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Jeudi 12 août 2010 - 66 e année - N˚20388 - 1,40 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Eric Fottorino Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA, L e Mexique célébrera cette année deux événements fon- dateurs : le bicentenaire de son indépendance, le 16 septem- bre, le centenaire de sa révolution, le 20 novembre. A l’heure de ce double anniversaire, les idéaux d’unité nationale nourris par les pères fondateurs de ce grand pays sont mis à mal par une vague de violences sans précédent. Pas un jour ne passe sans un règlement de comptes sanglant, une fusillade à l’arme lourde ou l’explosion d’une voiture piégée. La lutte féroce que se livrent les cartels de la drogue, et celle qui les oppose aux forces de l’ordre ont fait 28 000 morts depuis trois ans et demi. La croisade contre le nar- cotrafic lancée par le président conservateur, Felipe Calderon, en mal de légitimité après son élec- tion contestée de juillet 2006, a pris l’allure d’une guerre sans mer- ci. Malgré 50 000 militaires déployés sur le territoire avec le soutien actif des Etats-Unis, les organisations criminelles conser- vent leur pouvoir d’intimidation et de destruction. Leur puissance se double d’une influence politique accrue depuis l’alternance de 2000. Après soixante et onze ans de règne sans partage du Parti révo- lutionnaire institutionnel (PRI), l’arrivée au pouvoir des élus du Parti d’action nationale (PAN) a fait voler en éclats le « pacte taci- te» que le vieux régime autoritai- re avait conclu avec les barons de la drogue. Le changement à la tête du pays s’est, en outre, accompa- gné d’une infiltration des organes locaux de l’Etat par les cartels. Cette perte de contrôle du gou- vernement a enfanté des narco- Etats, fondés sur la corruption, volontaire ou forcée, des autori- tés locales, police en tête. Avec la complicité passive d’une partie de la population, acquise à la cau- se des narcotrafiquants, ou rési- gnée à leur emprise, dans un pays où la moitié des habitants vit encore sous le seuil de pauvreté. Le manque de stratégie globale du pouvoir n’a rien arrangé. Le cri- me organisé a continué de terrori- ser la population malgré de spec- taculaires saisies d’armes et des arrestations massives. Un millier de journalistes viennent de défi- ler à Mexico pour dénoncer la cruauté des cartels qui ont pris pour cible leur profession. Face à l’échec de son combat, Felipe Calderon se dit prêt à lan- cer un débat sur la légalisation des drogues, tout en trouvant per- sonnellement cette idée « absur- de». Son initiative, qui se veut un signe d’ouverture, est soutenue par deux de ses prédécesseurs, Vicente Fox et Ernesto Zedillo. Le président vient aussi de changer pour la troisième fois de ministre de l’intérieur. Mais cette nervosi- té du pouvoir érode sa légitimité et profite au PRI, que beaucoup jugent mieux placé pour rétablir la paix sociale. Lors de récentes élections locales, il a remporté neuf des douze postes de gouver- neur en jeu, malgré la perte de trois bastions historiques. Un résultat flatteur qui pour- rait préluder le retour du PRI à la présidence en 2012. Les Mexi- cains devront, alors, choisir entre la liberté offerte par le régime issu il y a dix ans de l’alternance et la sécurité garantie par l’ancien parti hégémonique. Dilemme peu réjouissant. p C omme il y est désormais obli- gé, le ministère de la justice a évalué le coût du projet de réforme de la procédure pénale en préparation. Selon cette étude d’impact, des investissements massifs, de l’ordre de 400 à 500 millions d’euros, seront néces- saires pour mettre aux normes les locaux de garde à vue, organiser la présence des avocats, enregistrer les auditions, etc. Cette facture devra être sérieusement revue à la hausse après la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet, qui a imposé au gouver- nement une réforme beaucoup plus approfondie – et donc coûteu- se – de la procédure de garde à vue d’ici un an. p Lire page 8 Editorial Une aventure inédite de Blake & Mortimer L’économie américaine s’essouffle, la Fed s’alarme K Contre-enquête Blé plus cher : vers une crise alimentaire ? K L’envolée des cours causée par la sécheresse en Russie peut-elle ramener le monde à la situation qu’il a connue en 2007 et 2008 ? K Le phénomène va-t-il provoquer la hausse du prix du pain ? Page 12 La réforme de la garde à vue va coûter cher ©Les Films du Poisson / Taylor Media – Photo : Baruch Rafic Charlotte Gainsbourg Les Films du Poisson et Taylor Media présentent un film de Julie Bertuccelli Actuellement produit par Sue Taylor Yaël Fogiel et Laetitia Gonzalez avec Marton Csokas Morgana Davies Christian Byers Tom Russell Gabriel Gotting et Aden Young « L’arbre » écrit et réalisé par Julie Bertuccelli d’après l’adaptation d’Elizabeth J. Mars du roman « L’arbre du père » de Judy Pascoe image Nigel Bluckmontage François Gédigier castingNikki Barrett sonOlivier Mauvezin Nicolas Moreauet Olivier Goinarddécors Steven Jones-Evans costumes Joanna Mae Parkmusique Grégoire Hetzel une productionLes Films du Poisson / Taylor Media en association avec Screen Australia en coproduction avec Arte France Cinéma WDR / Arte ARD / Degetoet Tatfilmavec la participation de Canal+en association avec Dorje Film Le Pacte Memento Films International Screen Queensland Screen NSW et Coficup 2 un fonds Backup Films www.larbre-lefilm.com « C’est le pire désastre naturel que le Pakistan ait connu » t Entretien avec Jean-Maurice Ripert, envoyé spécial de l’ONU pour l’aide au pays. Page 4 Page 18 Le Mexique miné par les barons de la drogue F ace aux signes de plus en plus visi- bles et inquiétants d’un essouffle- ment de la reprise économique aux Etats-Unis, la Réserve fédérale (Fed) a déci- dé, mardi 10 août, de réactiver une mesure de soutien à l’économie qu’elle avait prise au plus fort de la crise : l’achat direct d’em- prunts d’Etat auprès des banques. L’objec- tif est double : injecter de l’argent frais dans l’économie et empêcher une remon- tée des taux d’intérêt. L’annonce de la banque centrale fait sui- te à la publication, au cours des dernières semaines, d’une longue série d’indica- teurs économiques très décevants. Le taux de chômage reste très élevé (9,5 %), et l’im- mobilier ne parvient pas à se redresser. Plus alarmant encore, les Américains sem- blent avoir perdu cet appétit de consom- mer qui, depuis des décennies, soutenait la croissance. Ce changement de comporte- ment risque de peser sur le succès des sol- des traditionnels pour les jeunes avant la rentrée scolaire et universitaire. Cette période est un moment crucial pour le chif- fre d’affaires annuel de nombreuses gran- des marques de l’habillement. Les économistes sont de plus en plus nombreux à évoquer le risque d’un scéna- rio « à la japonaise » pour l’économie amé- ricaine. C’est-à-dire l’entrée dans une lon- gue période de stagnation de l’activité dou- blée d’une baisse des prix et des salaires. p Lire page 10 UK price £ 1,50 Une famille évacue le village de Baseera, dans la province du Pendjab, le 10 août. ADREES LATIF/REUTERS t La banque centrale des Etats-Unis réactive des mesures exceptionnelles de soutien à la reprise t Les analystes, sceptiques, craignent la déflation Le regard de Plantu

Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

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Page 1: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Jeudi 12 août 2010 - 66e année - N˚20388 - 1,40 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur: Eric Fottorino

Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Malte 2,50 ¤,Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA,

L e Mexique célébrera cetteannée deux événements fon-dateurs: le bicentenaire de

son indépendance, le 16 septem-bre, le centenaire de sa révolution,le 20 novembre. A l’heure de cedouble anniversaire, les idéauxd’unité nationale nourris par lespères fondateurs de ce grand payssont mis à mal par une vague deviolences sans précédent.

Pas un jour ne passe sans unrèglement de comptes sanglant,une fusillade à l’arme lourde oul’explosion d’une voiture piégée.La lutte féroce que se livrent lescartels de la drogue, et celle qui lesoppose aux forces de l’ordre ontfait 28 000 morts depuis trois anset demi. La croisade contre le nar-cotrafic lancée par le présidentconservateur, Felipe Calderon, enmal de légitimité après son élec-tion contestée de juillet2006, apris l’allure d’une guerre sans mer-

ci. Malgré 50 000 militairesdéployés sur le territoire avec lesoutien actif des Etats-Unis, lesorganisations criminelles conser-vent leur pouvoir d’intimidationet de destruction.

Leur puissance se doubled’une influence politique accruedepuis l’alternance de 2000.Après soixante et onze ans derègne sans partage du Parti révo-lutionnaire institutionnel (PRI),l’arrivée au pouvoir des élus duParti d’action nationale (PAN) a

fait voler en éclats le « pacte taci-te » que le vieux régime autoritai-re avait conclu avec les barons dela drogue. Le changement à la têtedu pays s’est, en outre, accompa-gné d’une infiltration des organeslocaux de l’Etat par les cartels.

Cette perte de contrôle du gou-vernement a enfanté des narco-Etats, fondés sur la corruption,volontaire ou forcée, des autori-tés locales, police en tête. Avec lacomplicité passive d’une partiede la population, acquise à la cau-se des narcotrafiquants, ou rési-gnée à leur emprise, dans un paysoù la moitié des habitants vitencore sous le seuil de pauvreté.

Le manque de stratégie globaledu pouvoir n’a rien arrangé. Le cri-me organisé a continué de terrori-ser la population malgré de spec-taculaires saisies d’armes et desarrestations massives. Un millierde journalistes viennent de défi-ler à Mexico pour dénoncer lacruauté des cartels qui ont prispour cible leur profession.

Face à l’échec de son combat,Felipe Calderon se dit prêt à lan-cer un débat sur la légalisationdes drogues, tout en trouvant per-

sonnellement cette idée « absur-de ». Son initiative, qui se veut unsigne d’ouverture, est soutenuepar deux de ses prédécesseurs,Vicente Fox et Ernesto Zedillo. Leprésident vient aussi de changerpour la troisième fois de ministrede l’intérieur. Mais cette nervosi-té du pouvoir érode sa légitimitéet profite au PRI, que beaucoupjugent mieux placé pour rétablirla paix sociale. Lors de récentesélections locales, il a remporténeuf des douze postes de gouver-neur en jeu, malgré la perte detrois bastions historiques.

Un résultat flatteur qui pour-rait préluder le retour du PRI à laprésidence en 2012. Les Mexi-cains devront, alors, choisir entrela liberté offerte par le régimeissu il y a dix ans de l’alternanceet la sécurité garantie par l’ancienparti hégémonique. Dilemmepeu réjouissant. p

C ommeilyest désormaisobli-gé, le ministère de la justicea évalué le coût du projet de

réforme de la procédure pénale enpréparation. Selon cette étuded’impact, des investissementsmassifs, de l’ordre de 400 à500millions d’euros, seront néces-saires pour mettre aux normes leslocaux de garde à vue, organiser laprésence des avocats, enregistrerles auditions, etc. Cette facturedevra être sérieusement revue à lahausse après la décision duConseil constitutionnel du30juillet, qui a imposé au gouver-nement une réforme beaucoupplusapprofondie – et donc coûteu-se – de la procédure de garde à vued’ici un an. p Lire page8

Editorial

Uneaventure inéditedeBlake&Mortimer

L’économieaméricaines’essouffle,la Fed s’alarme

KContre-enquêteBlépluscher:versunecrisealimentaire?KL’envolée des cours causée par la sécheresseenRussie peut-elleramener lemondeàla situationqu’il aconnueen2007 et2008?KLe phénomèneva-t-il provoquer lahausseduprixdu pain? Page12

Laréformedela gardeàvuevacoûter cher

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un film de Julie Bertuccelli

Actuellement

produit par Sue Taylor Yaël Fogiel et Laetitia Gonzalez avec Marton Csokas Morgana Davies Christian Byers Tom Russell Gabriel Gotting et Aden Young « L’arbre » écrit et réalisé par Julie Bertuccelli d’après l’adaptation d’Elizabeth J. Mars du roman « L’arbre du père » de Judy Pascoeimage Nigel Bluck montage François Gédigier casting Nikki Barrett son Olivier Mauvezin Nicolas Moreau et Olivier Goinard décors Steven Jones-Evans costumes Joanna Mae Park musique Grégoire Hetzel une production Les Films du Poisson / Taylor Media en association avec Screen Australia

en coproduction avec Arte France Cinéma WDR / Arte ARD / Degeto et Tatfilm avec la participation de Canal+ en association avec Dorje Film Le Pacte Memento Films International Screen Queensland Screen NSWet Coficup 2 un fonds Backup Films www.larbre-lefilm.com

«C’est lepiredésastrenaturelque lePakistanaitconnu»t Entretien avec Jean-Maurice Ripert, envoyé spécial de l’ONU pour l’aide au pays.Page4

Page 18

Le Mexique miné par les barons de la drogue

F ace aux signes de plus en plus visi-bles et inquiétants d’un essouffle-ment de la reprise économique aux

Etats-Unis, la Réserve fédérale (Fed) a déci-dé, mardi 10 août, de réactiver une mesurede soutien à l’économie qu’elle avait priseau plus fort de la crise : l’achat direct d’em-prunts d’Etat auprès des banques. L’objec-tif est double : injecter de l’argent fraisdans l’économie et empêcher une remon-tée des taux d’intérêt.

L’annoncede labanque centrale faitsui-te à la publication, au cours des dernièressemaines, d’une longue série d’indica-teurs économiques très décevants. Le tauxde chômage reste très élevé (9,5%), et l’im-mobilier ne parvient pas à se redresser.

Plus alarmant encore, les Américains sem-blent avoir perdu cet appétit de consom-mer qui, depuis des décennies, soutenaitlacroissance.Cechangementde comporte-ment risque de peser sur le succès des sol-des traditionnels pour les jeunes avant larentrée scolaire et universitaire. Cettepériodeest unmomentcrucialpourlechif-fre d’affaires annuel de nombreuses gran-des marques de l’habillement.

Les économistes sont de plus en plusnombreux à évoquer le risque d’un scéna-rio « à la japonaise » pour l’économie amé-ricaine. C’est-à-dire l’entrée dans une lon-guepériode destagnationde l’activitédou-blée d’une baisse des prix et des salaires. p

Lire page10

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1,50

Une famille évacuele village de Baseera,dans la provincedu Pendjab, le 10 août.ADREES LATIF/REUTERS

t La banque centrale des Etats-Unis réactivedes mesures exceptionnelles de soutien à la repriset Les analystes, sceptiques, craignent la déflation

Leregard dePlantu

Page 2: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

La duchesse d’York au bord de la banqueroute

Les faits

L’histoire MarcRoche(Londres, correspondant)

aInternationalSixmillions depersonnesont besoind’uneaidehumanitaire auPakistanSix millions de personnes affectées par les inondations au Pakistan ontbesoin d’une aide humanitaire pour survivre, ont estimé mardi 10 aoûtles Nations unies. La porte-parole du Bureau de coordination des affaireshumanitaires de l’ONU, Elisabeth Byrs, a annoncé mardi que l’organisa-tiondevait lancer mercredi 11août un appel defonds international deplu-sieurscentainesde millionsdedollars, àNewYork,enprésence derespon-sables pakistanais, précisant néanmoins que le nombre de sinistrés quibénéficierontdecette aiderestaitàdéterminer.Lundi9août,unresponsa-ble de l’ONU avait estimé que les terribles inondations qui frappent lePakistan, en raison d’une mousson exceptionnellement violente, repré-sentaient un désastre de plus grande ampleur, en termes de logistiquehumaine, que le tsunami dévastateur de décembre2004. Lire page4n Sur Lemonde.fr : les portfolios

L’OMSdéclare la findela pandémiedegrippeA(H1N1)L’Organisation mondiale de la santé a déclaré la fin, mardi 10 août, de lapandémie de grippe H1N1, la première du XXIe siècle, qui avait affolé laplanète il y a plus d’un an, avant de s’avérer « modérée » et nettementmoins dévastatrice qu’une simple grippe saisonnière. « Le monde n’estplus en phase d’alerte 6», et entredésormais « dans la période post-pandé-mique», a annoncé la directrice de l’OMS, Margaret Chan, lors d’une télé-conférence. L’alerte a été levée car le nouveau virus H1N1, qui a fait envi-ron 18 500 décès dans le monde depuis sa découverte en avril 2009, a« pratiquement cessé de sévir », a expliqué Mme Chan. Lire page4

702 mortsen Chinedansdes glissements deterrainLe bilan provisoire des glissements de terrain survenus dans la provincedu Gansu, dans le nord-ouest de la Chine, a doublé, mardi 10 août, pours’établir à702 morts,alors que prèsd’un millierde personnes étaient por-tées disparues. Plus de 7 000 soldats et secouristes étaient toujours àpied d’œuvre mardidans la région, oùau moins troisvillages ont été rava-gés, samedi 7 août, par des avalanches de boue et de roches. Les pluies tor-rentielles ont fait depuis le début de l’année en Chine plus de 2 100 mortsou disparus, et provoqué l’évacuation de 12 millions de personnes dansle sud, le centre, et plus récemment le nord-est. La situation dans le Gan-su reste d’autant plus inquiétante que la tempête tropicale Dianmu sedirige vers le nord de la Chine, ce qui devrait entraîner de fortes pluiesdans la région. Lire page 4

Rétablissementdes relationsentre laColombie et le VenezuelaLes présidents de Colombie et du Venezuela, Juan Manuel Santos et HugoChavez, ont décidé de rétablir leurs relations diplomatiques, rompues aumois de juillet, ont-ils annoncé, mardi 10août, dans une déclaration com-mune lue à Santa Marta, en Colombie. Les deux présidents « se sont accor-déspourrelancerlarelationbilatéraleenrétablissantlesrelationsdiplomati-ques entre les deux pays, sur la base d’un dialogue transparent». BogotaaccusaitM.Chavez,adversairedéclarédesEtats-Unis,d’offrirunrefugeauxrebellesdesFARC,tandisqueCaracasdénonçaitunaccordoffrantauxtrou-pes américaines l’accès aux bases militaires colombiennes. Lire page5

aFranceDébutdumois duramadanDe cinq à six millions de musulmans de France ont commencé mercredi11 août le mois du ramadan, un des cinq piliers de l’islam. La date a étéfixée par une commission théologique réunissant des membres duConseil français du culte musulman (CFCM), des responsables des mos-quées et des fidèles, qui ont tenu compte des observations de la Lune parles astronomes. La commission a pris en compte l’avis de la plupart despays musulmans, comme l’Arabie saoudite, qui ont annoncé ou s’apprê-taient à annoncer pour mercredi, au lever du soleil, le début du mois dejeûne. En France, un nombre croissant de fidèles respecte les obligationsde jeûne et de prière. Selon un sondage IFOP, en 2009, environ 70 % desmusulmans de France déclaraient observer le jeûne du ramadan, contre60% il y a vingtans. Lire page9n Sur Lemonde.fr : une sélection de témoignages sur le thème«Ramadan et travail»

aEconomieAuxEtats-Unis, la Fed reprendsesmesuresdesoutien à l’économiePréoccupée par le ralentissement de la reprise aux Etats-Unis, la Réservefédérale (Fed) a fait un petit pas pour soutenir l’économie. A l’issue de saréunion mardi 10 août, la Banque centrale américaine a choisi une solu-tion de relance a minima: celle de faire légèrement reprendre la plancheà billets pour éviter que la masse monétaire ne se contracte. La Fed a déci-dé qu’à chaque fois que des titres liés à l’immobilier (comme de la dettedes organismes parapublics Fannie Mae et Freddie Mac) qu’elle détenaitparviendraient à maturité, elle réinvestirait le montant récolté en ache-tant des titres de dette de l’Etat fédéral (bons du Trésor). Lire page10

D e vaudeville animant depuis près de

vingt ans la chronique royale, le

feuilleton des déboires de la duchesse

d’York, ex-épouse du prince Andrew, est

devenu une affaire d’Etat. Criblée de dettes

estimées à 5 millions de livres (6millions

d’euros) auxquels s’ajoutent des intérêts

galopants, «Fergie » est en faillite, ou quasi.

La duchesse pourrait devenir le premier

membre de la présente lignée d’ascendance

germanique, issue des Hanovre, étendue aux

Saxe-Cobourg et rebaptisée Windsor à faire

banqueroute. En effet, bien que ne faisant

plus partie du clan royal depuis son divorce,

en 1996, du deuxième fils de la reine Eliza-

bethII, l’ancienne Sarah Ferguson est la mère

de deux petits-enfants de la souveraine, les

princesses Béatrice et Eugénie. Les deux

anciens époux demeurent très liés.

Partageant son temps entre les Etats-Unis

et le Royaume-Uni, la dame rousse n’a guère

le sens des affaires. Sa société chargée de gérer

son image médiatique a déposé le bilan en

2009. Estimant son statut para-royal sous-éva-

lué, elle a cassé le contrat la liant à la société

de régime Weight Watchers. Ces deux coups

de tête ont entraîné des honoraires d’avocats

stratosphériques. Par ailleurs, son train de vie

somptuaire, son amour du luxe, ses parties

arrosées au champagne et un entourage de

onze personnes ont grevé son budget. Enfin,

lors de son divorce en 1996, Fergie s’était fait

«plumer » par son ex-belle famille, réputée

pour sa pingrerie.

