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Feuillets de Radiologie © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 323 Feuillets de Radiologie 2006, 46, n° 5,323-336 © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex J. Baccialone, F. Minvielle, T. Zioua, C. Teriitehau, Y. Geffroy, M. Lahutte, C. Cartry, N. Elkharras Service d’Imagerie Médicale, Hôpital d’Instruction des Armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart Cedex. Correspondance : J. Baccialone, à l’adresse ci-contre. Email : [email protected] Les tumeurs malignes de l’apex pulmonaire sont origina- les par leur rareté, environ 2 à 5 % des cancers broncho- pulmonaires et par leur localisation particulière. Ces tumeurs se développent en effet dans un site étroit, en périphérie du sommet pulmonaire dans la fossette sus- et rétro-pleurale de Sébileau et entrent en rapport avec la paroi thoracique, le plexus brachial, le rachis, la chaîne sympathique cervico- thoracique et les vaisseaux sub-claviers. C’est en 1838 que Edwin Hare décrit pour la première fois une tumeur de la base du creux sus-claviculaire avec envahisse- ment nerveux responsable de douleurs irradiant vers le bord cubital de la main [1]. Pancoast, en 1924 [2], puis en 1932 [3], décrit le tableau clinique complet de ces tumeurs qu’il pense être d’origine embryonnaire mais c’est Tobias qui en précise définitivement l’origine broncho-pulmonaire en 1932 [4]. En 1950, Chardack et Mac Callum [5] réalisent la première exérèse d’une tumeur de l’apex jusqu’alors jugée inopérable et exclusivement traitée par radiothérapie. En 1961, Shaw [6] présente une première série de 18 patients opérés après radiothérapie préalable. Enfin, en 1983, Paulson [7] précise tous les caractères anatomiques, cliniques et évolutifs de cette lésion maligne du sommet du poumon qui s’accompagne d’un syndrome douloureux particulier du membre supérieur et du syndrome de Claude Bernard-Horner. 3mise au point 3thorax Résumé Summary Le syndrome de Pancoast-Tobias associe classiquement une tumeur de l’apex pulmonaire à une symptomatologie caractéristique décri te en 1932 par Pancoast. Ces tumeurs sont rares mais leur bilan d’extension local pose des problèmes liés à leur situation parti- culière dans un environnement étroit. Par sa haute résolution en contraste et la possibilité de réaliser des coupes multiplanaires, l’IRM s’est révélée être la technique d’imagerie la mieux adap- tée pour l’analyse de l’extension locale de ces tumeurs afin d’en déterminer le critère T de la classification internationale TNM et en particulier d’en évaluer l’extension vers le rachis dont l’envahissement constitue parfois la seule contre-indication à la résécabilité. MRI contribution to the management of superior pulmonary sulcus (Pancoast) tumors. Pancoast tumors (superior sulcus tumor) are apical lung cancers that may cause any or all of the symptoms originally described in 1932 as Pancoast’s syndrome. Magnetic resonance imaging has emerged as the procedure of choice to assess the local extent of these invasive tumors. Because of its capacity for multiplanar imaging and depiction of subtle differences in contrast, MR ima- ging best depicts chest wall and especially spinal involvement for evaluation of the criteria T defined by the international classification and for predicting tumor resectability. Mots-clés : Poumon, Tumeur Key words: Lung, Tumour

IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

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Page 1: IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

Feuillets de Radiologie © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 323

Feuillets de Radiologie 2006, 46, n° 5,323-336© 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

J. Baccialone, F. Minvielle, T. Zioua, C. Teriitehau, Y. Geffroy, M. Lahutte, C. Cartry, N. Elkharras

Service d’Imagerie Médicale, Hôpital d’Instruction des Armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart Cedex.

Correspondance :J. Baccialone,

à l’adresse ci-contre.

Email : [email protected]

Les tumeurs malignes de l’apex pulmonaire sont origina-

les par leur rareté, environ 2 à 5 % des cancers broncho-

pulmonaires et par leur localisation particulière. Ces tumeurs

se développent en effet dans un site étroit, en périphérie du

sommet pulmonaire dans la fossette sus- et rétro-pleurale

de Sébileau et entrent en rapport avec la paroi thoracique,

le plexus brachial, le rachis, la chaîne sympathique cervico-

thoracique et les vaisseaux sub-claviers.

C’est en 1838 que Edwin Hare décrit pour la première fois une

tumeur de la base du creux sus-claviculaire avec envahisse-

ment nerveux responsable de douleurs irradiant vers le bord

cubital de la main [1]. Pancoast, en 1924 [2], puis en 1932

[3], décrit le tableau clinique complet de ces tumeurs qu’il

pense être d’origine embryonnaire mais c’est Tobias qui en

précise définitivement l’origine broncho-pulmonaire en 1932

[4]. En 1950, Chardack et Mac Callum [5] réalisent la première

exérèse d’une tumeur de l’apex jusqu’alors jugée inopérable

et exclusivement traitée par radiothérapie. En 1961, Shaw [6]

présente une première série de 18 patients opérés après

radiothérapie préalable. Enfin, en 1983, Paulson [7] précise

tous les caractères anatomiques, cliniques et évolutifs de cette

lésion maligne du sommet du poumon qui s’accompagne

d’un syndrome douloureux particulier du membre supérieur

et du syndrome de Claude Bernard-Horner.

