La Vie Associative | n°9 | L'économie dans les associations

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Le magazine de la Conférence Permanente des Coordinations Associatives (CPCA). n°9. Janvier 2007. L'économie dans les associations

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Le poids conomique des associations Page 4

Lenvironnement juridique et fiscal Page 14

Des exemples dvolution Des exemples structurelle dentreprise associative Page 26 Page 44

La

Bulletin de la Confrence permanente des coordinations associatives N 9 Janvier 2007

VieAssociativeLconomiedans les associations

Confrence permanente des coordinations associatives

La vie associative N 9 Janvier 2007

SommaireDirecteur de la publication : Jacques Henrard Responsables de la rdaction : Julien Adda, Virginie Ro Comit de la rdaction : Lquipe de La Pniche : Stphanie Barzasi, S y l vain Bouchard, Alain Dtolle, Odile Jacquin, Jordane Legleye, Odette Lepage, Myriam Lucas, Olivier Martin, Florian Mons, Hlne Spoladore, Christian Vaillant Maquette : Stphane Prvt Publication dite par la CPCA : 28, place Saint-Georges 75010 Paris Tl. 01 40 36 80 10 [email protected] www.cpca.asso.fr ISSN : 1761-9149 Dpt lgal parution Impression : GFI 114, rue de Cambrai 59000 Lille dite en 7 000 exemplaires Tous droits rservs Publication ralise en partenariat avec le soutien de la Dlgation interministrielle l'innovation, l'exprimentation sociale et l'conomie sociale (DIIESES). Cette publication sinscrit galement dans le cadre du Centre national de ressources sur le financement des associations entre la Caisse des dpts Direction des partenariats et de lconomie sociale et la CPCA.

4Le poids conomique des associationsEn France, de 4 5 % du PIB ?Les associations se caractrisent par le bnvolat. Mais 16 % dassociations employeurs comptent plus de 1,65 million de salaris.

Vers une clarification des relations avec les pouvoirs publics ?Les relations contractuelles avec l'tat ou les collectivits territoriales sont fondes sur des procdures htrognes.

Financement priv : la solution miracle ?Les rcentes politiques de l'tat incitent les associations diversifier leurs sources de financement.

Le don de temps : une valeur inestimable ?valuer le poids conomique du bnvolat prsente une double difficult.

26Des exemples dvolution structurelleDe laide domicile aux services la personneFace la concurrence des entreprises, lconomie des associations du secteur est la croise des chemins

Quelles ralits rgionales ?Les enqutes rgionales de lInsee sur l'emploi dans l'ESS permettent dextrapoler leur poids conomique.

Une exception franaise ?Une tude internationale propose une comparaison du poids conomique de la socit civile.

Culture : pour une reconnaissance du rle et de la fonction associativeAlors que les pratiques culturelles, comme les contenus, se diversifient, lconomie des associations culturelles est-elle la hauteur ?

14Lenvironnement juridique et fiscalL association, un statut pour entreprendre ?Pour beaucoup, gestion dsintresse rime avec non-commercial. Pourtant

L conomie du sport : un enjeu de socitLconomie du sport reste lie au p remier mouvement associatif de France. Pour combien de temps encore ?

L ducation populaire, entre gestion et valeurs militantesLa baisse des financements publics oblige les associations dducation populaire repenser leur modle conomique.

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Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

Lconomie dans les associations

ditorial44Des exemples dentreprise associativeGroupe SOS : la gouvernance associative au service du dveloppement conomique ?Interview de Jean-Marc Borello, dlgu gnral.

Jacques Henrard, prsident de la CPCA

Artisans du Monde, vers la cration dune marque ?Interview de Nicolas Gottry, administrateur.

Cap France, rseau professionnel du tourisme associatif dcentralis ?Interview de Jean-Michel Coeff, directeur de la Fdration.

52prsident de la CPCA

Lassociation, pour entreprendre autrement. Interview de Jacques Henrard,

Au dbut du XXe sicle comme au dbut du XXIe, la question de la capacit conomique des associations est un sujet politique, pour ne pas d i re politis, dterminant pour le dveloppement de la vie associative tout entire. Il faut se rappeler qu la cration de la loi de 1901, les dbats parlementaires tmoignent de la volont du lgislateur de limiter lassociation un groupement de personnes sans capacit conomique. Dans le contexte du tournant du sicle, cest la peur de voir se constituer un corps interm d i a i re dans une Rpublique fragilise, qui aurait les moyens de son indpendance conomique et donc politique, qui proccupe les responsables. Aujourdhui, si le contexte est radicalement diffrent, on entend parfois nos lus, voire c e rtains associatifs, dire que le monde associatif doit tre dbarrass de tout ce qui en fait un acteur conomique incontournable : relations contractuelles avec les pouvoirs publics, mise en uvre dactions dintrt gnral, professionnalisme, exprimentation socioconomique, insertion professionnelle, etc. On craint toujours la cration dun vritable corps intermdiaire, le troisime pilier de la dmocratie cot du politique et du syndicat. On craint que les citoyens organiss participent aux dbats de socit autrement que dans des cadres fixs par les lus. Ceux-ci prnent la participation des citoyens mais certains font tout pour la re t a rder. En parlant dconomie dans les associations, ce numro de La Vie associative essaie de montrer ce qui est trs peu visible ou tudi dans le monde associatif, l conomie dun secteur transversal qui na pas la reconnaissance quil mrite au mme titre que lartisanat ou les professions librales. Faire re c o n n a t re lconomie dans les associations, cest re c o n n a t re la vraie place du monde associatif dans le XXIe sicle. En acte et sans malentendu.

Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

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La reconnaissance de leur utilit sociale est un enjeu essentiel des associations ; pour autant,

En FranceAvec plus dun million dassociations estimes a c t i ves, le secteur associatif a pour spcificit dtre dabord un monde de bnvolat. Pourtant les 16 % dassociations employeurs comptent plus de 1,65 million de salaris, reprsentant plus de 900 000 quivalents temps plein, soit environ 6 % de lemploi en France.

leur importance du point de vue conomique ne doit pas tre oublie. Si l'valuation du poids conomique des associations se heurte encore d'importantes difficults en ce qui concerne les donnes et les mthodes, les dix dernires annes ont vu apparatre un grand nombre de travaux aussi bien du ct des sociologues que de l'Insee. Ils permettent aujourd'hui un tat des lieux plus prcis que bon nombre d'assertions courantes. Toutefois, si cet tat des lieux donne des ordres de grandeur assez solidement tablis, il laisse encore dans l'imprcision des domaines comme le bnvolat ou les associations sans salari. Les donnes actuelles permettent d'analyser le poids conomique des associations en France dans le dtail de ses secteurs mais aussi dans le dtail de ses rgions. Un programme international de recherches permet galement de relativiser quelques ides reues.

L

e poids conomique des associations est couramment voqu dans les publications associatives. Il est trs variable selon les sources : de 45 100 milliards deuros. Cela s'explique par le fait qu'il peut tre valu partir des budgets ou partir de la valeur ajoute (voir encadr) et qu'il intgre ou non la totalit des associations et surtout le bnvolat qui, lui-mme, peut tre valu de diffrentes manires.

La valeur ajoute du monde associatifL'valuation partir des budgets et hors bnvolat tourne autour de 60 milliards deuros (59 milliards en 2005 pour Viviane Tchernonog (1), 61 milliards en 2002 pour Philippe Kaminski (2), et 59 milliards en 2002 pour la Johns

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e, de 4 5 % du PIB ?Hopkins University (3). Mais le vritable poids conomique dun secteur est reprsente par sa valeur ajoute qui exprime sa contribution au PIB (voir encadr). Seul Philippe Kaminski en ralise lva l u ation pour 2002, hors bnvolat et uniquement partir des associations employeurs. Cette valeur ajoute est de 45 milliards deuros, soit 2,9 % du PIB (voir ci-dessous). L'valuation du bnvolat est concordante dans toutes les tudes pour ce qui concerne l'quivalent temps plein (ETP) qu'il reprsente : environ 930 000 ETP pour 2005. Mais selon les tudes, sa valeur varie du simple au double : entre 16 et 38 milliards deuros (voir article suivant). Au total, il est vraisemblable que la valeur ajoute de l'ensemble des associations (employeurs ou pas), y compris la contribution des bnvoles, est comprise entre 60 et 85 milliards deuros (3,5 et 5 % du PIB). Ces milliards ne disent pas forcment grand-chose et, pour illustrer ce qu'ils reprsentent, Edith Archambault (4)

2020,52

15 106,54 6,43 5,2 2,97 1,88

5 0

0,72

0,68

0,28

0,16

0,1

Contribution au PIB des diffrents secteurs associatifs en France en milliards deuros (daprs Philippe Kaminski)

tablit une comparaison avec des secteurs conomiques reconnus. La valeur ajoute du monde associatif, sil tait une mono-activit, est ainsi quivalente celle du BTP, du transport ou de la banque.

Le poids conomique des associations employeursC'est Philippe Kaminski qu'on doit l'tude la plus rigoureuse sur la contribution au PIB des associations employeurs en France. Cette tude a t ralise partir des dclarations annuelles des donnes sociales (DADS) pour l'anne 2002 et dun chantillon labor avec le laboratoire Matisse du CNRS (de Viviane Tchern o n og). Elle rvle que les associations employeurs contribu e n t pour 45 milliards deuros au PIB, soit 2,9 % de celui-ci. Les cots salariaux (36 milliards), des 1 435 000 salaris du secteur associatif, reprsentent les 4/5e de cette valeur ajoute. Le bnvolat n'est pas pris en compte dans cette tude. Selon l'tude de Philippe Kaminski, la rpartition de la valeur ajoute par grands secteurs du monde associatif s ' t a blit selon le tableau ci-contre. On voit le poids crasant du social dans cette contribution du monde associatif employeur au PIB. Si l'on considre le terme communment employ de sanitaire et social , cest 60 % de la valeur ajoute ..Bulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

Contribution au PIB des associations en France (principales donnes, daprs Philippe Kaminski)Secteurs Social Sant Enseignement Culture-Sport-Loisirs Emploi 2 Monde de l'entreprise Dfense droits Cultes ONG Environnement Divers Valeur ajoute 120,52 6,54 6,43 5,20 2,97 1,88 0,72 0,68 0,28 0,16 0,10 45,1 % 14,4 % 14,1 % 11,4 % 6,5 % 4,1 % 1,6 % 1,5 % 0,6 % 0,3 % 0,2 %

