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Darius Milhaud Un ogre en musique Voici un compositeur, véritable ogre de la composition avec ses plusieurs centaines (cinq cents !) d’œuvre, un véritable fleuve Amazone de la musique !_ C’est un grand compositeur français né le 4 septembre 1892 à Aix-en-Provence, en fait à Marseille, mais il avait masqué son état civil pour rendre hommage à la ville de son cœur, et mort le 22 juin 1974 à Genève._Il s’agit de Darius Milhaud._Milhaud c’est le profane comme le Bœuf sur le toit et aussi le sacré comme le Service Sacré. Mais contrairement à Poulenc qui allait de l'un à l'autre pour expier "ses turpitudes", Milhaud qui n'a rien à se faire pardonner, porte en lui ses deux aspects. Donc un homme à plusieurs faces, mais avec en lui un immense appétit de vivre et de composer._Il se définissait ainsi, et il tenait à cette définition :_«Français né à Aix et de confession israélite »._Il mettait en avant fortement ses ancrages juifs et français. _Quel judaïsme français s’agit-il ?_D’un des plus vieux, le judaïsme provençal, celui du comtat vénessin._Un peu d’histoire sur ces juifs spécifiques du Sud-Est, que l’on aura appelé les juifs du pape. Les juifs du comtat Venaissin Je me suis servi du livre Les Juifs du Pape de René Moulinas éd. Albin Michel, collection "Présences du Judaïsme" qui dit ceci : "La présence juive est attestée à Marseille et dans la Vallée du Rhône depuis l'Antiquité. À l’époque romaine, des communautés actives existent. Il est donc probable qu'elles se composent non seulement de juifs exilés mais aussi de gallo-romains convertis. _Après l'expulsion des juifs du Royaume de France en 1394, les communautés d'Avignon, Carpentras, Cavaillon et L'Isle-sur-la-Sorgue, qui dépendent non du roi de France mais du Pape, subsistent, moyennant une série de conditions humiliantes : port d'un chapeau de couleur jaune, résidence obligatoire dans un ghetto de quelques rues ("carriero" en

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Darius Milhaud

Un ogre en musiqueVoici un compositeur, véritable ogre de la composition avec sesplusieurs centaines (cinq cents !) d’œuvre, un véritable fleuveAmazone de la musique !_ C’est un grand compositeur français né le4 septembre 1892 à Aix-en-Provence, en fait à Marseille, mais il avaitmasqué son état civil pour rendre hommage à la ville de son cœur, etmort le 22 juin 1974 à Genève._Il s’agit de Darius Milhaud._Milhaudc’est le profane comme le Bœuf sur le toit et aussi le sacré comme leService Sacré. Mais contrairement à Poulenc qui allait de l'un à l'autrepour expier "ses turpitudes", Milhaud qui n'a rien à se faire pardonner,porte en lui ses deux aspects.

Donc un homme à plusieurs faces, mais avec en lui un immenseappétit de vivre et de composer._Il se définissait ainsi, et il tenait àcette définition :_«Français né à Aix et de confession israélite »._Ilmettait en avant fortement ses ancrages juifs et français. _Queljudaïsme français s’agit-il ?_D’un des plus vieux, le judaïsmeprovençal, celui du comtat vénessin._Un peu d’histoire sur ces juifsspécifiques du Sud-Est, que l’on aura appelé les juifs du pape.

Les juifs du comtat Venaissin

Je me suis servi du livre Les Juifs du Pape de René Moulinas éd.Albin Michel, collection "Présences du Judaïsme" qui dit ceci :

"La présence juive est attestée à Marseille et dans la Vallée du Rhônedepuis l'Antiquité. À l’époque romaine, des communautés activesexistent. Il est donc probable qu'elles se composent non seulement dejuifs exilés mais aussi de gallo-romains convertis. _Après l'expulsiondes juifs du Royaume de France en 1394, les communautés d'Avignon,Carpentras, Cavaillon et L'Isle-sur-la-Sorgue, qui dépendent non duroi de France mais du Pape, subsistent, moyennant une série deconditions humiliantes : port d'un chapeau de couleur jaune,résidence obligatoire dans un ghetto de quelques rues ("carriero" en