3333mise au point 3333thorax

Résumé SummaryLe syndrome de Pancoast-Tobias associe classiquement une tumeur

de l’apex pulmonaire à une symptomatologie caractéristique décrite

en 1932 par Pancoast. Ces tumeurs sont rares mais leur bilan

d’extension local pose des problèmes liés à leur situation parti-

culière dans un environnement étroit. Par sa haute résolution en

contraste et la possibilité de réaliser des coupes multiplanaires,

l’IRM s’est révélée être la technique d’imagerie la mieux adap-

tée pour l’analyse de l’extension locale de ces tumeurs afin d’en

déterminer le critère T de la classification internationale TNM

et en particulier d’en évaluer l’extension vers le rachis dont

l’envahissement constitue parfois la seule contre-indication à la

résécabilité.

MRI contribution to the management of superior pulmonary sulcus (Pancoast) tumors.

Pancoast tumors (superior sulcus tumor) are apical lung cancers

that may cause any or all of the symptoms originally described

in 1932 as Pancoast’s syndrome. Magnetic resonance imaging has

emerged as the procedure of choice to assess the local extent of

these invasive tumors. Because of its capacity for multiplanar

imaging and depiction of subtle differences in contrast, MR ima-

ging best depicts chest wall and especially spinal involvement

for evaluation of the criteria T defined by the international

classification and for predicting tumor resectability.

Mots-clés : Poumon, Tumeur Key words: Lung, Tumour

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IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

324

Cliniquement, ces tumeurs sont parfois asymptomatiques et

de découverte fortuite mais entrent le plus souvent dans le

cadre d’un syndrome de Pancoast-Tobias associant classique-

ment une douleur du bras du même côté, un syndrome de

Claude Bernard-Horner et une atrophie des muscles de la main.

Cette symptomatologie traduit une atteinte du plexus brachial

et de la chaîne sympathique cervicale, elle est rarement obser-

vée de façon complète puisqu’elle correspond à un stade très

avancé avec envahissement local majeur [8-11].

Sur le plan radiologique, les signes sont très caractéristiques

mais passent souvent inaperçus au début. Il s’agit le plus sou-

vent d’une opacité du sommet pouvant être arrondie ou plus

limitée en « croissant » ou en « cimier de casque » parfois

difficile à distinguer de stigmates bacillaires ou dystrophiques

éventuellement associés. La présence d’érosions ou d’une

lyse des arcs postérieurs des deux ou trois premières côtes,

voire une atteinte vertébrale (lyse d’une apophyse trans-

verse, d’un pédicule…) permettent d’emblée d’affirmer le

caractère malin de l’affection [12].

Le diagnostic de certitude des tumeurs de l’apex est histolo-

gique. L’endoscopie ne permet jamais, en pratique, d’attein-

dre la lésion mais le cyto-diagnostic et le brossage peuvent

ramener des éléments positifs dans 12 à 30 % des cas selon

les séries [13]. La certitude histologique est le plus souvent

acquise par ponction, soit trans-bronchique, soit surtout par

ponction directe sous contrôle tomodensitométrique (95 %

de positivité par ponction à l’aiguille fine) [9, 13-15]. Il s’agit

le plus souvent de carcinomes bronchopulmonaires épider-

moïdes, indifférenciés ou d’adénocarcinome. Les carcinomes

à grandes cellules et les carcinomes anaplasiques sont moins

fréquents. D’autres cancers primitifs peuvent provoquer un

syndrome de Pancoast : mésothéliomes, plasmocytomes,

lymphomes [16-19], métastases, lésions malignes avec enva-

hissement par contiguïté telles que les adénopathies de can-

cers ORL, les carcinomes thyroïdiens, certaines tumeurs de la

paroi thoracique (hémangiopéricytome). Des lésions bénignes

peuvent également en être à l’origine ; il peut s’agir de lésions

tumorales (tumeurs neurogènes…), inflammatoires (granulo-

matoses), mixte (amyloïdose) [18] ou surtout infectieuses

comme l’hydatidose [20], l’actinomycose [21], l’échinococcose,

la cryptococcose, les pneumopathies à staphylocoque, les infec-

tions à pseudomonas aeruginosa [22], la tuberculose [23] voire

une mycose invasive dans un contexte d’immunodépression

[24, 25].

Les carcinomes de l’apex restent de pronostic incertain et peu

favorable en raison de leur diagnostic le plus souvent tardif,

d’une association thérapeutique toujours controversée et d’une

chirurgie qui se veut obligatoirement large et mutilante, gre-

vée d’une lourde morbidité opératoire et dont le but premier

n’est pas forcément curatif mais vise plutôt à obtenir une

sédation douloureuse et un certain confort dans la survie des

patients.

L’IRM est aujourd’hui la technique d’imagerie la plus appropriée

dans l’exploration de cette région anatomique particulière et

dans le bilan d’extension locale de ces tumeurs. Elle participe

à l’appréciation du critère T de la classification TNM et à l’éva-

luation de leur résécabilité.

Anatomie utile : l’apex pulmonaire et son environnement

La complexité de l’anatomie du défilé cervico-thoracique n’en

permet pas une description exhaustive et seules seront envi-

sagées les structures anatomiques les plus susceptibles d’être

envahies par les tumeurs de l’apex.

L’apex pulmonaire

Cette entité correspond au poumon situé au dessus de l’orifice

supérieur du thorax limité latéralement par le bord interne de

la première côte qui est d’orientation très oblique, d’environ

45°, par rapport au plan horizontal — en arrière par la 1re vertèbre

thoracique dont la saillie du corps vertébral réduit fortement le

diamètre antéro-postérieur de l’orifice supérieur du thorax et

en avant par le bord supérieur du manubrium sternal et l’extré-

mité interne de la clavicule (fig. 1).

