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Université Mohamed 1 er Faculté des Sciences Juridique Economiques et Sociales Oujda Master économie et management des organisations Exposé Sous le thème : La théorie de la firme japonaise 1

La Théorie de La Firme Japonaise

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La Théorie de La Firme Japonaise

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Page 1: La Théorie de La Firme Japonaise

Université Mohamed 1er Faculté des Sciences Juridique Economiques

et Sociales Oujda

Master économie et management des organisations

Exposé

Sous le thème :

La théorie de la firme japonaise

Année universitaire 2013/2014

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Page 2: La Théorie de La Firme Japonaise

Plan

Introduction

I. Fondement de la théorie japonaise

1.La pensée japonaise

2.Le Toyotisme

II. La firme J

1. Définition et comparaison de la firme j/A

2. L’opposition de la firme japonaise et la

firme américaine 

3. Les trois principes de dualité

4. Évaluation critique de l’apport d’Aoki 

Conclusion

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Page 3: La Théorie de La Firme Japonaise

Introduction

La théorie de la firme japonaise est une théorie que l'on doit à l'économiste japonais

Masahiko Aoki. Elle consiste à analyser la structure d'une entreprise et ses performances à

l'aune de la structure d'échange de l'information. La firme de type A (américain, aussi appelé

dans les travaux ultérieurs d'Aoki le modèle H pour hiérarchique) possède une structure

rigide. Ses règles et ses fonctions sont préétablies de façon précise. La firme de type J

(japonais, aussi appelé modèle horizontal) au contraire possède une organisation du travail

souple et sans fonction figée. Chacune possède ses domaines et conditions d'efficacité. Selon

Aoki, la firme J est plus efficiente dans un univers incertain que la firme A. L'apport principal

de cette distinction est de montrer qu'il existe une cohérence entre les mécanismes de

coordination et les mécanismes d'incitation.

La structure d'échanges de l'information renvoie d'une part, au processus de division et

d'allocation des fonctions et d'autre part, au mode de coordination de ces fonctions. Le

processus de division et d'allocation des fonctions n'est pas le même dans la firme A et dans la

firme J. En effet, si dans la firme A on a une organisation taylorienne avec une définition

précise et a priori des fonctions, dans la firme J les fonctions sont spécialisées de façon plus

souples, on pratique la rotation du personnel et les rémunérations sont déconnectées des

fonctions. Quant au mode de coordination des fonctions, dans la firme A, la préférence va au

contrat qui définit des objectifs de performance sur lesquels une rémunération individuelle est

fixée, alors que dans la firme J, on favorise la recherche d'une compétence collective au

niveau des équipes de travail.

Afin de mieux comprendre cette notion on est dans l’obligation d’éclaircir les origines de

cette théorie, dans un premier temps on va parler de la pensée japonaise, et on va donner une

définition du toyotisme et son rôle dans la création de la puissance économique japonaise

qu’on connaît aujourd’hui.

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  I. Fondement de la théorie japonaise

1. La pensée japonaise

Les deux premiers auteurs japonais significatifs sont des américains. Il s'agit de Joseph

JURAN (1904- ) et d'Edward DEMING (1900-1993) qui sont les inventeurs du concept de "

qualité totale ".

JURAN montre la façon dont la " philosophie qualité " affecte les différents niveaux

d'activité de l'entreprise et souligne l'importance de la " trilogie de la qualité " que sont :

planification, contrôles et améliorations techniques permanentes.

Le comble de l’horreur, c’est d’être à bord d’un grand navire, de savoir qu’il va sombrer, de

connaître la façon exacte de le sauver et de ne pas être écouté. C’est la malédiction qui frappe

depuis un quart de siècle William Edwards Deming, ce personnage légendaire qui a montré

aux Japonais comment faire des produits de très haute qualité à très bas prix.

Les années 1941-1945 ont appris à Deming une chose importante. Il a réalisé que son

expérience lui permettait de créer une philosophie de management nouvelle et unique, une

philosophie dont les principes de base pouvaient être appliqués dans tous les secteurs de

l’économie, notamment dans les services. Les moyens devaient être différents de ceux mis en

oeuvre pendant la deuxième guerre mondiale. Nous comprenons rétrospectivement pourquoi

les Américains ne l’ont pas écouté. Le reste du monde était dévasté par la guerre. Les

Américains aidaient l’Europe par le plan Marshall, faisaient exploser des bombes à

hydrogène, gagnaient des prix Nobel et développaient leur économie de façon explosive.