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provençal) fermées chaque soir, paiement de taxes particulières,obligation d'assister périodiquement à des prêches les appelant à laconversion, etc. Pour l'Église, le maintien d'un petit groupe de juifsmisérables et abaissés doit témoigner du sort d'Israël, puni pour avoirrefusé le christianisme. La répétition au cours des âges de mesuresrestrictives est toutefois l'indice qu'elles étaient en réalité peuappliquées. Les "juifs du Pape", comme ils seront appelés, semblentavoir en fait eu de bonnes relations avec leurs concitoyens chrétiens.Un judaïsme comtadin original se développe. Il ne se rattache ni aucourant séfarade (d'origine espagnole, qui se rencontre dans lesrégions du bassin méditerranéen et en France dans le Sud-Ouest) niau courant ashkénaze (de l'Alsace-Lorraine et de l'Europe centrale etorientale). Il se caractérise par une organisation très structurée descommunautés, une totale endogamie, un rituel propre. Les juifsparlent un dialecte judéo-provençal._Au cours du XVIIIème siècle, lasituation économique des juifs s'améliore. Les comtadins voyagentbeaucoup dans tout le Midi de la France, certains s'installent de façonsemi-permanente à Nîmes, Montpellier, etc. L'usage du français serépand. Témoin de cette prospérité nouvelle, la construction de lasplendide synagogue de Carpentras. Par contre, la vie quotidienne nepeut guère refléter l'enrichissement des juifs du Pape, qui ne peuvents'établir hors des "carrières" surpeuplées. Ces lieux étaient desghettos_La Révolution française, avec le rattachement à la Franced'Avignon et du Comtat Venaissin, marque pour les juifs une véritablelibération. Malgré une opposition (peu virulente, d'ailleurs) decertains, les juifs du Pape deviennent citoyens français. En quelquesannées, les carrières se vident. Les juifs prennent une part active auxévénements révolutionnaires, en particulier à Nîmes, et se dispersentdans toutes les grandes villes du Midi, et jusqu'à Paris. En sommeilpendant un siècle et demi, les communautés d'Avignon et deCarpentras retrouvent une nouvelle vie après 1962, avec l'arrivée dejuifs rapatriés d'Algérie. Mais ce n'est plus le même judaïsme.".

Revenons à Darius Milhaud.

Il est l’unique enfant d'une grande famille juive aisée, installée depuislongtemps dans le sud de la France, dont les origines remontent au 15èsiècle, sans doute en fait au 10è siècle. Il s’agit de la famille Milhaud

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de Carpentras, la Jérusalem de Provence. Ni ashkénaze, ni séfarade, ilétait juif provençal. Ses parents étaient tous deux musiciens amateurs,et sa mère connaissait la tradition des chants spécifiques des juifsprovençaux. Son père fonde d’ailleurs la Société Musicale d’Aix en-Provence._Esprit curieux, épris de la vie, il passe sa jeunesse à Aix-en-Provence. Sa ville tant aimée, celle du roi René et des calissons, dufestival et des grands bourgeois. Son arrière-grand-père, JosephMilhaud avait fondé la synagogue d’Aix en Provence en 1840 etpublié des traités sur la Torah._Il montre des dons précoces et apprendle violon dès l’âge de sept ans et compose. Il entre en 1909 auConservatoire de Paris. Milhaud assimile avec une facilitédéconcertante toutes les influences, une véritable éponge à musique :il est l'élève de Gustave Leroux pour l'harmonie, André Gédalge pourle contrepoint, Charles-Marie Widor pour la composition et surtoutPaul Dukas pour l'orchestration, celui de l’apprenti sorcier maissurtout d’Ariane et Barbe-bleue._Il complète sa formation avecCharles Koechlin, grand méconnu de la musique française._Il estprofondément influencé par les écrivains Francis Jammes ("de l’eaufroide en pleine figure") et Paul Claudel et devient l'ami de Léo Latil,un poète qui fut tué en 1915 lors de la Première Guerre mondiale ( illui dédie son troisième quatuor). Il découvre l’œuvre de Paul Claudelen 1913, et jusqu’en 1923 il écrit des musiques sur les textes du poète(Choéphores, Euménides, Orestie). Inapte au service militaire, iltravaillera dans un foyer pour réfugiés.