Le parenchyme de l’apex pulmonaire appartient au lobe supé-

rieur. Il est recouvert par le dôme pleural constitué respective-

ment de la profondeur vers la superficie par la plèvre viscérale,

adhérente au poumon, par la plèvre pariétale qui adhère au

périoste de la première côte en arrière, par la gaine vasculaire

de l’artère sub-clavière en avant et par le fascia endotho-

racique qui adhère à la face supérieure de la plèvre pariétale

et qui constitue un plan de clivage encore dénommé plan

extra-pleural.

Le dôme pleural comprend ainsi trois versants : un versant

antérieur incliné en pente douce en bas et en avant, un versant

postérieur plus abrupt, oblique en bas et en arrière et un

versant interne, vertical (fig. 2).

L’environnement de l’apex pulmonaireLes espaces intercostaux et la paroi thoracique postérieure

Les espaces intercostaux, notamment postérieurs, sont fré-

quemment impliqués dans l’extension pariétale des processus

expansifs du sommet. À ce titre, ils font partie de son environ-

nement et la connaissance de leurs éléments constitutifs est

utile.

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Feuillets de Radiologie © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 325

J. Baccialone et al.2222mise au point

Les muscles intercostaux constituent trois plans de la profon-

deur à la superficie : les muscles intercostaux internes s’éten-

dent de l’angle costal postérieur jusqu’à environ 6 cm en dehors

du sternum en avant, les muscles intercostaux moyens n’exis-

tent que dans la moitié antérieure de l’espace intercostal,

de la ligne axillaire moyenne jusqu’au bord latéral du ster-

num tandis que les muscles intercostaux externes en occupent

les trois-quarts postérieurs, de l’articulation costo-transversaire

jusqu’à la jonction chondro-costale. En pratique, seuls les mus-

cles intercostaux externe et moyen sont respectivement

reconnaissables en IRM dans les régions postérieure et anté-

rieure.

Le paquet vasculo-nerveux intercostal, constitué de haut en

bas par la veine, l’artère et le nerf intercostal, est situé dans

un environnement graisseux qui en facilite sa reconnaissance

en IRM.

Le défilé des scalènes

Le défilé des scalènes constitue un repère anatomique fonda-

mental par son contenu nerveux et vasculaire. Il est très fré-

quemment envahi par les tumeurs apicales postérieures.

Le muscle scalène antérieur constitue un repère majeur. Né

des tubercules antérieurs des apophyses transverses de C3 à

C6, il s’insère sur la 1re côte, sur le tubercule de Lisfranc (fig. 3).

De chaque côté de cette tubérosité et du scalène antérieur

s’individualise une gouttière anatomique ; l’une, en arrière,

est dénommée défilé des scalènes et permet le passage de

l’artère sub-clavière et des nerfs du plexus brachial tandis que

l’autre, en avant, correspond au passage de la veine sub-

clavière.

Le scalène moyen constitue la limite postérieure du défilé des

scalènes, il s’insère d’une part sur les gouttières transversaires

de C2 à C6 et sur l’apophyse transverse de C7 et d’autre part sur

la face supérieure de la première côte, en arrière et en dehors

de l’insertion du scalène antérieur.

Le muscle scalène postérieur ne rentre pas directement dans

l’environnement de l’apex thoracique, il descend des apophyses

transverses cervicales jusqu’à la 2e côte.

Les éléments vasculaires de la sortie du thorax

À droite comme à gauche, l’artère sub-clavière décrit une

vaste courbe à concavité inférieure sur le versant antérieur du

dôme pleural puis passe dans le défilé interscalénique et

adopte un trajet oblique en bas et en dehors jusqu’à la pince

costo-claviculaire où elle devient l’artère axillaire.

Au voisinage du dôme pleural, l’artère sub-clavière donne

naissance à de multiples branches collatérales parmi lesquelles

l’artère vertébrale est la plus importante et la mieux analysable

en IRM. C’est la première collatérale du segment préscalénique

Figure 1. A et B : Structures osseuses du sommet thoracique. Noterl’inclinaison de la première côte et l’exiguïté du défilé cervico-thoraciqueen partie liée à la saillie intra-thoracique des corps vertébraux des troispremières vertèbres thoraciques.

A

B

Figure 2. Représentation schématique de l’apex thoracique dans leplan sagittal. La paroi thoracique, le rachis et le plexus brachial consti-tuent sa limite postérieure ; il est fermé en avant par le plan des vais-seaux sub-claviers. En dedans, il est limité par l’artère vertébrale et lachaîne sympathique puis, au delà, par le médiastin. GSt : ganglion stel-laire ; V1 : artère vertébrale.

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IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

326

de l’artère sub-clavière. Elle se dirige en haut, en arrière et un

peu en dedans (segment V1), passe au dessus et en avant du

ganglion stellaire qu’elle perfore parfois avant de pénétrer

dans le canal transversaire de C6 (segment V2), accompagnée

par sa veine. A gauche, l’artère vertébrale peut, dans 6 % des

cas, naître directement de la crosse de l’aorte.

Au niveau du creux sus-claviculaire, le plan veineux est antéro-

inférieur au plan artériel, il est représenté par la veine sub-

clavière et ses affluents.

Les éléments nerveux

Les principaux éléments nerveux du défilé cervico-thoracique

concernés par les tumeurs de l’apex sont le plexus brachial et

la chaîne sympathique cervico-thoracique.

