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JOG n6:Mise en page 1

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Page 1: JOG n6:Mise en page 1

JOG Kephren Publishing

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VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 - 35 €

Recherche • L’inhibition de la biosynthèse des androgènes. Une nouvelle approche thérapeutique dans le cancer

de la prostate résistant à la castration.

Santé publique • Unité Pilote de Coordination en OncoGériatrie dans le département de la Côte-d’Or : une expérience originale

Cas clinique • Sarcome de Kaposi et sujet âgé : à propos d’un cas

Article original • Applicabilité des recommandations de l’évaluation onco-gériatrique par les médecins généralistes au cours

du suivi en ville des malades âgés atteints de cancer

Actualités• L’image du JOG - Un « eczéma » du mamelon pas ordinaire

• 9ème Congrès International Francophone de Gériatrie et Gérontologie (CIFGG)30èmes Journées Annuelles de la Société Française de Gériatrie et Gérontologie

Billet d’humeur • L’Oncogériatrie, un partage des compétences : position du Docteur Michel Hery, co-président du congrès

Monaco Age Oncologie (MAO)

Dossier thématique • Nutrition en oncogériatrie

Dossier thématique • Nutrition en oncogériatrie

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Chère Consœur, Cher Confrère,

Le JOG : 1 an déjà…1 an depuis la parution du 1er numéro de la 1ère revue scientifique francophone dédiée à l’Oncogériatrie.

A l’occasion de ce 1er anniversaire, nous souhaitons remercier très sincèrement l’ensemble des professionnels de santéet partenaires qui nous ont soutenus dans cette aventure humaine.

Cette 1ère année a ainsi été marquée par un engagement fort à nos côtés du Gépo-g, SFGG et SFPO, par la construc-tion de partenariats avec les principaux événements médicaux francophones (MAO, SFCP, EPO-G, CIFGG), et par l’im-plication des membres des comités scientifiques et de rédaction.

Le JOG a ainsi pu, au travers de la qualité des articles publiés, grâce à son nombre croissant d’abonnés, et à votre trèsforte adhésion, se faire un nom et une crédibilité au sein de la presse spécialisée.

Pour cette année 2011, la volonté du JOG est de continuer à accompagner, soutenir et diffuser l’ensemble des travauxet communications scientifiques réalisés sur la thématique Oncogériatrique auprès de la communauté scientifique defaçon pluridisciplinaire.

Cette réflexion Oncogériatrique récente est en plein essor. Le JOG a pour vocation d’accompagner cette dynamique.Plus que jamais, nous vous invitons donc à nous rejoindre et nous soutenir au travers de la soumission de vos travaux

scientifiques.De plus, afin d’assurer sa pérennité et sa crédibilité, le JOG se doit de justifier d’un nombre d’abonnés payants aux-

quels il réservera sa diffusion. Nous espérons donc très sincèrement que 2011 marquera la continuité de votre soutienen vous abonnant ou réabonnant au JOG.

Toute l’équipe du JOG vous souhaite une excellente année 2011 et reste à votre écoute. n

Très confraternellement

Véronique Girre Olivier Guérin Jean-Philippe Spano Dimitri VerzaRédacteur en chef Rédacteur en chef Directeur de la rédaction Directeur de la publicationOncologue médicale Gériatre Oncologue médical PharmacienInstitut Curie, Paris CHU de Nice Pitié-Salpêtrière, Paris Paris

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Éditorial

241 VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie

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VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010

Rédacteurs en chefV. Girre (Paris)O. Guérin (Nice)

Directeur de la rédactionJ.-P. Spano (Paris)

Rédacteur en chef techniqueT. Marquet (Paris)

Advisory boardL. Balducci (Tampa - USA)J.-P. Droz (Lyon)

Chefs de rubriqueRecherche : G. Zulian (Genève - Suisse)Santé publique : T. Cudennec (Boulogne-Billancourt)Cas clinique : F. Retornaz (Marseille)Article original : C. Terret (Lyon)Actualités : L. Balardy (Toulouse), L. Mourey (Toulouse)

Comité éditorialG. Albrand (Lyon) - E.-C. Antoine (Neuilly-sur-Seine) - T. Aparicio (Bobigny) - A. Astier (Créteil) - R. Audisio(Londres - UK) - D. Azria (Montpellier) - S. Baffert (Paris)- S. Bonin-Guillaume (Marseille) - C. Bouleuc (Paris) -E. Brain (Saint-Cloud) - E. Carola (Senlis) - P. Chaibi(Paris) - A. Charrasse (Monaco) - P. Chassagne (Rouen)L. de Decker (Nantes) - S. Delaloge (Villejuif) -M. Extermann (Tampa - USA) - P. Follana (Nice) -E. François (Nice) - J.-M. Hannoun-Levi (Nice) - Y. Kirova(Paris) - V. Laroche (Chilly-Mazarin) - C. Leger-Falandry(Lyon) - F. Lokiec (Saint-Cloud) - N. Magné (Saint-Priesten Jarez) - Y. Menu (Paris) - M. Paccalin (Poitiers) -M. Puts (Toronto - Canada) - L. Ribière (Versailles) -L. Rotenberg (Neuilly-sur-Seine) - F. Rousseau (Marseille)- S. Schneider (Nice) - F. Scotté (Paris) - L. Sifer-Rivière(Paris) - P. Soubeyran (Bordeaux) - L. Teillet (Paris) - M.-C.Van Nes (Liège, Belgique)

Comité scientifiqueM. Arcand (Sherbrooke - Canada) - J.-P. Aquino (Paris)- B. Asselain (Paris) - D. Benchimol (Nice) -R.-J. Bensadoun (Poitiers) - H. Bergmann (Montréal -Canada) - G. Berrut (Nantes) - F. Blanchard (Reims) - M.Bonnefoy (Lyon) - I. Bourdel-Marchasson (Bordeaux) -H. Curé (Reims) - T. De Baere (Paris) - M. Debled(Bordeaux) - L. Escalup (Paris) - J.-M. Ferrero (Nice) -M. Ferry (Valence) - G. Freyer (Lyon) - J.-P. Gérard (Nice)- E. Gilson (Nice) - X. Hebuterne (Nice) - M. Hery (Monaco)- C. Jeandel (Montpellier) - P. Kerbrat (Rennes) - D. Khayat(Paris) - J. Latreille (Montréal - Canada) - J.-P. Lotz(Paris) - L. Mignot (Paris) - G. Milano (Nice) - E. Mitry(Boulogne-Billancourt) - F. Mornex (Lyon) - M. Namer(Nice) - F. Nourhashemi (Toulouse) - A. Pesce (Monaco)- J.-Y. Pierga (Paris) - F. Piette (Ivry-sur-Seine) - F. Puisieux(Lille) - M. Rainfray (Bordeaux) - G. Ruault (Paris) -O. Saint-Jean (Paris) - M. Schneider (Nice) -C. Thieblemont (Paris) - A. Thyss (Nice) - A. Toledano(Neuilly-sur-Seine) - J.-M. Vannetzel (Neuilly-sur-Seine)- U. Wedding (Berlin - Allemagne) - H. Wildiers (Louvain- Belgique)

Comité de lectureListe communiquée en fin d’année

EditeurKephren Publishing22, rue Chanez75016 Paris - FranceTél. : +33 (0)1 75 77 20 [email protected]

Directeur de la publicationD. Verza

MaquetteAu support

ImprimeurS.P.E.I. Imprimeur, Pulnoy

Relations commercialesI. Chartrain - [email protected]

[email protected]

CPPAP 0212 T 90198ISSN version papier : 2106-8534ISSN version électronique : 2107-6669Dépôt légal : à parutionIndexé Base PASCAL (INIST-CNRS)Adhérent au SPEPS Les articles publiés dans le Journal d’OncoGériatrie le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs.

Sommaire Table of contents

Editorial EditorialV. Girre, O. Guérin, J.-P. Spano, D. Verza

Recherche ResearchL’inhibition de la biosynthèse des androgènes. Une nouvelle approche thérapeutique dansle cancer de la prostate résistant à la castration.Androgen Biosynthesis Inhibition (ABI): A new therapeutic approach in Castration-ResistantProstate Cancer (CRPC)Ph. Beuzeboc, A. Toledano, M. Zerbib

Santé publique Public healthUnité Pilote de Coordination en OncoGériatrie dans le département de la Côte-d’Or : une expérience originalePilot Coordination Unit in Geriatric Oncology in Côte-d’Or: an original experienceV. Quipourt, S. Marilier, P. Fumoleau

Dossier thématique ReviewNutrition en oncogériatrie Nutrition in oncogeriatricsCoordination : S.M. Schneider

La Nutrition en oncogériatrie : un élément majeur de l’évaluation et de la prise en chargedes maladesNutrition in oncogeriatrics: a major tool for assessing and treating patientsX. Hébuterne

Evaluation de l’état nutritionnel avant décision thérapeutique en oncogériatrieNutritional assessment before therapy in oncogeriatricsF. Diebold, A. Danalache

Prise en charge de la dénutrition en oncogériatrieManagement of undernutrition in oncogeriatricsL. Evesque, S.M. Schneider

La sarcopénie : un nouveau concept en oncologieSarcopenia: a new concept in oncologyG. Zeanandin, S.M. Schneider, X. Hébuterne

Cas clinique Clinical case studySarcome de Kaposi et sujet âgé : à propos d’un casKaposi’s sarcoma and the elderly subjectA.-L. Couderc, D. Giacchero, I. Bereder, R. Boulahssass, O. Guérin

Article original Original articleApplicabilité des recommandations de l’évaluation onco-gériatrique par les médecinsgénéralistes au cours du suivi en ville des malades âgés atteints de cancerApplicability of the comprehensive geriatric assessment recommendations by generalpractitioners during the follow-up of elderly cancer outpatientsPh. Caillet, M.-A. Cariot, E. Paillaud

Actualités NewsL’image du JOG - Un « eczéma » du mamelon pas ordinaireL. Rotenberg

9ème Congrès International Francophone de Gériatrie et Gérontologie (CIFGG)30èmes Journées Annuelles de la Société Française de Gériatrie et GérontologieO. Guérin

Billet d’humeur Personal viewL’Oncogériatrie, un partage des compétences : position du Docteur Michel Hery, co-président du congrès Monaco Age Oncologie (MAO)Interview du Docteur Michel Hery par Dimitri Verza

Agenda Calendar - Petites annonces Job ads

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Comité de lecture 2010 L. Balardy (Toulouse) - M. Benoit (Nice) - V. Brunel (Marseille) - E. Carola (Senlis) - E. Castel-Kremer (Lyon) - A.-L. Couderc (Nice) - T. Cudennec(Boulogne-Billancourt) - L. de Decker (Nantes) - B. de Wazieres (Nimes) - C. Gaudin (Toulouse) - V. Girre (Paris) - O. Guérin (Nice) - N. Magné(Saint-Priest en Jarez) - L. Mourey (Toulouse) - E. Mulin (Nice) - F. Retorrnaz (Marseille) - F. Rousseau (Marseille) - P. Soubeyran (Bordeaux)- J.-P. Spano (Paris) - C. Terret (Lyon) - G. Zulian (Genévé-Suisse)

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010245

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L’inhibition de la biosynthèse des androgènes.Une nouvelle approche thérapeutique dans lecancer de la prostate résistant à la castration.Androgen Biosynthesis Inhibition (ABI): A new therapeutic approach in Castration-Resistant Prostate Cancer (CRPC)

Ph. Beuzeboca, A. Toledanob, M. Zerbibc

a. Département d’oncologie médicale, Institut Curie, 26 rue d’Ulm, 75005 Paris, France.b. Hôpital Américain de Paris, 63 boulevard Victor Hugo, 92200 Neuilly-sur-Seine, France.c. Hôpital Cochin, 27 rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France.

RésuméL’apparition de la résistance à la castration est un événement majeur de l’évolution du cancer de la prostate, et les

armes thérapeutiques dont nous disposons à ce stade, et qui reposent sur la chimiothérapie, ne permettent d’es-pérer qu’une survie limitée.

La castration bloque la production des androgènes testiculaires mais la prolifération tumorale reste dépendantedes androgènes d’origine périphérique, et tout particulièrement des androgènes d’origine intratumorale, comme l’ontmontré des travaux récents.

L’acétate d’abiratérone est un inhibiteur puissant, sélectif et irréversible de l’activité de CYP17 α-hydroxylase etC17-20-lyase qui sont des étapes clés de la biosynthèse des androgènes. Il permet ainsi un blocage de la biosyn-thèse des androgènes au niveau des surrénales, ainsi que dans la tumeur elle-même.

Les résultats de l’étude de phase III présentée lors du congrès de l’ESMO le 11 octobre dernier à Milan montrentque l’acétate d’abiratérone entraîne une amélioration significative de la survie globale versus placebo chez lespatients métastatiques résistants à la castration, après échec d’une ou deux lignes de chimiothérapie (dont une avecdocétaxel), et ce avec une très bonne tolérance.Mots clés : Inhibiteurs de la biosynthèse des androgènes, cancer de la prostate résistant à la castration, acétated'abiratérone, docétaxel.

AbstractCastration resistance is a major event of prostate cancer evolution. At this stage, treatment is primarily based on

systemic chemotherapy leading to limited survival improvement.Castration induces testicular androgens blockade but tumoral proliferation continues to be dependant of periphe-

ral androgens and primarily intratumoral androgens as recently demonstrated.Abiraterone acetate is a potent, selective and irreversible inhibition of CYP17 α-hydroxylase and C17-20-lyase acti-

vity, these two enzymes being key steps of androgen biosynthesis. Then, it allows androgen biosynthesis blockadeat the adrenal gland and tumor levels.

Phase III trial data released on October 11, 2010, during last ESMO congress in Milan, demonstrated that Abirateroneacetate induces statistically significant overall survival improvement compared to placebo in patients with metasta-tic castration-resistant prostate cancer after failure of one or two previous chemotherapy regimen including one withdocetaxel. These results were obtained with a very good safety profile.Keywords: Androgen Biosynthesis Inhibition (ABI), Castration-Resistant Prostate Cancer (CRPC), Abiraterone Acetate(AA), Docetaxel.

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Du fondamental au développementclinique

Il a fallu plus d’une quinzaine d’années pour confirmerl’intérêt thérapeutique du blocage du cytochrome P450(17) alpha (17 alpha-hydroxylase/C17-20 lyase ou CYP17),une enzyme clé de la biosynthèse des androgènes 1. Ellecatalyse deux réactions importantes impliquant la17 α-hydroxylase et la C17-20-lyase 2.

L’acétate d’abiratérone (AA), développé initiale-ment en Angleterre à l’Institute of Cancer Research,s’est révélé être un inhibiteur puissant, sélectif et irré-versible de CYP17 3.

AA (figure 1, A) inhibe la17 α-hydroxylase, ce quientraîne une diminution ducortisol et une augmentationsignificative des hormonesadrénocorticotropes (ACTH)et la biosynthèse de stéroïdes.Les niveaux de désoxycorti-costérone et corticostéroneaugmentent de 10 et 40 foisrespectivement. On observeaussi une augmentation(jusqu’à 4 fois) du taux de11-désoxycortisol, mais aussidu fait de l’inhibition complètede la C17-20-lyase une sup-pression significative de ladéhydroépiandrosténedione(DHEA), de l’androsténedioneet de la testostérone.

On pouvait craindre que AAn’entraîne une insuffisance sur-rénalienne. Mais la synthèse decorticostérone, un corticosté-roïde plus faible que le corti-sol, est préservée. Il en résulteune élévation de l’ACTH avecun syndrome d’hypersécré-tion de minéralocorticoïdes,caractérisé par une rétentionhydro-sodée, une hypokalié-mie, et une hypertension.

L’utilisation d’une cortico-thérapie ou d’antagonistesdes minéralocorticoïdes sup-prime cette élévation del’ACTH et les signes d’hyper-aldostéronisme (figure 1, B).

De fait, l’addition de dexaméthasone 0,5 mg/j à l’AAentraîne une diminution par 3 du niveau de base de l’ACTH,une diminution conséquente des niveaux de désoxycor-ticostérone jusqu’à un niveau inférieur à la limite de sen-sibilité dans les tests utilisés (<5 ng/dl), et une diminutionimportante par 2 des niveaux de corticostérone. De façonsimilaire, on note une diminution des niveaux de 11-dés-oxycortisol. En aval, la suppression des niveaux de sté-roïdes persiste.

Vu l’implication des androgènes dans le dévelop-pement et la progression du cancer de la prostate,l’équipe du Royal Marsden 4 et d’autres 5 ont vite com-pris l’intérêt clinique potentiel de cette molécule dans

Cancer de la prostate métastatique : nouvelle approche thérapeutique • Metastatic prostate cancer: new therapeutic approach

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Figure 1 : Inhibition de la biosynthèse des androgènes par Abiratérone

Hypokaliémie

Hypertension

Surcharge hydrique

Corticostérone Aldostéronex 10

x 5

x 4 x 2

x 3 < 2 ng/dl

x 40 x 1,5DésoxycorticostéronePrégnénolone

ACTH

Positive drive Feedback négatif

Suppression de rénine

< 1 ng/dl

< 80 pg/dl

17OH-Prégnénolone 11-désoxycortisol Cortisol

CYP 1717α-hydroxylase

DHEA AndrostènedioneTestostérone

Estradiol

CYP 17C17-20-lyase

A

Corticostérone Aldostérone< 5 ng/dl

x 3

x 2 x 2

x 3 < 2 ng/dl

x 2DésoxycorticostéronePrégnénolone

ACTH

< 1 ng/dl

< 80 pg/dl

17OH-Prégnénolone 11-désoxycortisol Cortisol

CYP 1717α-hydroxylase

DHEA AndrostènedioneTestostérone

Estradiol

B

T Abiratérone

T Abiratérone

T Abiratérone

T AbiratéroneCYP 17C17-20-lyase

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le traitement du cancer de la prostate, et des essaisde phase I/II de l’abiratérone ont été initiés 6.

Les premières études d’escalade de doses, qui avaientpour but d’entraîner le maximum de suppression de la syn-thèse de testostérone chez les patients atteints de can-cer de prostate, castrés et non castrés, ont permis de mon-trer qu’une dose répétée de 800 mg/jour pendant 12 jourschez des patients aux fonctions gonadiques intactes per-mettait de baisser la testostéronémie au taux de castra-tion. Néanmoins, ce niveau de suppression androgéniquen’était pas maintenu en raison d’une hypersecrétion com-pensatrice de LH 7.

Parallèlement, les concepts fondamentaux concer-nant la résistance à la castration évoluaient 8, insis-tant sur le fait que la prolifération tumorale restaitdépendante de la signalisation par le récepteur desandrogènes (RA).

Les cellules du cancer de la prostate développent unerésistance à la castration par l’acquisition de modificationsbiologiques incluant une surexpression du RA et unesurexpression des enzymes impliquées dans la synthèsedes androgènes 9 :

• L’émergence de phénotypes hypersensibles par ampli-fication, surexpression ou modulation des RA par d’au-tres voies de signalisation rend ces cellules excessivementsensibles à des taux très bas d’androgènes exogènes.De plus, les anti-androgènes classiques ont des effets ago-nistes en cas de surexpression ou mutations du RA.

• Les cancers de la prostate métastatiques sont aussi capa-bles de maintenir chez des patients castrés des taux d’an-drogènes intra-tumoraux pouvant activer les gènes ciblesdu RA (comme le prouve l’augmentation du PSA). Cettestéroïdogénèse intracrine, à partir d’androgènes surréna-liens mais aussi du cholestérol, permet de contourner lesniveaux faibles d’androgènes circulants. Montgomery etcoll 10 ont montré que les niveaux de testostérone et lestranscripts d’enzymes de la stéroïdogenèse étaient plus éle-vés dans les métastases de patients castrés que dans lescancers de la prostate primaires de patients non castrés.

Les résultats cliniques observés dès les essaisprécoces avec l’acétate d’abiratérone ont confirmétrès vite les espoirs suscités par cette nouvelleapproche thérapeutique 11,12.

La première étude de phase I 2, ayant inclus 21 patientsrésistants à de multiples hormonothérapies, chimio-naïfs,réalisée par paliers de 3 patients avec une escalade dedose (250, 500, 750, 1000 et 2000 mg/j en continu), apermis de choisir la dose de 1000 mg/j pour les essais

thérapeutiques ultérieurs (la montée des stéroïdes enamont atteint un plateau au-dessus de 750 mg). Les prin-cipales toxicités, dues à un syndrome d’excès de miné-ralocorticoides, étaient contrôlées par l’éplérénone, un anta-goniste de récepteur minéralocorticoïde (la spironolactonene doit pas être utilisée car elle peut activer le RA). Desbaisses du PSA de 30 %, 50 % et 90 % ont été obser-vées respectivement dans 66 %, 57 % et 29 % des caspour une durée allant de 69 à 578 jours, associées éga-lement à des améliorations cliniques (douleurs), biolo-giques (PAL, LDH) et des réponses RECIST objectives.

Dans la deuxième étude de phase I 13 utilisant le mêmeschéma d’escalade de doses, les patients pouvaient avoirreçu préalablement du ketoconazole (le kétoconazole estinhibiteur faible de CYP17). Il n’a pas été non plus observéde toxicité limitante.

Une baisse du PSA > 50 % a été observée chez 47 %des patients traités préalablement par kétoconazole et chez64 % des patients n’en ayant pas reçu.

Deux études de phase II ont été réalisées dans lesformes résistantes à la castration pour évaluer l’ef-ficacité de l’acétate d’Abiratérone après échec dudocétaxel.

• Dans l’étude anglaise, rapportée par Reid 14,47 patients ont été traités par 1 000 mg/j d’acétate d’abi-ratérone. Des baisses de PSA > 30 %, > 50 % et > 90 %ont été observées respectivement chez 68 %, 51 % et15 % des patients. Le temps moyen jusqu’à progressionbiologique était de 169 jours (IC 95 % : 113 à 281 jours).Sur les 27 patients qui avaient plus de 5 cellules tumo-rales circulantes (CTC), 11 (41 %) ont présenté une baissede leurs CTC.

• Dans la deuxième étude 15, 58 patients ont aussi ététraités par 1 000 mg/jour associés à 5 mg x 2/j de pred-nisone (47 % avaient reçu du ketoconazole). Une baissedu PSA > 50 % a été confirmée chez 36 % des patients(26 % pour ceux traités par ketoconazole et 45 % pourles autres). Le temps médian jusqu’à progression biolo-gique était de 169 jours (IC 95 %: 82 à 200 jours). Desbaisses des CTC ont aussi été constatées dans 34 % descas (10/29).

Au décours des études de phase II 16, trois pointsimportants doivent être relevés :

• le fait d’être efficace après ketoconazole laisse penserqu’il existe un effet sur la synthèse intracrine d’andro-gènes au niveau des cellules tumorales et pas seulementau niveau surrénalien ;

• l’addition de prednisone réduit l’incidence des toxici-tés liées aux effets minéralocorticoïdes et augmente l’ef-

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Cancer de la prostate métastatique : nouvelle approche thérapeutique • Metastatic prostate cancer: new therapeutic approach

ficacité (pour les patients en progression, le fait de rajou-ter une corticothérapie entraîne des réponses) ;

• le schéma utilisé pour les études de phase III versusplacebo associe abiratérone 1000 mg/jouren une prise à prednisone 5 mg x 2/j.Celles-ci ont pour critère de jugementprincipal une amélioration de la survie glo-bale (figures 2 et 3).

Les résultats de la première étuderandomisée (2:1) de phase III (COU-AA-301) comparant acétate d’abira-térone (797 patients) versus placebo(n = 398) après une chimiothérapie(une à deux lignes dont une à base dedocétaxel) viennent d’être présentésà Milan par JS De Bono lors ducongrès de l’ESMO 17.

