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This article was downloaded by: [University of Cambridge] On: 17 December 2014, At: 06:14 Publisher: Routledge Informa Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK European Journal of Teacher Education Publication details, including instructions for authors and subscription information: http://www.tandfonline.com/loi/cete20 La Socialisation Professionnelle des Instituters et les Pratiques Pédagogiques Sarella Henriquez Published online: 06 Jul 2006. To cite this article: Sarella Henriquez (1989) La Socialisation Professionnelle des Instituters et les Pratiques Pédagogiques, European Journal of Teacher Education, 12:3, 265-272, DOI: 10.1080/0261976890120306 To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/0261976890120306 PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all the information (the “Content”) contained in the publications on our platform. However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make no representations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness, or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and views expressed in this publication are the opinions and views of the authors, and are not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of the Content should not be relied upon and should be independently verified with primary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for any losses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages, and other liabilities whatsoever or howsoever caused arising directly or indirectly in connection with, in relation to or arising out of the use of the Content. This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Any substantial or systematic reproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing, systematic supply, or distribution in any form to anyone is expressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found at http://www.tandfonline.com/ page/terms-and-conditions

La Socialisation Professionnelle des Instituters et les Pratiques Pédagogiques

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Page 1: La Socialisation Professionnelle des Instituters et les Pratiques Pédagogiques

This article was downloaded by: [University of Cambridge]On: 17 December 2014, At: 06:14Publisher: RoutledgeInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK

European Journal of TeacherEducationPublication details, including instructions for authors andsubscription information:http://www.tandfonline.com/loi/cete20

La Socialisation Professionnelledes Instituters et les PratiquesPédagogiquesSarella HenriquezPublished online: 06 Jul 2006.

To cite this article: Sarella Henriquez (1989) La Socialisation Professionnelle des Instituterset les Pratiques Pédagogiques, European Journal of Teacher Education, 12:3, 265-272, DOI:10.1080/0261976890120306

To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/0261976890120306

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This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Anysubstantial or systematic reproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing,systematic supply, or distribution in any form to anyone is expressly forbidden.Terms & Conditions of access and use can be found at http://www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

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European Journal of Teacher Education, Vol. 12, No. 3, 1989 265

La Socialisation Professionnelle des Instituters et lesPratiques Pédagogiques

SARELLA HENRIQUEZ

SUMMARY Teachers' professional socialisation is a total process which develops ormodifies teachers' behaviour during their professional life. Institutional teacher training isunderstood to be an integrated part of this socialisation process. Teaching practice isanother integrated systematic part of this process. The early years of teaching practicehave fundamental importance in the integration of pedagogic and educational behav-iour. This socialisation process occurs in different ways and to varying degrees amongteachers, resulting in certain stages being reached in teaching practice. These 'steps' areinfluenced by at least two types of factors: (i) the nature of models teaching trainingtransmitted during institutional teacher training; (ii) the social composition of studentsand the institutional styles existing in the teaching practice.

SOMMAIRE Nous entendons ici par socialisation professionnelle le processus globald'acquisition ou de modification permanente des comportements enseignants tout au longde leur vie active. La formation institutionnelle des instituteurs est ici conçue comme unecomposante du processus global de socialisation, d'acquisition et de modification perma-nente des comportements enseignants. La pratique enseignante constitue une autreinstance de socialisation où les premières années de la pratique acquièrent une impor-tance fondamentale dans la constitution de l'ensemble des comportements pédagogiques etéducatifs plus larges. Ce processus de socialisation ne se réalise pas de la même manièrechez les enseignants ce qui se traduit par une différentiation des 'étapes' de la pratiqueenseignante. Ces parcours ou étapes varient selon l'influence d'au moins deux types devariables de la socialisation professionnelle que nous discutons ici: (i) la nature desmodèles véhiculés lors de la formation institutionnelle initiale et continue; (ii) lacomposition sociale du public scolaire et les modalités institutionnelles de la pratiqueenseignante.

A partir des observations systématiques réalisées auprès des enseignants issus desmilieux pédagogiques différents [1], nous discutons ici dans quelle mesure la socialisa-tion professionnelle dont la formation institutionnelle fait partie, constitue un proces-sus global d'acquisition et de modification permanente des comportements enseignants.

