2
Analyses commentees 211 En conclusion, il s’agit d’un travail t&s important, venant d’une Cquipe reputee dans ce domaine de recherche. Mais, et c’est le problbme actuel de la thera- pie gtnique, si de nombreux travaux experimentaux sem- blent prometteurs, il faut encore attendre la publication de resultats chez l’homme avant d’avoir une idee plus precise de l’efficacite de la therapie genique en cancero- logie. Dans le cancer du pancreas, un protocole doit pro- chainement debuter au Johns Hopkins Hospital de Balti- more, evaluant chez des patients ayant eu une pancreatectomie pour cancer, l’effet de l’injection syste- mique de cellules de cancer du pancreas, irradiees et exprimant (aprbs transfert in vitro) le gene du GM-CSF. RCfkrences 1 Panis Y, Kienmanesh Rad AR, Boyer 0. Gene therapy for liver tumors. Surg Oncol Clin North Am 1996 ; 5 : 461-73. 2 Kianmanesh AR, Perrin H, Panis Y, Fabre M, Nagy H, Houssin D et al. “Distant” bystander effect of suicide gene therapy: regression of non-transduced tumors together with a distant transduced tumor. Hum Gene Ther 1997 ; 8 : 1807-14. 3 Nagy H, Panis Y, Fabre M, Perrin H, Klatzmann D, Houssin D. Are hepatomas a good target for gene therapy? An experimental study in rats using retroviral-mediated transfer of thymidine kinase gene. Surgery 1998 ; 123 : 19-24. Y. Panis Hopital Lariboisibre, Paris La cryothbrapie dans le traitement des tumeurs hCpatiques Seifert JK, Morris DL. Prognostic factors after cryotherapy for hepatic metastases from colorectal cancer. Ann Surg 1998 ; 228 : 201-8. Seifert JK, Morris DL. World survey on the complications of hepatic and prostate cryotherapy. World J Surg 1999 ; 23 : 109-14. Ces deux etudes prtsenttes par les m&mes auteurs rap- portent : - l’analyse d’une serie de 195 patients trait& par cryothe- rapie hepatique, entre 1990 et 1997, dont 116 pour meta- stases d’origine colorectale, cherchant a identifier les fac- teurs pronostiques de cette methode thtrapeutique ; - les resultats d’une enquete multicentrique internatio- nale sur la morbiditt et la mortalite observees apres cryochirurgie. La premiere etude, retrospective, analyse le devenir d’une serie consecutive de malades porteurs de meta- stases d’origine colorectale, non t-C&cables, dont 54 etaient synchrones et 62 metachrones. Le nombre moyen de metastases traitees etait de trois (de une a neuf), d’une taille moyenne de 35 cm (extremes: 1-13 cm). Chez 33 patients (28,4%), la cryotherapie Ctait combinee a une resection hepatique pour des lesions qui Ctaient, elles, jugees r&&cables. Enfin, 109 patients (94%) benefi- ciaient de la mise en place d’un catheter pour chimiothe- rapie intra-arterielle. Le traitement cryotherapique Ctait juge complet (RO) chez 85 patients (73,3%). Des marges incertaines (Rl) ont ete laissees en place chez 11 patients (9,5 %) et chez 20 patients (17,2%), la resection a etC jugee incomplete (R2) en raison d’atteinte extrahtpatique ou hepatique non r&&able. La mortalitt postoperatoire a Ctt de 0,9 % et concernait un malade de&de d’infarctus du myocarde. La morbidite perioptratoire a et6 de 27,6%. La mediane de survie Ctait de 26 mois avec une survie actuarielle res- pectivement de 82,4, 55,7, 32,3 et 13,4% a un, deux, trois et cinq ans. L’analyse multivariee par regression logistique (modble de Cox) portant sur 15 variables a permis d’identifier sept facteurs pronostiques indepen- dants: un taux d’ACE preoptratoire normal ou faible, la taille de la tumeur traitee par cryotherapie inferieure a 3 cm ; l’absence de tissu tumoral extrahtpatique ; une tumeur primitive histologiquement bien differenciee ; l’absence d’envahissement ganglionnaire par la tumeur primitive ; le caractere complet du traitement cryothera- pique (RO) ; et enfin, le caracthe metachrone des meta- stases (sans preciser la definition du delai ntcessaire pour les qualifier de metachrones). La seconde etude cherche a Cvaluer l’incidence et les donnees cliniques du phtnomene de cccryochoc>> dtcrit aprbs cryotherapie hepatique et aboutissant a un syn- drome de defaillance multivisctrale comportant une coa- gulation intravasculaire disseminte. Cette complication a CtC observee chez 21 des 2 173 patients (1%) trait& et analyses dans cette enquete. Elle Ctait responsable de six d&&s parmi les 33 de&s perioperatoires. Rare mais grave, cette complication a Ctc d&rite apr&s traitement de tumeurs volumineuses necessitant deux cycles de cryotherapie (double freezing ou twin freeze-thaw). Commentaires La premiere etude (A) constitue le premier travail etu- diant les facteurs pronostiques de survie apres cryothera- pie des metastases hepatiques. 11 n’est pas Ctonnant de constater qu’elle retrouve les m&mes facteurs predictifs de bon pronostic qu’apres chirurgie d’exerese des meta- stases d’origine colorectale [ 1, 21. Petite difference

