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La maîtrise de la demande d’électricité · les émissions de gaz à effet de serre. ... DGEMP - Observatoire de l’énergie, bilan énergétique 1999 (P) ... dans la gestion

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34 A n n a l e s d e s M i n e s

L ’ é n e r g i e e n F r a n c e e t d a n s l e m o n d e

La libéralisation du secteurénergétique et le respect des

engagements de réduction desémissions de CO2 sont deux

défis majeurs, aux enjeuxcontradictoires, auxquels ilconviendra d’apporter des

réponses pertinentes enrecherchant un nouvel équilibre

de l’offre par rapport à lademande dans les prochainesdécennies. La maîtrise de la

demande d’électricité est unealternative crédible à

l’augmentation de l’offre quiinduit le renforcement coûteux

d’infrastructures de production,de transport et de distributiond’électricité. Elle permettra, à

long terme, de répondre enpartie à la croissance des besoins.

par Robert AngiolettiChef du département maîtrise de la

demande d’électricité,Agence de l’environnement et de la

maîtrise de l’énergie (ADEME)

L a maîtrise de la demande d’élec-tricité (MDE) a pour principalobjectif la réduction de la

consommation d’électricité par l’amé-

lioration de la performance deséquipements utilisateurs, tout en assu-rant le maintien de la qualité du servi-ce rendu, dans un contexte où lescontraintes environnementales se ren-forcent. Elle constitue une alternativecrédible à l’augmentation de l’offrequi induit le renforcement coûteuxd’infrastructures de production, detransport et de distribution d’électrici-té. La maîtrise de la demande d’élec-tricité vise à améliorer l’efficacité et lerendement aval du système électrique(après le compteur) et, par répercus-sion, à réduire l’impact de l’évolutionde la demande finale sur le dimen-sionnement et sur les coûts d’utilisa-tion des infrastructures. In fine, ellecontribue à réduire sur le long termeles émissions de gaz à effet de serre.

Anticiper pour mieux maîtriser

La consommation totale françaised’électricité a plus que doublé en 20ans et s’élèveaujourd’hui à 383Twh (1). L’élec-tricité alimentedes millions d’équipements etrecouvre de multiples usages, certains« captifs » (électroménager, éclairage,bureautique, force motrice…),d’autres « concurrentiels » (certainsprocédés industriels, chauffage, ECS,cuisson…) qui peuvent faire l’objet desubstitution par d’autres énergies.Les usages dont les appels de puissan-ce surviennent en périodes de pointe,le chauffage et l’éclairage des bâti-ments, par exemple, sont aussi assuréspar des productions d’électricité de

pointe et déterminent des capacités deproduction, mais également de trans-port et de distribution de l’électricité. Aujourd’hui, l’électricité est encoreabondante et son contenu en carbonereste faible du fait de la forte propor-tion de nucléaire utilisée en France.Néanmoins, à terme, le parc de pro-duction évoluera vers une diversifica-tion des sources primaires, notammentdécentralisées à partir des énergiesrenouvelables, mais aussi de moyensde production utilisant des combus-tibles fossiles pour couvrir les pointesde puissance. S’ils continuent à sedévelopper, les usages de pointeentraîneront, d’une part, des consom-mations de combustibles fossiles à fortcontenu en carbone, d’autre part, desinvestissements en capacités de pro-duction et de distribution difficiles àamortir, sur de courtes périodes d’uti-lisation. Un nouveau doublement des consom-mations d’électricité sur les vingt pro-chaines années serait donc trèscoûteux et difficilement supportable

par la collectiviténationale en rai-son des nouvellescontraintes que

cela impliquerait : doublement duparc de production, renforcementmassif des réseaux de transport et dedistribution, augmentation des émis-sions de gaz à effet de serre, atteintesà l’environnement et aux paysages.Par ailleurs, le secteur électrique estactuellement en pleine évolution, et lemouvement d’ouverture à la concur-rence des marchés de l’électricité, qui

La maîtrise de la demande d’électricité

(1) Source : DGEMP - Observatoire de l’énergie,bilan énergétique 1999 (P)

L a c o n s o m m a t i o n t o t a l e française d’électricité a plusq u e d o u b l é e n 2 0 a n s

