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INTRODUCTION

I.

Définition et origine du droit comparé

L’expression « droit comparé » ne signifie rien en soi. Il n’existe pas undroit qui serait « comparé » au sens où, soit un domaine du droit, soitun système national de droit y correspondrait. Comme l’écrivait RenéDavid, « l’expression

droit comparé

est une expression malheureuse,qu’il aurait mieux valu et qu’il vaudrait mieux éviter »

(1)

.

Cette expression -

droit comparé

- est relativement récente. Elleapparut, à Paris, en 1900, année de l’exposition universelle. ÉdouardLambert et Raymond Saleilles prirent le parti de créer le « CongrèsInternational de Droit Comparé ». L’esprit de ce Congrès était en phaseavec le début du XX

e

siècle, et plus particulièrement avec l’inébranlablefoi envers le progrès le caractérisant. Fort de son existence, de sa raisonet de ses succès, l’homme essayait de briser les confinements locaux et dedominer pacifiquement le monde. Les juristes furent évidemment tou-chés par cet esprit. Interpréter et élaborer leur propre système ne suffi-saient dès lors plus. Ainsi naquit la volonté de développer

un droitcommun de l’humanité

. Le « droit comparé » devait être l’instrumentrésolvant les différences accidentelles entre les droits de peuples dont lesdegrés de développement économique et culturel étaient semblables

(2)

. Ilfallait, selon Lambert

(3)

, « réduire le nombre des divergences juridiquesconsécutives à des incidents historiques ou à des circonstances temporai-res ou contingentes ». La foi dans le progrès, si caractéristique du débutdu XX

e

siècle, a disparu ; les deux guerres mondiales ont affaibli, voiredétruit, la croyance en un éventuel droit universel. Le « droit comparé »a toutefois poursuivi de manière constante son développement.

Cela dit, si l’expression « droit comparé » est un peu impropre ouconstitue un abus de langage, elle est toutefois claire. L’expression est

(1) R. D

AVID

,

Traité élémentaire de droit civil comparé

, Paris, L.G.D.J., 1950, p. 3.(2) Actuellement, on ne dira plus forcément d’un pays ou d’une civilisation qu’il est sous-déve-

loppé, parce que c’est scientifiquement incorrect. L’expression « pays en voie de développement » dis-simule une conception idéologique erronée. Dire d’une civilisation qu’elle est sous-développée — ouen voie de développement —, c’est laisser entendre que toute civilisation passe par les mêmes stades dedéveloppement et de progrès, mais néanmoins que toutes les civilisations ne sont pas en même tempsau même stade de développement. De tels propos sous-entendent également que la civilisation occi-dentale constitue le stade le plus avancé de développement. Mais plus aucun anthropologue digne dece nom neferait une telle affirmation aujourd’hui.

(3) E. L

AMBERT

,

Conception Générale et Définition de la Science du Droit Comparé

, Procès-ver-baux des séances et documents, Congrès international de droit comparé I (1905) 26, cité par K. Z

WEI-

GERT

et H. K

ÖTZ

,

Einführung in die Rechtsvergleichung auf dem Gebiete des Privatrechts

, 3

e

éd.,Tübingen, J.C.B. Mohr Siebeck, 1996, p. 1.

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DROIT PRIVÉ COMPARÉ

LARCIER

donc commode ; elle couvre l’accomplissement de deux sortes d’études :d’une part, l’étude des droits étrangers eux-mêmes — sous la réservetoutefois qu’il est impossible de tous les connaître — et, d’autre part,l’étude comparative de certains domaines du droit ou de certaines ques-tions juridiques précises. Si l’on suit l’opinion de René David, lafâcheuse expression

droit comparé

« invoque l’idée d’une disciplineautonome, et dissimule sa dépendance des études de droit étranger »

(4)

.Aussi, le « droit comparé » n’est-il pas un ordre juridique, mais une dis-cipline

(5)

. Néanmoins, « beaucoup de discussions oiseuses auraient étéévitées si, au lieu de droit comparé, on avait parlé (…) soit de comparai-son des droits, soit de méthode comparative »

(6)

.

À la manière des Allemands, il serait sans doute préférable d’utili-ser la formule de

comparaison du droit

— «

Rechtsvergleichung

» —,car c’est à l’accomplissement d’une étude comparative que le « droitcomparé » invite ; cette étude comparative tend à examiner divers droitsen de différentes contrées et/ou en de différentes époques.