La cryothérapie dans le traitement des tumeurs hépatiques

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Page 1: La cryothérapie dans le traitement des tumeurs hépatiques

Analyses commentees 211

En conclusion, il s’agit d’un travail t&s important, venant d’une Cquipe reputee dans ce domaine de recherche. Mais, et c’est le problbme actuel de la thera- pie gtnique, si de nombreux travaux experimentaux sem- blent prometteurs, il faut encore attendre la publication de resultats chez l’homme avant d’avoir une idee plus precise de l’efficacite de la therapie genique en cancero- logie. Dans le cancer du pancreas, un protocole doit pro- chainement debuter au Johns Hopkins Hospital de Balti- more, evaluant chez des patients ayant eu une pancreatectomie pour cancer, l’effet de l’injection syste- mique de cellules de cancer du pancreas, irradiees et exprimant (aprbs transfert in vitro) le gene du GM-CSF.

RCfkrences

1 Panis Y, Kienmanesh Rad AR, Boyer 0. Gene therapy for liver tumors. Surg Oncol Clin North Am 1996 ; 5 : 461-73.

2 Kianmanesh AR, Perrin H, Panis Y, Fabre M, Nagy H, Houssin D et al. “Distant” bystander effect of suicide gene therapy: regression of non-transduced tumors together with a distant transduced tumor. Hum Gene Ther 1997 ; 8 : 1807-14.

3 Nagy H, Panis Y, Fabre M, Perrin H, Klatzmann D, Houssin D. Are hepatomas a good target for gene therapy? An experimental study in rats using retroviral-mediated transfer of thymidine kinase gene. Surgery 1998 ; 123 : 19-24.

Y. Panis Hopital Lariboisibre, Paris

La cryothbrapie dans le traitement des tumeurs hCpatiques

Seifert JK, Morris DL. Prognostic factors after cryotherapy for hepatic

metastases from colorectal cancer. Ann Surg 1998 ; 228 : 201-8.

Seifert JK, Morris DL. World survey

on the complications of hepatic and prostate cryotherapy. World J Surg 1999 ; 23 : 109-14.

Ces deux etudes prtsenttes par les m&mes auteurs rap- portent : - l’analyse d’une serie de 195 patients trait& par cryothe- rapie hepatique, entre 1990 et 1997, dont 116 pour meta- stases d’origine colorectale, cherchant a identifier les fac- teurs pronostiques de cette methode thtrapeutique ; - les resultats d’une enquete multicentrique internatio- nale sur la morbiditt et la mortalite observees apres cryochirurgie.

La premiere etude, retrospective, analyse le devenir d’une serie consecutive de malades porteurs de meta- stases d’origine colorectale, non t-C&cables, dont 54 etaient synchrones et 62 metachrones. Le nombre moyen de metastases traitees etait de trois (de une a neuf), d’une taille moyenne de 35 cm (extremes: 1-13 cm). Chez 33 patients (28,4%), la cryotherapie Ctait combinee a une resection hepatique pour des lesions qui Ctaient, elles, jugees r&&cables. Enfin, 109 patients (94%) benefi- ciaient de la mise en place d’un catheter pour chimiothe- rapie intra-arterielle.