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est à l’ordre du jour dans l’ensemblede l’Union européenne, a de lourdesconséquences sur l’organisation dufutur système et sur le positionnementdes acteurs en présence :- dans un contexte de concurrenceaccrue sur les prix, la tendance naturel-le des opérateurs du marché sera d’aug-menter leurs ventes en volume afin demaintenir leurs chiffres d’affaires et, lecas échéant, d’élargir leurs offres deservices ;- il convient de s’interroger sur lesmeilleures valorisation de l’électriciténucléaire disponible, en n’oubliant pasles possibilités d’exportation d’électri-cité à contenu nul en carbone vers lesautres pays européens ;- la question du renouvellement futurdu parc de production d’électricité etde la nature des énergies primairesmises en œuvre pour la produire, etdonc son impact sur l’effet de serre, restelargement ouvert.Parallèlement, la France s’est engagée,dans le cadre du Protocole de Kyoto, àstabiliser ses émissions de CO2 en2010 à leur niveau de 1990. Les ten-dances observées ces dernières annéesmontrent que cet objectif sera difficileà atteindre. Néanmoins, la dynamiqueen œuvre dans tous les pays industria-lisés, qui ne disposent en général pasd’une base de production nucléaireaussi importante qu’en France, vise ledéveloppement d’équipements éco-nomes en électricité et il n’est pas rai-sonnable de penser que la Francepuisse rester à l’écart de ce mouve-ment.Ainsi, la libéralisation du secteur énergé-tique et le respect des engagements deréduction des émissions de CO2 sontdeux défis majeurs, aux enjeux contra-dictoires, auxquels il conviendra d’ap-

porter des réponses pertinentes enrecherchant un « nouvel équilibreoffre/demande » dans les prochainesdécennies. En effet, l’augmentation desbesoins de l’économie et du confort dela société, notamment sur les usagescaptifs qui sont enforte croissance,reste inéluctabledans la mesure oùelle accompagnel’amélioration de la qualité de vie descitoyens.La maîtrise de la demande d’électricité(MDE) est une alternative crédible qui, àlong terme, permettra de répondre en

partie, de manière optimisée, à la crois-sance de ces besoins.

Quelques chiffres clésLa consommation d’électricité est en

forte croissancedans tous les sec-teurs de l’écono-mie. Deux secteursabsorbent à eux

seuls près de 96 % de l’électricité finaledu pays : les bâtiments (61 %) et l’indus-trie (35 %). Dans l’industrie, la part de marché del’électricité a augmenté de +42 % sur les20 dernières années, pendant que laconsommation totale d’énergie du sec-teur baissait de 1,8 %.Dans les bâtiments résidentiels et ter-tiaires, sur la même période, la croissan-ce constatée des consommationsd’électricité a été de +130 %, comparéeà une augmentation de +49 % de laconsommation de l’ensemble du sec-teur. Cette forte pénétration s’explique,d’une part, par la croissance soutenuedes usages spécifiques liée notamment àl’équipement des ménages, d’autre part,

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Fig. 1a. - Evolution des consommations d’électricité dans l’industrie

Fig. 1b. - Evolution des consommations d’électricité dans le bâtiment

Fig. 2. - Répartition des consommations d’électricité par usage dans le logement 1999

Deux secteurs absorbent à euxseuls près de 96 % de l’électrici-té finale du pays : les bâtiments (61 %) et l’industrie (35 %)

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par le développement du chauffageélectrique et de la climatisation des bâti-ments (voir les figures 1a et 1b).Dans les résidences principales (2), lesusages captifs de l’électricité constituentle premier poste de consommationd’électricité (41 %), devançant le chauf-fage (36 %), l’eau chaude sanitaire(14 %) et la cuisson (8 %). Trois usagesdomestiques captifs recouvrent à euxseuls, sensiblement à parts équivalentes,plus de 70 % des besoins spécifiques :l’éclairage (11,8 TWh), le froid(11,5 TWh) et le lavage (11,4 TWh). Laconsommation des produits bruns (TV,magnétoscope, Hi-Fi, décodeurs…) esten forte croissance et représente aujour-d’hui plus de 16 % des consommations,notamment en veilles souvent inutiles(voir la figure 2, ci-contre, sur la réparti-tion des consommations d’électricité parusage dans le logement en 1999).

