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Directeur de la publication : Edwy Plenel www.mediapart.fr 1 1/6 La Ligue de défense juive, un groupuscule d'extrême droite aux méthodes radicales PAR LOUISE FESSARD ET MARINE TURCHI ARTICLE PUBLIÉ LE MERCREDI 23 JUILLET 2014 Débordés par des partisans de Dieudonné et d’Alain Soral, les manifestants pro-palestiniens font aussi face à la mobilisation adverse de groupuscules juifs radicalisés, et en particulier la Ligue de défense juive (LDJ). Qui sont les militants de cette organisation juive d'extrême droite, dont certains demandent la dissolution ? Mercredi, les militants pro-palestiniens manifestent à nouveau à Paris, cette fois-ci avec l'autorisation du gouvernement. Débordés par des partisans de Dieudonné et d’Alain Soral, ils font aussi face à la mobilisation adverse de groupuscules juifs radicalisés. Parmi eux, la Ligue de défense juive (LDJ), organisation juive d'extrême droite. [[lire_aussi]] Très présent sur Internet et les réseaux sociaux, où il promet de défendre la communauté juive et de faire « dormir à l’hôpital » les « casseurs musulmans pro-terrorisme », ce groupuscule use de méthodes violentes. Il sillonne certains quartiers comme la rue des Rosiers, l’emblématique rue de la communauté juive de Paris, pour les « sécuriser ». Le 22 juillet, la plateforme de pétition en ligne wesign.it, qui héberge la pétition réclamant la dissolution de la LDJ, a accusé dans un communiqué le groupuscule d'avoir attaqué son site internet. « Nous avons eu une attaque avec un nombre exorbitant d'adresses ip venant de Suède, des États-Unis et de nombreux pays occidentaux », explique à Mediapart son fondateur, Baki Youssoufou. Sur Facebook, l'organisation avait annoncé qu’elle viendrait à chaque manifestation pro-palestinienne pour « raccompagner » à sa façon les manifestants pro- palestiniens – aucun appel de sa part n'est cependant visible pour la manifestation de ce mercredi. Ces derniers jours, la LDJ a été au coeur de plusieurs échauffourées autour de synagogues. Le 13 juillet, certains de ses membres s'étaient opposés à des militants pro-palestiniens aux abords de la synagogue de la rue de la Roquette, à la fin d'une manifestation de solidarité avec Gaza, avant d'être séparés par les CRS. Plusieurs versions s’étaient affrontées (lire notre article). « Nous nous sommes seulement défendus », avait affirmé la Ligue de défense juive, alors que des éléments laissent penser que l'affrontement était prémédité. Dans une vidéo amateur relayée par i-Télé, on voit certains membres de la LDJ brandir casques de moto, barres de fer, bombes lacrymogènes, pieds de table et chaises du restaurant La Cappadoce, avant d'aller se réfugier derrière un cordon de CRS. Interrogé à propos de cet épisode sur France inter ce mercredi, le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve a estimé que la Ligue de défense juive « est dans l'excès ». « Elle est dans des actes qui peuvent être répréhensibles et qui doivent être condamnés et ces actes le sont par moi de façon extrêmement ferme », a- t-il affirmé. Avant d'ajouter que «s'il y a des violences qui ont été commises, des plaintes qui ont été déposées, le droit passera ». Le ministre a cependant démenti les propos d'un auditeur selon lesquels les forces de l'ordre auraient protégé les activistes de la LDJ. « Les forces de police se sont interposées entre la LDJ et des manifestants pour éviter des affrontements, a balayé Bernard Cazeneuve. Tout ce discours, toutes ces affirmations selon lesquelles il y aurait une complicité de la police avec la LDJ qui expliquerait que les manifestations aient mal tourné relève d'une manipulation pure et simple. » Sur mediapart.fr, un objet graphique est disponible à cet endroit. Dans la journée de mercredi, le blogueur Al-Kanz s'est cependant ému de ce qu'un tweet du ministre condamnant « fermement » des « actes répréhensibles

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La Ligue de défense juive, un groupusculed'extrême droite aux méthodes radicalesPAR LOUISE FESSARD ET MARINE TURCHIARTICLE PUBLIÉ LE MERCREDI 23 JUILLET 2014

Débordés par des partisans de Dieudonné et d’AlainSoral, les manifestants pro-palestiniens font aussiface à la mobilisation adverse de groupuscules juifsradicalisés, et en particulier la Ligue de défense juive(LDJ). Qui sont les militants de cette organisationjuive d'extrême droite, dont certains demandent ladissolution ?