 

De 1916 à 1918, il séjourne à 25 ans, au Brésil en qualité de secrétaired'ambassade, où il rejoint Paul Claudel. Il y découvre le folklore sud-américain et les rythmes exotiques. lui ne connaissait comme musiqued’ailleurs que les chants religieux de la synagogue d’Aix._Ils’imprègne totalement de l'art populaire sud-américain qui le marquepour toujours et qu'il immortalise dans les Saudades do Brazil [1920-1921] pour piano._Dès son retour en France, il rejoint « le groupe dessix ». Plutôt canular de journaliste (les cinq Russes et les six français),qu’école de pensée musicale, ce groupe de six copains compositeurs

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avec pour gourou Erik Satie promeut au lendemain de la PremièreGuerre mondiale, une rupture avec le sérieux de la musique. Marquépar le cirque et la dérision avec pour communiquant et MonsieurLoyal, Jean Cocteau qui se prendra lui au sérieux, ce groupe proclamela légèreté, l'humour, la simplicité et la clarté. Et aussi un clin d’œil àla modernité._« Ayant grandi au milieu de la débâcle wagnérienne etcommencé d'écrire parmi les ruines du debussysme, imiter Debussy neme paraît plus aujourd'hui que la pire forme de la nécrophagie. » lit-on dans la revue le Coq et l’Arlequin. _Et ceci aussi :_« Depuis, nousavons eu le cirque, le music-hall, les parades foraines et lesorchestres américains. Comment oublier le Casino de Paris, ce petitcirque, boulevard Saint-Jacques, ses trombones, ses tambours. Toutcela nous a réveillés. ». , La création du bœuf sur le toit de Milhaud sefait n 1920 au Théâtre des Champs-Élysés avec la présence sur scènedes fameux frères Fratellini,_Ce groupe se compose de FrancisPoulenc, D’Arthur Honegger, de Germaine Tailleferre, de LouisDurey, de Georges Auric et bien sûr de Milhaud. La plupart sont sesamis du Conservatoire._Ces six musiciens recherchaient, à choquer età s’opposer à Wagner Debussy, Fauré, Ravel._Il participe avec eux àla brève aventure du " Groupe des Six " en réaction avec la complexitéde la musique qui se faisait autour d’eux. Les Mariés de la Tour Eiffel,sera l’œuvre emblématique composée par les six ensemble (Dureyétant complété par Tailleferre)_Parmi ce groupe, Darius Milhaud,véritable force de la nature, avait un tempérament très puissant et iln’hésitait pas dans ses œuvres, parfois agressives, à faire un largeusage de la polytonalité, c’est-à-dire de faire entendre plusieursmélodies simultanément dans des tonalités différentes, sans jamais,pour autant, sombrer dans l’anarchie ou la cacophonie, et dejuxtaposer brutalement des tonalités fort différentes._Milhaud estd’expression polyphonique par excellence._C'est l'époque du Bœufsur le toit, mais aussi des Choéphores et des Euménides. En 1923, aucours d'un séjour aux Étatisons, il découvre le jazz. Son caractèrejoyeux trouve un écho dans l'atmosphère du Paris de l'après-guerre etc'est à ce moment qu'il s'intéresse à un autre art populaire : le jazznord-américain qui fait les beaux jours (ou plutôt les belles nuits) duParis des années folles. Il ne reste rien de ce groupe, selon moi quidéteste Erik Satie et Poulenc, et Cocteau. En fait il reste

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Milhaud._Voyageant énormément, il partage son temps entre lacomposition et l'enseignement. En 1940, fuyant les nazis, il repartpour les Etats-Unis, où il enseigne au Mills Collège d'Oakland (postequ'il conservera jusqu'en 1971). Plus de vingt de ses cousins serontexterminés par les nazis. Il retournera à ses racines juives en leurmémoire._À partir de 1947, il partage ses activités d'enseignant entrela France, où il est professeur de composition au Conservatoire deParis, et les États-Unis._Il continue à adorer les voyages. Il composele plus souvent à Aix-en-Provence._L'arthrite qui le paralyse peu àpeu ralentit à peine son activité incessante couronnée en 1971 parl'élection à l'Académie des Beaux-Arts. ._Il meurt en 1974 à Genèveet repose à Aix-en-Provence, comme il l'avait souhaité. _Sesmémoires s’intitulent « Ma vie heureuse », et elle le fut.