La MDE : définition et axesstratégiques d’action

Au sein du système électrique, la maîtri-se de la demande d’électricité (MDE)intervient concrètement sur deuxaspects :- l’amélioration du rendement aval dusystème électrique, au niveau de laconsommation des équipements situésaprès le compteur (elle permet ainsi laréduction de la facture au bénéfice desagents économiques, tout en maintenantla qualité du service) ;- la réduction des besoins de puissancede pointe, qui permet l’équilibrage descourbes de charge journalières et saison-nières et la réduction des pointes maxi-males et, ainsi, évite ou diffère les

besoins de nouvelles infrastructuresnécessaires pour assurer la qualité et lasécurité de la desserte électrique (voir lafigure 3 illustrant les impacts de la MDEsur la courbe de charge électrique).C’est sur ce deuxième aspect que la MDEse différencie de l’utilisation rationnellede l’énergie (URE) qui est le conceptgénéral d’économies d’énergie. En effet,contrairement aux énergies fossiles,l’électricité n’est pas stockable et néces-site une gestion offre/demande en tempsréel avec des besoins d’adaptation ins-tantanée entre production, transport, dis-tribution et consommation. Le rôle duRTE, nouveau gestionnaire du réseau detransport de l’élec-tricité, est à ce titretotalement centraldans la gestion en temps réel de la four-niture (dispatching) et la programmationdes investissements de réseaux permet-tant de réduire les congestions et d’assu-rer la sécurité de la desserte.L’enjeu est d’importance, car l’électricitéfournit aujourd’hui 40 % des besoinsd’énergie finale de l’économie française.En outre, les tempêtes de fin 1999 ontclairement mis en évidence notre dépen-dance vis-à-vis d’elle, incontournablemême lorsqu’elle ne constitue pas l’éner-gie principale utilisée par les équipe-ments. Par exemple, du fait de la présencede systèmes de commande et d’une ali-mentation électrique de la pompe de cir-culation d’eau, les chaudières fioul, gazou bois ne peuvent pas fonctionnerlorsque l’électricité est coupée.Trois axes stratégiques d’actions (voir lestableaux I, II, III) peuvent être déclinésdes finalités indiquées ci-dessus : - développer les usages et les équipe-ments performants de l’électricité et

créer un pôle de compétences scienti-fiques et technologiques sur la MDE ;- transformer les marchés et modifier lescomportement d’achats et d’usage desconsommateurs, des maîtres d’ou-vrages et des gestionnaires, en dévelop-pant les partenariats avec les acteursclés de la filière électrique ;- contribuer à l’élaboration des choixénergétiques futurs en anticipant et enoptimisant la relation entre offre etdemande d’électricité, en puissance eten consommation, aux plans local etnational. En comparaison à un scénario « laisser-faire », intégrant cependant une part de

progrès technolo-gique tendancielsous la forme de

« MDE rampante », l’ADEME estime leséconomies attendues, suite à la mise enœuvre des programmes MDE sur lesseuls usages spécifiques utilisés dans lesecteur bâtiment, à 11,5 TWh/an en2006, soit environ 10 % de la consom-mation actuelle de ces usages (le plannational de lutte contre le changementclimatique a retenu un potentiel de20 TWh/an en 2010). Les émissions deCO2 évitées par la valorisation de cegisement sont estimées, pour leur part,à 0,62 Mt C/an en 2006, hors DOM etCorse (3).

A qui profite la MDE ?Un kWh non consommé est un kWhqui ne coûte pas et qui ne pollue pas.

Fig. 3. - Les impacts de la MDE sur la courbe de charge électrique

(2) Source : CEREN - Secteur résidentiel, suivi duparc et des consommations d’énergie,1999(3) Hypothèses ADEME - Résidentiel : éclairage79 g C/kWh, électroménager 39 g C/kWh, autresusages 8 g C/kWh. Tertiaire : éclairage 50 g C/kWh,autres usages 8 g C/kWh.

Un kWh non consommé est un kWhqui ne coûte pas et qui ne pollue pas

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D’une manière générale, pour lesconsommateurs, l’utilisation d’équipe-ments électriques performants permetde réduire sensiblement la facture éner-gétique, à service rendu équivalent ou,à l’inverse, d’assurer une meilleuresatisfaction à facture égale.La plupart des équipements perfor-mants mis sur le marché présentent dessurcoûts faibles et dont les temps deretour sur investissement sont relative-ment courts, souvent inférieurs à 2 ansdans le cas de biens de grande consom-mation tels que l’électroménager (réfri-gérateurs, appareils de lavage…), leslampes fluo-compactes (LFC), les appa-reils électroniques (consommations deveilles réduites) et de nombreusesapplications industrielles. L’utilisationde ce type d’équipements et l’adoptionde comportements simples et raisonnés(par exemple : éteindre la lumière lors-qu’il ne reste plus personne dans unepièce, éteindre les veilles électroniquesle soir…) permettent des gains finan-ciers pour les ménages et de producti-vité pour les PME/PMI, par lesréductions sensibles des charges éner-gétiques qu’elles induisent. Enfin, cer-taines catégories de ménages à faiblesrevenus, peuvent bénéficier d’autantplus de ces équipements qu’ils facili-tent une meilleure gestion de leur bud-