Mercredi, les militants pro-palestiniens manifestentà nouveau à Paris, cette fois-ci avec l'autorisationdu gouvernement. Débordés par des partisans deDieudonné et d’Alain Soral, ils font aussi faceà la mobilisation adverse de groupuscules juifsradicalisés. Parmi eux, la Ligue de défense juive(LDJ), organisation juive d'extrême droite.

[[lire_aussi]]

Très présent sur Internet et les réseaux sociaux,où il promet de défendre la communauté juive etde faire « dormir à l’hôpital » les « casseursmusulmans pro-terrorisme », ce groupuscule usede méthodes violentes. Il sillonne certains quartierscomme la rue des Rosiers, l’emblématique rue dela communauté juive de Paris, pour les « sécuriser». Le 22 juillet, la plateforme de pétition en lignewesign.it, qui héberge la pétition réclamant ladissolution de la LDJ, a accusé dans un communiquéle groupuscule d'avoir attaqué son site internet. «Nous avons eu une attaque avec un nombre exorbitantd'adresses ip venant de Suède, des États-Unis et denombreux pays occidentaux », explique à Mediapartson fondateur, Baki Youssoufou.

Sur Facebook, l'organisation avait annoncé qu’elleviendrait à chaque manifestation pro-palestiniennepour « raccompagner » à sa façon les manifestants pro-palestiniens – aucun appel de sa part n'est cependantvisible pour la manifestation de ce mercredi.

Ces derniers jours, la LDJ a été au cœur de plusieurséchauffourées autour de synagogues. Le 13 juillet,certains de ses membres s'étaient opposés à desmilitants pro-palestiniens aux abords de la synagoguede la rue de la Roquette, à la fin d'une manifestationde solidarité avec Gaza, avant d'être séparés par lesCRS. Plusieurs versions s’étaient affrontées (lire notrearticle). « Nous nous sommes seulement défendus »,avait affirmé la Ligue de défense juive, alors quedes éléments laissent penser que l'affrontement étaitprémédité. Dans une vidéo amateur relayée par i-Télé,on voit certains membres de la LDJ brandir casquesde moto, barres de fer, bombes lacrymogènes, piedsde table et chaises du restaurant La Cappadoce, avantd'aller se réfugier derrière un cordon de CRS.

Interrogé à propos de cet épisode sur France inter cemercredi, le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuvea estimé que la Ligue de défense juive « est dansl'excès ». « Elle est dans des actes qui peuvent êtrerépréhensibles et qui doivent être condamnés et cesactes le sont par moi de façon extrêmement ferme », a-t-il affirmé. Avant d'ajouter que «s'il y a des violencesqui ont été commises, des plaintes qui ont été déposées,le droit passera ».

Le ministre a cependant démenti les propos d'unauditeur selon lesquels les forces de l'ordre auraientprotégé les activistes de la LDJ. « Les forces de policese sont interposées entre la LDJ et des manifestantspour éviter des affrontements, a balayé BernardCazeneuve. Tout ce discours, toutes ces affirmationsselon lesquelles il y aurait une complicité de la policeavec la LDJ qui expliquerait que les manifestationsaient mal tourné relève d'une manipulation pure etsimple. »

Sur mediapart.fr, un objet graphique est disponible à cet endroit.