II.

Les raisons de pratiquer une telle discipline

Les bonnes raisons de faire du droit comparé sont nombreuses. Mais laplus simple d’entre elles résulte d’un raisonnement par l’absurde : ne pasfaire de droit comparé supposerait donc que l’on se contente de connaî-tre le droit applicable en Belgique, comme si le droit belge tel qu’il existeactuellement, voire la Belgique, étaient éternels et immuables. Or, pourtout juriste — même débutant — il apparaît de manière manifeste que ledroit belge ne s’est pas développé, ni ne se développe, dans un milieuclos, autosuffisant et immuable. Deux processus actuellement en coursdémontrent en effet qu’une telle opinion serait empreinte d’erreursgrossières :

A.

Le processus d’intégration européenne

À l’origine, l’Union européenne avait pensé pouvoir faire l’économied’une unification du droit privé. Mais avec le temps, la nécessité d’undroit privé commun européen — à tout le moins, dans certaines matières— se fait de plus en plus impérieuse.

Il est vrai que les codifications liées à un territoire constituent unphénomène contingent au regard de l’évolution de l’Histoire, puisque lescodifications nationales sont apparues relativement tard

(7)

, si l’on consi-

(4) R. D

AVID

,

Traité élémentaire de droit civil comparé

,

op. cit.

, p. 8.(5) O. P

FERSMANN

, « Le droit comparé comme interprétation et comme théorie du droit »,

R.I.D.C.

, 2001/2, p. 277.(6) R. D

AVID

,

Traité élémentaire de droit civil comparé

,

op. cit.

, p. 3.(7) Période couvrant la fin du XVIII

e

et le début du XIX

e

siècle.

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Introduction

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LARCIER

dère l’évolution des systèmes juridiques. Or, pendant ce temps, les fron-tières politiques des États d’Europe — mais aussi du reste du monde —n’ont cessé de changer. Il est donc permis de dire que globalement, lessystèmes juridiques sont plus stables que les découpages territoriaux.Mais si les frontières à l’intérieur de l’Europe tendent à perdre de leursignification, la disparité entre les différents systèmes juridiques finit parparaître tellement bizarre qu’elle en devient inacceptable. Par consé-quent, plus le processus d’intégration européenne se réalisera profondé-ment, plus l’unification du droit devra être substantielle …

B.

Le processus de mondialisation

La discipline qu’est le droit comparé impose de « sortir de son nid » etd’examiner la conception juridique d’autrui ainsi que la vie du droitsous d’autres latitudes. Une telle démarche intellectuelle est essentielle,parce que le monde est engagé dans un

processus de mondialisation

etque les différents droits étatiques — en particulier dans un pays aussipetit que la Belgique — tendent à voir leur portée et leur importanceréduites. Les barrières subsistantes deviennent de plus en plus perméa-bles à bien des niveaux. Ainsi n’est-il même plus nécessaire de franchirphysiquement les frontières pour tomber sous le coup d’une législationétrangère. L’effort imposé par le droit comparé est un effort important.La matière n’est guère confortable, car elle suppose notamment la maî-trise d’un certain nombre de langues étrangères. Le premier écueil ren-contré dans l’étude des droits étrangers est en effet une connaissanceinsuffisante de la langue du pays dont on voudrait étudier le droit.

Une critique que l’on pourrait être tenté d’adresser à cette visiondes choses pourrait être la suivante : même dans un monde globalisé, lescitoyens de différents pays ont des vécus différents, des cultures différen-tes,

etc.

Partant, il est peu probable que la

Shari’a

devienne la loi appli-cable en Belgique, tout particulièrement en matière de droit du mariage.En effet, sur certains points, l’éloignement culturel est tel que l’on pour-rait penser que rien ne rapprochera jamais suffisamment les différentsordres juridiques nationaux au point que tous soient soumis au mêmedroit.

Mais la mondialisation ne suppose pas nécessairement qu’il y aitune uniformisation de tous les domaines juridiques. Il ne semble pasqu’une uniformisation des régimes matrimoniaux soit de la premièreimportance au regard du processus de mondialisation.