get tout en leur permettant de disposerd’un niveau d’équipement acceptableen biens de base.Pour les producteurs d’énergie, la MDEprésente un intérêt majeur. Ellepermet :- d’augmenter le bénéfice d’exploita-tion grâce au lissage des courbes decharge à la production ;- de réduire les besoins de puissance depointe, et donc d’investissements, enfacilitant l’adaptation des capacités deproduction ;- de limiter les charges de péréquationtarifaire ;- d’améliorer la qualité du servicerendu par le fournisseur et, ainsi, defidéliser sa clientèle ;- de respecter les contraintes environ-nementales à moindre coût.Dans le cas des « clients éligibles »,l’ouverture des marchés de l’électricitéà la concurrence induit une contractua-lisation de gré à gré entre le fournisseuret son client. Il apparaît qu’à l’heureactuelle, la négociation débouche sou-vent sur un prix moyen unique del’électricité, plus lisible, et représentatifà la fois de la consommation et de lacourbe de charge du client. La MDEfournit alors une marge de manœuvred’adaptation de la courbe de charge,rendant plus prévisibles les appels deconsommations et de puissances par« blocs » et facili-te la négociationd’un prix moyenplus intéressantdans une logique« g a g n a n t -gagnant » entre les parties.Par ailleurs, la mise en place d’unenouvelle fiscalité environnementale surles émissions de CO2 (TGAP énergieou permis négociables) induira sansdoute des transferts vers des moyens deproduction d’électricité moins pol-luants avec une recherche d’optimisa-tion de la courbe de charge qui aura, defait, un impact sur la réduction desdéséquilibres à la pointe.Plus généralement, le comportementd’entreprise citoyenne et le respect descontraintes environnementales devien-dra à terme un enjeu, voire un impéra-tif, d’accès au marché. C’est la raisonpour laquelle certains fournisseursd’énergie, comme EDF par exemple,

s’engagent sur la voie du développe-ment durable, en mettant en œuvre,notamment, la norme ISO 14 001 dansleur domaine d’activité industrielle.Deux autres bénéficiaires des actionsMDE sont les autorités en charge dutransport et de la distribution d’électri-cité :- le RTE (réseau de transport de l’élec-tricité) tout d’abord, dans la mesure oùles actions de MDE ciblées sur des ter-ritoires en contrainte ou mal sécurisés(« presqu’îles électriques », lignescongestionnées…) peuvent permettrede réduire les coûts des renforcementsdes réseaux THT, lesquels sont difficile-ment acceptés par les populationsconcernées par les tracés ; c’est actuel-lement le choix qui a été fait dans le casde la ligne THT Boutre-Carros, situéedans le Alpes-Maritimes ;- les communes, propriétaires desréseaux de distribution MT et BT la plu-part du temps concédés à EDF, qui pourla même raison peuvent éviter ou diffé-rer les investissements de renforcementde réseaux électriques et, le cas échant,lorsque la MDE est couplée à de la pro-duction décentralisée, éviter lesenfouissements coûteux pour sécuriserles lignes situées en environnementsensible.Au final, c’est l’ensemble de la collecti-vité nationale qui est bénéficiaire des

avantages fournispar la MDE, par laréorientation desinves t i s s emen t slourds de produc-tion, de transport et

de distribution, le redéploiement deséconomies financières et la réductiondes pollutions.

L’étiquetage énergétique :un exemple concret de programmes MDELe premier exemple concerne les pro-grammes d'étiquetage énergétique qui,depuis une dizaine d'années, ont étémis en œuvre dans de nombreux paysdans le but d'améliorer l'informationaccessible au consommateur et d'intro-duire un nouveau critère de sélectionfavorisant la diffusion d'équipementsélectroménagers plus performants sur

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Fig. 4. - L’étiquette énergie influenceun nombre croissant de consommateurs

C’est en 1994 qu’une directiveeuropéenne a rendu obligatoirel’étiquetage des performances énergétiques des réfrigé-rateurs et des congélateurs

