud : Sutton

Publishing, 1998, p. vii-xviii. 11

Sur cette dernière, voire l’impressionnant travail de Nicolas Weill-Parot, Les « images

astrologiques » au Moyen Âge et à la Renaissance. Spéculations intellectuelles et pratiques magiques (XIIe-

XVe siècle), Paris, 2002.

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l’illicite. On pourrait ajouter qu’elle a suscité, quelles que soient ses formes, malignes ou

bénignes, la plus vive opposition des autorités ecclésiastiques. Il faut donc garder à l’esprit

que c’est ce rejet qui fonde aujourd’hui l’emploi moderne du terme « magie » pour

désigner la totalité de ses parties quand la réalité est, cela va sans dire, beaucoup plus

problématique.

Comparée aux autres textes de nature approchante, l’ars notoria se distingue

fondamentalement sur deux points : d’une part, sa finalité est vouée quasi exclusivement à

l’acquisition du savoir sous sa forme scolaire, des arts libéraux à la théologie ; d’autre

part, elle met en scène des modus operandi qui laissent une place privilégiée aux anges et

qui, bien que ritualisés, ne se définissent pas comme contraignants pour les entités

invoquées. Divers traits du savoir de Fernand de Cordoue peuvent se rapporter à elle : tout

d’abord, la maîtrise absolue de l’ensemble du savoir théorique médiéval dont il fait

preuve ; ensuite, la possibilité de mémoriser rapidement, sans effort, l’ensemble des

connaissances connues, qui est l’un des chevaux de bataille de l’ars notoria (parfois

nommée ars memorativa à partir du XIVe siècle) ; enfin, la connaissance des langues

anciennes dont fait état le Bourgeois de Paris lorsqu’il dresse le catalogue des aptitudes de

Fernand, sans doute en partie fondée par la provenance hispanique de ce dernier

(notamment en ce qui concerne l’hébreu et l’arabe), rappelle les langues prétendument en

usage dans cette technique d’invocation des anges messagers du savoir divin, à la fois

pour constituer les noms angéliques, mais aussi les mots étranges (verba ignota ou

mystica) qui constituent une part essentielle de l’art notoire et expliquent, aux yeux de ses

défenseurs, son extraordinaire pouvoir.

Si l’on ne peut conclure que Fernand de Cordoue est dépeint en sous main par nos

deux historiographes (et en particulier par un clerc comme l’auteur du Journal parisien)

comme un adepte qui aurait bénéficié des vertus miraculeuses de l’ars notoria, l’épisode

en question atteste que le désir d’un apprentissage rapide et efficace fait partie de l’horizon

d’attente des clercs médiévaux, tout en suscitant la plus vive méfiance de ceux qui ont eu à

subir de longues années d’étude pour atteindre un rang enviable dans la société et, parfois,

pour aboutir à un résultat qui n’était pas toujours au niveau de leurs espérances de départ.

Dans ces circonstances, au moment même où tout un savoir nouveau inonde l’Occident et

où le nombre des étudiants augmente, il ne faut guère s’étonner que des stratégies allant

dans cette voie se soient développées et que des textes de « magie », dont l’un des plus

beaux fleurons est l’ars notoria, aient joui d’un succès dont l’importance nécessite d’être

réévaluée.

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Or, il y avait en la matière, au moment où nous avons entrepris ce travail sous

l’impulsion de Colette Beaune et de Jean-Patrice Boudet, une véritable urgence. Le bilan

historiographique était alors des plus maigres sur cette tradition de textes et cette pratique,

et, plus largement, sur l’ensemble la magie rituelle médiévale. Et pour cause, c’est

essentiellement au cours de ces toutes dernières années, au moment même où cette thèse

s’élaborait patiemment, que des jalons ont été posés et sont venus nourrir notre réflexion.

Le premier qui a porté une certaine attention à l’ars notoria est Lynn Thorndike,

dont la monumentale History of Magic and Experimental Science, bien qu’ancienne, reste

le point de départ inévitable de toute étude sur la magie médiévale, ne serait-ce que pour

trouver un premier recensement des manuscrits conservés12

. Dans un chapitre consacré à

l’image de Salomon magicien à l’époque médiévale, il passe en revue tous les textes de

magie rituelle qui lui sont attribués à partir du XIIIe siècle et insiste tout particulièrement

sur l’ars notoria que le roi hébreu patronne en compagnie d’Apollonius. Thorndike, sans

se livrer à une étude en règle de la tradition manuscrite, fait le lien entre l’art notoire et des

prières composées entre 1304 et 1307 par un moine bénédictin dénommé Jean (à savoir,

nous y reviendrons, Jean de Morigny), de même qu’il établit la relation génétique entre

l’ars notoria et une autre tradition de textes, l’ars Paulina, attribuée comme son nom

l’indique à saint Paul. L’idée d’une pluralité de versions est ainsi posée, sans que l’on

puisse pour autant en mesurer la portée faute de recensement exhaustif des sources.