Effectif746 910 151 840 194 230 163 940 85 480 38 550 16 080 20 900 10 100 4 960 2 340 52,0 % 10,6 % 13,5 % 11,4 % 6,0 % 2,7 % 1,1 % 1,5 % 0,7 % 0,3 % 0,2 %

Cots salariaux 1 Sal/VA16,7 5,4 5,0 3,8 2,3 1,3 0,5 0,5 0,3 0,1 0,1 46,5 % 15,0 % 14,0 % 10,5 % 6,3 % 3,7 % 1,5 % 1,3 % 0,7 % 0,3 % 0,2 % 81 % 82 % 78 % 73 % 76 % 71 % 73 % 69 % 91 % 79 % 74 %

Total

45,47

1 435 330

35,39

79 %

1. Valeur ajoute et cot salariaux en milliards deuros. 2. Il sagit du secteur de linsertion professionnelle.

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.. du monde associatif qui sont produits par ce secteur. Les deux autres secteurs qui contribuent significativement sont l'enseignement et la recherche d'une part, et la culture, le sport et les loisirs de l'autre. Ce dernier secteur (CSL) pose nanmoins problme puisque l'tude de Viviane Tchernonog fait apparatre un nombre d'associations employeurs 63 % plus lev que celui de Philippe Kaminski (ce qui explique peut-tre l'essentiel de l'cart entre les deux travaux et tient des primtres de dfinition diff rents). Dans tous les secteurs, la masse salariale reprsente de 70 80 % de la valeur ajoute et correspond au mme classement. On notera toutefois des carts significatifs. Les ex c d e n t s tant le plus souvent ngligeables, il apparat que le sport, le tourisme social, les comits d'entreprise et les organismes paritaires ont proportionnellement plus d'investissements financer que le social et la sant, la part des cots salariaux y tant nettement infrieure.

RepresDes questions mthodologiques malgr des prconisations dj anciennesLa seule manire d'valuer le produit intrieur brut du secteur associatif serait davoir accs aux budgets de toutes les associations. Sil existe un plan comptable pour toutes les associations, aucun organisme ne centralise leurs donnes conomiques. Si ce plan comptable prvoit par ailleurs la valorisation du temps bnvole dans lestimation des budgets associatifs, elle reste peu pratique. Les travaux du Conseil national de la vie associative (CNVA) tmoignent depuis presque 20 ans de lobjectif prioritaire donner au suivi statistique de la vie associative. Le rapport de la mission du Conseil national de linformation statistique (Cnis) en 1998 (1), prpar par un groupe de travail mixte avec les responsables associatifs, avait clairement identifi les enjeux et fait des propositions. Si dans cette logique, un programme dtude de lInsee a t lanc la fin des annes 1990 pour traiter systmatiquement les DADS , cette exploitation na pas t suivie par la cration des outils proposs (cration dune base de donnes, dun panel associatif, etc.). La CPCA a, pour sa part, propos au gouvernament en 2006 la cration dun conseil suprieur de lemploi dans les associations dont une des fonctions serait la coordination des tudes statistiques sur les associations employeurs. (1) CNIS, 3 septembre 1998, www.cnis.fr

Labsence de donnes pour les associations non employeurs85 % des associations n'emploient pas de salaris. Selon une tude prcdente de Viviane Tchern o n og, les

2/3 ont des budgets annuels infrieurs 7 500 e, ce qui ne les oblige aucun recensement systmatique de leurs comptes. N'tant soumises aucune dclaration comptable, ne r e c evant que peu de financement public, elles restent larg e m e n t mconnues dans les estimations conomiques. C'est ainsi de 2 4 milliards deuros de budget pour lesquels une valuation de la valeur

RepresPIB et valeur ajouteLe produit intrieur brut (PIB) est la richesse produite chaque anne en France. Il est calcul par l'addition des valeurs ajoutes de tous les agents conomiques. La valeur ajoute est constitue par l'apport propre de l'agent conomique la valeur d'un bien ou d'un service. On dduit donc de la valeur finale les biens et services extrieurs consomms pour la raliser. Pour les associations (comme pour la fonction publique), qui pour l'essentiel ne vendent pas de biens ou de services, on considre que les cots de production constituent la valeur de l'activit. En fait, pour calculer la valeur ajoute d'une association, il suffit de prendre le montant de son budget et d'en soustraire les achats, charges et services extrieurs, impts et taxes (fournitures, loyer, sous-traitance, publicit, transport, tlphone). La valeur ajoute est ainsi essentiellement constitue des charges de personnel, de l'intrt des emprunts, de l'amortissement des investissements et de l'ventuel excdent. Enfin, le plan comptable associatif prvoit la possibilit de valoriser le bnvolat. Cette valorisation du bnvolat doit alors tre additionne la valeur ajoute puisqu'elle en constitue une partie au mme titre que les charges de personnel.

ajoute dgage est impossible, mme si lon suppose quelle serait trs fa i ble. Si ces associations de bnvoles sont peu nombreuses dans le secteur sanitaire et social, o l'valuation de leur poids conomique ne changerait pas fondamentalement la donne, il n'en va pas de mme dans la culture, les loisirs, le sport, l'environnement, la dfense des droits, etc. o une multitude de petites associations vive n t seulement des cotisations, des dons, de quelques recettes d'activits et de l'investissement dsintress des bnvoles. n

(1) Viviane Tchernonog, Le Monde associatif en 2005, CNRS-Universit Paris I, Centre dconomie de la Sorbonne, 2006. (2) Philippe Kaminski, Les Associations en France et leur contribution au PIB, ADDES, 2006. (3) Lester Salamon, Les Institutions sans but lucratif dans les comptes nationaux, Center for Civil Society Studies, Johns Hopkins University, 2006. (4) Edith Archambault, Le Poids conomique des associations en Fra n c e, Centre dconomie de la Sorbonne, U n iversit Pa r i s I ADDES, 2005.

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Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

Le don de temps : une valeur inestimable ?valuer le poids conomique du bnvolat prsente une double difficult : valuer le nombre dheures de bnvolat et valuer sa valeur montaire. Au bout, un rsultat du simple plus du double. Limites de lexercice.Le principe dvaluation du bnvolat retenu par le plan comptable associatif consiste le valoriser hauteur de ce que lassociation devrait payer si elle devait faire assurer ces tches par des salaris ou des sous-traitants. Mme en connaissant bien le nombre dheures effectues par les bnvoles, il reste la question de leur quivalence avec des heures de salaris. Plusieurs arguments plaident pour ne pas sous valuer ces heures. Lessentiel du bnvolat est effectu par des bnvoles rguliers qui ont ou acquirent une comptence quivalente celle dun salari (la validation des acquis de lexprience peut mme h o m o l oguer cette comptence). Ajoutons que les dirigeants, dont 70 % sont au moins cadres intermdiaires, font une grande part du bnvolat associatif et assument des fonctions souvent proches de celles d'un chef d'entreprise, gnralement bien rmunr. Il n'est donc pas invraisemblable d'valuer le travail des bnvoles la mme hauteur que celui des salaris du monde associatif. On aboutit alors une valuation tout fait similaire celle de la Johns Hopkins University : environ 38 milliards d'euros, soit 2,2 % du PIB. Le poids conomique des associations et la part quy prend le bnvolat illustrent pleinement la ncessit de dfinir de nouveaux indicateurs de richesse, le seul PIB ne rendant que partiellement et partialement compte de la richesse de lactivit associative. n(1) Lionel Prouteau, La Mesure et la Valorisation du bnvolat, Addes, 2006.Bulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

bnvolat effectu en France, soit une ressource quivalente 2,7 % du PIB, cest--dire plus de 40 000 e par ETP !

Quelle valuation montaire ?

T

outes les tudes rcentes convergent peu prs sur le nombre dheures effectues par les bnvoles dans les associations. En 2002, quelque 12 millions de bnvo l e s effectuent 820 000 ETP. La culture et les loisirs arrivent en tte avec 28 % de ces ETP, suivi par le sport (20 %), le sanitaire, social et humanitaire (17 %) et la dfense des droits (15 %).

0,9 % ou 2,7 % du PIB ?La valeur montaire de leur travail serait de 14,8 milliards d'euros, soit 0,9 % du PIB (1). Il faut noter que cette valuation est faite a minima puisqu'un ETP de bnvole est estim 18 000 e, c'est--dire le cot d'un salaire peine suprieur au smic. Cette valuation postule une efficacit comparable du bnvolat et du salariat, et retient le salaire moyen offert par les associations du mme secteur. On stonne alors de deux choses. Le cot moyen d'un salari ETP d'une association est de 36 000 e dans ltude de Philippe Kaminski (voir article prcdent), soit le double. Il en va de mme du travail de la Johns Hopkins University (voir articles prcdents et suivants) qui value 937 000 ETP le

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Interview

Viviane Tchernonog : La baisse des financements de ltat

ne peut tre compense par les collectivits locales. Quelles sont les principales volutions de la structure budgtaire des associations ?L'enqute mene en 2005 nous permet de reprer les volutions sur une priode de 5 annes (2000-2005). Premier constat : les ressources des associations ont continu de crotre en volume sur cette priode, et si les financements publics tout compris (ventes de prestations et subventions) ont augment en volume durant la dernire priode, les ressources prives ont cependant augment deux fois plus vite. Pa rmi les ressources prives, ce sont les cotisations et, dans une moindre mesure, les ressources lies l'activit qui ont connu le plus fort taux d'accroissement pour plusieurs raisons, la plus importante tenant l'augmentation plus rapide du nombre de petites associations de membres, qui vivent pour l'essentiel de cotisations et qui s'appuient sur le travail bnvo l e . Mais ce sont la nature et l'origine des ressources publiques qui ont connu les modifications les plus importantes. Les associations doivent faire face une double restructuration de leurs ressources publ i q u e s . avec d'autres associations ayant dj tabli un partenariat avec les conseils gnraux et qui pourraient tre investies de nouvelles missions. C'est l un point important : les associations sont en situation de concurrence, par rapport aux financements publics, qui s'accrot chaque anne avec l'arr ive de nouvelles associations porteuses de nouveaux projets.

Vi v i a n e T c h e r n o n o g, c h a rg de e re c h e rche au CNRS, l a b o ra t o i re Matisse, Universit Paris 1, La Sorbonne, www.matisse. univ-paris1.fr

Existe-t-il des secteurs ou des types d'association ayant plus subi ces volutions ?Les associations du secteur social ou de la politique de la Ville par exemple ont sans doute t plus que d'autres exposes ces bouleversements, mais pour autant on ne peut conclure que ces domaines de l'action associative aient diminu en volume : certaines associations ont disparu du fa i t de ces volutions, d'autres ont connu de gr aves difficults, d'autres encore se sont cres ou se sont dveloppes la faveur de ces changements.