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le plan énergétique. C’est en 1994qu’une directive européenne (94/2 CEE)a rendu obligatoire l’étiquetage desperformances énergétiques des réfrigé-rateurs et des congélateurs. Cette régle-mentation a progressivement étéétendue aux sèche-linge, lave-linge etlave-vaisselle et le sera prochainementà d’autres équipements domestiques. Le secteur du froid domestique estexemplaire de cette problématique :- il représente le second poste deconsommation d’électricité domestiquealors que les ménages estiment généra-lement sa consommation énergétiquecomme marginale ;- il existe sur le marché une largegamme d’appareils dont la performan-ce énergétique varie considérablement,à volumes et services rendus égaux,sans que le prix reflète réellement ladiversité des performances.C’est pourquoi le froid domestique aété choisi comme premier terrain d’ex-périmentation par l’ADEME qui, dès1987, a pris l’initiative de travailler sur

ce sujet. La stratégie développée s’estappuyée sur :- des analyses des parcs d’équipe-ments ;- une coopération approfondie entreagences de l’énergie des différents paysde l’Union européenne, qui a permisde constituer un réseau durable ;- des partenariats avec l’industrie et lesréseaux de distribution commerciale ;- la promotion de la démarche et sonélargissement progressif à de nouvellescatégories d’équipements.Les résultats obtenus en Europe, enmatière d’amélioration de l’efficacitéénergétique des appareils électromé-nagers, sont particulièrement satisfai-sants pour les différents acteurs quiont participé à ces travaux. Le critèrede la performance énergétique estdevenu un paramètre pris en comptepar les constructeurs, les distributeurs,les associations de consommateurs etles administrations nationales et euro-péennes. L’affichage des perfor-mances énergétiques et la fixation de

seuils minima de performance, ainsique les accords volontaires avec lesindustriels, ont abouti au résultatrecherché : cinq ans après la publica-tion des directives d’application, onne trouve plus, sur le marché euro-péen, de réfrigérateurs des catégoriesE, F et G (peu économes). Ces résul-tats ont été obtenus grâce à laconjonction d’un ensemble de fac-teurs favorables :- les travaux initiaux de l’ADEME enFrance, avec le soutien d’EDF et de laCommission européenne ;- les travaux relayés par les agencesnationales de l’énergie au Danemark etaux Pays-Bas ;- la coopération entre agences natio-nales de l’énergie d’un nombre crois-sant de pays européens ;- le soutien financier partiel, mais conti-nu, de la Commission européenne (pro-gramme SAVE) ;- l’implication personnelle d’un petitgroupe de représentants de ces organi-sations.

Usages & équipements Situation actuelle Objectifs 2006 Modalités d’actions

Produits blancs Consommation totale = 30 TWh 60 % des ventes >catégorie C Pour tous les types d’équipe-(gros électroménager) Economie attendue = 3,4 TWh ments, par filières technolo-

giques et familles d’acteurs :Produits bruns Consommation totale = 4,2 TWh 60 % des ventes > catégorie1 C - études approfondies des (TV, magnétoscope …) en veilles notamment Economie attendue = 0,3 TWh techniques, marchés et

acteurs ;Bureautique Consommation totale = 3,1 TWh 60 % des ventes en Energy Star - partenariats et accords volon-Multimédia Marché en croissance forte Economie attendue = 1,9 TWh taires avec les industriels ;

- normalisation, certification Eclairage Consommation totale = 36 TWh Diffusion des technologies des produits ;

performantes - création de « labels et 5 LFC par ménages, étiquettes énergie » sur les ballasts électroniques en tertiaire produits de grande diffusion ;Economie attendue = 9 TWh - réglementation en vue du

relèvement des seuils Auxiliaires de chauffage Consommation totale = 6,2 TWh 60 % des ventes > catégorie3 C d’exigence sur les produits & de ventilation Rendements médiocres, services Economie attendue = 1,0 TWh neufs (nouvelles directives

généraux peu pris en compte européennes…) ;- prise en compte des équipe-ments de qualité dans les seuils d’exigence des futures réglementations énergétiques des bâtiments ;- formation des professionnels (BET, installateurs) : concep-tion, dimensionnement, maintenance.

TABLEAU I Axe1 : Développer les usages et équipements performants de l’électricité

1 Etiquette à créer, par analogie aux produits blancs

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L’application de cette démarche conti-nue à s’étendre à de nouvelles catégo-ries de produits (ampoules d’éclairage)et commence même à sortir du secteurde l’électroménager (automobile, mai-sons d’habitation). Le modèle d’étiquet-te conçu en Europe (voir la figure 4ci-avant) s’implante dans des pays voi-sins, et même sur d’autres continents(Afrique du Nord, Moyen-Orient,Amérique latine).L’étiquette énergie influence unnombre croissant de consommateurs.La distribution intègre les catégories deperformance énergétique. En nombrecroissant, ils utilisent aujourd’hui cecritère dans la définition de leur offrede produits et suivent l’évolution deleurs ventes par catégories. Les fabricants sont maintenant favo-rables à l’étiquetage énergie.Relativement sceptiques à l’origine, ilsexpriment aujourd’hui une positionclairement positive, en particulier dansles pays du nord de l’Europe.L’étiquette énergie est finalement consi-dérée par la plupart des acteurs du mar-ché de l’électroménager comme unmoyen d’information utile et pertinent,plutôt que comme une contrainte