L’historien américain insiste par ailleurs sur la similitude entre le type de magie incarnée

par l’art notoire et la théurgie néoplatonicienne tardo-antique décriée par saint Augustin

dans un passage célèbre de la Cité de Dieu, mais il n’entre pas, là encore, dans une analyse

de détail. Aussi, par delà l’ouvrage d’Elisabeth Butler consacré à la magie rituelle publié

en 1949 et fondé sur des sources de l’époque moderne13

, faut-il attendre 1987 et un article

pionnier de Jean Dupèbe pour que ce terrain quasi vierge de la recherche historique

commence à être défriché14

. L’auteur, sans s’attacher à retracer avec précision l’histoire du

texte et à en répertorier les manuscrits, développe un point de vue qui s’inscrit dans la

lignée de Thorndike. Le lien entre théurgie néoplatonicienne et ars notoria est en

particulier mis en exergue. Il est par ailleurs affirmé que l’art notoire appartient « au

groupe des magies judéo-grecques liées à la Sapientia Salomonis » et qu’à ce titre il

apparaît en Occident dès le XIIe siècle « avec la traduction des œuvres scientifiques et

12

L. Thorndike, History of Magic and Experimental Science, New York, 1928, t. II, p. 279-283. 13

E.M. Butler, Ritual Magic, Cambridge, 1949, rééd. Stroud, Sutton Publishing, 1998. 14

J. Dupèbe, « L’ars notoria et la polémique sur la divination et la magie », dans Divination et

controverse religieuse en France au XVIe siècle (Cahiers V.L. Saulnier, 4), 1989, p. 123-134.

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magiques juives et arabes ». Autrement dit, même si Jean Dupèbe ne l’écrit pas en toutes

lettres, ce texte serait en toute hypothèse le fruit d’une traduction ― sans que l’on sache

au juste de quelle langue ― au même titre que des opuscules comme l’ars Almandel,

traduit de l’arabe, ou le Sepher Raziel, issu d’un original hébreu. La présence de mots sans

signification pour les latins et aux assonances « orientales » est du reste susceptible

d’accréditer cette thèse. Regardant de près les manuscrits répertoriés par son prédécesseur,

Dupèbe précise la relation entre l’art notoire et l’ars Paulina (qui en est une version

« christianisée » tardive), puis procède à une première analyse du contenu avec pour

arrière-fond les pratiques ritualisées des théurges des premiers siècles de l’ère chrétienne.

Se situant entre magie et mystique, l’ars notoria serait pour l’essentiel l’apanage de

moines opposés à une science universitaire jugée trop rationnelle.

Par la suite, alors que les études scientifiques sur les textes de magie rituelle

médiévale trouvent leur véritable point de départ avec la publication en 1997 par Richard

Kieckhefer d’un manuel de magie démoniaque conservé dans un manuscrit du XVe

siècle15

, deux articles sont consacrés à l’ars notoria dans le volume Conjuring Spirits édité

par Claire Fanger l’année suivante. Le premier est l’œuvre de l’historien de l’art Michael

Camille, qui entreprend une étude des « figures » et des « notes » qui accompagnent les

traités et que tout bon praticien doit observer pour obtenir la révélation qu’il espère16

.

L’auteur, et c’est un point important au vu de l’état général des sources médiévales de

magie rituelle, met en avant la grande qualité des manuscrits qu’il a examinés et détaille

les rapports que ces signes figuratifs étranges que des catalogues qualifient à tort de

cabalistques entretiennent avec les diagrammes didactiques et mnémotechniques utilisés

depuis le haut Moyen Âge dans la pédagogie médiévale. Le second, que l’on doit à Claire

Fanger, se propose de mettre à jour la dette contractée par le moine bénédictin Jean de

Morigny ― le « moine Jean » évoqué par Thorndike ― vis-à-vis de l’art notoire pour

composer au début du XIVe siècle son Livre des visions de la vierge Marie, condamné en

1323 par la Faculté de Théologie de l’université de Paris17

. Cette démarche comparative

passe bien entendu par une mise au point préalable sur l’ars notoria elle-même. Ne

connaissant pas le travail antérieur de Jean Dupèbe, Fanger décrit, en se fondant sur des

manuscrits représentatifs, l’architecture-type d’un traité, tout en pointant du doigt l’épais

15

R. Kieckhefer, Forbidden Rites. A Necromancer’s Manual of the Fifteenth Century, Sutton

Publishing : Stroud-Gloucestershire, 1997. 16

M. Camille, « Visual Art in Two Manuscripts of the Ars Notoria », dans C. Fanger (éd.),

Conjuring Spirits, op. cit., p. 110-139.

