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L'Islam: politique et croyance by Maxime RodinsonReview by: Constant HamèsArchives de sciences sociales des religions, 38e Année, No. 84, La religion aux États-Unis (Oct.- Dec., 1993), pp. 301-302Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/30127324 .

Accessed: 17/06/2014 23:53

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Au niveau institutionnel, ce qui le frappe, par contre, c'est l'dtonnante analogie entre les <<Eglises religieuses>> et les <AEglises sdcu- libres >, notamment le <mouvement iddologi- que>> communiste, dont il fut lui-m~me membre jusqu'en 1958. Dogmatisation, intold- rance, persdcution des <hdrrsies >>: les simili- tudes sont troublantes. D'oii sa sympathie, en tant que <marxiste hdrrtique >>, pour des au- teurs chrdtiens qui reprdsentent une tentative de <<ddogmatisation>> de leurs Eglises: Ri- chard Simon, I'oratorien du xvIIe sidcle, auteur d'une Histoire Critique du Vieux Testament (1676) ddnoncde comme << vaine science>> et dangereuse erreur par Bossuet, ou l'abb6 Jean Steinmann, dont la Vie de Jdsus (1959) fut mise A l'index en 1961.

Dans le dernier article de ce recueil, l'dmi- nent islamologue rdsume ainsi son credo: <(Rien de ce qui n'est pas universel n'a une valeur absolue. Tautologie peut-dtre, mais ili n'est aucunement inutile de la rdpdter, notam- ment devant la prdtention des rdvolutions na- tionalistes a s'annexer l'universalisme pour mieux le ddtruire >>.

Michael Ldwy.

84.75 RODINSON (Maxime).

L'Islam : politique et croyance. Fayard, 1993, 329 p.

L'avant-propos qui accompagne le livre re- tiendra l'attention de beaucoup de chercheurs et d'dcrivains plus gdndralement. <J'ai rddig6 cent fois plus d'articles que de livres >>; (< les kilomitres de rayonnages dans les biblio- thdques, ces ndcropoles souvent immenses>>.. AJe me suis toujours senti pressd, harcel6 (..) << J'ai ainsi dispers6 dans de multiples publica- tions.. >>. D'oii le paradoxe de cet ouvrage qui est fait d'articles dispersds, indgaux dans le genre, dans l'espace et dans le temps, mais qui laisse ddcouvrir une pensde constante, unifide, A la fois quant A son objet, I'islam et surtout quant a ses Aiddes directrices >. Quelles sont- elles ? Nouveau paradoxe puisqu'il s'agit avant tout ~<d'iddes gdndrales qui ddpassent le cadre de l'Islam, qui touchent a toute l'histoire et la probldmatique des relations entre les concep- tions du monde et les structures d'organisation, de mobilisation ou de ddveloppement des so- cidtds>>. La plus fondamentale de ces iddes, nous semble-t-il, exposde sous des formes va- rides, ? propos de questions varides, s'attaque au mythe qui consiste a considdrer l'Islam comme une totalit6 conceptuelle, un systdme d'iddes, de pratiques, de choix de vie qui serait