administrative. Elle a introduit une plusgrande transparence des performancestechniques des appareils mis sur lesmarchés.Les consommateurs étant désormaissensibilisés aux économies d’énergieet à la lecture de l’étiquette, lesconstructeurs resserrent leurs gammessur les classes A et B. Les appareils declasse A sont de plus en plus nom-breux, et présentés comme offrant, deplus, le maximum de sécurité alimen-taire grâce notamment à l’électroniqueassociée.Ainsi, les deux directives complémen-taires relatives à l’étiquetage et auxseuils de performance énergétique desappareils de froid domestique ontcontribué à une transformation radicaledu marché euro-péen de ces appa-reils, prouvée pardes évaluationsnombreuses etrégulières. Lesréfrigérateurs et congélateurs mis envente au début de l’an 2000 consom-ment en moyenne 30 % de moins queceux de 1992. La production de CO2en sera réduite d’autant.

Plus de 17 millions de ces appareilsseront vendus dans l’année au sein del’Union européenne, pour un montantde 7 milliards d’euros. La consomma-tion énergétique des réfrigérateurs etcongélateurs domestiques en servicedans l’Union s’élève annuellement à14 milliards d’euros.

Les opérations de MDE en réseaux ruraux et dans l’industrieUn deuxième exemple vise les opéra-tions de MDE en réseaux ruraux qui par-tent du principe que les coûts dedéveloppement du réseau de distribu-tion électrique sont plus élevés en rural

qu'en urbain. Cefait permet de fairede la zone ruraleun espace où laMDE est économi-quement très com-

pétitive et se justifie pleinement pouréviter ou différer des renforcements coû-teux du réseau, souvent financés par desfonds publics (FACE : fonds d’amortisse-ment des charges d’électrification). Dans

Cibles Situation actuelle Objectifs 2006 Modalités d’actions

Ménages Consommation totale Economie estimée - Partenariats et accords volontaires avec62 TWh 11 TWh les industriels et les réseaux de distributionSoit 2 023 kWh/logement - Promotion des labels & étiquettes, directives UE

- Promotion des technologies performantes- Actions de sensibilisation & de communication grand public : modification des comportements d’achat et d’usage- Formation des vendeurs- Subventions et incitations fiscales

Bâtiments Publics Consommation totale Economie estimée Toutes cibles et tous usages tertiaires et professionnels (Etat, communes, lycées 11 TWh 1 TWh - Création d’un pôle scientifique et technique sur la MDE& collèges…) - Développement de politiques d’achats groupés

pour les équipements performants (achats publics, Tertiaire privé Consommation totale Economie estimée procurement)

30 TWh 3,5 TWh - Accords volontaires avec les grands maîtres d’ou-vrage

Total toutes cibles Consommation totale Economies estimées - Aide à la décision subventionnée103TWh 15,5 TWh - Sensibilisation et information des maîtres d’ouvrage,

des gestionnaires et des usagers,- Subventions et incitations fiscales ciblées par familles d’acteurs - Opérations exemplaires- Territoires et villes pilotes MDE

TABLEAU II Axe 2 : Transformer les marchés et modifier les comportements des maîtres d’ouvrages et des gestionnaires

Les réfrigérateurs et congélateurs misen vente au début de l’an 2000consomment en moyenne 30 % demoins que ceux de 1992 : la produc-tion de CO2 en sera réduite d’autant

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ce cadre, les technologies de MDE ontpour principal objectif de diminuer lapuissance appelée en pointe, puisquec'est elle qui dimensionne le réseau. Lesmaîtres d'ouvrage de ces opérations sontles collectivités locales compétentespour la distribution d'électricité, engénéral regroupées sous le nom de syn-dicats départementaux d'électrification.Deux types d'opérations de MDE enréseaux ruraux ont été conçus, grâce àun travail commun réalisé par l'ADEMEet EDF : les opérations dites « micros »et « macros ».Les opérations micros concernent despetits réseaux identifiés sur lesquels lescoûts de renforcements sont très élevéspour un très petit nombre d'usagers.Après enquête, les solutions techniquesde MDE sont mises en place au cas parcas. Ces opérations ont une très bonnerentabilité, mais se heurtent cependantau principe d'égalité de traitement desusagers : seuls les usagers situés sur desréseaux en contrainte se voient propo-ser l'amélioration de leurs équipe-ments.