Il faut en revanche souligner — avec René Rodière

(8)

— à quelpoint les droits et les systèmes juridiques sont bien plus les droits d’unÉtat que ceux d’une nation. C’est avant tout l’État qui légifère, et non la

(8) R. R

ODIÈRE

,

Introduction au droit comparé

, Paris, Dalloz, 1979, p. 3.

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DROIT PRIVÉ COMPARÉ

LARCIER

nation. En effet, sans la présence des autorités publiques et leurs inter-ventions législatives et judiciaires, le morcellement et l’isolement des dif-férents systèmes juridiques seraient certainement bien moinsconsidérables.

Si les choses poursuivent une évolution linéaire, les États-Unisd’Amérique pourraient bien mettre tout le monde d’accord dans undélai relativement bref. En effet, actuellement, ce sont clairement lesNord-Américains qui sont les plus représentés sur

la toile

, et cette pré-sence massive, en l’absence de régulation internationale, pourrait endéfinitive se muer en une hégémonie de fait, procédant de la loi du plusfort …

III.

Le droit comparé et les codifications

La nécessité même de parler de droit privé comparé est — au fond etdans une bonne mesure — la conséquence du processus de codificationqu’a connu l’Europe occidentale d’abord, le reste du monde ensuite.Avant ces codifications, le droit privé était largement considéré commeétant un ensemble de règles relativement universel. Les ordres juridiqueseuropéens étaient tous les descendants d’une tradition commune, et lesdisparités entre les différentes réglementations n’empêchaient pasqu’existe une réelle unité intellectuelle entre les juristes européens desdifférents pays

(9)

. C’est une telle unité intellectuelle que l’école de droitprivé européen tente de reconstituer, afin de mener à l’adoption d’unCode de droit privé européen remplaçant les actuels codes natio-naux

(10)

.

Pour bien comprendre la situation actuelle et aborder efficace-ment le droit privé comparé, il est essentiel de s’interroger sur la codifi-cation du droit privé, ainsi que sur son impact sur la science juridique.L’importance du processus de codification, commencé pour l’essentiel àla fin du XVIII

e

siècle, est très généralement admise. Avec plus de deuxsiècles de recul, la constatation que les buts premiers de la codificationnapoléonienne n’ont pas été atteints, s’impose. En effet, ces codificationsn’ont rendu inutiles ni les avocats, ni les juristes ; elles n’ont pas nonplus pu consolider durablement le droit privé

(11)

. En définitive, le seulrésultat tangible imputable aux codifications est certainement la mise àmal de la tradition juridique européenne. Ainsi, depuis que les différents

(9) En ce sens, voy., p. ex., R. D

AVID

,

Traité élémentaire de droit civil comparé

,

op. cit.

, pp. II et s.(10) En ce sens, R. Z

IMMERMANN

,

Roman Law, Contemporary Law, European Law : the civiliantradition today

, Oxford-New York, Oxford University press, 2001, p. XIX.(11) R. Z

IMMERMANN

,

Roman law, contemporary law, European law : the civilian traditiontoday

,

op. cit.

, p. 1.

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Introduction

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LARCIER

États européens ont codifié leur droit, le droit privé s’est

nationalisé

; ilest désormais lié à un territoire géographique restreint.

Il est également vrai que les premiers signes de « nationalisation »(ou mieux : « parcellisation ») du droit étaient déjà perceptibles dès lesXVII

e

et XVIII

e

siècles

(12)

. À cette époque, une certaine évolution chezles auteurs, et en particulier chez les auteurs de manuels, peut être cons-tatée. Le

ius commune

européen (composé de droit romain et de droitcanon) tend à prendre un peu de distance avec l’interprétation stricte dudroit romain. Une place plus importante est dès lors reconnue aux droitsrégionaux, d’origine médiévale

(13)

. Trois éléments témoignent d’un telchangement :

• l’augmentation de l’activité législative des différentes principautéset royaumes ;

• l’installation de juridictions nationales ;• la création, dans les universités, de chaires de droit spécifiques

(14)

.

Il n’était dès lors plus uniquement question de droit romain, maisaussi de droit romano-germanique, de droit romano-hollandais, de droitromano-écossais, de droit romano-saxon ou de droit romano-hispani-que. Mais il apparaît qu’il s’agit là simplement de variations nationalesou régionales sur un thème unique, une tradition juridique commune. Àl’époque, en effet, l’habitude de la

peregrinatio academica

(15)

a étémaintenue

(16)

. En outre, les références à la doctrine savante se font tou-jours indépendamment des frontières étatiques.