BULLETIN DES OUVRAGES

la racine ou le noyau de tous les comporte- ments publics et privds du monde qui fait pro- fession d'adhdrer A cette religion>>. Ce qui, au-deld de l'islam, donne: AJ'applique ce principe aussi bien aux autres religions et, fai- sant scandale, je leur assimile les iddologies sdculibres, les doctrines qui visent A diriger les socidtds >. Cette profession de foi sociologique ou plus largement scientifique ne risque-t-elle pas de ddraper, par un excds de mouvement de balancier, vers une rdduction globale de l'iddel ou du << spirituel>> B quelques grands domaines comme l'dconomique ou le politique ? L'objec- tion a 6t6 pressentie puisque, par principe, <<j'accorde 6galement un grand intdrrt sur un certain plan a la doctrine, a la foi et aux rituels qui leur sont lids >. Mais l'idde dominante de I'ouvrage reste bien la ddcouverte de ce qu'il y a << d'autre > sous les apparences du religieux. Voir ce qu'il y a de non religieux sous le re- ligieux ou, d'un autre point de vue, voir que le religieux est tributaire de bien des facteurs (sociaux, 6conomiques, politiques pour l'es- sentiel) pour exister, se ddvelopper, s'affaiblir, renaitre, etc. reprdsente la thdse centrale de chacun des articles reproduits et de l'ouvrage dans son entier. Qu'est-ce que le Prophite Mo- hammed a cr66 et 16gud, en instituant une communaut6 et des lois ? Comment compren- dre la notion de minorit6 en islam ? Qu'est-ce qu'une communaut6 religieuse libanaise ? Que signifie < la primaut6 du spirituel >> dans le ca- dre de la rdvolution khomeyniste? Qu'est-ce que <<le rdveil de l'intdgrisme musulman>>? Dans chaque cas, I'auteur nous fait partir du religieux pour nous montrer que d'autres dy- namismes sont en jeu, plus ou moins cachds par le facteur religieux, plus ou moins expri- mds par lui ou a travers lui. Ce que l'A. mani- feste ainsi, c'est une mdfiance sociologique permanente vis-a-vis des pensdes et des atti- tudes iddalistes qui prennent pour argent comp- tant les iddes, les doctrines, religieuses ou sdculibres qui prdtendent mobiliser les esprits et les corps. L'exemple le plus parlant de cette mdfiance << mthodologique >> se retrouve dans une discussion, par articles d'hebdomadaires interposds, entre M. Foucault, ardent ddfenseur d'un islam chiite qui devait apporter la told- rance, I'dgalitd, la justice, etc. et M. Rodinson plus enclin a soupeser et a supputer les ddrives politiques, 6tatiques, corporatistes, factiona- listes, nationalistes, confessionnalistes, etc. d'un rdgime iranien drap6 dans un langage is- lamique <<rdvolutionnaire A. <<L'Histoire avait tranchd. II 6tait de plus en plus difficile de trouver des gens convaincus que la Rdvolution iranienne avait supprim6 ou 6tait en voie de supprimer les virtualitds oppressives du pou- voir politique, de rdaliser une socidtd iddale,

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ARCHIVES DE SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

harmonieuse et humaine >>. Ce commentaire se poursuit dans un texte d'accompagnement qui est devenu plus long que l'article ancien qu'il est cens6 pr6senter.

Aupris d'un public large et moins large qui voudrait mettre au clair ses opinions actuelles sur << l'islam>>, on ne peut que recommander ce livre de r6flexions qui ne n6cessite ni 6ru- dition islamologique ni vocabulaire compliqu6. La seule remarque qu'on nous permettra de faire tient h l'effet de mise c6te a c~te d'arti- cles de port6e g6ndrale qui ont 6t6 6crits pour &tre lus s6par6ment. Les lire d'affil6e fait naf- tre le sentiment d'un manque: celui de quel- ques descentes dans le concret, dans des exemples pr6cis, dans des analyses de cas. Et puis il y a aussi une question qui n'est pas que rituelle : pourquoi Islam et non islam (voir ce- pendant p. 161) comme christianisme, boud- hisme ? Dans la mesure oii l'ouvrage d6nonce une certaine mythification des id6es, islami- ques en particulier, ne serait-il pas opportun d'enlever au concept islam le caractbre absolu, id6al, total, monolithique, irr6versible, etc. que lui confbre la majuscule ?

Constant Hambs.

84.76 ROSNER (Fred). La Mddecine tirie du Mishne Torah de Mai- monide. Paris, Biblieurope et Britt Internatio- nal, 1992, 383 p. (Pr6f. par Emmanuel Chouchana).