Cette étude de phase III, multicentrique,randomisée, en double aveugle, versusplacebo a inclu 1195 patients sur 147 sitesdans 13 pays (Europe, USA, Australie,Canada). La stratification a été établieselon le statut ECOG (0-1 versus 2), lesdouleurs les plus intenses antérieures auxdernières 24 heures (par l’échelle courteBPI : absent [0-3] ; présent [4-10], unechimiothérapie antérieure (1 versus 2), le

type de progression (taux de PSAseulement versus la progressionradiologique avec ou sans pro-gression PSA).

Il a été retrouvé un avantage trèssignificatif (HR =0,646 (0,54-0,77),p <0,0001) en survie globale: 14,8mois (IC 95 %: 14,1-15,4 mois)versus 10,9 mois (IC 95 % :10,2-12,0 mois) (figure 4).

La durée médiane de traitement a été de 8 mois dans lebras abiratérone. Il faut noter que 28,1 % des patients(n = 222) du bras abiratérone étaient encore dans l’étudeau moment de l’analyse versus 13,7 % dans le bras pla-cebo (n = 54).

L’analyse en sous-groupe a montré que le bénéficeconcernait de façon systématique, l’ensemble des sous-groupes (figure 5).

D’autre part, tous les critères de jugement secondairesde l’étude étaient significativement améliorés que ce soit :

• le temps jusqu’à progression PSA : 10,2 mois versus6,6 mois (HR = 0,58, IC 95 %: 0,46-0,73, p < 0,0001) ;

• la survie sans progression : 5,6 mois versus 3,6 mois(HR = 0,67, IC 95 %: 0,59-0,78, p < 0,0001) ;

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Figure 4 : Etude de phase III COU-AA-301. Courbes de survie globale.

COU-AA-301 : L’Acétate d’Abiratéroneaméliore la survie globale des CRPCm

Acétate d’abiratérone : 14,8 mois (IC 95%: 14,1. 15,4)

Placebo : 10,9 mois (IC 95%: 10,2. 12,0)

Nombre de jours depuis la randomisation

Surv

ie (%

)

100

80

60

40

20

00 100 200 300 400 500 600 700

Aprés 1 ligne de chimiothérapie OS : 15,4 mois AA vs 11,5 mois placebo

AA 797 728 631 475 204 25 0

Placebo 398 352 296 180 69 8 1

Figure 2 : Schéma de l’étude COU-AA-301

1195 patients avec

un cancer de la

prostate métastati-

que résistant à la

castration en

échec d’une ou de

deux lignes de

chimiothérapie

(dont au moins une

avec docétaxel)

Acétate d’abiratérone

1000 mg/j

Prednisone 5 mg x 2/j

n = 797

Critères d’efficacité (ITT)

Critère primaire

● Survie globale (25% d’amélioration ; HR = 0,8)Critères secondaires (ITT)

● Temps jusqu’à progression● Survie sans progression● Taux de réponse PSA

Placebo

Prednisone 5 mg x 2/j

n = 398

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Figure 3 : Schéma de l’étude COU-AA-302

1170 patients

avec un cancer

de la prostate

métastatique

résistant

à la castration,

chimio-naifs

Acétate d’abiratérone

1000 mg/j

Prednisone 5 mg x 2/j

n = 780

Placebo

Prednisone 5 mg x 2/j

n = 390

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Cancer de la prostate métastatique : nouvelle approche thérapeutique • Metastatic prostate cancer: new therapeutic approach

• Le taux de réponse biologique (PSA) : 38 % versus10,1 % (p < 0,0001).

La tolérance a été acceptable avec de rares toxicités degrade 3 ou 4 : rétention hydrique : 2,3 %, hypokalié-mie : 3,8 %, troubles hépatiques : 3,5 %, hypertension :1,3 %, désordres cardiaques : 4,1 %. Ces données étaientassez comparables à celles du bras placebo.

Très clairement, l’abiratérone apparaît comme unnouveau tournant dans la prise en charge des can-cers de la prostate résistants à la castration aprèsdocétaxel avec un rapport bénéfice/risque très favo-rable.

Il faudra attendre les données de la deuxième étudede phase III (figure 3) chez des patients métastatiquesrésistants à la castration mais chimio-naïfs (le recru-tement est clos) pour envisager une utilisation à unstade plus précoce. n

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Figure 5 : Bénéfice en survie observé dans tous les sous-groupes

BPI; Brief Pain Inventory, ALK-P, phosphatase alcaline

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Cancer de la prostate métastatique : nouvelle approche thérapeutique • Metastatic prostate cancer: new therapeutic approach

250VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie

Bibliographie :1 Barrie SE, Potter GA, Goddard PM, Haynes BP, Dowsett M, Jarman M. Pharmacologyof novel steroidal inhibitors of cytochrome P450(17) alpha (17 alpha-hydroxylase/C17-20 lyase). J Steroid Biochem Mol Biol 1994; 50(5-6): 267-73.2 Attard G, Reid AH, Yap TA, Raynaud F, Dowsett M, Settatree S, et al. Phase I clinicaltrial of a selective inhibitor of CYP17, abiraterone acetate, confirms that castration-resistant prostate cancer commonly remains hormone driven. J Clin Oncol 2008; 26(28):4563-71.3 Jarman M, Barrie SE, Llera JM. The 16,17-double bond is needed for irreversibleinhibition of human cytochrome p45017alpha by abiraterone (17-(3-pyridyl)androsta-5, 16-dien-3beta-ol) and related steroidal inhibitors. J Med Chem 1998; 41(27):5375-81.4 Attard G, Belldegrun AS, de Bono JS. Selective blockade of androgenic steroid syn-thesis by novel lyase inhibitors as a therapeutic strategy for treating metastatic pros-tate cancer. BJU Int 2005; 96(9): 1241-6.5 Leroux F. Inhibition of p450 17 as a new strategy for the treatment of prostate can-cer. Curr Med Chem 2005; 12(14): 1623-9.6 Madan RA, Arlen PM. Abiraterone. Cougar Biotechnology. IDrugs 2006; 9(1): 49-55.7 O'Donnell A, Judson I, Dowsett M, Raynaud F, Dearnaley D, Mason M, et al. Hormonalimpact of the 17alpha-hydroxylase/C(17,20)-lyase inhibitor abiraterone acetate(CB7630) in patients with prostate cancer. Br J Cancer 2004; 90(12): 2317-25.8 Sher HI, Sawyers CL. Biology of progressive, castration-resistant prostate cancer:directed therapies targeting the androgen-receptor signalling. J Clin Oncol 2005;23(32): 8253-61.9 Stanbrough M, Bubley GJ, Ross K, Golub TR, Rubin MA, Penning TM, et al. Increasedexpression of genes converting adrenal androgens to testosterone in androgen-inde-pendent prostate cancer. Cancer Res 2006; 66(5): 2815-25.

10 Montgomery RB, Mostaghel EA, Vessella R, Hess DL, Kalhorn TF, Higano CS, et al.Maintenance of intratumoral androgens in metastatic prostate cancer: a mechanismfor castration-resistant tumor growth. Cancer Res 2008; 68(11): 4447-54.11 Ang JE, Olmos D, de Bono JS. CYP17 blockade by abiraterone: further evidencefor frequent continued hormone-dependence in castration-resistant prostate cancer.BrJ Cancer 2009; 100(5): 671-5.12 Attard G, Reid AH, Olmos D, de Bono JS. Antitumor activity with CYP17 blockadeindicates that castration-resistant prostate cancer frequently remains hormone dri-ven. Cancer Res 2009; 69 (12): 4937-40.13 Ryan CJ, Smith MR, Fong L, Rosenberg JE, Kantoff P, Raynaud F, et al. Phase I cli-nical trial of the CYP17 inhibitor abiraterone acetate demonstrating clinical activity inpatients with castration-resistant prostate cancer who received prior ketoconazole the-rapy. J Clin Oncol 2010; 28(9): 1481-8.14 Reid AH, Attard G, Danila DC, Oommen NB, Olmos D, Fong PC, et al. Significantand sustained antitumor activity in post-docetaxel, castration-resistant prostate can-cer with the CYP17 inhibitor abiraterone acetate. J Clin Oncol 2010; 28(9): 1489-95.15 Danila DC, Morris MJ, de Bono JS, Ryan CJ, Denmeade SR, Smith MR, et al. PhaseII multicenter study of abiraterone acetate plus prednisone therapy in patients with doce-taxel-treated castration-resistant prostate cancer. J Clin Oncol 2010; 28(9): 1496-501.16 Chen Y, Clegg NJ, Scher HI. Phase II multicenter study of abiraterone acetate plusprednisone therapy in patients with docetaxel-treated castration-resistant prostate can-cer. Anti-androgens and androgen-depleting therapies in prostate cancer: new agentsfor an established target. Lancet Oncol 2009; 10(10): 981-9.17 De Bono JS, Logothetis CJ, Fizazi K, North S, Chu L, Chi KN, et al. On behalf of theCOU-AA-301 investigators. Abiraterone acetate (AA) plus low dose prednisone (P) improvesoverall survival (OS) in patients (PTS) with metastatic castration-resistant prostate can-cer (MCRPC) who have progressed after docetaxel-based chemotherapy (CHEMO): resultsof COU-AA-301, a randomized double-blind placebo-controlled phase III study. 35th

ESMO Congress, Abst LBA5.

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En 2005, en France, plus de 30 % des cancers ontété diagnostiqués chez des sujets âgés de 75 ansou plus 1. Les données issues des registres de can-

cers ont permis de souligner l’insuffisance de traitementdes sujets âgés dans certains domaines de l’oncologie 2.

Dans le cadre du premier appel d’offres de l’INCA en2005 3, concernant la mise en place des UPCOG, notreobjectif principal était d’améliorer la qualité des soinsapportés aux sujets âgés de 75 ans ou plus, atteints d’uncancer digestif, gynécologique (sein et autre localisation)ou d’une hémopathie maligne. Avec les registres spécia-lisés des cancers du département qui sont à l’initiative du

projet, l’originalité était d’évaluer tous les cas diagnosti-qués dans la population de Côte-d’Or, quel que soit le lieude résidence et la filière de soins.

Il était également prévu de développer un programmede recherche clinique et en santé publique, grâce auxregistres des cancers (digestif, sein et hémopathie maligne).Des études ponctuelles concernant en particulier l’ana-lyse des comorbidités, de la qualité de vie et des effetsindésirables des traitements étaient envisagées.

L’Unité Pilote de Coordination en Oncogériatrie (UPCOG)de Côte-d’Or est coordonnée par le Dr Valérie Quipourt –PH Gériatre au CHU de Dijon et par le Pr Pierre Fumoleau –

Unité Pilote de Coordination en OncoGériatriedans le département de la Côte-d’Or : une expérience originalePilot Coordination Unit in Geriatric Oncology in Côte-d’Or: an original experience

V. Quipourta,b, S. Mariliera,b, P. Fumoleaub

a. Unité Pilote de Coordination en Oncogériatrie, Centre Gériatrique de Champmaillot, 2 rue Jules Violle, CHU,21079 Dijon Cedex, France.b. Centre Georges-François Leclerc, 1 rue du Professeur Marion, BP 77980, 21079 Dijon Cedex, France.Correspondance : Valérie Quipourt, Unité Pilote de Coordination en Oncogériatrie, Centre Gériatrique deChampmaillot, CHU, 2 rue Jules Violle, 21079 Dijon Cedex, France. Courriel : [email protected]

RésuméL’originalité de l’Unité Pilote de Coordination en Oncogériatrie (UPCOG) de Côte-d’Or est de considérer toutes les

filières de soins du département, publiques et privées, et de développer un programme de recherche clinique et ensanté publique avec les registres spécialisés des cancers du département. La mise en place de cette unité a per-mis de confirmer une collaboration plus étroite entre les gériatres, les spécialistes d’organes et les médecins géné-ralistes, mais qui n’est pas totalement acquise et nécessite un travail relationnel suivi, entre autres, en participantrégulièrement aux réunions de concertation pluridisciplinaire, lieux d’échanges entre les différents professionnels.Comme les autres UPCOG, notre unité s’est beaucoup investie dans ce projet et souhaiterait poursuivre et déve-lopper ses activités dans le futur.Mots clés : Cancer, sujet âgé, registre des cancers, évaluation gériatrique.

AbstractThe originality of the Pilot Coordination Unit in geriatric oncology in Côte-d’Or is twofold: it includes all oncology

departments, both public and private, and it develops a clinical and public health research program from the Côte-d’Or cancer registers. The development of this unit confirmed the collaboration between geriatricians, organ spe-cialists and general practitioners. However, as this collaboration is not complete, it requires continued contact, inclu-ding multidisciplinary discussion meetings and exchanges between different professionals. Like other French pilotcoordination units in geriatric oncology, this unit has invested a great deal in this project and the authors would liketo continue and expand its activities in the future.Keywords: Cancer, elderly patient, cancer register, geriatric evaluation.

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrieVOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 252

PUPH Oncologue et Directeur du Centre Georges-FrançoisLeclerc de Dijon (Centre de Lutte Contre le CancerRégional).

Mise en place de l’UPCOG de Côte-d’OrOrganisation de l’évaluation oncogériatrique

Depuis décembre 2006, nous avons instauré une consul-tation d’oncogériatrie spécifiquement dédiée aux patientsâgés de 75 ans et plus porteurs d’un cancer, et accessiblesur demande des médecins dans un délai maximum de10 jours. Cette consultation intervient, selon la pathologie,soit dès le diagnostic avant tout traitement, soit après le trai-tement chirurgical, chaque fois qu’il existe une indicationde traitement adjuvant ou en cas de traitement palliatif.L’évaluation concerne toutes les filières de soins du dépar-tement, publiques et privées. Le gériatre est aidé dans sesévaluations par une infirmière dédiée à cette activité.

Concernant les cas résidant à Dijon et son aggloméra-tion, pour le secteur public et libéral, la consultation estréalisée soit dans le centre référent du département : pôlede gérontologie du CHU de Dijon (consultation ou hospi-talisation de jour gériatrique avec une approche multidis-ciplinaire), soit en consultation au Centre Georges-FrançoisLeclerc (CGFL), soit au lit du patient dans le cadre del’Équipe Mobile Oncogériatrique (CHU, CGFL, établisse-ments privés). Pour les trois centres hospitaliers générauxdu département (Beaune, Semur-en-Auxois et Châtillon-sur-Seine, soit 25 % des cas), la consultation oncogéria-trique est assurée sur site par le gériatre du centre réfé-rent en gérontologie le plus proche.

Un questionnaire papier a été conçu en utilisant les dos-siers médicaux des patients et en particulier les comptes

rendus opératoires et les résultats anatomo-pathologiquescouplés à l’entretien, l’examen clinique et les tests géria-triques (tableau 1), puis a été informatisé à l’aide du logi-ciel Capture System.

Au 10 décembre 2010, 575 évaluations oncogériatriques(242 en 2010) ont été réalisées, et 158 suivis (53 en 2010).

Nous présentons les résultats d’une étude rétrospec-tive sur notre activité du 1er janvier 2010 au 30 avril 2010,qui a porté sur 89 évaluations initiales et 9 suivis. Les carac-téristiques des patients sont présentées dans le tableau 2.

Pour les évaluations initiales, la population était à prédo-minance féminine avec un âge moyen de 83 ans. Un avissur le traitement oncologique était principalement demandé.Les localisations néoplasiques étaient dans plus de 25 %des cas mammaires, dans 16 % colo-rectales et dans 9 %pulmonaires. Pour 32,6 %, le statut était métastatique lorsde la consultation. L’impact des comorbidités était impor-tant avec en moyenne 2,1 comorbidités considérées commesévères. Les comorbidités les plus fréquentes étaient :hypertension artérielle, arthrose, dyslipidémie, insuffisancerénale et affections cardiaques (tableau 3).

La stabilisation des comorbidités n’était obtenue quedans 57,3 % des cas. Un syndrome gériatrique étaitdépisté dans plus de 9 cas sur 10. La prise en charge géria-trique était alors principalement nutritionnelle, une adap-tation thérapeutique, une prescription de kinésithérapie ouun soutien social. L’information diagnostique du patientn’était obtenue que dans 57 % des cas.

Les suivis correspondaient surtout à des demandes desuivi plus gériatrique qu’oncologique avec, au final, prin-cipalement des conseils de prise en charge nutritionnelle.Les patients apparaissaient mieux informés lors du suivi

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Tableau 1 : Eléments de l’évaluation gériatrique

Recueil des données lors d’une évaluation oncogériatriqueIdentification du patient Sexe, âge, lieu de résidence

Situation socialeSituation familiale, lieu d’habitation, aides à domicile, APA, régime de protection, profession et niveaud’études

Condition de l’évaluation Motif, médecin et service demandeurs, date, lieu et modalité de l’évaluation

Données oncologiquesLocalisation primitive, histologie, stade TNM 4, présence de métastases, traitement antérieur reçu < 6 mois

Données gériatriquesIndice de karnofsky, antécédents, comorbidités selon Charlson, CIRS-G et pathologies chroniques évo-lutives, dépendance, état nutritionnel (dosage albumine et pré-albumine), évaluations cognitive, thy-mique, motrice, sensorielle et sphinctérienne, évaluation de la douleur, médicaments (nombre, liste)

Données biologiques Taux d’hémoglobine (g/dl), taux de créatinine plasmatique (µmol/l), clairance de la créatinine (ml/mn)selon Cockroft et MDRD

Information du patient Sur le diagnostic, motivation pour un traitementAvis du gériatre sur le traitement oncologique

Médical, chirurgical, radiothérapie, radiochimiothérapie, surveillance sans intervention thérapeutique,soins palliatifs, autre proposition

Proposition d’un Programmede soins personnalisé

Equilibre des comorbidités, détection de syndromes gériatriques, interventions proposées, propositiond’un suivi gériatrique

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010253

(78 % des cas), et il s’agissait de cancer du sein dans plusd’un tiers des cas.

Recherche en OncogériatrieL’UPCOG a aussi une mission de recherche. Nous avons

participé à l’étude Oncodage suite à l’appel d’offre de l’INCAen 2007 et plusieurs travaux ont été réalisés en lien avec lesstructures de recherche: une étude sur la prise en chargeet la survie du cancer colorectal chez le sujet âgé à partirdes données des registres a été publiée en 2007 dansEuropean Journal of cancer 5. Un poster a été accepté aucongrès du GRELL à Lugano en 2009 sur l’incidence et lasurvie des hémopathies malignes chez les patients âgés deplus de 75 ans sur une période de 26 ans, et leur prise encharge thérapeutique au cours des 3 dernières années, enCôte-d’Or à partir des données du registre des hémopa-thies malignes. Les résultats confirment chez ces sujets uneaugmentation de toutes les hémopathies malignes, excep-tées les leucémies aigues, et une insuffisance de traitement.

Un autre travail sur l’influence des comorbidités sur laprise en charge thérapeutique des patients âgés atteintsde cancer colorectal sur base de population a fait l’objetd’une communication orale aux Journées Francophonesd’Hépato-gastro-entérologie et d’Oncologie Digestive(JFHOD), et est en cours de publication dans le Journalof American Geriatrics Society (JAGS) 6. Ce travail mon-tre que la présence de comorbidités n’explique pas l’in-suffisance de prise en charge du sujet âgé.

D’autres projets sont en cours. Une étude rétrospectivesur la prise en charge thérapeutique des patientes âgéesde 75 ans et plus, en comparant celles ayant bénéficiéd’une consultation d’oncogériatrie et les autres, à partirdes données du registre des cancers du sein entre 2007et 2009, est en phase d’analyse statistique. Nous envisa-geons également l’analyse des données de notre baseoncogériatrique avec l’objectif de comparer le traitementoncologique proposé par le gériatre avec celui effective-ment réalisé. Une autre étude rétrospective des facteurspronostiques de la survie chez les patientes âgées de75 ans et plus et atteintes d’un cancer du sein, et des fac-teurs prédictifs de la prise en charge thérapeutique, à par-tir des données du registre des cancers du sein, est pré-vue sur l’année 2011. Enfin, un essai de phase III randomisé,multicentrique (7 centres prévisionnels), évaluant l’effica-cité de la consultation oncogériatrique chez les patientesâgées de 75 ans et plus et atteintes d’un cancer du sein :étude de l’influence sur la qualité de vie, la prise en chargethérapeutique et la survie, va faire l’objet d’un projet librede recherche INCa.

Autres activitésUn groupe de travail régional d’oncogériatrie au sein du

réseau Onco-Bourgogne existe depuis juin 2008. Ses

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Tableau 2 : Caractéristiques des patientsEvaluation initiale

(n = 89)Suivi

(n = 9)N (%) N (%)

SexeHommeFemme

29 (32,6)60 (67,4)

4 (44,4)5 (55,6)

Age< 75 ans75 - 79 ans80 - 84 ans85 - 89 ans≥ 90 ans

9 (10,1)21 (23,6)22 (24,7)24 (27,0)13 (14,6)

1 (11,1)3 (33,3)3 (33,3)1 (11,1)1 (11,2)

Age moyen 83,0 80,6

Type de prise en chargeConsultation CGFLHJ gériatriqueEMG CHUEMG CGFL

36 (40,4)29 (32,6)21 (23,6)

3 (3,4)

8 (88,9)1 (11,1)

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Localisation primitiveSeinColo-rectalPoumonInconnuHémopathiesVessieORLEstomacProstateReinFoieAutres

25 (27,2)15 (16,3)

9 (9,7)7 (7,6)7 (7,6)2 (2,2)2 (2,2)2 (2,2)1 (1,1)1 (1,1)1 (1,1)

20 (21,7)

3 (33,3)1 (11,1)1 (11,1)

01 (11,1)

000

1 (11,1)00

2 (22,2)

MétastasesOuiNon

29 (32,6)60 (67,4)

3 (33,3)6 (66,7)

Type de demandeAvis gériatrique simpleAvis sur traitement oncologique

14 (15,7)75 (84,3)

8 (88,9)1 (11,1)

CIRS-GTotalNombre de catégories ≥ 3 (moyenne)

14,02,1

13,61,9

Information du patientOuiNonInconnu

51 (57,3)20 (22,5)18 (20,2)

7 (77,8)1 (11,1)1 (11,1)

Equilibre des comorbiditésOuiNon

51 (57,3)38 (42,7)

5 (55,6)4 (44,4)

Existence de syndromes gériatriquesOuiNon

81 (91,0)8 (9,0)

8 (88,9)1 (11,1)

Prise en charge gériatrique proposéeModification de traitementPrise en charge nutritionnelleKinésithérapiePrise en charge psychologiquePrise en charge cognitivePrise en charge sociale

45 (50,1)59 (66,3)34 (38,2)24 (27,0)14 (15,7)32 (36,0)

6 (66,7)8 (88,9)3 (33,3)4 (44,4)3 (33,3)3 (33,3)

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missions sont la promotion des projets de recherche etd’études dédiés aux patients âgés atteints de cancer, ladiffusion de référentiels existants pour chaque localisationtumorale avec les spécificités gériatriques, l’organisationde réunions de formation médicale continue pour lesmédecins et les soignants, et le partage de nos expérienceset formations par le biais d’un site internet.

La participation régulière aux RCP d’organe représenteun investissement important mais indispensable pour unemeilleure prise en charge des patients en lien avec les onco-logues, radiothérapeutes et chirurgiens.

L’information des médecins et des soignants est uneautre priorité avec l’organisation de nombreuses réunionset l’élaboration de brochures d’information destinées auxprofessionnels, mais aussi au grand public « Comment mieuxprendre en charge les patients atteints de cancer? » dis-ponibles dans les Espaces Rencontres Informations (ERI).