Dans la journée de mercredi, le blogueur Al-Kanzs'est cependant ému de ce qu'un tweet du ministrecondamnant « fermement » des « actes répréhensibles

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» de la LDJ ait été supprimé de son compte Twitterofficiel. Selon son cabinet, contacté par Mediapart,c'est tout le « live tweet » de la matinale de Franceinter qui a été « comme d'habitude » effacé et remplacépar un lien vers la vidéo de l'entretien. « BernardCazeneuve peut redire ce qu'il a dit sur la LDJcinquante fois si besoin », nous assure-t-on. Plusieurs« live tweet » d'apparitions médiatiques de BernardCazeneuve ont cependant été conservées sur soncompte, comme le 9 juillet lors d'un passage chezFrance info.

Qui sont les militants de la LDJ ? Le groupusculerevendique plusieurs centaines de militants, mais n’encompte en réalité qu’une quarantaine, avec un noyaudur d’une quinzaine de personnes, essentiellement desjeunes basés à Paris et Lyon. Parmi ses dirigeants, ontrouve Jean-Claude Nataf, qui apparaît aussi sous lespseudonymes de « Amon Cohen » ou « Carlisle ».Homme de réseaux, il a la main sur tous les outilsde communication du groupuscule et entretient descontacts avec l’extrême droite française. En 2013,

Mediapart l'a aperçu dans la foule du 1er-Mai duFN, où il écoutait le discours de Marine Le Pen encompagnie de Philippe Péninque, ancien du GUD etconseiller officieux de la présidente du FN.

Philippe Péninque (cheveux blancs) lors du défilé du 1er-Mai du FN,en 2013, avec Jean-Claude Nataf (avec le bonnet). © Mediapart

Ses premiers contacts avec l’extrême droite française,retracés par le site d’information antifascisteREFLEXes, remontent au début des années 2000,via Louis Aliot, l'actuel numéro deux du FN.D'après Libération, il s'est aussi renduà la fête des «Bleu Blanc Rouge » du Front national, au milieu desannées 2000. Parallèlement, il a côtoyé l’ex-FN Jean-François Touzé, dont il est proche, et s’est tourné untemps vers des cadres du Bloc identitaire (BI). Une

rencontre aura d'ailleurs lieu à Paris en marge d’unemanifestation du BI avec Fabrice Robert et RichardRoudier, qu’il avait rencontrés dès 2005.

En 2010, le Monderapportait un billet posté sur le sitede la LDJ dans lequel son administrateur soutenaitMarine Le Pen après ses déclarations rapprochant lesprières de rue musulmanes et l'Occupation. Un an plustard, après la mort d'un bijoutier tué au cours d’unbraquage, Nataf explique dans le Parisien que « dansla communauté », certains sont tentés « de plus en pluspar un vote protestataire en faveur du Front national». Car une partie de la LDJ voit d’un bon œil lastratégie de « dédiabolisation » de Marine Le Pen, sesappels du pied à la communauté juive (Louis Aliots’était rendu en Israël fin 2011) et surtout son discoursanti-islam.

En amont de la présidentielle de 2012, la LDJ publiaitsur son site une « mise au point » pour le moinsambiguë. L’organisation « n’apporte pas son soutienau Front national », pouvait-on lire, « bien quela prise de position faite par le FN à l’encontrede l’islamisation reste un pas significatif dans lesurgences politiques de notre pays ». Plus récemment,l'organisation se félicitait que Marine Le Pen ait «tué le père » après les déclarations de Jean-MarieLe Pen sur la « fournée ». Le 21 juillet, dans unbillet intitulé « Non, ce n’est pas le Front nationalqui attaque les synagogues », l’organisation fustigeles comités de surveillance des mairies frontistesauxquels participent l’Union des étudiants juifs deFrance (UEJF) et Sos Racisme.

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Sur Twitter, le groupuscule cultive cette même dualité,alternant défense du FN et provocations :

Des militants de la LDJ déjà condamnéspour des agressions

Parallèlement, une partie de la LDJ s'est rapprochéedu collectif anti-islam Riposte laïque et son satelliteRésistance républicaine. À plusieurs reprises, ce sontdes militants de la ligue qui ont assuré la sécuritéd’événements organisés en 2010 par Riposte laïque –comme l’apéro républicain, une manifestation devantl’ambassade d’Iran, ou les « Assises sur l’islamisation». Organisées avec les identitaires, celles-ci ont étésécurisées sous la conduite de Philippe Wagner, unancien skinhead nationaliste qui avait intégré la LDJ.La présidente de Résistance républicaine, ChristineTasin, sait s'en souvenir. Dans un billet, le 16 juillet,elle salue le « patriotisme » de l'organisation etévoque « le soulagement de savoir que la LDJ existe,est efficace ».