Quelles volutions constatez-vous du point de vue du bnvolat ?Globalement, l'augmentation du bnvolat a t considrable durant les 5 dernires annes ; il convient donc de parler avec prudence de crise du bnvolat. Le nombre d'heures moyen par association est rest le mme dans les petites associations sans salari tandis qu'il a lgrement baiss dans les associations employeurs, grandes ou moyennes. Cette augmentation est surtout le rsultat de l'arrive de nouvelles petites associations qui ne recourent pas l'emploi salari. Les problmes que connat aujourd'hui le secteur associatif en matire de bnvolat sont davantage dus des questions de formation, de comptences, de qualifications des bnvoles qu' un nombre insuffisant de personnes prtes s'engager. La bonne volont et l'engagement ne suffisent plus aujourd'hui parce les interventions des associations ncessitent de plus en plus de technicit : elles requirent des savo i r- faire, des mtiers, des qualifications - et cela vaut autant pour les travailleurs salaris que pour les travailleurs bnvoles. Ce qui semble poser problme, c'est l'adaptation structurelle de l'offre et de la demande de travail bnvole. La question de la formation des bnvoles est d'ailleurs au centre des proccupations des coordinations associatives et de la CPCA.

De quel ordre ?D'une part et sur le long terme, la nature des financements publics volue dans le sens d'une transformation lente mais trs rgulire des subventions publiques en un financement public de prestations ou d'actions. Or la dmarche est trs diffrente : dans le premier cas, on soutient l'action associative car on reconnat son utilit sociale, dans le second, on considre l'association comme un prestataire de services. D'autre part, le champ du partenariat public a t restructur paralllement la dcentralisation, mais la baisse du financement de ltat ne peut tre compense par lintervention des collectivits locales. Il faut toutefois analyser cette croissance au regard de la nature des interve ntions et des comptences spcifiques des diffrents acteurs publics. Les rgions par exemple financent surtout les associations d'ducation, de formation ou les associations culturelles ayant un rayonnement rgional. Les associations du secteur social, qui ont vu leur fi n a n c ement par l'tat interrompu ou fortement diminu, ne pourront se tourner vers les rgions pour trouver de nouveaux partenaires. Mais elles se trouveront alors en concurrence8Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

Quelles ralits rgionales ?Il n'existe encore aucune tude par rgion du poids conomique des associations. En revanche, les enqutes rgionales de lInsee sur l'emploi dans l'conomie sociale et solidaire, qui distingue les associations des mutuelles et des coopratives, permettent aujourdhui dextrapoler un certain nombre dinformations sur le poids conomique dans les associations.Si l'on compare le rang de chaque rgion en termes d'emploi associatif et de PIB par habitant, une remarque essentielle peut tre faite : le poids des associations serait inversement proportionnel la valeur du PIB par habitant. Plus une rgion est riche plus le poids des associations est faible, plus une rgion est pauvre plus le poids des associations est fort. Il est vrai que les pouvoirs publics utilisent souvent le biais des subventions et des emplois aids pour rpondre au problme du chmage. Cette mme pnurie d'emtemps plein (ETP), on ne peut retenir que le nombre de salaris au moment de la dclaration aux Urssaf (le 31/12) qui ne distingue pas le type de contrat et ne prend pas en compte les contrats temporaires en cours d'anne.

L'associatif au secours des rgions en difficult ?

omme il a t dit dans l'article prcdent, les salaires constituent l'essentiel de la valeur ajoute du secteur associatif, bnvolat mis part. La mesure de l'emploi dans les associations constitue donc une premire approximation, et probablement la meilleure, du poids conomique des associations en rgion.

C

Un poids conomique du simple au double ?Cette principale donne, au regard de l'valuation du poids conomique du secteur associatif, varie du simple au double de manire rgulire. Ainsi, le secteur associatif reprsente moins de 5 % de la population active en Champagne-Ardenne et plus de 8 % en Corse. En l'absence de donnes systmatiques sur les quiva l e n t s

Plus une rgion est riche plus le poids des associations est faible, plus une rgion est pauvre plus le poids des associations est fort.plois amne les personnes, d'une part crer leur propre emploi sous forme associative et d'autre part s'investir dans le bnvolat. 5 des 6 rgions o le poids des associations est infrieur la ..Bulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

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Comparaison du poids de lemploi associatif et de la dtention du pourcentage de PIB par rgion%/rgion1 Corse Lorraine Poitou Limousin Bourgogne Franche-Comt Auvergne Nord-Pas-de-Calais Alsace Centre Picardie Basse-Normandie le-de-France Aquitaine Haute-Normandie Rhne-Alpes PACA Midi-Pyrnes ChampagneArdenne Moyenne 8,5 % 7,9 % 6,8 % 6,8 % 6,7 % 6,7 % 6,5 % 6,4 % 6,2 % 6,0 % 6,0 % 5,8 % 5,7 % 5,7 % 5,5 % 5,3 % 5,0 % 5,0 % 4,9 % 5,8 % Rang PIB/hab2 20 13 19 21 11 7 18 16 3 9 17 12 1 6 2 4 8 14 5

cificits rgionales. Ainsi, par exemple, le poids conomique des associations en Corse semble s'expliquer en grande partie par une trs forte reprsentation du secteur culture, loisirs et sport qui constitue 22 % de l'emploi associatif alors qu'il dpasse rarement les 10 % dans les autres rgions. De mme, en rgion PACA les secteurs de la culture et des loisirs reprsentent 16 % des tablissements employeurs, l o, partout ailleurs, ils sont autour de 10 %. Autre exemple, l'tude alsacienne fait ressortir une import a n c e significative des associations de dfense d'intrts spcifiques qui reprsente prs de 10 % de l'emploi associatif, les autres rgions ne distinguant mme pas ce type d'associations.

Des diffrences importantes difficiles expliquerLes diffrences rgionales restent nanmoins souvent difficiles interprter, tant donn la grande incert itude des rsultats statistiques publis. Ainsi, les trois rgions dans lesquelles le poids du sanitaire et social est le plus fort (environ les 2/3 des emplois associatifs) sont l'Alsace, le Nord - Pas-de-Calais et Midi-Pyrnes ; or le Nord - Pa s - d e Calais et l'Alsace se situent au-dessus de la moyenne tandis que Midi-Pyrnes est du ct du fa i bl e

poids du monde associatif. De mme, les deux rgions dans lesquelles il est le plus fa i ble (moins de la moiti des emplois associatifs) sont la Corse et l'le-de-France dont on a dj vu l'opposition radicale en termes de poids du monde associatif comme du PIB par habitant. Ni une rpartition interne au monde associatif ni des va r i a bles externes (traditions culturelles, dmographie, conomie) nexpliquent ces similitudes ou ces diffrences. Il en va de mme en ce qui concerne le secteur de l'enseignement. Les trois rgions o il est le plus faible (Alsace, Corse et Midi-Pyrnes) se situent au hasard sur notre chelle de poids relatif du monde associatif ; tandis que les trois rgions o il est le plus fort (Nord - Pas-de-Calais, Basse-Normandie et Picardie) se situent au milieu. En l'tat actuel des donnes, il serait donc tout fait hasardeux d'aller audel de cette constatation d'ensemble : dans les rgions en difficult conomique les associations sont souvent utilises pour pallier les difficults et prennent ainsi une place plus importante dans la vie conomique que dans les rgions prospres. n Pour aller plus loin :Associations et territoires, La Vie associative n spcial, en partenariat avec la revue Territoires de lAdels, dc. 2006.

1. Pourcentage demplois associatifs dans la population active totale de la rgion. 2. Classement de la rgion en fonction du PIB par habitant.

.. moyenne sont les rgions les plus riches de France (les 1re, 2e, 4e, 5e, 8e). 5 des 8 rgions o le poids des associations est nettement suprieur la moyenne sont les rgions les plus pauvres (16e, 18e, 19e, 20e et 21e). Il convient toutefois de relativiser cette rgle. En effet, Midi-Pyrnes, 14e rgion pour la richesse, fait partie des rgions o le poids conomique des associations est parmi les plus faibles. l'oppos, la Franche-Comt, 7e rgion pour la richesse, fait partie des rgions o le poids des associations est relativement lev.

RepresDes publications disparatesLes remarques mthodologiques gnrales de l'article prcdent expliquent qu'aucune donne n'existe encore au niveau rgional sur le poids conomique des associations. La premire approche l'aide des publications des Insee rgionaux sur l'emploi dans l'conomie sociale donne accs au nombre d'emplois dans les associations, mais pas la masse salariale des associations et sa comparaison avec celle de l'ensemble de la rgion. Une approximation pourrait tre faite avec le nombre des ETP en tenant compte des carts de salaires entre le secteur associatif et le reste de l'conomie, mais mme ces chiffres ne sont pas systmatiquement fournis ni leur comparaison. La plupart des commentaires accompagnant les publications de synthse des rsultats relvent l'importance des incertitudes des donnes ds qu'on entre dans le dtail. Enfin, 3 Insee rgionaux (Bretagne, Languedoc-Roussillon, Pays de la Loire) ne donnent aucune information en libre accs.Toutefois, on peut trouver quelques lments de comparaison sur les sites Internet de ces rgions ou des chambres rgionales dconomie sociale (CRES) : http://www.cres-bretagne.org/page.php http://www.cres-pdl.org/ http://www.cr-languedocroussillon.fr/3165-economie-sociale-et-solidaire.htm

Des spcificits localesD'autres facteurs explicatifs entrent donc en jeu faisant apparatre des sp10Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