Le traitement cryotherapique Ctait juge complet (RO) chez 85 patients (73,3%). Des marges incertaines (Rl) ont ete laissees en place chez 11 patients (9,5 %) et chez 20 patients (17,2%), la resection a etC jugee incomplete (R2) en raison d’atteinte extrahtpatique ou hepatique non r&&able. La mortalitt postoperatoire a Ctt de 0,9 % et concernait un malade de&de d’infarctus du myocarde. La morbidite perioptratoire a et6 de 27,6%. La mediane de survie Ctait de 26 mois avec une survie actuarielle res- pectivement de 82,4, 55,7, 32,3 et 13,4% a un, deux, trois et cinq ans. L’analyse multivariee par regression logistique (modble de Cox) portant sur 15 variables a permis d’identifier sept facteurs pronostiques indepen- dants: un taux d’ACE preoptratoire normal ou faible, la taille de la tumeur traitee par cryotherapie inferieure a 3 cm ; l’absence de tissu tumoral extrahtpatique ; une tumeur primitive histologiquement bien differenciee ; l’absence d’envahissement ganglionnaire par la tumeur primitive ; le caractere complet du traitement cryothera- pique (RO) ; et enfin, le caracthe metachrone des meta- stases (sans preciser la definition du delai ntcessaire pour les qualifier de metachrones).

La seconde etude cherche a Cvaluer l’incidence et les donnees cliniques du phtnomene de cccryochoc>> dtcrit aprbs cryotherapie hepatique et aboutissant a un syn- drome de defaillance multivisctrale comportant une coa- gulation intravasculaire disseminte. Cette complication a CtC observee chez 21 des 2 173 patients (1%) trait& et analyses dans cette enquete. Elle Ctait responsable de six d&&s parmi les 33 de&s perioperatoires. Rare mais grave, cette complication a Ctc d&rite apr&s traitement de tumeurs volumineuses necessitant deux cycles de cryotherapie (double freezing ou twin freeze-thaw).

Commentaires

La premiere etude (A) constitue le premier travail etu- diant les facteurs pronostiques de survie apres cryothera- pie des metastases hepatiques. 11 n’est pas Ctonnant de constater qu’elle retrouve les m&mes facteurs predictifs de bon pronostic qu’apres chirurgie d’exerese des meta- stases d’origine colorectale [ 1, 21. Petite difference

Page 2: La cryothérapie dans le traitement des tumeurs hépatiques

212 Analyses commenttes

cependant, en cas d’exerese chirurgicale, la limite du facteur de bon pronostic concernant la << taille>> de la tumeur se situe autour de 5 cm, au lieu des 3 cm pour la cryotherapie. D’autres etudes [3] avaient mis en Cvi- dence le role tres utile de la cryotherapie qui permet d’augmenter le nombre de malades pouvant beneficier d’une eradication de leurs metastases hepatiques.

La survie actuarielle a cinq ans observee ici est infe- rieure a celle obtenue apres exe&e chirurgicale [2]. Cependant, morbidite et mortalite sont cornparables. Les auteurs insistent sur les indications retenues, a savoir les patients porteurs de lesions non r&&cables, et confirment que la chirurgie d’exerbse est preferable chaque fois qu’elle est rtalisable. La cryotherapie apparait comme une methode complementaire utile pour atteindre I’ob- jectif de resection-destruction complete (RO) lorsque celui-ci ne peut Ctre realise par l’exerese seule.

Dans cette etude, une chimiotherapie intra-arterielle a CtC instituee dans la grande major&C des cas contribuant probablement a la qualitt des taux de survie enregistres. Ce traitement complementaire introduit une action sup- pltmentaire qui rend plus difficile l’appreciation de l’ef- ficacite reelle de la cryotherapie. Cette association thera- peutique avait d’ailleurs Cte recommandee auparavant [4]. Une etude prospective recente [5] a conclu a I’effica- cite de la cryotherapie en termes de survie, dans le traite- ment des metastases d’origine colorectale qu’il s’agisse de traitement a vi&e palliative ou curative.