Le plexus brachial

C’est une structure complexe issue des nerfs spinaux de C5 à

Th1 avec parfois une participation des nerfs C4 et Th2. Ces

nerfs vont se diviser puis se rejoindre formant un réseau dans

lequel on décrit des troncs puis des divisions en cordes. Le plexus

brachial est situé à la fois dans la région sus-claviculaire et

dans le creux axillaire où naissent ses racines terminales mais

seule sa partie supérieure, où s’intriquent les différents troncs

nerveux, entre en rapport avec le dôme pleural.

La partie initiale, radiculaire, du plexus est située dans les

gouttières des apophyses transverses puis dans la partie la plus

interne du défilé interscalénique. Les racines C5, C6 et C7 émer-

gent à la partie la plus élevée du triangle intercostoscalénique.

Les deux racines les plus inférieures, C8 et Th1, s’appliquent

l’une sur le col de la première côte, l’autre en dedans. Dès leur

émergence des trous de conjugaison, elles entrent en rapport

étroit avec le dôme pleural. La racine Th1 entre en rapport avec

le ganglion stellaire et l’artère vertébrale. Les racines C8 et Th1

fusionnent à l’union du tiers postérieur et des deux tiers anté-

rieurs du rebord supérieur de la première côte pour constituer

le tronc primaire inférieur.

Le plexus brachial émet à tous les niveaux de nombreuses

collatérales, ses branches terminales sont toutes destinées à

l’innervation du membre supérieur, elles naissent en aval du

défilé scalénique, dans le creux axillaire.

La chaîne sympathique cervico-thoracique

Elle est représentée par le ganglion stellaire formé par la fusion

du ganglion cervical inférieur et du premier ganglion thoracique.

Il est situé au voisinage du rachis sur le versant postérieur

du dôme pleural, en avant du col de la première côte, dans la

fosse sus-rétropleurale de Sébileau où il entre en rapport avec

les racines C8 et Th1 expliquant la fréquence de leur atteinte

concomitante dans le développement des tumeurs de l’apex.

Le ganglion stellaire est recouvert en haut et en avant par

l’artère vertébrale qui se coude au dessus de lui ou le perfore

pour gagner le canal transversaire de C6 (fig. 4). Il émet des

branches efférentes vers les racines C6, C7, C8, et Th1 du plexus

Figure 3. Disposition du groupe des muscles scalènes. Le défilé ou hia-tus interscalénique est limité en avant par le scalène antérieur, insérésur le tubercule de Lisfranc ; il est fermé en arrière par le scalènemoyen. Le scalène postérieur reste à distance de l’apex.

Figure 4. Représentation schématisée du ganglion stellaire. Il est consti-tué par la fusion du ganglion cervical inférieur et du premier ganglionthoracique. Il entre en rapport étroit avec l’artère vertébrale et les deuxdernières racines C8 et Th1 du plexus brachial.

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brachial et des rameaux qui vont constituer le nerf vertébral qui

s’accole à l’artère du même nom.

Apport de l’IRM dans le bilan d’extension locale des tumeurs de l’apex

L’IRM est indiquée dans la détermination du critère T des tumeurs

de l’apex par sa meilleure résolution en contraste [26-28]

et la possibilité d’analyse d’emblée multiplanaire que néces-

site l’étude de ces lésions particulières situées dans une zone

fermée.

Si le traitement des cancers de l’apex thoracique n’est pas

encore standardisé, la place de la chirurgie est en revanche

bien établie. Outre les contre-indications liées à une extension

régionale et générale (métastases à distance, ganglion métasta-

tique dans la région préscalénique, stade N2 avec ganglions

métastatiques médiastinaux), le bilan d’imagerie doit s’attacher

à préciser l’extension locale de la tumeur pour en évaluer

la résécabilité.

Sur le plan de la classification TNM, les cancers de l’apex peuvent

être classés T3 ou T4 ; selon la dernière classification interna-

tionale [29], ils restent classés T3 même en cas d’envahisse-

ment du plexus brachial, de l’artère ou de la veine sub-clavière.

Ils ne deviennent T4 qu’en cas d’envahissement du rachis, du

médiastin et des gros vaisseaux, de la trachée, de l’œsophage

ou lorsque le syndrome de Pancoast-Tobias est cliniquement

complet.

Aspects techniques

Le patient est en décubitus dorsal, les bras le long du corps.

L’exploration peut être réalisée au moyen d’une antenne

de surface permettant une étude complète et simultanée de

l’apex thoracique jusqu’à Th5 et du rachis cervical jusqu’à

la base du crâne. L’exploration d’une tumeur de l’apex est sys-

tématiquement réalisée dans les trois plans de l’espace.

Des séquences rapides en écho de spin en pondération

T1 et en contraste spontané suffisent en pratique pour réaliser le

bilan. Les séquences STIR sensibilisent l’analyse du signal des

corps vertébraux mais n’apportent pas d’argument déterminant.

De la même manière, des séquences axiales en pondération T2

sont parfois utiles pour compléter l’analyse du canal rachidien

en cas d’envahissement des foramens de conjugaison et

d’extension épidurale mais n’apparaissent pas indispensables.

L’injection de produit de contraste et les séquences angio-

graphiques peuvent être réalisées en cas d’englobement des

gros vaisseaux, elles ne sont que rarement utiles.

Anatomie normale de l’apex en IRML’incidence sagittale

C’est le plan de coupe le plus utile [27], cette incidence s’avère

être la plus informative et la plus appropriée pour l’étude de

la graisse extra-pleurale de l’apex, des différents constituants

des espaces intercostaux et du signal des structures osseuses

costales (fig. 5A, B, C et D).