Interview

Philippe Kaminski : Il faut une volont commune des cher-

cheurs et du monde associatif pour avoir un suivi rgulier des volutions des diffrents secteurs associatifs. Quelle fiabilit peut-on accorder lvaluation de la contribution des associations au PIB et quelles amliorations peut-on envisager ? Mon travail sur le compte satellite des institutions sans but lucratif en France na pas subi beaucoup de critiques depuis 18 mois. Il y a pourtant des choses amliorer. La partie la plus solide des rsultats rside dans lvaluation des cots salariaux. Elle repose sur les DADS (dclarations annuelles des donnes sociales) qui sont exhaustives et comportent trs peu derreurs. La seule difficult rside dans ltablissement de la nomenclature et la catgorisation des associations. Le travail dans ce domaine est dsormais prenne et conforme au Manuel sur les institutions sans but lucratif dans le systme des comptes nationaux, recommand par les Nations unies. Ce qui est amliorer, cest le travail sur les bu dgets et le dtail des postes, aussi bien de charges que de produits. Mme si jai travaill avec les meilleurs spcialistes (essentiellement le laboratoire Matisse du CNRS), lvaluation partir dchantillons est encore perfectible. Notamment, les comptes fournis ladministration fiscale par les associations (ou les secteurs dassociations) imposables taient encore en 2002 de qualit trs incertaine, en particulier pour les associations faisant appel la gnrosit publique et pour celles de solidarit internationale. Si les comptes fournis par les socits commerciales sont normaliss et homognes, il nen va pas de mme des associations, tout particulirement quand elles sont sectorises. Il est alors trs difficile de rtablir la ralit de leur budget. Les rsultats sont alors plus vraisemblables , ce qui explique laccord des spcialistes sur ce travail, que vrais , comme cest le cas lorsquils reposent sur des donnes sres. Un travail quivalent au vtre est-il envisageable au niveau rgional et quelles conditions ? On retrouve au niveau rgional les mmes difficults mthodologiques que celles voques au niveau national. Elles ne sont pas insurmontables et nempchent pas de faire au niveau rgional, au minimum, le travail qui a t fait au niveau national. Mais il faut dabord relever quau niveau rgional, cest avant tout la question de lemploi qui proccupe et cest pourquoi les travaux ont port sur ce domaine. Mais le vritable problme est celui de la prennit des comptences et des volonts dans les Insee rgionaux pour assurer un suivi dans la dure de ce type de travail. Si lon y consacrait un effort comparable celui qui est fait pour lartisanat, le commerce ou lagriculture, on aurait une connaissance assez approfondie du secteur. Lconomie sociale et solidaire est souvent dans le tout dernier tiroir. Et cest cause dune trs grande faiblesse du lobbying en la matire. Il faut que le monde associatif prenne conscience quil doit peser pour obtenir une meilleure connaissance de son rle conomique. Il faut une volont commune des chercheurs et du monde associatif pour avoir un suivi rgulier des volutions des diffrents secteurs associatifs. Dans la mesure o le plan comptable associatif permet une valuation des contributions volontaires et o la tendance est aux nouveaux indicateurs de richesse , que pensez-vous de lvaluation du bnvolat ? Tout dabord, il faut raffirmer quavant dessayer dvaluer le bnvolat, il serait bon de prciser ce qui pourrait tre plus clairement tabli dans les comptes associatifs ; ne serait-ce que pouvoir distinguer les diffrents types de cotisation, les dons, les subventions, etc. Du point de vue mthodologique, la grande difficult est que lvaluation du bnvolat est purement fictive puisquil nest pas montaris. On peut alors sinterroger sur la validit dune succession doprations trs alatoires : recueil de dclarations de temps de bnvolat, extrapolation lensemble du monde associatif, passage par le calcul dquivalents temps plein, valuation comme si le travail tait effectu par un salari. On finit par ne plus trs bien savoir de quoi lon parle et on aboutit des carts dvaluation considrables. Des travaux doivent absolument rduire ces carts et rconcilier les positions. En attendant davoir approfondi la question, je penche du ct des valuations minimales. Il faut voir de prs ce que le temps de bnvolat reprsente de rel travail. Quant aux nouveaux indicateurs de richesse, ce sont des questions qui se sont beaucoup poses chez tous ceux qui soccupaient de comptabilit publique des annes 1950 aux annes 1970. Lintrt a disparu ensuite. Il est bon que cela revienne, mais cela na rien de neuf.Bulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

Philippe Kaminski, statisticien, auteur de Les Associations en France et leur contribution au PIB, Addes, 2006

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Une exception franaise ?Un programme de collecte et d'tude des donnes concernant les organismes but non lucratif, a t men linitiative de la Johns Hopkins University (JHU), Les premiers rsultats font apparatre que l'exception franaise n'existe pas en ce qui concerne le monde associatif et revient sur certaines ides reues.Entre les Pays-Bas, dont les ressources des organisations sans but lucratif reprsentent 19 % du PIB, et le Mexique pour lequel elles reprsentent 0,7 % du PIB, une grande diversit de situations apparat. En limitant notre comparaison aux 21 pays membres de lOCDE sur les 36 tudis par la JHU, on constate un grand clivage entre les pays dvelopps et les pays en dveloppement ou en transition : les ressources des organisations sans but lucratif reprsentent en moyenne 8,4 % du PIB des premiers alors quelles ne reprsentent en moyenne que 2,2 % du PIB pour les seconds. Mais lintrieur mme des pays dvelopps, les situations sont varies entre les Pays-Bas, dj cits, et lAutriche (3,4 %), ou la Belgique (11 %), ou tures de reprsentation de la socit civile rside dans l'apport considrable des bnvoles. On estime que 132 millions de bnvoles uvrent au sein des organisations but non lucratif, soit prs de 1 adulte (15 ans et plus) sur 10. Leur contribution en termes d'ETP est proche de la moiti (44 %).

Une grande diversit suivant les pays

es budgets (recettes cumules) des organismes but non lucratif des 36 pay s tudis (1) reprsentent 5,4 % du total de leurs PIB. Si la globalit de ces organismes tait considr comme un pays, il serait la 7e puissance conomique mondiale, juste derrire la France et le RoyaumeUni et devant l'Italie ou le Brsil.

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Salaris et bnvoles45,5 millions d'emplois quivalents temps plein (ETP) sont occups par des salaris et des bnvoles au sein de ces institutions sans but lucratif (ISBL) qui emploient en moyenne 4,4 % de la population active. Pour comparaison, les entreprises du BTP emploient 44,3 millions de personnes en postes ETP. La particularit de ces struc12Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

Ressources des organisations sans but lucratif sans valorisation du bnvolat Recettes dactivit 53 % Financement public 34 %

Dons privs 12 %

encore lItalie (4 %). La France et ses 6,4 % occupe alors simplement une place un peu en dessous de la moyenne des pays dvelopps. Autre ide reue battue en brche : la socit civile franaise (et les associations en premier lieu) n'est pas plus particulirement finance par les pouvoirs publics que dans les autres pays. La France ne consacre que 2,2 % de son PIB au fi n a n c ement public de ces organismes, derrire les Pays-Bas (9 %), la Belgique (7,3 %), l'Irlande (6,1 %), le Royaume-Uni (3,3 %), l'Allemagne (2,5 %) et les tats-Unis (2,4 %). Malgr la diversit des situations et des chiffres d'un pays l'autre, il apparat que dans la majorit des cas, plus il y a de salaris au sein d'une organisation et plus il y a de bnvoles : le bnvolat n'est pas seulement un acte individuel, il est avant tout un acte social. Les bnvoles demandent tre mobiliss, orients et encadrs. Ce travail de recrutement et de mobilisation est effectu par les salaris permanents de l'organisation. Ce constat vient contredire l'ide reue selon laquelle les bnvoles pourraient se substituer des travailleurs salaris.

RepresLe Johns Hopkins Comparative Non profit Sector ProjectLe Johns Hopkins Comparative Nonprofit Sector Project vise amliorer la connaissance des organisations de la socit civile par la mise en uvre du Manuel sur les institutions sans but lucratif dans le systme des comptes nationaux (1) dit et recommand par les Nations unies. Ce manuel, dvelopp par le Center for Civil Society Studies de l'Universit Johns Hopkins (2), en collaboration avec la Division des statistiques des Nations unies et une quipe internationale d'experts statisticiens, dfinit un cadre conceptuel et incite les instituts nationaux de statistiques tablir un compte satellite des institutions sans but lucratif et lintgrer dans leurs programmes permanents de collecte et de synthse des donnes conomiques. 36 pays s'inscrivent aujourd'hui dans ce programme et sont mme, par le biais de leurs comptes satellites nationaux, de fournir des donnes fiables sur : - Le nombre d'organisations dans chaque catgorie ; - Le nombre de leurs salaris et bnvoles ; - La valeur ajoute de ces organisations ; - L'valuation des apports lis au bnvolat ; - Les charges et dpenses par grands chapitres ; - Les ressources, incluant les dons et subventions ; - L'activit redistributive des fondations ; - L'aide internationale au dveloppement. Donnes mthodologiques : - Les chiffres exploits proviennent des statistiques du BIT (http://laborsta.ilo.org/) - La valorisation montaire du travail bnvole est calcule aprs valorisation horaire en postes ETP, et ce en fonction des donnes conomiques de chaque pays. - Les recettes d'activit correspondent aux recettes commerciales lies la vente de biens et aux prestations de services, aux cotisations des membres et aux revenus financiers. - Le financement public comprend toutes les contributions (conventions, subventions) de l'tat, des collectivits locales et des tablissements publics. - Les dons privs correspondent la gnrosit du public, donations des entreprises et des fondations. (1) http://unstats.un.org/unsd/nationalaccount/sna/sna14-fr.asp (2) http://www.jhu.edu/~cnp/

Une troisime voie entre tat et secteur priv lucratifSans prendre en compte la valorisation montaire du travail du bnvole, l'tude des modles conomiques des organisations de la socit civile dans 34 pays montre qu'en moyenne : - Plus de 53 % des ressources de ces organismes proviennent des recettes d'activits propres (recettes commercia-

les lies la vente de biens et de prestations de services, cotisations des membres et revenus financiers). - 34 % des ressources proviennent du f inancement public et majoritairement de l'tat. Ressources des organisations sans but lucratif - Seules 12 % des ressouravec valorisation du bnvolat ces proviennent des dons p r iv s : gnrosit du Financement Recettes public, mcnat et donapublic dactivit tions des entreprises, 26 % 42 % apports des fondations. Si l'on prend en compte la valorisation montaire du travail bnvole en l'incluant dans la catgorie dons priDons privs vs , on obtient alors la 31 % rpartition suivante :

- La prise en compte de la va l o r i s ation du travail bnvole fait passer la part des dons privs de 12 % 31 %, ce qui dmontre que les ressources b n voles sont prs de 2 fois plus importantes que les contributions montaires apportes par la gnrosit du public, les entreprises et les fondations. - Les dons privs apparaissent alors comme la deuxime ressource, derrire les recettes d'activits, pour les o rganisations de la socit civile. - Le f inancement public ne correspond plus qu'au quart des ressources totales. n(1) JHU, Global Civil Society, 2004.Bulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

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Avec le dveloppement de leurs activit conomiques, les associations sont dans une

Lassociation Il est important de l association de la socit commerciale, communment appele entreprise , alors que les associations sont aussi des entreprises prives.

situation paradoxale. Elles sont renvoyes, au Code du commerce alors quelles relvent dune autre logique statutaire. Le contrat dassociation qui lie les fondateurs vise la mutualistation de moyens, dactions et dobjectifs, dans un autre but que le p a rtage des bnfices : la non-lucrativit est la pierre angulaire du projet associatif. Mais non lucratif ne signifie pas quelles ne peuvent pas exercer dactivits commerciales. Les associations ont pu tre attaques par les entreprises capitalistes et leur reprsentant (le Medef) qui les accusent de concurrence dloyale quand elles reoivent des financements de ltat ce qui fausserait le libre jeu de la concurrence. Si lon ajoute quelles peroivent des subventions pour le service public quelles remplissent, le risque de confusion est encore accru. Entre secteur public et entreprises de capitaux, les associations sont en qute dune reconnaissance la hauteur de leur poids conomique et social.

pour toute disposition conomique gnrale, diffrencier clairement

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es associations sont des acteurs conomiques part entire, de plus en plus amenes faire de la prestation de service ou de la vente pour mener bien leurs projets associatifs.