Fergie est un électron libreLe sort de la duchesse a pris récemment

une tournure politique. Selon l’hebdomadai-

re dominical Sunday Telegraph, la reine a évo-

qué la situation de son ex-bru lors de son der-

nier tête-à-tête avec le premier ministre,

David Cameron. Fils favori d’Elizabeth II, le

duc d’York, quatrième dans l’ordre de succes-

sion, est le représentant britannique au com-

merce extérieur et à l’aide au développement.

La souveraine regimbe à venir en aide à cette

pauvre duchesse. Elle ne lui pardonne pas

ses frasques passées, en particulier les pho-

tos publiées dans la foulée de la séparation,

en 1992, où on la voit en topless sucer l’orteil

d’un amant au bord d’une piscine d’une villa

près de Saint-Tropez.

Mais Fergie est un électron libre, une bom-

be atomique au cœur même du système qui

depuis plus d’un millénaire dirige le royau-

me. En mai, désespérée devant l’aggravation

de sa situation financière, elle s’était fait pié-

ger par un tabloïd en proposant sans crier

gare d’introduire des hommes d’affaires

auprès de son ancien mari moyennant rému-

nération. Elle pourrait vendre cher ses turpi-

tudes en décrivant le goût prononcé de «Ran-

dy Andy » (« Andy le Tombeur ») pour les star-

lettes et les reines de beauté de petite vertu.

Autrefois, elle aurait perdu la tête sur le

billot d’un échafaud. De nos jours, la reine

serait prête à délier les cordons de la bourse

pour éviter un fâcheux scandale. Autre

temps, autres mœurs… p

Société éditrice du « Monde » SAPrésident du directoire, directeurde la publication : Eric FottorinoVice-président, directeur général : David GuiraudSecrétaire général du directoire :Pierre-Yves RomainDirecteur du « Monde » : Eric FottorinoDirecteur adjoint : Laurent GreilsamerEditeur : Michel SfeirDirectrice de la rédaction : Sylvie KauffmannDirecteurs éditoriaux : Gérard Courtoiset Alain Frachon.Rédacteurs en chef : Michel Kajman, FrédéricLemaître, Franck Nouchi, Isabelle Talès,Didier Pourquery (« Le Monde Magazine »).Chef d’édition : Françoise Tovo.Directrice artistique : Sara Deux.Veille de l’information : Eric Azan.Secrétaire général : Jean-Pierre GiovencoMédiatrice : Véronique MaurusConseil de surveillance : Louis Schweitzer,président. Gilles van Kote, vice-présidentLe Monde est édité par la Société éditrice du « Monde » SADurée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000.Capital social : 149 017 497 ¤. Actionnaire principal : Le Monde SA.Rédaction :80,boulevard Auguste-Blanqui,75707ParisCedex13 Tél. :01-57-28-20-00 ;télécopieur :01-57-28-21-21Abonnements :partéléphone:deFrance0-825-000-778.(0,15TTC/min) ;del’étranger:(33)3-44-31-80-48 ouwww.lemonde.fr/abojournal/Changementd’adresseetsuspension :0-825-022-021(0,15TTC/min)

Les scores

Les gens Les chiffrest AndrzejWajdadécoréparDmitriMedvedevLe cinéaste polonais AndrzejWajda, s’est vu remettre, mardi10août, l’ordre de l’amitié par leprésident russe Dmitri Medve-dev, pour son apport aux rela-tions entre les deux pays dans ledomaine de la culture. AndrzejWajda, 84 ans, a réalisé le filmKatyn sur le massacre de milliersd’officiers polonais par la policede Staline dans une forêt del’Ouest de la Russie. L’URSS avaitaccusé jusqu’en 1990 l’Allemagnenazie d’être responsable de cesmeurtres, qui restaient le princi-pal motif de tensions entre Mos-cou et Varsovie.

t LechefmafieuxGiuseppeFalsonevaêtreremisàl’ItalieGiuseppe Falsone, 40 ans, le chefprésumé de la Mafia italiennearrêté en juin à Marseille, où il secachait, va être remis à l’Italie, aindiqué, mardi 10 août, la courd’appel d’Aix-en-Provence. Giu-seppe Falsone faisait l’objet dedeux mandats d’arrêt européens.

t LeprésidenttunisienBenAlisollicitépourunsixièmemandat

Plus de soixante personnalitéstunisiennes ont lancé un appel àl’actuel président tunisien ZineEl-Abidine Ben Ali, âgé de 73ans, àse représenter aux élections de2014, pour briguer un sixièmemandat successif, selon une décla-ration commune publiée lundi9août par la presse locale.Les dispositions en vigueur de laConstitution tunisienne limitentl’âge maximum du candidat à lamagistrature suprême à 75ans,nécessitant le cas échéant unenouvelle révision de la loi pourpermettre à l’actuel chef de l’Etat,au pouvoir depuis vingt-troisans,de se représenter à la présidence.(PHOTO AFP)

Shocking !Leprésidentselaissevivre

tEuro de natationCinq nouvelles médaillesfrançaises à BudapestLes Français Camille Lacourt etJérémy Stravius ont réussi le dou-blé sur 100 m dos, mardi 10 août,aux championnats d’Europe denatation à Budapest. Le Mar-seillais de 25 ans a aisément domi-né la finale. La journée a été fastepour la délégation française, quis’est adjugée trois autresmédailles. Frédérick Bousquet arécolté l’argent sur 50 m papillon,derrière l’Espagnol Rafael MunozPerez. La jeune Mélanie Hénique,17 ans, a grimpé sur la 3e marchedu podium du 50 m papillon, der-rière la Suédoise Therese Alsham-mar et la Danoise Jeanette Otte-sen. Hugues Duboscq est arrivédeuxième en finale du100 m brasse derrière le Norvé-gien Alexander Dale Oen.n Sur Lemonde.fr : Les Bleusnagent dans le bonheur ; tousles résultats

24heuresdans lemonde

tDiscrimination

1,60mn’estplusunetailleminimalepourentrerdansla policeLes policiers ou gardiens de prisonne devront plus forcément mesu-rer au minimum 1,60m pour exer-cer leurs fonctions, selon un arrê-té interministériel, publié mardi10août, au Journal officiel, qui allè-ge les conditions d’aptitudes phy-siques pour intégrer la fonctionpublique. Certaines conditionsd’aptitude pour intégrer certainscorps de la Fonction publiqued’Etat n’avaient « plus lieu d’être ».Lire page 9

tReligion

57000fidèlesontquittél’EglisecatholiqueautrichienneL’Eglise catholique autrichienne vaconnaître une désaffection recordcette année en raison des scandalesd’abus sexuels, a rapporté mardi10août le quotidien Der Standard.Quelque 100000Autrichiens pré-voient de quitter l’Eglise, dans unpays où deux tiers des habitants sedéclarent catholiques. Au premiersemestre, 57000départs ont déjàété dénombrés au premier semes-tre 2010, soit plus que les53216enregistrés en 2009.

1256mosquéesferméesauMarocpourrisqued’effondrementLe Maroc a annoncé mardi 10aoûtavoir fermé 1 256 mosquées « pré-sentant des risques d’effondre-ment» après un travail d’expertisedes anciens lieux de culte menédepuis quelques mois par le minis-tère des affaires islamiques (MAI).Plus de 19000mosquées ont étéexpertisées par le MAI, dont 513vont être démolies puis reconstrui-tes ont annoncé les autorités. Quel-que 245 millions d’euros serontpar ailleurs consacrés à la réhabili-tation des mosquées anciennes. LeRoyaume compte actuellement47967 mosquées.

C’est un président Sarkozy pasrasé, très bronzé, décontracté, leregard un peu vague, accompa-gné d’une Carla Bruni hilare quifait la « une » du Daily Telegraphdu mercredi 11 août. Le quotidiensouligne que M. Sarkozy, « quiaffronte une chute de popularité,séjourne, pour trois semaines,dans la villa de sa belle-famille aucap Nègre».Des vacances interrompues, mar-di 10 août, pendant une heure ettrente minutes, nous informel’Elysée, le temps de recevoir dansla résidence le premier ministrelibanais, Saad Hariri, pour évo-quer les tensions à la frontièreavec Israël.

(PHOTO «THE DAILY TELEGRAPH »)

0123 est édité par la Société Editrice du Monde (SA).La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’adminis-tration. Commission paritaire des publications et agences de pressen° 0712 C 81975 ISSN 0395-2037

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0123Jeudi 12 août 2010

Page 3: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Palo Alto (Californie)Envoyé spécial

En Californie, depuis plus dedeux ans, n’importe qui peutfaire séquencer et analyser sonpropregénomesansaucunefor-malité,etsansêtreobligédepas-ser par un médecin. Il suffit de

cracher dans un petit tube, et d’envoyer sasalive par la poste à une société spécialisée– il en existe plusieurs dans la Silicon Val-ley, la plus célèbre étant 23andMe, fondéepar Anne Wojcicki, l’épouse de Sergey Brin,fondateur de Google.

Pour moins de 500dollars (381 euros), leclient obtient, via Internet, une analysegénétique partielle permettant d’en savoirplussursesoriginesethniquesetsursaper-sonnalité profonde, mais aussi de décou-vrir s’il est porteur de mutations généti-ques favorisant l’apparition de dizaines demaladies.

Cette première révolution en a entraînéune deuxième, encore plus spectaculaire.On voit à présent apparaître des sites Inter-net permettant au grand public de se for-mer à la génétique et de mener des recher-ches sans l’aide de spécialistes.

Ainsi, Do-It-Yourself Genomics, unestart-up à but non lucratif, propose touteunegammede servicesdestinésaux« cher-cheurs-citoyens », une nouvelle race debénévoles amateurs et autodidactes. Cha-que participant à DIY Genomics doitd’abord faire établir son profil génétiquepar 23andme, ou une société concurrente.Puis il doit télécharger son code génétiqueà l’état brut et le renvoyer sur le site de DIYGenomics, où il sera stocké, publié, puisanalysé en fonction des recherches encours. Ainsi, chaque membre du site pour-ra consulter les données génétiques desautres membres, utiliser des outils en lignepour mener des recherches personnelles,recruter des volontaires pour mener destestsetdes étudescollaboratives,publier etdiscuter les résultats…

DIY Genomics va aussi demander à sesvolontaires d’effectuer des analyses biolo-giques classiques, notamment des testssanguins, pour croiser les résultats avec lesdonnées génétiques. Par la suite, certainsmembres se soumettront à un traitementpharmaceutique ou à un changement demode de vie, et en étudieront l’impact surleur corps – l’objectif étant d’inhiber ou deretarderl’apparitiondesmaladiespourles-quelles ils ont une prédisposition.

La fondatrice de DIY Genomics, MelanieSwan, n’est pas généticienne, mais elle estconnue dans la Silicon Valley commeconsultante et enseignante spécialiste destechnologiesdel’information.Pourlespro-fessionnels d’Internet, le code génétiqueest un code informatique comme un autre,qui ne les impressionne pas : après tout,avec « seulement » 3milliards de paires de

base, le génome humain représente unfichier de 3 gigaoctets, soit nettement pluspetit que le système d’exploitation Win-dows de Microsoft ou qu’un film d’Hol-lywood numérisé sur DVD…

Grâce à son carnet d’adresses, Mme Swancompte bientôt trouver des sponsors, desmécènesetdesinvestisseursvenusnotam-ment du monde d’Internet. Sans faussemodestie,elle décrit son nouveausitecom-me « le futur Facebook de la génomique ».On n’en est pas là, car DIY Genomics n’a pasencore de locaux. Mme Swan réunit sa petiteéquipe, une dizaine de bénévoles de tousâges, dans un café Starbucks près de l’uni-versité Stanford.

Pourtant, elle prépare déjà le lancementd’une vingtaine de projets de recherche. Lepremier,quiregroupe80volontairesrecru-tés sur la Toile, porte sur deux mutationsgénétiques qui, lorsqu’elles sont combi-nées, accroissent le risque de maladies car-dio-vasculaires, accélèrent le vieillisse-ment des cellules, et ont peut-être un lienavec la maladie d’Alzheimer.

Mme Swansaitqu’elle empiètesurlespré-rogatives traditionnelles de l’establish-ment médical, ce qui pourrait provoquerdes réactions hostiles, mais elle veut restersereine: «les chercheurs-citoyens ne sont enguerre contre personne, tout le monde estbienvenu, y compris bien sûr les médecins etleslaboratoiresquiveulentmenerdesrecher-ches originales en coopération avec despatients informés et actifs, par exemple sur

des maladies rares». Elle note que les méde-cinsde laSiliconValleycommencentàs’ha-bituer à voir des patients arriver dans leurcabinetavecdesdossierscontenantdesana-lyses génétiques réalisées via Internet.

A terme, l’ambition des « généticiens-citoyens » californiens est sans limite. Ilsrêvent d’inventer une nouvelle forme demédecine préventive « génomique », quipermettra de ralentir les mécanismes duvieillissement au niveau de la cellule, ycompris chez les personnes réputées bienportantes. Ils sont persuadés que, face àune perspective aussi exaltante, la peur depublier sur Internet ses données médicaleset génétiques personnelles, encore tenacedans le grand public, va s’estomper rapide-ment. Par ailleurs, le séquençage completd’un génome humain, qui coûtait300 000 dollars il y a deux ans, revientaujourd’huiàmoinsde20000dollars.Cer-tains prédisent que, compte tenu du ryth-medel’innovationdanscesecteur,ilcoûte-ra sans doute moins de 100 dollars dansquelques années: ce sera alors une simpleformalité.

Déjà, d’autres start-up préparent desapplications de «génomique personnelle»pour les smartphones comme l’iPhone oule BlackBerry: bientôt, chacun pourra char-ger l’intégralité de son code génétique surson téléphone mobile, le transporter par-tout avec soi et le partager à tout momentavec qui bon lui semble. p

Yves Eudes

D’AUTRES «CHERCHEURS CITOYENS » selancent carrément dans la création demédicaments génétiques, en court-circui-tant les grands laboratoires. Andrew Hes-sel, un biologiste canadien qui séjournesouvent dans la Silicon Valley, vient decréer grâce à Internet une entreprise coo-pérative baptisée Pink Army, qui va réunirdes femmes atteintes d’un cancer du seinet les aider à s’impliquer dans le combatcontre leur maladie

Auparavant, M.Hessel avait travaillépendant sept ans pour un grand labora-toire pharmaceutique: «Nous étions unebonne équipe, avec un gros budget. Et pour-tant, en sept ans, nous n’avons pas mis unseul nouveau médicament sur le marché –juste des variantes de médicaments exis-tants, pour prolonger les brevets. Nousétions prisonniers d’une stratégie juridico-financière.»

En réaction à son ancien milieu, M.Hes-sel a organisé sa coopérative en s’inspirantdu mouvement des logiciels libres: tousles résultats des recherches seront mis gra-tuitement à la disposition de la commu-nauté des chercheurs – y compris les labo-ratoires privés. Pink Army mise sur les pro-grès incessants de la biologie synthétiqueet de la virothérapie pour concevoir des

traitements personnalisés : «Chaque can-cer est unique. Nous allons donc le combat-tre avec des médicaments fabriqués surmesure, en fonction des caractéristiquesgénétiques de chaque patiente.» De ce fait,il sera impossible de réaliser des tests surd’autres volontaires: chaque patiente serason propre cobaye et assumera les risquesen connaissance de cause – ce qui devraitsimplifier les formalités administratives.

Pink Army, qui compte à ce jour400membres, n’est pas riche, mais, pourM.Hessel, ce n’est pas un problème: «Labiologie synthétique est devenue bon mar-ché. Si je veux fabriquer un virus artificielcapable de tuer les cellules cancéreusesd’une patiente, je vais écrire son code géné-tique sur ordinateur, puis je vais l’envoyerà un labo spécialisé. Une semaine plus tard,je recevrai mon virus par la poste dans untube. Si son génome comporte 6000 pairesde base, ça me coûtera 3000dollars.»

M.Hessel s’attend à des réactions de lapart des milieux pharmaceutiques, maisse dit prêt à les affronter: «Nous resteronsen dehors du circuit commercial, et nousn’utiliserons pas de produits ni de techni-ques brevetés. Je ne vois pas comment onpourra nous attaquer.» p

Y. E.

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Le génome humain représente un fichier de 3 gigaoctets, soit nettement plus petit qu’un film numérisé sur DVD. LAGUNA DESIGN/SPL/PHANIE

EnCalifornie, Internetfavorise le développement du phénomènedes«chercheurs-citoyens»bénévoles dont l’ambition est sans limites

Généticiensautodidactes

Des traitementspersonnalisés

Pagetrois0123Jeudi 12 août 2010

Page 4: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Ledéveloppement à lachinoise,responsable de lacoulée deboue de Zhouqu?

D es pluies torrentielles liéesà la mousson asiatiquecontinuent de s’abattre sur

le Pakistan et les pays voisins, cau-sant des inondations meurtrières.Jean-Maurice Ripert, l’envoyé spé-cial de l’ONU pour l’aide au Pakis-tan, appelle la communauté inter-nationale à « agir vite, massive-ment et dans la durée ».

Le diplomate français, contactépar téléphone à Islamabad, espèreque les talibans « ne profiterontpas des circonstances pour mar-quer des points ».Etes-vous d’accord lorsquel’ONU affirme que les inonda-tions au Pakistan sont pires quele tsunami de 2004?

C’est une catastrophe d’uneimmense ampleur. Le nombre devictimes, probablement entre1 500 et 2 000, n’est pas compara-ble au tsunami [220 000 morts enAsie]. Mais ce qui est insupporta-ble pour le Pakistan, c’est le nom-bre de personnes affectées, près de15millions, l’ampleur des surfacesagricoles touchées, et les consé-quences économiques et sociales,qui se feront sentir pendant desannées. C’est le pire désastre natu-rel que le pays ait connu.Quelle est la première urgencepour l’ONU?

Il faut d’abord fournir de l’aidealimentaire aux 6 millions de per-sonnes qui en ont besoin. Il fautaussi des abris : des tentes, desbâches. Nous sommes à peine à lamoitié de la mousson ! La troisiè-me urgence est sanitaire. L’eau sta-gnanteproduitdesrisquesd’épidé-miesconsidérables, comme le cho-léra. On entre en plus dans le moisdu ramadan, et ne pas boire dulever au coucher du soleil peutaggravercertainesinfectionsintes-tinales. Il faut aussi aider les fem-mes qui vont accoucher dans desconditions dangereuses.

On a besoin de tout : généra-teurs,pompesàeau, tentes, nourri-tures, latrines, vaccins contre lesserpents ou les scorpions…

Vous redoutez aussi une deuxiè-me catastrophe humanitaire?

Il faut déjà travailler à la recons-truction. Les gens vont devoir ren-trer chez eux. La récolte d’été a étéperdue et, si on ne plante pas dansde bonnes conditions à l’automne,la catastrophe durera des mois. Ilfaut remettre en état le systèmed’irrigation, nettoyer, réparer…Des centaines de kilomètres deroutes ont disparu, et 67 ponts ontété détruits dans le Nord-Ouest.L’ONU a-t-elle les moyens de fai-re face?

L’ONU s’est mobilisée tout desuite, parce qu’elle était présentedans le Nord-Ouest pour s’occuper

de 3 millions de personnes dépla-cées en 2009 par les opérations del’armée contre les talibans. Nousavons utilisé nos stocks de nourri-ture, de tentes, de vaccins. Nousavons aussi reçu des dons pourprès de 100 millions de dollars[76,6 millions d’euros]. Mais toutcela ne suffira pas, c’est pourquoinous allons lancer un appel à l’aidehumanitaire.Le gouvernement a-t-il été à lahauteur?

Quel gouvernement aurait étécapable de répondre de manièresatisfaisante à des inondations quiont mis 15 millions de personnessur les routes en dix jours ? L’ar-

mée a évacué des dizaines de mil-liers de personnes. L’ONU inter-vient en appui. Nous nous inté-grons à un plan d’ensemble quiexiste plus ou moins. Les réponsessont un peu désordonnées pourl’instant, mais c’est assez normal.Le Pakistan était-il préparé?

Selon les experts, personne nepouvait se préparer à une catastro-phedecette ampleur.Mais le Pakis-tan, comme toute l’Asie du Sud, estconfronté à davantage de catastro-phes naturelles,et sa capacitéd’an-ticipation et de réponse n’est pas àla hauteur.La population semble très criti-que à l’égard des autorités…

On ne fait jamais assez pour despersonnes en détresse. Beaucoupde gens se sont sentis abandonnés,même si c’est moins vrai aujour-d’hui. Mais au début, la plupart deszones touchées n’étaient accessi-blesqu’enhélicoptère.DansleKhy-ber Pakhtunkhwa (nord), la régionla plus pauvre et la plus touchée,l’armée a mobilisé, avec l’aide desEtats-Unis, des hélicoptères, maiscela n’a pas suffi, et il a fallu réhabi-liter les sentiers muletiers. Le défilogistique est considérable.La presse rapporte que les ONGislamiques, parfois liées auxinsurgés, sont beaucoup plusvisibles que le gouvernement…

Je ne sais pas. Il y a énormémentd’ONG locales dans les villages quifont un travail exceptionnel.L’ONU travaille avec toutes lesONG enregistrées auprès du gou-vernement et qui respectent lesprincipes de l’action humanitaire:impartialité, neutralité, indépen-dance. Mais il est vrai que nousespérons tous que les militants neprofiteront pas des circonstancespour marquer des points.Faites-vous face à un grave pro-blème d’insécurité?