Elle montre les rapports des artères sub-clavières avec les

structures anatomiques de voisinage sur l’ensemble de leur

trajet. Elle met en évidence les ostiums et les segments V1

des artères vertébrales situés en regard des ganglions stellaires

qui ne sont généralement pas directement visibles mais peuvent

parfois être reconnus en arrière du segment initial de l’artère

vertébrale.

Enfin, elle permet l’étude du signal des corps vertébraux du

rachis cervical dans son ensemble et de la charnière cervico-tho-

racique. Dans cette incidence, les parties molles prévertébrales,

le canal rachidien et la moelle sont également analysables sur

toute leur hauteur.

L’incidence axiale transverse

Son principal intérêt est l’étude locale du rachis, des parties

molles péri-vertébrales, des foramens de conjugaison, du canal

rachidien et de la moelle (fig. 6A, B, C et D).

Elle permet également l’analyse du segment proximal des

artères vertébrales et des chaînes sympathiques cervicales

situées en regard. Elle montre les racines inférieures du plexus

brachial et permet l’étude de leur trajet jusqu’au hiatus inter-

scalénique.

L’incidence frontale

Moins utile, elle permet surtout l’analyse de l’espace graisseux

extra-pleural de l’apex thoracique et dans une moindre mesure

des foramens de conjugaison, des structures du médiastin

supérieur, en particulier de la graisse médiastinale, de la crosse

aortique et des troncs supra-aortiques (fig. 7A, B, C et D).

Résultats

Classiquement sont définis trois types d’envahissement [30].

Les tumeurs postérieures sont les plus fréquentes, elles se

développent dans l’angle costo-vertébral. Elles envahissent

en arrière les espaces intercostaux, le défilé des scalènes et

les dernières racines du plexus brachial et peuvent remonter

le long du rachis et se prolonger dans les foramens de conju-

gaison et le canal rachidien. En avant, elles peuvent s’étendre

Page 6: IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

328

vers l’artère vertébrale et la chaîne sympathique puis vers

l’artère sub-clavière, voire le médiastin.

Les tumeurs moyennes se situent en regard de l’arc moyen de

la première côte, leur extension est supérieure vers les troncs

primaires du plexus brachial, en aval de ses racines et vers le

scalène moyen.

Les tumeurs antérieures de l’apex sont peu fréquentes. Elles

peuvent envahir l’arc antérieur de la première côte et le sca-

lène antérieur, la veine sub-clavière et le nerf phrénique à

droite. Ces tumeurs n’atteignent pas le plexus brachial lui-

même.

Les tumeurs avec extension postérieureL’envahissement pleural

L’IRM comme le scanner n’est pas capable de distinguer une

atteinte limitée à la plèvre pariétale. La présence d’un épaissis-

sement pleural adjacent à une masse périphérique n’augure

en rien de son envahissement et peut être d’origine tumorale

comme desmoplastique inflammatoire [31] ; seuls les résultats

de l’exploration chirurgicale et de l’analyse anatomo-patho-

logique extemporanée permettent de prendre la décision de

limiter l’exérèse à la plèvre pariétale ou de la compléter par

une pariétectomie.

L’envahissement pariétal

L’envahissement des côtes et des espaces intercostaux n’est

pas en soi une contre-indication à la chirurgie.

La graisse intercostale

L’IRM offre une meilleure résolution en contraste que le

scanner par la présence de graisse dans les espaces inter-

costaux. Cette graisse pariétale est en quantité variable chez

un même patient et prédomine au tiers postérieur des espaces

intercostaux où seul de muscle intercostal externe est

reconnu. L’analyse d’un envahissement pariétal par dispari-

tion de la graisse extra-pleurale est donc plus facile à identifier

en région postérieure où siègent la majorité des tumeurs de

l’apex.

L’absence d’envahissement peut être évoquée devant l’absence

d’anomalie de signal de la graisse intercostale et l’intégrité

de ses contours sans que l’on puisse présumer de l’atteinte de

la plèvre pariétale (fig. 8). Le critère d’envahissement est la

Figure 5. A, B, C et D : Plan de coupe sagittal, repères anatomiques sur 4 coupes réalisées en pondération T1 de dedans en dehors. SCM : muscle sterno-cleido-mastoïdien ; St : sternum ; Cl : clavicule ; K1, K2 et K3: arcs postérieurs des trois premières côtes ; GA : graisse apicale ; MIC : muscleintercostal externe ; GIC : graisse intercostale ; ASC : artère sub-clavière ; VSC : veine sub-clavière ; VIC : vaisseaux intercostaux ; VJ : veine jugu-laire ; CP : carotide primitive ; V1 : artère vertébrale. En jaune sont indiquées les racines nerveuses de leur émergence foraminale jusqu’au hiatusinterscalénique ; GS : ganglion stellaire.

A B C D

Figure 6. A, B, C et D : Plan de coupe axial, repères anatomiques sur 4 coupes pondérées T1 réalisées de C7 à Th1. ScaA : scalène antérieur ; ScaM :scalène moyen ; ScaP : scalène postérieur ; K1 et K2 : arcs postérieurs des 2 premières côtes ; C7 (blanc) : corps vertébral de C7 ; Th1 (blanc) : corpsvertébral de la 1re vertèbre thoracique. Les racines nerveuses sont indiquées en jaune.

A B C D

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J. Baccialone et al.2222mise au point

disparition en pondération T1 de l’hypersignal de la graisse

intercostale remplacé par un signal intermédiaire identique à

celui de la tumeur (fig. 9) [32].