Au sein de notre mission universitaire, nous intervenonsdans le cadre de la Capacité de Gériatrie (DiplômeInterrégional avec les villes de Dijon, Besançon et Reims).Nous participons également au Diplôme InterrégionalUniversitaire de Lyon intitulé « Gériatrie appliquée à la priseen charge de patients âgés atteints de cancer ». Les per-sonnels paramédicaux sont aussi concernés (Institut de

Formation en Soins Infirmiers). Des formations spécifiquesdestinées aux médecins et soignants ont été réalisées dansle cadre des Régionales de Cancérologie, mais aussi avecle réseau Onco-Bourgogne.

ConclusionLa mise en place de l’UPCOG dans le département de

la Côte-d’Or a permis de développer une collaboration plusétroite entre les gériatres, les spécialistes d’organe et lesmédecins généralistes, avec toutefois une certaine fragi-lité illustrée par l’absence prolongée de la coordinatriceen 2009, qui n’a pas pu être remplacée au niveau d’uneéquipe médicale gériatrique déjà extrêmement limitée,avec ainsi une nette diminution de l’activité clinique maisaussi de recherche au cours de cette même année. L’avenirdevrait être plus serein avec l’implication d’un secondgériatre depuis juin 2010.

Notre équipe comporte de réels atouts : déjà une équipetrès motivée (médecins, infirmière, secrétaire) qui nous apermis de renforcer l’activité clinique, en continuant de par-ticiper très régulièrement aux Réunions de ConcertationPluridisciplinaire, lieux d’échanges, d’autant plus intéres-sants lorsque le patient a préalablement bénéficié d’uneévaluation gériatrique, mais aussi pour que nos collègues

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Tableau 3 : Pathologies chroniques évolutives

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spécialistes n’oublient pas l’intérêt de cette consultation.Ainsi, lorsque nous participons aux RCP, le recrutementdes patients augmente très sensiblement. Peut-être quela diffusion systématique de l’outil de dépistage géria-trique en oncologie (G8), lorsqu’il sera validé, modifiera lerecrutement, mais il est sûr que certains services reste-ront très réticents à son utilisation et à l’évaluation onco-gériatrique, malgré toute la bonne volonté des équipes deterrain. En tout cas, notre activité clinique ne cesse d’aug-menter mais nous pose aussi des problèmes d’organisa-tion avec l’ensemble de nos missions, dont la coordina-tion, la formation et la recherche.

Un autre point fort est la collaboration avec les registresdes cancers du département, bien implantés localementet sur le plan national, avec lesquels nous avons déjàdéveloppé plusieurs travaux communs. D’autres projetssont en cours, avec une valorisation par des publicationssur le plan international.

Ces résultats sont tout à fait encourageants mais ne doi-vent pas nous faire oublier qu’il s’agit d’une activité récente

dont les résultats ne sont pas acquis et qui nécessite uninvestissement permanent. Se pose enfin l’avenir de notreunité au niveau local, régional et national… n

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Bibliographie :1 Belot A, Grosclaude P, Bossard N, et al . Cancer incidence and mortality in Franceover the period 1980-2005. www.invs.sante.fr/surveillance/cancers/estimations_can-cers/default.htm. Rev Epidemiol Sante Publique 2008 ; 56 : 159-75.2 Faivre-Finn C, Bouvier AM, Mitry E, Rassiat E, Clinard F, Faivre J. Chemotherapy forcolon cancer in a well-defined French population: is it under or over-prescribed? AlimentPharmacol Ther 2002 ; 16 : 353-9.3 Mise en place d’une unité pilote de coordination en oncogériatrie dans le départe-ment de la Côte-d’Or. Appel à projet national pour l’émergence d’unités pilotes decoordination en Oncogériatrie (UPCOG). 2005 INCA.4 Sobin L, Wittekind C : TNM atlas. International Union Against Cancer, Wiley-Liss, 1997.5 Faivre J, Lemmens V.E.P.P, Quipourt V, Bouvier AM. Management and survival ofcolorectal cancer in the elderly in population-based study. Eur J Cancer 2007 ; 43 :2279-84.6 Quipourt V, Jooste V, Cottet V, Faivre J, Bouvier AM. Comorbidities alone do not explainthe under – treatment of colorectal cancer. JAGS 2010. Publication en cours.

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»«Dossier thématique • Nutrition en oncogériatrie • Nutrition in oncogeriatrics

Dossier thématique • Nutrition en oncogériatrie • Nutrition in oncogeriatrics

Coordination : S.M. Schneidera, b

a. Pôle digestif, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, CHU de Nice, France.b. Faculté de Médecine, Université de Nice Sophia-Antipolis, France.

VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010257

La Nutrition en oncogériatrie : un élément majeur de l’évaluation et de la prise en charge des maladesNutrition in oncogeriatrics: a major tool for assessing and treating patientsX. Hébuterne

Evaluation de l’état nutritionnel avant décision thérapeutique en oncogériatrieNutritional assessment before therapy in oncogeriatricsF. Diebold, A. Danalache

Prise en charge de la dénutrition en oncogériatrieManagement of undernutrition in oncogeriatricsL. Evesque, S.M. Schneider

La sarcopénie : un nouveau concept en oncologieSarcopenia: a new concept in oncologyG. Zeanandin, S.M. Schneider, X. Hébuterne

Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrieVOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 258

Nutrition en oncogériatrie • Nutrition in oncogeriatrics

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La dénutrition est si communément associée à lamaladie tumorale qu’elle est souvent considéréecomme partie intégrante de l’évolution des cancers,

et donc banalisée. Il est pourtant admis que bon nom-bre de malades cancéreux décèdent de cachexie, et quela dénutrition limite la tolérance et l’efficacité des traite-ments. La prévalence globale de la dénutrition, touscancers confondus, est de l’ordre de 40 %. Elle est lamême qu’il y a 30 ans, et elle est particulièrement impor-tante au cours des cancers digestifs et des cancersORL (figure 1) 1. Chez un malade cancéreux, une pertede poids supérieure à 15 % est constamment associéeà une altération du pronostic, indépendamment de la mala-die tumorale. La dénutrition serait directement respon-sable du décès des malades dans 5 à 25 % des cas 2.

Au cours des dix dernières années, la prévalence ducancer a augmenté alors que la mortalité a diminué.

Les progrès thérapeutiques ont été considérables et,dans certaines situations métastatiques, la médiane desurvie a été multipliée par 3 ou 4. Il est possible d’af-firmer que dans certains cas, une maladie autrefoisconstamment mortelle a été transformée en maladiechronique. Certains malades reçoivent par exempleune chimiothérapie au long cours qui, sans les guérir,permet une stabilisation prolongée de leur cancer. Ainsi,le problème nutritionnel, qui était marginal compte tenudu pronostic effroyable des malades, est passé au pre-mier plan. Par ailleurs, l’âge n’est plus un obstacle autraitement des malades et l’on sait bien que les per-sonnes âgées (PA) présentent des particularités méta-boliques qui augmentent le risque de dénutrition. L’âge,le cancer et l’agression d’une chirurgie, d’une chimio-thérapie et/ou d’une radiothérapie se conjuguent pourdétériorer de manière synergique la situation nutrition-

nelle des malades.Chez un malade cancéreux l’anorexie

est au premier plan, favorisée par destroubles du goût très fréquents, et lastimulation du système pro-opioméla-nocortine par les cytokines, qui inhibela prise alimentaire 3. Dans une enquêterécente réalisée un jour donné chez1023 malades, plus de 50 % affirmaientmanger moins, et autant disaient avoirprésenté une modification du goûtdepuis le début de leur maladie 4. Onsait, notamment depuis les travaux deRoberts et al. 5 et de Rolls et al. 6, queles personnes âgées présentent destroubles spécifiques du contrôle de l’ap-pétit, même en l’absence d’agression.La sarcopénie dont on connaît la pré-

La Nutrition en oncogériatrie : un élémentmajeur de l’évaluation et de la prise encharge des maladesNutrition in oncogeriatrics: a major tool for assessing and treating patients

X. HébuternePôle digestif, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, CHU de Nice, France. Faculté de Médecine, Université de Nice Sophia-Antipolis, France.Correspondance : Xavier Hébuterne, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, Hôpital de l’Archet 2, 151 route de Saint-Antoine, BP 3079, 06202 Nice Cedex 3, France. Tél. : +33 (0)4 92 03 61 68, fax : +33 (0)4 92 03 65 75, courriel : [email protected]

Figure 1 : Prévalence de la dénutrition mesurée « un jour donné »chez 1 903 malades cancéreux. Etude Nutricancer 1

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valence élevée chez la PA a d’importantes consé-quences en cas de cancer, et ceci est rappelé dans unarticle de ce numéro de la revue 7. Par ailleurs, nousavons pu montrer qu’en cas de dénutrition par carenced’apports, la perte pondérale chez une PA portait plusspécifiquement sur la masse maigre, alors qu’elle esthomogène (masse maigre et masse grasse) chez unepersonne plus jeune 8. Ainsi, une perte pondérale équi-valente aura des conséquences fonctionnelles beau-coup plus importantes chez une PA que chez un maladeplus jeune. La dénutrition est également plus difficile àcorriger chez les PA que chez des sujets plus jeunes 9.Enfin, au cours du cancer, la dénutrition est égalementiatrogène, favorisée par la chirurgie, la radiothérapie etla chimiothérapie, mais aussi par les hospitalisationsrépétées des malades, et l’on sait que les PA sont par-ticulièrement sensibles aux stress répétés, médicauxou psychologiques.

Alors que les réunions de concertations pluridiscipli-naires, les consultations d’annonce, les programmespersonnalisés de soins se généralisent, et que per-sonne ne pourrait imaginer aujourd’hui ne pas propo-ser une prise en charge psychologique adaptée et nepas traiter efficacement la douleur des malades, laprise en compte de la dénutrition est encore trop sou-vent absente dans les unités de cancérologie, ou alorstrop tardive et inadaptée.

L’évaluation de l’état nutritionnel doit être systématiqueen oncogériatrie. L’utilisation de marqueurs comme lePerformance Status (PS), pourtant largement diffusé encancérologie, est insuffisant et nous avons pu montrerque plus de 50 % des malades avec un PS à 2 (c’est-à-dire considérés comme aptes à recevoir une chimio-thérapie) étaient dénutris 10. Ainsi, pour une même valeurdu PS, il existe deux catégories de malades : dénutrisou non dénutris. Le cancérologue doit rajouter à sa listed’outils une balance pour peser les malades à chaquevisite et établir une courbe de poids, ainsi qu’une échellevisuelle analogique pour évaluer les ingesta. Cet outil sim-ple et validé 11 permet de se faire une idée suffisammentprécise de ce que mangent nos malades, ce qui per-met de mettre en place rapidement les mesures correc-tives et éviter ainsi un diagnostic tardif de la dénutritiondont les conséquences sont souvent désastreuses.

Dans l’étude Nutricancer 4, moins de 50 % desmalades qui affirmaient manger moins de la moitié deleur ration habituelle avaient reçu des conseils nutrition-nels ou des compléments nutritionnels oraux (figure 2).Ceci peut facilement être expliqué par la rareté des dié-téticiennes dans les unités de cancérologie, alors quepratiquement aucun poste n’a été créé dans le cadredu plan cancer. Dans de nombreuses situations, lasupériorité de la nutrition entérale sur la nutrition paren-

térale est bien démontrée et cette dernière doit être stric-tement réservée aux situations d’insuffisance intestinaleet en cas d’échec de la nutrition entérale 12. Bienqu’elle soit souvent techniquement possible 13, mêmedans des cas où son utilisation était autrefois impen-sable 14, la nutrition entérale est largement sous-employée dans la prise en charge nutritionnelle desmalades cancéreux. Au cours des cancers ORL, lamise en place précoce d’une gastrostomie percutanéeendoscopique, pratique maintenant courante, a révo-lutionné la prise en charge des malades en permettantdes traitements agressifs impossibles il y a quelquesannées 15. Cette expérience devrait servir d’exemplepour les autres cancers et la nutrition entérale devraitêtre plus largement utilisée, notamment en oncogéria-trie, si besoin dans le cadre d’essais cliniques démon-trant son efficacité sur le devenir des malades. Enfin,la nutrition péri-opératoire a fait la preuve de son effi-cacité, et il est maintenant démontré que l’immunonu-trition pré- et péri-opératoire réduit la morbidité desmalades cancéreux opérés 16. On peut se demandercombien de services de chirurgie ont systématisé cegenre d’approche pourtant très efficace.

Devant ce constat, la Société Francophone NutritionClinique et Métabolisme (SFNEP) a décidé d’animer, avecle soutien de la Haute Autorité de Santé (HAS) et del’Institut National du Cancer (INCa), un groupe de tra-vail qui est en train d’élaborer des recommandations depratiques cliniques pour la prise en charge nutritionnelledes malades cancéreux. Ces recommandations quiseront disponibles vers la fin de l’année 2011, permet-tront, grâce à un consensus formalisé d’experts, de fairele point sur les évidences dans le domaine et d’établirun document de référence. Une attention toute parti-

Figure 2 : Type de prise en charge nutritionnelle(Conseils : conseils nutritionnels ; CNO :compléments nutritionnels oraux) proposée à desmalades cancéreux (n = 1 023) non sélectionnésinterrogés « un jour donné », en fonction de leursingesta évalués à l’aide d’une échelle visuelleanalogique (EVA ; 0 : ingesta nuls ; 10 : ingestanormaux). Etude Nutricancer 4

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culière sera donnée à la prise en charge du malade âgéporteur d’un cancer. Il conviendra, bien sûr, de réfléchiraux mesures d’évaluation des retombées de ces docu-ments en matière de prise en charge de la dénutrition.Cependant, chez la PA, il semble possible dès mainte-nant de s’appuyer sur les recommandations de pratiquescliniques de l’HAS, pour la stratégie de prise en chargeen matière de dénutrition protéino-énergétique chez lesujet âgé qui ont été publiées en 2007 (tableau 1). Lebon sens et la simplicité de ces recommandations fontqu’elles sont facilement applicables, notamment chezun malade en cours de traitement pour un cancer.

Mais les mesures pour lutter contre la dénutrition desmalades cancéreux ne doivent pas s’arrêter là.L’élaboration de programmes de recherche cliniqueest indispensable. En particulier, pour convaincre lescancérologues de l’utilité de la nutrition chez leursmalades, il faut des preuves qui, il faut bien le recon-naître, ne sont pas présentes dans tous les domaines.

Il est important de démontrer, comme l’ont par exem-ple fait Ravasco et al. 17, qu’un programme de sou-tien nutritionnel précoce bien conduit permet d’amé-liorer le pronostic et la qualité de vie des malades. Desétudes spécifiques en oncogériatrie doivent voir le jour.Celles-ci devront s’intéresser aux problèmes de prisealimentaire chez les PA au cours des traitements ducancer ; de la sarcopénie avec ses conséquences surla tolérance des traitements et éventuellement sur lamodulation des doses de cytotoxiques en fonction dela masse maigre ; et enfin, bien sûr, aux stratégies deprise en charge précoce de la dénutrition chez cesmalades en évaluant leurs impact sur la tolérance destraitements, la qualité de vie et le coût des soins.

Plus encore que chez un sujet plus jeune, le traite-ment du cancer chez une PA doit s’intégrer dans unedémarche globale qui intègre les soins de support, eten particulier la prise en charge de la dénutrition. n

Tableau 1 : Stratégie de prise en charge nutritionnelle d’une personne âgée qui présente un tube digestiffonctionnel (www.has-sante.fr)

Statut nutritionnel

Appo

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alim

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spon

tané

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Normal DénutritionDénutrition

sévère

Normaux SurveillanceConseils diététiquesAlimentation enrichie

Réévaluation à un mois

Conseils diététiquesAlimentation enrichie et CNO

Réévaluation à 15 jours

Diminués mais supérieurs à la moitié de

l’apport habituel

Conseils diététiquesAlimentation enrichie

Réévaluation à un mois

Conseils diététiquesAlimentation enrichie

Réévaluation à 15 jours, puis en cas d’échec CNO

Conseils diététiquesAlimentation enrichie et CNORéévaluation à une semaine,

puis en cas d’échec NE

Très diminués,inférieurs à la moitié de

l’apport habituel

Conseils diététiquesAlimentation enrichie

Réévaluation à une semaine,puis en cas d’échec CNO

Conseils diététiquesAlimentation enrichie

et CNORéévaluation à une semaine,

puis en cas d’échec NE

Conseils diététiquesAlimentation enrichie

et NE d’embléeRéévaluation à une semaine

CNO : compléments nutritionnels oraux ; NE : nutrition entérale

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Bibliographie :1 Hébuterne X, Lemarié E, Michallet M, Beauvillain de Montreuil C, GoldwasserF. Prévalence de la dénutrition au cours du cancer : une enquête nationale unjour donné. Nutr Clin Metabol 2006 ; 20 : S86. [Résumé]2 Senesse P, Assenat E, Schneider SM, Chargari C, Magné N, Azria D, HébuterneX. Nutritional support during curative treatment of patients with gastrointestinal(GI) cancer : who could benefit ? Cancer Treat Rev 2008 ; 34 : 568-75.3 Laviano A, Meguid M, Rossi-Fanelli F. Cancer anorexia : clinical implications,pathogenesis, and therapeutic strategies. Lancet Oncol 2003 ; 4 : 686-94.4 Hébuterne X, Lemarié E, Michallet M, Beauvillain de Montreuil C, GoldwasserF. Effets des cancers sur l’état nutritionnel et la prise alimentaire : la perceptiondes malades. Nutr Clin Metabol 2007 ; 21 : S39. [Résumé]5 Roberts S, Fuss P, Heyman M, Evans WJ, Tsay R, Rasmussen H, et al. Controlof food intake in older men. JAMA 1994 ; 272 : 1601-6.6 Rolls B, Dimeo K, Shide D. Age-related impairments in the regulation of foodintake. Am J Clin Nutr 1995 ; 62 : 923-31.7 Zeanandin G, Schneider SM, Hébuterne X. La sarcopénie : un nouveau concepten oncologie. JOG J Oncogériatr 2010; 1: 271-6.8 Schneider S, Al-Jaouni R, Pivot X, Bender Braulio V, Rampal P, Hébuterne X.Lack of adaptation to severe malnutrition in elderly patients. Clin Nutr 2002 ; 21:499-504.9 Hébuterne X, Broussard JF, Rampal P. Acute renutrition by cyclic enteral nutri-tion in elderly and younger patients. JAMA 1995 ; 273 : 638-48.

10 Cessot A, Hébuterne X, Coriat R, Durand JP, Mir O, Mateus C, et al. Definingthe clinical condition of cancer patients : it is time to switch from performancestatus to nutritional status (soumis)11 Thibault R, Goujon N, Le Gallic E, Clairand R, Sébille V, Vibert J, Schneider SM,Darmaun D. Use of 10-point analogue scales to estimate dietary intake : a pros-pective study in patients nutritionally at-risk. Clin Nutr 2009 ; 28 : 134-40.12 Zaloga GP. Parenteral nutrition in adult inpatients with functioning gastroin-testinal tracts : assessment of outcomes. Lancet 2006 ; 367 : 1101-11.13 Boulton-Jones JR, Lewis J, Jobling JC, Teahon K. Experience of post-pyloricfeeding in seriously ill patients in clinical practice. Clin Nutr 2004 ; 23: 35-41.14 Séguy D, Berthon C, Micol JB, Darré S, Dalle JH, Neuville S, Bauters F, et al.Enteral feeding and early outcomes of patients undergoing allogeneic stem celltransplantation following myeloablative conditioning. Transplantation 2006 ; 82 :835-9.15 Piquet MA, Ozsahin M, Larpin I, Zouhair A, Coti P, Monney M, et al. Early nutri-tional intervention in oropharyngeal cancer patients undergoing radiotherapy. SupportCare Cancer 2002 ; 10 : 502-4.16 Heys SD, Walker LG, Smith I, Eremin O. Enteral nutritional supplementationwith key nutrients in patients with critical illness and cancer : a meta-analysis ofrandomized controlled clinical trials. Ann Surg 1999 ; 229 : 467-77.17 Ravasco P, Monteiro-Grillo I, Vidal PM, Camilo ME. Dietary counseling improvespatient outcomes : a prospective, randomized, controlled trial in colorectal can-cer patients undergoing radiotherapy. J Clin Oncol 2005 ; 23 : 1431-8.

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IntroductionLa dénutrition est fréquente chez la personne âgée

(PA). Sa prévalence est de 5 à 10 % à domicile, 15 à18 % en institution et peut atteindre 50 à 60 % à l’hô-pital 1. Chez les patients hospitalisés pour un cancer,environ 40 % sont à risque de dénutrition quand ils nesont pas déjà dénutris 2. Une étude a mis en évidenceun état nutritionnel altéré chez 66 % des personnesâgées atteintes d’un cancer ; les critères étant un MNA< 24 et un taux d’albumine < 35 g/L 3. Elle est de manièregénérale associée à une augmentation de la mortalité,de la durée de l’hospitalisation, des infections nosoco-miales et d’une perte de l’autonomie 1.

En cancérologie, il s’agit d’un des principaux facteurspéjoratifs pour la survie 3,4. En outre, elle diminue latolérance à la chimiothérapie, augmente le délai entreles cures, diminue le statut immunitaire et, par là-même,la résistance aux infections 5. Le statut nutritionnel est

un facteur prédictif de la mortalité à long terme dansles cancers du poumon, non à petites cellules, et trai-tés par lobectomie 6.

Les causes de dénutrition sont multiples, à la foisliées à la maladie cancéreuse elle-même mais aussi auxcomorbidités associées (insuffisances cardiaque, res-piratoire, rénale, hépatique, démences, troubles bucco-dentaires et de la déglutition…), ainsi qu’aux facteurspsycho-socio-environnementaux.

L’évaluation gériatrique standardisée (EGS) est une par-tie essentielle du bilan du cancer de la PA. Elle permetde dépister les comorbidités, d’aider à la décision thé-rapeutique et de proposer une prise en charge géria-trique globale. Son efficacité sur la survie et la toléranceaux traitements a été démontrée dans de nombreusesétudes 1,5,7. Cette évaluation est multidisciplinaire maispeut être longue et délicate selon les patients.

Le bilan nutritionnel est une partie importante de cette

Evaluation de l’état nutritionnel avantdécision thérapeutique en oncogériatrieNutritional assessment before therapy in oncogeriatrics

F. Diebold, A. DanalacheCourt-séjour gériatrique, Centre Hospitalier de Sedan, France.Correspondance : Frédéric Diebold, Service de Court séjour gériatrique, Centre Hospitalier de Sedan, 2 avenue du Général Margueritte, 08200 Sedan, France. Courriel : [email protected]

RésuméLa dénutrition est fréquente chez la personne âgée. Ses conséquences sont maintenant bien connues et

son dépistage ainsi que sa prise en charge tendent à se développer. En oncogériatrie, elle est un des princi-paux facteurs pronostiques, tant pour la tolérance au traitement que pour la survie. Lors de l’évaluation géria-trique standardisée (EGS), l’outil le plus souvent proposé pour son dépistage est le MNA.

Nous proposons, à partir des données récentes de la littérature, un bilan nutritionnel plus complet, prenantà la fois en compte les critères cliniques, biologiques, et des outils d’évaluation tel que le GNRI ou le MNA,afin d’aider au mieux les oncologues pour la décision thérapeutique, ainsi que pour adapter la prise en chargenutritionnelle.Mots clés : Dénutrition, cancer, personne âgée, facteurs pronostiques, évaluation gériatrique.

AbstractUndernutrition is frequent in the elderly. The consequences are now well known. Screening as well as care

tend to progress. In oncogeriatrics, undernutrition is one of the main prognostic factors for survival and res-ponse to treatment. A comprehensive geriatric assessment usually uses MNA as a screening tool for under-nutrition.

This review, based on recent studies, proposes a nutritional assessment portfolio including clinical parame-ters, biological parameters, and tools such as GNRI and MNA, in order to help oncologists adapt therapy aswell as optimise nutritional intervention.Keywords: Undernutrition, cancer, elderly, prognostic factors, geriatric assessment.