C’est un problème récurrent auPakistan. En 2009, l’ONU a eu dou-ze morts et douze blessés graves. Ily a une insécurité généralisée. Celaétant, les zones auxquelles nousavons accès n’ont cessé de s’accroî-

tre, et nous pouvons aller presquepartout, dans des conditions desécurité qui restent à déterminer.Depuis les inondations, nousn’avons pas reçu de menaces parti-culières visant l’ONU, mais nousfaisons très attention, et je salue lecourage des humanitaires.Cette catastrophe pourrait-ellerenforcer les talibans et Al-Qaida?

La misère du peuple peut tou-jours être exploitée par des gensqui ont des objectifs politiques oumilitants. Pour nous, l’essentielest d’aider les autorités du Pakis-tan à travailler ensemble, à fixerles priorités et à les mettre enœuvre. C’est la meilleure réponseà apporter à ceux qui veulent utili-ser la catastrophe à d’autres fins.p

Propos recueillis par

Philippe Bolopion

(New York, Nations unies)

«Le pire désastrenaturel que le Pakistanait connu»Jean-Maurice Ripert, l’envoyé spécial de l’ONU, souligne l’urgence de l’aide aux régions inondées du pays

PlanantidésertificationLes Nations unies vont lancer une Décenniede lutte contre la désertification lorsde la 2e conférence internationale sur le climat,la durabilité et le développement durabledans les régions semi-arides, qui s’ouvrele 16 août, à Fortaleza, dans le Nordeste, au Brésil.

Versl’exploitation desressourcesgéothermiques profondesL’Académiedessciences fait le point,dans ses

Comptesrendus, surl’utilisation dela chaleur descouchesprofondes de la Terre,à partir del’expériencealsacienne.Editions Académie des sciences/Elsevier Masson, 192 p., 54 euros (en anglais)

Trois Français portésdisparus dans le Ladakh

L’Organisationmondiale dela santé décrètela fin de la pandémie de grippeA(H1N1)La liste des experts qui ont conseillé l’OMS est rendue publique. Certains déclarent avoir reçu des fonds de fabricants de vaccins et d’antiviraux

LA VILLE DE ZHOUQU, dans lesrégions tibétaines du sud de la pro-vince du Gansu, a été victime, le7 août, d’une coulée de boue géan-te qui a fait, à ce jour, 702morts etplus de 1 000 disparus. La surex-ploitation des ressources hydroé-lectriques, forestières et minièresest mise en cause.

Onze glissements de terrainmajeurs ont été comptabilisésdans la région depuis 1823. L’undeux a tué 87personnes enjuin1992. En outre, rappelle lequotidien 21 Century Herald, le

comté de Zhouqu, qui compte130000 habitants, avait été signa-lé comme dangereux lors d’uneenquête diligentée après le trem-blement de terre au Sichuan parle ministère des terres et des res-sources naturelles : « Nous avionsalors préconisé le déplacement [dusiège du comté] », a expliqué unofficiel au quotidien Du Tao. Uneopération jugée trop coûteuse.

La poétesse et bloggeuse tibé-taine Tsering Woeser a lancé unappel sur Twitter à rechercher lesdonnées relatives aux dégâts pro-

voqués sur l’écosystème par la fré-nésie de développement chinoise.Les résultats mis en ligne sontrévélateurs: « Les montagnes sontdevenues extrêmement instableset très facilement sujettes à desdésastres naturels tels que les glis-sements de terrain et les coulées deboue. Cette situation est le résultatde la déforestation, des activitésd’exploitation minière, de laconstruction de barrages hydroé-lectriques et d’autres activitéshumaines», relate ainsi un rap-port de l’université de Lanzhou

(capitale du Gansu) en 2006.Alors que la déforestation

intense entre les années 1960 et1990 est aujourd’hui plus stricte-ment contrôlée, 41 projets de sta-tions hydroélectriques ont été lan-cés à Zhouqu depuis 2003, et dou-ze autres barrages sont prévus.Selon Fan Xiao, ingénieur en chefdu Bureau de géologie et des miné-raux du Sichuan, on compte plusde 1 000 barrages sur le courssupérieur du fleuve Bailong. S’ilsn’ont pas directement contribuéau désastre, provoqué par des

pluies torrentielles et une topogra-phie favorable, ils l’ont aggravé :« Le terrain descendu de la monta-gne a atteint deux affluents déjàen crue du Bailong. La boue a étécharriée jusqu’au cours principaldu fleuve. Or celui-ci avait un fluxralenti à cause des barrages, quien principe régulent les inonda-tions. Mais ça s’est passé trop vite,ils étaient presque remplis. Cetenchaînement a été catastrophi-que», dit-il. p

Brice Pedroletti

Pékin, correspondant

BP:colmatage retardéLe forage des puits de secours devant mettre unterme à la marée noire dans le golfe du Mexiquea été suspendu pour plusieurs jours, en raisonde l’arrivée d’une tempête. La base du puitsendommagé, d’où ont fui 780 millions de litresde pétrole, doit être cimentée.

Planète

«Lamisère dupeuplepeuttoujours êtreexploitéepar des gensquiontdes objectifspolitiquesoumilitants»

Selon un responsable gouverne-mental indien, cinq touristeseuropéens, dont trois Français,figurent parmi les 177 personnesmortes dans les inondationsdues aux pluies de mousson quiont frappé ces derniers jours larégion himalayenne du Ladakh,dans le nord de l’Inde.Le Quai d’Orsay a confirmé, mar-di 10août, que les trois trek-keurs français étaient portés dis-parus et que des recherchesétaient «menées en collabora-tion avec l’armée indienne» pourles localiser. – (AFP.)

C ette fois, c’est officiel : lapan-démie 2009-2010 due aunouveau virus grippal

A(H1N1) est terminée. La directricegénérale de l’Organisation mon-diale de la santé (OMS), le docteurMargaret Chan, l’a annoncé mar-di 10 août, suivant l’avis du Comitéd’urgence réuni le matin même àGenève. L’OMS a aussi mis enligne, mercredi 11 août, la liste des16 membres de ce comité et ladéclaration d’intérêts faite par sixd’entre eux.

Jusqu’ici, seul le nom du prési-dentde ce Comitéd’urgence, l’Aus-tralien John McKenzie, avait été

rendu public. Ce qui alimentait lescritiquessur lemanquedetranspa-rence de l’OMS.

Aucun expert français ne figuresur la liste. Parmi les six membresayant effectué une déclarationd’intérêt, certainsdirigent des cen-tres de recherche ayant reçu desfonds de l’industrie pharmaceuti-que. L’OMS a cependant estiméqu’il n’y avait pas de conflit d’inté-rêts tels que les six expertsauraient dû s’abstenir de partici-per aux travaux du Comité .

Le dossier du professeur ArnoldMonto (Université du Michigan),déjà épinglé en juin par le British

Medical Journal, apparaît pour-tant copieux. Il a déclaré des activi-tés de consultant, passées et pré-sentes, pour un montant n’excé-dant pas à chaque fois 10 000 dol-lars (7 660 euros), auprès des labo-ratoires GSK, Novartis, Roche, Bax-ter et Sanofi. Soit les quatre princi-paux fabricants de vaccins, maisaussi les deux producteurs d’anti-viraux (Roche et GSK).

Concernant la gestion de la pan-démie, le docteur Chan estime que« nous avons eu beaucoup de chan-ce ». La directrice générale a invitéles Etats à maintenir leur vigilance.«Le nouveau virus H1N1 a pratique-

ment cessé de sévir, a-t-elle indi-qué.Cela ne signifie pas qu’il a com-plètementdisparu.» Ildevraitadop-ter « le comportement d’un virusgrippal saisonnier et [continuer] decirculer quelques années encore ».

18 500 décèsDepuis son début en avril 2009,

la pandémie a fait au total18 500 décès, selon l’OMS – contre250000 à 500 000 attibuées cha-que années à la grippe saisonnière.Mais pour le virus A(H1N1), il s’agitde morts confirmées en labora-toire, une procédure inédite quis’appliquera à l’avenir, a précisé le

docteur Keiji Fukuda, conseillerspécial de Mme Chan. « De 20 à 40 %des populations de certainesrégions ont été infectés par le virusH1N1 et ont donc acquis un certaindegré d’immunité protectrice.»

Pour Mme Chan, l’OMS n’a passurréagi, comme il lui en a parfoisété fait le reproche. L’institution aété «constante dans ses messages»,indiquant que « la pandémie avaitune sévérité modérée et [QUE\]laplupartdespersonnestouchéesgué-riraient, mais qu’il existait des for-mes graves chez les jeunes adulteset les femmes enceintes ». Mme Chana estimé que son organisation

avait trouvé «le bon équilibre». Ellea toutefois tiré quelques leçonsplus critiques. La période postpan-démique doit inciter les Etats toutcomme l’OMS à « revoir leurs plansde réponse ». « Il faudra peut-êtreplus de flexibilité, avec des scéna-rios optimistes, intermédiaires etpessimistes», a-t-elle déclaré.

Dans la perspective d’une futu-re pandémie, il faut aussi « exami-ner les phases, y compris la sévéri-té ». L’OMS a été fortement criti-quée en 2009 pour avoir suppriméce critère dans la définition d’unepandémie. p

Paul Benkimoun

I R A N

I N D E

C H I N E

TERRITOIRESDU NORD-OUEST

A F G H A N I S T A N

P A K I S T A N

JAMMU-ET-CACHEMIRE

Sutlej

Jhelum

Chenab

Kaboul

Islamabad

Peshawar

Quetta

KarachiHyderabad

In

dus

Mer d’Oman

Indus

Indus

200 km

Zones gravement touchées par les inondations

Zones touchées

Zones touchées prochainement

Barrages sur l’Indus

Près de 15 millions de personnes affectées

SOURCE : OCHA - DONNÉES AU 9 AOÛT 20102010(9 août)

2000199019801973

Nombrede personnes touchées

par les inondations

13,8 millions 15

10

5

0

4 0123Jeudi 12 août 2010

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50123Jeudi 12 août 2010

Rio de JaneiroCorrespondant régional

L a Colombie et le Venezuelaont rétabli, mardi 10 août,leursrelationsdiplomatiques,

rompuesunilatéralementparCara-casle22juillet.Unedécisionannon-céeparlenouveauprésidentcolom-bien Juan Manuel Santos et sonhomologuevénézuélienHugoCha-vez,autermed’unerencontreàSan-ta Marta, en Colombie.

M.Santos a accueilli son visiteurdans une résidence historique, ladernière demeure de Simon Boli-var, héros de l’indépendance desdeux pays. L’ancien présidentcolombien Andrés Pastrana(1998-2002) avait prié pour quel’âme du Libertador « éclaire l’es-prit» des deux chefs d’Etat. Il a étéentendu. Le rendez-vous de SantaMarta a donné lieu à un assautmutuel d’amabilités. M. Chavez aexpriméson«amour éternel»pourla Colombie et son « amitié », son«affection» et sa «tendresse» à sonhôte. M.Santos a multiplié les ges-tes d’attention protocolaires àl’adresse de M.Chavez.

Outrelanormalisationdiploma-tique « sur la base d’un dialoguetransparent », M. Chavez a assuréque son gouvernement « ne sou-tient et ne soutiendra pas (…) ni nepermettra la présence [sur sonterritoire] de guérillas ni du narco-trafic».M.SantosapréciséqueCara-cas avait accepté de rembourser sesdettes aux exportateurs colom-biens, soit environ 800 millions dedollars (610millions d’euros).

Les deux pays reviennent deloin. Leur dernier contact au som-met remonte à avril 2009. Enjuillet 2009, Bogota annonce unaccord, qui sera formellementsignéle30 octobre,selonlequell’ar-mée américaine pourra faire usagede sept bases en Colombie pour lut-ter « contre le trafic de drogue et leterrorisme».M.Chavezdécideaussi-

tôt de geler ses relations diplomati-ques avec Bogota, puis les échangescommerciaux. En novembre, ilannonce son intention de déployer15 000 militaires à la frontière, etpromet de répondre à toute atta-que par «une guerre de cent ans».

On en était là lorsque, le 22juillet2010, avant de tirer sa révérence,Alvaro Uribe met une dernière foisles points sur les «i».Son représen-tant auprès de l’Organisation desEtats américains (OEA) présentedes « preuves » (photos, imagessatellite, coordonnées GPS) de laprésence «active» au Venezuela dequelque 1 500 guérilleros des For-ces armées révolutionnaires deColombie (FARC).

M.Chavez riposte en décrétant –mesure inédite – la rupture de sesrelations avec Bogota, suivie dudéploiement d’unités à la frontière,

et en maniant l’ironie : « Nousavons effectué un vol à la recherchedes endroits indiqués. Il y a unrocher.J’aiditauxcamaradesdesou-leverlerocher,ilyapeut-êtreuntun-nel en dessous.»

Aufil desans, labrouilleentrelesdeux voisins s’était personnalisée.Jusqu’au bout, les échanges ver-baux entre MM. Chavez et Uribesont restés acerbes. Ce dernier avaittout juste quitté le pouvoir queM.Chavez le qualifiait à nouveau

de«laquaisdesAméricains».M.Uri-be s’est dit prêt à témoigner contreM. Chavez devant la Cour pénaleinternationale(CPI),sicelle-ciaccep-tait une plainte des victimes de laguérilla des FARC.

Entre MM. Chavez et Santos, lecontentieux est moins lourd. LeColombien était ministre de ladéfense lorsque son armée lança,en mars2008, un raid en territoireéquatorien qui provoqua la mortde Raul Reyes, numéro 2 des FARC.M. Chavez lui décocha alors quel-ques saillies: « fauteur de guerre »,«pion de l’empire yankee».

M. Santos est aussi celui qui anégociél’accordsurlesbasesaméri-caines.Pendantlacampagneélecto-rale colombienne, M. Chavez avait«prié Dieu» pour qu’il « illumine lepeuple » et le dissuade de voterpour M. Santos. Mais le peuple a

choisi ce dernier, élu le 20juin der-nier avec 69% des suffrages. Ce quiimporte aujourd’hui, c’est l’appa-rente volonté des deux parties detourner la page. A peine arrivé aupouvoir, M.Santos a fait ce qu’il fal-lait pour rendre possible cette nou-velle ère. Il a proposé, comme«objectif fondamental», un «dialo-

gue franc et direct» aux gouverne-ments vénézuélien et équatorien.

Pragmatique, fort de sa légitimi-té toute neuve, et soucieux de mar-quer sa différence de style, sinond’objectifs, avec son prédécesseur,il estime n’avoir rien à perdre enmanifestantson ouverture.Et juge-ra M.Chavez sur ses actes.

Ce dernier a également donnéquelques signes de bonne volonté,en n’évoquant plus en public lecontentieux des bases américaines,et en appelant ànouveau les FARC àdéposer les armes et à libérer leursotages, comme il l’avait déjà fait enjuin2008. Si M.Chavez voulait unefois pour toutes chasser les soup-çons sur ses liens avec la narco-guérilla, il pourrait, par exemple,autoriser des délégués de pays«amis » (Argentine, Brésil, Bolivieou Equateur) à se rendre dans leszones qui, selon Bogota, abritentdes camps des FARC.

Pareille initiative pourrait êtreparrainée par l’Unasur, l’organisa-tion régionale chaperonnée par leBrésil.Lesecrétairegénéraldel’Una-sur, l’ex-président argentin NestorKirchner, était présent à Santa Mar-ta. Au lendemain de cette nouvelleréconciliation, la balle est plutôtdans le camp vénézuélien. p

Jean-Pierre Langellier

Enjuillet, laColombierévélait laprésence«active » au Venezuelade1 500 guérillerosdesFARC

400 km

OCÉANPACIFIQUE

OCÉANATLANT.

Mer des Caraïbes

Présence supposéedes FARC en 2009Bases militaires

SOURCE : GRAPHIC NEWS PÉROU

BRÉSIL

GUYANA

É Q UAT E U R

V E N E Z U E L APANAMACOSTA RICA

Bogota

Caracas

Quito

CO LOMB I E

Santa Marta

Rétablissementdes relations entre Bogota etCaracasLe président colombien Santos et son homologue vénézuélien Chavez se sont rencontrés pour régler leur différend

Unanderupture aux conséquenceséconomiques importantes

International

Le président colombien, Juan Manuel Santos, et le président vénézuelien, Hugo Chavez,à Santa Marta, en Colombie, le 10 août. RODRIGO ARANGUA/AFP

Rio de JaneiroCorrespondant régional

La réconciliation entre la Colom-bie et le Venezuela est aussi unehistoire de gros sous, à la mesurede leur interdépendance économi-que. Les deux voisins sont, l’unpour l’autre, deuxième partenairecommercial. Jusqu’en 2009, laColombie était le deuxième four-nisseur du Venezuela, après lesEtats-Unis, assurant 13,5 % desimportations de ce dernier.

Ces échanges, largement enfaveur de Bogota, ont été rude-ment affectés par la décision deM.Chavez, annoncée le 28 juillet2009, de geler le commerce bilaté-ral pour protester contre l’accordmilitaire américano-colombien.

Le Venezuela avait égalementdécidé de ne pas renouveler unaccord pétrolier sur la livraisonde carburant à la Colombie à destarifs préférentiels : – 40 % duprix du marché. Au terme de cetarrangement, qui visait à réduirela contrebande, deux départe-ments frontaliers colombiensrecevaient 17 millions de litresd’essence par mois.

Au total, les échanges s’éle-vaient en 2008 à 7,2 milliards dedollars (5,5milliards d’euros),dont 6 milliards représentaientles exportations colombiennes.Ils n’étaient plus, en 2009, que de2milliards et devraient diminuerencore de moitié en 2010.

C’est un sérieux manque àgagner pour la Colombie, qui avait

d’emblée dénoncé ce qu’elle tientpour un «embargo commercial illé-gal et injuste», comparable, selonelle, à celui imposé à Cuba. Bogotavendait à Caracas la quasi-totalitéde ses exportations de viande et decuir, mais aussi des produits indus-trialisés: automobiles, textiles,équipement électronique.

Pénuries alimentairesLes quatrecinquièmes du com-

merce transitaient par la route demontagne qui relie la Colombie àSan Cristobal, capitale de l’Etatvénézuélien de Tachira. La frontiè-re est restée ouverte, mais unegrande partie des 30 000 Colom-biens qui la franchissaient chaquejour ont renoncé à le faire, de crain-te de voir leurs marchandises

confisquées par la garde nationalevénézuélienne. Le transport rou-tier a été réduit drastiquement.

La Colombie évalue à 750 000le nombre d’emplois détruits parle gel du commerce dans les sec-teurs du transport et de l’agroali-mentaire. Elle estime que la chutede ses exportations vers leVenezuela lui coûtera en 2010 aumoins 0,5 % de son produit inté-rieur brut (PIB).

Pour remplacer la Colombie,Hugo Chavez s’est tourné vers l’Ar-gentine, avec laquelle il a signérapidement des accords commer-ciaux portant notamment surl’importation de médicaments, deriz, de 2 millions de paires dechaussures et des 10 000 automo-biles achetées auparavant chaque

année à son voisin. Le Brésil a éga-lement élargi sa part d’échangesavec le Venezuela. Bogota a dénon-cé « le manque de solidarité » deces deux pays.

Le rapprochement Bogota-Cara-cas n’entraînera pas de sitôt unretour des échanges à leur niveauantérieur, du fait de la grave criseéconomique et financière danslaquelle se débat le régime deHugo Chavez: récession persistan-te (– 3%), effondrement des reve-nus pétroliers, inflation supérieureà 30%, manque de devises, pénu-ries alimentaires, restrictions dansl’approvisionnement en énergie.Quoi qu’il en soit, on n’imagine pasune réconciliation politique sansnormalisation commerciale.p

J.-P. L.

MexicoCorrespondance

N i uno mas ! (“pas un deplus”)», ont scandé près demille journalistes qui ont

défilé il y a quelques jours àMexico, pour dénoncer les violen-ces des cartels de la drogue. « Ondemande justicepour noscollèguesassassinés ou disparus», a déclaré àla foule Elia Baltazar, reporter auquotidien Excelsior et organisatri-ce de cette marche, suivie par unedizaine de villes mexicaines. Unemobilisation inédite alors que desobservateurs internationauxmènent, depuis lundi 9 août, unemission d’enquête sur la libertéd’expression au Mexique, pays leplus dangereux du continent pour

l’exercice du journalisme. En dixans, 64 professionnels mexicainsont été tués et 12 ont disparu, selonlaCommissionnationaledesdroitsde l’homme. Près de la moitiédepuis fin 2006, lorsque le prési-dent Felipe Calderon a déclaré laguerre au crime organisé. Sanscompter la recrudescence des atta-quesàl’armelourdeouàlagrenadecontre des rédactions (trois en2009, six en 2010). « L’Etat mexi-caindoitgarantirlalibertéd’expres-sionetl’exercicedudroitàl’informa-tion», réclame le document remispar les manifestants aux autorités.

Les journalistes de Ciudad Jua-rez, à la frontière avec les Etats-Unis, sont les plus exposés. «Mena-cés, certains portent des gilets pare-balles », souligne Raul Lechuga,

rédacteur en chef d’El Diario deChihuahua. Dans cette ville, deve-nue la plus meurtrière du pays,14professionnelsontétéassassinésdepuis2000 et 29attaquésces qua-torze derniers mois. Au point queles compagnies locales refusent designer avec les reporters descontrats d’assurance-vie. « Cettesituation pousse à l’autocensure.On ne fait plus d’enquête d’investi-gationsur le narcotrafic », peste-t-il.

Gros calibresMêmepsychosechez les journa-

listes de l’Etat de Sinaloa (nord-ouest), haut lieu de la lutte entreles cartels pour le contrôle du mar-ché: « Il faut se déplacer en groupeet changer d’itinéraire pour éviterd’être pris pour cible », confie Jorge

Inzunza, photographe au quoti-dien El Sol de Sinaloa, qui désespè-re de voir la fin de la terreur.