Une première série d'opérations microsa été réalisée en Maine-et-Loire en1999/2000, sur quatre réseaux encontrainte de tension, comportant10 usagers concernés par une mauvaisequalité d'électricité. Les interventionset matériels mis en place ont été :- les rééquilibrages intérieurs et exté-rieurs (rebranchements des clientsmonophasés sur le réseau triphasé) etmise en place de transformateurstri/mono ;- les programmateurs d’intermittence ;- les onduleurs sur les matériels sen-sibles (ordinateurs, etc.) ;- les démarreurs électroniques demoteurs ;- l’éclairage fluo compact ;- la substitution de chauffage électriquepar du chauffage au bois ;- les groupes électrogènes.Les résultats des mesures de la qualitéde desserte électrique (valeurs hebdo-madaires mesurées) montrent que lenombre de défauts constatés, quiétaient avant l’opération de 1 000 à11 000 sur une durée cumulée de

1 000 à 3 500 mn, étaient passés aprèsl’opération de 40 à 700 sur une duréecumulée de 6 à 86 mn. En conclusion,la qualité de fourniture est redevenuenormale et les gains sont compris entre90 et 100 %. Le montant des renforce-ments différés pendant 6 ans est de1 130 KF HT pour un coût des équipe-ments MDE de 410 KF HT. Deuxenquêtes réalisées auprès des usagersont montré que ceux-ci sont très satis-faits de l'opération.Les opérations macros, encore au stadeexpérimental, concernent une zoneétendue (canton, voire département)présentant une forte densité de réseauxen contrainte et sur laquelle il est pro-posé à l'ensemble des usagers des inci-tations à la mise en place d'équi-pements performants, choisis pour êtreles plus efficaces, toujours en termes depuissance évitée, en fonction descaractéristiques moyennes des consom-mateurs locaux : usages domestiques,agricoles ou touristiques. La décisiond’action MDE est prise si le bilan éco-nomique, calculé par différence entre

Thèmes d’intervention Situation actuelle Objectifs 2006 Modalités d’actions

Evaluations technico- Données dispersées Validation des chiffres clés - Etudes technico-économiques : économiques Controverses sur les chiffres Observatoire des marchés coûts d’accès, contenus en CO2 …

clés de l’électricité - Publication des chiffres clésSecteur électrique en - Suivi des acteurs : attentes, évolution rapide motivations, positionnement …

Etudes prospectives Evolutions rapides des modes Identification des facteurs - Etudes prospectives sur les modesde vie, des technologies et clés du changement, d’habiter et de travaillerdes équipements anticipation des évolutions - Identification des pistes de recherche

et définition des axes de et développement des produits, recherche et d’innovation composants et systèmes

Valorisation des Connaissances limitée des Evaluation globale des - Etudes locales de potentiels MDE (y potentiels MDE potentiels et des coûts de potentiels et des coûts de c. zones rurales)

transaction MDE transaction MDE - Evaluation des coûts de programmesOpérations de référence - Opérations de référence

Valorisation des Connaissances limitée des Evaluation globale des - Etudes locales de potentiels de potentiels de production potentiels de production potentiels et des coûts production décentralisée (y c. ENR),décentralisée décentralisée et des coûts Opérations de référence - Evaluation des coûts d’opérationd’électricité de référence - Opérations de référence

Planification Peu ou pas de prise en Cadre de cohérence PEL - Etudes de PELénergétique locale (PEL) compte de l’énergie dans Prise en compte - Intégration dans les règlements

les planifications territoriales réglementaire d’urbanisme & d’aménagement- Evolution juridique du FACE

TABLEAU IIIAxe 3 : Contribuer à l’élaboration des choix énergétiques futurs en anticipant et en optimisant la relation offre / demande

d’électricité à long terme, en puissance et en consommation

Page 8: La maîtrise de la demande d’électricité · les émissions de gaz à effet de serre. ... DGEMP - Observatoire de l’énergie, bilan énergétique 1999 (P) ... dans la gestion