Mai'monide, nd a Cordoue en 1135, d6c6d6 en Egypte en 1204 et enseveli a Tibdriade, est l'un des plus grands penseurs juifs du Moyen- Age. Son principal ouvrage, le Mishne Torah, achev6 en 1180, codification de la loi biblique et talmudique, constitue jusqu'a nos jours une r6f6rence essentielle pour la connaissance du judai'sme.

Thdologien et philosophe, Maimonide fut aussi m6decin : de 1174 jusqu'a sa mort, il fut attach6 comme tel au vizir Al-Fadhil, r6gent d'Egypte et a sa famille. Maimonide connut les oeuvres grecques et arabes anciennes. Il s'en inspira dans sa pratique, mais les critiqua et surtout les enrichit de traditions m6dicales pui- s6es dans la Bible, le Talmud et la litt6rature rabbinique. Le Mishne Torah constitue l'une des sources de ses connaissances m6dicales. De plus, Mai'monide a r6dig6 en arabe une di- zaine de trait6s m6dicaux.

Fred Rosner, professeur de mddecine a l'U- niversit6 de New York, pr6sente et analyse dans cet ouvrage, les principaux textes de Ma'f- monide relatifs a la pratique et a l'6thique m&-

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dicales. Suivant en cela la tradition, la valeur supreme de l'6thique juive est la vie humaine. La vocation de la m6decine est de sauver la vie. Maimonide semble avoir compris la rela- tion entre le corps et I'esprit: il est un pr6- curseur de la m6decine psychosomatique. Il insiste aussi sur les conditions d'hygibne ainsi que sur les rapports entre les maladies et l'en- vironnement. Les commandements juifs reli- gieux relatifs a la sexualit6 et a la di6t6tique sont interpr~t6s non seulement selon la tradi- tion religieuse, mais encore selon un effort d'explication scientifique se d6gageant des mentalit6s du Moyen-Age.

Compl6t6 par de nombreuses r6f6rences, l'ouvrage de F. R. pr6sente Maimonide comme un pr6curseur de la m6decine moderne. Cer- tains d6veloppements comme ceux concernant l'avortement et l'euthanasie sont d'actualit6. Fred Rosner a le m6rite de rendre accessible au lecteur contemporain une r6flexion sur l'6thique m6dicale qui puise ses sources dans une sagesse ancienne trop mal connue.

Doris Bensimon.

84.77 ROUSSE-GROSSEAU (Christiane).

Mission catholique et choc des modules culturels en Afrique. L'exemple du Dahomey (1861-1928). Paris, L'Harmattan, 1992, 390 p.

Relatant d'une plume alerte pras de soixante-dix annies de l'histoire de l'Eglise au Dahomey (devenu B6nin depuis pros de deux d6cennies), l'auteur qui est professeur d'His- toire a l'Universit6 de Lyon II nous offre ici un travail a bien des 6gards exemplaire, ffit-ce dans ses omissions. En 1861, les premiers mis- sionnaires de la Soci6t6 des Missions Afri- caines de Lyon (S.M.A.), fond6e quelques anndes auparavant, abordent les c6tes du Sud- Dahomey; en 1928, est ordonn6 le premier pro- tre autochtone, I'abb6 Moulero. Entre ces deux dates, les royaumes dahomdens, dont I'A. rap- pelle la longue histoire, seront entr6s dans l'orbe de la colonisation frangaise (6viction de Behanzin en 1892) et l'6vang61isation y fera de notables progrbs. Peu au fait des traditions locales pour lesquelles ils n'ont qu'une pidtre estime, ces missionnaires originaires de l'Ouest de la France ou de l'Alsace, ne sont pas loin de penser que s'offre a eux la chance de faire renaitre en terre africaine la chr6tient6 qui les a nourris das l'enfance et que la IIIe R6publique a singuliarement malmen6e. De 1l, la tentation d'une Eglise qui, consciem- ment ou non, << transplante >> sous d'autres cieux sa cat6chase (on traduit en langue fon le

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