Croyant que l’expansion était sans limites, ils n’acceptaient pas de conseils sur la façon de

produire des biens de qualité et d’améliorer la productivité. Première puissance mondiale,

l’Amérique n’avait aucun problème avec la productivité, l’innovation ou la concurrence ; elle

cherchait seulement à occuper ses loisirs le mieux possible.

L’histoire des Japonais est totalement différente. Leur pays était vaincu ; leur économie en

ruine. Le rêve du « Grand Extrême Orient Prospère » fondé sur les conquêtes militaires du

Japon s’était envolé. Leur archipel, plus petit que la Californie mais dix fois plus peuplé,

dépourvu de ressources naturelles, devait relever un important défi. Avec l’aide du

commandement des forces alliées dirigé par le général MacArthur, l’Association des

Ingénieurs et Scientifiques Japonais (JUSE) a invité le Dr. Deming à donner des conférences

au Japon sur la maîtrise de la qualité. Ce fut pour eux une chance monumentale.

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Lors de ses premières visites au Japon, Deming étudia les habitudes des ouvriers et fut

persuadé que ses méthodes pouvaient être appliquées dans leurs usines. En juillet 1950, dès

son arrivée à Tokyo, il a invité à une réunion les quarante-cinq plus grands industriels du

Japon ; ils sont tous venus. Il leur a expliqué ses méthodes et leur a promis que, s’ils les

appliquaient, le Japon deviendrait en cinq ans un acteur important sur la scène internationale.

Dans les six semaines qui ont suivi la réunion, des industriels signalaient déjà des gains de

productivité de 30 % obtenus sans aucun investissement. En voyant ces résultats, ils ont

compris que le chemin de pensée de Deming était réellement efficace. Alors ils ont consacré

tout leur temps et leur énergie à le suivre.

2. Le Toyotisme

Après la défaite du Japon face aux Américains au cours de la Seconde Guerre mondiale. Pour

relancer leur économie, les japonais adoptent une forme d’organisation comme une vision

stratégique afin de redémarrer leur l'économie et pour rattraper les américains au niveau de la

production sinon risquer de disparaître.

a. Dèfinition et origine

Également appelé « ohnisme », le toyotisme est une organisation du travail élaborée

dans le début des années cinquante par le fondateur de Toyota Sakichi Toyoda, et

l'ingénieur Taiichi Ohno qui sont inspirés des travaux de William Edwards Deming ainsi

que de Ford et Taylor.

Le toyotisme répond à une situation bien particulière de l’industrie automobile japonaise

de l’après-guerre, qui était caractérisée par :

• un faible marché intérieur et peu de débouchés extérieurs;

• une grande diversité de producteurs vendant à une demande diversifiée;

• l’existence d’un syndicalisme d’entreprise.

Le tableau suivant retrace la différence entre le modèle d’organisation japonais et le modèle

occidental( la firme A) :

Entreprises japonaises :

emploi à vie

carrières non spécialisées

mécanismes de contrôle implicites

prise de décision collective

responsabilité collective

Entreprises occidentales :

emploi limité dans le temps

carrières spécialisées

mécanismes de contrôle explicites

prise de décision individuelle

responsabilité individuelle

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intérêt global intérêt limité

b. Les principes du toyotisme

Le toyotisme repose sur deux principes fondamentaux afin d’éliminer les gaspillages :

d’abord l’autonomisation, ensuite le « juste-à-temps » ou « à flux tendus » ou encore le

Kanban.

L'autonomation et auto-activation: L’autonomation est une contraction de

l’autonomie et d’automatisation. L’idée étant de doter les machines d’une

certaine « autonomie » en introduisant un mécanisme d’auto-arrêt ou d’arrêt

automatique en cas de fonctionnement défectueux.