Lassociation : acteur marchand non lucratifPour mener bien son objet, l'association a besoin de ressources. Outre les cotisations des membres, les ventuels dons privs ou les subve n t i o n s publiques, l'association peut tre amene dvelopper une activit conomique pour trouver des ressources complmentaires. Son objet peut aussi requrir la mise en place d'une activit conomique pour dve l o p p e r, par exemple, la pratique du tennis, donner des cours de musique, permettre des enfants dfavoriss de partir en vacances, etc. La dfinition de l'activit conomique est relativement claire : il s'agit d'une a c t ivit de production, de transformation ou de distribution de biens meubles ou immeubles, ou encore de toute prestation de services en matire industrielle, commerciale, artisanale et agricole. ce titre, bon nombre d'activits associatives, ds lors qu'elles

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n, un statut pour entreprendre?sont tarifes, entrent dans ce cadre. Un sjour de tourisme social, une pice de thtre amateur, une sortie nature, une sance de sport, des plateaux-repas livrs chez des personnes ges, etc. On pourrait multiplier l'envi les exemples d'activit associative qui donnent lieu au paiement d'une prestation ou d'un service. Mais cette activit conomique n'implique pas forcment lucrativit : une a c t ivit dsintresse peut parfaitement revtir un caractre conomique parce qu'elle concourt la production et la circulation des produits, sans pour autant qu'il ny ait ni recherche, ni distribution de bnfices. En effet comme le confirme le Conseil constitutionnel dans un arrt du 25 juillet 1984 le principe constitutionnellement garanti de libert d'association n'interdit pas aux associations de se procurer les ressources ncessaires la ralisation de leur but, qui ne peut tre le partage de bnfices entre leurs membres, par l'exercice d'activ its lucratives . tes qui, pour les besoins de leur objet social, ralisent des activits de nature commerciale. En clair, si les associations ne peuvent s'immatriculer au registre du commerce et des socits, comme le souligne la jurisprudence de la Cour de cassation, elles n'en ont pas moins la capacit de faire des actes de commerce et de dvelopper une activit conomique. Ce qui implique un certain nombre de consquences. priv qui ne bnficie pas des ava ntages du statut commercial, notamment sur les baux commerciaux, tout en effectuant des actes de commerce qui la soumettent un certain nombre d ' o bl i gations. Sans entrer dans le dtail juridique de chacune d'entre elles, il convient de souligner certains points. L'activit conomique de l'association oblige une certaine transparence financire et comptable, elle engage la responsabilit des dirigeants de l'association, soumet les actes de publicit sur ..

L'association entre droit civil et droit commercialL'article L. 442-7 du Code du commerce prcise : Aucune association ou cooprative d'entreprise ou d'administration ne peut, de faon habituelle, offrir des produits la vente, les ve ndre ou fournir des services, si ces a c t ivits ne sont pas prvues par ses statuts. Les statuts de l'association d o ivent donc tre le plus prcis possible, notamment sur l'objet, les moyens mis en uvre pour le raliser et les ressources de l'association. Ils d o ivent alors clairement stipuler que l'association va engager une activit conomique pour raliser son objet. Deux cas se posent ensuite selon que l ' a c t ivit commerciale est accessoire ou mene titre habituel. Les associations qui organisent quelques oprations commerciales pour complter leur financement, du type repas de fin d'anne, vente exceptionnelle de T-shirts, soire festive, etc., sont considres comme soumettant ces actes de commerce isols un objet social prdominant. ce titre, ces actes commerciaux raliss occasionnellement par les associations relvent du droit civil. Mais lorsque l'association met en place une activit commerciale rgulire (magasin associatif de commerce quitable, cole de musique, maison de retraite, etc.) en lien direct avec son objet, elle relve alors du droit commercial. Cet entre-deux juridique fait de l'association une structure civile de droit

RepresLes exonrations fiscales dont bnficient les activits conomiques associativesIl existe diffrents cas de figure qui prvoient des exonrations fiscales pour certaines activits conomiques des associations : - Lorsque l'association ralise moins de 60 000 euros de recettes commerciales dans l'anne, que la gestion est dsintresse et que les activits non lucratives restent significativement prpondrantes selon l'estimation des services fiscaux ; - Si les services rendus aux membres ont un caractre ducatif, sportif, culturel ou social ; - Si les recettes ont t ralises lors des six manifestations annuelles exceptionnelles de soutien ou de bienfaisance ; - Si l'association intervient dans certains domaines (handicap, associations intermdiaires). - Si le chiffre d'affaires li des prestations de service est infrieur 27 000 euros TTC et si le chiffre d'affaires li des ventes de biens (marchandises ou produits) est infrieur 76 300 euros TTC, l'association est exonre de TVA et d'IFA.

Lassociation sans but lucratif signifie que les profits, quand ils sont raliss, demeurent dans la structure. Cela ne signifie pas la recherche dune absence de rsultat.Les associations exerant une, voire plusieurs activits commerciales, cherchent donc diversifier leurs ressources et se retrouvent faire du commerce. Ces associations sont en ralit des structures non commeran-

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.. la rglementation en la matire, et surtout, oblige l'association se conformer aux rgles de la concurrence et peut la faire entrer dans le champ des impts commerciaux.

Un rgime fiscal qui tient compte de la ralit des pratiquesLe rgime fiscal des associations reste particulier. Rappel dans l'instruction fiscale de dcembre 2006 (1) qui reprend les critres d'imposition des activits commerciales associatives dfinis en 1998, 1999 et 2002, le principe de non-assujettissement des associations but non lucratif reste la rgle. Il n'est pas remis en cause tant que la gestion de l'association est bien dsintresse (critre premier s'apprciant notamment par une administration titre bnvole, l'absence de distribution de bnfices, la non attribution de parts d'actifs), qu'elle ne concurrence pas une entreprise lucrative et que la gestion des activits commerciales n'est pas similaire celle d'une entreprise. L'utilit sociale de l'association est alors apprcie selon le faisceau d'indices de la rgle des 4 P (produit, public, prix, publicit). Si l'association ne remplit pas l'un de ces diff rents critres, elle est alors soumise aux trois impts commerciaux : l'impt sur les socits, la taxe professionnelle et la T VA. Reste qu'un certain nombre d'exonrations fiscales existent pour les activits conomiques des associations, et varient en fonction de la part que prennent ces activits dans l'activit globale de l'association ou selon le secteur d'intervention (voir encadr). Mais les marges de manuvre sont troites. Ces ajustements spcifiques aux associations n'ont pas empch qu'un grand nombre d'activits associatives se trouvent assujetties l'impt. Alors mme que les pouvoirs publics encouragent les associations dvelopper de la prestation de service pour trouver de nouvelles ressources et ne pas dpendre simplement du financement public, les responsables associatifs ont parfois l'impression de tomber sous le couperet fiscal du sim16Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

ple fait que leurs activits conomiques sont sur le mme champ que des socits commerciales. S'engage alors, pour beaucoup d'associations, une lutte avec les services fiscaux pour faire reconnatre leur utilit sociale ou la part prpondrante de leurs activits non lucratives, notamment en valorisant le travail de leurs bnvo l e s . L'enjeu est d'autant plus crucial que le secteur lucratif est prompt dnoncer une concurrence dloyale de la part du monde associatif.

Qui concurrence qui ?Dans un rapport (2) devenu clbre, le Medef conteste la lgitimit des associations bnficier de rgimes drogatoires et propose d'intgrer le secteur associatif vocation sociale et l'conomie sociale et solidaire dans le march concurrentiel afin de mettre fin de prtendues distorsions de concurrence qui nuiraient l'entreprise lucrative. Il s'agit l de dnoncer des pratiques para-commerciales, qui permettraient l'association de se livrer

Peu de cas relvent rellement dune concurrence dloyale.une activit commerciale sans en supporter les charges correspondantes. Une circulaire du 12 aot 1987 a dfini les pratiques para-commerciales. Cela concerne l'association lorsque : - Celle-ci s'adresse de manire habituelle des tiers, et non uniquement aux membres de l'association ; - Elle s'exerce en vue de raliser un profit ou de rentabiliser la prestation offerte ses membres ; - Elle concurrence directement une activit commerciale similaire en ralisant un chiffre d'affaires substantiel avec les tiers. Le caractre dloyal de la concurrence serait alors avr si l'association n'tait pas soumise l'ensembl e des obl i gations des entreprises du secteur marchand, que ce soit en

matire fiscale, sociale ou rglementaire, et bnficiait pour son dveloppement de facilits que les autres ne pourraient obtenir, et d'une ampleur telle qu'elles lui permettent de fausser le libre jeu de la concurrence, sauf ce qu'elles soient justifies par des considrations d'intrt gnral (avis du Conseil de la concurrence du 10 fvrier 1998). Ce qui n'est pas le cas. Si les services des directions de la concurrence, de la consommation et de la rpression des fraudes sont rgulirement alerts par des entreprises commerciales, notamment dans les secteurs des espaces verts, du btiment, du tourisme ou du sport loisirs, peu de cas relvent rellement d'une concurrence dloyale. Les exonrations fiscales ou les subventions qui sont souvent reproches aux associations pour justifier d'une concurrence dloyale ne viennent que reconnatre la spcificit associative qui s'inscrit dans le respect des rgles. Le monde associatif ne revendique nullement une place en dehors de la sphre conomique et sociale. Le Conseil national de la vie associative (CNVA) notait cet effet, en session plnire le 27 mars 2002, que le temps n'est plus au confinement des associations au-del des frontires du march ou l'obl i gation pour elles de se soumettre aux impts commerciaux et aux rgles de la concurrence, ds lors qu'un oprateur marchand s'intresse ou s'inve s t i t dans une activit jusque-l dve l o ppe par elles . Mais il s'agit plutt de souligner la singularit de l'conomie des associations : le profit n'est pas une fin en soi, la plus-value conomique est au service d'une plus-value sociale, la fonction employeur intgre la participation des salaris et les associations offrent une rponse adapte des besoins auxquels ne peut rpondre l'entreprise seule. n

(1) Instruction fiscale 4 H-5-06, Bulletin des impts n 208 du 18 dcembre 2006. (2) C o n c u rrence : march unique, acteurs pluriels. Pour de nouvelles rgles du jeu , juillet 2002.