La « marche » des journalistesfait suite à l’enlèvement, le26 juillet, dans l’Etat de Durango(nord-ouest), de quatre reporters etcameramen de Televisa, premiergroupe mondial d’audiovisuel his-panophone,etdelachaînenationa-le Milenio, tous libérés depuis. « Lesravisseurs exigeaient la diffusiond’un message. Ils sont parvenus àleurs fins, regrette Jorge Perez,rédacteur en chef du quotidien ElSiglo de Durango. Les cartels cher-chentàinfluencer lapopulationparnotre intermédiaire. Il faut mettrefin à leur impunité.»

C’est une des principales reven-dications des journalistes. « Il y a

un manque de volonté politiquepour lutter contre la corruption despoliciers, des maires ou des juges,qui étouffent la plupart des affai-res », dénonce Armando Prida, pré-sidentdela Fondationpourla liber-té d’expression au Mexique.

Pourtant, le gouvernement acréé depuis quatre ans le poste deprocureur chargé de la protectiondes journalistes. « Son inefficacitéest flagrante,déplore-t-il. Sans par-ler du projet de loi, proposant queles attaques contre les journalistessoient élevées au rang de crimefédéral. Son vote est bloqué au Par-lement depuis des mois. »

Alertés, des représentants desNations unies et de l’Organisationdes Etats américains mènentdepuis lundi une enquête conjoin-

te sur l’ampleur de la crise, auprèsdes médias, des autorités et de lasociété civile. Leurs conclusionssont attendues pour le 24août.

Mais dans l’attente de mesuresconcrètes, les dirigeants des orga-nes de presse les plus touchés s’ap-prêtent à instaurer leur propre« protocole de sécurité des journa-listes ». Inspiré des standards descorrespondants de guerre, cemanuel commun prévoit le portd’un gilet pare-balles, voire d’uncasque, et conseille de ne pass’avancer sur la scène d’un crimeavant l’arrivée des autorités.« Mais que valent ces précautionsface aux gros calibres des narcotra-fiquants? »,s’interrogeRaul Lechu-ga d’El Diario de Chihuahua.p

Frédéric Saliba

Lesjournalistesmexicainsenappellentàlaprotectiondel’EtatcontrelesnarcotraficantsLe pays est devenu l’un des plus dangereux pour la presse. L’ONU et l’Organisation des Etats américains ont ouvert une enquête conjointe

Page 6: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Le centre commercial Nasdaq, l’une des premières constructions modernes de la ville d’Erbil,au Kurdistan irakien, où les projets architecturaux se multiplient. JULIEN GOLDSTEIN/MYOP

Reportage

Erbil (Kurdistan irakien)Envoyé spécial

C ’est l’une des pistes d’atterris-sage les plus longues du mon-de, avec ses 4,8 km. Deux

avions peuvent atterrir en mêmetemps, face à face, sans se rencon-trer », montre Cetin Dayioglu, enécrasant la pédale d’accélérateur deson 4×4 sur le tarmac lisse commeunbillard.Ledirecteurdelacompa-gnieturquedetravauxpublicsMak-Yol, responsable de la constructiondunouvelaéroportd’Erbil, lacapita-le du Kurdistan d’Irak, fait visiterson joyau : les installations « lesplus modernes du Moyen-Orient »,un terminal capable d’accueillir2,5 millions de passagers par an.«Au mieux, il en accueillera un mil-lion,maisici onaime faire les chosesen grand», sourit le patron turc.

Repoussée à plusieurs reprisesdepuis plus d’un an, l’inaugura-tion de ce nouvel aéroport interna-tional, symbole de la nouvelleentente cordiale entre la Turquieet la région kurde d’Irak, devraitavoirlieuen septembre; enprésen-ce du premier ministre turc, RecepTayyip Erdogan, espère le gouver-nement kurde d’Erbil.

Longtempsentravéspardesrela-tionspolitiquesdélicates, leséchan-ges commerciaux entre Ankara etErbil connaissent des taux de crois-sance record. Près de 60 % des1200 sociétés étrangères installéesau Kurdistan irakien sont turques.

Signedecetafflux,lacompagnienationale Turkish Airlines vaouvrir des liaisons quotidiennesavec Istanbul et Ankara. Au postefrontière terrestre de Habur, lenombre de douaniers va être triplépour accélérer le transit descamions, qui font entrer chaquejourdesmilliersdetonnesdematé-riauxde constructionetde biensdeconsommation. « Les compagniesturques ont compris avant lesautres que la zone est sûre et pleined’opportunités : centrales, routes,raffineries, pipelines, tout est àconstruire, et il y a de l’argent », pré-

cise M. Dayioglu, dont l’entreprisevient également d’achever la réno-vation de la route d’Erbil à Kirkouk,un nœud pétrolier stratégique.

« Nos hommes d’affaires sontplus intrépides que les vôtres »,s’amuse Aydin Selcen, le consulgénéral de Turquie pour la régionkurde, fraîchement nommé.« Quand le ministre des affairesétrangères, Ahmet Davutoglu, estvenu à Erbil en octobre 2009, il adéclaré que la frontière entrela Tur-quie et l’Irak devait être rendueobsolètepar l’intégration économi-que des deux pays », poursuit lediplomate.

En juin, le ministre turc du com-merce extérieur, Zafer Caglayan,s’est rendu à Erbil avec 200 hom-mesd’affaires.L’Irakestdéjàle qua-trième partenaire commercial,avec 7,5 milliards d’euros, dont4,5milliardsd’échangesaveclaseu-le région kurde. Trois banques, sixcompagnies pétrolières s’apprê-tent à investir. Une zone francheest en projet, à la frontière. Lesentreprises de BTP bâtissent à lachaîne des lotissements, des

hôtels, des centres commerciauxremplis de produits turcs, et plusde 80 % des matériaux sont ache-minés de Turquie. Sur des kilomè-tres les camions de ciment atten-dent aux postes de douane.

Pourtant, la simple existenced’unereprésentation officielletur-que à Erbil aurait paru impossibleily a moins detrois ans.Pour Anka-ra, la présence de centaines de

rebelles du Parti des travailleursdu Kurdistan (PKK) dans les mon-tagnesdu nord de l’Irak et la coopé-ration jugée « insuffisante» d’Erbilfaisaient encore obstacle.

Mais la diplomatie de bon voisi-nageduministre desaffairesétran-gères a accéléré le rapprochement.La visite en Turquie du présidentde la région autonome kurde, Mas-soud Barzani, en juin, a confirmé lecheminparcouru.« Ilyaunecoopé-ration sur les dossiers de sécuritéavec les Etats-Unis, l’Irak et le gou-vernement régional kurde», confir-meM. Selcen.L’arméeturque bom-barde régulièrement les repairesdu PKK au-delà de sa frontière. «Deplus, nous avons besoin du gaz etdu pétrole irakiens pour alimenterle développement rapide de notrepays », poursuit-il. Les Kurdesd’Irak, qui veulent exporter leurspropres ressources vers la Turquie,prévoient de multiplier leur pro-duction par dix d’ici cinq ans.

Pour reconquérir cette ancienneprovince de l’Empire ottoman, les

Turcs misent sur leurs hommesd’affairesetinvestissentdansl’édu-cation, réactivant de solidesréseaux.Dix-neufécolesetuneuni-versité ont été ouvertes dans larégion par la communauté deFethullah Gülen, un imam turc à latête d’un réseau d’écoles dans lemonde entier. L’université Bilkentd’Ankara, fondée par Ihsan Dogra-maci, unmédecin et puissant hom-me d’affaires turc décédé enfévrier,originairedelacommunau-té turkmène d’Erbil, va égalementinaugurerune antenneà la rentrée.Le géant du bâtiment appartenantau même groupe familial, Tepe,reconstruitlesuniversitésdeSuley-manieh et d’Erbil.

La Turquie voisine «est une por-te ouverte sur l’Ouest et la civilisa-tionoccidentale»,estimeSinanCha-labi, le ministre du commerce et del’industriede larégion kurde. Nom-méàcepostecléparMassoudBarza-ni, M.Chalabi est un Turkmène lié àla Turquie et à l’influente familleDogramaci. « Un Turc pour parleraux Turcs», commente-t-on à Erbil.

Ankara mène « une diplomatied’influence commerciale envahis-sante, analyse un expert de larégion. Ils sont en train de construi-re un Irak à leur convenance.» L’ap-pétit turc ne se limite d’ailleurspas au Nord. « Nous voulons êtreprésents partout, coopérer avectout le monde », assène le consulturc d’Erbil. A Mossoul, à Bagdad,où les négociations pour la forma-tion d’un nouveau gouvernementsont attentivement suivies, maisaussi à Bassora, dans le Sud chiite,où ellea ouvert un consulat, la Tur-quie s’est lancée à la conquête denouveaux marchés.p

Guillaume Perrier

MoscouCorrespondance

I l y avait déjà quelques joursque Vladimir Poutine n’avaitpas effectué une de ces sorties

médiatiquesdont il estfriand.Mar-di 10 août, le premier ministre rus-se a participé, en tant que copilote,à un vol dans un avion bombar-dier d’eau, un Beriev 200, qui arécupéré à deux reprises 12 tonnesd’eau à la surface d’une rivièreavant de les disperser sur les forêtsen feu, dans la région de Riazan.

Le coup de main aura été profi-table : les autorités ont annoncé,mercredi 11 août, une diminutionde moitié de la superficie desforêts en feu. Les ressourceshumaines et matérielles du payssont, elles, limitées : la Russiecompte seulement 4 Beriev 200 et22 000 pompiers professionnels.A titre d’exemple, la France possè-de 16 bombardiers d’eau, et 25 000pompiers professionnels.

Mais malgré l’ampleur de lacatastrophe, les autorités russesaccueillent les propositions d’aidede l’étranger sans zèle. « Nousavons eu plusieurs offres [d’aideétrangère], nous les considéronscommeune réserve», affirmait lun-di Iouri Brajnikov, du ministèredes situations d’urgence (MTchS).

Dès les premiers feux, fin juillet,l’Allemagne était prête à offrir dumatériel. Paris, Rome et Ankara luiont emboîté le pas en proposantavions et hommes, tout comme lesvoisins ex-soviétiques – Ukraine,Biélorussie, Azerbaïdjan, Kazakhs-tan. Les Baltes ont suivi en propo-sant une aide technique.

Deux semaines plus tard, deuxcolonnes de pompiers ukrainiens,une polonaise, une bulgare et unearménienne se battent bien contreles flammes, mais les équipesouest-européennes sont toujoursplacées en attente. Dans les airs,deux avions italiens sont attendusdans la région de Samara, et unDash8français arroseles incendiesde Nijno-Novgorod. Des hélicoptè-res et des avions d’anciennes répu-

bliques soviétiques sont sur place.Mardi 10 août, deux groupes

d’experts, français et américains,étaient à Moscou pour discuteravec les autorités russes d’uneéventuelle coopération au sol.

Et pourtant, lourdeurs de labureaucratie aidant, ou crainte devoir des étrangers s’approcher desites sensibles comme des sitesnucléaires menacés par le feu, tou-te cette aide est « freinée ». On n’en-voie pas de pompiers occidentauxn’importe où, les traducteurs fontdéfaut et rien n’est mis en œuvrepour coordonner les efforts inter-nationaux.

Pas assez de moyensPour un diplomate européen

en poste à Moscou, les autoritésrusses«sont totalementdésorgani-sées, même si le MTchS reconnaîtque la situation est tragique. Levieux réflexe bureaucratique russe,très lourd, n’aide en rien : des équi-pes d’aide ont été programmées àtrois endroits différents avant de sevoir confirmer officiellement unemission», ajoute-t-il.

Des défenseurs des droits del’homme ont publié une lettreouverte adressée au présidentMedvedev dans laquelle ils implo-rent les autorités russes « dedemander une aide urgente » auxcapitales étrangères : « Le pays n’apas assez de moyens pour luttercontre le feu. »

Les sites stratégiquesà proximi-té deszones d’incendie posentéga-lement problème. La région deKolomna, près de Moscou, où lefeu fait rage, héberge des hangarsde l’aviation russe – déjà détruitspar les incendies –, ainsi qu’uncomplexe militaire impliqué dansla fabrication de missiles Iskender.Sarov et Snejinsk, également àproximité des flammes, sont descomplexes nucléaires.

Lundi, Iouri Brajnikov, duMTchS, a été très clair : impossibledelaisserdes équipes étrangèresdesecours manœuvrer à proximitédes endroits classés stratégiques.p

Alexandre Billette

Ankaramène « unediplomatied’influencecommercialeenvahissante»

GÉORGIE

T U R Q U I E

SYRIEI R A K

IRAN

AZERBAÏDJAN

AZ .

ARMÉNIE

Cisj. JORDANIE

L IBAN

ISRAËL

CHYPRE

MerMéditerranée

MerCaspienne

200 km

Gaziantep

Alep

Erzurum

MossoulSuleymanieh

Van

Habur

Ankara

BagdadDamas

Kirkouk

Zone de peuplement kurde Kurdistan irakien autonome

Erbil

Lepotentiel économique du Kurdistanirakienaiguise l’appétit de laTurquieAéroport, BTP, antenne d’université: Ankara pousse sa politique du «bon voisinage» avec Erbil

International

PékinCorrespondant

C ondamné à mort samedi7 août pour trafic et fabrica-tion de métamphétamines

par une cour de Canton, Chan ThaoPhoumy, un Français d’originechinoise né au Laos et emprisonnédepuis 2005, a fait appel de sacondamnation. Celle-ci doit enoutre être confirmée par la Coursuprême chinoise. M. Chan avaitdéjà été condamné à perpétuité en2007, après une opération antidro-gue qui s’était soldée en 2005 parl’arrestation de 85 suspects et ledémantèlementde16unitésdepro-ductiond’héroïneetdemétamphé-tamine (connue sous le nom decrystal ou ice) dans la province duGuangdong, au sud de la Chine.

La bande de huit personnes

dont il faisait partie s’était lancéedans laproduction de crystalàHui-zhou en 1999, puis ailleurs dans leGuangdong, ainsi que dans la pro-vince du Henan, selon la pressechinoise. De nouveaux crimesauraient été découverts, qui ontconduit à la condamnation àmort. Un résident de Hongkong,Chung Kwan Shing, décrit commele parrain de la bande, est toujoursen cavale.

M. Chan, qui parlerait mal lefrançais, a reçu la visite d’un repré-sentant du consulat, qui a assistéaux audiences du procès. Dans lapresse chinoise, l’homme est pré-senté comme étant né à Canton,mais, selon le consulat, « il n’y apas de doute sur le fait qu’il soitfrançais ». Le consulat général deFrance est « entièrement mobilisépour apporter toute l’assistance

consulaire nécessaire » à ce ressor-tissant français, a déclaré, lundi,lors d’un point de presse, la porte-parole adjointe du ministère desaffaires étrangères français, Chris-tine Fages, ajoutant : « La Francerappelle son engagement résolu enfaveur de l’abolition de la peine demort, en tous lieux et en toutes cir-constances.»

Tortures atrocesChan Thao Phoumy est le der-

nierd’unelistecroissantederessor-tissants étrangers condamnés à lapeine capitale pour production,trafic ou transport de stupéfiantsen Chine. Quatre Japonais ont étéexécutés en avril dans le Liaoning.Deux d’entre eux avaient été arrê-tés aux aéroports de Dalian et deShenyang alors qu’ils tentaientd’embarquer pour le Japon avec

plusieurs kilos de drogue. Endécembre2009, l’exécutionduBri-tannique Akmal Shaikh, accuséd’avoir fait passer 4 kg d’héroïneen Chine, avait soulevé un tollé enGrande-Bretagne : l’homme, quiarrivait du Tadjikistan, était consi-déré comme souffrant de problè-mes psychiatriques et aurait étédupé par des trafiquants qui luiavaient proposé de le faire partici-per à un concert en Chine.

La fiabilité des procédures judi-ciaires chinoises est un autre sujetde préoccupation : un avocatchinois, Zhu Mingyong, a défrayéla chronique en juillet en rendantpublic le témoignage filmé de sonclient, un membre supposé de lamafia de Chongqing, condamné àmort, sur les tortures atroces qu’ila subies en détention. p

Brice Pedroletti

LeFrançaiscondamné à mortà Cantonfait appelChan Thao Phoumy avait été arrêté pour son implication dans la fabrication de drogue synthétique

Etats-Unis

Mesuresd’austéritéauPentagoneWASHINGTON. Le Pentagone a annoncé, lundi 9août, une série de mesu-res visant à réduire ses coûts de fonctionnement titanesques, à commen-cer par une baisse de 10% du budget annuel consacré à ses sous-traitantset la suppression du Joint Forces Command, un commandement basé enVirginie. L’objectif est de dégager des économies mais aussi de réduire«la dépendance excessive» des forces armées à des services extérieursqui représentent désormais 39% de l’ensemble du personnel travaillantpour la défense américaine, a expliqué le secrétaire américain à la défen-se Robert Gates. Le Pentagone, qui envisage d’économiser 100 milliardsde dollars (75000 euros) en coûts de fonctionnement sur 5 ans, bénéficied’un budget 2011 en légère hausse à 700 milliards de dollars. – (AFP.) p

Guinée Second tour de l’élection présidentiellefixé au 19septembreCONAKRY. Les deux partis guinéens dont les candidats sont qualifiés ausecond tour de l’élection présidentielle en Guinée, ont exprimé, mardi10 août, leur satisfaction sur le choix de la date du scrutin, le 19 septem-bre. Il opposera Cellou Dalein Diallo et Alpha Condé qui avaient respecti-vement obtenu 43,69 % et 18,25% des suffrages au premier tour, le27juin. Ces résultats avaient donné lieu à de nombeux recours qui enavaient retardé la publication officielle. – (AFP.)

Afghanistan Exécution d’une femme en publicHERAT. Une veuve afghane de 48 ans, soupçonnée d’adultère, a été exé-cutée en public, lundi 9août, à Qades dans le nord-ouest de l’Afghanis-tan, a rapporté Abdoul Jabar, un responsable provincial. Selon la Forceinternationale d’assistance à la sécurité (FIAS), la femme exécutée,enceinte, a reçu 200 coups de fouet avant qu’un commandant talibanlui tire dessus. Un porte-parole des talibans, Qari Mohammad Yous-souf, a nié leur responsabilité dans cette exécution. – (Reuters, AFP.)

Israël La Libye financera des logements à GazaGAZA. L’Agence de secours et de travaux de l’ONU pour les réfugiés dePalestine (Unrwa) a annoncé, mardi 10 août, qu’Israël avait autorisé laLibye à financer la reconstruction de 1 250 logements détruits durantl’offensive de Tsahal à Gaza, début 2009, aux termes d’un accord inéditentre les deux pays théoriquement en guerre. La veille, Rafaël Hadad,un photographe israélien incarcéré depuis cinq mois en Libye, avait étélibéré. – (Reuters.)

EnRussie, l’aideoccidentalefreinéeparla bureaucratieLacrainte de voir des étrangers s’approcher de sitessensibles menacés par le feu ralentit les secours

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Page 7: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

70123Jeudi 12 août 2010

Allemagne

Berlinindemnise lesvictimesd’unraid aérien en AfghanistanBERLIN. L’armée allemande a versé 430 000 dollars (près de 330 000euros) aux familles touchées par un raid aérien meurtrier de l’OTAN, enAfghanistan, le 4septembre 2009, qui avait été ordonné par le comman-dement allemand dans ce pays, a annoncé mardi 10août le ministèreallemand de la défense. Chaque famille concernée a touché 5 000 dol-lars «une mesure qui ne constitue pas une indemnisation au sens juridi-que du terme mais une aide humanitaire », précise le ministère sur sonsite Internet. L’argent a été versé par le biais d’une banque afghane surdes comptes « personnalisés » afin d’être « sûr que l’argent ne tombe pasentre de mauvaises mains », détaille le ministère. La frappe aérienne del’OTAN sur Kunduz avait fait 102 morts et blessés, selon Berlin, et jus-qu’à 142 morts et blessés, dont des civils, selon la première estimation del’OTAN. Elle avait entraîné la démission du ministre de la défense del’époque, Franz Josef Jung, du chef d’état-major, le général Wolfgang Sch-neiderhan, et d’un secrétaire d’Etat à la défense, Peter Wichert. – (AFP.) p

Zabrautzi, un quartier construit dans les années 1970. N. MINERBI/LUZ

Bucarest, Bruxelles (Bureaueuropéen)Correspondants

E xigé par la France, l’Italie et laSuède – soutenues par la pré-sidence belge de l’Union

européenne –, le débat sur l’inté-gration des Roms en Europe netrouve pas d’issue, à Bruxelles.Pierre Lellouche, secrétaire d’Etatfrançais aux affaires européennes,avait demandé il y a quelquessemaines un débat « urgent » sur« un problème réel dont il est tempsde s’occuper ».

Evoquant les problèmes dedélinquancede mineurs, mais aus-si de réseaux de prostitution et detrafics d’enfants auxquels estconfrontée la France, M. Lelloucheavait fustigé les flux de « gens quine cherchent pas à s’intégrer », laresponsabilité des pays d’originedes Roms (dont 9 millions ont unpasseport européen), ou encore larelative inaction de la Commis-sion de Bruxelles qui, soulignait lesecrétaire d’Etat, dépense pour-tant beaucoup d’argent en vue deleur intégration. La Suède enchaî-nait en demandant un « plan d’ac-tion contraignant » censé répon-dre à « une situation alarmante ».