Le juste-à-temps: Le juste à temps est un système de production qui vise à

synchroniser et à ajuster exactement le flux et le nombre des pièces avec le

rythme de montage. De ce fait, l'entreprise a toujours les stocks justes nécessaires

et assure donc sa production selon les commandes, ce qui permet de diminuer

des dépenses inutiles en achetant trop de stocks. La pièce doit arriver ni trop tôt,

ni trop tard. L’objectif est d’atteindre une organisation optimale reposant sur le

principe des cinq zéros à savoir zéro stock, zéro délai, zéro papier, zéro défaut,

zéro panne.

Le kaizen: C’est la fusion des deux mots japonais kai et zen qui signifient

respectivement « changement » et « bon ». La traduction française courante est «

amélioration continue ». Par extension, on veut signifier « analyser pour rendre

meilleur ».

Le cercle de qualité: Un cercle de qualité est définie comme un petit groupe

d'employés effectuant des travaux similaires ou connexes qui se réunissent

régulièrement afin d’identifier, analyser et résoudre les problèmes reliés à la

production et d'améliorer son fonctionnement général. Les cercles de qualité

permettent de réduire les coûts, d’augmenter la productivité et de motiver les

employés qui reçoivent habituellement une formation formelle dans les méthodes

de résolution de problèmes.

II. La firme J

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1. Définition et comparaison de la firme j/A

L’analyse d’aoki soulève une question suivante ; comment la structure d’échange

d’information détermine la conception différente de chaque firme ??

Pour mener son analyse, aoki a procédé en suivant une méthode comparative entre les grandes

firmes japonaises contemporaines et la grande firme fordienne américaine. Il a ainsi mis en

évidence un ensemble de différences jugées importantes pour lui permettre de relever les

principes de la théorie générale de la firme.

a. La firme amèricaine

La firme américaine se caractérise par des principes de spécialisation rigides, un

mode hiérarchique et autoritaire de répartition des fonctions, une distinction entre

conception et exécution. Il n'y a pas de partage de l'information, mais une

circulation de l'information le long de la hiérarchie (ce sont les niveaux supérieurs

de la hiérarchie qui détiennent l'information, d'où une coordination hiérarchisée de

l'information). L'expérience acquise durant la gestion d'un événement imprévu sera

parfaitement transmise à la hiérarchie grâce à la circulation verticale de

l'information et permettra d'affiner les probabilités d'occurrence des événements,

lesquelles s'intégreront dans le prochain exercice de planification. Cependant la

compétence de la firme américaine n'est pas instantanément parfaite du fait de

l'existence d'un délai d'exécution des décisions (rationalité limitée).

b. la firme japonaise

La firme japonaise présente une division du travail flexible, avec rotation des

tâches, une coordination basée sur des méthodes incitatives, un partage du pouvoir

entre propriétaires, gestionnaires et employés. Ce modèle favorise l'acquisition

d'informations nouvelles, le partage de l'information et la décentralisation de la

coordination de l'information. Aussi le "learning by doing" permet d'améliorer et

d'élargir la connaissance des techniques de production des différentes unités

opérationnelles.

Les firmes américaines et japonaises se définissent ainsi comme des ensembles

ordonnés de participants, coordonnant automatiquement leurs ressources

informationnelles. L'activité économique ne résulte plus d'une sommation de

rationalités contractuelles individuelles, mais d'un arrangement informationnel de

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groupes d'agents économiques dont la compétence collective est bien supérieure.

Selon M. AOKI, la structure souple et horizontale du système d'information de la

firme japonaise est la plus efficace et la mieux adaptée à l'environnement

contemporain que celle de la firme américaine. Celle-ci, adaptée à la grande série

standardisée, pour des marchés croissants, rencontre les plus grandes difficultés à

atteindre ses objectifs dès lors que ceux-ci sont soumis à des ajustements

permanents dans des univers changeants.

Incitation

information

centralisation decentralisation

centralisation Firme H

decentralisation Firme O

2. L’opposition de la firme japonaise et américaine 

L’opposition entre la firme A et la firme J est présentée au niveau des cinq points suivants :

Au niveau des ateliers :

La répartition du travail dans la firme A, se fait selon des principes de spécialisation rigides en

fonction des standards préétablis, c’est une  une coordination hiérarchique. Dans la firme J,

la coordination est plutôt horizontale et les échanges d’informations se font de manière plus

au moins informelle en pratiquant la rotation des taches.