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évaluation mais est encore loin d’être standardisé(tableau 1). Les différents modèles d’EGS ne propo-sent souvent que le MNA pour le dépistage. Pourtant,ainsi que l’a montré une étude récente 3, il n’existe pasencore de facteur nutritionnel unique à la fois prédictifde la mortalité, de la tolérance au traitement et durisque de dépendance secondaire. C’est un ensemblede critères à la fois anthropométriques, biologiques etd’outils de dépistage qui permettent de préciser l’étatnutritionnel et d’optimiser sa prise en charge tout aulong du traitement.

A partir des dernières données de la littérature, nousproposons un bilan nutritionnel plus complet, plus longà réaliser, mais au vu de l’importance de l’état nutri-tionnel sur le devenir, nous le croyons nécessaire pourune prise en charge optimale.

Bilan cliniqueLes paramètres cliniques sont plus pertinents que les

paramètres biologiques et ont démontré un meilleurimpact sur le pronostic 8.

PoidsCritère essentiel, il doit être recueilli à l’admission.

Mais plus que le poids, c’est surtout la perte de poidsqui est importante et doit alerter. Si le poids antérieurn’est pas toujours connu, il est possible de prendre pourréférence le poids idéal théorique obtenu à partir de laformule de Lorentz :

• Homme : poids idéal = taille -100- [(taille – 150)/4] ;• Femme: poids idéal = taille - 100 - [(taille – 150)/2,5].Une perte de poids ≥ 5 % en un mois ou ≥ 10 % en

6 mois caractérise une dénutrition modérée. Une pertede poids ≥ 10 % en 1 mois ou 15 % en 6 mois carac-térise une dénutrition sévère 1.

La perte de poids est fréquente chez le patient âgéatteint d’un cancer. Elle entraîne une augmentation dela mortalité et est associée à une baisse de la réponseà la chimiothérapie (traitement plus court pouvant expli-quer en partie la plus faible réponse), de la qualité devie et de la survie globale 9,10. C’est un facteur de mau-vais pronostic chez les patients recevant une chimio-thérapie, surtout dans les cancers digestifs et pulmo-naires 1,11. Dans les cancers pulmonaires, une pertede poids supérieure à 11 % au moment du diagnosticest associée à une baisse de la survie globale 3.

TailleDe préférence mesurée en position verticale, elle peut

également être prédite à partir de la hauteur talongenou, par l’équation de Chumlea et al, lorsque lepatient ne peut tenir debout. Elle est indispensablepour calculer l’Indice de Masse Corporelle (IMC).

Indice de masse corporelleC’est le rapport poids/(taille)2. Il est corrélé à la masse

maigre, et sa diminution est prédictive de la morbi-mor-talité hospitalière. Une valeur inférieure à 21 signe unedénutrition, et une valeur inférieure à 18 une dénutri-tion sévère 1. Cependant, ce n’est pas un marqueurprécoce de dénutrition, et il peut encore être normalquand le MNA dépistera, lui, une dénutrition. De mêmechez l’obèse sarcopénique, l’IMC ne dépistera pas unediminution de la masse maigre et musculaire.

Périmètres et plis cutanésDans les études, c’est principalement le pli cutané

tricipital qui est proposé pour identifier la dénutrition 3.Il doit être mesuré en même temps que le plis cutanébicipital 4.

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Tableau 1 : Différents éléments du bilannutritionnel. D’après 1,3

Paramètres :Valeurs seuils pour le diagnos-tic de dénutrition

Clinique- Perte de poids

- Indice de masse corporelle

- Périmètre tricipital- Circonférence du mollet

≥ 5 % en un mois ou ≥ 10 %en 6 mois : modérée≥ 10 % en 1 mois ou 15 % en6 mois : sévère

< 21 : modérée< 18 : sévère

Biologique- Albuminémie

- Transthyrétinémie

- Protéine C-réactive- Leptine- Hémoglobine- IL-6

< 35 g/L : modérée< 30 g/L : sévère

< 200 mg/L : modérée< 100 mg/L : sévère

Mini Nutritional Assessment

< 17 : dénutrition> 17 et ≤ 23,5: risque de dénu-trition≥ 24 : absence de dénutrition

Geriatric Nutritional Risk Index

GNRI < 82 : risque majeur82 ≤ GNRI ≤ 92: risque modéré92 ≤ GNRI ≤ 98 : risque faibleGNRI > 98 : absence de risque

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La circonférence du mollet est un marqueur de lamasse musculaire. Elle est un reflet du handicap et estcorrélée aux taux d’albumine plasmatique ainsi qu’auMNA dont elle est un des critères, et peut représenterun paramètre valide de dénutrition 12.

AutresLe reste du bilan doit également comprendre un exa-

men bucco-dentaire et la recherche de troubles de ladéglutition 3,13.

Enfin, un bilan des ingesta est indispensable. Au coursde ce bilan la recherche de l’autonomie du patient visà vis de son alimentation est importante à rechercheret peut s’appuyer sur l’ADL et/ou l’IADL. L’ADL (Activitiesof Daily Living), ou Echelle de Katz, prend en comptel’autonomie à la toilette, la continence, l’habillage, la loco-motion et l’alimentation. C’est un facteur prédictif dela mortalité à un an 6. L’IADL (Instrumental Activities ofDaily Living) prend, elle, en compte la capacité à utili-ser le téléphone, prendre ses médicaments, utiliser unmoyen de transport, gérer son argent, faire ses courseset préparer un repas. Un bon score IADL est associéà un meilleur pronostic 14. Ces deux échelles sont sou-vent proposées dans l’EGS pour l’évaluation du statutfonctionnel de la personne âgée

Bilan biologiqueDe nombreux paramètres ont été étudiés et mesurés,

mais peu d’entre eux ont fait leur preuve comme fac-teur pronostique pertinent. Parmi eux, l’albuminémie etle taux d’hémoglobine sont les deux plus importants 15.

AlbuminémieS’il s’agit du marqueur nutritionnel le plus ancien et

le plus utilisé, il reste très décrié comme marqueurnutritionnel pur, car très variable selon les situations,notamment inflammatoires. Sa demi-vie est de 21 jourset un taux inférieur à 35 g/L peut faire évoquer une dénu-trition. C’est plus un marqueur du risque de morbi-mor-talité 1.

La diminution de l’albumine plasmatique entraîne unediminution des doses de chimiothérapies délivrées auxorganes cibles, et augmente la toxicité. De tous les para-mètres cliniques et biologiques étudiés, c’est le prin-cipal facteur pronostic d’événements infectieux, noninfectieux et de mortalité dans les 30 jours suivant uneintervention chirurgicale 8, et un facteur de risque indé-pendant de mortalité 2,12,15,16.

Dans une étude portant sur 54 patients suivis pourune hémopathie (âge moyen 86 ± 6 ans), les trois fac-teurs prédictifs de la mortalité, en analyse univariée,étaient : albumine plasmatique < 30 g/L, échelle IADL< 3 et échelle ADL > 5. Etait également retrouvée une

perte de poids > 3 kg dans les 3 mois (p = 0,01). Enanalyse multivariée, seule l’albuminémie était proche duseuil de significativité 18. Enfin, il a été montré qu’unecombinaison des taux d’albuminémie, d’interleukine-6 et de CRP pouvait être prédictive de la mortalité àtrois et sept ans 15.

TransthyrétinémieSon taux varie également en fonction de l’état inflam-

matoire. Sa demi-vie est plus courte et elle serait unmarqueur de la dénutrition aigüe ou chronique surtouten l’absence d’inflammation.

Les valeurs proposées sont < 200 mg/L en cas dedénutrition modérée et < 100 mg/L pour une dénutri-tion sévère 4.

Protéine C-réactiveC’est une des protéines de l’inflammation. Si elle n’est

pas un des marqueurs de la dénutrition, elle doit être priseen compte, car corrélée à la perte de poids 9 et à la réponseà la radio chimiothérapie 4. De plus, l’albuminémie doitêtre analysée en regard de l’état inflammatoire.

LeptinémieLe taux plasmatique de leptine est corrélé à la masse

grasse. Un taux bas de leptine est un facteur de mau-vais pronostic dans les cancers pulmonaires 3. Dans uneétude portant sur 192 patients âgés (médiane 85 ± 7 ans),le taux de leptine était le seul facteur biologique pronos-tique corrélé au statut nutritionnel défini par l’IMC et lepli cutané tricipital. Les valeurs seuils étaient de 4 ng/mLpour l’homme et de 6,48 ng/mL pour la femme 3.

HémoglobineL’anémie entraîne une augmentation de la fatigue

(facteur de dépendance) et aggrave la toxicité des chi-miothérapies par hémoconcentration 7. Elle est corré-lée au déclin fonctionnel et à la mortalité 15, et le plussouvent combinée à d’autres paramètres biologiques.

CytokinesSi l’interleukine-1, l’interleukine-6, le TNF-αet l’IFN-γsont

souvent citées dans les études 11, c’est sur l’interleukine-6 que nous avons retrouvé le plus de données commefacteur pronostique. Cette cytokine pro-inflammatoirejoue, avec l’interleukine-1 et le TNF-α, un rôle dans l’ano-rexie. Comme la CRP, elle est un facteur pronostique signi-ficatif pour le déclin fonctionnel 12 et la survie 9. En post-opératoire, les personnes âgées avec un IMC bas ont untaux d’interleukine-6 augmenté, suivi d’une augmenta-tion de la réaction inflammatoire et d’une aggravation dela perte de poids. A contrario, en cas de statut nutrition-nel correct, la réaction immunitaire reste stable 3. Dans

Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrieVOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 264

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une étude sur les cancers pulmonaires, le pronostic étaitlié à un taux élevé d’interleukine-6, un taux bas d’IFN-γ,un âge avancé et le nombre de métastases 3.

Protéine vectrice du rétinolNous avons retrouvé une étude dans laquelle a RBP

ou Retinol Binding Protein est corrélée aux scores duMNA et du NRS dans le dépistage de la dénutrition 8.Cette protéine est synthétisée par le foie et de demi-vie très courte. Mais, dans l’état actuel, il s’agit plusd’un outil de recherche que de diagnostic courant dela dénutrition.

Outils d’évaluation nutritionnelleMNA

Le Mini Nutritional Assessment a été développé parGuigoz et Vellas en 1991 pour l’évaluation du risquede dénutrition de la personne âgée. C’est l’échelled’évaluation la plus utilisée dans la littérature 3,5,9,17-20,et une de celles recommandées par la société euro-péenne de nutrition clinique et métabolisme (ESPEN)pour le dépistage de la dénutrition.

Les scores sont :• < 17 : dénutrition ;• > 17 et ≤ 23,5 : risque de dénutrition ;• ≥ 24 : absence de dénutrition.Il est corrélé à la perte de poids et permet le dépis-

tage de la dénutrition lorsque l’IMC et l’albumine sontencore normales 13. Dans le dépistage de la dénutri-tion, sa sensibilité est de 96 %, sa spécificité de 98 %et sa valeur prédictive positive de 97 % 4. Il est plussensible que l’albuminémie dans le dépistage des per-sonnes à risque de dénutrition et prédictif de la mor-talité à trois mois (8 % pour les PA classées à risqueet 33 % si dénutries) et à un an (48 % si MNA < 17,24 % si le score est entre 17 et 23,5) 1. C’est aussi unfacteur prédictif de fragilité, de morbi-mortalité et dustatut fonctionnel. Il est également en rapport avec unmauvais état bucco-dentaire 13.

Dans la plupart des EGS, c’est l’échelle recomman-dée pour le dépistage de la dénutrition, par entre autresla SIOG, dans le bilan d’évaluation du cancer de la pros-tate 20. Chez une série de patients âgés suivis pour uncancer, le risque de décès à six mois était de 7,4 %pour un MNA ≥ 24 et de 34 % pour un MNA ≤ 17 quelque soit le type de cancer. Dans une autre étude de202 patients âgés de plus de 70 ans, et pour qui unechimiothérapie était proposée, un MNA < 24 était asso-cié à une moins bonne survie et à une diminution descycles de chimiothérapie 19.

Les limites du MNA sont : une durée de remplissagequi peut être longue, l’impossibilité de renseigner cer-tains items en cas de confusion, d’aphasie ou de

démence quand l’entourage n’est pas présent et quel’histoire clinique est difficile à reconstituer. Il existe uneversion courte : le MNA-SF. Un score ≤ 11 indique unepossibilité de malnutrition et doit être alors être com-plété par les 12 questions restantes du MNA. Dansnotre bibliographie, c’est toujours le MNA dans sa ver-sion longue qui est utilisé. Une nouvelle version du MNA-SF permet de prendre en compte le périmètre du mol-let en cas d’impossibilité de calculer l’IMC et de selimiter à la version courte ; elle est en cours de valida-tion 21.

GNRILe Geriatric Nutritional Risk Index a été adapté à par-

tir du NRI en utilisant le poids idéal obtenu par la for-mule de Lorentz 22.

GNRI = [1,489 x albuminémie (g/l)] + [41,7 x poidsactuel/poids idéal théorique].

Les valeurs seuil retenues sont :• GNRI < 82 : risque majeur ;• 82 ≤ GNRI ≤ 92 : risque modéré ;• 92 ≤ GNRI ≤ 98 : risque faible ;• GNRI > 98 : absence de risque.Sa valeur pronostique sur le risque de mortalité a été

confirmée. Dans une enquête de prévalence du RES-CLAN de Champagne-Ardenne de 2006 (donnéesfournies par le Pr E. Bertin et en cours de publication),pour un GNRI < 82, l’OR était pour les escarres de 3,92et pour les infections nosocomiales de 1,77 dans unepopulation de 857 personnes âgées de plus de 70 ans.

AutresLa mesure de la composition corporelle est souvent

évoquée dans les études, mais nous n’avons pasretrouvé de données validant son intérêt, tant commefacteur pronostique que comme facteur modulateur destraitements.

ConclusionDans les différents modèles d’EGS proposés, la dénu-

trition est le plus souvent dépistée à partir du seul MNA.Si son intérêt n’est plus à démontrer, le bilan nutrition-nel ne peut se limiter à ce seul paramètre, mais doitprendre en compte un ensemble de critères cliniquesbiologique et échelles d’évaluation. Le bilan des ingesta,la perte de poids, l’IMC, la circonférence du mollet, l’étatbucco-dentaire, un éventuel trouble de la déglutition,un bilan biologique comprenant l’albuminémie, la CRP,le taux d’hémoglobine, peut-être la leptine et l’interleu-kine-6, doivent figurer dans l’évaluation nutritionnelle,couplés au MNA et au GNRI. Ces critères semblent,aujourd’hui, les plus utiles et les plus pertinents dansla prise en charge du patient âgé cancéreux.

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Ce bilan doit être adapté à l’état général du patient,aux objectifs, au temps disponible et aux possibilitésde chaque équipe. Il reste également à déterminer la

bonne combinaison pronostique en termes d’efficacitéthérapeutique et de survie, ainsi qu’à évaluer l’intérêtde la mesure de la composition corporelle. n

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IntroductionDans le domaine de l’oncogériatrie, la prise en charge

de la dénutrition devrait permettre d’augmenter la rationénergétique des patients, et par là-même leurs para-mètres nutritionnels, afin d’envisager une diminution de

la morbidité liée aux traitements ainsi qu’une meilleurequalité de vie. Toutefois, les modalités de cette priseen charge doivent être étroitement modulées en fonc-tion du type de patient et du type de pathologie néo-plasique sous-jacente.

Prise en charge de la dénutrition enoncogériatrieManagement of undernutrition in oncogeriatrics

L. Evesquea, b, S.M. Schneidera, b

a. Pôle digestif, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, CHU de Nice, France.b. Faculté de Médecine, Université de Nice Sophia-Antipolis, France.Correspondance : Ludovic Evesque, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, Hôpital de l’Archet2, 151 route de Saint-Antoine, BP 3079, 06202 Nice Cedex 3, France.Tél. : +33 (0)4 92 03 61 68, fax : +33 (0)4 92 03 92 31, courriel : [email protected]

RésuméLe dépistage systématique de la dénutrition nécessite, par la suite, de pouvoir prodiguer une prise en charge

nutritionnelle adaptée aux besoins de chaque patient. Pour ce faire, une évaluation de la situation en milieuspécialisé permettra de pouvoir envisager un projet de soins personnalisé pour chaque patient. Dans tousles cas, un conseil nutritionnel semble indispensable, afin de prévenir ou de traiter une dénutrition sous-jacente.Ce conseil nutritionnel peut être associé à la prescription de compléments nutritionnels oraux en cas de dif-ficulté pour le patient à maintenir des ingesta satisfaisants, sous réserve de la vérification régulière d’unebonne observance thérapeutique. Si ces mesures s’avèrent insuffisantes, une nutrition artificielle par voie enté-rale ou parentérale doit alors être envisagée. Il est cependant important de bien évaluer le rapport bénéfice/risquede ce type de prise en charge car, si elle a démontré un bénéfice clair dans certaines indications comme lasituation périopératoire ou en prévention des toxicités induites par les traitements anticancéreux, elle exposeégalement le patient à des effets secondaires spécifiques. De plus, le bénéfice en termes de qualité de vien’est pas clairement établi, probablement en raison de difficulté méthodologique des essais dans cette situa-tion (hétérogénéité des patients étudiés, difficultés d’ordre éthique). Au final, la prise en charge de ces patientsnécessite une coordination de l’ensemble des acteurs impliqués (nutritionnistes, oncologues, gériatres, chi-rurgiens, diététiciennes) afin de proposer un projet personnalisé au cas par cas.Mots clés : Gériatrie, Cancer, Dénutrition, Prise en charge.

AbstractScreening for undernutrition should be followed by nutritional support tailored for each patient. Dietary advice

is always necessary to prevent or treat an underlying malnutrition. This nutritional counselling may be associatedwith the prescription of oral nutritional supplements if the patient has difficulty maintaining a satisfactory foodintake, provided that proper compliance is checked on a regular basis. If these measures prove to be insufficient,artificial nutrition by enteral or parenteral administration should be considered. However, it is important to assessthe risk/benefit ratio of this type of support because, although clear benefits have been demonstrated in speci-fic indications such as the perioperative situation, or in the prevention of drug-related toxicity, it also exposes thepatient to specific side effects. Moreover, benefits in terms of quality of life have not been clearly established, pro-bably due to methodological difficulties (heterogeneity of the populations studied, ethical difficulties). In conclu-sion, the management of these patients requires the coordination of all professionals involved (nutritionists, onco-logists, geriatricians, surgeons, dieticians) to provide an individualized project on a case-by-case basis.Keywords: Geriatrics, Cancer, Undernutrition, Management.

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ObjectifsDans ses guidelines, l’European Society for Clinical

Nutrition and Metabolism (ESPEN) suggère que lesbesoins énergétiques d’un patient cancéreux sont de30 à 35 kcal/kg/j pour les patients valides, et de 20 à25 kg/j pour les patients alités 1,2. Bien qu’il sembleexister en situation cancéreuse une augmentation dela lipolyse 3, contrastant avec une insulinorésistance4, aucune étude n’a évalué l’intérêt d’une compositionspécifique pour les patients cancéreux L’apport pro-téique nécessaire est par ailleurs de 1,2 à 2 g/kg/j, etne devrait pas être en deçà de 1 g/kg/j 5. La questiondu sujet âgé cancéreux n’est pas spécifiquement éta-blie dans ces recommandations. Toutefois, elles cor-respondent aux besoins établis pour la populationgériatrique, et peuvent par conséquent pleinements’appliquer à ce sous groupe de patients 6.

Stratégies de prise en chargeLa figure 1 présente la stratégie globale de traitement

de la dénutrition, qui ne diffère pas chez le malade âgéet porteur de cancer des autres indications.

Conseils diététiquesLe conseil nutritionnel représente l’ensemble des inter-

ventions éducatives visant à entraîner une augmentationde la quantité et de la qualité des ingesta pour un patient.Il est en pratique délivré par une diététicienne. Une revuesystématique a évalué l’impact du conseil nutritionnel surles paramètres nutritionnels des patients adultes dénu-tris, toutes pathologies confondues. Les auteurs souli-gnent le faible niveau de preuve d’une stratégie basée

sur le conseil nutritionnel seul, sans association à uneprescription de compléments oraux 7. Toutefois, dansle domaine de la cancérologie, Ravasco et al. ont mon-tré, dans une étude randomisée, que l’administration d’unconseil nutritionnel adapté à des patients traités parradiothérapie pour cancer colorectal était suivie d’uneamélioration de la qualité de vie et de la quantité desingesta, ainsi qu’une diminution des effets secondairesà trois mois supérieure par rapport à la prescription decompléments nutritionnels oraux seuls 8. On peut aisé-ment concevoir l’impact positif que pourrait représenterl’usage d’un conseil nutritionnel en oncogériatrie, au seind’une population de patients pouvant présenter descarences d’apport liées à une texture des repas inadap-tée, ou à des difficultés de préparation de ceux-ci parexemple. Le bénéfice d’une intervention nutritionnelle seulesur la qualité et la quantité des ingesta au sein d’une popu-lation de 592 patients de plus de 65 ans non cancéreuxn’a cependant pas pu être établi, mais il s’agissait depatients suivis en milieu hospitalier sur une courte période.L’étude multicentrique française INOGAD actuellementen cours évalue l’intérêt du conseil nutritionnel dans ledomaine spécifique de l’oncogériatrie.

Compléments nutritionnels orauxLes compléments nutritionnels oraux (CNO) peuvent

être prescrits en cas de baisse des ingesta, afin de main-tenir l’équilibre nutritionnel des patients. Leur prescrip-tion est fréquente, et devrait être réalisée au plus tôt.Toutefois, la prescription de CNO ne peut se concevoirque dans le cadre d’un suivi nutritionnel associé. Uneétude réalisée en milieu gériatrique a montré la discor-

dance parfois majeure entrela quantité de complémentsprescrite et celle effectivementprise par le patient 9. Sur29 patients institutionnalisésauxquels étaient prescrits desCNO, seuls neuf d’entre euxrecevaient effectivement letraitement prescrit, et deuxd’entre eux prenaient effecti-vement la totalité du traite-ment. Au total, la quantitéeffectivement prise par lepatient était d’environ 55 % dela quantité prescrite. En can-cérologie, Ovesen et al. ontcomparé pendant cinq mois,avant et en cours de chimio-thérapie, un groupe depatients recevant des CNOet des conseils diététiques

Figure1 : Arbre décisionnel du soin nutritionnel (www.sfnep.org)

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réguliers, à un groupe témoin sans CNO ni conseil dié-tétique systématique 10. Les ingesta énergétiques totauxaugmentaient progressivement et significativement dansle groupe avec conseil diététique, alors qu’ils diminuaientdans le groupe témoin. Le poids diminuait durant les troispremiers mois dans les deux groupes (-1,5 kg en 3 mois)puis augmentait uniquement dans le groupe CNO (+1,5 kgen 2 mois). En pratique, malheureusement, les CNOsont, faute de temps, fréquemment prescrits sans pren-dre en compte la dimension éducative nécessaire, cequi explique sans doute les données discordantes concer-nant l’efficacité des CNO sur la prise pondérale en patho-logie cancéreuse. Ainsi l’analyse des données publiéesdans le domaine faite par Raynard en 2005 montrait queseuls cinq essais randomisés sur huit publiés, représen-tant 349 patients au total, mettaient effectivement en évi-dence un bénéfice à l’adjonction de CNO en termes degain pondéral dans une population de patients cancé-reux 11. Ces essais souffraient néanmoins d’une qua-lité méthodologique médiocre : absence de prise encompte de l’observance, durée d’étude variable, absencede conseils nutritionnels.