Ces gouvernements visaientaussi certains pays d’origine, accu-sés de se soustraire à leur devoir

d’assistance. Outre la Bulgarie(750 000 Roms, selon les estima-tions) et la Slovaquie (500 000),c’est la Roumanie – officiellement537000 Roms mais, plus vraisem-blablement quelque 2 millions –qui a été la cible des critiques. Elle adepuis promis d’agir. Un secrétai-re d’Etat chargé des Roms rapa-triés a été nommé. Mais, simulta-nément, Bucarest a protestécontre la destruction de campe-ments en France et le « blâmepublic» qui lui était adressé.

IlrestequelalenteurdeBucarestdans l’utilisation des fonds euro-péens pour l’aide aux Roms agace.Six programmes, d’un montanttotal de 9,3 millions d’euros, sontgérés par l’Agence nationale pourles Roms, mais les résultats sontpeu visibles. Le sort misérable decettepopulationlapoussetoujoursà émigrer. Des projets risquentd’être bloqués à force de retards.«LaCommissionnousarecomman-dé de résilier ceux qui n’avancentpas pour éviter de bloquer l’argent,affirme Anca Zevedei, directeur de

l’Autorité de gestion des ressourceshumaines au ministère roumaindu travail. La Commission veutaider les Roms et les défavorisés,mais regardez ce qui se passe avecles projets gérés par l’Agence natio-nale pour les Roms…»

Les associations roms criti-quent tant la France que les autori-tés roumaines. « La Roumanie n’apas fait son travail, estime CiprianNecula, chargé du projet « La Mai-son des Roms ». L’Etat a permisl’existence des réseaux de traficsd’êtres humains et de prostitution.Il s’est contenté de mettre quelquesprogrammes sur le papier pour fai-re plaisir aux Européens.»

La situation sur place confirmele diagnostic pessimiste quant augaspillage, voire à la non-utilisa-tion, des fonds européens. En fait,la Roumanie peine à dépenser les32 milliards d’euros de fonds nonremboursables que la Commissionlui a réservés de 2007 à 2013, àconditionqu’elleenfasselademan-de et justifie leur utilisation.

Arbitre du débat sur les Roms, laCommission ne cache pas sonmalaise. Invitée par la France etd’autresà«agir», elleobjecte qu’el-le a multiplié les initiatives aucours des dernières années, visanttant à l’intégration qu’à la non-dis-crimination. Mais « l’intégrationne sera effective qu’avec l’action

ciblée des Etats, au niveau natio-nal, régional et local », soulignel’exécutif européen.

Quelque 13,3 milliards d’eurosauront été dépensés, entre 2007 et2013, via le Fonds social européen,pour l’intégration des Roms etd’autres groupes dits « vulnéra-bles». En Roumanie et en Hongrie,la moitié des aides reçues vont auxRoms. De l’argent est aussi distri-bué à divers pays par le Fonds agri-cole pour le développement ruralet, depuis mai, des Etats peuventfaire appel au Fonds européenpour le développement régionalen vue d’aider des minorités, dontles Roms, à obtenir plus facile-mentunlogement.Les fondsstruc-turels permettent quant à eux decofinancer des projets pour la peti-te enfance, l’éducation ou l’em-ploi. Enfin, le Parlement européena alloué 5 millions d’euros pour lelancement d’un projet pilote d’in-tégration centré sur le microfinan-cement et l’enseignement.

« Ce n’est pas l’argent qui man-que, c’est le bon moyen de l’utili-ser », soupire un haut fonctionnai-re. En dernier recours, Bruxelles adonc lancé deux études censéesidentifier les programmes, les pro-jets et les politiques d’intégrationqui ont réussi.p

Mirel Bran et

Jean-Pierre Stroobants

Zabrautzi, uneenclave «tzigane» enpleinBucarest

«LaRoumanie n’apasfaitsontravail»

Ciprian Neculachargé du projet

« La Maison des Roms »

Lesaideseuropéennes à l’intégrationne parviennent pas toujours aux RomsCritiquée par la France, la Roumanie peine à employer les 32milliards d’euros disponibles d’ici à 2013

BucarestCorrespondant

Le quartier Zabrautzi de Bucarest,habité par la minorité rom, a toutd’une cité interdite. Sur le terrainvague où se dressent une dizained’immeubles, les poubelles sontl’unique décor. Derrière les monti-cules d’ordures ménagères, de fer-raille rouillée et de débris quefouillent quelques chiens vaga-bonds, une tête surgit, puis deux,puis trois. Des yeux pétillants scru-tent l’horizon. « Tziganes de mer-de!», crie un automobiliste qui fer-me sa vitre avant que l’écho luirevienne.

Les enfants continuent de fixerl’horizon, tels de petits sphinx. Ilsne savent pas encore que, dansleur pays, le mot « Tzigane» estune insulte, synonyme de«voleur», «fainéant», «sous-hom-me». Ils constatent qu’entre leurghetto et le reste de Bucarest exis-te une frontière invisible, celle quiles isolera de plus en plus au fur età mesure qu’ils grandiront.

A l’entrée des immeubles, lesmurs moisis conservent un vaguesouvenir de la peinture desannées 1970, époque où le dicta-teur Nicolae Ceausescu avaitordonné la sédentarisation de cet-te population. Dans le quartierZabrautzi, plus de vingt ans aprèsla chute de la dictature, il fait figu-re de bienfaiteur. « Il nous donnaitdu travail, nous pouvions faire soi-gner nos enfants à l’hôpital, on nevivait pas si mal que ça, on avait de

quoi manger», résume Maria,grand-mère d’une famille de dixpersonnes qui vit entassée dansune pièce de 20mètres carrés.

La Roumanie compte officielle-ment 537000 Roms, mais, d’aprèsleurs associations, ils seraient2millions sur 22 millions de Rou-mains. Lorsqu’il y a un recense-ment, une bonne partie d’entreeux cachent leur identité, qu’ilsn’aiment guère voir inscrite surles papiers officiels.

Réseaux d’esclavageDe toute façon, pour les Rou-

mains, il y a trop de « Tziganes ».L’intégration de leur pays àl’Union européenne, le 1er janvier2007, a provoqué une véritablevague migratoire vers l’Occident.Parmi les 2,5 millions de Rou-mains partis travailler à l’Ouest,beaucoup sont des Roms à larecherche d’une vie meilleure.

Pourtant, l’Ouest n’est pas la ter-re promise espérée. Sans travail,sans Sécurité sociale, ils se heur-tent à l’hostilité des Européens et,dans le meilleur des cas, à leurindifférence. Peu éduqués, dépour-vus de compétences, ils surviventdans les bidonvilles qu’ils ontconstruits autour des grandes vil-les, surtout en Italie, en Espagne eten France. Leur bouée de sauveta-ge, c’est la mendicité et le vol,quand ils ne sont pas embrigadésdans les réseaux d’esclavage queleur impose leur hiérarchie selondes règles non écrites.

L’aide au retour humanitaire

mise en place par la France il y atrois ans est loin d’avoir atteint sonbut. En 2009, environ 8000 Romsont été reconduits en Roumanieavec en poche un billet d’avion et300 euros. Mais les deux tiers d’en-

tre eux sont revenus en France etpromettent de recommencer jus-qu’à ce que leur pays d’origine leuroffre davantage que des quartierscomme celui de Zabrautzi.p

M. Br.

Europe

BruxellesBureau européen

J anusz Lewandowski, discretcommissaire européen au bud-get, a choisi la période de tor-

peur que s’offrent au mois d’aoûtles institutions bruxelloises poursortir de sa coquille. Avec unedéclaration, lundi 9 août, au jour-nal Financial Times Deutschlanden faveur d’un « impôt européen »– ou plus exactement de taxes queprélèverait directement l’Union –ila, dumême coup,choisi deseren-dre impopulaireauprès des «gran-des capitales », à savoir Berlin,Lon-dres et Paris. Il pourra, en revan-che, compter sur le soutien de l’ac-tuelle présidence belge de l’Unioneuropéenne.

L’idée du commissaire polonaisest assez simple. Puisque, raison-ne-t-il, la crise force lesEtats àdimi-nuer leurs dépenses et qu’ils ver-raient d’un bon œil la réduction deleur contribution au budget euro-péen – 140 milliards d’euros autotal –, la Commission augmente-raitses ressourcespropres sansfor-cer les ministres des finances àdécider de nouveaux prélève-ments. L’Europe pourrait décréterun impôt direct mais aussi, plusraisonnablement, une taxationdes transactions financières, desbillets d’avion ou des revenusgénérés par la bourse d’échangedes quotas d’émission de CO2.« Ambitieux mais réaliste », estimeM. Lewandowski, qui compte surle soutien d’une opinion a priorifavorable à l’idée de faire payer lesbanques ou les gros pollueurs.

Le commissaire va commencerune tournée des capitales et serait,assure-t-il, « surpris » d’y être malaccueilli. C’est pourtant ce qui leguetteaprèsles réactionsdéfavora-bles déjà enregistrées. Un porte-parole du ministère allemand desfinances a évoqué une position« contraire » à celle de son gouver-nement.Lord James Sassoon, sous-

secrétaire d’Etat britannique auxfinances, parle d’un possible vetode son pays. Quant à Pierre Lellou-che, secrétaire d’Etat français auxaffaires européennes, il juge l’idée« parfaitement inopportune » carsupposant « un transfert trèsimportant de souveraineté ». Jus-qu’ici, seule la Belgique est favora-ble au principe de ressources pro-pres pour l’Union, un systèmeplus « sain » et plus « responsabili-sant», selon le secrétaire d’Etat aubudget, Melchior Wathelet.

Le Parlement «vigilant»Evoquant l’esprit des « pères de

l’Europe », favorables à un budgeteuropéen autonome, et la faibles-se relative des moyens commu-nautaires – qui ne dépassent pas1 % du produit intérieur de l’en-semble des Vingt-Sept –, le libéralpolonaisa, quoiqu’il en soit, amor-cé un débat qui promet de fâcher.

C’est à la fin septembre que laCommission devait dévoiler sesprojets concernant le budget euro-péen des prochaines décennies.Elle a déjà suscité la colère des«grands» – mais aussi de «petits»,comme le Danemark et les Pays-Bas – en réclamant une augmenta-tion de quelque 6% de son budgetet de quelque 4,5% de ses crédits defonctionnement. Hostiles, diversescapitales – dont Paris – aimeraientqu’elle parle plutôt d’économies.

Qu’à cela ne tienne, sous-entend la Commission, on pour-rait alors reparler du fait qu’en l’es-pace de vingt ans, les ressourcespropres de Bruxelles sont passéesde 88 % à 24 % de son budget glo-bal. Ou des rabais, consentis, entreautres, à l’Allemagne ou à la Gran-de-Bretagne. Voire de la politiqueagricole commune qui absorbe45% des ressourcescommunautai-res, avec l’aval, entre autres, de laFrance… Le Parlement proposerases options en octobre et prometd’être « vigilant».p

J.-P. S.

LaCommissionrelancel’idéed’unimpôt«européen»Paris, Londres et Berlin ont déjà manifestéleur opposition à de nouveaux prélèvements

Page 8: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

DÈS LE 12 AOÛT, N°11ANDRÉA DE NERCIAT

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L e gouvernement peine àdéglutir en découvrant lecoût de la réforme de la procé-

dure pénale. L’évaluation chiffréedu projet, devenue obligatoiredepuis la réforme constitutionnel-lede2008etqueLeMondes’est pro-curée, impose des investissementsmassifs pour un peu mieux garan-tir les droits de la défense, dans unprojet pourtant jugé plutôt timidepar les avocats.

Michèle Alliot-Marie, la gardedessceaux,entendtoujoursprésen-ter aux parlementaires l’ensembledesaréforme(quicomprendlasup-pression du juge d’instruction et lamodificationdesconditionsdegar-de à vue), avant de décider quellepartie sera d’abord examinée.

Mais le Conseil constitutionnel,par un arrêt du 30 juillet, a tranché:les principaux articles de l’actuelcode de procédure pénale régissantla garde à vue «sont contraires à laConstitution » . Le gouvernementdevra revoir sa copie, d’ici au1er juillet 2011, pour davantagegarantir«l’exercicedes libertés indi-viduelles ».

La chancellerie a convenu qu’el-le devra « enrichir » son texte. Ellene pourra probablement pas secontenter de la présence en garde àvue d’un avocat à la première heu-re, puis à la douzième où il pourraconsulter les procès-verbauxd’audition.Leprojetderéformepré-voyait également qu’il assiste auxinterrogatoires de son client, en casde prolongation au-delà de vingt-quatre heures.

Le projet d’étude d’impact estdatédu20juillet, justeavantladéci-

sion du Conseil constitutionnel. Ildevraitlui aussiêtre réécritet lafac-ture sera alourdie, mais il donnedéjàuneidée assezprécisedessom-mes qu’il s’agit de mobiliser pour laréforme.

Pour l’heure, peut-être placée engarde à vue toute personne soup-çonnée d’avoir commis ou tenté decommettre une infraction. Elle adroit de consulter pendant unedemi-heure un avocat, qui n’a pasaccès au dossier, «une simple visite

de courtoisie », protestent les bar-reaux qui exigent comme leConseilconstitutionnel«l’assistan-ce effective » d’un avocat. La garde àvue est limitée à 24heures, qui peu-vent être prolongées une fois par leprocureur de la République. Lesexceptions sont toutefois nom-breuses : elle peut durer 96heuresen matière de criminalité organi-sée, trafic de stupéfiants, voire sixjours pour le terrorisme.Réduire les gardes à vue Le projetde la chancellerie vise à réduire de25 % le nombre de garde à vue, quidoit rester «exceptionnelle» : on encomptait 765 618 en 2009, et leurnombre a enflé de près de 140 %depuis 1993. Le ministère souhaitecréer une nouvelle possibilité de

retenue dans les locaux de police.« Le principe de l’audition libred’unepersonne soupçonnéeestprio-ritairement affirmé, indique l’étu-de, la gardeàvue n’est plusla moda-lité procédurale pour entendre unsuspect.»

On ne pourra d’ailleurs être gar-dé à vue que pour les seules infrac-tions punies d’une peine d’empri-sonnement. La chancellerie estimeunpeu au doigt mouillé que la moi-tié des gardes à vue pour conduiteen état d’ivresse disparaîtront, soit165 000. L’économie sur les frais

d’examen médicaux et d’interpré-tariat serait de 12 millions d’euros.L’enregistrementvidéodesaudi-tions Les gardes à vue seront enre-gistrées,etpasseulementenmatiè-re criminelle comme aujourd’hui.La police a chiffré à 43,7 millionsd’euros le coût des équipements (lagendarmerie plus modestement àmoins de 4 millions) et à 2,2 mil-lions le coût annuel de la mainte-nance.

Le parquet pourra désormaisautoriser les prolongations de gar-de à vue par visioconférence ; à rai-

son de 700 sites à équiper, l’étuded’impact prévoit un investisse-ment de 17,5millions d’euros pourla police, 3,8 millions pour la gen-darmerie.

Un nouvel effort en informati-que sera également nécessaire. Lesystème Cassiopée, dont doiventêtre équipés les tribunaux, risquede subir un surcoût d’au moins 4 à5millions d’euros.L’investissement immobilier Lesavocats devront pouvoir s’isoleravec leurs clients dans des locauxdédiés. L’étude d’impact évalue à

2 120 les salles d’audition qui leurseront réservées. Le « coût mini-mum» serait de 53millions d’eurospour la police, au moins 20,5 mil-lions pour la gendarmerie, plus300000 euros par an de «kits d’hy-giène » – pour les gardés à vue quin’ont pas eu le temps d’emporterleur brosse à dents.

Il y a pire. 82,2 % des locaux degarde àvue nerépondent pas,selonla direction de la police nationale,aux normes européennes, notam-ment à celles du Comité européende prévention de la torture. La miseen conformité est estimée entre60000 et 80000 euros par cellule,soituncoûttotalde plusde230 mil-lions d’euros.Recrutement des magistratsDans les six premières heures,enfin, l’avocat pourra contester leplacement en garde à vue devant lejuge de l’enquête et des libertés(JEL), qui aura vingt-quatre heurespour statuer : c’est l’habeas corpusà la française. En comptant que lesmagistrats du parquet passeronten moyenne trente minutes pardossier pour prolonger une garde àvue (100 380 prolongations en2009), les JEL quarante-cinq minu-tes, leur greffier autant, il faudrarecruter 65 magistrats et 45 gref-fiers. Pour l’ensemble de la réfor-me, le ministère estime qu’il faudra940 magistrats de plus sur quatreans, soit plus d’un dixième ducorps.

Pourlagendarmerie, lapiluleris-que d’être difficile à avaler. La réfor-me prévoit certes un renfort de 550équivalents temps plein, soit uninvestissement de 22,7 millions enrémunération et 4,8 millions enfrais de fonctionnement.

Mais il faudra immobiliser 100 à200 équivalents temps plein pourla formation judiciaire des gendar-mes, effectifs qui seront « prélevéssur la ressource du terrain ». Enfin,note l’étude, «il faudra envisager lerisquequepeut représenterune“an-née blanche OPJ” [une année sanspossibilité de passer l’examen d’of-ficier de police judiciaire], alors quela détention de l’examen est unecondition d’avancement de gra-de».p

Franck Johannès

Selon l’étude d’impact, « la palpa-tion de sécurité» (sur les vête-ments) n’est définie «par aucuntexte législatif ou réglementai-re», même si une circulaire duministère de l’intérieur imposedepuis 2003 qu’elle soit faite parquelqu’un du même sexe. Lesfouilles corporelles (fouilles judi-ciaire et de sécurité) n’ont pasplus de base légale. La «fouillejudiciaire», qui consiste à cher-cher sur quelqu’un tout objet uti-

le à la manifestation de la vérité,n’est pas mentionnée dans lecode de procédure pénale – laCour de cassation l’assimile àune perquisition. La «fouille desécurité», pour s’assurer qu’unepersonne ne porte pas d’objetdangereux, est censée être pro-portionnée: les fouilles systéma-tiques, a fortiori à nu, sont pros-crites par une circulaire de 2003et une note du directeur généralde la police nationale de 2008.

Lourde facture pour laréforme de la garde àvueL’étude d’impact de la chancellerie chiffre à des centaines de millions d’euros la réforme de la procédure pénale

Lebudget del’aidejuridictionnelle pourraitaugmenterdeprès de100 millions d’euros

L’AIDE juridictionnelle – l’assis-tance d’un avocat pour les dému-nis, financée par l’Etat – a uncoût, et il est d’autant plus élevéque les droits de la défense sontrespectés.

900 000 personnes ayant desrevenus inférieurs à 915 euros yont eu recours en 2009, ce quireprésente un budget de 300 mil-lions d’euros. C’est beaucouppour le gouvernement, qui envi-sage de créer un « ticket modéra-teur » d’un peu moins de 10 eurosà la charge du justiciable.

La réforme de la procédureenvisagée par le ministère de lajustice risque cependant d’alour-dir considérablement la facture.Le budget de l’aide juridictionnel-le, au Royaume-Uni par exemple,il est vrai le plus élevé du monde,était en 2009 de 2,1 milliards delivres (2,5 milliards d’euros).

Unités de valeurLa création de l’habeas corpus

d’abord, c’est-à-dire le droit decontester devant un juge unemesure privative de liberté com-me la garde à vue, nouveauté dela réforme, a été chiffrée par l’étu-de d’impact.

Les avocats sont rémunérés àl’acte (« l’unité de valeur », ouUV), et la chancellerie propose 2UV pour cette interventiondevant le futur juge de l’enquêteet des libertés (JEL), soit 48,4euros hors taxe. Quand on sait

que les charges des avocats repré-sentent deux tiers de leurs reve-nus, on comprend que les cabi-nets les plus florissants ne sedérangent pas pour si peu.

L’étude du ministère évalue de30 000 à 36 500 le nombre d’in-terventions devant le JEL, soit unbudget supplémentaire de 1,5 à1,9 million d’euros.

L’étude d’impact estime à 50 %le taux moyen d’intervention desavocats commis d’office à la pre-mière et à la douzième heure degarde à vue, instaurés par la réfor-me – soit 300 000 à 375 000. Ledocument compte sur la présen-ce de 80 % d’avocats pour la pro-longation au-delà de vingt-quatreheures, soit 80 000 gardes à vue.

Aujourd’hui, un avocat com-mis d’office perçoit 61 euros horstaxes, majoré de 31 euros la nuitet 23 euros si la garde à vue a lieuhors des limites de la communedu tribunal.

197994 personnes ont été assis-tées par un avocat commis d’offi-ce en 2009, qui ont touché enmoyenne 99 euros par interven-tion. Le montant total de l’aidejuridictionnelle pour la premièreheure de garde à vue s’est ainsiélevé en 2009 à 15,4 millions d’eu-ros.

Avec une seconde interventionà la douzième heure, le coût del’assistance d’un avocat est chif-fré entre 34,6 et 47,1 millions d’eu-ros ; sa présence lors de la prolon-

gation à 24 heures, à 44,2 millionsd’euros.

L’aide juridictionnelle totaleest ainsi estimée par an pour laseule garde à vue (hors habeascorpus) à 78,9 millions d’eurosdans une hypothèse basse (baissede 25 % des gardes à vue), ou91,4 millions pour l’hypothèsehaute (au niveau actuel).

«Partie citoyenne»Le ministère a chiffré la propo-

sition de loi du député socialisteAndré Vallini, qui entend quel’avocat soit présent pendant tou-te la garde à vue. L’aide juridiction-nelle représenterait ainsi entre211,3et 236,2millions d’euros.