Au niveau de l’entreprise :

On procède dans la firme A à une répartition hiérarchique et autoritaire des fonctions, de

manière à réaliser des gains en spécialisation. Alors que dans la firme J, on applique des

procédures souples et « transfonctionnelles » de coordination telle la participation des

ouvriers aux cercles de qualité ou la présence des ingénieurs dans les ateliers, atténuant la

rigueur de l’opposition entre travaux de conception et d’exécution.

Au niveau de relation de sous-traitance :

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La firme A se caractérisant par la rigidité, la sous- traitance demeure aussi hiérarchique et

pratiquée le plus souvent comme report des risques vers le sous traitant contrairement à la

firme J dans laquelle elle assure l’autonomie des Cocontractants et un certain partage de

risque grâce à sa déconcentration et sa décentralisation.

Au niveau de la structure financière :

La nature des rapports entre les institutions financières et la firme J, lui assure l’autonomie de

gestion, tandis que le poids des contraintes financières et de rentabilité à court terme sont si

importants que les actionnaires et les banquiers disposent d’un véritable pouvoir hiérarchique

dans la firme A.

Au niveau du partage du pouvoir :

Contrairement à la firme A où le poids des propriétaires (actionnaires) est très important, la

firme J se caractérise par une certaine équivalence entre propriétaires et salariés en leur

accordant une certaine autonomie à travers leur participation au conseil d’administration.

Toutefois, les salariés ont le droit d’être représentés par le syndicat de l’entreprise. Les

gestionnaires sont des médiateurs entre propriétaire et salarié qui défendent les intérêts des

employés et de propriétaires.

Cette opposition peut être résumée dans le tableau suivant :

Modèle A Modèle JAteliers - spécialisation rigide

- standards préétablis- coordination hiérarchique

- flexibilité et souplesse - rotation des taches - coordination par incitation

Entreprise - répartition en fonction- séparation conception-exécution-hiérarchie autoritaire

-coordination transfonctionnelle-échanges conception-exécution-participation encouragée

Sous-traitance - intégration rigide- report de risque sur le sous traitant-relation hiérarchique

-déconcentration et décentralisation- autonomie relative- relation d’association

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Structure financière - contraintes financières- objectif de rentabilité à court terme- pouvoir des actionnaires et des banques

- liaison avec une banque du groupe- participations croisées- autonomie de gestion à long terme

Partage du pouvoir - soumises au contrôle des propriétaires- s’opposant aux organisations de salariés - les gestionnaires construisent leur carrière- recherche du profit maximum

- les gestionnaires sont des médiateurs- ils défendent les intérêts des employés et de propriétaires (défense de l’emploi)- recherche de la croissance la plus forte

3. Les trois principes de dualité

Aoki va faire finalement la différence entre deux types de firmes : la firme hiérarchique ( le

modèle H) et la firme horizontale ( le modèle J), sur la base de ce qu’il désigne les trois

principes de dualité de l’entreprise qui sont les suivants .

Coordination, hiérarchie et incitations :

Ce principe traite le mode de coordination et « les méthodes de stimulation » interne de la

firme.

Le modèle H présente une séparation hiérarchique entre les opérations de conception et celles

d'exécution. L’accent est mis sur les gains tirés de la spécialisation.

Ainsi, les opportunités d’apprentissage sont faibles. Ce type de firme n’établit pas de lien

durable avec le salarié qui reste écarté de la gestion et qui répète une tâche particulière

puisque les tâches irrégulières sont traitées par la hiérarchie.

Le modèle J, quant à lui, est caractérisé par une coordination horizontale entre les unités

opérationnelles ce qui favorise le partage des informations dans le cadre des efforts de

coordination.

La plus value apportée par la prise en compte de l’impertinence acquise et la coordination

horizontale organisée au niveau des exécutants peut plus que compenser la perte d’efficacité

par le sacrifice de temps et de l’énergie des unités officielles  due à l’abandon de la

spécialisation organisationnelle.

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Aoki insiste sur le fait que les apprentissages se font pour l’essentiel suivants des procédures

informelles et tacites, c’est le caractère même qui rend difficile la mise en place de

la coordination horizontale, sans faire référence à des méthodes de stimulation particulière

c’est alors à ce niveau qu’intervient le système de la hiérarchie des grades comme instrument

de stimulation. Ce système consiste à affecter un garde à chaque salarié  « suivant une grille »,

chaque grade correspond à un niveau donné de salaire, mais non à une fonction particulière,

de sorte à ce que les employés ayant le même grade peuvent exercer des fonctions différentes.