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mystère qui entoure son origine. Elle répertorie par ailleurs quelques manuscrits

supplémentaires qui enrichissent le premier inventaire de Thorndike, ce qui encourage à

mener plus loin les investigations.

Enfin, à ce mince chapitre bibliographique, on peut ajouter l’article de Jean-Patrice

Boudet paru en 2000, qui fait la synthèse des pistes explorées jusque-là tout en

répertoriant un nombre de manuscrits plus importants et en posant de manière plus aiguë

le délicat problème de l’origine18

. Faut-il voir en l’art notoire une résurgence de la

théurgie antique, exogène et/ou endogène, via Byzance, comme on le laisse entendre

depuis Thorndike ? Ou peut-on identifier une influence de la kabbale juive, voire de la

magie arabe, et inscrire l’apparition du texte en Occident dans le mouvement des

traductions espagnoles ? Les différentes pistes restent, de l’aveu même de l’auteur, bien

difficiles à suivre ― ce que nous avons eu nous-mêmes, de manière conjointe, tout le

loisir de vérifier ― mais en évoquant la première mention du texte par Gervais de Tilbury

vers 1210, son attribution problématique à Virgile et le lien établi par Charles Burnett avec

l’ars notaria sténographique, l’hypothèse d’un ancrage occidental apparaît désormais

possible, même si elle reste très largement à étayer.

L’ars notoria pose ainsi au médiéviste qui ambitionne d’y voir plus clair toute une

série de problèmes qui valent la peine d’être résolus ou pour le moins éclaircis, non

seulement pour connaître son histoire spécifique, mais aussi pour mieux apprécier dans

son ensemble ce pan de l’histoire culturelle médiévale qu’est la magie savante, en

particulier son versant spirituel incarné par la magie rituelle ; un champ de

l’historiographie qui, après avoir été laissé pour compte en ce qui concerne l’histoire des

textes, connaît des développements spectaculaires depuis la fin des années 1980,

notamment parce qu’il se situe à la croisée de domaines d’études souvent cloisonnés,

religieux, culturel et scientifique19

. Et il n’est pas jusqu’à l’histoire politique qui ne prenne

désormais en compte les avancées en la matière20

. Par ailleurs, cette monographie sur

l’une des pratiques de magie rituelle les mieux documentées pour la période médiévale

n’arrive pas seule, mais en conjonction avec les travaux de Nicolas Weill-Parot, de Claire

17

C. Fanger, « Plundering the Egyptian Treasure : John the Monk’s Book of Visions and Its

Relation to the Ars Notoria of Solomon », dans Ead., Conjuring Spirits, op. cit., p. 216-249. 18

J.-P. Boudet, « L’ars notoria au Moyen Âge : une résurgence de la théurgie antique ? », dans La

magie. Actes du colloque international de Montpellier (25-27 mars 1999), t. III : Du monde latin au monde

contemporain, Montpellier, 2000, p. 173-191. 19

R. Kieckhefer, Magic in the Middle Ages, Cambridge, 1989, ch. I.

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Fanger, de Frank Klaassen, de Gösta Hedegård21

et surtout, pour le domaine qui nous

occupe, de Jean-Patrice Boudet, dont les éditions de textes, les multiples découvertes dans

les fonds manuscrits et le récent mémoire d’habilitation ont sans cesse apporté des

contrepoints utiles pour mieux cerner les spécificités de l’art notoire.

Pour rendre compte des interrogations que pose un texte aussi étrange aux

médiévistes, nous avons choisi, une fois n’est pas coutume, de procéder en deux temps.

Une première partie est consacrée à tout ce qui touche de près ou de loin la tradition

manuscrite et vise à clarifier un certain nombre de points jusque-là demeurés opaques. En

premier lieu, l’importance à accorder à l’ars notoria au sein de la littérature latine et plus

particulièrement parmi les diverses traditions de textes de magie qui se multiplient en

Occident à partir du XIIe siècle. Pour mieux apprécier l’intérêt que ce type de production

« littéraire » et de pratique a suscité au sein de l’élite culturelle de la société médiévale, un

minutieux travail d’inventaire des sources a été en premier lieu nécessaire, dont les

résultats, sur le plan quantitatif, ne peuvent s’apprécier que si l’on établit des

comparaisons avec des textes de nature comparable (ou perçue comme telle par les

censeurs) (ch. 1). Même si l’exercice est aride et ne se prête guère à des envolées lyriques,

c’est alors seulement que l’on peut entreprendre un autre exercice minutieux, l’analyse des

manuscrits et l’identification des leçons et des variantes, dans le but d’écrire, malgré la

permanence d’inévitables zones d’ombre, l’histoire de l’ensemble de la tradition

manuscrite (celle-ci reste-t-elle monolithique ou s’est-elle diversifiée au fil du temps ?) et

apprécier quelles sont les modalités de l’écriture magique pour un texte attribué, comme

beaucoup d’autres à l’époque, à une haute figure de l’Ancien Testament (ch. 2 à 7).