Nutrition entéraleLa nutrition entérale (NE) doit être classiquement pro-

posée en cas de troubles de déglutition ou de dyspha-gie haute entravant une prise alimentaire correcte, avecintégrité du tube digestif. Elle peut être réalisée par lebiais d’une sonde nasogastrique ou par l’intermédiaired’une sonde de gastrostomie en cas de nécessité denutrition entérale prolongée (supérieure à trois semaines).Les contre-indications classiques en sont la présencede vomissements mal contrôlés, de troubles cognitifsgênant le bon déroulement de la nutrition, ou de trou-bles de la vigilance. Il s’agit là d’une méthode relative-ment contraignante. En oncogériatrie, ce mode de nutri-tion ne peut s’envisager qu’après avoir clairement évaluéla motivation du patient et de son entourage, ainsi quesa compliance attendue. Une évaluation gériatriquepréalable semble par conséquent indispensable. L’ES-PEN a édité en 2006 des guidelines concernant l’utili-sation de la NE en gériatrie 12. L’effet positif de la NEsur la qualité de vie des patients en gériatrie n’est pasclairement établi. Le faible nombre d’essais publiés, demême que les effets secondaires de la NE que peuventreprésenter les nausées, les diarrhées, et qui sont fré-quemment majorées en situation cancérologique, expli-quent sans doute également cette absence de béné-fice démontré. En termes de durée de vie des patients,le bénéfice n’est, là aussi, pas clairement démontré. Unerevue systématique des essais publiés évaluant la NEpar gastrostomie des patients gériatriques menée parMitchell et al. en 2000 n’a pas mis en évidence de gain

de survie par rapport aux patients contrôles 13. Un âgeavancé ainsi que la présence concomitante d’un can-cer évolutif représentaient les facteurs les plus péjora-tifs en termes de mortalité. Toutefois la faible qualitéméthodologique des cinq essais pris en compte nepermettait pas aux auteurs de conclure de façon défi-nitive. Enfin, l’ESPEN recommande de ne pas entamerde nutrition entérale pour les patients fragiles à haut risquede mortalité. La NE a clairement démontré son intérêtdans certains sous-groupes de patients. Une étuderandomisée a analysé l’impact d’une nutrition périopé-ratoire entérale ou parentérale à l’appréciation de l’in-vestigateur chez des patients (N = 468) devant êtreopérés de cancers digestifs (estomac ou côlon) et pré-sentant une dénutrition initiale. Les patients ayant béné-ficié du support nutritionnel artificiel présentaient moinsde complications post opératoires (18,3 % vs 33,5 %;p = 0,012) (6,0 vs 2,1 %; p = 0,003) 14.

Nutrition parentéraleLa nutrition parentérale (NP) ne doit se concevoir

qu’en cas de contre-indication ou de mauvaise tolé-rance de la NE. Elle présente en effet un risque de com-plications plus élevé que la NE. Globalement, le tauxd’infection sur cathéter veineux central varie selon lesétudes de 6 % à 38 %, selon les conditions de réali-sations de la nutrition parentérale 15. En revanche, iln’a pas été spécifiquement étudié dans la populationgériatrique. La problématique demeure donc la mêmeque pour la NE. Il s’agit, là aussi, d’un moyen de sup-port nutritionnel invasif dont le rapport bénéfice/risqueet les modalités doivent être clairement établis et expli-qués au patient et à son entourage avant de l’initier. Iln’existe pas non plus de données rapportées dans lalittérature concernant la qualité de vie des patientsgériatriques sous NP. La NP a cependant montré unbénéfice en situation péri-opératoire, comme indiquédans le paragraphe précédent 14. Au final, la place dela NP dans l’arsenal thérapeutique des patients enoncogériatrie apparaît donc modeste, bien qu’elle nedoive pas être exclue. En pratique, l’absence de sup-port nutritionnel chez un malade aphagique, quel quesoit le stade d’évolution de sa maladie, est difficile àaccepter par les patients et leur entourage, et cettemodalité de support est, par conséquent malgré, toutfréquemment utilisée.

ImmunonutritionDivers nutriments tels que l’arginine, la glutamine ou

les acides gras oméga-3 ont montré, utilisés seuls ouen association, qu’ils étaient capables de moduler lesparamètres nutritionnels, immunologiques, et inflamma-toires des patients. Dans une méta-analyse de 2419

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patients hospitalisés en soins intensifs ou en post opé-ratoire (après chirurgie carcinologique digestive pour laplupart), Heyland et al. ont mis en évidence une dimi-nution des complications infectieuses (RR = 0,66 ;IC 95 % = 0,54-0,80) et une diminution de la duréed’hospitalisation (-3,33 jours ; IC 95 % = -5,63 à-1,02 jours). Ces effets positifs étaient plus particuliè-rement observés pour le sous-groupe de malades chi-rurgicaux et pour les solutions nutritives ayant un apportélevé en arginine 16. De même, Gianotti et al. ontdémontré dans une étude prospective ayant inclus 305malades devant être opérés d’un cancer digestif, enbon état nutritionnel (IMC moyen à 24), qu’une immu-nonutrition préopératoire (arginine, oméga 3) pendant5 jours sans support nutritionnel post-opératoire, entraî-nait significativement moins de complications infec-tieuses (14 malades vs 31 malades, p < 0,02) et unedurée significativement plus courte d’hospitalisation(12,2 ± 4,1 jours vs 14,0 ± 7,7 jours, p < 0,03) 17. Enrevanche, le bénéfice de l’immunonutrition en situationde dénutrition n’est pas établi 18. L’immunonutrition pour-rait également jouer un rôle bénéfique sur la toxicité destraitements. Ainsi, il a été montré, dans un essai de phaseIII ayant porté sur 86 patients, que l’adjonction par voieorale de glutamine (15 g/j) diminuait de façon signifi-cative (11,9 versus 31,8 %; p = 0,04) l’incidence desneuropathies sévères au cours du traitement par oxa-liplatine (schéma Folfox 4) pour carcinome colorectal,sans altérer la réponse à la chimiothérapie 19. En termesde mortalité, il a enfin été montré qu’une supplémen-tation orale en n-3 chez des patients (N = 60) porteursde cancers à un stade avancé conduisait à une amé-lioration de la survie à un an, de 30 % dans le groupetémoin à 60 % dans le groupe expérimental 20. Cesdonnées concernant l’amélioration de la survie et dela toxicité demeurent toutefois trop isolées pour recom-mander l’usage d’une immunonutrition en dehors d’es-sais cliniques. A l’heure actuelle, la seule indicationvalidée d’une immunonutrition en cancérologie demeuredonc, en situation périopératoire, une chirurgie carci-nologique majeure chez des patients initialement nonsévèrement dénutris. De plus, il n’existe pas de don-nées spécifiques dans le domaine de l’oncogériatrie.

ConclusionLa prise en charge nutritionnelle en oncogériatrie est

une problématique extrêmement fréquente. Cependant,bien qu’un grand nombre de données abordent laquestion de la nutrition en gériatrie ou en cancérolo-gie, il n’existe en revanche que très peu d’essais ayantévalué de front la double problématique oncogéria-trique. De plus, en dehors de certaines situations bienprécises comme la période périopératoire, l’interpré-

tation des données de la littérature dans le domaineest rendue difficile par la grande hétérogénéité despatients analysés, de leur type néoplasique, de leur duréede suivi inégale, et par les problèmes d’ordre éthiquesuscités par la question de la nutrition en fin de vie. Ilapparaît, par conséquent, fondamental de réaliser uneévaluation précise de la situation globale de chaquepatient, qui doit passer par une expertise gériatriqueet oncologique au cas par cas. n

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IntroductionLa prévalence du cancer est croissante dans le monde

et reste en très grande partie liée au vieillissement de lapopulation mondiale. L’oncogériatrie occupe désormaisune place privilégiée dans le paysage de l’oncologiemédico-chirurgicale. Ces dernières années, la rechercheclinique en cancérologie a été animée par un souci per-manent de développer une vision intégrée de l’approchedu patient cancéreux, mais aussi de repérer le plus pré-cocement, dans la démarche diagnostique, les facteurs

cliniques et biologiques de mauvais pronostic. De nom-breuses études ont clairement montré que la dénutritionprotéino-énergétique était très fréquente au décours del’évolution de tout cancer, et qu’elle associait la carenced’apports à une forme particulière appelée cachexiecancéreuse. Cette entité complexe constitue pour lepatient un facteur de mauvais pronostic, et reste indé-pendant des caractéristiques de la tumeur initiale. Lesétudes mécanistiques rapportent cette conséquence àune déplétion quantitative et qualitative de la masse

La sarcopénie : un nouveau concept en oncologieSarcopenia: a new concept in oncology

G. Zeanandina, b, S.M. Schneidera, b, X. Hébuternea, b

a. Pôle digestif, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, CHU de Nice, France.b. Faculté de Médecine, Université de Nice Sophia-Antipolis, France.Correspondance : Gilbert Zeanandin, Service de Gastro-entérologie et Nutrition Clinique, Hôpital del’Archet 2, 151 route de Saint-Antoine, BP 3079, 06202 Nice Cedex 3, France.Tél. : +33 (0)4 92 03 61 68, fax : +33 (0)4 92 03 59 23, courriel : [email protected]

RésuméLe cancer du sujet âgé revêt une forme particulière car les conséquences de la cachexie cancéreuse se gref-

fent sur celles liées au déclin physiologique de la masse et de la fonction musculaires, la sarcopénie. Lesdeux processus se potentialisent, et les effets délétères se traduisent par une augmentation du risque de mor-bidité et de mortalité. Les récentes études ont fait émerger que la toxicité de nombreuses chimiothérapiesétait directement corrélée à la masse musculaire totale résiduelle. Celle-ci peut être estimée par coupe tomo-densitométrique passant au niveau de la troisième vertèbre lombaire. Le calcul des doses des molécules anti-cancéreuses selon la surface corporelle semble dépassé. Dans un proche avenir, il faudra certainement inté-grer la composition corporelle dans la détermination des posologies des chimiothérapies cytotoxiques, etprendre plus activement en charge la sarcopénie en parallèle de la cachexie cancéreuse. L’exercice physiquecontre résistance régulière et la prise en charge d’une dénutrition protéino-énergétique sont les stratégies quiont fait leurs meilleures preuves, mais elles demandent à faire l’objet d’études dans ce domaine.Mots clés : Sarcopénie, cancer, toxicité, chimiothérapie, masse musculaire.

AbstractUndernutrition in the elderly cancer patient is remarkable as it combines the consequences of cancer

cachexia with those of age-related sarcopenia, namely muscle mass and function loss. Both phenomena increasemorbidity and mortality. Recent studies show that the toxicity of chemotherapy is strongly linked to residualand total muscle mass. Muscle mass can be estimated by computed tomography with a lumbar vertebrallandmark (L3). Dose-limiting toxicity according to body surface area seems to be unsuitable in predicting thistoxicity. In the near future, the body composition will probably be included to determine the dose-limiting toxi-city and the active management of sarcopenia will be necessary at the same time as cancer cachexia.Resistance training and adequate protein supplementation are currently the most effective and safe interven-tions available to attenuate or recover some of the loss of muscle mass and strength that accompany ageing,although their effect in this situation needs to be assessed.Keywords: Sarcopenia, cancer, toxicity, chemotherapy, muscle mass.

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musculaire correspondant à la sarcopénie. La sarcopé-nie induite par la néoplasie peut alors se greffer à la sar-copénie liée à l’âge et avoir un effet global négatif sur ledevenir du patient. Le diagnostic de la sarcopénie estdonc une étape primordiale de la prise en charge en onco-gériatrie. Les stratégies visant à limiter la sarcopénierevêtent un intérêt particulier en complément des théra-peutiques conventionnelles pour améliorer le pronosticglobal. Après un rappel sur la définition récente retenuepar les experts pour la sarcopénie, nous aborderons suc-cessivement sa physiopathologie, ses points divergentset communs avec la cachexie cancéreuse, les causesde la déplétion du capital musculaire au décours ducancer, l’impact spécifique de la sarcopénie en oncolo-gie, avant de conclure sur les stratégies interventionnellesthérapeutiques ou préventives dans ce domaine.

Sarcopénie, une entité relativementrécente en médecine mais lourde deconséquences

Le vieillissement est marqué par une profonde modi-fication de la composition corporelle avec un accrois-sement de la masse grasse au détriment de la massemaigre (masse des organes dont masse musculaire,masse osseuse). Cette modification commence enmoyenne dès l’âge de 40 ans, ne s’accompagne pasnécessairement d’une perte de poids, et intéresseessentiellement la masse maigre et plus particulière-ment la masse musculaire. En 1989, Irwin Rosenbergpose les fondements de la sarcopénie en définissantainsi la diminution de la masse musculaire squelettiqueliée à l’âge 1. La prévalence de la sarcopénie est varia-ble dans les études, du fait de critères diagnostiqueset techniques d’évaluation différents. Classiquement,le diagnostic de sarcopénie répond au critère d’unemasse musculaire inférieure à la moyenne moins deuxécarts types des valeurs de ceux d’individus âgés de40 ans. Dans une cohorte américaine de 4449 sujetsde plus de 60 ans, Janssen et al. ont relevé une sar-copénie modérée chez 35 % des personnes âgées etsévère chez 10 % d’entre eux 2. En France, Vellas etson équipe ont décrit, sur une cohorte de femmes deplus de 75 ans, une prévalence de la sarcopénie de9,4 % 3. Le concept de sarcopénie a longtemps souf-fert d’une définition uniquement quantitative avec poursupport la seule diminution de la masse musculaire. En2008, Clark l’a complétée en intégrant les notions deperte de la force musculaire aboutissant à une pertede la fonction musculaire, la dynapénie 4. Un grouped’experts européens a récemment proposé une défi-nition consensuelle de la sarcopénie. La diminution dela masse musculaire n’est plus le primum movens (pré-sarcopénie), mais accompagne soit une diminution de

la force soit une diminution de la performance 5. La sar-copénie est dite sévère dès lors où ces trois paramè-tres sont réunis. Le déclin de la force et des performancesfonctionnelles musculaires sont les facteurs les plus péjo-ratifs car ils sont directement responsables de l’aggra-vation de la morbidité du patient. L’intérêt suscité parla sarcopénie est issu du lien étroit entre perte de lamasse musculaire et diminution de la force musculaired’une part, entre perte de la masse musculaire et dimi-nution des performances fonctionnelles d’autre part.Rapportée naguère comme une entité exclusive ausujet âgé, la sarcopénie peut s’observer dans de nom-breuses situations cliniques où existe une perte demasse musculaire, dont la cachexie. Il en est ainsi despathologies cancéreuses qui peuvent induire, à un cer-tain moment de leur évolution, une perte préférentiellede masse musculaire et s’additionner aux consé-quences délétères du processus physiologique de lasarcopénie liée à l’âge 6.

Etiopathogénie de la sarcopénie, dela dénutrition protéino-énergétiqueet de la cachexie : points de convergence et de divergence

Sarcopénie, dénutrition protéino-énergétique etcachexie sont des états dynamiques et ont pour soclecommun la perte de la masse musculaire 7. Les pro-cessus de sarcopénie et de dénutrition protéino-éner-gétique peuvent survenir en condition physiologique endehors de toute agression métabolique. Toutefois, la pertede masse musculaire découle le plus souvent d’unecondition pathologique : maladie chronique évolutive,dénutrition protéino-énergétique suite à une agressionaigüe ou chronique, cachexie dans la cadre du cancerou d’une insuffisance d’organe. La sarcopénie résultede la conjoncture de plusieurs mécanismes aussi diffé-rents que l’inactivité, la dégénérescence des motoneu-rones innervant les fibres musculaires, l’inflammationsecondaire au vieillissement, la diminution des hor-mones anabolisantes circulantes, la prédisposition géné-tique, et surtout une protéosynthèse musculaire insuf-fisante en regard de la protéolyse physiologique 8. Ladiminution de la protéosynthèse musculaire sans franchealtération de la protéolyse est d’ailleurs la caractéristiquela plus importante de la sarcopénie et la distingue de lacachexie où il existe un hypercatabolisme avec protéo-lyse accrue associée à une protéosynthèse en déclinet à une lipolyse accrue 7,9. Un statut plasmatique encytokines pro-inflammatoires exacerbé, la déplétion enhormones anabolisantes, l’inadéquation des ingestaaux besoins, une insulinorésistance périphérique d’ori-gine inflammatoire sont des mécanismes décrits autantdans la sarcopénie que dans la cachexie. La physiopa-

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thologie très proche de ces deux entités explique aussileurs conséquences communes sur la diminution de laforce et des performances musculaires ainsi que leurcaractère péjoratif sur la morbidité comme la mortalitéde l’individu.

Mécanismes spécifiques de la perte de la masse musculairedans le cancer

L’évolution de tout cancer est marquée, à des degrésdifférents, par une perte de masse musculaire. Chez lapersonne âgée, ce tableau revêt une importance par-ticulière car cette perte pathologique vient se greffer àla perte physiologique du capital musculaire, et les effetsdélétères de l’un et de l’autre se potentialisent. Lesdeux principales causes de déclin musculaire du sujetâgé cancéreux sont, d’une part la perte de l’appétit avecdiminution des ingesta protéiques et énergétiques, d’au-tre part les dommages liés à l’inflammation secondaireà la fois au vieillissement et à la tumeur. L’anorexie dusujet âgé atteint d’un cancer est multifactorielle. Latumeur elle-même, via l’activation de la sécrétion de pep-tides anorexigènes (mélanocortine hypothalamique) etla synthèse accrue de cytokines pro-inflammatoires(tumor necrosing factor de type α), réprime les circuitscentraux de promotion de l’appétit 10. Les moléculesanticancéreuses sont sources de nombreux effets secon-daires digestifs tels nausées, mucite, diarrhée. Le vieil-lissement s’accompagne physiologiquement d’une pertede l’appétit 11. D’autres facteurs comme la dépressionou une plus grande dépendance pour s’alimenter yparticipent aussi. Durant le cancer, l’inflammation est leplus souvent à un stade infraclinique et elle est sous ten-due par une élévation des cytokines pro-inflammatoires12. Elle induit des dommages métaboliques majeurs quivont s’accentuer dans le temps : exacerbation de laprotéolyse au détriment de la protéosynthèse muscu-laire, insulinorésistance musculaire avec une perte dusignal anabolique des nutriments, lipolyse. La baisse dela synthèse des hormones anabolisantes au profit deprotéines inflammatoires, la diminution de l’activité phy-sique, la prévalence croissante des maladies chroniquessont d’autres facteurs qui contribuent à la déplétionmusculaire du patient cancéreux âgé.

Impact de la sarcopénie sur le pronostic du patient et ses conséquences spécifiques en oncologie

La principale répercussion de la sarcopénie est liée àses conséquences sur les performances fonctionnellesmusculaires aboutissant à ce qui a été défini par LindaFried comme le syndrome de fragilité incluant faiblesse

musculaire, lenteur à la marche, inactivité physique,appréciation subjective de fatigue et une perte de poidsrécente 13. Le syndrome de fragilité est corrélé à untrès mauvais pronostic morbide du patient en majorantle risque de chutes, de fractures, de dépendance, eten précipitant l’entrée dans une institution ou en indui-sant des hospitalisations récurrentes. Il aggrave aussila probabilité de mortalité. Les conséquences du syn-drome de fragilité sont liées à une diminution desréserves physiologiques exposant le patient aux nom-breux événements péjoratifs lorsqu’il est confronté àun stress quelconque. Toute agression aigüe ou chro-nique induit un hypercatabolisme qui devient délétèreen cas de réserves protéiques entamées. D’ailleurs, cettedernière situation correspond à celle observée lorsd’une néoplasie évolutive et plus particulièrement chezle sujet âgé. Chez le patient cancéreux, la déplétion quan-titative et qualitative de la masse musculaire a fait l’ob-jet d’études récentes et il a été mis en évidence quece facteur était associé à une diminution des perfor-mances physiques, à une toxicité plus élevée induitepar la chimiothérapie, et enfin à une baisse de la sur-vie sans progression. Dans une étude prospectivemenée chez 55 patientes traitées par capécitabinepour cancer du sein métastasé, Prado et al. ont éva-lué l’influence de la masse musculaire sur la toxicité liéeà la chimiothérapie après un cycle de traitement, ainsique la survie sans récidive 14. La surface musculairea été estimée par coupes tomodensitométriques pas-sant par la troisième vertèbre lombaire (figure 1). Le diag-nostic de sarcopénie a été ainsi retenu chez un quartdes patientes comparativement à des valeurs seuils pré-cédemment validées. Cette prévalence était identiqueautant chez les patientes à indice de masse corporellebas qu’élevé (surpoids ou obésité). Une toxicité induitepar la chimiothérapie a été observée chez la moitié dessarcopéniques contre seulement un quart chez les nonsarcopéniques avec une différence statistique signifi-cative (p = 0,03). Par ailleurs, le délai sans récidive étaitsignificativement plus court chez les sarcopéniquescomparativement aux non sarcopéniques (101,4 jourscontre 173,3 jours, IC95 % = [59,3-142,9] vs [126,1-220,5], p < 0,05). Cette même équipe avait constatédes résultats similaires sur une étude précédenteconduite chez 62 patients porteurs d’un cancer colo-rectal réséqué avec nécessité d’une chimiothérapieadjuvante (5 FluoroUracile = 5 FU) 15. La toxicité avaitété évaluée après le premier cycle de traitement et elleétait significativement liée à la masse musculaire rési-duelle. D’ailleurs, quand la dose totale de 5 FU admi-nistrée (425/m²) était rapportée à la masse maigre, lesposologies variaient du simple au double (12 à 23 mg/kgde masse maigre) sans différence entre les sexes, et il

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était noté une toxicité plus élevée au dessus d’un seuilde 20 mg de 5 FU/kg de masse maigre. Outre l’effetseuil, il ressortait un effet sexe avec une toxicité signi-ficativement plus fréquente chez les femmes. Cettedifférence semblait être expliquée par une proportionplus importante d’individus de sexe féminin au dessusdu seuil toxique de 20 mg de 5 FU/kg de masse mai-gre comparativement au sexe masculin. Il avait préa-lablement été décrit que les obèses sarcopéniquesétaient ceux qui avaient le plus mauvais pronostic ausein d’une cohorte de patients atteints de cancerssolides du tractus digestif ou respiratoire 16. Ce sous-groupe de patients présentait une altération significa-tive des performances physiques (p = 0,009) et untaux de survie quatre fois moindre par rapport auxsujets sans obésité sarcopénique (hazard ratio = 4,2 ;IC95 % = 2,4 – 7,2, p < 0,0001). Très récemment, Antounet al. ont mené chez des patients traités pour cancerdu rein une étude sur le même design que celle dePrado 17. Ils ont montré que le sous-groupe de patientsavec un indice de masse corporelle normal ou bas etune masse musculaire diminuée avait un risque plusélevé de toxicité chimio-induite, et nécessitait des ajus-tements de dose comparativement aux individus avecune masse musculaire conservée (7/15 vs 5/40,p = 0,035). Il est connu depuis longtemps que la tolé-rance à la chimiothérapie est fortement conditionnée

par l’existence d’une dénutrition 18. Toutefois, la rela-tion entre masse maigre et toxicité est une notion trèsrécente dans le domaine de l’oncologie et avait été trèspeu décrite. Aslani et al. se sont intéressés chez31 patients à la toxicité hématologique du cyclophos-phamide, du méthotrexate et du 5 FU, dont les dosesavaient été calculées selon la surface corporelle totale 19.Ils avaient relevé, en analyse multivariée, un risque rela-tif de neutropénie 28 fois plus important en cas demasse maigre inférieure à 89 % de celle considérée pourl’âge et le sexe. Même si toutes ces études concor-dent pour montrer que la masse musculaire est unindice pronostique majeur, l’appréciation de la fonctionmusculaire reste certainement l’élément essentiel. Galeet al. ont répertorié 800 patients autonomes, de plusde 65 ans, qu’ils ont suivi sur une durée de 27 ans 20.Au début de l’étude, chaque patient avait bénéficiéd’une évaluation de la performance musculaire par testcontre-résistance (hand grip test). Le taux de morta-lité, toutes causes confondues, était significativementplus élevé chez les personnes présentant une altéra-tion de la performance fonctionnelle musculaire. Lamême observation était faite pour le taux de mortalitépar cancer, mais seuls les hommes maintenaient cettetendance en analyse multivariée, et il ne semblait pasexister de lien significatif entre circonférence muscu-laire brachiale inférieure abaissée et taux de mortalité.