Quelles sont les actions militantes de la LDJ ? Sur sonsite, l'organisation se présente comme un « mouvementpatriotique et nationaliste juif » qui vise à « protégerles juifs de France contre la violence tant verbale que

physique de leurs ennemis ». Elle affirme prôner « undiscours pacifiste ». Mais sur les réseaux sociaux, ellerevendique des actes de violence :

Tweets du 17 janvier 2014, lors des affrontementsentre militants de la LDJ et pro-Dieudionné.

Tweet du 27 mars 2014.

Et diffuse des propos radicaux:

Tweet du 6 avril 2014.

Sur le terrain, le groupuscule se comporte en milicequi seconderait les forces de l'ordre et multiplie lesmessages de soutien aux policiers. Exemples :

Tweet du 20 juillet 2014.

Post sur le compte Facebook de la LDJ, le 20 juillet 2014.

L'organisation fonctionne avec un noyau de jeunesmenés par un chef de bande et des méthodes violentesque certains de ses membres assument, comme danscette vidéo diffusée en 2009 :

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Sur son site, sur les réseaux sociaux ou YouTube,la LDJ met en scène ses actions coup de poing. Ony voit par exemple les militants asperger de peinturerouge l'écrivain juif marocain et militant antisionisteJacob Cohen (voir les images), la présidente del’association CAPJPO-EuroPalestine Olivia Zémor(voir les images), ou encore la porte-parole desIndigènes de la République Houria Bouteldja :

Mais d’autres actions de l’organisation vont bien au-delà de la violence symbolique. La liste des agressionsdont est à l’origine la LDJ est longue (lire la recensiondu journal Politis et l’article du quotidien Times ofIsrael qui liste 115 incidents violents depuis 2001).Certains de ses membres ont été condamnés pour desfaits de violence.

En 2002, des militants du Betar et de laLDJ provoquent de violents incidents lors d’unemanifestation de soutien à Israël à Paris. Uncommissaire de police est grièvement blessé aprèsun coup de poignard. En 2004, l’un de ses cadresest condamné pour avoir agressé des étudiants dela faculté de Nanterre dans l’enceinte du tribunaladministratif de Paris. En 2009, quatre de ses membressont condamnés après le saccage, avec cagoules,bâtons et bouteilles d'huile, d’une librairie parisienneproche de la cause palestinienne. La même année, ilssont soupçonnés d'être les auteurs de l'agression detrois lycéens, dont deux d'origine tunisienne.

Deux ans plus tard, la LDJ interrompt violemmentune réunion organisée par l’association France-Palestine. Rue89 raconte cette opération coup depoing : slogans « Israël vaincra », drapeaux israéliensdéployés, gants en cuir renforcés de plomb ou de sableenfilés.

La même année, l’organisation crée la polémiqueen annonçant dans un communiqué une expéditionen Israël avec les « militants ayant une expériencemilitaire » pour « prêter main-forte à (leurs) frèresface aux agressions des occupants palestiniens » et« renforcer les dispositifs de sécurité des villes juivesde Judée et Samarie (la Cisjordanie, ndlr) ».

Métronews rappelle qu’en juin 2013, la LDJ avaitpublié un message pour revendiquer la violenteagression d'un jeune. Plusieurs associations ou sitesavaient dénoncé ce post Facebook alors que la victimeen question était dans le coma.