Ce processus permanent de constitution, de reconstitution et de modification descomportements et des 'styles' enseignants ne se réalise pas au même rythme et de lamême manière chez les enseignants. Ce processus qui intègre la formation profession-nelle est à la base de la configuration de chacune des 'étapes' de la pratique

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enseignante, des étapes qui diffèrent selon les modes particuliers de socialisation pourchacun des enseignants.

Par ailleurs, la nature des effets observables sur les pratiques enseignantes suite à laformation professionnelle, de même que la nature des représentations de la formationreçue, changent selon la présence d'autres variables de la socialisation professionnellenotamment la composition sociale du public scolaire, l'existence d'une équipe pédago-gique dans l'établissement ou socialisation par les 'pairs', les styles de direction etd'inspection, les rapports de force entre les enseignants 'traditionnels' et 'novateurs'.

Dans le cadre de notre recherche [2] à l'aide des entretiens et des enquêtes, nousavons essayé d'examiner les variables de la socialisation professionnelle susceptiblesd'expliquer la diversité des pratiques éducatives et pouvant être saisies à travers lesreprésentations propres aux acteurs enseignants. Ici nous ne présentons que deux deces variables dans une problématique plus générale de la socialisation professionnelle.

L'intérêt d'examiner chacune des variables de la socialisation qui inter-agissentavec la formation professionnelle, réside dans la possibilité d'introduire des modifica-tions au niveau des comportements enseignants à chacune des 'étapes' de la pratique.

I. La Socialisation—formation professionnelle

Nous assistons aujourd'hui, dans le domaine scolaire et social, et ceci depuis laSeconde Guerre mondiale, à un processus de socialisation conflictuelle et fortementdivergente, s'opposant à une socialisation fortement convergente présente encore avant1945.

Cette évolution est due, en particulier, à la transformation des agents traditionnelsde socialisation (famille, environnement proche, groupes sociaux organisés) et àl'émergence de nouveaux moyens de socialisation (moyens de communication demasse, consommation culturelle amplifiée) de même qu'aux nouveaux objectifs assig-nés à l'école, et à l'hétérogénéité du public scolaire. Ces différents facteurs accentuentla dimension conflictuelle de la socialisation scolaire, et rendent ainsi beaucoup pluscomplexes les activités professionnelles de l'enseignant.

Nous entendons ici par socialisation professionnelle le processus global d'acquisi-tion ou de modification des comportements enseignants. La formation professionnelleconstitue l'étape institutionnelle de ce processus inachevé de socialisation profession-nelle. En effet, quels que soient les divers modèles, cohérents ou contradictoires, quipeuvent être véhiculés au cours de la formation professionnelle, nous pensons, d'aprèsnos observations [3], que ce sont les expériences acquises au cours des premièresannées d'exercice du métier qui vont structurer la diversité des comportements, despersonnalités ou des styles enseignants: ces derniers constituant des expressionsconcrètes de la socialisation professionnelle.

Deux modes institutionnels, identifiables en terme de recherche, structurent for-mellement la socialisaton professionnelle: la formation initiale et la formation continue.

La formation initiale, même si elle a évolué et s'est lentement diversifiée selon lesmodes de fonctionnement des institutions de formation, reste encore structurée sur lemode de l'apport des connaissances et des savoirs théoriques.

La formation continue a réellement évolué, allant d'un modèle d'apport ponctuelde connaissances et de savoirs théoriques, vers une diversification au niveau de l'offrede formation, ainsi qu'au niveau des modalités de fonctionnement. Elle s'est davantageaxée sur des processus d'auto-analyse, de réflexion et de recherche sur des aspectsponctuels de la pratique, de même que sur des processus éducatifs plus globaux.

Cette dualité, observable au niveau de l'évolution des processus de formation, est

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en rapport direct avec le degré d'explicitation et de diversification (selon les besoinsexprimés par les enseignants à la base) de la demande de formation. C'est lorsque lesenseignants sont confrontés aux problèmes du terrain scolaire qu'ils peuvent définir etexpliciter davantage leurs demandes de formation, afin de mieux répondre auxproblèmes spécifiques qui surgissent dans le cours du fonctionnement scolaire. Parailleurs, la pratique pédagogique 'novatrice', en milieu scolaire ouvert, constitue lemoyen privilégié de l'ajustement de la formation professionnelle avec les projets leséducatifs, les évolutions sociales, économiques et technologiques.