Interview

Edith Arnoult-Brill : Entrer en conomie ne veut pas forc-

ment dire marchandiser. Lconomie associative se rduit-elle la seule conomie marchande ? Le dveloppement de lactivit conomique des associations induit quelles se voient appliquer les rgles de droit commun destines au secteur marchand : droit commercial et impts rservs aux entreprises. Or lassimilation de lactivit conomique associative une activit marchande o r d inaire a des consquences extrmement nfa s t e s . L exemple des services la personne est clairant. Ce sont en effet les associations qui ont repr les besoins et qui y ont rpondu par le dveloppement de leur projet associatif en direction des personnes les plus fragiles, et ont structur, au long de dizaines dannes, lactivit des services la personne dans un contexte relativement prcaire. partir du moment o ce secteur a t peru par les pouvoirs publics comme porteur demplois et quune cert a i n e solvabilisation de la demande tait envisageable, le secteur marchand sy est intress comme un gisement potentiel de profits. Mme si lintervention des entreprises du secteur marchand peut ventuellement se faire dans des conditions financires plus conomiques , elle a pour effet de dgrader certains aspects du service en termes de lien social et dintervention auprs des plus dmunis. Les entreprises ont, en effet, tendance occuper les secteurs les plus rentables de ce nouveau march en laissant en dshrence les pans les plus dlicats dintervention. Dune pratique associative, attentive recrer du lien en produisant un service relationnel, sinscrire dans une fonction danimation et de rparation sociale, on passe une pratique marchande qui renvoie les moins solvables dans lexclusion. Entrer en conomie ne veut pas forcment dire marchandiser et les pratiques conomiques des associations ne sont pas rductibles celles des entreprises du secteur marchand. Les collectivits locales ont de plus en plus tendance traiter indiffremment avec des associations ou des entreprises lucratives Le CNVA a t trs actif pour faire des propositions concernant la rglementation de la commande publique (marchs publics et dlgation de service public). Malheureusement ses propositions nont pas t reprises par les nouveaux textes. De mme, si les mesures concernant la transparence ont t soutenues (et parfois proposes) par les associations, on peut regretter une incomprhension concernant lusage qui est fait de la rglementation relative la dlgation de service public. En effet, nombre de ces dlgations ne relvent pas dune activit que devrait assurer une collectivit publique qui la confie une association, mais dune activit repre, construite et structure par des associations, souvent contenue dans leur objet social, qui recevaient jusqualors une subvention. Ainsi, la stricte application de la loi Sapin (1) pour garantir une conformit juridique la relation entre lassociation et la collectivit conduit des situations paradoxales : lactivit dintrt gnral associative se transforme en un service public dont la dlgation passe par une procdure dappel doffre mettant en concurrence des organismes de diffrente nature juridique du secteur associatif non marchand et du secteur marchand concurrentiel. Ceci a pour effet de marchandiser une dmarche qui va bien au-del de la simple activit conomique . Quid de la plus-value sociale, socitale, ducative... ? Quelles propositions pour l'avenir ? Il est indispensable que nous continuions produire une ex p e rtise collective de lensemble des secteurs associatifs pour pouvoir intelligemment retenir le rouleau compresseur de la logique administrative et marchande, et viter ainsi la banalisation de l'activit des associations celle de lconomie administre et/ou de lconomie de march. Le CNVA a propos llaboration dun code des associations qui na pas t retenu par le gouve rn ement. Cest trs regrettable parce que cette initiative permettrait lensemble des acteurs de la vie associative de disposer dun outil de dialogue efficace et pdagogique. Le rassemblement de tous les textes lgislatifs et rglementaires touchant les associations aurait permis de mieux apprcier la complexit laquelle sont confronts leurs responsables, particulirement lorsquils sont en charge dune activit caractre conomique. Le Conseil prconise galement quun travail i m p o rtant soit men sur lapport rel de lactivit associative la richesse nationale. Cela passe par une rflexion sur les outils pertinents pour son valuation. Dautant que le mode de production conomique dune association est porteur de plus-values lies notamment lutilit sociale, constitutives dune autre forme denrichissement de notre socit solidarit, mancipation, socialisation, reconstitution du lien socialBulletin de la CPCA N 9 janvier 2007

Edith Arnoult-Brill, prsidente du Conseil national de la vie associative (CNVA)

(1) Loi n 93-122 du 29 janvier 1993, relative la prvention de la c o rruption et la transparence de la vie conomique et des procdures publiques. Pour aller plus loin CNVA, Bilan de la vie associative 2003 - 2 0 0 6, paratre.

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Vers une clarification des relations avec les pouvoirs publics ?Les financements publics constituent une part importante des ressources des associations. Ncessaires pour assurer la vocation d'intrt collectif de l'action associative, ces financements, aux procdures htrognes, s'avrent complexes : subventions, conventions pluriannuelles d'objectifs (CPO), dlgations de service public, marchs publics ou encore prestations de service. Les relations contractuelles avec l'tat ou les collectivits territoriales gagneraient tre clarifies.par les associations et par les pouvo i r s publics de travailler dans une logique de partenariat et de dvelopper entre eux une vritable culture du contrat .

Conventions pluriannuelles d'objectifs : peu d'lusLa convention pluriannuelle d'objectif est le mode de financement qui semble rpondre le mieux la fois la demande de financements prennes de la part des associations et au souci de l'tat ou des collectivits du bon emploi de ces subventions. Alors que les CPO sont appeles de leurs vux par l'ensemble du monde associatif, la CPCA a demand une enqute ralise par le ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative (MJSVA) qui rapporte, dans les limites dun exercice indit, sans comparaison historique ni mise en perspective de lensemble des financements associatifs de chaque ministre, le chiffre de 724 CPO en cours en 2006 au nive a u national pour un montant d'environ 208 millions d'euros. Les ministres de la Jeunesse, des Sports et de la Vie a s s o c i a t ive, de la Cohsion sociale, de l'ducation nationale et de la Culture cumulent eux quatre 591 CPO pour 176 millions d'euros. ct des CPO concentrs au niveau national, subsistent des conve n t i o n s annuelles. En effet, une convention est obl i gatoire pour les financements suprieurs 23 000 euros. Un modle de convention, annex la circulaire de dcembre 2000 (1) relative aux conve n-

a lo i organique des lois de finances (L O L F), mise en uvre en janvier 2006, et les indicateurs de performance qu'elle suppose encadre d'une certaine manire la ncessit de cette clarification des relations contractuelles, par son objectif d ' valuation des dpenses publ i q u e s Cette clarification serait une concrtisation de la volont exprime la fois

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tions pluriannuelles, fixe sans ambigut les obligations de l'association et du financeur. Le financement est assur pour l'association, qui doit remettre chaque anne un compte rendu financier de l'action subventionne. Un guide destination des associations et des services de ltat existe pour une valuation commune. La subvention est une demande adresse par une association un partenaire public alors que la prestation de services est une demande de ce partenaire laquelle lassociation rpond. Dans les faits, la confusion entre les deux existe. Les termes de la convention doivent donc prciser que l'action de l'association n'est pas une contrepartie au financement.

Le Conseil national de la vie associative a point des drives dans lapplication de la loi, conscutives une absence de clarification de la notion de subvention. l'occasion de la Confrence nationale de la vie associative, la CPCA a mis des propositions, au regard des travaux du groupe prparatoire, pour une consolidation de ce type de contrat (2) : allongement des conventions pluriannuelles d'objectif de trois quatre ans ; ncessit de verser avant le 31 mars les avances de subventions - aux associations qui en font la demande - hauteur de 50 % des montants prvus par la convention pluriannuelle tel que prvu par la circulaire de dcembre 2000...

demande. Il n'est obligatoire que pour l'tat et ses services dconcentrs, mais le lgislateur avait dans l'ide de l'tendre aux collectivits territoriales. Si les textes existent, leur application ne va pas de soi. Ainsi le Conseil national de la vie associative (CNVA) a point des drives dans l'application de la loi, conscutives une absence de clarification de la notion de subvention, qui conduit une interprtation alatoire des textes. Le CNVA a suivi les conclusions du groupe de travail de la Confrence de la vie associative sur la question et recommande cette dfinition clarifie, distincte de celle de la commande publique et de la dlgation de service public. Il s'agit galement, pour les associations comme pour le CNVA, dans le souci de parfaire l'application des textes, d'amliorer celle du dossier unique de demande de subvention, de thmatiser ce dossier selon les ministres concerns, ainsi que de limiter les demandes de pices administratives supplmentaires. Une telle dfinition permettrait galement de clarifier les obligations rciproques. Par ailleurs, le dossier commun de demande de subvention pourrait tre valable dans les relations avec les collectivits territoriales, dans les limites d'une application permise par les lois de dcentralisation. Il est dailleurs de mise quant il y a cofinancement.

Extension du domaine de la dlgation de service public ?La dlgation de service public, qui confie aux associations des missions d'intrt gnral constitue ga l e m e n t une forme solide de partenariat, le plus souvent avec les communes.

Avec la dcentralisation, de plus en plus de collectivits locales ont recours ces dlgations encadres par un contrat qui fixe les conditions d ' exploitation du service et la rmunration de l'association, en fonction des rsultats de l'exploitation. Elles concernent par exemple les quipements sportifs, la gestion des dchets ou les services administratifs comme les offices de tourisme. La dlga t i o n de service public est une reconnaissance vidente du rle de l'association. Si la bonne excution d'un service public (continuit du service, adaptation aux besoins du public et galit de traitement des usagers), est troitement contrle par la prfecture et le mandataire grce un rapport annuel que doit prsenter l'association, la commune ne peut en revanche s'immiscer dans le fonctionnement interne de l'association. Plus durables qu'un march publ i c , les dlgations de service public prsentent nanmoins l'inconvnient d'une procdure complexe et ne sont pas sans poser question sur la relation entre association et pouvoirs publics (c f. interview ddith Arnoult-Brill). Conformment la loi Sapin de janvier 1993, les associations sont soumises une mise en concurrence si le financement excde 106 000 euros sur toute la dure du contrat. En de, un appel public candidature est lanc, qui doit tre publi dans la presse locale.