Stratégies préventives et thérapeutiques de la sarcopéniedans le cadre du cancer

Au vu de ce qui vient d’être évoqué, la prévention dela sarcopénie dans le cancer a pour but de prévenir lasarcopénie primaire liée à l’âge, et la sarcopénie secon-daire induite par la tumeur et des traitements associés.La dernière ne peut se concevoir qu’au prix d’une miseen rémission prolongée ou définitive de la maladie. Dece fait, les moyens d’intervention se limitent à la seulesarcopénie primaire. La sarcopénie est inévitable lorsdu vieillissement et conduit inexorablement à une dimi-nution de la masse et de la force musculaire. A défautd’une prévention efficace, la limitation du déclin mus-culaire et le retardement de l’entrée dans une sarco-pénie symptomatique sont les deux pistes préventivespossibles. Les différentes stratégies interventionnellesont pour objectif de remédier aux différents méca-nismes de dysrégulation dans la sarcopénie, préalable-ment évoqués. A ce jour, la pratique régulière d’une acti-vité physique contre résistance est la stratégie la plusefficace, avec une rapide amélioration des perfor-mances physiques, en l’absence même de gain signi-ficatif de masse musculaire 21. L’Association américainede cardiologie conseille une pratique régulière, au moins

Figure 1 : Coupe acquise par tomodensitométriepassant par la troisième vertèbre lombaire

L’utilisation d’un logiciel (Slice-O-Matic software V4.3 ;Tomovision, Montreal, Quebec, Canada) va permettre, en fonc-tion des unités Hounsfield, de mesurer la surface occupée parla masse musculaire (en rouge), celle occupée par le tissu adi-peux viscéral (en jaune) et celle occupée par le tissu adipeuxsous-cutané (en bleu). Ces surfaces sont linéairement corré-lées à la masse musculaire ainsi qu’au tissu adipeux de l’en-semble de l’organisme. D’après 17

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deux fois par semaine, d’un exercice physique de résis-tance sollicitant au moins 2/3 des muscles appendi-culaires et axiaux. Ce type d’exercice stimule la pro-téosynthèse musculaire, augmente le recrutement desunités motrices, diminue l’insulinorésistance périphé-rique, exerce un effet anti-inflammatoire s’opposantaux effets délétères des cytokines pro-inflammatoires,diminue la fatigue et stimule l’appétit.

La prise en charge parallèle d’une dénutrition protéino-énergétique est indispensable pour corriger les carencesen protéines et substrats énergétiques mais égalementtous les déficits en micronutriments anti-oxydants 22.Dans ce cadre, la supplémentation en acides aminésa éveillé un grand intérêt et particulièrement la supplé-mentation en leucine. Cet acide aminé essentiel rami-fié, en dehors d’être le plus abondant dans les mus-cles, se comporte comme un véritable nutriment signal.Il active la protéosynthèse musculaire in vitro mais aussiin vivo, chez l’animal comme chez l’homme, via desvoies de signalisation cellulaire indépendantes de l’in-suline et impliquant un complexe protéique – le com-plexe mTOR (mammalian target of rapamycin) – dontle rôle majeur dans la régulation de la synthèse pro-téique et la différenciation de la cellule est actuellementclairement établi. Le vieillissement est caractérisé parune perte de réponse de cette voie aux nutrimentsavec une protéosynthèse musculaire suboptimale mêmesi les apports protéiques sont suffisants. Toutefois, laleucine est le seul acide aminé à restaurer l’activationde cette voie quand elle est administrée en bolus lorsdes repas.

La correction ou la supplémentation en différentes hor-mones anabolisantes déficitaires n’ont pas fait leurpreuve et les résultats restent décevants.

D’autres pistes sont en cours d’élaboration et de vali-dation (vitamine D, myostatine) et constitueront certai-nement des perspectives prometteuses dans un ave-nir proche.

ConclusionsLe dépistage et le diagnostic de la déplétion muscu-

laire sont indispensables en début de toute prise encharge en oncologie et plus particulièrement en onco-gériatrie, au vu du pronostic extrêmement péjoratif dela sarcopénie en termes de morbidité et de mortalité.Les quelques études qui se sont intéressées au sujetmontrent que la toxicité de certaines chimiothérapiesest directement corrélée à la masse musculaire, et quele calcul des doses limitantes selon la surface corpo-relle totale n’est pas le plus pertinent. Plus que la sim-ple réduction de la masse musculaire, il semblerait quele facteur pronostique le plus important soit la perfor-mance fonctionnelle musculaire. Toutes ces donnéessont en faveur, dans un proche avenir, de l’intégrationde la composition corporelle dans la détermination desposologies des chimiothérapies cytotoxiques. Les pistesthérapeutiques dans le domaine de la sarcopénie res-tent très limitées à ce jour, et la meilleure préventiongravite autour de la pratique régulière d’un exercice phy-sique d’endurance et de la prise en charge d’une dénu-trition protéino-énergétique. Ceci reste, bien sûr, à êtredémontré. n

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Cas CliniqueMr T. âgé de 89 ans, d’origine corse, est adressé en

consultation d’oncogériatrie, avant décision d’un traitementanti-cancéreux de type chimiothérapie, pour un sarcomede Kaposi méditerranéen ou classique localisé aux mem-bres inférieurs. Le patient est suivi dans le service de der-matologie pour un sarcome de Kaposi évoluant depuis 1997sans association au virus de l’immunodéficience humaine(VIH). Il a déjà eu plusieurs traitements pour cette patho-logie dont 10 cures de Vinblastine en 2003 qui se sontcompliquées d’une neuropathie périphérique, et 13 séancesde radiothérapie sur les lésions cutanées de l’avant-pieddroit compliquées de radiodermite. Devant la récidive desnodules de Kaposi en 2006, un nouveau traitement estinstauré par 24 cures de Bléomycine (dose cumulée à300 mg). En 2007, le patient a présenté une ostéite del’avant-pied droit compliquant la radiodermite tout d’abordtraitée par antibiothérapie puis, devant l’insuffisance deréponse au traitement médical et aux soins locaux, il estdécidé de réaliser une amputation transmétatarsienne del’avant-pied droit en 2008. Une nouvelle chimiothérapiede 6 cures de Doxorubicine Liposomale Pégylée (dose

réduite de 25 %) est réalisée fin 2008, en l’absence decontre-indications devant l’apparition de nouvelles lésionsde Kaposi aux membres inférieurs, et a permis une netteamélioration clinique dans les suites. Etant donné la réap-parition de nodules violacés de Kaposi sur les membresinférieurs droit et gauche en 2010, il est décidé en Réunionde Concertation Pluridisciplinaire (RCP) de reprendre untraitement par Doxorubicine Liposomale Pégylée après unavis oncogériatrique et un bilan préthérapeutique.

Le patient avait comme antécédents des troubles visuels,suite à un traumatisme de l’œil gauche dans l’enfance,un diabète de type 2, une hypertrophie bénigne de la pros-tate et un tabagisme ancien à 15 Paquets Années (PA).Son traitement comportait Glimépiride 2 mg/j, AlfuzosineLP 10 mg/j, Naftidrofuryl 200 mg 2/j et Ranélate de stron-tium 1/j. Au niveau social, il vivait seul et n’avait pas d’en-fant ; mais une aide-ménagère intervenait 6 heures parsemaine à son domicile. Il ne présentait pas de perte d’au-tonomie : les activités de la vie quotidienne (ADL) et lesactivités instrumentales de la vie quotidienne (IADL)n’étaient pas altérées. Il présentait par ailleurs des trou-bles de la marche secondairement à l’amputation de

Sarcome de Kaposi et sujet âgé : à propos d’un casKaposi’s sarcoma and the elderly subject

A.-L. Couderca, D. Giaccherob, I. Beredera, R. Boulahssassa, O. Guérina

a. Pôle de Gérontologie, CHU Nice, Hôpital de Cimiez, 4 avenue Reine Victoria, 06000 Nice, France.b. Service de Dermatologie, CHU Nice, Hôpital de l’Archet 2, 151 route de St Antoine de Ginestière, 06200 Nice, France.

RésuméL’histoire clinique d’un patient âgé de 89 ans ayant peu de comorbidités et sans perte d’autonomie, atteint d’un

Sarcome de Kaposi (SK) de forme classique ou méditerranéen nous rappelle qu’il s’agit d’une pathologie assez fré-quente du sujet âgé dans les régions méditerranéennes. Ce patient a été traité par plusieurs types de chimiothéra-pies et de la radiothérapie suite à de nombreuses rechutes de la pathologie, et a finalement présenté peu d’effetssecondaires après les différentes chimiothérapies. La robustesse de certains patients âgés, voire très âgés, montrebien que l’âge n’est pas un critère de fragilité en oncogériatrie.Mots clés : Maladie de Kaposi, grand âge, polychimiothérapie.

AbstractThe clinical history of an 89-year old, autonomous patient with few co-morbidities, suffering from classic (Mediterranean)

Karposi’s sarcoma reminds us that this is a fairly common disease in the elderly subject in the Mediterranean regions.This patient was treated with several types of chemotherapy and radiotherapy following a great many recurrencesof the disease. He presented few adverse effects after the different chemotherapies. The hardiness of certain elderlyor even very old patients proves that age is not a criterion of fragility in oncogeriatrics.Keywords: Kaposi’s sarcoma, elderly patient, polychemotherapy.

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l’avant-pied droit, et le Get up and Go test était donc patho-logique. Le patient ne présentait pas de perte d’appétit,pas de perte de poids et le Mini Nutritional Assessment(MNA) ne montrait pas de risque de dénutrition. Il exis-tait tout de même au bilan biologique une carence en vita-mine B9 à 5,1 ng/ml qui nécessitait une supplémenta-tion mais pas d’autres carences vitaminiques associées.Un bref bilan cognitif montrait un Mini Mental StateExamination (MMSE) à 29/30 et un test de l’Horloge à7/7. Le patient ne présentait par ailleurs aucun troubleneurologique à l’examen clinique. Aucun trouble de typedépressif n’existait également chez ce patient, que ce soitlors de l’entretien ou lors de la réalisation du GeriatricDepression Scale (GDS). A l’examen dermatologique, onretrouvait au niveau des membres inférieurs, des nodulesviolacés prédominant sur la face interne de la jambedroite et du creux poplité droit, ainsi que des nodules dela jambe gauche (cf. photos 1 et 2). Le moignon d’am-putation et la face dorsale du pied droit présentaient unelésion nodulaire ulcérée.

Photos 1 et 2 : Nodules violacés de Kaposi chez Mr T.

Le bilan biologique montrait un ionogramme et un bilanhépatique normaux, une clairance de la créatinine enMDRD à 100 ml/min et une hémoglobine à 7,1 mmol/l.Les examens paracliniques à la recherche d’une exten-sion de la maladie de Kaposi se sont révélés négatifs : uneradiographie thoracique normale et une échographie abdo-minale ne montrant pas d’anomalie hépatique. Une écho-graphie cardiaque transthoracique a été également réali-sée en bilan préthérapeutique et montrait une hypertrophieconcentrique du ventricule gauche, une fraction d’éjec-tion à 58 %, une insuffisance tricuspide et pas d’hyper-tension artérielle pulmonaire. Au vu de l’évaluation onco-gériatrique, le patient était de type fragile mais ne présentaitpas de contre-indications à la chimiothérapie. Selon la clas-sification de Balducci, ce patient est de type Balducci III(soins de confort) mais notre expertise clinique gériatriquenous a plutôt orientés vers un Balducci II, avec des réservesfonctionnelles diminuées. Un traitement par DoxorubicineLiposomale Pégylée a donc été instauré et est actuelle-ment poursuivi.

DiscussionLa Maladie de Kaposi (MK) est associée à l’infection par

l’herpès virus 8 (HHV-8) sous quatre formes épidémiolo-giques 1 : classique, endémique, post-transplant et épi-démique (ou associée au VIH).

La forme classique ou méditerranéenne, qui est la formeayant atteint notre patient, est présente de façon spora-dique chez des patients du pourtour méditerranéen (sur-tout en Italie, en Grèce) 2 et d’Europe de l’Est 3. Une ori-gine ethnique est probablement en cause dans cettepathologie 4. Cette maladie atteint principalement leshommes âgés (5 à 15 hommes pour une femme au-delàde 60 ans). La MK, sous sa forme classique, survient sur-tout sous forme cutanée et atteint principalement lesmembres inférieurs, comme cela est le cas dans notreobservation. La deuxième forme est la forme endémique,qui est fréquente en Afrique de l’Est et Centrale, où ellereprésente de 1 à 10 % des cancers diagnostiqués dansces régions 1. Elle survient principalement chez les hommesà partir de 40 ans et est beaucoup plus agressive que laforme classique avec souvent des nodules disséminés, deslésions infiltrantes parfois viscérales et des atteintes gan-glionnaires. La troisième forme de MK est la forme ditepost-transplant, rencontrée chez les patients greffés, enparticulier du rein, recevant un traitement immunosup-presseur de longue durée. La dernière forme est dite épi-démique car liée à l’épidémie de l’infection par le VIH dontelle constituait autrefois le mode d’entrée vers le stade SIDA.Cette forme épidémique représentait une des maladiesopportunistes les plus fréquentes et était le premier can-cer chez les patients infectés par le VIH au stade SIDA.Elle est en net recul épidémiologique depuis l’avènementde la trithérapie. Il s’agit souvent de formes disséminéesavec des lésions multifocales et une atteinte viscérale 1.

La MK classique dont est atteint notre patient réalise untableau typique de MK limitée à la peau, avec des lésionsmultiples à type de papulo-nodules rouge sombre prédo-minant aux membres inférieurs. Initialement superficielles,elles s’épaississent en plaques ou tuméfactions, en nodulesbruns ou violacés, de tailles variables, kératosiques ou ulcé-rés. A un stade avancé, un oedème des membres infé-rieurs, dur et scléreux s’associe aux placards infiltrés etaux nodules 3,5. Les autres atteintes de type viscéralessont rares 3, de l’ordre de 10 % des patients atteints dela forme classique 6. Le plus souvent, les lésions évoluentlentement et l’état général est conservé pendant de longuesannées, mais certaines études ont montré que dans la formeclassique de MK il existait une augmentation du risque decertaines néoplasies type lymphomes malins non hodg-kiniens ou mélanomes 7. Le traitement de la forme clas-sique de MK consiste le plus souvent en une simple sur-veillance lorsque le patient est immunocompétent etasymptomatique. La mortalité est relativement faible dans

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cette pathologie comme le montre l’étude de Brenner etal 8 où 4 % des patients sur 123 patients atteints de MKétaient décédés des suites de cette pathologie. Lorsquela pathologie est plus évoluée, la radiothérapie obtientdes rémissions fréquentes et souvent prolongées 8. Dansles formes plus étendues une chimiothérapie est plusappropriée. Des réponses ont été obtenues sousVinblastine, Bléomycine, Doxorubicine et Dacarbazineseules ou en association 6. Les anthracyclines liposo-males type Doxorubicine Liposomale Pégylée montrentactuellement des résultats encourageants 3. Des traite-ments locaux comme des injections d’interféron alphadans la lésion peuvent être une alternative aux traitementssystémiques.

Notre patient a eu plusieurs types de chimiothérapies suiteà une extension importante des lésions de MK. Il a toutd’abord eu, lors de la découverte de la pathologie, un trai-tement par Vinblastine et de la radiothérapie, puis trois ansaprès la rémission, un traitement par Bléomycine a dû êtreinstauré. Devant une nouvelle apparition de lésions cuta-nées au bout de deux ans, une chimiothérapie de typeanthracycline liposomale a été réalisée et a permis unerémission pendant deux ans. Une nouvelle cure d’anthra-cycline liposomale a été proposée au patient devant unerechute de la MK qui, pour l’instant, se déroule sans effetssecondaires. La particularité de ce cas clinique est labonne tolérance aux différentes chimiothérapies de cepatient pourtant très âgé. Seule une neuropathie périphé-rique sous Vinblastine avait motivé une interruption ; lesautres types de chimiothérapie n’ont pas altéré son auto-nomie ou fait décompenser ses comorbidités. Ainsi cetterobustesse de certains patients âgés, voire très âgés,face aux différents cycles de chimiothérapie nous montreune fois encore que le critère d’âge seul, ne doit pascontre indiquer un traitement efficace qui améliore la qua-lité de vie. Des études concernant les facteurs influençantla longévité et la robustesse chez les patients âgés et trèsâgés 9-11 indiquent que la perte d’autonomie pour les actesde la vie quotidienne ou les troubles cognitifs sont les cri-tères déterminants de fragilité et de mortalité notammentchez les très âgés. Un sujet âgé et très âgé (>85 ans) devraitdonc bénéficier systématiquement d’une évaluation géron-tologique standardisée avant d’instaurer ou de contreindiquer une thérapeutique anti-cancéreuse, car si sur-trai-ter certains patients fragiles peut être très délétère, sous-traiter des patients robustes est une véritable perte de

chance en terme de survie mais également de qualité devie. Nous touchons là également les limites de la classifi-cation de Balducci pour ces patients très âgés qui sonten général de fait classés Balducci III, alors qu’une exper-tise clinique approfondie montre chez certains de cespatients une chance raisonnable de traitement.

ConclusionLa MK sous sa forme classique atteint donc de préfé-

rence les patients originaires du pourtour méditerranéenou d’Europe de l’Est, de sexe masculin âgé de plus de60 ans. C’est une forme cutanée qui touche habituelle-ment les membres inférieurs et a une évolution relative-ment lente. Dans notre cas clinique, l’évolution a été mar-quée par plusieurs périodes de rémissions et de rechutesdont les traitements ont été de la radiothérapie et plusieurstypes de chimiothérapies incluant les anthracyclines lipo-somales. Ce patient pourtant très âgé a finalement pré-senté peu d’effets secondaires après les différents cyclesde chimiothérapie mais a présenté une complication nonnégligeable de la radiothérapie. Ce cas illustre la robus-tesse de certains patients très âgés aux effets indésira-bles médicamenteux, et notamment aux effets secon-daires post-chimiothérapies. n

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Applicabilité des recommandations del’évaluation onco-gériatrique par les médecinsgénéralistes au cours du suivi en ville desmalades âgés atteints de cancerApplicability of the comprehensive geriatric assessment recommendations by generalpractitioners during the follow-up of elderly cancer outpatients

Ph. Cailleta, M.-A. Cariotb, E. Paillauda, b

a. Département de Médecine Interne et Gériatrie, Centre Hospitalo-universitaire Henri Mondor, Albert Chenevier(AP-HP), 51 avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil Cedex, France.b. Département de Médecine Interne et Gériatrie, Centre Hospitalo-universitaire Henri Mondor, Albert Chenevier(AP-HP), 41 rue de Mesly, 94010 Créteil Cedex, France.Correspondance : Philippe Caillet, Hôpital Henri Mondor, Département de Médecine Interne et Gériatrie,Consultation d’Onco-Gériatrie (UPCOG Créteil), 51 avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil Cedex, France. Tél. : +33 (0)1 49 81 47 14, courriel : [email protected]

RésuméObjectif : Le but de cette étude prospective était d’évaluer, au travers d’une enquête d’opinion auprès des méde-

cins traitants, si les recommandations de l’évaluation gériatrique standardisée (EGS) étaient applicables au coursdu suivi en ville des malades âgés cancéreux.

Matériel et méthode : Nous avons interrogé les médecins de ville auxquels les comptes rendus (CR) de l’EGS avaientété envoyés. Les difficultés rencontrées en ville pour appliquer les recommandations de l’EGS ont été appréciéespar des questions à choix binaire (réponse par oui ou par non) ou à réponse ouverte.

Résultats : Parmi 80 médecins interrogés, 45 questionnaires (56,3%) ont pu être analysés. La majorité des méde-cins (77,7%) a estimé que les informations contenues dans le CR et les recommandations de l’EGS étaient utilespour la prise en charge en ville de leurs patients âgés cancéreux. Les recommandations proposées ont été jugéesdifficilement applicables en ville dans 60% des cas, principalement les recommandations concernant la prise encharge nutritionnelle et sociale, respectivement pour 53,4% et 46,7% des médecins interrogés. Les recommanda-tions relatives à la prise en charge en kinésithérapie, au traitement de la douleur et à la réalisation d’examens com-plémentaires ont été jugées applicables en ville respectivement dans 60,0%, 64,4% et 84,4% des cas.

Conclusion : Les médecins de soin primaire ont jugé utiles les recommandations de l’EGS pour la prise en chargede leurs malades cancéreux âgés. Les recommandations relatives à la prise en charge nutritionnelle et sociale sontapparues les plus difficiles à appliquer en ville.Mots clés : Patients âgés, évaluation gériatrique, cancer, médecine générale.

AbstractPurpose: This prospective study used an opinion survey of primary care physicians to determine whether the recom-

mendations of the comprehensive geriatric assessment (CGA) were applicable during the follow-up of elderly can-cer patients in private practice.

Materials and methods: The authors surveyed the physicians receiving the CGA reports. In private practice, thedifficulties encountered in implementing the CGA recommendations were assessed using binary-choice questions(yes / no) or open answers.

Results: It was possible to analyse 45 out of the 80 questionnaires (56.3%). Most physicians (77.7%) felt that theinformation contained in the CGA reports and the CGA recommendations were useful in the management of theirelderly cancer patients in private practice. The proposed recommendations were considered unpractical in 60% ofthe cases, mainly the recommendations for nutritional care and social management, in 53.4% and 46.7% of the

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IntroductionLa prise en charge des personnes âgées atteintes de can-

cer est devenue un important enjeu de santé publique dansles pays occidentaux, en raison du vieillissement régulier dela population et de l’augmentation de l’incidence des can-cers avec l’âge. Actuellement, plus de 60 % des cancers et75 % des décès par cancer surviennent chez des personnesde plus de 65 ans en Europe et aux Etats-Unis 1-3. EnFrance, l’âge moyen au moment du diagnostic est de 64ans pour les femmes et de 67 ans pour les hommes 4.

Cependant, l’hétérogénéité de la population âgée, entermes de comorbidités et de statut fonctionnel, expliqueen grande partie la difficulté à établir des recommanda-tions de prise en charge thérapeutique du cancer chezles malades âgés. Afin d’optimiser la prise en charge despersonnes âgées, les gériatres ont développé une procé-dure d’évaluation médico-psycho-sociale : « l’ÉvaluationGériatrique Standardisée » (EGS) ou « CompréhensiveGeriatric Assessment » (CGA) dans la littérature anglo-saxonne 5,6. L’EGS permet une évaluation multidimension-nelle de l’état de santé global des patients âgés au tra-vers de l’analyse des comorbidités et de leurs traitements,du statut fonctionnel, de l’état nutritionnel, cognitif et thy-mique, et de l’environnement social. Basée sur des échellesgériatriques validées, elle permet l’identification des diffé-rents problèmes de santé et la mise en œuvre d’un plande soins personnalisés pour la prise en charge de ces pro-blèmes. Chez le patient non cancéreux, cette approcheglobale multidisciplinaire a prouvé son intérêt en retardantla perte d’autonomie, en diminuant le taux d’institution-nalisation ainsi que la mortalité dans certaines études 7.Cette procédure d’évaluation et de prise en charge glo-bale des malades âgés est actuellement proposée pourla prise en charge des patients âgés atteints de patholo-gies cancéreuses 6,8-11.