Le contexte et la problématique de la formation professionnelle des enseignants acertainement beaucoup changé depuis notre première enquête en 1975 [4]. A l'époque,la formaton institutionnelle était caractérisée par son hétérogénéité: inégalité de ladurée de la formation et diversité du mode de fonctionnement dans les EcolesNormales.

Aujourd'hui une 'nouvelle génération' d'instituteurs gagne progressivement leterrain scolaire: ces nouveaux instituteurs se différencient de ceux qui sont déjà enplace—outre les origines sociales de plus en plus bourgeoises—par le type deformation reçue, à caractère universitaire. Ces nouveaux instituteurs vont probable-ment donner une nouvelle physionomie à l'école par leur participation aux innovationsà la base, contribuant ainsi aux transformations de l'ensemble de la société française.

Jusqu'en 1985, les modes d'accès à la profession d'instituteur sont multiples, car siofficiellement le recrutement se fait après le bac, suivi de trois années de formation enécole normale, en réalité la moitié des maîtres en fonction n'ont pas reçu la formationcomplète dispensée dans les écoles normales.

Le nouveau parcours du futur instituteur est quantitativement et qualitativementdifférent; il commence désormais à l'Université où il prépare, en deux ans après le bac,un diplôme d'études universitaires générales (DEUG). Puis il est recruté par concoursdans une école normale où il passe à nouveau deux années débouchant sur un examenavec classement, lequel détermine son affectation. La complémentarité nouvelle entreUniversité et Ecole Normale, depuis la rentrée 1984, constitue certes une source dedifficultés au niveau des modalités de fonctionnement.

Cette ouverture du mode de recrutement entraîne des effets sur ce personnelenseignant nouvellement formé: des effets qui vont se répercuter à leur tour, au seindes établissements scolaires une fois intégrés ces nouveaux instituteurs.

Après cette sélection les élèves instituteurs reçoivent dans les écoles normales uneformation professionnelle polyvalente de deux ans, rémunérée. Elle est axée sur lessept matières des nouveaux programmes de l'école primaire, et aussi sur la méthodo-logie, la sensibilisation à la recherche pédagogique et l'usage des technologies nouvelles.

II. Formation Professionnelle et Pratiques Pédagogiques

Dans le cadre de notre enquête [5], nous avons constaté les effets différentiels de laformation professionnelle sur les pratiques pédagogiques des instituteurs. Parmi ceuxqui ont reçu une formation, une grande scission s'est faite, sur le terrain scolaire, entreceux dont la formation comporte un passage par l'Université et ceux dont la formationest uniquement 'normalienne'. La variable âge de l'enseignant montre, indirectement,cette coupure. Nous avons essayé d'identifier les rapports existants entre formationprofessionnelle et pratiques pédagogiques, par notre question: 'Vos pratiques pédagogi-ques sont-elles le résultat d e . . . ?'

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—d'une formation initiale 10%—d'une formation continue ou d'un recyclage 16%—d'un conseil venant d'un inspecteur 3%—d'un cheminement personnel 63%—de l'ensemble de ces facteurs 7%—'je ne sais pas' 1%

II apparaît, d'une façon massive, que c'est le 'cheminement personnel' qui est à la basedes pratiques pédagogiques, mais la formation professionnelle initiale n'est cependantpas reconnue comme totalement inefficace, tout particulièrement pour les jeunesinstituteurs dont la formation professionnelle comporte une formation universitaire. Laformation continue semble avoir un impact différentiel selon le type et la nature de laformation continue suivie. L'inspection semble jouer un rôle fort limité.

La variable sexe n'est pas significative. Par contre, la variable âge de l'enseignantl'est en ce qui concerne les pratiques pédagogiques. Il en ressort que la formationinitiale semble plus directement utilisable chez les jeunes enseignants des deuxpremières tranches d'âge (82% et 72%), ce qui correspond aux instituteurs dont laformation normalienne comprend également un passage en Université.