L’entrée en vigueur des codifications nationales a cependantentraîné un changement plus fondamental. L’évanescence de la cons-cience européenne d’une unité intellectuelle fondamentale peut êtreimputée à ces codifications. La tendance à un cloisonnement national dela pratique juridique et de l’étude du droit devient la règle

(17)

. En effet,les nouveaux droits nationaux, en accord avec la doctrine de la souverai-

(12) K. L

UIG

, « Institutionenlehrbücher des nationalen Rechts im 17. und 18. Jahrhundert », in

Ius commune

, vol. 3, 1970, pp. 64-97 — traduction anglaise : « The Institutes of National Law in theSeventeenth and Eighteenth Centuries »,

Juridical Review

, vol. XVII, 1972, pp. 193-226 ; R. Z

IMMER-

MANN

,

Roman Law, Contemporary Law, European Law : the civilian tradition today

,

op. cit.

, p. 1.(13) K. L

UIG

cite sur ce point : F. W

IEACKER

,

Privatrechtsgeschichte der Neuzeit

, Göttingen, Van-denhoeck und Ruprecht, 1967, p. 207, et H. C

OING

, « Die europäische Privatrechtsgeschichte der neu-ren Zeit als einheitliches Forschungsgebiet », in

Ius commune

, vol. 1, 1967, p. 19.(14) K. L

UIG, « The Institutes of National Law in the Seventeenth and Eighteenth Centuries », op.cit., p. 198.

(15) Cette pratique de la peregrinatio academica consistait en ce que, d’une part, les professeursdispensaient leurs enseignements successivement dans plusieurs universités d’Europe et, d’autre part,les étudiants accomplissaient leur cursus au sein de plusieurs universités européennes.

(16) R. ZIMMERMANN, Roman Law, Contemporary Law, European Law : the civilian traditiontoday, op. cit., p. 2.

(17) Voy., en ce sens, L.-J. CONSTANTINESCO, Traité de droit comparé, vol. 1, Paris, LGDJ, 1972,p. 22.

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18 DROIT PRIVÉ COMPARÉ

LARCIER

neté absolue — tant interne qu’externe — de l’État, se devaient d’êtreindépendants de l’autorité « internationale » du droit romain et devaient,chacun, prévaloir sur les réglementations des territoires autonomes, desvilles et des classes au sein de l’État (18). Il est possible que la tendance àl’isolation des droits nationaux soit actuellement en perte de terrain.

La conclusion est que les codifications nationales mirent fin à la« seconde vie » du droit romain — période pendant laquelle il a étédirectement applicable. Depuis sa réception au XIe siècle, le droitromain servit de base juridique à l’administration de la justice en Europeoccidentale et centrale ; il constitua également le ius commune, le droitcommun. Pendant ces quelques huit siècles, le droit romain assimila denombreux éléments de droit canon ainsi que des coutumes non romai-nes. Le droit romain de l’Ancien Régime ne correspondait dès lors plus àcelui des Romains de l’Antiquité. Il en était fait un nouvel usage : l’ususantiquus pandectarum fut remplacé par l’usus modernus pandectarum.

Au XVIIIe siècle, certains auteurs ont voulu ébranler l’autoritéreconnue au droit romain, au motif que ce droit était l’œuvre de diri-geants despotiques d’un autre temps et d’une autre civilisation. L’on areproché également au droit romain d’être la source d’innombrablescontroverses doctrinales portant sur des arguties anachroniques, fon-dées sur des subtilités purement théoriques … De plus, le droit romainconstituait souvent une source de droit subsidiaire par rapport aux cou-tumes régionales. Enfin, la multiplicité des sources de droit contribua àdiffuser l’impression de complexité et d’inefficacité de l’administrationde la justice.

La codification avait pour objectif, d’une part, de mettre del’ordre dans l’ordonnancement juridique ainsi que, d’autre part, de met-tre sur pied un système qui couvrirait l’entièreté du droit privé, tout enen excluant les sources juridiques rivales, et tout particulièrement le iuscommune romano-canonique.