Au sein de l’Unité Pilote de Coordination en Onco-Gériatrie (UPCOG) de notre centre hospitalier, une EGSpeut être réalisée pour tous les patients âgés de 70 anset plus atteints de cancer, adressés par les oncologues,les radiothérapeutes, les chirurgiens, les hématologues outout autre spécialiste d’organe prenant en charge despatients âgés cancéreux. A l’issue de cette évaluation, legériatre rend non seulement un avis sur la faisabilité dutraitement anticancéreux envisagé par l’équipe oncologique,mais il élabore également des recommandations de priseen charge globale du patient âgé. Les actions de prise en

charge proposées et/ou initiées lors de la consultation sontmultiples et peuvent concerner :

• la prise en charge sociale (évaluation des aides néces-saires à domicile, mise en place de ces aides, aide à laconstitution du dossier d’Allocation Personnaliséed’Autonomie, orientation vers un Service Social, etc.) ;

• le maintien ou l’amélioration de l’autonomie (prescrip-tion de kinésithérapie, orientation du patient vers un ser-vice de soins de suite et réadaptation, etc.) ;

• la prise en charge nutritionnelle (prescription de com-pléments alimentaires, orientation vers une consultationdiététique, etc.) ;

• la prise en charge psychologique (orientation vers unsuivi psychologique et/ou une consultation psychiatrique,prescription d’un antidépresseur, etc.) ;

• la prise en charge d’un trouble cognitif existant ourévélé par l’EGS (orientation vers une consultation mémoire,prescription des examens complémentaires nécessairesà cette consultation, etc.) ;

• les comorbidités (proposition de mesures correctivesadaptées en cas de comorbidités non stabilisées, pres-cription d’examens complémentaires utiles au suivi et/ouà la prise en charge spécifique de ces comorbidités, etc.) ;

• le traitement habituel du patient (arrêt de certains médi-caments responsables d’effets iatrogènes, réévaluation del’indication de certains médicaments, mise en place demoyens pour faciliter l’observance thérapeutique, etc.) ;

• la prise en charge de la douleur (prescription ou adap-tation du traitement antalgique, gestion des effets secon-daires de ces traitements, orientation vers la consultationdouleur, etc.).

Les éléments de l’EGS et l’ensemble des recommanda-tions de prise en charge sont synthétisés dans un compte-rendu de consultation dactylographié adressé à l’onco-logue, mais également au médecin traitant du patient.Cependant, l’applicabilité en ville des recommandationsde cette évaluation n’a jamais été étudiée.

L’objectif de ce travail est d’évaluer, au travers d’uneenquête d’opinion auprès des médecins traitants desmalades âgés cancéreux, si les recommandations del’EGS sont applicables au cours du suivi en ville.

Matériel et méthodeMédecins interrogés

Pour cette étude descriptive et observationnelle, les don-nées ont été recueillies de manière prospective entre jan-

Applicabilité en ville des recommandations de l’EGS • Applicability of CGA recommendations for outpatients

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cases respectively. The recommendations for physiotherapy, pain management and additional examinations wereconsidered applicable in private practice in 60.0%, 64.4% and 84.4% of the cases respectively.

Conclusion: Primary care physicians found the CGA recommendations useful in the care of their elderly cancerpatients. The implementation of the nutritional care and social management recommendations appeared most dif-ficult in private practice.Keywords: Elderly patients, comprehensive geriatric assessment, cancer, general practice.

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie VOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010283

vier et mars 2010, à l’initiative de l’Unité Pilote deCoordination en Onco-Gériatrie (UPCOG) d’un GroupeHospitalo-Universitaire de la région parisienne (France).

Nous avons établi la liste des médecins traitants auxquelsles comptes-rendus de consultation (CRC) d’évaluation onco-gériatrique avaient été envoyés au cours de l’année 2009.

Un premier contact téléphonique a été établi avec cha-cun des médecins de cette liste afin de leur présenter l’étudeet d’obtenir leur accord de participation. Les médecins nonjoignables à plusieurs reprises ont été exclus. Les don-nées pouvaient être recueillies dès le premier contact, sile médecin était disponible pour répondre immédiatementau questionnaire. S’ils n’étaient pas disponibles immédia-tement, les médecins choisissaient de répondre au ques-tionnaire ultérieurement selon un des procédés suivants :

1/au cours d’un second entretien téléphonique ;2/questionnaire adressé et retourné par mail ;3/par fax ;4/par courrier.Un délai maximal d’un mois était accordé pour complé-

ter et retourner le questionnaire. Pour chaque médecin inter-rogé, nous avons noté son sexe, son âge et le nombred’années d’exercice depuis l’installation en ville.

Questionnaire de l’étudeL’intégralité du questionnaire de l’étude comportait

20 questions à choix binaire (réponse par oui ou par non)dont certaines étaient complétées par des questionsouvertes afin de permettre une libre expression et de pré-ciser les difficultés rencontrées en ville pour appliquer lesrecommandations de l’EGS. Les questions se répartissaientselon quatre thèmes :

1/la connaissance de l’onco-gériatrie par les médecinsde ville et le lien ville-hôpital ;

2/l’utilité des informations transmises dans le CRC pourla prise en charge et le suivi des patients ;

3/l’applicabilité des recommandations proposées en ville ;4/l’amélioration de la pratique professionnelle concernant

la prise en charge spécifique des malades âgés cancé-reux au travers des recommandations proposées.

Dans cet article, nous présentons les résultats relatifs auxquestions concernant l’utilité des informations transmisesdans le CRC et à l’applicabilité des recommandations del’EGS en ville par les médecins généralistes au cours dela prise en charge et du suivi à domicile de leurs maladescancéreux âgés (cf. tableau 1).

Analyse statistiqueLes questionnaires incomplets n’ont pas été retenus

dans l’effectif utilisé pour l’analyse statistique. Les don-nées qualitatives sont exprimées sous forme d’effectifs etde pourcentages. Les données quantitatives sont expri-mées sous forme de moyennes et d’écarts-types.

RésultatsNombre de questionnaires analysables

Les comptes-rendus des évaluations onco-gériatriquesont été adressés par courrier à 95 médecins traitants au coursde l’année 2009. Dix médecins (10,5 %) n’ont jamais pu êtrecontactés pour leur proposer de participer à l’étude, et cinqmédecins (5,3 %) ont refusé d’emblée de participer à l’étude.

Au total, 80 médecins ont accepté de participer à notreenquête. Parmi eux, 45 praticiens (56,3 %) ont réponduà l’ensemble des questions. Dix questionnaires (12,5 %)ont été exclus de l’analyse statistique dans la mesure oùplus de six questions étaient restées sans réponse. Vingt-cinq médecins (31,2 %) n’ont jamais retourné le question-naire, malgré plusieurs relances. Finalement, 45 question-naires ont été retenus pour l’analyse statistique descriptive.La figure 1 résume le schéma de notre étude.

Les réponses ont été obtenues de la façon suivante: onzepar mail (24,5 %), neuf par courrier (20,0 %), quinze parfax (33,3 %) et dix par entretien téléphonique (22,2 %) donthuit (17,8 %) dès le premier contact téléphonique.

Profils des médecins dont les questionnairesont été retenus pour l’analyse

Les médecins interrogés avaient un âge moyen de51,5 ± 7,5 ans, compris entre 36 et 64 ans. Ils se répar-tissaient en 13 femmes (28,9 %) et 32 hommes (71,1 %).Le temps d’exercice depuis l’installation était en moyennede 20,9 ± 8,7 ans, compris entre 5 et 36 ans.

Environ trois quart des médecins généralistes interrogés(73,3 %) ne connaissaient pas l’existence d’une consul-tation d’évaluation onco-gériatrique avant d’avoir reçu lepremier CRC.

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Figure 1 : Schéma de l’étude et réponses exploitablespour l’analyse statistique descriptive.

CRC : compte-rendu de consultationEGS : évaluation gériatrique standardisée

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Les recommandations de l’EGS et leurapplicabilité en ville

Le tableau 1 présente les résultats relatifs aux questionsconcernant l’utilité et l’applicabilité des recommandationsde l’EGS au cours de la prise en charge des patients âgéscancéreux suivis en ville. La majorité des médecins (77,7 %)a estimé que les informations contenues dans le CRC d’éva-luation et les recommandations de l’EGS étaient utiles

pour la prise en charge de leurs patients âgés cancéreux,ainsi que pour répondre aux questions spécifiques despatients à propos de la pathologie cancéreuse et de saprise en charge. Cependant, huit médecins de soins pri-maires (17,8 %) souhaitaient des informations complémen-taires pour :

• mieux expliquer cette prise en charge au patient et àson entourage (1 médecin) ;

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Tableau 1 : Questionnaire utilisé pour évaluer l’applicabilité par les médecins de ville des recommandations de prise en charge proposées par l’EGS.

Questions Réponses courtesOui

n (%)Questions relatives aux informations contenues dans le CR :

1. Ces recommandations vous paraissent-elles utiles pour la prise en charge de vos patients âgés can-céreux ?

O - N 35 (77,7)

2. Souhaiteriez-vous avoir des informations supplémentaires pour le suivi de vos patients âgés cancé-reux ?⇨Si oui, lesquelles ?

O - N 8 (17,7)

3. Le CR vous aide-t-il à répondre aux questions spécifiques du patient sur sa pathologie cancéreuseet sa prise en charge ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 32 (71,1)

4. Les recommandations concernant le traitement habituel vous paraissent-elles pertinentes ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 37 (82,2)

Questions relatives à l’applicabilité des recommandations de l’EGS :

5. Les recommandations du CR vous paraissent-elles facilement applicables au cours de votre suivi dupatient ?⇨Si non, pourquoi ? (N=27) recommandations trop nombreuses. recommandations trop difficiles à mettre en œuvre. manque de correspondants pour les mettre en œuvre.Autre :

O - N

18 (40,0)

2 (7,4)6 (22,2)5 (18,5)

6. Les recommandations sur la prise en charge nutritionnelle sont-elles applicables dans votre pratiquecourante ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 21 (46,6)

7. Les recommandations sur la prise en charge en kinésithérapie sont-elles applicables dans votre pra-tique courante ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 27 (60,0)

8. Les recommandations sur la prise en charge sociale sont-elles applicables dans votre pratique cou-rante ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 24 (53,3)

9. Les recommandations sur la prise en charge de la douleur sont-elles applicables dans votre pratiquecourante ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 29 (64,4)

10. Les recommandations concernant d’éventuels examens complémentaires sont-elles applicablesdans votre pratique courante ?⇨Si non, pour quelle(s) raison(s) :

O - N 38 (84,4)

Abréviations. EGS : évaluation gériatrique standardisée – CR : compte-rendu – O : oui – N : non.

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• avoir une connaissance des alternatives thérapeutiqueséventuelles pour en discuter avec le malade et son entou-rage en cas de refus du traitement proposé (1 médecin) ;

• préciser l’intérêt de certains examens complémen-taires dans le cadre du traitement (1 médecin) ;

• être informé des interactions médicamenteuses éven-tuelles entre la chimiothérapie proposée et le traitementhabituel du patient, et des effets indésirables prévisiblesde la chimiothérapie (2 médecins).

Les recommandations proposées dans le CRC de l’EGSétaient difficilement applicables au cours du suivi en villepour 60 % des médecins interrogés, en raison d’un nom-bre trop important de recommandations ou par manquede correspondants pour les mettre en œuvre.

Dans notre étude, les recommandations concernant laprise en charge nutritionnelle et la prise en charge socialedes patients âgés cancéreux ont été considérées commedifficiles à appliquer en ville, respectivement pour 53,4 %et 46,7 % des médecins interrogés. Concernant la priseen charge nutritionnelle, un médecin a précisé qu’il exis-tait une mauvaise observance de la prise en charge nutri-tionnelle proposée dès lors qu’il n’y avait pas de membrede la famille ou d’aide à domicile pour surveiller la prisedes repas ou des compléments alimentaires. Deux autresmédecins ont rapporté le refus d’un suivi nutritionnel à domi-cile par leurs patients.

Concernant les difficultés d’applicabilité de la prise encharge sociale, deux médecins ont rapporté le refus desaides à domicile par leurs patients. Un médecin a souli-gné les problèmes financiers qui pouvaient limiter la miseen place des aides au domicile. Enfin, trois médecins ontexpliqué qu’ils manquaient de temps pour contacter lesdifférents intervenants, en évoquant également le manquede disponibilité des assistantes sociales en ville.

Peu de médecins interrogés ont affirmé qu’il était diffi-cile de réaliser des examens complémentaires en ville(15,6 %) et que, dans la pratique courante, la perte d’au-tonomie et/ou l’isolement social du patient constituaientles principaux obstacles à la réalisation de ces examens.

DiscussionDans notre étude, les informations et recommandations éta-

blies à l’issue de l’EGS et transmises aux médecins de villedans les CRC d’évaluation ont été jugées utiles pour la priseen charge en ville à près de 78 %. Cependant, 60 % desmédecins interrogés ont estimé que les recommandationsétaient difficilement applicables au cours du suivi en ville.

Les informations contenues dans le CRC ont été majo-ritairement jugées utiles au cours de la prise en chargedes patients âgés cancéreux en ville. L’intérêt des infor-mations apportées par la prise en charge hospitalière pourla prise en charge en ville est souligné par d’autres tra-vaux. Une étude récente, conduite au service d’accueil

des urgences de la Réunion, a montré que les comptes-rendus de passage aux Urgences étaient considérés dans100 % des cas utiles au suivi du patient par les médecinsgénéralistes 12. L’utilité des recommandations de l’EGSnous paraît d’autant plus importante que, selon certainesdonnées de la littérature, 70 % des médecins généralistesprescrivent des traitements adjuvants ou symptomatiquesaux patients cancéreux qu’ils suivent à domicile 13.

Toutefois, même si les recommandations de prise encharge ont été jugées utiles, plus de la moitié des méde-cins de ville interrogés a estimé qu’elles étaient difficile-ment applicables en ville. Une étude, réalisée auprès de163 médecins de ville, avait montré un résultat ambiva-lent similaire : 75 % des médecins de ville interrogés sedéclaraient satisfaits du contenu du compte-rendu hos-pitalier, mais 55 % d’entre eux n’étaient pas satisfaits duprojet de prise en charge 14.

Dans notre travail, le nombre important des recomman-dations et le manque de correspondants pour les mettreen œuvre constituaient les deux principaux facteurs limitantl’applicabilité des recommandations. L’EGS est une éva-luation multidimensionnelle médico-psycho-sociale quiappréhende le patient dans sa globalité. Toute anomalieconstatée au cours de l’évaluation fait l’objet d’une priseen charge spécifique et/ou de recommandations. Le nom-bre important de ces recommandations s’explique princi-palement par la fréquence de la polypathologie, de la poly-médication et de l’altération de l’autonomie physique, del’état nutritionnel, cognitif et/ou thymique, avec l’avancéeen âge. Une étude concernant la prise en charge de patientsâgés cancéreux a révélé qu’en moyenne l’EGS mettait enévidence six problèmes de santé par patient, non traités et/ounon stabilisés avant la consultation 15. Dans cette mêmeétude, il a été rapporté qu’au cours du suivi, 17 interven-tions en moyenne par patient étaient mises en œuvre. Lenombre élevé des recommandations proposées dans nosCRC au décours de l’EGS s’accorde à ces données de lalittérature. Toutefois, il serait probablement nécessaire demieux hiérarchiser les recommandations de prise en charge.

Les difficultés d’applicabilité des recommandations étaientliées selon certains praticiens à un manque de correspon-dants en ville. L’impression d’ensemble paraît être celled’une offre de soins quantitativement insuffisante pourrépondre aux besoins exprimés, même si, en France, l’of-fre de soins en ville est très diversifiée (infirmières, kinési-thérapeutes, orthophonistes, diététiciennes…) et peutrépondre qualitativement aux besoins des malades âgés.Cette situation, mise en avant par les médecins interro-gés, risque de se dégrader considérablement en raisonde l’insuffisance du nombre de diplômés dans les annéesà venir, à l’image de ce qui est observé dans de nombreuxpays développés 16. Cependant, selon les estimations,l’offre de soins en kinésithérapie en France est en crois-

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sance, et le nombre de kinésithérapeutes libéraux devraitêtre proche de 60000 en 2020 ce qui devrait permettreun accès à la rééducation à domicile plus aisé pour lespatients âgés, cancéreux ou non 17.

Dans notre étude, les recommandations les plus difficilesà mettre en œuvre concernaient principalement la prise encharge nutritionnelle et la prise en charge sociale. Un peuplus de la moitié des médecins interrogés a estimé qu’ilétait difficile d’appliquer les recommandations concernantla prise en charge nutritionnelle à domicile, particulièrementen l’absence de conjoint, de membre de la famille ou d’aideà domicile. La Haute Autorité de Santé (HAS) répond à ceproblème en présentant plusieurs possibilités d’aides pourcoordonner la prise en charge nutritionnelle de la personneâgée à domicile et aider les médecins de ville 18 :

• des aides individuelles : aide de l’entourage, aide ména-gère, portage des repas, restaurants de foyers ;

• des structures qui ont un rôle de mise en place desdispositifs, de coordination et d’information : réseaux desoins dont les réseaux gérontologiques, centres commu-naux d’action sociale (CCAS), centres locaux d’informa-tion et de coordination (CLIC) et services sociaux ;

• les services d’hospitalisation à domicile ont égalementpour mission d’assurer la prise en charge nutritionnelle desmalades qu’ils ont en charge par l’intervention d’une dié-téticienne et/ou d’une infirmière.

L’utilisation d’un carnet de suivi nutritionnel à domicilepourrait être utile pour conserver le bénéfice du suivi dié-tétique mis en place dans un service de soins de suite etréadaptation chez les patients âgés dénutris 19.

Les difficultés financières, parfois mises en avant pourexpliquer les difficultés de prise en charge, sont égalementévoquées par l’HAS. Une aide financière pour la mise enplace d’aides à domicile peut être obtenue grâce à l’allo-cation personnalisée d’autonomie (APA), à l’aide socialedépartementale, à l’aide des caisses de retraite ou à cer-tains contrats de mutuelles 18. Les compléments nutrition-nels oraux remboursés à 100 % dans la dénutrition étaientdéjà intégralement pris en charge dans le cadre d’unepathologie cancéreuse (arrêté du JO du 10 novembre 2000).

La moitié environ des médecins interrogés dans notreétude a trouvé qu’il était difficile d’appliquer en ville lesrecommandations relatives à la prise en charge sociale deleurs patients âgés cancéreux. Pour pallier les problèmesfinanciers également évoqués à ce sujet et faciliter la miseen place des aides à domicile, l’APA et l’aide sociale auxpersonnes âgées évoquées ci-dessus sont utiles 20. Demême, l’organisation et la mise en place d’un plan d’aideà domicile peuvent être facilitées par les différents orga-nismes ou structures d’information citées ci-dessus : lesCLIC et les CCAS peuvent transmettre les informationsnécessaires à l’organisation du maintien à domicile au

patient âgé lui-même ou à son entourage 20. Les réseauxgérontologiques qui regroupent des professionnels de lasanté et du social peuvent occuper ici une place privilé-giée dans l’organisation du maintien à domicile et l’accom-pagnement de la personne âgée grâce à une action directede soins et de suivi à domicile.

Un entretien téléphonique établi systématiquement entrele gériatre hospitalier et le médecin traitant du patientpourrait permettre de mieux expliquer les recommanda-tions proposées, et de préciser d’emblée celles qui appa-raitraient difficiles à mettre en œuvre. Cet entretien pour-rait également permettre de mieux hiérarchiser l’ensembledes actions de prise en charge recommandées lorsqu’ellessont nombreuses, en intégrant l’avis du médecin traitantet les contraintes environnementales du patient. L’intérêtd’un tel entretien quant à l’amélioration de l’applicabilitéen ville des recommandations de l’EGS par les médecinsde ville reste à démontrer par de nouvelles études.

La principale faiblesse de notre étude réside dans la taillerestreinte de l’échantillon puisque nous n’avons pu ana-lyser que 45 questionnaires. Ce faible effectif ne sauraitêtre représentatif de l’avis de l’ensemble des médecinsqui prennent en charge les sujets âgés cancéreux en ville.Les difficultés exprimées concernant la mise en œuvre decertaines recommandations de l’EGS peuvent être liéesà des contraintes locales qui n’ont pas pu être vérifiéesdans notre étude, mais qui mériteraient probablement unerecherche particulière. Enfin, un biais de sélection a pu êtreintroduit par le nombre de médecins qui ont refusé de par-ticiper à l’étude ou qui n’ont jamais retourné le question-naire. Le motif de refus ou de non retour des question-naires n’a pas pu être étudié. Cependant, malgré notreeffectif modeste, notre travail constitue, à notre connais-sance, la première étude qui s’est proposée d’étudierl’applicabilité des recommandations de l’évaluation onco-gériatrique par les médecins de soins primaires au coursdu suivi de leurs malades âgés atteints de cancers.

ConclusionCette étude constitue le premier travail qui a évalué, au

travers d’une enquête d’opinion, l’intérêt et l’applicabilitéen ville des recommandations de l’évaluation onco-géria-trique réalisée en milieu hospitalier, au cours du suivi despatients cancéreux âgés par les médecins de soins pri-maires. Les médecins interrogés ont majoritairement estiméque les recommandations de l’évaluation étaient utiles enville au cours de la prise en charge. Cependant, certainesrecommandations sont apparues difficilement applicablespendant le suivi à domicile, telles que les recommanda-tions concernant la prise en charge nutritionnelle et sociale.Un entretien téléphonique établi systématiquement entrele gériatre hospitalier et le médecin traitant du patientpourrait permettre une meilleure coordination. n

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Bibliographie :1 Yancik R, Ries LG. Cancer in older persons : an international issue in an ageing world.Semin Oncol 2004 ; 31 : 128-36.2 Jemal A, Siegel R, Ward E, et al. Cancer statistics, 2009. CA Cancer J Clin 2009 ;59 : 225-49.3 Piette F, Spano J-P, Chaibi P et al. Onco-gériatrie, une évidence épidémiologique.La Presse Médicale 2010 ; 39 (2) : 208-15.4 Maraninchi D, Institut national du cancer, Situation du Cancer en France en 2009,www.e-cancer.fr.5 Rolland Y, Rumeau P, Vellas B. L’évaluation gérontologique standardisée. La Revuede Gériatrie 2001 ; 26 (2) : 151-6.6 Wielland D, Hirth V. Comprehensive Geriatric Assessment. Cancer Contrl. 2003 ; 10(6) : 454-62.7 Stuck AE, Siu AL, Wieland GD, Adams J, Rubenstein LZ. Comprehensive geriatric assess-ment : a meta-analysis of controlled trials. Lancet 1993 ; 342 (8878) : 1032-6.8 Gosney MA. Clinical Assessment of elderly people with cancer. Lancet oncology 2005;6 (10) : 790-7.9 Extermann M, Aapro M, Bernabei R, et al. Use of geriatric assessment in older can-cer patients : Recommendations from the task force on CGA of the International Societyof Geriatric Oncology (SIOG). Crit Rev Oncol Hematol 2005 ; 55 : 241-52.10 Balducci L. Management of cancer in the elderly. Oncology 2006 ; 20 (2) : 135-52.11 Balducci L, Baskin R, Cohen HJ, et al. (NCCN Senior Adult Oncology Panel Members).Senior Adult Oncology. NCCN Clinical Practice Guidelines in Oncology. V.2. 2007.www.nccn.org.12 Loire C, Duval C-M, Hervé F et al. Enquête de satisfaction des médecins généra-

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Un « eczéma » du mamelon pas ordinaireL. RotenbergClinique Hartmann, 26 boulevard Victor Hugo, 92200 Neuilly-Sur-Seine, France.

Mme B, 76 ans, sans antécédent mammaire, présente une lésion sèche du mamelon droit évoluant depuis 8 mois.Pas de prurit ni écoulement mamelonnaire.Examen clinique normal par ailleurs.