L’application de ce système incite fortement les salariés à développer leurs compétences et

leur savoir-faire à travers les possibilités multiples d’apprentissage qui leurs sont offertes dans

le cadre de la coordination horizontale.

L’incitation que représente le système de la hiérarchie de grade joue un rôle moteur pour

assurer l’efficience de la coordination et de la firme dans son ensemble.

Managers, actionnaires, banquiers :

Cette dualité incitation / hiérarchie s’applique ici aux relations entre l’entreprise et les acteurs

qui interviennent dans sa structure financière à savoir les actionnaires et les banquiers.

L’organisation interne et le contrôle financier de la firme japonaise sont doublement

caractérisés par :

le rôle limité de la hiérarchie dans la prise de décision. Les managers disposent d’une

certaine autonomie qui représente en elle-même une forte incitation.

Le rôle accru de la hiérarchie dans les mécanismes d’incitation : ce n’est qu’en cas de

mise en danger de la rentabilité de l’entreprise que les actionnaires et les banques

interviennent, d’abord de manière discrète, puis directement. Les financiers ne pilotent

l’entreprise que par incitation indirecte avec un faible pouvoir de décisions.

D’ailleurs, déjà compte tenu de la réglementation japonaise, les banques et les institutions

financières ne sont pas autorisés à détenir chacune plus de 5% à la fois des titres d’une

entreprise non financière. Les managers disposent donc d’un pouvoir effectif dans la conduite

des affaires. Ce système est qualifié de WDIR c'est-à-dire faible pouvoir de décision / forte

incitation

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Le principe du double contrôle :

Ce principe a trait au partage du pouvoir général entre les différents centres de décisions qui

composent la firme.

Les décisions des managers sont soumises alors au double contrôle, celui des détenteurs du

capital ainsi que celui des employés.

En effet, Aoki considère que les salariés représentent un actif spécifique dont la firme doit

maintenir la cohérence et s’y attacher à long terme.

Ainsi, le syndicat d’entreprise exerce un contrôle équivalent à celui des actionnaires, et les

managers agissent comme médiateurs de ce double intérêt contrairement à la forme H, qui est

soumise principalement au contrôle des actionnaires.

Le tableau suivant résume les trois principes de dualité dans le modèle A et J :

Le mode H, typiquement occidental selon Aoki, propose une solution hiérarchique à la

coordination par la planification. Alors que le mode J plus horizontal dont le principe

d’incitation fonctionne à l’inverse :

En Occident, l’incitation est décentralisée au sens du marché, car les acteurs sont recrutés et

font carrière sur les marchés internes ou externes du travail. La sanction de leur efficacité et

de leur bonne volonté se fait lors des recrutements ou des licenciements et parfois par des

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Modèle A Modèle JCoordination

Hiérarchie

Incitation

Spécialisation rigide

Recherche de gains de spécialisationHiérarchie dans la gestion

Recherche des gains de communicationCoordination horizontale

Hiérarchie des gardes

Managers

Actionnaires

Banquiers

Instabilité des équipes dirigeantesTrès forte mobilité

Forte capacité de contrôle

Managers stables

Décentralisation du capital

La banque joue un rôle particulier

Principe du double contrôle

Les actionnaires veulent des profits élevés, distribués rapidement Les salariés veulent des salaires élevés Les gestionnaires font leur carrière

Relations de partenairesIdentité d’intérêts employés-actionnairesLes salariés sont un actif spécifiqueLes gestionnaires sont des médiateurs

Page 13: La Théorie de La Firme Japonaise

systèmes incitatifs assez précis jouant sur leur revenu. Les salariés ont aussi pour tradition de

changer d’employeur selon les rémunérations et les conditions de travail offertes.

Dans l’entreprise japonaise traditionnelle, le salarié reste au contraire attaché à l’entreprise,

souvent à vie, et sa rémunération ne varie pas aussi nettement en fonction des résultats.

Curieusement, c’est la hiérarchie des grades qui est au Japon une forme d’incitation où l’on

progresse plus ou moins vite selon les résultats et les preuves de dévouement à l’entreprise.