Parallèlement, la formation professionnelle 'normalienne' continue a être l'objet defortes critiques de la part des instituteurs. Voici quelques récits qui en témoignent [6]:

Moi, il ne me semble pas que ce soit à l'EN qu'on puisse se former, commec'est à l'heure actuelle. Je suis plus pour une formation continue, mêmeinitiale, à la fois sur deux terrains:

... à la fac, pour avoir une formation théorique de réflexion sur le pédago-gique, et puis, faire que l'EN soit un endroit où il y ait des gens du terrain,des instituteurs, éventuellement des conseillers pédagogiques, des chercheursde l'INRP, des intervenants.

Moi, je suis pour une réforme de l'EN, en remettant les professeurs d'ENdans leurs corps d'origine, qu'ils aillent mûrir un peu en reprenant contactavec la classe.

La formation professionnelle initiale dans les Ecoles Normales d'autrefois n'échappepas non plus aux critiques. Elle est également l'objet de critiques nuancées de la partdes instituteurs plus âgés. On entend dire que:

La formation que j'ai réalisée en EN, il y a 30 ans, ne correspond plus à cequi se fait en ce moment. Notre formation était très encadrée, très rigide, onnous inculquait plutôt des valeurs morales. Il y avait des cours de moraleréservés à la directrice de l'EN. Ça nous donnait une certaine attitude parrapport à la fonction. C'était peut-être mal fait, mais je pense qu'en sortantde l'EN après cette année de formation, on était persuadé qu'on avaitquelque chose à faire pour les enfants, et qu'on n'allait pas uniquement dansune classe pour déverser des savoirs, mais aussi, qu'on avait des valeurssociales et éducatives.

Par rapport au métier, c'était très sec. Sur la formation typiquement profes-sionnelle, on nous donnait des fiches de leçons modèles, et on avait troisstages dont l'objectif était de prendre conscience des différents problèmes dela ville et de la campagne, mais ... on appliquait bêtement les recettes qu'onnous donnait, il n'y avait pas une réflexion pédagogique. Il n'y avait pasd'ouverture, mais il y avait une certaine rigueur, telle qu'en arrivant en

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classe, a la rentrée d'octobre, on avait dans sa petite valise des recettes quipermettaient de démarrer, la réflexion pédagogique venait après.

La situation est inverse en ce qui concerne la formation continue dont l'impact sembles'accoître ave l'âge de l'enseignant. Mais ces résultats peuvent être influencés par lefait que les jeunes enseignants—et en particulier les moins de 25 ans—sont beaucoupmoins nombreux à avoir suivi ces stages de formation continue.

Les conseils de l'inspection se font sentir davantage auprès des très jeunesdébutants, pour amortir le fameux 'choc' de la pratique; ils décroissent en importanceavec les années d'expérience de l'enseignant.

La pratique pédagogique comme résultante d'un cheminement personnel est re-présentée quel que soit l'âge, et reste très élevée, en particulier chez les plusexpérimentés. Parmi les éléments qui participent à ce 'cheminement personnel', onidentifie les 'mouvements pédagogiques', les 'partis politiques', le 'passage en faculté,comme des éléments déclenchant une analyse et une remise en cause des fonctions del'école et de la fonction enseignante; il s'agit donc des instances formatrices dans unsens large.

Ces constats vont dans le sens de nos recherches précédentes [7]. Dans notre thèsede Illème cycle, nous avions mis en évidence le faible impact de la formationnormalienne sur les pratiques pédagogiques, de même que sur la nature des rapportsenseignants-enseignes. Dans une autre recherche [8] concernant les effets de laformation continue dans un cadre universitaire, c'est le 'développement personnel' quia été mis en avant par les enseignants, en particulier lorsque l'offre de formationcontinue était très diversifiée comme c'était le cas de la formation en faculté. A la suited'une période de formation universitaire, et après une demande initiale formulée dansles termes d'une recherche de formatiom strictement professionnelle, c'est un déve-loppement personnel qui a été déclenché, créant à son tour une dynamique propre quiva influencer les pratiques pédagogiques.

Notre hypothèse concernant l'existence d'un modèle de formation professionnelleva dans le même sens. Nous soutenons qui'il n'existe pas, à 'heure actuelle, un modèlede formation qui soit satisfaisant pour former un 'enseignant efficace'. On peutdistinguer plusieurs cheminements, des parcours professionnels et sociaux fort diversqui constituent des modes de formations aussi divers. Par ailleurs, il n'y a pas un seulet unique modèle normalisant la formation d'un 'enseignant efficace'.