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Ses œuvres :

Très prolixe, beaucoup trop car combien d’œuvres inutiles dans soncorpus - le catalogue de ses œuvres ne comporte pas moins de quatrecent quarante-trois numéros d'opus ! Cas rare en ce siècle, Milhaudlaisse une œuvre proprement gigantesque : dans tous les genres,illustrant toutes les formes et jouant de toutes les combinaisonsi n s t r u m e n t a l e s ( «  opéra-minute », «  symphonieminiature »)._Particulièrement vaste (443 numéros d'opus), son œuvreaborde tous les genres : opéra (Christophe Colomb), cantates, ballets(la Création du monde), symphonies, musique de chambre(Scaramouche pour deux pianos) et musique de film._Il s'inspire desmusiques provençales, juives, brésiliennes mais aussi du jazz

Son œuvre la plus célèbre est Le Bœuf sur le toit, écrite en 1919, crééele 21 février 1920 au théâtre des Champs-Élysées dans des décors deRaoul Dufy. L'action de ce ballet, dont l'argument fut improvisé parJean Cocteau, se situe dans un bar américain à l'époque de laprohibition. Sa partition exprime à merveille l'exubérance de la vie decette époque. Le compositeur s'y est plu à réunir des airs populaires,des tangos, des maxixes, des rumbas et même un fado portugais, ainsiqu'à les transcrire avec un thème revenant comme un refrain.

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L'argument et la musique présentent un caractère de joie,d'amusement, que renforce la composition de l'orchestre : deux flûtes,un hautbois, deux clarinettes, un basson, deux cors, deux trompettes,un trombone, une petite percussion (dont le guitebaro, instrumentd'Amérique du Sud) et les cordes.

La Création du monde [1923] illustre également les préoccupations del'époque : il s'agit d'exprimer les forces vives et barbares des originesde l'humanité. Cette sorte de mythologie cosmogonique et païenne luia été inspirée par l'Anthologie nègre que venait de faire paraître BlaiseCendrars, et il l'exprime par l'utilisation du langage du jazz new-orleans. Ce ballet fut donné au théâtre des Champs-Élysées le 25octobre 1923 par la compagnie des Ballets suédois de Rolf de Maré,dans un décor et des costumes de Fernand Léger.

Son style

Son langage d'un grand lyrisme utilise surtout les ressources del'écriture horizontale (contrepoint) dans la superposition de mélodiesindépendantes, d'accords, de rythmes, ou de groupes instrumentaux,qui lui permet d'explorer les richesses de la polytonalité, ou lescomplexités de la polyrythmie. _Contrapuntiste exceptionnel, il a écritdeux quatuors à cordes qui peuvent être joués ensemble sous formed'octuor. Outre la fécondité jaillissante et l'invention mélodique, lescaractéristiques de son œuvre sont l'utilisation de la polytonalité, celledes rythmes exotiques ou du jazz qu’il adorait pour ses syncopes etson improvisation, (La Création du monde, 1923) et le lyrisme. Au-delà de l'éclectisme des formes et de la complexité d'écriture, sonœuvre témoigne d'un style très personnel, aisément identifiable, unesorte de modernisme épuré mis au service d'une expression généreuse.Brésil, Afrique, Jazz et judaïsme provençal forment son inspiration.

Sa fascination du ballet

Le ballet est un genre privilégié par le "Groupe des Six" en général etpar Milhaud en particulier. Les raisons sont de deux ordres : lapremière réside dans la rivalité qui oppose bientôt la troupe desBallets russes à celle des Ballets suédois. Serge Diaghilev comme

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Maré font appel aux jeunes musiciens de l'avant-garde, à ceux quiécrivent la musique la plus révolutionnaire et qui, de ce fait, leurassurent le succès, fût-il de scandale comme celui du Sacre [1913] oude Parade [1917]. La deuxième consiste en ce que l'esthétique desballets qui se fonde sur la fusion des arts - musique, danse, décor -s'inscrit complètement dans l'esprit des années vingt, où lacollaboration entre artistes a rarement été plus active et féconde.Milhaud écrit cinq ballets entre 1920 et 1930, et certains d'entre euxconstituent ses œuvres les plus célèbres : Le Bœuf sur le toit,L'Homme et son désir et La Création du monde ont été composés pourles Ballets suédois. Sa collaboration avec les Ballets russes débuteavec Le Train bleu [1924]. Il y retrouve l'esprit du divertissement dansla plus pure esthétique du " Groupe des Six "_Milhaud et le judaïsme

Juif de tradition, plutôt que de conviction, il se sentait plus israéliteque juif._Il se disait avant tout français et juif de France. Pour lui lejudaïsme devait s’intégrer dans la modernité._Il n’était pas l’hommedes grands élans mystiques mais il était aussi bien capable d’écrirepour la pape une ode pour la paix (Pacem in Terris), que pour lecirque. C’est le produit des grandes familles juives implantées depuistoujours en France. Une haute bourgeoisie en sorte. Il n’utilise presquepas les airs traditionnels des Juifs du Comtat Venaissin,_Il n’a parcontre jamais renié ses attaches et a composé un Service Sacré.