Marchs publics : clarifier l'article 30Les marchs publics auraient pu tre un moyen pour les bailleurs publics de reconnatre l'utilit sociale ..

RepresLa clarification des relations contractuelles : bientt un guide l'issue de la Confrence nationale de la vie associative de janvier 2006, le Premier ministre Dominique de Villepin annonait 25 mesures sur la base des propositions des groupes de travail. Parmi ces mesures, l'dition et la diffusion d'un guide sur les relations contractuelles sont en passe d'tre concrtises. Ce guide devrait permetttre de clarifier les diffrentes relations contractuelles et garantir une scurit juridique aux partenaires. Pour passer des paroles aux actes, des rencontres entre associations et fonctionnaires devraient avoir lieu.

Subventions : clarifier la notion, simplifier le dossier uniqueC'est la circulaire de dcembre 2002 (3) qui met en place le dossier unique de demande de subve n t i o n pour tenter d'uniformiser ce type de

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.. des associations. Tous les dbats autour de la rforme des marchs p u blics ont d'ailleurs achopp sur cette question : mise en place du mieux-disant social ou respect de la concurrence pure et libre ? Les associations uvrant dans le secteur de l'insertion notamment, doivent pouvoir accder ces marchs et faire reconnatre cette spcificit. Mais la rforme du Code des marchs publics daot 2006, si lon pouvait attendre d'elle une reconnaissance explicite, ne lve pas le flou sur les secteurs

cadre de travaux publics par exemple. Reste savoir si la seule existence de cette spcificit suffira en gnraliser l'utilisation. De part et d'autre, pour les services juridiques des collectivits publiques comme pour les associations, un effort de promotion de cette spcificit associative est ncessaire.

Rpublique un dlgu charg des rapports associations-institutions, ou encore d'organiser des rencontres rgulires entre les associations et les ministres. Car d'une manire gnrale, il s'agit pour les associations et les administrations, de mieux se connatre.

Clarifier pour consoliderSur les 32 mesures proposes pour une consolidation des relations contractuelles lors de la Confrence nationale de la vie associative, 8 mesures ont t retenues et font aujourdhui lobjet dun travail gouvernemental. Il s'agit d'abord de reconnatre le projet associatif comme lment central du partenariat entre les pouvoirs publics et les associations. Il convient notamment d'inciter les associations faire valoir leur projet et, pour les financeurs publics, de demeurer ouverts des actions innovantes. Le dialogue entre les pouvoirs publics et les associations doit se dvelopper, grce notamment la mise en place d'interlocuteurs rfrents au sein des administrations. ce propos, le CNVA recommande un rappel du rle des dlgus dpartementaux la vie associative (DDVA) en matire de coordination. La CPCA propose galement de rendre obligatoire la motivation des dcisions de refus de l'octroi d'une subvention, dadjoindre au Mdiateur de la

Au-del de laction, des contrats de moyens pour la reprsentativit ?La campagne de la CPCA Que serait la vie sans les associations ? , si elle entend encore, pour sa deuxime dition, faire connatre l'action des associations au public, devra galement p e rmettre une meilleure reconnaissance par les institutions du secteur associatif, qui participera une consolidation de son financement ; ainsi il est, par exemple, concevable que cette reprsentativit acquise, un financement automatique soit accord au secteur associatif organis, en tant qu'acteur social majeur et au mme titre par exemple, que les syndicats. n(1) Circulaire du 1er dcembre 2000 relative aux conventions pluriannuelles dobjectifs entre ltat et les associations, JO du 2 dcembre 2000. (2) Cf. le rapport Collinet sur : cpca.asso.fr/actu/confNVA/confNVA.html (3) Circulaire du 24 dcembre 2002 relative aux subventions de l'tat aux associations, JO du 27 dcembre 2002.

Faute de dispositions prcises, il leur est difficile de pouvoir sinscrire dans un evironnement conomique concurrentiel et de faire valoir ce qui constitue pourtant une plus-value pour lintrt gnral.d'activit dans lesquels ces associations se reconnaissent (services sociaux, sanitaires, juridiques, rcratifs). Si l'article 30 du Code des marchs publics prvoit une procdure adapte pouvant permettre aux adjudicateurs, d'inclure par exemple une clause sociale dans leur march public, les secteurs concerns par ces dispositions ne sont pas ex p l i c i t e m e n t lists. Les associations voient dans ce flou les consquences d'un manque de concertation avec elles dans l'laboration de la loi. Faute de dispositions prcises, il leur est difficile de pouvoir s'inscrire dans un environnement conomique concurrentiel et de faire valoir ce qui constitue pourtant une plus-value pour l'intrt gnral. Des collectivits qui ont souhait introduire ces clauses sociales dans leurs marchs publics ont permis un retour l'emploi de chmeurs de longue dure et une rponse aux besoins de main-d'uvre des entreprises, dans le20Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

RepresLa LOLF : Une opportunit plus quune contrainte Sylvie Trosa, professeure associe lInstitut dtudes politiques de Paris ayant particip la mise en place de la LOLF au ministre des Affaires sociales, voit dans la LOLF un moyen pour les associations de professionnaliser leur action et de consolider ainsi leurs relations contractuelles. Les associations pourraient voir dans la LOLF une opportunit de ne plus subir la suspicion de mauvaise utilisation de largent public ou dinefficacit. La LOLF a cet gard est plus une opportunit quune contrainte (...). Du ct des associations, il me semble que des fonctions nouvelles font galement leur apparition avec la modernisation de ltat. La LOLF, par exemple, est une rforme technique qui implique des connaissances techniques. La matrise de ces enjeux permettra aux professionnels associatifs de simpliquer, par exemple, dans un dialogue constructif avec ltat en partant de la ncessit de lvaluation. Retrouvez l'intgralit de l'interview dans la rubrique Actualits du site de la CPCA : http://cpca.asso.fr

Interview

Christian Hamonic : Il faut construire, par la concer-

tation, des indicateurs qui correspondent l'activit dveloppe. Christian H a m o n i c, vice-prsident de la CPCA, en charge des relations contractuelles En pratique, quels sont les risques de confusion de la part des collectivits entre, par exemple, une dlgation de service public et un march public ? Pour les associations, le risque de confusion pse surtout entre la subvention et les procdures de commande publique. La subvention s'impose ds lors qu'une association poursuit une a c t ivit prexistante l'intervention financire de la collectivit publique ou que l'activit pours u ivie est dcide d'un commun accord. Si le mode de financement retenu est inadapt au projet, cette confusion peut propulser l'association dans le secteur marchand lucratif et la fragiliser. Peut-on parler, avec la LOLF et ses indicateurs de performances de l'entre du secteur associatif dans une phase d'obligation de rsultat conomique ? Il est normal qu'une valuation s'applique l'action conduite par l'association. Mais il ne peut en aucun cas s'agir d'une valuation de la performance au sens strict de l'efficacit conomique. Les associations apportent une contribution l'intrt gnral qui n'est pas systmatiquement mesurable. Comment mesurer seulement avec des chiffres - l'impact d'une association culturelle de quartier qui cre du lien social en permettant aux habitants de mieux se connatre ? Il faut construire, par la concert ation, des indicateurs qui correspondent l'activit dveloppe. L'enjeu est d'viter la confusion des genres entre valuation et contrle. La clarification et la scurisation des relations contractuelles ne peut-elle se faire que sur la base d'une application des textes existants, comme le CNVA le recommande ? Les circulaires du 1er dcembre 2000 et du 24 dcembre 2002 posent les principes d'un financement pluriannuel scuris pour les associations. Pourtant, force est de reconnatre qu'il reste beaucoup faire pour que ces principes soient effectifs. Pour ce faire, la CPCA a mis un certain nombre de propositions, dont l'allongement des conventions pluriannuelles d'objectif (CPO) de trois quatre ans. Ces mesures ncessitent un rel accompagnement par les services de l'tat, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Cette clarification des relations contractuelles doit-elle permettre au secteur associatif de supporter une concurrence avec le secteur priv dans le cadre des marchs publics, comme cest le cas des services la personne ? Les associations ne peuvent tre mises en concurrence avec des oprateurs conomiques purement marchands. Une collectivit qui choisit d'attribuer un march public une association fait un choix de socit en quelque sorte. Elle choisit la plus-value citoyenne d'une association qui concourt l'intrt gnral. Hlas, l'article 28 du Code des marchs publics ne cite plus expressment la liste des services qui concernent l'activit associative laquelle s'applique cette procdure adapte, comme le fait pourtant la rglementation europenne. Les conventions pluriannuelles d'objectif sontelles un moyen de sortir de la subvention discrtionnaire pour aller vers un vrai partenariat entre associations et collectivits locales ? Assurment. Une tude de mars 2006, ralise par le CNRS et le cabinet Deloitte, pointe le caractre incertain de la subvention publique (suppression d'un apport, gel des crdits, dlais de versement trop long, etc.) comme l'un des principaux facteurs de fragilit associative. D'o la ncessit d'inscrire le financement publ i c dans le temps et dans un cadre contractuel scuris.