Le problème d’un envahissement pariétal ne se pose plus en

cas d’ostéolyse manifeste d’emblée visible sur le bilan standard

ou identifiée en scanner et qui en représente le critère absolu.

En l’absence de ces critères formels d’envahissement, l’IRM

peut révéler la présence d’anomalies de signal sur les structu-

res osseuses en contact avec la tumeur et en particulier sur les

côtes et le rachis. Les clavicules et le sternum sont rarement

atteints dans ce type de tumeur.

L’envahissement costal est évoqué devant la disparition de la

corticale et du remplacement de son hyposignal par un signal

identique à celui de la tumeur (fig. 10A et B) ; l’atteinte de

l’os spongieux se traduit de la même manière par la dispari-

tion de l’hypersignal graisseux remplacé par un signal identi-

que à celui de la tumeur, voire par un hyposignal plus marqué.

Ces modifications peuvent concerner une ou plusieurs côtes

contiguës à la tumeur et s’accompagnent toujours d’un enva-

hissement de la graisse intercostale.

L’extension au rachis

En dehors des espaces intercostaux, une altération de l’hyper-

signal graisseux doit également être recherchée au niveau de

la graisse paravertébrale où elle peut être isolée, sans ano-

malie associée du signal des structures osseuses vertébrales

Figure 7. Plan de coupe frontal, repères anatomiques sur 4 coupes réalisées d’avant en arrière et passant par le rachis.

A B

C D

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IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

330

(fig. 11). L’IRM ne permet pas de distinguer une atteinte

limitée à la plèvre pariétale ou contenue par le ligament

prévertébral (T3 de la classification TNM) d’une atteinte du

périoste et de l’os spongieux (T4 du TNM). Celui-ci reste habi-

tuellement de découverte opératoire.

La fréquence des atteintes vertébrales est plus élevée avec

les cancers de l’apex qu’avec les autres tumeurs broncho-

pulmonaires. Celle-ci est évoquée devant une altération de

type inflammatoire du signal de l’os spongieux vertébral ;

l’envahissement est affirmé lorsque l’hypersignal de l’os

spongieux est remplacé par un signal identique à celui de la

tumeur (fig. 12A et B) auquel s’associe éventuellement la

disparition de la corticale (fig. 13A et B). L’envahissement

du corps vertébral par contiguïté fait classer le patient dans

la catégorie T4 mais ne constitue pas toujours une contre-

indication chirurgicale formelle. Les possibilités de la chirur-

gie et de la vertébroplastie sont en cours d’évaluation [33],

une exérèse osseuse partielle peut parfois être réalisable

dans des conditions particulières, en l’absence de lésion N2

et/ou à visée palliative.

L’envahissement des foramens de conjugaison et du canal

rachidien à partir des foramens ou du corps vertébral est

susceptible de constituer une contre-indication formelle

à la chirurgie. L’IRM en permet une description optimale.

Les coupes en pondération T1 réalisées dans le plan

axial et montrant la disparition de l’hypersignal graisseux

foraminal suffisent en règle à affirmer l’extension intra-

foraminale (fig. 14A, B et C). Une série de coupes axiales

en pondération T2, en utilisant l’hypersignal du LCS, peut

éventuellement être utile pour en apprécier l’extension

intra-canalaire.    

L’envahissement du plexus brachial

Enchâssés dans la gouttière costo-vertébrale et le défilé cer-

vico-thoracique, les cancers de l’apex envahissent fréquem-

ment les racines inférieures du plexus brachial.

La symptomatologie à type de névralgies cervico-brachiales

traduit l’extension supérieure de la tumeur et l’atteinte par

compression ou envahissement des éléments inférieurs du

plexus brachial.

L’atteinte clinique du plexus brachial ne constitue pas une

contre-indication systématique à la chirurgie. Seul un enva-

hissement massif comportant plus que les racines C8 et Th1 et

empêchant à l’évidence une exérèse complète peut consti-

tuer une vraie contre-indication.

Le rôle de l’IRM est d’en établir un bilan topographique et

repose sur la recherche d’un englobement des racines et/ou

d’une altération de l’hypersignal de la graisse environnante

de l’apex en regard des émergences radiculaires du plexus

brachial, en particulier des deux dernières racines, C8 et Th1

(fig. 15A, B et C).

Figure 8. Coupes sagittales en pondération T1. La tumeur est en contactétroit avec la paroi (têtes de flèche), la graisse intercostale est respectée,le muscle intercostal externe bien visible, la paroi thoracique n’est pasenvahie. Seules la chirurgie et l’analyse anatomo-pathologiqueextemporanée peuvent déterminer l’envahissement de la plèvre parié-tale.

Figure 9. L’hypersignal de la graisse du 2ie espace intercostal a disparu(flèches), remplacé par un signal identique à celui de la tumeur. Lemuscle intercostal externe n’est plus visible, le processus bombe enarrière : l’envahissement est manifeste. Absence d’anomalie de lamorphologie et du signal des arcs costaux postérieurs.

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J. Baccialone et al.2222mise au point

L’extension antérieure des tumeurs de l’apex

L’analyse des rapports entre la tumeur et les artères sub-

clavières et vertébrales et la chaine sympathique permet d’en

détermine l’extension antérieure susceptible de modifier la

stratégie chirurgicale en imposant une voie d’abord cervicale

antérieure.

Les critères d’envahissement des structures vasculaires

La recherche d’une extension vasculaire repose sur la recon-

naissance d’une occlusion ou d’une sténose circonférentielle

(fig. 16A et B). Comme en scanner, l’envahissement est très

probable dès que le contact de la tumeur avec le vaisseau

concerné dépasse 180 degrés (fig. 16C) [34].