Un reportage diffusé en 2012 dans « Enquête exclusive», sur M6, montre comment l’organisation joue auxjusticiers dans Paris, avec des méthodes parfoisillégales, sous la conduite de leur leader, alors visé partrois plaintes pour agression. On le voit s'entraîner autir (malgré l’interdiction de port d'armes en France)et expliquer qu’ils sont « préparés face aux menacesqu’il pourrait y avoir contre Israël ». On voitégalement l’organisation sillonner le Marais, à Paris,en pleine nuit, pour une opération d’affichage sauvageavec des appels au meurtre contre l’assassin antisémited'Ilan Halimi. Quelques jours plus tard, ils partenten expédition punitive porte de Bagnolet, avec desmatraques télescopiques, pour venger un adolescentqui aurait été victime d’une insulte antisémite :

En 2004, « Complément d'enquête » avait révélé queles membres de la LDJ s’entraînaient dans un bâtimentofficiel protégé par la police française. L'émissionde France 2 avait filmé une quarantaine de leursmembres en train de suivre dans ces locaux des coursde krav maga, technique de combat utilisée par l’arméeisraélienne :

« Si à un moment, la LDJ remplit les critèresde dissolution, ce sera appliqué »

Autour de la Ligue de défense juive, c’est toute unegalaxie de jeunes qui gravitent. Outre le Betar, autremouvement de jeunesse juif radical, une multitudede petits groupes communautaires se montent. Ils seretrouvent dans les clubs de krav maga, comme le

Maccabi, dans le Xe arrondissement de la capitale. Ilssont en lien sur les réseaux sociaux, où ils lancent desappels pour converger vers les synagogues.

La LDJ reste pourtant ultraminoritaire au sein dela communauté juive. « C’est une toute petiteorganisation, qui n’est pas membre des institutionsjuives, qui n’est pas membre du Crif », « c’esttrès, très marginal », a tenté de minimiser RogerCukierman, le président du Crif (Conseil représentatif

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des institutions juives de France), interrogé par RFIsur la responsabilité de la LDJ dans les tensionsactuelles.

Photo de la Ligue de défense juive sur leur compte Twitter. © @LDJ_France

Une « petite » organisation dont certains partis etassociations demandent à nouveau la dissolution. LaLDJ émane de la Jewish Defense League, fondéeen 1969 par le rabbin Meir Kahane aux États-Unispuis en Israël, et dont elle se revendique. Son créateura également fondé le parti Kach (devenu KahaneChai), qui prônait l'expulsion des populations arabesde Palestine hors du "Grand Israël". Le parti a étéinterdit par le gouvernement israélien en 1994 aprèsle massacre d'Hébron par l’un de ses membres.Il est classé comme organisation terroriste par legouvernement américain.

Ce sont ces arguments que brandit le députécommuniste Jean-Jacques Candelier pour réclamer ladissolution de la LDJ. Dans une lettre ouverte àFrançois Hollande, le 19 juillet, il dénonce une «organisation criminelle ». « L'impunité de cesbarbares dont le seul but est de créer un amalgameentre judaïsme et sionisme est inacceptable »,argumente le député. À gauche, d'autres élusdemandent cette dissolution. « Il semble qu’il y a eudes provocations de la part de la Ligue de défensejuive (LDJ), donc je suis pour la dissolution », adéclaré la sénatrice EELV Esther Benbassa dans lesInrockuptibles.

Ce n’est pas une première. Le Mrap demande cettedissolution depuis 2002, à la suite de plusieursagressions attribuées à la LDJ. « La violence de cegroupe, l’étalage sur Internet de ses entraînementsparamilitaires, les vidéos relatant les actions decommando du groupe, ses provocations jusque dansl’enceinte des tribunaux, ne peuvent passer inaperçusdu ministère », dénonçait à nouveau en juillet 2012 lemouvement contre le racisme.

Au même moment, l'Union juive française pour la paix(UJFP) était également remontée au créneau auprèsde Manuel Valls en s’étonnant que la LDJ soit « l’unedes rares milices fascistes autorisées en France ». « EnFrance, elle a multiplié les attaques de manifestationsautorisées, de rassemblements, de réunions publiques,de locaux associatifs, et a commis des ratonnades anti-Arabes », accusait l’association.