L’examen des manuscrits les plus anciens et de sources externes contemporaines des

premiers développements permet aussi, au fil de l’exposé, d’émettre un certain nombre

d’hypothèses sur cette énigme qu’est l’origine de l’ars notoria (ch. 2.2. et 2.4.). La

question n’est sans importance, puisqu’elle pose celle des contacts qui ont pu avoir lieu

entre cultures latine, grecque, hébraïque et arabe aux XIIe et XIIIe siècles ainsi que sur la

plus longue durée. Enfin, tout ce dépouillement codicologique et textuel a servi de base

aux éditions de textes qui font office de troisième acte, dont l’importance est essentielle

aux historiens pour œuvrer à des comparaisons fiables entre textes de magie, quand

20

Voir par exemple dernièrement C. Beaune, Jeanne d’Arc, Paris, 2004, ou encore B. Guenée, La

folie de Charles VI, roi bien-aimé, Paris, 2004. 21

En attendant, pour le domaine byzantin, l’étude d’Aurélie Gribomont en cours d’élaboration à

Louvain.

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jusque-là on se basait bien souvent, non parfois sans quelques désagréments, sur des

éditions tardives du XVIIe siècle ou sur des manuscrits médiévaux qui n’étaient pas

toujours représentatifs22

.

La seconde partie est pour l’essentiel un commentaire des textes édités avec pour

toile de fond la question suivante : de quel type de magie s’agit-il vraiment, et peut-on du

reste, si l’on fait un temps abstraction des conventions de langage entre historiens (que

nous ne pourrons toutefois manquer d’utiliser), parler de magie pour la qualifier ? Pour y

répondre, il faut s’attacher prioritairement à l’analyse des rituels qui sont prescrits pour

jouir de la science infuse dispensée par Dieu et les anges. Mais cette entreprise ne va pas

de soi : l’ars notoria n’est pas un manuel qui décrit de manière limpide les modalités de sa

mise en pratique. Celle-ci est au contraire une épreuve que seuls les plus zélés, les plus

animés par la foi vont pouvoir surmonter, notamment par le biais d’un obscur travail

d’exégèse susceptible de reconstituer un rituel cohérent. Nous nous sommes livrés, pour

chacune des branches de la tradition manuscrite que l’on a pu identifier, à ce jeu descriptif,

sans pour autant prétendre avoir réussi de manière définitive au vu des ellipses, voire des

incohérences textuelles. En tous les cas, les historiens à venir disposerons d’une base de

travail plus sûre quand elle était jusque-là inexistante (ch. 1). Par ailleurs nous avons

essayé de comprendre dans le même temps en quoi cet hermétisme volontaire a influé sur

la destinée et la dynamique manuscrite de l’art notoire, retracées texte après texte dans la

première partie.

Après cet indispensable travail de reconstitution et de description des rituels, il

fallait encore en analyser les principaux constituants pour mieux saisir dans sa complexité

et son ambiguïté la nature de l’ars notoria et établir des comparaisons avec d’autres textes

de magie rituelle contemporains. Nous avons fait tout d’abord la part du mythe dans

l’origine que s’attribue le texte (ch. 2), non seulement parce qu’elle met en avant le

personnage de Salomon, à l’image si ambivalente à la fin du Moyen Âge, mais parce

qu’elle détermine l’efficacité et la nature d’un modus operandi qui, fait sans équivalent à

notre connaissance, veut trouver sa place parmi les sacrements pour preuve de son

orthodoxie. Puis nous avons passé au crible de l’analyse les éléments qui font la vertu de

l’art notoire (primat de l’intériorité, impératifs d’ordre temporel, langage et signes

utilisés), avant d’en détailler, dans une optique comparative, les objectifs liés à la maîtrise

du savoir (ch. 3 et 4). L’avant-dernier chapitre (5) pose la question de la mise en pratique

22

Le travail de Hedegård sur le Liber juratus d’Honorius de Thèbes se heurte par exemple à ce

problème.

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du texte et essaie de faire le point, malgré le défaut des sources, sur ce que l’on sait des

praticiens, quand le dernier (6) expose les griefs qu’ont nourri les autorités ecclésiastiques

à leur égard à partir du XIIIe siècle jusqu’à l’époque moderne. Cette brève plongée finale

dans le monde « renaissant » est aussi l’occasion d’apprécier l’attitude des mages du

temps vis-à-vis de cette pratique magique représentative de l’âge scolastique, de même, à

grands traits, que celle des humanistes, dont l’ironie mordante et le « désenchantement »

font un beau point d’orgue.