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le coût du programme MDE et celui desrenforcements de réseaux évités sur lazone, est favorable.Deux opérations macros sont en coursdans les départements du Finistère (surun canton) et de la Loire (sur deux can-tons) et deux autres en projet (Rhône etAisne). Dans le canton de Lanmeur(Finistère), les opérations de MDEconcernent essentiellement l'améliora-tion des systèmes de chauffage élec-trique en zone touristique côtière. Dansla Loire, sont mises en place des amé-liorations concernant le déplacementdes heures creuses des chauffe-eauélectriques. Pour ces deux opérations,les premiers résultats pourront êtreconnus courant 2001.Parallèlement, une PME bordelaise(Valorem) a mis au point, en partenariatavec les services techniques d'EDF, unnouveau type d'appareil électrotech-nique appelé DAT (décaleur adaptateurde tension) ayant pour fonction deréguler la tension délivrée en bout deréseau. Cet appareil est aujourd’hui dis-ponible pour des puissances de 12 à36 kVA (mono et triphasé) et son coûtse situe entre 40 et 100 KF. Une optiontechnique permet, en plus de la régula-tion de tension, de commander ledélestage de certains appareils chez lesusagers, afin de répartir les chargesdans le temps. L’innovation techniqueintéresse les gestionnaires de réseaux etpourra trouver un important marché àl’exportation vers les nombreux pays oùla qualité du réseau est bien moindrequ’en France.Enfin, dans l’industrie, de nombreusesapplications MDE permettent, au tra-vers d’actions simples et à faible inves-tissement, d’optimiser l’efficacitéénergétique des commodités et desprocédés et ainsi d’améliorer la compé-titivité des entreprises.

La variation électronique de vitesse surles moteurs de pompes du réseaud’eau de la Brasserie Kronenbourg aainsi permisd ’ é c o n o m i s e r107 tep/an avecun temps deretour sur investis-sement de 2 ans (investissement300 KF, gain 150 KF/an). De même,l’optimisation d’un système de réfrigé-ration par lissage des appels de puis-sance et réduction des pics dedémarrage, a conduit à éviter uninvestissement lourd d’améliorationdes compresseurs (estimé à 1,5 MF) età économiser encore 167 tep/an avecun temps de retour de 3 mois.L’opération est très rentable et les éco-nomies réelles sont même supérieuresaux prévisions.La société Le Joint Français a économi-sé 60 tep/an avec un investissement de30 KF (temps de retour 6 mois) en opti-misant son système d’air comprimé. Onle voit, les exemples sont multiples.

L’action de l’ADEMEL’action de l’ADEME s’inscrit claire-ment dans la mise en œuvre du plannational de lutte contre le changementclimatique au travers de la relance despolitiques de maîtrise de l’énergie défi-nies par le gouvernement.Pour ce qui concerne la MDE, les aidesde l’Agence visent à :- fournir un soutien aux programmes derecherche et développement, en parte-nariat avec les industriels, dans le butde mettre au point des techniques etprocédés moins consommateurs ;- réaliser des opérations expérimentalesin situ permettant de démontrer l’intérêtdes technologies matures issues de larecherche ;

- constituer une panoplie d’opérationsexemplaires, vitrines permettant defaire la promotion des équipements ou

modes d’organisa-tion les plus per-formants ;- accompagner lesdécideurs dans la

mise au point de programmes d’inves-tissements rentables en s’appuyant surla formation, le conseil, l’aide à la déci-sion, l’information et la communica-tion ;- contribuer, dans une vision de longterme, aux arbitrages sur la planifica-tion du développement des infrastruc-tures par la prise en compte despotentiels de réduction de la demanded’électricité et, le cas échéant, de pro-ductions locales décentralisées notam-ment par les EnR, afin d’optimiser leschoix et de limiter les atteintes à l’envi-ronnement.L’ADEME s’engage pour l’environne-ment et la maîtrise de l’énergie auxcôtés de ses partenaires. Elle travailleen étroites relations avec les cher-cheurs, les industriels et les profes-sionnels (CNRS, Ecole des Mines,Syndicat de l’Eclairage, GIFAM, SIMA-VELEC, COSTIC…), les maîtres d’ou-vrages et les collectivités locales. Elleaccompagne les actions de normalisa-tion engagées par l’AFNOR et l’UTE àla demande du Secrétariat d’Etat àl’Industrie. De même, un accord trien-nal de partenariat a été signé, le 14juin 2000, par les présidents del’ADEME et d’EDF, dans l’objectif derenforcer la prise en compte du déve-loppement durable dans l'évolutiondu système électrique. L’un des axesmajeurs d’intervention sera de pro-mouvoir la MDE auprès de la filièreélectrique et des consommateurs nonéligibles. •

L’ADEME travaille en étroites rela-tions avec les chercheurs, les indus-triels, les professionnels, les maîtresd’ouvrages et les collectivités locales