Œuvres sacrées

Milhaud aura écrit les œuvres suivantes :_* poèmes juifs (1916)_*Prières journalières à l’usage des juifs du Comtat Venaissin_*Cantate nuptiale_* Liturgie Comtadine_* Le Service sacré reprenantles traditions synagogales du Comtat Venaissin_* l'oratorio Davidcomposé pour le troisième millénaire de Jérusalem en 1955 Composéen 1952 pour le Festival de Musique d'Israël, et publié à Tel-Aviv,David est l'œuvre qui accorde la plus grande part à l'Histoire. _*L'opéra Esther de Carpentras, hommage à « la Jérusalem de laProvence »._* la cantate « Ani Maamin » en 1974, sa dernière œuvre.Le sous-titre est « Le chant perdu et retrouvé ». Les symboles ne sontpas minces._La cantate s’appuie sur un texte d’Elie Wiesel, déporté àl’âge de quinze ans à Auschwitz. Treblinka, Maidanek, Auschwitz, le

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père tué devant le fils, l’enfant étranglé dans les bras de sa mère, voilàce que racontent les solistes et les chœurs. Mais c’est aussil’expression d’une foi qui ouvre sur des questions éternelles, quechacun pose et essaie de résoudre à sa façon : responsabilité d’un dieu,responsabilité des hommes. Elie Wiesel témoigne d’une croyance dontla grandeur reconnaissable par tous est de porter l’horreur à la face dumonde, à la mémoire du temps._La cantate de Darius Milhaud confieà quatre voix parlées les rôles d’Abraham, Isaac, Jacob et du récitant.La soprano porte le texte de la pensée divine qui peut s’interprétercomme un silence devant le drame de l’homme. Le chœur estomniprésent et exprime le désarroi du peuple hébreu. _« Ani maaminbeviat ha-Mashiah » signifie « Je crois en la venue du Messie »._Lapartition de Darius Milhaud porte en exergue ces lignes : _« C’est l’undes treize principes de la Foi énoncés par Maimonide. C’estégalement le chant que, dans les camps et les ghettos, les juifs pieux etobstinés ont choisi comme hymne. Leur foi, au lieu de consoler etd’apaiser les survivants, ne fait que les déconcerter. Affirmation etprovocation à la fois, elle ne peut pas susciter d’inquiétude. Etpourtant... ».

* 6 Chants populaires hébraïques (1940)_* la musique de Samaëltexte d’André Spire, en 1953. _* Caïn et Abel pour récitant, orgue etorchestre. _* Candélabre à sept branches_* Saül musique de scène_*Trois psaumes de David

Malgré toutes ces musiques, Darius Milhaud n’est pas vraiment ungrand compositeur juif, mais un compositeur du monde, Brésil etAfrique, jazz, années folles et cirque, font plus de traces en lui. _Ilaura poussé plus loin que quiconque la polytonalité et l’art de ladissonance. Il a inventé un nouvel univers harmonique. Il ne croyaitpas à une révolution musicale, mais à une extension de la tradition._«Chaque œuvre n’est qu’un maillon dans la vaste chaîne, et les idéesnouvelles, les techniques nouvelles ne font que s’ajouter à un vastepassé, une culture musicale, qui sans invention n’aurait pas devalidité. »_Pour le moment dans le purgatoire de la musique, il serarejoué un jour. _Les Choéphores, la création du monde, l’homme etson désir restent des œuvres majeures du siècle passé.

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Principales Œuvres

Opéra_Au nombre de 16 dont :_Les Malheurs d'Orphée [1924],_Esther de Carpentras [1925], _Le Pauvre Matelot [1926],_Christophe Colomb [1928], _Médée [1939],_Bolivar [1943];_L'Enlèvement d'Europe_L'Abandon d'Ariane_La Délivrance deThésée.

Musique de scène_Les Choéphores_Les Euménides_L’orestie

Ballets_Au nombre de 14 dont :_L'homme et son désir_Le Bœuf surle toit_La Création du monde

Musique symphonique_Saudades do Brasil, suite de danses_Suiteprovençale_7 symphonies

Musique de chambre_La Cheminée du Roi René, pour flûte,hautbois, clarinette, cor et basson._Scaramouche pour deux pianos (ouclarinette et orchestre)

Musique vocale_Chants populaires hébraïques_Catalogue defleurs_Le Retour de l'enfant prodigue_Service sacré du matin duSabbat.