Selon Libération, les statuts de la Ligue de défensejuive ont d’abord été déposés en préfecture en tantque… « Liberté, démocratie et judaïsme ». Le 19juillet 2003, deux ans à peine après sa création, la LDJs’était autodissoute. Depuis, il s’agit donc d’un simplegroupement informel, non enregistré au Journalofficiel.

Dans le cadre de la loi du 10 janvier 1936 sur lesgroupes de combat et milices privées, le président dela République peut dissoudre par décret des milices,qu’elles soient ou non constituées en association. C’estce qui s’est passé pour le Service d’action civique(SAC), dissous en 1982 par François Mitterrand. Plus

récemment, le 1er mars 2012, Nicolas Sarkozy avaitdissous le groupuscule islamiste radical « ForsaneAlliza » au motif qu’il s’agissait d’un « groupe decombat » qui avait pour « but d'attenter par la force àla forme républicaine du gouvernement ».

En juillet 2013, après le meurtre du militantantifasciste Clément Méric, François Hollande avaitdissous plusieurs organisations d’extrême droite les 12et 25 juillet 2013 : « Troisième Voie », les « Jeunessesnationalistes révolutionnaires » de Serge Ayoub puis,deux semaines plus tard, les « Jeunesses nationalistes» d’Alexandre Gabriac et l’Œuvre française (lire nosarticles ici et là).

En raison de son caractère liberticide, cettemesure doit répondre à des conditions strictes etêtre précédée d’une procédure contradictoire. Pourdissoudre l’Œuvre française, le président de laRépublique s’était par exemple appuyé sur troismotifs expressément prévus par la loi : la formeet l’organisation militaires du mouvement, le cultequ’elle vouait à la collaboration et au régime deVichy, ainsi que son idéologie incitant à la haine et

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à la discrimination envers les étrangers, les juifs etles musulmans. Le Conseil d’État avait confirmé cesmotifs le 25 octobre 2013, en rejetant le recours desresponsables de ce mouvement d'extrême droite.

« Le Conseil d’État reconnaît une milice privéeà son organisation hiérarchique paramilitaire, àl’obéissance de tous à un chef, à ses entraînementscollectifs aux arts martiaux, à sa capacité àorchestrer des coups de force, c’est-à-dire à mobilisercollectivement et rapidement des effectifs autourd’un événement particulier et dans une logique deviolence », explique l'avocat Nicolas Gardères dans LeNouvel Obs.

Interrogé mardi par Mediapart à Marseille sur uneéventuelle dissolution de la LDJ, Bernard Cazeneuve aéludé, en répondant qu’aucun groupe ne peut se mettre« en contravention avec les principes de la Républiquesi l’on veut que ses valeurs prévalent ». Avant decouper court au point presse qu’il tenait à l’hôtel depolice sur l’élucidation de plusieurs des règlements decomptes récents par la brigade criminelle.

« Si à un moment, la LDJ remplit les critères, ce seraappliqué », précise son cabinet qui rappelle que ladissolution est « une procédure exceptionnelle, qui

répond à des conditions strictes ». « Nous savons qu’ils’agit de gens malintentionnés et ils sont suivis depuisdes années par le ministère de l’intérieur qui est trèsvigilant, assure par ailleurs le cabinet du ministre.La meilleure preuve, c’est qu’à Sarcelles dimanche,la manifestation prévue par la LDJ a également étéinterdite. »

« C'est clair que la LDJ n'est pas simple et que sesmembres créent plus de problèmes qu'autre chose,mais à la préfecture on ne peut rien faire tant quele ministère de l'intérieur n'agit pas », déplore dansMétronews un responsable de la préfecture de Paris,sous couvert d’anonymat.

Boite noire

Nous avons adressé lundi une série de questions auministère de l'intérieur, à la préfecture de police et auparquet de Paris sur le manque de réaction des forcesde l'ordre le 13 juillet face à des militants du LDJarmés sur la voie publique, sur le bâtiment où la LDJs'entraîne selon « Complément d'enquête », sur lessuites judiciaires de plusieurs aggressions attribuées àla LDJ, etc. Beaucoup sont pour l'instant restées sansréponse.

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