Il s'agit bien d'une idéalisation normative qui ne correspond pas à la réalité par lefait qu'il existe une diversité de modes de socialisation à l'intérieur d'une formationsociale, d'où résulte une diversité des pratiques pédagogiques et sociales. Celles-ci secaractérisent du point de vue de leur finalité sociale, par une prise de position dans lesens soit d'une plus grande sélection soit d'une plus grande démocratisation del'enseignement.

Aujourd'hui nous pensons qu'à la place d'un 'enseignant efficace' nous avonsdavantage besoin d'une 'équipe enseignante' qui soit en permanente révision despratiques et de la qualité des relations entre enseignants et enseignés.

III. La Nature des Obstacles Ressentis lors de la Pratique du Métier

L'identification des obstacles rencontrés par les instituteurs normaliens ou non, lors del'exercice du métier enseignant, nous permet de préciser la distance ou l'écart entre laformation reçue et la pratique pédagogique. Toutefois, puisque nous travaillons sur des

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discours enseignants, il s'agit des représentations concernant ces pratiques pédagog-iques.

Parmi les obstacles propres au métier, qui ont été identifiés par les enseignants [9],les normaliens et non-normaliens ont évoqué des obstacles de même nature, mais dontl'ordre de fréquence est différent. Ainsi, on observe Table I.

TABLE I. Obstacles Ressentis lors de l'Exercice du Métier par Fréquence Décroissante

Normaliens (n=222, 52%) Non-normaliens («=206,

Obstacles d'ordre relationnel 29%Comment gérer les conflits avecl'administration, les parents d'élèves

Obstacles d'ordre pédagogique 25%A cause de l'hétérogénéité despublics scolaires

Obstacles dus à l'inadaptation 19%Des structures scolaires qui pèsentsur les élèves et sur l'enseignant

Malaise des enseignants 18%Face à l'école et à la société

Aucun obstacle ressenti 9%

Obstacles d'ordre pédagogique 33%A cause de l'hétérogénéité despublics scolaires

Obstacles d'ordre relationnel 25%Comment gérer les conflits avecl'administration, les parentsd'élèves

Malaise des enseignants 21%Face à l'école et à la société.Dévalorisation du métier, isolement

Inadaptation des structures scolaires 14%Qui pèsent sur les élèves et surl'enseignant

Aucun obstacle ressenti 7%

Ces résultats ne montrent aucune différence significative entre les instituteurs etles institutrices.

La variable âge est significative: on constate que les obstacles importants décrois-sent régulièrement avec l'âge, en augmentant ainsi la catégorie 'aucun obstacleressenti'. Mais on peut se demander si les enseignants se situant dans cette catégorie,ont en réalité pris conscience de leur propre identité, de leur rôle social et profession-nel et s'ils ont atteint ce qu'on appelle la 'maîtrise de la pratique'.

Parmi les causes qui sont à l'origine de ces obstacles, les insuffisances de laformation des maîtres ont été citées en tout premier par les normaliens (65%) demême que par les non-normaliens (79%).

Il semble paradoxal que presque deux sur trois des instituteurs normaliens dénon-cent la formation reçue comme insuffisante et donc à l'origine de la plupart desdifficultés qu'ils recontrent lors de l'exercice de leur métier.

IV. Les Variables Institutionnelles de la Socialisation Professionnelle

Les enseignants de notre enquête qui ne sont pas passés par l'Ecole Normale [10],reconnaissent avoir eu une formation 'sur le tas'. Ce mode de formation qui consisteà se 'débrouiller du jour au lendemain' est fort différent selon les modalités dufonctionnement institutionnel; il est ainsi plutôt lié au hasard des circonstances. Ici, lavariable 'insitutionnelle' joue un rôle décisif, car dans les établissements scolaires oùfonctionne une 'équipe pédagogique', la socialisation professionnelle se réalise davan-tage par les 'pairs', par les collègues.