Réponses page suivante

1. Décrivez la lésion cutanée : quels diagnostics évoquez-vous ?2. Quelles anomalies décrivez vous sur le cliché mammographique fourni. BiRads ?3. Qu’attendez vous de l’IRM dans cette indication ?4. Conduite à tenir

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1. Lésion mamelonnaire eczématiforme, rouge, croûteusea. Eczéma ;b. Maladie de Paget.

2. Mammographie normale = Birads 1 mais la cliniqueimpose un Birads 0 soit bilan à compléter avec indicationde biopsie de l’aréole.3. IRM avec injection de Gadolinium :

a. Prise de contraste et épaississement de l’aréole ;b. Courbe type 2 ou 3 (progressive ou en plateau, voirlavage précoce (Wash-out) ;c. Recherche d’une infiltration intra-mammaire de lalésion cutanée, d’une lésion mammaire sous-jacente ;d. Sein controlatéral, creux axillaires, CMI.

4. Histologie : Maladie de Paget du mamelon. Pas delésion mammaire sous-jacente.5. Traitement :

a. Chirurgie : pamectomie + ganglion sentinelle (GS) ;b. Radiothérapie ;c. Chimiothérapie si N +.

CommentairesAffection rare touchant le mamelon, elle accompagne envi-

ron 3 % des cancers du sein 1.Elle se caractérise comme une lésion cutanée eczéma-

tiforme, infiltrant peu à peu la glande mammaire.Le problème essentiel de la maladie de Paget du mame-

lon est son diagnostic tardif.La similitude avec l’eczéma entraîne souvent un retard

diagnostic.La lésion est en général bien limitée, unilatérale, résis-

tante au traitement topique.

Sémiologie cutanée• Rougeurs.• Écoulement de liquide non purulent.• Aspect croûteux de la lésion, quelquefois à l’origine

d’une légère érosion, s’accompagnant d’une petite pertede substance.

• Lésion unilatérale.• Résistance au traitement local (topique).• Le prurit est absent ou discret.• La plaque s’étend ensuite très lentement en surface, avec

un aspect eczématiforme mais très bien limité. L’érythèmepeut être érosif, squameux ou croûteux 2. L’évolution peut

s’étendre sur de nombreux mois, aboutissant à un pla-card débordant largement le mamelon.

Dans 1 cas sur 2, la lésion se localise au mamelon ensurface, dans l’autre moitié des cas la lésion envahit le sein.

La maladie de Paget est susceptible d’apparaître éga-lement dans les régions de la vulve et du pourtour de l’anus.

Examens complémentaires1. Biopsie cutanée pour analyse histologique : cellulescarcinomateuses au sein du revêtement malpighien dumamelon. Les cellules sont de grandes tailles, polygonales,au cytoplasme abondant clair, au noyau irrégulier et d’ar-chitecture lentigineuse 1,3.2. Mammographie : le plus souvent normale, elle peutrévéler un cancer sous-jacent.3. Échographie : épaississement de la plaque aréolaire, etbilan mammaire à la recherche de lésions associées.4. IRM: prise de contraste de la plaque aréolaire et visua-lisation de l’infiltration en profondeur. Recherche de lésionsintra mammaires associées 2.

TraitementLe traitement chirurgical dépend de l’envahissement

intra-mammaire.1. Tumorectomie en cas de lésion cutanée isolée : pamec-tomie et ganglion sentinelle (GS).2. Mastectomie + GS ou curage axillaire en cas d’enva-hissement plus profond.3. Traitements complémentaires dans les indications habi-tuelles.

En l’absence de diagnostic suffisamment précoce, lepronostic n’est pas favorable.

Taux de survie à 5 ans de 30 à 50 % 1,3. n

L’image du JOG • Réponses et Commentaires

Maladie de Paget du sein

Bibliographie :1 Ikeda DM, Helvie MA, Frank TS, Chapel KL, Andersson IT. Paget disease of the nip-ple : radiologic-pathologic correlation. Radiology 1993; 189: 89-94.2 Berg WA, Gutierrez L, NessAiver MS, Carter WB, Bhargavan M, Lewis RS, et al.Diagnostic Accuracy of Mammography, Clinical Examination, US, and MR Imaging inPreoperative Assessment of Breast Cancer. Radiology 2004; 233: 830-49.3 Giess CS, Keating DM, Osborne MP, Ng YY, Rosenblatt R. Retroareolar breast carci-noma : clinical, imaging, and histopathologic features. Radiology 1998; 207: 669-73.

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Le 9ème congrès international francophone de gériatrieet gérontologie de Nice s’est tenu du 19 au 21 octo-bre 2010 au palais Acropolis à Nice. Ce congrès

était également le congrès annuel de notre société natio-nale. Plus de 1400 consœurs et confrères gériatres issusde plus de 25 pays se sont retrouvés autour des trois thé-matiques centrales de ce congrès : les innovations théra-peutiques concernant nos patients âgés, les gérontech-nologies, et la culture méditerranéenne. L’oncogériatrie atenu une place d’honneur dans ce programme fourni etvarié, avec une session dédiée de communications orales,d’intéressantes interventions lors des communicationslibres, et une session de posters spécifique. L’affluencedu public lors de ces différentes séances a témoigné, sibesoin en était, de l’importance que prend cette théma-tique au sein de l’approche gériatrique internationale.

Lors des communications libres, l’équipe bordelaise 1 aprésenté les résultats préliminaires de l’étude ONCODAGEdont le but est de construire et valider un outil de dépis-tage simple, rapide et utilisable par les oncologues, per-mettant de sélectionner les patients pour lesquels l’EGS(Evaluation Gériatrique Standardisée) est la plus utile avantde décider de la stratégie thérapeutique oncologique à leurproposer. Le recrutement (près de 1700 sujets) est achevé,et les résultats étaient en cours d’exploitation à ce stade.Une équipe parisienne 2 a montré l’intérêt de l’évaluationgériatrique avant la prise en charge chirurgicale d’un can-cer digestif, et notamment comment réduire le risque desyndrome confusionnel post-opératoire par quelquesconseils simples, par exemple sur le choix des antalgiques.

Lors de la session d’experts dédiée à l’oncogériatrie, lapremière communication présentée par le Dr VéroniqueGirre (cancérologue à l’Institut Curie, Paris, France) a per-mis de faire le point sur la recherche clinique concernantles thérapies ciblées, en particulier le bevacizumab et letrastuzumab, dans la prise en charge du cancer du seinde la femme âgée. L’usage de ces thérapies est une avan-cée pour le traitement de nos patientes âgées, même sides études spécifiques font encore défaut. Puis le Dr

Frédérique Retornaz (gériatre au centre gérontologiquedépartemental de Montolivet, Marseille, France) a fait lelien entre l’identification et l’évaluation de fragilités et la priseen charge oncogériatrique, insistant sur l’importance dela confrontation clinique avant la décision, et l’utilité del’abord gériatrique tout au long du projet de soins, et passeulement lors de la décision thérapeutique initiale. Marie-Claire Van Nes (gériatre chef de service à Louvain, Belgique)a montré par la suite l’intérêt de la coordination ville-hôpi-tal dans la prise en charge de nos patients âgés atteintsde cancer, en présentant l’expérience pilote qu’elle a miseen place en Belgique. Enfin, le Pr Gilbert Zulian (cancéro-logue et gériatre, Collonge-Bellerive, Suisse) a insisté surles aspects éthiques qui guident nos décisions oncogé-riatriques, au travers de cas cliniques.

Lors de la session de posters spécifiques, 27 commu-nications affichées ont été présentées, toutes d’un bonniveau. Il s’agissait là d’une des sessions les plus fourniesdans le programme de communications affichées.

Tout d’abord, il est à signaler quelques communicationsconcernant la chirurgie carcinologique des sujets âgés, avecnotamment un poster sur la cytoréduction chirurgicale etchimio-hyperthermie intra-péritonéale pour le traitement dela carcinose péritonéale 3 dont la conclusion était qu’uneapproche thérapeutique associant cytoréduction chirurgi-cale et CHIP pouvait apporter un gain de survie à long termechez les sujets âgés de plus de 65 ans et atteints de car-cinose péritonéale. Ces patients avaient été sélectionnéspar une EGS initiale, ayant éliminé une vulnérabilité initiale.Cela confirme la possibilité de réaliser des actes très lourdssur des sujets âgés présentant un vieillissement réussi.

D’autres présentations, nombreuses, ont abordé l’éva-luation gérontologique en oncogériatrie, son utilisation etses conséquences. Ainsi, l’équipe bordelaise 4 a montréque la qualité de vie globale (évaluée par le QLQ-C30) n’étaitpas influencée par l’âge, l’état métastatique ou les comor-bidités. Une qualité de vie médiocre était corrélée avec unfaible score à l’EGS. Les fonctions altérées et la présencede symptômes étaient liés à un état de dénutrition (perte

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9ème Congrès International Francophone deGériatrie et Gérontologie (CIFGG)30èmes Journées Annuelles de la Société Françaisede Gériatrie et Gérontologie19-21 octobre 2010, Nice, France – Compte-rendu

O. Guérin, Université de Nice Sophia-Antipolis, CNRS UMR 6267, INSERM U998. Pôle de Gérontologie, CHU deNice, Hôpital de Cimiez, 4 avenue Reine Victoria, 06000 Nice, France. Correspondance : [email protected]

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de poids, faible score au MNA) et à une perte d’autono-mie (mauvais statut OMS et IADL altérées). Un autre tra-vail rétrospectif 5 a montré l’intérêt d’un outil simplifiéd’évaluation, le SGE, dans l’aide à la prise de décision d’unechirurgie carcinologique thoracique pour des sujets âgésatteints de cancer du poumon. Le retour d’une expé-rience intéressante de nos collègues de Fort-de-Francea également été présentée, portant sur 60 patients 6. LeurEGS, suivie d’une discussion en RCP confrontant lesarguments cliniques des gériatres et des oncologues impli-quait, dans plus de 21 % des cas, une adaptation des trai-tements en fonction des fragilités identifiées. Dans leur expé-rience, un patient sur deux voyait son projet personnaliséde soins influencé par cette approche oncogériatriqueexemplaire. L’expérience marseillaise s’est, quant à elle,intéressée notamment aux interventions gériatriques recom-mandées suite à l’EGS en oncogériatrie 7. Cette étude aconcerné 81 patients, d’un âge moyen de 82 ans. Pourchaque patient, 2,74 interventions gériatriques ont étéproposées suite à l’EGS. Elles concernaient principalementle statut nutritionnel, les comorbidités et le statut cognitif.80 % des patients présentaient au moins un critère de fra-gilité. Dans 60 % des cas, le traitement proposé par l’on-cologue était maintenu, mais nécessitait des ajustements,et dans 30 % des cas il a été contre-indiqué.

Une étude sur l’intérêt des traitements par chimiothéra-pie dans le cancer du pancréas 8, portant sur 259 patients,dont 72 de plus de 75 ans, a montré que la survie globale(de 9,4 mois) n’était pas significativement différente entreles sujets jeunes (<75 ans) et les plus âgés. De même, lachimiothérapie améliorait la survie des patients quel quesoit l’âge, et de manière identique pour les sujets plus jeunesou plus âgés. Par contre, les sujets âgés avaient moinssouvent de chimiothérapie que les plus jeunes (73 % vs92 %), et présentaient plus souvent des réductions dedoses. La conclusion des auteurs était que, même concer-nant ce cancer de mauvais pronostic, les sujets âgéssélectionnés, en bon état général, bénéficiaient autant dela chimiothérapie que des patients plus jeunes.

Quelques communications affichées ont insisté sur l’im-pact majeur de la fragilité nutritionnelle ou de la dénutritionavérée sur les possibilités de traitement et le pronostic descancers chez les sujets âgés. Ainsi, le Mini NutritionalAssessment (MNA) a été présenté comme un facteur pro-nostic très puissant de la survie 9. Dans le cadre de l’étudeINOGAD, essai multicentrique chez les patients âgés can-céreux traités par chimiothérapie, le MNA a été pratiqué lorsdu screening. Chez ces 550 patients de médiane d’âge de77,5 ans, les survies ont été très différentes en fonction deleur statut au MNA. Ceux qui étaient dénutris (MNA infé-rieur ou égal à 17 points) avaient une médiane de survie de8,4 mois, pour 14,4 mois pour le groupe « à risque dedénutrition » (MNA entre 17,5 et 23 points), et pour 32 mois

pour le groupe bien nutri (MNA supérieur ou égal à23,5 points). Il est à noter également que plus de la moitiédes sujets étaient dénutris ou à risque de dénutrition aumoment du diagnostic de cancer, selon le critère MNA.

Une étude prospective particulièrement intéressante a étéprésentée, et concernait les facteurs associés à une modi-fication du traitement anti-cancéreux 10. L’âge moyen dessujets était de 80 ans. L’EGS pratiquée a montré que52 % d’entre eux avaient une altération du statut ECOG(PS ≥ 2), 34 % une dépendance ou plus aux activités basalesde la vie quotidienne (ADL), 58 % une dénutrition, 29 %une altération cognitive et 27 % une dépression. Le nom-bre moyen de comorbidités était de plus de 5. Cela repré-sente donc une population âgée gériatrique assez repré-sentative, ayant un nombre assez élevé de fragilitésgérontologiques. En analyse multivariée, les facteurs indé-pendants associés à une modification du plan de traite-ment étaient l’altération du PS (OR = 3,6, 95 % CI : 1,7-7,7), la dénutrition (OR = 1,8, 95 % CI: 1,0-3,3), et le nombrede syndromes gériatriques (OR = 1,4, 95 % CI : 1,1-1,8).

Enfin, des communications ont présenté des élémentsliés à l’organisation de la filière et de l’activité oncogéria-trique. Ainsi, l’équipe lyonnaise a fait part de son expé-rience pionnière en France concernant l’organisation d’uneréunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) oncogé-riatrique spécifique 11. Leur étude a porté sur 300 patients,et la discussion lors de ces réunions de concertationoncogériatrique a montré un fort intérêt pour l’élaborationcommune d’un programme de soins adapté.

Les communications oncogériatriques lors du CIFGGont donc été nombreuses et de qualité. La thématique onco-gériatrique est désormais, lors des congrès généralistesde gériatrie et de gérontologie, absolument incontourna-ble tant dans le champ médical que paramédical et dansl’espace des sciences humaines. n

9ème Congrès International Francophone de Gériatrie et Gérontologie (CIFGG)

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Bibliographie :1 Rainfray M, Soubeyran P, Bellera C, Mertens C. Validation d’un outil de dépistage en oncogériatrie(G-8) dans une cohorte de 1669 patients âgés de plus de 70 ans, atteints de tumeurs malignes etdevant recevoir un traitement : étude oncodage. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 246 (O2.2).2 Moulias S, Benoist S, Brouquet A, Teillet L, Cudennec T. Facteurs de risque de syndrome confusion-nel lors de chirurgie digestive carcinologique du sujet âgé, résultats d’une étude prospective menéeauprès de 108 patients. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 249 (O2.9).3 Bereder I, Boulahssass R, Mailland V, Couderc AL, Brocker P, Guérin O, et al. Cytoréduction chirurgi-cale et chimio-hyperthermie intra péritonéale pour le traitement de la carcinose péritonéale chez 59patients âgés de plus de 65 ans. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 412 (P4.2-168).4 Blanc-Bisson C, Rainfray M, Mathoulin-Pelissier S. La qualité de vie : l’état nutritionnel et l’autono-mie, des facteurs déterminants. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 412 (P4.2-169).5 Cudennec T, Gendry T, Moulias S, Chinet T, Teillet L. Utilisation d’une évaluation gériatrique simplifiéeen oncologie thoracique. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 416 (P4.2-179).6 Fanon JL, Godaert-Simon L, Khattar M, Rouquet-Saliba C, Delobel R, Bonnet M, et al. Cah AnneeGerontol 2010; 2: 417 (P4.2-182).7 Magarian MF, Pauly V, Potard I, Molines C, Retornaz F. Prise en charge des patients âgés atteints decancer: intérêt de la consultation d’évaluation gériatrique. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 422 (P4.2-194).8 Lagrandeur J, Mitry E, Cudennec T, Moulias S, Moussous W, Teillet L. Est-il pertinent de traiter lesformes avancées de cancer du pancréas après 75 ans? Cah Annee Gerontol 2010; 2: 420 (P4.2-188).9 Blanc-Bisson C, Blanc JF, Houede N, Mertens C. Le MNA: un facteur pronostic très puissant de la sur-vie des patients âgés cancéreux. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 413 (P4.2-170).10 Caillet P, Vouriot J, Canoui-Poitrine F, Berle M, Reinald N, Krypciak S, et al. Facteurs indépendantsassociés à une modification multivariée chez 392 patients âgés cancéreux. Cah Annee Gerontol 2010;2: 413 (P4.2-172).11 Castel-Cremer I, Terret C, Lombard-Bohas C, Albrand G. Démarche décisionnelle en oncogériatrieà propos de 300 patients de plus de 70 ans. Cah Annee Gerontol 2010; 2: 414 (P4.2-173).

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Le Journal d’OncoGériatrie : Comment évaluez-vous l’évolution du concept d’oncogériatrie au coursdes 10 dernières années?

Michel Hery: Le concept d’oncogériatrie était, il y encore10 ans, une grande nébuleuse. Ces dernières années, grâceà une prise de conscience collégiale, des actions menéespar l’INCa, mais aussi de terrain comme le MAO (MonacoAge Oncologie), nous avons pu observer une grande évo-lution ; en effet, il existe aujourd’hui une évaluation géria-trique qui est entrée dans les mœurs, bien qu’encoreinexistante à la fin des années 90.

De plus en plus de travaux spécifiques ou d’essais thé-rapeutiques sur le sujet âgé sont réalisés (exemple decommunication à l’ASCO sur le cancer digestif chez le sujetâgé, ce qui témoigne d’une réelle progression). Les spé-cificités du sujet âgé sont mises en avant et davantageprises en compte, ce qui nous permet également de mieux« catégoriser/classer » les patients âgés et ainsi, de lestraiter plus facilement et efficacement.

Parmi les progrès réalisés, au travers du MAO, nouspouvons recenser l’amélioration de la prise en charge dupatient âgé entre le gériatre et l’oncologue. Pendant long-temps, l’oncogériatrie était dédiée aux oncologues unique-ment, éludant le versant « gériatre » et ne permettant doncpas l’apprentissage mutuel.

Enfin, citons un autre exemple patent de cette évolution :la création des DU/DIU d’oncogériatrie qui participent audéveloppement de l’oncogériatrie et au partage desconnaissances entre oncologues, gériatres et infirmières.

Le JOG: Quels sont, selon vous, les facteurs d’ac-célération de la prise de conscience des deux spé-cialités?

M.H. : Lors de la 1ère réunion du MAO en 2007, il est res-sorti l’importance de lier les spécialités d’oncologie et degériatrie, car les gériatres sont une ressource essentiellequi permet de mieux comprendre les patients et de pren-dre en compte leur vieillissement.

Le JOG: Quels pourraient être les freins à la conti-nuité de l’ouverture entre l’oncologie et la gériatrie,donc au développement de l’oncogériatrie?

M.H. : Il existe un ralentissement dans cette ouverturecar beaucoup d’oncologues ont du mal à « franchir le pas »et à faire appel aux gériatres. Pourtant il est essentiel defaire équipe et de s’ouvrir aux autres, afin d’améliorer lapratique courante.

Le JOG: Cependant, il serait difficile d’impliquer desgériatres partout, nous ferions face à une pénuriedans cette spécialité…

M.H. : Il est évident qu’il ne faut pas faire appel auxgériatres pour tous les patients de 75 ans ; néanmoins,si les oncologues notent une fragilité chez leur patient,il est primordial qu’ils puissent s’adresser à un gériatre,dans des situations bien précises afin d’utiliser leursavoir et leurs spécificités à bon escient. Peut-êtreexiste-il aujourd’hui une méconnaissance du rôle desgériatres ?

Le JOG: Concernant l’oncogériatrie dans sa pra-tique quotidienne, quelles actions concrètes mettreen place sur l’ensemble du territoire?

M.H. : Il est important de favoriser et de multiplier les réu-nions de rencontres entre oncologues et gériatres pourcréer de bonnes relations, partager sur des sujets com-muns et ouvrir des portes, afin de promouvoir le “partage”du malade.

Le JOG: Hormis les réunions, quelles actions de ter-rain pourrions-nous mettre en place pour favoriserce rapprochement?

M.H. : Nous pourrions faire participer les gériatres à l’éla-boration des essais thérapeutiques car bien souvent lepatient âgé n’est pas traité de façon optimale. Il est doncimportant d’intégrer les gériatres dans notre réflexion etconfronter nos expertises et points de vue.

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L’Oncogériatrie, un partage des compétences :position du Docteur Michel Hery, co-présidentdu congrès Monaco Age Oncologie (MAO)Interview du Docteur Michel Hery, Service de radiothérapie, Centre Hospitalier Princesse Grâce, Avenue Pasteur,98000 Monaco, Monaco. Par Dimitri Verza, Directeur de la publication du Journal d’OncoGériatrie

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Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrieVOLUME 1 - N°6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 294

Le JOG: Jusqu’où aller dans ce transfert de com-pétences entre oncologues et gériatres? Faut-il allerjusqu’à une double compétence?

M.H. : Il est difficile de dire jusqu’où ira le partage dumalade, nous devons avancer pas à pas.

Le JOG: Quels sont vos vœux « oncogériatriques »pour 2011-2012?

M.H. : Augmenter les partenariats entre oncologues etgériatres et impliquer davantage les gériatres dans cette

collaboration. Il faut créer des actions pour que les onco-logues et les gériatres s’impliquent dans ce rapproche-ment et se mélangent davantage. La programmation dudéploiement de nouvelles Unités de Coordination enOncoGériatrie dans le cadre du plan cancer 2009-2013,sous l’égide de l’INCA, va dans ce sens. n

L’Oncogériatrie, un partage des compétences : position du Docteur Michel Hery, co-président du congrès Monaco Age Oncologie (MAO)

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AgendaFévrier 2011• 1er – 4 février, Paris – 22nd International Congress on Anti-Cancer Treatment

www.icact.com• 3 – 5 février, Monaco – 3ème Monaco Age Oncologie

www.mao-monaco.org• 17 – 19 février, Orlando, États-Unis – ASCO Genitourinary Cancers Symposium

www.gucasymposium.org

Mars 2011• 10 – 12 mars, Paris – Congrès 2011 de la Société Française d’Hématologie

sfh.hematologie.net• 16 – 19 mars, St. Gallen, Suisse – 12th St. Gallen International Breast Cancer Conference

www.oncoconferences.ch• 18 – 22 mars, Vienne, Autriche – EAU Annual Congress

www.eauvienna2011.org• 19 mars, Paris – 14èmes Rencontres Infirmières en Oncologie

www.assoafic.org

Avril 2011• 2 – 6 avril, Orlando, États-Unis – American Association for Cancer Research 102nd Annual Meeting

www.aacr.org• 3 – 6 avril, Paris – 37th Annual Meeting of the European Group for Blood and Marrow Transplantation

www.ebmt.org

Mai 2011• 11 – 14 mai, Washington, DC, États-Unis – Annual Scientific Meeting of the American Geriatrics Society

www.americangeriatrics.org• 14 – 19 mai, Washington, DC, États-Unis – AUA 2011 Annual Meeting

www.aua2011.org

Retrouvez l’agenda complet des congrès sur notre site internet www.le-jog.com

Petites AnnoncesCet espace vous est réservé afin de publier vos annonces emploi

(postes à pourvoir, recherches de postes disponibles, etc.).Votre annonce sera également publiée en ligne sur notre site internet www.le-jog.com

N’hésitez pas à contacter notre service Petites Annonces pour toute demande d’information : [email protected]