Même si elle ne constitue pas une contre-indication à

l’exérèse, l’envahissement des vaisseaux sub-claviers

constitue un facteur de mauvais pronostic. L’évaluation

d’une extension antérieure est déterminante puisque

l’abord chirurgical postérieur ne permet pas un abord satisfai-

sant des vaisseaux sous-claviers ainsi que d’un éventuel

prolongement cervical. En cas d’envahissement, la veine

sous-clavière peut être sacrifiée sans rétablissement ;

L’artère sub-clavière, en revanche, doit être remplacée par

une angioprothèse.    

L’artère vertébrale peut être sacrifiée après contrôle de l’artère

vertébrale contro-latérale. Son envahissement, souvent lié à

un envahissement de l’artère sub-clavière, répond aux mêmes

critères que pour les autres vaisseaux (fig. 16C et D), une

atteinte de la chaîne sympathique peut y être associée

compte tenu des rapports entre les deux structures.

A B

Figure 10. A : Coupes sagittales passant par le hiatus interscalénique, processus expansif de la région apicale postérieure franchissant la graisse des2e et 3e espaces intercostaux. Hyposignal global de la graisse de l’os spongieux de l’arc postérieur de la 3e côte signant l’envahissement malgrél’absence anomalie significative au scanner (tête de flèche). B : Effacement partiel de la corticale de l’arc postérieur de la 2e côte (tête de flèche) ede l’os spongieux en regard traduisant l’envahissement costal. Noter l’envahissement du 1er espace intercostal sans anomalie morphologique ni designal formellement identifiable de la 1re côte (K1).

Figure 11. Coupe axiale transverse ; processus expansif de l’apex droitvenant au contact du rachis avec effacement de la graisse paraverté-brale sans anomalie de signal vertébral en regard. L’IRM ne permet pasde distinguer une atteinte limitée à la plèvre pariétale (stade T3)d’une extension au périoste et à l’os spongieux du corps vertébral(stade T4).

Page 10: IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

332

L’envahissement des structures nerveuses :

la chaîne sympathique

La présence d’un signe de Claude Bernard Horner signe

l’extension vers la fosse sus-rétropleurale de Sébileau de la

tumeur avec envahissement ou compression de la chaîne

sympathique et en particulier du ganglion stellaire. En IRM,

son envahissement peut être associé à un englobement de

l’artère vertébrale et à une extension vers le rachis et les deux

dernières racines du plexus brachial (fig. 13A et 14A) ou à un

simple contact avec ces structures (fig. 17A et B). Le ganglion

stellaire peut être sacrifié à l’intervention, son envahissement

ne constitue pas une contre-indication chirurgicale.     

A B

Figure 12. A et B : Coupes sagittales en pondération T1 (A) et STIR (B) ; diminution de l’hypersignal graisseux des corps vertébraux de Th1, Th2 et Th3en contact avec la tumeur en pondération T1, hypersignal inflammatoire en pondération STIR. Ces anomalies de signal permettent de conclure à unenvahissement tumoral malgré l’absence d’anomalie au scanner.

BA

Figure 13. Coupes axiale transverse (A) et sagittale (B) en pondération T1 ; carcinome épidermoïde différencié de l’apex droit. Disparition de la cor-ticale antérieure des corps vertébraux de Th1 et Th2 (tête de flèche) et envahissement massif de l’os spongieux vertébral et de l’espace intersoma-tique Th1-Th2. Cet envahissement était déjà visible en scanner.

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J. Baccialone et al.2222mise au point

L’évaluation de l’envahissement médiastinal

L’IRM ne présente pas d’avantage particulier par rapport au

bilan initial réalisé par le scanner. Toutes les études réalisées

montrent, à l’instar du scanner, les insuffisances de l’IRM dans

la reconnaissance d’un envahissement tumoral médiastinal.

Aucun des critères décrits dans la littérature (contact de la

tumeur de plus de 3 cm avec le médiastin, effet de masse ou

déformation de la trachée, de l’œsophage, infiltration d’un

plan graisseux médiastinal…) ne présente une spécificité

suffisante pour affirmer l’envahissement médiastinal. En

revanche, un contact de moins de 3 cm avec le médiastin et

la persistance d’un plan graisseux médiastinal sont en faveur

d’une bonne probabilité de résécabilité [35]. De la même

manière, si l’on s’intéresse à la valeur prédictive positive, le

seul signe qui aurait une valeur de 100 % est le contact sur

plus de 180 degrés de la tumeur sur une structure médiasti-

Figure 14. A : Carcinome de l’apex droit venant au contact du rachis, effaçant la graisse para-vertébrale (flèche) et la graisse du foramen de conjugai-son (tête de flèche) signant l’envahissement foraminal. B : Tumeur de l’apex gauche avec envahissement foraminal ; noter l’envahissement épiduralgauche avec refoulement du cordon médullaire (têtes de flèche). C : Coupe coronale en pondération T1 passant par les foramens de conjugaison dusegment Th2-Th3 ; tumeur de l’apex droit, noter l’envahissement massif de la graisse apicale, de la graisse para-vertébrale et du foramen droit avecdébut d’extension épidurale. Tous ces éléments sont déjà renseignés par les coupes axiales, ce plan de coupe n’est pas indispensable. Th2 : émer-gence foraminale de la racine Th2 gauche.