Mais il n’y a pas que la garde àvue. Le projet de réforme de la pro-cédure pénale offre plus de droitsà toutes les parties: le mis en cau-se, les victimes, et une nouvelle«partie citoyenne» qui pourraintervenir même si elle n’est pasdirectement concernée.

Leur champ d’interventionpourrait ainsi augmenter « dans600 % de procédures supplémen-taires », a calculé la direction desaffaires criminelles et des grâces.Le budget de l’aide juridictionnel-le augmenterait en conséquence :46,3 millions (contre 14,8 aujour-d’hui). Il faudrait enfin y ajouter16,1 millions pour les interven-tions devant le juge et le tribunalde l’enquête et des libertés.p

F. J.

France

82,2 % deslocauxdegarde àvue nerépondentpas,selonladirection delapolicenationale, auxnormeseuropéennes

Aucun texte légal ne définit les fouilles à corps

8 0123Jeudi 12 août 2010

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90123Jeudi 12 août 2010

Moinsde1,60m,etapteàêtrepolicieroudouanier

Offensivepublicitairedes marques halalpour leramadan

Reportage

Mégevette (Haute-Savoie)Envoyé spécial

D ans la vallée du Risse, enHaute-Savoie, le village deMégevette compte

364 habitants. On y monte par uneétroite route depuis Annemasseou Thonon. Dans son petit syndi-cat d’initiative, au rez-de-chaus-sée de la mairie, un dépliant vanteles nombreux mérites touristi-ques d’une région nommée lesAlpes duLéman, située entre Genè-ve et Chamonix.

L’hiver, les visiteurs skient àMorzine ou aux Gets. L’été, ils peu-vent randonner dans un cadresomptueux. Mégevette disposed’une quinzaine de gîtes et de quel-ques chalets en location pourhéberger les touristes. Depuis2007, le village compte aussi LesRosiers, une maison familiale d’ungenre novateur, assez rare en Fran-ce. Une maison qui cuisine exclusi-vement halal, selon le respect durite musulman.

« On s’adresse surtout à desfamilles modestespour leur offrir lapossibilité de passer des vacances àla montagne, l’idée de la cuisinehalal, c’est un plus, c’est un argu-ment en supplément », expliqueBoudjema Mebarek, 50 ans, quigère la maison et se met volontiers

aux fourneaux. Titulaire d’un BTSde tourisme, ancien maître d’hôteldans des centres de congrès,M.Mebarek s’est mis au service del’association La rose des neiges.Basée à l’origine à Vénissieux, àl’est de Lyon, l’association « tra-vaillait, dit-il, dans les quartiers,pour l’aide scolaire ou le soutienaux familles».

L’association a loué la maisonde Mégevette, il y a trois ans, afind’offrir une destination de vacan-ces à des populations modestes.Une journée en pension complètecoûte 30 euros. Les tarifs vont de150 à 210 euros pour une semaine,de 50 à 75 euros le week-end, enfonction de l’âge des résidents,avec une réduction à partir d’ungroupe de sept personnes. Pour lanourriture halal, il faut s’approvi-sionner à Bonneville ou Annemas-se. Parfois, des cuisiniers viennent

apporter leurs spécialités culinai-res. « La cuisine halal, ce n’est pasnon plus l’intérêt unique et cen-tral», tempère M. Mebarek, qui nesouhaite pas donner au lieu uneimage religieuse prédominante.

La bâtisse de deux étages étaitune ferme au début du siècle der-nier, transformée en colonie devacances dans les années 1960.Aujourd’hui, elle compte vingt-cinq chambres, dans un décorvieillot, et est ouverte pendant lescongés scolaires, hiver comme été.

«Ça facilite la vie»Beaucoup de résidents vien-

nent de la région lyonnaise, com-me Hadj Ali, 44 ans, originaire duquartier des Minguettes à Vénis-sieux. « J’ai entendu parler de lamaison, je l’airegardée surInternet,c’est une chance de pouvoir emme-ner les enfants en vacances à un

prix abordable, sinon c’est impossi-ble, dit cet ouvrier intérimaire.Vous vous rendez compte, avant,pour les enfants, les montagnes,c’était les tours! » Pour lui, « le côtéhalal n’était pas la priorité ». Enrevanche, Soufian El Jiamil, 24 ans,venu de Seine-et-Marne, avec fem-meet enfant,reconnaîtquelacuisi-ne halal a été déterminante dansson choix : « Ca facilite la vie. » Il neregrette pas la destination: « Je neconnaissais pas, je découvre despaysages magnifiques.»

Logiquement, la maisonaccueille une grande majorité defamilles musulmanes. Le voile descertaines femmes, la barbe de cer-tainshommesontapportéunetou-che inattendue dans le village. « Audépart, c’était un peu dur, mainte-nant, c’est le contraire, il y a eu uneacceptation, les résidents visitent larégion, font des activités », ditM.Mebarek.

Contacté à plusieurs reprises, lemaire n’a pas souhaité s’exprimer.« Ce n’était pas très bien perçu audébut, les gens ne comprenaientpas que c’était un centre de vacan-ces », confie Nicole Morel, 55 ans,employée communal, chargée del’accueil touristique.

La saison s’est terminée mardi10août. Les dernières familles ontrepris la route. Pour fêter le rama-dan à la maison.p

Richard Schittly

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F-C.Ab

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LE 5/7

C ’était une des formes lesplus insidieuses et désuètesde discrimination dont les

femmes sont les principales victi-mes. Un arrêté interministériel du2août, publié au Journal officiel du10, vient d’abroger le seuil de lataille minimum de 1,60 mètre jus-qu’alors imposé pour entrer dansla police. Elaboré par Eric Woerth,ministre du travail, et GeorgesTron, secrétaire d’Etat à la fonc-tion publique, ce texte, qui fixe denouvelles conditions d’aptitudephysique pour intégrer certainesfonctions de l’administration s’ap-plique également aux agents etcontrôleurs des douanes.

Pour eux, il ne sera plus néces-saire d’avoir «l’usage intégral desmembres supérieurs et inférieurs»ni de «faire preuve d’une élocutionet une phonation permettant unecompréhension normale de laparole». Quant au personnel del’administration pénitentiaire etles surveillants de prison, ilsn’auront plus à « justifier d’un indi-ce de masse corporel (IMC) compati-ble avec les missions confiées »,qui, jusqu’à présent, écartait lespersonnes jugées obèses ou tropfluettes.

La Haute Autorité de luttecontre les discriminations (Halde)le reconnaît : « Dans la mesure oùl’auteur de cette exigence[l’employeur] n’arrive pas àdémontrer qu’une taille spécifiquen’est pas indispensable pour exécu-ter le travail, il s’agit d’une discrimi-nation indirecte. » Pour le ministè-re, la suppression de ces critèresd’aptitude physique établis en

d’autres temps s’est imposée avecl’ouverture des recrutements etdes métiers. Certaines fonctions,qu’elles soient administratives ouexercées dans la police scientifi-que, ne justifient plus le maintiend’une taille minimale. En invo-quant l’absurdité de l’effet deseuil, on justifie aussi cette déci-sion par la nécessité de remplacerune norme réglementaire par destests d’aptitude certifiés par desmédecins.

Certes, pour entrer dans la poli-ce, les douanes et l’administrationpénitentiaire, qui plus est pour yexercer des responsabilités d’enca-drement, il faudra toujours avoir«après correction éventuelle, uneacuité visuelle de quinze dixièmespour les deux yeux, avec un mini-mum de cinq dixièmes pour unœil». Le candidat devra égalementsubir un dépistage de produits illi-cites « dont le résultat doit êtrenégatif», est-il soigneusement pré-cisé.

Les policiers « actifs» ainsi queles douaniers « de la branche desurveillance» doivent être décla-rés « aptes au port et à l’usage desarmes». Pour cela, ils seront sou-mis à des tests en stand de tir.Dans l’administration pénitentiai-re, « le candidat doit être en mesu-re d’accomplir tous les gestes pro-fessionnels s’agissant du contrôlepar l’œilleton ». Selon les servicesdu ministère de la justice, la nor-me retenue pour la hauteur del’œilleton des portes de cellulesdes nouvelles prisons reste situéeà… 1,55 mètre. p

Michel Delberghe

Le ramadan a commencé, mer-credi 11août, en France pour unedurée de trente jours. Pendantcette période, les musulmansdoivent s’abstenir de manger,de boire et d’avoir des relationssexuelles, du «lever de l’aube aucoucher du soleil». En sont dis-pensés les enfants, lesvieillards, les femmes enceintes,les malades et les voyageurs.

L’autre obligation du ramadanest la prière à la mosquée, tousles soirs et le vendredi à lami-journée.Il y a en France entre 5 et 6mil-lions de musulmans. Selon unsondage IFOP, environ 70% desmusulmans de France décla-raient l’an dernier observer lejeûne du ramadan, contre 60%il y a vingt ans.

Maison familiale de vacances des Rosiers, en Haute-Savoie, le 10 août. BRUNO AMSELLEM POUR « LE MONDE »

AMégevette, lamaison familialedesRosiers offre vacances et cuisine halalDans ce village de Haute-Savoie, une association propose des séjours pour les familles modestes

Sécurité

Grenoble: nouveaucoup defiletmanqué àla VilleneuveCinq des six jeunes hommes interpellés dans le quartier de la Villeneu-ve à Grenoble, mardi 10 août, ont été remis en liberté le même jour fau-te de charges suffisantes. Le matin, une soixantaine de policiers étaientintervenus pour interpeller des suspects dans le cadre de l’enquête surles violences urbaines commises mi-juillet après le décès d’un braqueurissu du quartier tué par la police à l’issue d’une course-poursuite. Unepremière opération, fortement médiatisée le 4 août, avant la venue deBrice Hortefeux sur Grenoble, avait débouché sur quatre gardes à vue.Mais les quatre jeunes hommes interpellés avaient été rapidement relâ-chés, faute de preuve. « Il y a des pressions pour intervenir le plus vite pos-sible alors que l’enquête exigerait plutôt un travail de longue haleine »,dénonce une source proche du dossier en faisant état de consignesvenues du ministère de l’intérieur.p Luc Bronner

RomsEvacuation de deux camps illégaux dans l’HéraultDeux squats de Roms, occupés au total par une cinquantaine de person-nes, ont été évacués par la police mardi 10 août dans l’Hérault, l’un àMontpellier, le second à Lattes. Ces évacuations, réalisées en applica-tion de jugements prononcés par le tribunal de Montpellier, intervien-nent alors que le président de la République a annoncé, fin juillet, l’éva-cuation de 300 camps illégaux de Roms et de gens du voyage. – (AFP.)

Fait divers Découverte du cadavre d’un homme de 71 ansdans un congélateur à LyonLe cadavre d’un homme de 71 ans, dont le décès remonte à près de deuxans, a été découvert mardi 10 août dans le congélateur de son apparte-ment à Lyon. La concubine du défunt a été placée en garde à vue, la poli-ce tentant de déterminer les circonstances du décès. – (AFP.)

France

Le ramadan a débuté le 11 août

« FIÈREMENT halal ». Le slogan dela marque Isla Délice, spécialiséedans la charcuterie et les plats cui-sinés halal, qui s’affiche sur 6 000panneaux publicitaires dans tou-te la France à l’occasion du rama-dan, n’est pas passé inaperçu. Cet-te campagne marque une nouvel-le étape dans la volonté des mar-ques de séduire de manière plusdirecte les consommateurs deculture musulmane.En 2009 déjà, les premières tenta-tives de ces marques « affinitai-res» de sortir des médias commu-nautaires et de s’afficher auprèsdu grand public avaient fait grandbruit. Isla Délice avait rodé sa pre-mière campagne d’affichage natio-nale. Surtout, son concurrentZakia Halal, filiale de Panzani,n’avait pas hésité à diffuser unspot publicitaire sur M6 ou TF1.Un an plus tard, les deux pion-niers ont été rejoints par un autreacteur de ce marché, Reghalal, la

marque de LDC, numéro un fran-çais de la volaille.Comment interpréter cette offen-sive publicitaire ? « C’est l’évolu-tion normale d’un marché alimen-taire qui gagne en volume avecune clientèle qui demande de nou-veaux produits », explique Jean-Daniel Hertzog, directeur générald’Isla Délice. Cette société, créée ily a vingt ans, revendique la placede leader en France du secteur dela charcuterie et des plats cuisinéshalal, avec un chiffre d’affaires de51 millions d’euros en 2009, etune croissance de 10 % à 12% paran.Le cabinet Solis, spécialiste dumarketing ethnique, qui a lancé,fin 2009, la première étude sur lesprofils de consommation des pro-duits halal en France, estime l’en-semble de ce marché à 4,5 mil-liards d’euros. La viande commer-cialisée dans les boucheries ou lesépiceries musulmanes représente

encore l’essentiel de l’activité. Lacharcuterie ne pèse que 12 % à 13 %de l’ensemble, les plats cuisinésencore moins, mais l’appétit desconsommateurs, en particulierdes plus jeunes, pour ces produits,ne cesse de croître.

«Identitaire»«Depuis quelques années, on assis-te à une demande de consomma-tion identitaire de plus en plus for-te. Le contexte politique et sociétal,les débats sur l’islam et les musul-mans alimentent un sentimentcommunautaire qui se renforce»,constate Jean-Christophe Després,fondateur de l’agence de marke-ting communautaire Sopi.D’où l’intérêt croissant des entre-prises agroalimentaires et de lagrande distribution pour cesconsommateurs qui veulent man-ger halal tout en sortant de la tradi-tion culinaire. Et l’apparition dansles rayons de lardons pour la qui-

che Lorraine, comme de samossasou de nems halal. Les pionniers dece marché comme Isla Délice ouZakia doivent désormais batailleravec Nestlé ou Fleury-Michon et lagrande distribution qui lance sespropres marques, à l’instar de Casi-no avec Wassila.Si les hypermarchés mettent entête de gondole les produits halalà l’occasion du ramadan, ils hési-tent à évoquer trop directement lecaractère religieux de l’événe-ment pour éviter de provoquerdes réticences de la part de leursclients non musulmans. « Zakiacomme Isla Délice réalisent l’essen-tiel de leur activité sur le marchéhalal. Ce qui n’est pas le cas desautres», souligne Abbas Bendali,directeur de Solis. « C’est un sujetsensible et complexe», reconnaîtLuc Wise, cofondateur de l’agencepublicitaire Herezie, qui a conçula campagne Isla Délice. p

Laurence Girard

Page 10: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

10 0123Jeudi 12 août 2010

LaFed s’alarme de l’essoufflement de la repriseLa Réserve fédérale américaine a annoncé la réactivation de mesures exceptionnelles de soutien à l’économie

AuxEtats-Unis, le « backto school » n’est plus synonyme de dépenses folles

Latransformationdes magasins Atac en SimplyMarket n’a pas convaincu les clientsFace à des consommateurs désorientés, les responsables de la nouvelle marque du groupe Auchan ont décidé de corriger le tir

New YorkCorrespondant

S es membres étaient tiraillésentre le désir d’attendre uneamélioration, même modes-

te, de l’économie américaine luiévitant tout effet d’annonceinquiétant pour les marchés finan-cierset la nécessité inverse d’adop-ter des nouvelles mesures pourcontrarier un ralentissement éco-nomique devenu manifeste… LaRéserve fédérale (Fed, banque cen-trale américaine), après trois moisde tergiversations, a fini par choi-sir la seconde option.

Mardi 10 août, son comité depolitique monétaire (FOMC) aadopté une mesure – le réinvestis-sement immédiat dans des bonsdu Trésor du produit des obliga-tions hypothécaires arrivées àéchéance qu’elle détient – que lesanalystes jugent principalementdestiné à réinjecter dans l’écono-mie des liquidités sous forme deprêts.Laméthodeavaitdéjà étéuti-lisée du second semestre 2009 àavril2010.

Objectif recherché : apporter denouvelles liquidités au systèmebancaire en pariant sur un desser-rement(quise fait attendre)de l’ac-cès au crédit – les intérêts de nom-breux emprunts étant liés au ren-dement des bons du Trésor.

L’explication de la mesure estdouble. D’une part, la Fed a modi-fié son jugement sur la conjonctu-re. Le 23 juin, elle jugeait que « lareprise économique [suivait] son

cours [et que] le marché de l’emploi[s’améliorait] graduellement ».Désormais, elle estime que « lerythme de la reprise en termes deproduction et d’emploi s’est ralenti

les derniers mois ». Dans son langa-ge volontairement mesuré, elle estenréalité «trèsinquiètede la péren-nité de la relance », commenteMichael Feroli, économiste chez

JPMorgan Chase.Car depuissa réu-nion de juin, la situation s’estaggravée et le pronostic de sortiede crise devenu plus aléatoire.Dans son communiqué de ce mar-

di, le mot-clé est « ralenti » : 2,9 %de croissance annoncée pour2010 : aux normes américaines,cela s’appelle un ralentissement.Plus abruptement, Dean Maki, deBarclays Capital, disait à l’AFP quele FOMC « a perdu confiance » dansla croissance des Etats-Unis.

D’autrepart,cettedécisiondéno-te une inquiétude montante : celled’une sortie de crise plus longuequ’imaginée, marquée par l’instal-lation dans un chômage structurelet par une déflation durable. Finjuillet, James Bullard, un dirigeantde la Fed de Saint Louis (Missouri),avait évoqué ce scénario. Lundi, laFed de San Francisco (Californie)publiait une étude évoquant la« probabilité » d’une retombée enrécession de l’économie américai-ne dans les deux ans.

Risque déflationnisteMardi, le syndicat patronal

National Federation of Indepen-dent Business indiquait que laconfiance en l’économie des PME-PMI américaines continuait de sedégrader. Quant à la déflation, celafait plusieurs mois que des analys-tesaméricains de divers bords évo-quentle spectredu « scénariojapo-nais » : une croissance flasqueaccompagnée d’une baisse desprix et des salaires. Avec l’actuellestagnation des prix due à uneconsommation en berne et la pres-sion efficace à la baisse imposéepar les employeurs sur le coût dutravail salarié, cette crainte défla-tionniste prend de l’ampleur.

Le matin même, le Wall StreetJournal avait rendu publique l’esti-mation des 53 experts de son paneld’économistes. Composé à paritéd’analystes financiers et d’écono-mistes d’entreprise, il évaluait enmai comme équivalents le risqued’un retour de l’inflation ou d’unedéflation. Aujourd’hui, ses mem-bres jugent, à deux contre un, quela déflation est la principale mena-ce que les Etats-Unis doiventenrayer.Aucunneprévoitunechu-te des prix durable à l’horizon desdix-huit prochains mois. Mais, sielle intervenait, « elle ferait beau-coup de dégâts », selon Maury Har-ris, membre (UBS) du panel. Ladéflation, comme l’a montré le« cas nippon », est plus difficile àéradiquer que l’inflation.

Lepire,pour la Fed,est sansdou-te le sentiment majoritaire, tantdes marchés que des experts éco-nomiques, selon lequel les mesu-res adoptées restent relativementmodestes, de sorte que leurimpact devrait l’être aussi. p

Sylvain Cypel

EnhausseTata MotorsLe cours de Bourse du constructeur automobileindien – propriétaire de Jaguar, Land Rover etcréateur de la voiture à bas coût Nano – a atteint,mardi 10 août, son plus haut niveau depuis 1991.

EnbaisseThomasCookComme son compatriote TUI Travel, le tour-opé-rateur britannique a lancé un avertissement surrésultats. Le beau temps au Royaume-Uni a inci-té les Britanniques à différer leurs voyages.

O nnepeutpasimposern’im-porte quoi n’importe où auconsommateur. La chaîne

de supermarchés Simply Market,une enseigne du groupe Auchan,l’a appris à ses dépens.

La société voulait pourtant pro-voquer un « big bang » dans l’uni-versdeladistribution.L’idée?Rem-placer une enseigne vieillissante,en perte de vitesse, Atac, par unenouvelle marque, ludique et sur-tout bon marché : Simply Market.

La transformation des290 magasins s’opère à partird’avril 2009. La campagne est lan-cée, l’offre est simplifiée. En rayon,il est proposé un assortimentréduit de 20 %, focalisé sur les pro-duits frais et à moindre prix, fai-sant disparaître ainsi de grandes

marques plus onéreuses.Mais, alors qu’un changement

d’enseigne se traduit par une haus-se quasi mécanique des ventes grâ-ce à un effet de curiosité, le chiffred’affaires flanche de 7% à 8% danscertains magasins. Les clients sedisent mécontents, le personneldémotivé. En clair, c’est un raté.

L’échec a été particulièrementcuisant dans les villes de périphé-ries et dans les campagnes. Dans lesupermarché de La Ferté-Saint-Aubin, à 20 km d’Orléans, lesclients se sont notamment plaints«de ne pas retrouver les produits dechez eux, comme leboudin blanc, laterrine de Sologne, les vins de Cléryou les boîtes à biscuits de Cham-bord», raconte Jean-Michel Trihan,le directeur du magasin.

En périphérie de grandes vil-les certains consommateurs sesont dits nostalgiques de l’ensei-gne Atac où ils pouvaient s’of-frir, même si cela était plus cher,

des produits de marque commeles crèmes Mamie Nova, BonneMaman ou les pâtes italiennesDe Cecco, pour améliorer le quo-tidien.

Dans des zones très rurales,comme à Mirebeau, près de Poi-tiers, les habitués ont, eux, déploréde voir disparaître les produits debasse-cour, comme les grainesnécessaires à nourrir les poulets.