Comme au Japon le statut social en général est très lié au statut de l’entreprise, l’enjeu pour

l’individu est particulièrement fort sans qu’il soit nécessaire d’en passer systématiquement par

des systèmes incitatifs financiers.

Aoki conclut que la firme J, caractérisée par son esprit d'équipe, par sa formation collective

est probablement plus efficace lorsque les fluctuations sur le marché sont négligeables, de

même que lorsque le processus de production est d'une certaine complexité avec des produits

diversifiés. Pour sa part, la firme A serait plus adaptée à un contexte de stabilité ou de très

fortes fluctuations de la demande, ou encore lorsque le processus de production comporte peu

d'étapes

4.Evaluation critique de l’apport d’Aoki 

a. des faits stylisés :L’analyse en termes de « faits stylisés » et de  « structure d’échange d’information »  fait

référence sur le plan méthodologique aux « faits stylisés » a permis une description

synthétique de la firme japonaise tout en s’inscrivant dans une démarche théorique non-

culturaliste, qui met l’accent sur une série de dimensions décisives au fonctionnement des

firmes à travers la notion de structure d’échange d’information et des rapports entre les

incitations et la hiérarchie.

b. des principes de dualité :Concernant le premier principe dual « hiérarchie /incitation », il n’est intelligible que sur la

base d’innovations organisationnelles puissantes .Or, la structure des échanges d’informations

ne représente qu’un dérivé des innovations organisationnelles. Il fallait donc mettre en

évidence le contenu technique et les modes de contrôles qu’elles mettent en œuvre.

Le deuxième principe de dualité qui implique une faible intervention des actionnaires et

surtout des banquiers , est lié à des caractéristiques institutionnelles propres au japon dans une

phase historique déterminée alors que dans la décennie 1980 , la plupart de ces

caractéristiques ont disparu, entre autres, les taux d’intérêt étaient fixés par la banque du

japon, il ne pouvaient donc être utilisés dans la concurrence interbancaire . Ce sont les

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banques qui étaient en position de faiblesse pour garantir leurs portefeuilles de clients

émanant des entreprises industrielles.

Les caractéristiques institutionnelles prises en compte par Aoki expliquent le fonctionnement

particulier des rapports entre industrie et finance japonaise, plus efficacement que les

considérations relatives aux structures d’échange d’information entre banquiers et industriels.

Quant au principe du double contrôle également contesté du fait que le syndicalisme

japonais reste le plus intégré du monde d’une part, et que d’autre part l’actualité témoigne au

contraire de son faible pouvoir depuis le début de la décennie 1990. Depuis, on constate une

réduction drastique d’effectif qui se manifeste.

En définitive, la théorie de la firme n’intègre pas les innovations organisationnelles et les

contextes intentionnels.

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Conclusion

AOKI, qui suppose l’existence d’une structure organisationnelle, introduit une conception

contractuelle et coopérative de la firme compatible avec l’Économie des coûts de transaction

en développant un modèle d’analyse de la firme japonaise qui place la question de la

circulation de l’information au cœur de l’analyse.

Aoki se rapproche de la théorie de l’agence tout en interrogeant son « universalité » :

• Rôle central est attribué aux incitations qui assurent l'efficacité du mode de coordination

horizontal.

• Néanmoins, les incitations du modèle J conduisent à des comportements coopératifs, alors

que dans la théorie de l'agence, les incitations permettent de limiter les comportements

opportunistes.

• Alors que la théorie de l’agence voit la firme comme un « nœud de contrats », la firme

selon AOKI est un lieu de coordination horizontale, de coopération et d’apprentissage des

unités opérationnelles entre elles, voire un « jeu coopératif » (Aoki, 1984) porté par un

système d’incitation, l’ensemble conduisant à l’efficience organisationnelle.

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Bibliographie

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1991

T.Ohno, L’esprit Toyota, Masson, 1990.

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Benjamin Coriat et Olivier Weinstein : Les nouvelles théories de

l’entreprise, Livre de poche, 1995

H Sumiko-Hirata, Autour du "modèle" japonais:

Automatisation, nouvelles formes d'organisation et de relations

de travail, L'Harmattan, 1993

Paul Milgrom, John Roberts : Economie, organisation et

management

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