A B C

Figure 15. Tumeur de l’apex gauche, coupes sagittales en pondération T1 réalisées sur le trajet du plexus brachial des foramens (A) à l’espace inter-scalénique (C) chez un patient souffrant de névralgies cervico-brachiales gauches de topographie C8, Th1 et Th2. La tumeur franchit la graisse apicaleet vient englober les racines C8 et Th1 (flèche blanche, coupes B et C). L’IRM permet de montrer que la tumeur épargne la racine C7 dont on suit letrajet sur les trois coupes. L’envahissement du plexus brachial est clinique, l’IRM en permet l’évaluation topographique. Pour mémoire, disparition dela corticale inférieure de la 1re côte et hyposignal de l’os spongieux de la 2e côte au contact de la tumeur, signant l’envahissement. Noter l’extensiontumorale au contact de l’artère sub-clavière en avant.

A B C

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IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

334

nale [34]. Ce signe se rencontre dans les tumeurs plus évo-

luées en contact avec les structures du médiastin supérieur

telles que la trachée, voire l’œsophage et les nerfs récurrents.

Conclusion

Le bilan local d’extirpabilité des tumeurs de l’apex constitue

une indication indiscutable de l’IRM. Deux séquences, sagit-

tale et axiale transverse en pondération T1 et en contraste

spontané, suffisent en pratique à le réaliser en quasi-totalité.

Par la supériorité de sa résolution en contraste vis à vis du

scanner, l’IRM reste en effet la seule technique d’imagerie

permettant la distinction entre un stade T3 et un stade T4

dans l’évaluation de l’extension tumorale vers l’axe rachidien

et surtout dans les extensions tumorales intra-canalaires à

partir des corps vertébraux et/ou des foramens de conjugai-

son et qui constituent pratiquement la seule contre-indication

locale à la chirurgie. Dans l’évaluation des stades T4 par enva-

hissement des structures du médiastin supérieur, elle garde

en revanche les mêmes limites que le scanner.

Figure 16. A et B : Processus expansif apical avec envahissement massif du défilé interscalénique. La tumeur englobe totalement l’artère sub-clavièredont la lumière est sténosée, l’envahissement est formel. C : Le contact de la tumeur avec l’artère sub-clavière dépasse 180 degrés, l’envahissementest très probable. Noter la sténose associée de l’artère vertébrale. D : Angio-MR des vaisseaux du cou, reconstruction MIP 3D. Tumeur de l’apex droitévoluée envahissant la paroi postérieure et d’extension supérieure et antérieure, englobant l’artère sub-clavière et enserrant l’ostium et le segmentproximal V1 de l’artère vertébrale (têtes de flèche rouges). V1 : artère vertébrale ; SSCL : artère sub-clavière ; TTBS : tronc thyro-bicervico-scapu-laire ; TBC : tronc artériel brachio-céphalique.

A B C D

A B

Figure 17. Coupes axiales transverses passant par le segment proximal des artères vertébrales. A : Tumeur apicale droite, syndrome de Claude BernardHorner. L’artère vertébrale droite et le ganglion stellaire (flèche jaune) sont englobés par la tumeur, noter l’extension tumorale vers le rachis avec dis-parition de la graisse paravertébrale (flèche blanche). La tumeur franchit la graisse médiastinale et vient au contact de l’œsophage. B : Tumeur de l’apexgauche, signe de Claude Bernard Horner ; la tumeur vient au contact du segment V1 de l’artère vertébrale (flèche rouge) et comprime ou envahit le ganglionstellaire compte tenu de la clinique, signant l’extension vers la fossette sus-rétropleurale de Sébileau. En revanche, la tumeur affleure la graisse para-vertébrale sans l’effacer et n’atteint pas l’arc postérieur de la 2e côte.

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Page 14: IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

IRM des tumeurs broncho-pulmonaires de l’apex

336

2222test de formation médicale continue

Qu’avez-vous retenu de cet article ?Testez si vous avez assimilé les points importants de cet article en répondant à ce questionnaire sous forme de QCM.

1. Devant une extension tumorale pariétale, une contre-

indication formelle à la chirurgie est représentée par :

A : La présence d’une lyse costale ;

B : La présence d’un envahissement d’un corps

vertébral par contiguïté ;

C : La présence d’un envahissement d’un foramen

de conjugaison avec extension intra-canalaire.

2. Parmi les structures anatomiques suivantes, quelles sont

celles dont l’envahissement entraîne la classification de

la tumeur dans le critère T4 de la classification

internationale TNM ?

A : Médiastin ;

B : Corps vertébral ;

C : Paroi thoracique ;

D : Artère sub-clavière.

3. En IRM, le plan de coupe le plus contributif pour l’étude

de l’extension des tumeurs de l’apex est le plan :

A : Axial ;

B : Sagittal ;

C : Coronal.

4. En IRM, l’envahissement de la paroi thoracique est au

mieux apprécié par une séquence en coupes :

A : Sagittales pondérées T1 avec injection de

produit de contraste ;

B : Sagittales pondérées T2 ;

C : Sagittales pondérées T1 en contraste spontané ;

D : Sagittales STIR.

5. En IRM, l’envahissement d’un foramen de conjugaison

est au mieux apprécié par la réalisation :

A : De coupes axiales transverses en pondération

T1 avec injection de gadolinium ;

B : De coupes axiales transverses en pondération

T2 ;

 C : De coupes axiales transverses en pondération

T1 et en contraste spontané.

6. La réalisation de coupes axiales transverses en

pondération T2 est indispensable pour compléter le

bilan d’un envahissement foraminal :

A : Vrai ;

B : Faux.

Réponses : p. 384