« On a voulu calquer partout unconcept unique, sans prendre enconsidération les spécificités loca-les », analyse rétrospectivementPhilippePupunat,directeur opéra-tionnel des magasins du GrandOuest. Or, les attentes de clientspressés de grandes villes ne sontpas les mêmes que celles d’habi-tants de la campagne, qui récla-ment plus d’accueil et des pro-duits qu’ils ne peuvent pas se pro-curer facilement ailleurs.

Pour Simply Market, les chosesont été d’autant plus compliquées

que ses difficultés d’ajustement sesont ajoutées à celle d’un contextede crise et de concurrence agressi-ve. Ainsi quand Atac devenait Sim-ply, les magasins Champion sesont transformés en CarrefourMarket… avec succès.

Pour Laurent Thoumine,consultant chez Kurt Salmon, Sim-ply restera ainsi « le plus gros rata-gedeces dernièresannées».Sa prin-cipaleerreur : avoir lancé une cam-pagne de publicité joyeuse et plei-ne de promesses, quand, sur le ter-rain, « il ne s’agit que d’un joli coupde peinture », estime-t-il.

« L’initiative était très courageu-se. Certaines idées sont bonnes,comme de faire du “everyday lowprice’’ [des prix bas toute l’annéeet moins de promotions]. Mais

pourquoi l’enseigne, qui pèse trèspeu dans le paysage des supermar-chés, ne cherche-t-elle pas à profi-ter pas de l’image puissante d’Au-chan ? », s’étonne aussi Gilles Gol-denberg, spécialiste de la distribu-tion.

Au siège de Simply Market, on aprisconscience deserreurs commi-ses. « On ne peut rationaliser tousles magasins de la même maniè-re », reconnaît aujourd’hui TinaSchuler, directrice commercialede l’enseigne. Au cours des der-niers mois, le tir a donc été rectifié.L’enseigne assure que les chosessont rentrées dans l’ordre, et que lacroissance est au rendez-vous, ceque devraient confirmer les résul-tats du groupe fin août. p

Claire Gatinois

Les cours du jour ( 11/08/10 , 10h04 )

Economie

ILS ONT sans doute été un peutrop optimistes. Il y a quelquesmois, au moment de passer com-mande pour leurs collectionsd’été, les détaillants américainspariaient sur la confirmation de lareprise économique. Mais depuis,les choses ont changé. Les dépen-ses des ménages ont stagné aumois de juin, selon les chiffrespubliés mardi 3 août. Aussi lesentreprises, craignant de garderleurs stocks sur les bras, déploient-elles des trésors d’ingéniositépour tenter d’attirer les clientsdans les magasins.

Aux Etats-Unis, les semainesprécédant la rentrée des classessont l’occasion de bénéficier desoldes et de promotions. Pour lesdétaillants du secteur de la distri-bution qui ciblent la jeunesse, lesventes réalisées au cours de cettepériode cruciale, appelée « back toschool», représentent 25% du chif-fre d’affaires annuel. Un marchéestimé par le cabinet NPD Group à11 milliards de dollars, soit envi-ron 600 dollars (453 euros) par

famille. Les experts estiment aus-si qu’elle est un très bon indica-teur avancé des fêtes de Noël, picannuel de la consommation desménages américains.

Pour séduire les jeunes et leursparents, les chaînes de distribu-tion redoublent donc actuelle-ment d’efforts. Pour la premièrefois, Abercrombie and Fitch (A&F), marque populaire auprès

des adolescents, a lancé une cam-pagne publicitaire via le réseausocial Facebook et ressort unmagazine promotionnel abandon-né depuis sept ans. D’habitude,A& F n’a pas besoin de dépenserbeaucoup dans ce genre d’opéra-tion. Le bouche-à-oreille et sarenommée chez les jeunes suffi-sent. Pas cette année. Par ailleurs,A & F dit avoir baissé de 16 % ses

prix en magasin en juillet par rap-port au trimestre précédent. Uneautre marque connue du secteur,Aeropostale, a acheté des encartsdans Teen Vogue, un magazineaméricain au lectorat assez éloi-gné de sa clientèle traditionnelle.Les supermarchés Target ont, eux,mis en place des navettes de busgratuites qui emmènent les jeu-nes dans les magasins, faisant desrotations entre les campus et leszones commerciales à toute heurede la journée.

FrilositéLes détaillants ont en réalité

une marge de manœuvre très fai-ble. Autrefois période faste de laconsommation américaine, la pré-rentrée voit, chaque été depuistrois ans, les recettes stagner. Quiplus est, le chômage des jeunestouche des niveaux historiquesaux Etats-Unis. Le taux de chôma-ge des 20 à 24 ans dépasse les23 % ; il atteint 26,5 % chez les16-19ans. Les premiers postes àêtre supprimés sont ceux du servi-

ce à la clientèle, emplois habituel-lement occupés par les jeunesl’été pour financer leurs études,coûteuses outre-Atlantique. Leursrevenus sont en baisse, et ceux deleurs parents aussi.

Les consommateurs restentdonc prudents et ne feront sansdoute pas de dépenses excessives.Une frilosité qui inquiète dans unpays où la consommation repré-sente plus de 70% du produit inté-rieur brut. « Les ménages améri-cains restent fortement endettés etleurs revenus n’augmentent pas.Ils privilégient donc l’épargne et leremboursement de leurs crédits »,explique Thomas Julien, écono-miste chez Natixis. Le taux d’épar-gne des ménages est d’ailleursremonté à 6,4% en juin, au plushaut depuis 1 an.

Petite lueur d’espoir, selonl’étude annuelle réalisée par NPD,seulement 38 % des personnesinterrogées prévoient de dépen-ser moins cette année que l’an der-nier. En 2009, elles étaient 44 %. p

Tiphaine de Tricornot

Prèsde Poitiers, leshabituésont déploréladisparition desproduitsdebasse-courcomme lesgrainespourlespoulets

Euro 1euro : 1,3133 dollar (achat)Or Onced’or : 1192,50 dollarsPétrole Light sweetcrude : 79,50 dollarsTauxd’intérêt France : 2,814 (à dix ans)Tauxd’intérêt Etats-Unis : 2,783 (à dix ans)

8

6

2

4

0

— 2

— 4

Août2004

Août2005

Août2006

Août2007

Août2008

Août2009

30 juin2010

évolution en %, en glissement annuelDÉPENSES DES MÉNAGES AMÉRICAINS

SOURCE : BLOOMBERG

3,1

Mardi 10août, les traders du Chicago Board Options Exchange attendent les conclusions de la Fed. SCOTT OLSON/GETTY IMAGES/AFP

Page 11: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Reportage

Equilly (Manche)Envoyée spéciale

I l y a près d’un an, ChristopheLefranc, 41 ans, était allé auMont-Saint-Michel en tracteur

pour déverser son lait à la face dumonde. Il n’avait pas prévenu sonfils Quentin, âgé de 13 ans, sinon legamin aurait manqué l’école pourl’accompagner.

Sa femme, Marie-Christine,40 ans, y serait allée si elle n’avaitpas été sur le point d’accoucher.Dans un champ de la baie, desdizaines de tracteurs alignés, rou-lant au pas, avaient répandu plu-sieurs millions de litres de lait.

Ces images, qui « ont fait le tourde la Terre », ont donné au mouve-ment « une ampleur qu’on ne peutpas chiffrer ». Mais elles leur ontcoûté cher. Pendant douze jours,les Lefranc ont fait la grève du lait.Pendant douze jours, ils ont euautant de travail – il fallait bientraire et nourrir les vaches –, maisaucun revenu. « On a encore dumal à s’en remettre », lâche Chris-tophe Lefranc. Le manque àgagner ? Il sort sa calculatrice :« 3 000 euros. » Le budget familiald’un trimestre.

Cet été, les Lefranc sont allésavec leurs trois enfants au Puy-du-Fou, en Vendée. Un jour et demide vacances, pour faire plaisir àElodie, 17 ans, et Quentin, qui pas-sent l’été à aider leurs parents.C’est que depuis cette journée du18 septembre 2009, la situationn’a fait qu’empirer à la ferme duLogis, sur la commune d’Equilly,dans la Manche. Christophe

Lefranc la résume d’un mot :« Désolation. »

Le prix du lait reste inférieur aucoût de production. Depuis prèsd’un mois et demi, il est mêmeinconnu : les discussions entreindustriels et syndicats profession-nels sont dans l’impasse. L’avenirdes Lefranc reste suspendu à cesnégociations,dontenréalitéilsn’at-tendent pas grand-chose. En 2008,ils s’étaient syndiqués à la Fédéra-tion nationale des syndicats d’ex-ploitants agricoles (FNSEA). Ilsn’ont pas renouvelé leur adhésion,et ne jurent plus que par l’Associa-tion nationale des producteurs de

lait indépendants (l’APLI). Apparueà la fin de l’année 2008, la jeuneassociation rebelle était l’initiatricede la grande grève et des déverse-ments spectaculaires de 2009.

Sept taurillons ont quitté la fer-me lundi 9 août, un mois plus tôtque prévu. Il faut bien des ren-trées. Tous les matins, à 6 h 30,quand Christophe Lefranc seretrouve dans les prés pouremmener les vaches à la salle detraite, il pense aux 180 euros qu’ildoit rembourser chaque jour à labanque. En 2005, la ferme estdevenue une entreprise. LesLefranc ont acheté les terres qu’ils

louaient, ils ont mis la ferme auxnormes, et Marie-Christine a prisle statut d’exploitante.

Il fallait grossir pour survivre,alors ils ont emprunté. Beaucoup:près d’un demi-million d’euros. Laproduction est passée de200 000 litres de lait par an à400 000. « Si nous étions restés à200 000, un des deux aurait dûaller travailler à l’extérieur », notel’agriculteur. Mais comment rem-bourser 180 euros tous les joursquandontravailleàperte?« Ontra-vaille avec un capital énorme, et onvit moins bien que nos parents, quien avaient quatre fois moins.»

Avec 300 bêtes, dont 60 vacheslaitières,et110hectaresquipermet-tent de pourvoir à une partie deleur alimentation, le travail estincessant.Un apprenti en alternan-ce donne un coup de main, mais les800 euros mensuels qu’il coûtepèsent lourd.

«On commence à paniquer»Les journées, entamées à

l’aube, se terminent au plus tôt à20 heures, samedi et dimanchecompris. Christophe Lefranc nes’accorde que quelques heures derépit, un dimanche sur deux. Acondition qu’il n’y ait pas de vêla-ge. Le dernier a eu lieu dans la nuit,à 2 h 30.

Le couple prélève 1 400 eurospar mois sur le budget de l’entre-prise pour vivre, dont 400 eurosservent au remboursement del’emprunt pour la maison. « Res-tent 1 000 euros par mois, pour170 heures de travail par semai-ne. » Ces heures, ils les font à deux.Christophe Lefranc n’oubliejamais ce qu’il doit àMarie-Christi-ne. C’est elle qui traie, passe l’éta-ble au Kärcher deux fois par jour,s’occupe de la volaille et du pota-ger. Et elle participe autant que lui

au travail administratif, l’équiva-lent d’une journée par semaine.

«Onfaittoutbien,soupire l’agri-culteur, et pourtant on commenceàpaniquer.»Va-t-ilfalloirrenoncerau prélèvement mensuel de1400euros? Ils y pensent. Si le prixdulaitneremontepas,ilfaudratra-vailler sans rémunération, ou« décapitaliser » en vendant dubétail. Depuis la crise de 2009, lesLefranc ont juste reçu une aide de1000euros,perçuecarMarie-Chris-tine avait encore le statut de jeuneagricultrice. Dos au mur, ils enten-dent continuer à se battre, avecleurs voisins. «Avant, chacun étaitdans sa ferme, maintenant on sevoit plus.» En juillet, Marie-Christi-ne et Quentin ont fait avec l’APLIun aller-retour pour Bruxelles encar, dans la journée, pour manifes-ter. Quelques semaines plus tôt,Christopheétaitalléàunemanifes-tation à Caen avec l’aînée.

Elodieveutêtrecomptable.Avecde la peinture blanche, elle a écritsur des bâches de plastique noires :«Les politiques ont bradé l’agricul-ture aux financiers.» Les pancartessont plantées au bord de la route,sous les yeux des vacanciers. p

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Les négociations sur le prix dulait au troisième trimestre, fixépar l’interprofession rassem-blant syndicats et industriels,n’ont toujours pas abouti. Lesagriculteurs demandent une réé-valuation du prix à 330euros latonne pour s’aligner sur les

cours mondiaux, là où les indus-triels leur offrent 310euros enmoyenne. La FNSEA a donné auxindustriels jusqu’au jeudi 12aoûtpour revenir négocier. En casd’échec, les agriculteurs font pla-ner la menace d’une multiplica-tion des actions de protestation.

Economie

Faute d’accord, les prix du lait toujours en suspens

Christophe et Marie-Christine Lefranc avec leurs trois enfants, lundi 9 août, dans la sallede traite de la ferme du Logis, à Equilly. THOMAS JOUANNEAU POUR « LE MONDE »

«Ladésolation»d’une ferme laitière où «on fait tout bien»Le couple Lefranc, installé dans la Manche, n’arrive à se verser, en tout, que 1400euros par mois. Malgré des journées de travail interminables

110123Jeudi 12 août 2010

Page 12: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Le 27 février 200812,80 $Une consommation plus élevée quela production durant plusieurs années puisune sécheresse en Australie poussent le prixdu blé – comme l’ensemble des matièrespremières agricoles – à des niveaux inconnus.Un phénomène amplifié par l’utilisation decéréales pour fabriquer des agrocarburantset par la spéculation.

Le 29 juin 20104,28 $

À la suite des sommets atteints en 2008,des terres oubliées sont remises en activité,

des surfaces plus importantes sont cultivées…Résultat, les stocks mondiaux,

largement entamés, se remettentà gonfler, contribuantà la retombée des prix.

Le 8 août 20107,85 $

À cause de la canicule,la production russe de blé

est très touchée. Pour protégersa consommation intérieure,

le Kremlin instaure un embargosur ses exportations de céréales.

SOURCE:BLOOMBERG

Al’origine était leblé. » Voilà ceque rappelait en2009 DmitriMedvedev, leprésident russe,à la veille del’ouverture du

Forum mondial céréalier de Saint-Pétersbourg, qui devait consacrerleretour dela grande Russieagrico-le. Mais aujourd’hui, le blé russepeut-il être à l’origine d’une nou-velle crise alimentaire ?

La brutale envolée des cours dublé à cause de la canicule et de lasécheresseenRussie ravive lespec-tre de 2007 et 2008. Deux annéesoù les cours des matières premiè-res agricoles – blé, maïs, riz, soja… –avaient doublé. Avec au bout de lachaîne, de Dakar à Mexico ouau Caire, de violentes « émeutes delafaim»pourprotester contre l’en-volée des prix des denrées. « Nousne sommes pas encore en situationd’alerte, mais nous regardons lasituation de très près », expliqueainsi Eric Hazard, de l’ONG Oxfamà Dakar.

La Russie, un acteur majeurdéfaillant Tirant enfin profit deses tchernozioms, ses fameuses ter-res noires très grasses et fertiles, laRussie était devenue, ces dernièresannées, le troisième plus grosexportateur mondial de blé, avec18millionsdetonnes, justederrièreles Etats-Unis (22,9 t) et l’Unioneuropéenne (19,5t). Las, la caniculeet les incendies ont réduit à néantses capacités d’exportation.

Le premier ministre VladimirPoutine a ainsi indiqué, lundi9 août, que la production du paysne s’élèverait qu’à 60 à 65 millionsdetonnesdecéréales, dontenvironles deux tiers de blé, loin des 90 à95millions de tonnes initialementprévus. Le Kremlin a aussi décidéd’instaurer un embargo sur sesexportations de céréales pour nepas trop affecter la consommationintérieure.

Résultat, les marchés mondiauxse sont emballés, le Chicago Mer-cantile Exchange enregistrant desvolumes de transaction record. Leboisseau de blé (environ 27 kg) àtrois mois a atteint jusqu’à 7,85dol-lars (6 euros) le 8 août, soit unehausse de près de 70% par rapportau cours de juin, avant de reculerun peu les jours suivants du fait deprises de bénéfices. En juillet, lecours de l’épi a bondi de 38 %, une

hausse mensuelle jamais vuedepuis 1973. « Nous sommes toute-fois encore très loin des sommets de2008», relativise l’économiste Phi-lippeChalmin,coordinateurdurap-port Cyclope, la bible des matièrespremières. A cette époque, le bois-seau avait en effet atteint jusqu’à12,80euros à Chicago.

Les marchés sont d’autant plusnerveux que d’autres grandsexportateurs de blé ont aussi ren-contré des problèmes climati-ques : canicule dans les autrespays de la mer Noire (Ukraine etsurtout Kazakhstan), vague dechaleur en juin ayant affecté lesrendements en Europe, inonda-tions au Canada…

« Les industriels ont repris despositionssurles marchéspourassu-rer leurs approvisionnements,explique Michel Portier, directeurde la société de conseil spéciali-sée Agritel. Et la situation ten-due a attiré de nouveauxacteurs, venus spéculer. »

Des stocks très abondants Jus-qu’à la campagne 2007-2008, lesstocks mondiaux de blé avaient étéconsidérablementamputésàlasui-te de sept années consécutives deconsommationsupérieureàlapro-duction. Un phénomène lié à desrécoltes décevantes et à l’essor denouvelles pratiques alimentaires,notamment la consommation deviande: environ un tiers de la pro-duction mondiale sert en effet àl’alimentation du bétail.

Mais la flambée des cours de2007-2008 a considérablementinversé la tendance: attirés parles prix élevés, des agricul-teurs ont remis en activité deterres inutilisées ou semésurdessurfaces plusimpor-tantes… Résultat, les stocksmondiaux culminent à197 millions de tonnes,très loin du plancher de118 millions connu en2007-2008.

En 2010-2011, laconsommationmondiale de blé

devraitredevenir

supérieure à laproduction,

selon une esti- mation du Conseilinternational des céréales publiée le29 juillet, avec un déficit de 5mil-lions de tonnes.

Surtout, des inconnues persis-tent. A commencer par le cas de laRussie, où la prochaine campagneest peut-être déjà compromise: lessemis doivent débuter fin août, or,la canicule devrait durer au moinsjusqu’au 20 août, selon des prévi-sions publiées mardi 10 août parHydrometcentre, le centre russe deprévisions météorologiques. Lesspécialistes scrutent égalementattentivement l’Australie, où ilsespèrentdefortespluiesd’icideuxàtrois semaines.

«Avec de la pluieen Australie et en Russie, le prix duboisseau pourrait perdre 20 % etretomber aux environs de 5,50dol-lars,estimeM.Portier.Maissilacani-cule russe persiste et que l’Australieestàsontourfrappéeparlasécheres-se, le scénario de 2007 pourrait alorsse répéter.»

« La situation est sérieuse, jugeAbdolreza Abbassian, économisteà l’Organisation des Nations uniespour l’alimentation et l’agricultu-re, mais il va falloir attendre enco-re deux ou trois mois pour en mesu-rer toutes les conséquences. »D’autant que le blé a entraînédans sa hausse d’autres matièrespremières : le prix de l’orge a dou-blé, certains maïs ont vu leurcours progresser de 40 %. Deshausses qui limitent la substitu-tion du blé par ces produits, maisqui n’ont pas touché le riz, dont leprix avait doublé en 2007-2008 :sur les marchés mondiaux – où ils’échange peu, car il franchit rare-ment les frontières de ses pays deproduction – le riz connaît unehausse limitée de 10 %.

Impacts variables pour lesconsommateurs Dans les paysdéveloppés, la hausse des coursmondiaux du blé devrait avoir unimpact limité pour le consomma-teur. « L’alimentation du bétailreprésente 60% à 80% des chargesde l’éleveur, explique M. Portier. Sil’augmentation des cours perdure,lesprix delaviandepourraientaug-menter de 8% à 10%.»

Si en France, le prix du blé necompte que pour 5% dans celui dela baguette, dans les pays en déve-loppement, où 60 % à 90 % desrevenus sont consacrés à l’alimen-tation, l’impact risque d’être beau-coup plus violent : « Le prix du blécompte pour au moins 50 % dans

celui du pain » dans ces pays, noteM.Abbassian. Notamment en Afri-que, où peu de blé est produit. Or,comme le relève Cécilia Bellora,adjointe au directeur de la Fonda-tion pour l’agriculture et la ruralitédans le monde (FARM), «le pain estdevenu un aliment de base dans lescentres urbains de nombreux paysafricains ». La hausse du prix dupain avait fortement contribuéaux «émeutes de la faim» de 2008en Egypte et en Afrique de l’Ouest.

Reste à savoir dans combien detemps et dans quelle mesure lahausse des prix du blé sera répercu-téesurlesconsommateursdespaysen développement. En limitant lestaxes à l’importation, les gouverne-ments peuvent limiter l’impact deshaussesdescours.D’autantquel’ef-fet tampon du taux de change seramoins important en Afrique qu’en2007-2008: toutes les transactionsau niveau international se font endollar; or, le franc CFA est arrimé àl’euro,quiadepuisfortementchutéface au billet vert.