11 apparait une fois de plus que seule l’exerese com- plete (RO) des metastases d’origine colorectale est justi- free mais que cet objectif peut Ctre atteint par la combi- naison resection-cryotherapie. 11 serait interessant dans cette approche de comparer l’efficacite de la cryothera- pie a d’autres methodes (telle que la destruction tumorale par utilisation de radiofrequence).

RCf6rence.s

1 Nordlinger B, Jaeck D. Traitement des m&stases hdpatiques des cancers colorectaux. Monoerauhie de I’Association francaise de chi-

rurgie (AFC). Paris : Sprin&r:Verlag ; 1992. p. 181. ’ 2 Jaeck D, Bachellier P, Guiguet M, Boudiema K, Vaillant JC, Balla-

dur P, Nordlinger B and the Association fratqaise de chirurgie. Long-term survival following resection of colorectal hepatic metas- tases. Br .I Surg 1997 ; 84 : 977-80.

3 Adam R, Akpinar E, Johann M, Kunstlinger F, Majno P, Bismuth H. Place of cryosurgery in the treatment of malignant liver tumors. Ann Surg 1997 ; 225 : 39-50.

4 Preketes AP, Caplehom JRM, King .I, Clingan PR, Ross WB, Mor- ris DL. Effect of hepatic artery chemotherapy on survival of patients with hepatic metastases from colorectal carcinoma treated with cryotherapy. World J Surg 1995 ; 19 : 768-71.

5 Korpan NN. Hepatic cryosurgery for liver metastases. Long-term follow-up. Ann Surg 1997 ; 225 : 193-201.

D. Jaeck Hopital de Hautepietre, Strasbourg

RCsection hkpatique avec exclusion vasculaire totale

Evans PM, Vogt DP, Mayes JT, Henderson M, Walsh RM. Liver resection using total vascular exclusion.

Surgery 1998 ; 124: 807-15

Dans cette etude retrospective, 61 resections hepatiques realisees sous exclusion vasculaire sont rapportees. Les indications ont concern6 des tumeurs volumineuses, cen- trales, necessitant le plus souvent une hepatectomie majeure, mais aussi des lesions plus limitees (15 seg- mentectomies). La pathologie responsable Ctait essentiel- lement maligne (39 metastases, 15 tumeurs malignes pri- mitives). Le foie non tumoral n’etait jamais cirrhotique. 11 faut noter que 21% des operes avaient un age sup& rieur a 70 ans.

La technique optratoire de l’exclusion vasculaire totale ne comporte pas beaucoup d’originalid: abord abdominal, dissection des elements hilaires, mobilisation complete du foie. Aprbs un test de tolerance hemodyna- mique au triple clampage (pedicule hepatique - veine cave inferieure de part et d’autre du foie), la resection est pratiquee a l’aide d’un dissecteur ultrasonique. Apres levee des clamps et controle de l’hemostase avec recours au coagulateur Argon, la paroi est refermee sur un drain aspiratif. L’exclusion vasculaire du foie a tte bien toleree au plan hemodynamique chez tous les patients. Cepen- dant, le triple clampage a entrain6 une hypotension arte- rielle cinq fois, le remplissage vasculaire par 500 a 1000 mL de cristalldides assurant par la suite une t&s bonne tolerance. La duree moyenne du clampage a Cte de 39 f 13,2 minutes (11 a 80 minutes). Les transfusions peroptratoires ont ett de 1,45 + 1,9 U de sang (48% de cas sans aucune transfusion). La duree de sejour en soins intensifs a CtC de 1,3 f 1,2 jours, et la dur&e globale de l’hospitalisation de 9,5 f 4,0 jours. La mortalit n’a CtC que d’un cas sur 61 (1,6%). Ce cas conceme un homme de 22 ans ayant subi une hepatectomie droite Clargie pour carcinome fibrolamellaire de 22 cm de diametre, sans hypertrophie du lobe gauche. Un temps de clam- page de 79 minutes a CtC suivi d’insuffisance hepatocel- lulaire irreversible aboutissant au d&s 4 semaines aprbs l’intervention. La morbidite a CtC de 36% et il faut remarquer deux autres cas d’insuffisance hepatocellu- laire reversible.

Les auteurs soulignent l’interet de l’exclusion vascu- laire pour realiser les hepatectomies exsangues ou presque dans de bonnes conditions techniques. Un clam- page prolonge au-de18 de 45 minutes est correle a une