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Financement priv : la solution miracle ?Bien que le financement public restepartie du f inancement priv ex t e rne des associations. Selon le Centre dtude et de recherche sur la majoritaire dans le budget des philantropie (Cerphi), ces dons ont associations employeurs, les rcentes t de plus de 2,5 milliards d'euros en 2005 ; en augmentation de 20 % par politiques de l'tat les incitent rapport 2004, essentiellement en raison du tsunami. Ils reprsentent diversifier leurs sources de financement. 4,2 % des ressources des associations. Cette moyenne masque une Reste valuer les avantages et les grande diversit de situations, la majorit des dons allant aux ONG, inconvnients du financement priv. Petit aux grandes associations caritatives et celles de la recherche mdicale pour tour d'horizon des possibilits et des qui elles constituent une ressource essentielle. La loi sur le mcnat de 2003 a enjeux pour les associations. encore augment la capacit pour le contribuable de dduire de ses impts une proportion des dons eff e c t u s (entre 66 et 75 %). Avec le systme de la dduction fiscale, le don cote a dive r s i fication des fi n a n c e- moins au donateur. Par exemple, pour ments constitue aujourd'hui un don de 100 euros, le particulier un vritable enjeu dans la pourra en dduire 66 dans sa dclaraconsolidation des activ i t s tion d'impts. Le cot rel, pour le associatives. Le financement d o n a t e u r, sera donc de 34 euros. Ce p r iv interne des associations se dernier a bien suivi la consigne compose de ressources propres (cotisa- puisque l'augmentation des dclarations, dons de temps et d'argent) et/ou de tions de dons a t de 39 % depuis productions de richesses (prestations 2003 quand l'augmentation des dons rglementes, adhsions, biens et servi- n'tait que de 32 %. ces). Depuis plus de quarante ans, ce Avec 1,7 milliard de montants dclatype de ressources constitue le moteur rs, les 2/3 des dons bnficient ainsi essentiel du dynamisme associatif. Les de la dduction fiscale. L'tat, qui rpercussions de cette conomie de vient de franchir le milliard de rducrichesses non lucratives sur l'conomie tion d'impt accorde aux donateurs, en gnral sont trs importantes : l'co- est tent de considrer que ce milliard nomie du sport et du tourisme en sont constitue un financement public et des illustrations. non plus des dons privs. Ainsi, le projet de budget du ministre de la Vie La gnrosit du public, un finance- a s s o c i a t ive fait-il figurer cette absence de recette fiscale comme fa iment priv ? sant partie du budget du ministre. Il est un peu trange de tout faire pour Ce sont les dons issus de la gnrosit le moins d'Etat en baissant le du public qui reprsentent la majeure financement public des associations

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et en favorisant le financement priv, mais de vouloir tout de mme conserver l'image d'un tat gnreux. Qui plus est, on n'a pas vu le ministre de la Culture interve n i r, lorsqu'un grand patron franais se rpandait sur les mdias pour vanter son projet de cathdrale de l'art contemporain, pour dire que ce projet tait financ pour moiti par les pouvoirs publics sans qu'aucun contrle public ni dmocratique ne puisse s'exercer sur ce projet. Deux poids, deux mesures ? Enfin, la collecte des dons est avant tout le fruit d'un norme travail de sollicitation des associations et d'une gnrosit qui ne dpend que pour une trs fa i ble part de l'obtention d'une dduction fiscale. Cette dernire n'a qu'un effet facilitateur. Il est donc tout fait a busif de la part de l'Etat de vouloir se l'approprier.

cette progression est lente et ne concerne que 20 % des associations. Les dons ne constituent pas un mode de financement pour la plus grande

Ingalit fiscale des donateursAutre problme pos par la dduction fiscale accorde aux dons : celui de l ' i n galit face cet avantage. Pour bnficier d'une rduction fiscale, encore faut-il payer des impts sur le revenu. Selon le Cerphi, c'est ainsi 800 000 foyers f iscaux qui ont dclar des dons pour 2005 alors qu'ils taient non imposables. Il faut bien sr y ajouter tous ceux qui se savaient non imposables et n'ont donc mme pas dclar leurs dons. Ajoutons que, selon le Cerphi, plus on est riche et plus on donne de manire absolue, mais plus on est pauvre et plus on donne proportionnellement son revenu. Cette situation montre que l'avantage fiscal est donc profondment injuste et apporte une preuve supplmentaire que l'Etat peut difficilement s'approprier la gnrosit publique. Quant aux mthodes de collecte de dons, il semble que les nouve l l e s techniques mises en place ces vingt dernires annes (mailing, tlphone, SMS) ont atteint leurs limites. Si Internet rencontre un certain succs par la commodit qu'il offre, les donateurs prfrent des mthodes fondes sur une vritable relation : collecte dans la rue, vnement festif ou mdiatique. Il reste que si les dons progressent,

Il est un peu trange de tout faire pour le moins dtat en baissant le financement public des associations et en favorisant le financement priv, mais de vouloir tout de mme conserver limage dun tat gnreux.part des associations et rien n'indique des changements importants dans ce domaine.

Les perspectives du mcnatSelon l'Association pour le dveloppement du mcnat industriel et commercial (Admical), 1 milliard d'euros ont t consacrs au mcnat d'entreprise en 2005. La loi du 1er aot 2003 relative au mcnat, aux associations

et aux fondations est venue encourager encore un peu plus le mcnat d'entreprise en accordant aux entreprises mcnes une rduction directe de leur impt de 60 % du don effectu dans la limite de 5 pour 1 000 de leur chiffre d'affaires. Il s'agit presque d'un doublement de l'avantage fiscal accord prcdemment aux entreprises qui soutiennent financirement les associations d'intrt gnral. De mme le rgime des fondations a t revu pour favoriser leur dveloppement. Aujourd'hui, 10 % des associations franaises bnficient de mcnat d'entreprise. Le mcnat ne se rsume pas au seul apport financier : il peut prendre galement la forme de prts/dons de matriels ou encore de mise disposition de personnel. La part du mcnat reprsente 0,09 % du PIB contre 2,1 % aux tats-Unis (mcnat et philanthropie totaliss). De mme, le nombre de fondations (473 fondations d'utilit publique et 73 fondations d'entreprise), susceptibles d'apporter des financements est faible comparativement certains de nos voisins europens : environ 2 000 en Grande-Bretagne et 3 000 en Allemagne. Contrairement certaines ides reues, il n'y a pas que les grosses entreprises et leurs fondations qui pratiquent le mcnat : de plus en plus de petites et moyennes entreprises s ' e n gagent dans des oprations de mcnat. Selon un sondage ralis par l'Admical, 18 % des entreprises de plus de 200 salaris font du mcnat et 53 % des entreprises mcnes sont des PME. Les secteurs associatifs les plus soutenus sont ceux de la culture ..

RepresSponsoring et mcnat : deux types de soutien privSponsoring (ou parrainage) et mcnat sont des aides financires ou matrielles que les entreprises prives accordent aux associations. La distinction se fait sur des critres fiscaux : le mcnat est une aide accorde sans contrepartie directe une structure dont l'intrt gnral est reconnu, quand le sponsoring suppose des retombes conomiques et publicitaires pour l'entreprise sponsor, un bnfice direct en termes d'image. Le nom, la marque, le logo du sponsor apparaissent sur les affiches, les courriers, les maillots (du club sportif par exemple) ou tout autre support de communication de l'association. Il s'apparente donc une prestation de service publicitaire de l'association la socit commerciale (et doit apparatre comme tel dans la comptabilit des deux structures).

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.. et de la solidarit. Autre tendance rcente, la part croissante du mcnat de comptences qui c o n c e rne 31 % des entreprises mcnes. La mise disposition de salaris pour raliser des missions ponctuelles auprs d'associations correspond ainsi une dynamique interne aux entreprises qui y trouvent aussi un moyen de mobiliser leurs salaris sur un projet de solidarit qui utilise leurs comptences

responsabilit sociale des entreprises trace les perspectives de nouveaux partenariats avec le monde associatif qui pourrait bien innover sur le terrain de l'utilit collective.

Le dveloppement des activits marchandes non lucratives ?Selon dith Archambault, les activits marchandes reprsentent 27,5 % des recettes des associations. Il s'agit l des ventes de biens ou de services des clients autres que les pouvoirs publics. Cela reprsenterait quelque 18 milliards de chiffre d'affaires. Au-del de l'organisation de manifestations et de ventes de petits objets de soutien, c'est essentiellement dans la vente de prestations de service que les associations exercent leurs activits marchandes. Les situations sont extrmement contrastes selon les secteurs d'activit des associations. Pour ne retenir que des exemples d'associations employeurs, selon Philippe Kaminski, ce type de recettes peut varier de 11 % dans la petite enfance 82 % dans le tourisme social en passant par 28 % dans la culture et le sport, 32 % dans le service domicile ou 38 % dans le logement et les foyers.

Au-del de lorganisation de manifestations et de ventes dobjets, cest essentiellement dans la vente de prestations de service que les associations exercent leurs activits marchandes.dans un cadre valorisant. Ce qui souligne galement que le mcnat repose sur la logique gagnant-gagnant . Le mcne souhaite galement avoir un effet retour, la plupart du temps en termes d'image. Ce qui explique en part i e que l'accs au mcnat est assez ingalement partag par les associations. Entre projets visibles et moins visibles, entre actions ponctuelles et activits de long terme, les possibilits de partenariats ne sont pas les mmes. C'est pourquoi le mcnat d'entreprise ne pourra se substituer au financement public comme certains pourraient l'esprer. C'est la fois une question d'ampleur des budgets allous aux associations qui sont sans commune mesure entre le mcnat et le financement public, mais c'est aussi une question de critres. La rciprocit inhrente au mcnat, entre l'association et l'entreprise, ne relve pas du mme ordre que le soutien public au projet associatif, dont la finalit premire est l'intrt gnral. Reste cependant, sans caricaturer les positions, que le dveloppement de la24Bulletin de la CPCA N 9 Janvier 2007

L'augmentation, depuis deux dcennies, de la part des financements privs dans les budgets associatifs est lie la volont des pouvoirs publics de rduire leurs financements et de contraindre les associations l'autonomie fi n a ncire. Ils ont galement pratiqu une politique de solvabilisation de la demande plutt que de financement direct des associations prestataires dans certains secteurs. C'est le cas des services aux personnes. La marchandisation de ces secteurs modifie profondment les modles conomiques associatifs. Ceux-ci passent d'une relation de mandataire au service d'une collectivit locale celle de prestataire auprs des usagers. Cette volution n'est pas sans prsenter de risques pour l'identit associative. Les associations ont en effet su dvelopper et structurer des activits conomiques devenues rentables . n Pour aller plus loin :- la gnrosit du public : www.unogep.org/ - le mcnat d'entreprise : www.admical.org/ www.imsentreprendre.com/ - le dveloppement des activits marchandes : http://www.avise.org/

RepresTsunami : le rapport de la Cour des comptesLa Cour des comptes a publi, le 3 janvier dernier, un rapport portant sur lutilisation des dons collects, lors du tsunami du 26 dcembre 2004, en Asie du Sud par 32 associations de solidarit internationale. Selon les estimations de la Cour, le vaste lan de gnrosit des Franais a permis ces organismes de recueillir 323 millions deuros de dons. Les dpenses des ONG sont apparues globalement conformes aux objectifs poursuivis par les appels la gnrosit publique , a dclar le Premier prsident de la Cour, Philippe Sguin. Cependant, ce rapport pointe le montant des sommes qui nont pas encore t utilises - plus de 50 %. Ce constat sexplique notamment par le temps que ncessitent les actions de reconstruction et de rhabilitation qui suivent les oprations durgence. En comparaison, ltat na utilis quun tiers des fonds mobiliss. La Cour des comptes met galement des rserves sur les ressources qui ont t raffectes dautres actions (6 % du total des ressources collectes). Cet afflux financier except