Nos études de cas à l'aide d'entretiens en profondeur nous ont permis d'identifier

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d'autres variables institutionnelles que lors de l'utilisation des enquêtes où ellesprésentaient un caractère peu explicite, des variables qui sont apparues commeassociées à la socialisation-formation professionnelle des instituteurs. Il s'agit enparticulier des 'styles de direction'—d'animation, de contrôle ou de laissez-faire—del'ensemble des modes de contrôle et de pression soit d'origine endogène ou exogène àl'établissement, de l'idéologie pédagogique dominante, soit par la voie hiérarchique del'Inspection, soit par la voie militante des mouvements pédagogiques et syndicaux.

Pour certains instituteurs, ce manque de socialisation-formation institutionnelleprend des formes très diverses. Nos observations montrent qu'il peut devenir senti-ment de culpabilité vis-à-vis des élèves en situation d'échec scolaire, et s'inscrire àl'origine du 'malaise enseignant'; situation qui prend parfois des caractères 'pathologi-ques', comme nous l'avons remarqué lors de nos études de cas dans les Zonesd'Education Prioritaires.

On peut se demander dans quelle mesure ce sentiment d'impuissance et de désarroiest venu s'installer avant l'entrée dans la profession, et dans quelle mesure il provientde la formation initiale spécifique des enseignants ou des conditions objectives de leurprofession?

V. Quelques Constats de Notre Recherche sur la Socialisation des Enseignants

Au vu de l'ensemble de nos résultats empiriques au micro-niveau, nous pouvonsaujourd'hui constater que la compréhension de la diversité des pratiques pédagogiquesdépasse largement une sociologie des attributs (variable sociologiques objectives etsubjectives). Elle intègre des variables de processus (socialisation professionnelle,statégies individuelles et collectives), des variables institutionnelles (styles de directionet d'inspection, idéologies pédagogiques, politique et syndicale dominantes, rapports deforce entre enseignants novateurs et conserroteurs), des variables de contexte (compo-sition socio-culturelle du public scolaire), des variables de résultats (résultats sco-laires), des variables de feed-back et d'auto-évaluation (modification des pratiques).

Nos recherches au micro-niveau constituent un long détour empirique et concep-tuel autour de la socialisation professionnelle des enseignants afin d'examiner l'ensem-ble des variables explicatives de la diversité des pratiques pédagogiques et éducativesplus larges, susceptibles d'être saisies à travers les représentations propres aux acteursenseignants.

Partie des effets différentiels de la formation professionnelle sur les pratiques etrapports pédagogiques—notre hypothèse de départ douze ans auparavant—noussommes amenée aujourd'hui à élargir ce concept pour y intégrer la socialisationprofessionnelle non encore achevée, exprimée en termes d'étapes de la pratique, dont lagenèse s'insère dans les éléments d'une socialisation familiale et scolaire, mais surtoutde nature professionnelle. Les premières années de la pratique, définissables comme lechoc de la pratique acquièrent une importance fondamentale dans la constitution del'ensemble des comportements pédagogiques et éducatifs plus larges. Ceux-ci sontmodifiables et révisables par l'enseignant lui-même tout au long de sa trajectoireprofessionnelle notament lors de la présence des situations déclanchantes de change-ments comme c'est le cas de la formation continue, de l'exercice enseignant en milieud'innovation, parmi d'autres situations.

Correspondance: Sarella Henriquez, Université Paris VIII, 2 rue de la Liberté, 93526,Saint Denis, Paris, France.

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NOTES

[1] S. HENRIQUEZ (1987) Continuités et raptures des représentations et des pratiquesenseignantes, Vols. III et IV, Doctorat d'Etat, Université de Paris V.

[2] S. HENRIQUEZ (1987) op. cit.[3] S. HENRIQUEZ (1985) Les premières années de la pratique enseignante, mimeo,

Université Paris VIII.[4] S. HENRIQUEZ (1975) L'observation des attitudes et des comportements pédago-

giques des enseignants. Thèse de III Cycle, Université Paris VIII.[5] S. HENRIQUEZ (1987) op. cit.[6] S. HENRIQUEZ (1987) op cit.[7] S. HENRIQUEZ (1975) op. cit.[8] S. HENRIQUEZ (1986) Les étudiants-enseignants à l'Université Paris VIII, mimeo,

Université Paris VIII.[9] S. HENRIQUEZ (1987) op. cit.

[10] Instituteurs (206), soit 48% de notre échantillon.

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