Ce processus a malheureusement conduit à ce que droit, pratiquejuridique et étude du droit se bornent au cadre étatique. Envisageant laBelgique, la modique taille de son territoire souligne à souhait le côtéabsurde de la parcellisation du monde juridique.

IV. Plan de l’exposé des systèmes juridiques

Dans quel ordre fallait-il exposer les différents systèmes juridiques quej’ai choisi d’aborder dans le présent ouvrage ? L’ordre retenu est partiel-lement arbitraire, dans la mesure où il repose sur un gallo-centrisme. Je

(18) K. LUIG, « The Institutes of National Law in the Seventeenth and Eighteenth Centuries », op.cit., p. 200.

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Introduction 19

LARCIER

prierai donc le lecteur — en particulier s’il n’est ni belge ni français — debien vouloir excuser ce travers.

J’ai choisi de faire un exposé qui tient compte à la fois de la chro-nologie et des influences doctrinales dominantes dans l’état actuel dessystèmes juridiques … C’est ainsi qu’il m’est apparu évident que je nepouvais exposer le droit italien avant d’avoir parlé des pandectistes etdu système juridique allemand. En l’occurrence, même si la premièrecodification italienne est antérieure à la codification allemande et est lar-gement influencée par le Code Napoléon, un exposé portant sur le droititalien actuel adressé à des personnes qui ne sauraient rien des pandec-tistes me semblerait être une erreur de méthode.

Puisque la science juridique a été inventée par les Romains, il étaitlogique de commencer par eux et leur système juridique. Le Moyen Âgesera envisagé assez sommairement, et principalement du point de vue dela renaissance du droit romain. Ensuite, vient le système juridique fran-çais, et en particulier l’évolution du droit français vers le Code Napo-léon. Si l’on s’en tient à l’Europe continentale, le seul système juridiquequi ait tenu tête à l’influence française et proposé une pensée juridiquefondamentalement différente tout en se fondant sur la même traditionromaine, c’est le système allemand. C’est donc ce dernier qu’il convenaitd’envisager ensuite, d’autant que tous les autres systèmes juridiques del’Europe continentale abordés dans le présent ouvrage ont subi à la foisles influences française et allemande. Après les droits français et alle-mand, il m’est apparu intéressant d’aborder le droit anglais, avant determiner un bref tour d’horizon d’autres systèmes juridiques intéressantssur le continent européen. Après l’Europe, j’ai trouvé intéressant de jeterun coup d’œil du côté du Proche-Orient et de l’Afrique, avant de metourner vers le continent américain, et plus particulièrement vers lespays qui ont adopté un système juridique proche de ceux de l’Europecontinentale. Enfin, pour clore ce petit tour du monde, j’ai choisi de con-sacrer quelques pages aux systèmes juridiques chinois et japonais.

Comme je l’ai annoncé, les omissions sont nombreuses et je nedésespère pas de compléter le présent ouvrage plus tard - qui sait ? -dans de prochaines éditions. Mais enseigner, c’est aussi se limiter. Lecours pour lequel cet ouvrage est destiné est un cours de 30 heures et ilserait impossible de parler de tous les systèmes juridiques sans que l’énu-mération ne devienne fastidieuse et un peu vaine.

Un des objectifs poursuivis par cet ouvrage est de dépayser l’étu-diant en lui montrant des institutions juridiques différentes de cellesqu’il connaît, de telle sorte qu’il soit poussé à réfléchir à son propredroit. À cette fin, une connaissance encyclopédique de tous les différentssystèmes juridiques de la Terre ne me paraît pas nécessaire. J’espère enrevanche que le modeste exposé qui suit atteindra au moins partielle-ment l’objectif que je me suis fixé.

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20 DROIT PRIVÉ COMPARÉ

LARCIER

Enfin, il est sans aucun doute vrai que l’exposé des droits étran-gers comporte un risque particulièrement grand, puisqu’il porte sur desdroits que l’auteur connaît forcément moins bien que les juristes indigè-nes. Il en résultera peut-être de grossières approximations, voire deserreurs, dont j’ose espérer qu’elles ne seront pas impardonnables. Sur cepoint, j’espère que les collègues étrangers qui trouveraient ce genred’erreurs dans mon petit opus me le signaleront, pour que je puisse lescorriger et m’amender. Qu’ils en soient d’avance remerciés !