Toutdépendra dela volonté–oudela capacité–des importateursderépercuter la volatilité des courssur les acheteurs locaux. « La trans-mission des cours mondiaux auxmarchés locaux reste très floue,note Mme Bellora. Au Sénégal, entemps normal, seulement 30% de lahausse des prix du riz sur les mar-chés est répercutée au niveau local.Or, en 2008, la totalité de la haussedes prix duriz avait été in fine trans-mise aux consommateurs.» p

Clément Lacombe

Prixduboisseaudeblé(environ27kg)àtroismois,àChicago

Leproblèmede la faim dans le mondea été délaissé depuis la crisefinancière

Décodage

D’ici dix ans, plus aucunhomme, femme ouenfant n’ira se coucher enayantfaim.»Telétaitl’en-

gagement pris en… 1974 par HenryKissinger, alors secrétaire d’Etataméricain. Trente-cinq ans plustard, en novembre 2009, le Som-met mondial sur l’alimentations’est abstenu de fixer une échéancepouréradiquerlafaimdanslemon-de, alors que les documents prépa-

ratoires à la déclaration finale évo-quaient l’année 2025.

Les « émeutes de la faim » de2008 avaient pourtant remis lesquestions de sécurité alimentairedans l’agenda politique. Uneurgence renforcée par la crise éco-nomique mondiale : en 2009, lenombre de personnes souffrantde la faim a encore crû de 11 %, et afranchipourla premièrefoisla bar-re du milliard d’individus.

Les chefs d’Etat et de gouverne-ment du G8, en 2009 à L’Aquila(Italie), s’étaient engagés à réunir22 milliards de dollars (16,8 mil-liards d’euros) en trois ans afin de

lutter contre l’insécurité alimen-taire dans le monde. A cette épo-que, tous soulignaient l’importan-ced’augmenterla partdes investis-sements agricoles dans l’aidepublique au développement, tom-bée de 17 % en 1980 à 3,8% en 2006,avant de remonter autour de 5 %aujourd’hui.

Mais ces engagements restentpour l’heure encore flous. D’où lecoup de colère, le 15 juin, de Jac-ques Diouf, le directeur général del’Organisation des Nations uniespour l’alimentation et l’agricultu-re (FAO) : « J’espère que les pays duG8 tiendront leur promesse car,

pour l’instant, cet argent n’est tou-jours pas arrivé à destination. Espé-rons que cet effort finisse par seconcrétiser.»

A l’occasion d’un sommet àMuskoka au Canada, les 25 et26juin,les membresduG8 onttou-tefois indiqué qu’au « 30 avril,nous avions déboursé/attribué6,5 milliards de dollars et sommesrésolus à débourser/attribuer lemontant total de nos engage-ments nationaux d’ici à 2012 ».

Une somme qui englobe la faci-lité alimentaire européenne de830 millions d’euros ainsi que le«programme globalpourla sécuri-

té alimentaire », doté de 900 mil-lions de dollars, réunissant lesEtats-Unis, le Canada, l’Espagne, laCorée du Sud et la Fondation Bill etMelinda Gates.

Mais le communiqué du G8entretient le flou entre les som-mes réellement décaissées et cel-les simplement attribuées. Le G8rechigne aussi à donner des détailssur les modalités – dons, prêts ? –ainsi que sur la façon dont cetargent doit être utilisé.

« Le soufflé est retombé, jugel’économiste Philippe Chalmin.En juin 2008, tous les puissants dela planète se pressaient à la Confé-

rence internationale sur la sécuritéalimentaire.Ennovembre2009, Sil-vio Berlusconi était le seul chefd’Etat ou de gouvernement à êtreprésent au Sommet mondial surl’alimentation.»

« La question de la faim dans lemonde a été mise de côté par la cri-se financière et les questions clima-tiques, expliquait récemment undiplomate. La communauté inter-nationale n’arrive à se concentrerque sur un seul sujet à la fois. Lasous-alimentation redeviendra unsujet majeur lorsque éclateront denouvelles émeutes de la faim. » p

C. L.

Contre-enquêteEconomie

K Lahausseduprixdublépeut-elleprovoquerunecrisealimentaire?K Quelleserasarépercussionsur leprixdupain?

Zoom

PRINCIPAUX EXPORTATEURS LORS DE LA CAMPAGNE 2009-2010,en millions de tonnes

La Russie, un exportateur majeur

Etats-Unis

Unioneuropéenne

RussieRussieCanada

Australie

SOURCE : INTERNATIONAL GRAINS COUNCIL

22,9

19,5

18

13,7

17,5

SOURCE : INTERNATIONAL GRAINS COUNCIL

Les stocks mondiaux se sont reconstitués

609

686

677

124598

121

168

197

192651

2006/2007

2007/2008

2008/2009

2009/2010

2010/2011, estimation au 29 juillet 2010

2006/2007

2007/2008

2008/2009

2009/2010

2010/2011, estimation au 29 juillet 2010

PRODUCTION MONDIALEDE BLÉ, en millions de tonnes

STOCKS MONDIAUXDE BLÉ,en millions de tonnes

12 0123Jeudi 12 août 2010

Page 13: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

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Multi-promoteursCM-CIC EUROPE 23,37 9/8Fonds communs de placementsCM-CIC EURO ACTS C 19,85 9/8CM-CIC SELECT.PEA 7,44 9/8CM-CIC MID EUROPE 19,34 9/8CM-CIC TEMPERE C 169,33 9/8CM-CIC DYN.EUROPE 32,73 9/8CM-CIC FRANCE C 32,05 9/8CM-CIC EQUILIBRE C 70,07 9/8CM-CIC DYN.INTERN. 26,14 9/8CM-CIC OBLI C.T.D 136,40 10/8CM-CIC MID FRANCE 29,80 9/8

Fonds communs de placementsCM-CIC DYN.INTERN. 26,14 9/8CM-CIC OBLI C.T.D 136,40 10/8CM-CIC OBLIGATIOND 26,47 10/8CM-CIC MID FRANCE 29,80 9/8CM-CIC PLANBOURSEC 18,12 9/8CM-CIC TEMPERE C 169,33 9/8CM-CIC EURO ACTS C 19,85 9/8CM-CIC FRANCE C 32,05 9/8

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FRANCE CAC 40 3692,51 11/8 -1,02 4088,18 11/1 3287,57 25/5 11,50

ALLEMAGNE DAX Index 6213,70 11/8 -1,15 6386,97 6/8 5433,02 5/2 11,60

ROYAUME UNI FTSE 100 index 5310,38 11/8 -1,23 5833,73 16/4 4790,04 1/7 11,30

ETATS-UNIS Dow Jones ind. 10644,25 11/8 -0,51 11258,01 26/4 9614,32 2/7 12,10

Nasdaq composite 2277,17 11/8 -1,24 2535,28 26/4 2061,14 1/7 16,60

JAPON Nikkei 225 9292,85 11/8 -2,70 11408,17 5/4 9091,70 6/7 15,90

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VALEURS DU CAC40

Cours en euros.◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'animation.Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2010. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité.

ACCOR ......................... ◗ 24,48 24,65 -0,69 -6,43 30,74 22,25 1,05 T FR0000120404AIR LIQUIDE ....................... ◗ 85,82 86,68 -0,99 10,43 89,38 70,59 2,25 T FR0000120073ALCATEL-LUCENT ........... ◗ 2,19 2,23 -1,97 -8,19 2,69 1,83 0,16 T FR0000130007ALSTOM ............................ ◗ 41,99 42,48 -1,15 -14,41 55,14 35,42 1,24 T FR0010220475ARCELORMITTAL ................ 24,42 25,02 -2,38 -24,11 35,45 21,33 0,16 A LU0323134006AXA .................................... ◗ 14,08 14,28 -1,37 -14,87 17,60 11,51 0,55 T FR0000120628BNP PARIBAS ACT.A ........ ◗ 55,28 56,00 -1,29 -1,11 60,38 40,81 1,50 T FR0000131104BOUYGUES ....................... ◗ 33,16 33,87 -2,10 -8,96 40,56 30,40 1,60 T FR0000120503CAP GEMINI ...................... ◗ 35,85 36,64 -2,14 12,15 40,30 30,20 0,80 T FR0000125338CARREFOUR ..................... ◗ 35,94 36,21 -0,75 7,09 39,22 31,81 1,08 T FR0000120172CREDIT AGRICOLE ............ ◗ 10,81 10,98 -1,55 -12,54 13,78 7,87 0,45 T FR0000045072DANONE ............................ ◗ 42,94 43,01 -0,17 0,25 46,88 39,34 1,20 T FR0000120644DEXIA ................................... 3,67 3,74 -1,92 -13,83 4,87 2,72 0,15 D BE0003796134EADS ................................... ◗ 18,15 18,30 -0,79 28,86 18,95 13,29 0,17 T NL0000235190EDF ...................................... ◗ 33,67 33,91 -0,69 -18,97 42,84 30,14 0,60 S FR0010242511ESSILOR INTL .................... ◗ 48,01 48,33 -0,66 14,98 50,45 40,84 0,70 T FR0000121667FRANCE TELECOM ............ ◗ 16,30 16,32 -0,09 -6,45 17,92 14,01 0,80 S FR0000133308GDF SUEZ ........................... ◗ 26,00 26,37 -1,42 -14,17 30,77 22,64 0,67 S FR0010208488LAFARGE ........................... ◗ 39,66 40,15 -1,21 -31,40 63,00 39,22 2,00 T FR0000120537LAGARDERE ....................... ◗ 28,55 28,93 -1,31 0,48 32,95 24,08 1,30 T FR0000130213L’OREAL ............................ ◗ 80,04 80,42 -0,47 2,62 85,00 70,90 1,50 T FR0000120321LVMH MOET HEN. ............ ◗ 95,37 96,28 -0,95 21,68 97,72 74,19 1,30 S FR0000121014MICHELIN ........................... ◗ 61,27 62,24 -1,56 14,35 65,35 49,81 1,00 T FR0000121261PERNOD RICARD ............... ◗ 61,40 60,83 0,94 2,49 68,64 54,89 0,61 T FR0000120693PEUGEOT ............................ ◗ 22,35 22,60 -1,11 -5,56 27,49 17,92 1,50 T FR0000121501PPR ..................................... ◗ 104,95 106,15 -1,13 24,58 110,90 81,00 3,30 T FR0000121485RENAULT ............................ ◗ 33,86 34,40 -1,57 -6,46 40,39 26,56 3,80 T FR0000131906SAINT-GOBAIN .................. ◗ 32,44 32,95 -1,56 -14,80 40,28 29,30 1,00 T FR0000125007SANOFI-AVENTIS ............. ◗ 45,87 46,23 -0,79 -16,70 58,90 44,01 2,40 T FR0000120578SCHNEIDER ELECTRIC ..... ◗ 89,51 90,55 -1,15 9,45 93,60 72,00 2,05 T FR0000121972SOCIETE GENERALE ......... ◗ 44,23 45,07 -1,86 -9,64 53,12 29,70 0,25 T FR0000130809STMICROELECTR. ............. ◗ 6,13 6,29 -2,56 -4,61 8,08 5,73 0,06 A NL0000226223SUEZ ENV. .......................... ◗ 14,20 14,20 n/d -11,94 17,86 12,94 0,65 S FR0010613471TECHNIP ............................. ◗ 51,05 51,87 -1,58 3,34 64,85 45,14 1,35 T FR0000131708TOTAL ................................. ◗ 39,59 40,12 -1,33 -12,04 46,73 35,66 1,14 S FR0000120271UNIBAIL-RODAMCO ........ ◗ 149,10 151,15 -1,36 -2,99 161,45 119,85 8,00 D FR0000124711VALLOUREC ....................... ◗ 71,74 72,58 -1,16 12,93 81,61 60,35 3,50 T FR0000120354VEOLIA ENVIRON. ............. ◗ 20,93 21,06 -0,64 -9,51 26,49 18,74 1,21 T FR0000124141VINCI ................................... ◗ 37,20 37,71 -1,35 -5,75 44,98 33,01 1,10 S FR0000125486VIVENDI .............................. ◗ 18,16 18,28 -0,66 -12,67 21,47 16,18 1,40 T FR0000127771

Mercredi 11 août 9h45Valeur Dernier Cours % var. % var. Plus Plus Divid. Code cours préc. /préc. 31/12 haut bas net ISIN

Finance Des régulateursveulent se passerdes agences de notationQuatre régulateurs bancaires amé-ricains – la Réserve fédérale (Fed),la FDIC, et deux branches de régu-lation bancaire du Trésor appe-lées à fusionner (OCC et OTS) – ontindiqué, mardi 10 août, qu’ils sou-haitaient se passer des agences denotation pour évaluer la soliditéfinancière des banques. Ils ontpublié une proposition de nou-veau règlement qui sera soumiseà une enquête publique. La tropgrande confiance dans les notesde ces agences avait été identifiéecomme un facteur ayant aggravéla crise financière. – (AFP.)

Médias La taxe destinéeaux radios associativesest remboursée à NRJA la suite d’une décision de laCour européenne de justice de2008 invalidant la taxe imposéepar la France sur les radios et lestélévisions commerciales pourfinancer les radios associativesentre 1998 et 2002, l’Etat a reversé

à NRJ 4,4 millions d’euros. Les sta-tions assujetties à la taxe mais quine s’étaient pas jointes à la procé-dure ne toucheront rien.

Informatique Le patrond’Oracle critique l’évictionde celui de HPDans une lettre adressée au NewYork Times mardi 10 août, LarryEllison, patron de l’éditeur infor-matique américain Oracle, a criti-qué la décision du conseil d’admi-

nistration de Hewlett-Packard dedébarquer son patron, MarkHurd. « C’est la pire décision prisedepuis l’éviction de Steve Jobs parApple [en 1985] », a affirmé M. Elli-son. M. Hurd a été contraint à ladémission à la suite d’une plaintepour harcèlement sexuel.

Automobile Pas deproblème d’électroniquesur les ToyotaMalgré une étude technique

approfondie, l’agence de sécuritéroutière américaine, la NHTSA,n’a décelé aucun défaut dans lesystème électronique des voitu-res Toyota, qui avaient été misesen cause par des experts et des res-ponsables politiques pour des pro-blèmes d’accélération intempesti-ve. Les défaillances seraient duesà un blocage de la pédale d’accélé-ration dans le tapis. Toyota a dûrappeler plus de 7millions de véhi-cules aux Etats-Unis.

Aviation Le patron d’EADSen Amérique du Nord bles-sé dans un accident d’avionSean O’Keefe, directeur de la filia-le nord-américaine du construc-teur aéronautique EADS, a survé-cu à un accident d’avion en Alas-ka. Le petit appareil, un DeHavilland DHC-3 , qui transpor-tait neuf personnes, s’est écrasélundi soir dans une zone monta-gneuse à 500 km d’Anchorage.M.O’Keefe, blessé, a été hospitali-sé. Cinq passagers ont péri dansl’accident, dont l’ancien sénateurde l’Alaska Ted Stevens. – (AFP.)

Economie

Marchés

Distribution

Lareprise desgrands magasinsallemandsKarstadt patineLes 25 000 salariés de la chaîne de grands magasins allemands Karstadtdevront encore patienter au moins jusqu’au 3septembre pour connaî-tre leur sort. Mardi 10 août, le tribunal d’Essen a prolongé une nouvellefois le délai imparti à l’acheteur désigné de la chaîne de magasins, l’in-vestisseur allemand Nicolas Berggruen allié au groupe de textile BCBGMax Azria, pour ficeler son offre de reprise des 120magasins, ajoutantun nouveau chapitre au feuilleton mouvementé du sauvetage de lasociété. L’enseigne, créée en 1881 et solidement implantée dans le paysa-ge allemand, a été placée en dépôt de bilan le 9 juin 2009, dans la fouléede sa maison mère Arcandor. Si aucune solution de reprise n’aboutit, legroupe pourrait être démantelé.p

Retrouvez l’ensemble des cotations sur notre site Internet :http://finance.lemonde.fr

Lavie desentreprises

Pékindevra redoubler d’effortspourcontrôler samonnaie

P ékin voudrait à la fois unyuan stable mais aussi plusinfluent sur la scène interna-

tionale. Il sera difficile d’obtenirl’un et l’autre. Car une plus gran-de circulation du yuan en dehorsdes frontières chinoises entraîne-ra un afflux de capitaux dans lepays, rendant ainsi le contrôle dutaux de change plus complexe.Jusqu’à présent, Pékin a réussi àlimiter la volatilité du yuan. Maiscette situation ne peut pas dureréternellement.

La Chine est sur le point d’as-souplir ses contrôles de capitauxen ouvrant une brèche, à Hon-gkong. Depuis la mi-juillet, Pékina autorisé les entreprises basées àHongkong à détenir des comptescourants en yuans, transférerlibrement des fonds dans larégion et même faire parvenir desfonds vers la Chine. Quant auxbanques et aux assurances deHongkong, elles peuvent désor-mais vendre des produits structu-rés en yuans, qui fournissent desrendements plus élevés que lessimples dépôts.

Les entreprises chinoises, etpas seulement les financières,peuvent dorénavant profiter descoûts avantageux du crédit enyuans à Hongkong, et renvoyerl’argent chez elles. Mais pour riva-liser avec les 60milliards de dol-lars d’investissements directsétrangers qui entrent chaqueannée en Chine, la course sera lon-gue. En outre, chaque opérationdoit d’abord être approuvée parPékin.

En attendant, les taux d’intérêt

des comptes courants libellés enyuans sont trop faibles, ce qui frei-ne les épargnants hongkongais.Actuellement, Hongkong détient85 milliards de yuans (9,5 mil-liards d’euros) en comptes cou-rants, c’est-à-dire moins de 2 % dutotal de ses dépôts.

Jusqu’à présent, les flux de capi-taux n’ont pas affecté la capacitéde Pékin à maintenir un yuan sta-ble. Malgré l’importance de l’effetd’annonce du déblocage du yuanen juin, le prix comptant de ladevise est resté inchangé enjuillet, au taux de 6,77 yuans pourun dollar. Toutefois, la volatilités’est accrue : le volume de transac-tions au jour le jour est désormaisdeux fois plus élevé que celuiobservé en 2009.

Avec l’augmentation des flux

de capitaux, il sera plus difficile detenir le yuan en laisse. Certes,Pékin pourrait émettre des bonsdu Trésor pour absorber les liquidi-tés générées par les entrées de capi-taux, mais cela signifie payer desintérêts. A trop attirer de capitaux,le risque serait alors de compro-mettre la capacité de Pékin à rele-ver les taux d’intérêt à l’intérieurde ses frontières. Quoi qu’il en soit,le prix à payer pour un yuan libreest un effort de contrôle.p

Wei Gu

(Traduction de Séverine Gautron)

n Sur Breakingviews.comPlus de commentaires sur l’actualitééconomique et financière.

L es partisans de la théorie du«pic pétrolier » – le peak oil –viennent de perdre leur plus

grand prophète : Matt Simmons,banquier d’affaires de Houston,est décédé lundi 9août. Comme laplupart des pays refusent de divul-guer des données détailléesconcernant le pétrole, il s’écoulerasans doute beaucoup de tempsavant que les avertissements répé-tés de M. Simmons sur le déclinprochain de la production nesoient justifiés – ou soient discré-dités. Mais la croisade qu’ilmenait pour une plus grandetransparence sur les données des

réserves de pétrole se fait pluspressante que jamais.

Le fondateur du cabinet Sim-mons &Co a contribué à donnerdu poids à la théorie du «pic pétro-lier», à savoir le pic de productionde pétrole avant son déclin. Sonlivre Twilight in the Desert, publiéen 2005, s’appuyait sur la situa-tion en Arabie saoudite, le plusimportant producteur de pétroleau monde. Sur la base de 200 arti-cles techniques, M.Simmons yaffirmait que le plus grand champpétrolifère du royaume, Ghawar,produirait bientôt son volumemaximal. En conséquence, legéant allait commencer à devoirlutter pour rester en phase avec lademande croissante de pétrole.

Contrairement à King Hub-bert, le père de la théorie du peakoil, M. Simmons était financier etnon géologue. Aussi, la portéescientifique de son discours a par-fois été mise en doute. L’ancienresponsable de la gestion desréserves chez Aramco – la compa-gnie nationale saoudienne d’hy-drocarbures – Nansen Saleridisait d’ailleurs de lui, sur le tonde l’humour, qu’il pouvait bienlire 200 études de neurologie,pour autant, personne ne le laisse-rait pratiquer une chirurgie ducerveau.

Les dernières avancées ont tou-tefois semé le doute. Les progrèsaccomplis pour le forage en hautemer ont mis d’immenses réservesà portée de main au large descôtes de l’Afrique de l’Ouest, duBrésil et du golfe du Mexique.Comme les prix ont augmenté,l’extraction des sables bitumi-neux du Canada est devenue éco-nomiquement séduisante. Et si lecontexte politique le permettait,d’énormes réserves de pétrolebon marché pourraient êtreforées en Irak.

Cela ne remet toutefois pas enquestion les arguments de M.Sim-mons. Le sort de l’économie mon-diale dépend d’un approvisionne-ment énergétique fiable : il seraitdonc inconscient de s’en remettreaveuglément aux seules estima-tions des grands producteurs depétrole sur leurs propres réserves.Et toute transition vers un aban-don du pétrole devrait, après tout,être anticipée avec des décenniesd’avance. En cela, la quête d’infor-mation de M. Simmons ne doitpas s’éteindre avec lui.p

Christopher Swann

(Traduction de Séverine Gautron)

M aladresse?Passageenforce?Enannon-çant, mardi 10août, vouloir lancer dèscette année Street View en Allemagne,

un des pays où ce service de navigation est leplus controversé, Google a logiquement suscitéde vives réactions.

StreetView,lancéen 2007,disponibleaujour-d’hui dans 23 pays (dont la France), propose gra-tuitement aux internautes des vues à 360degrés des rues des villes, permettant de vérita-bles balades virtuelles. Les façades sont prisesen photo par des voitures affrétées par Google,équipées d’une caméra sur le toit. Des étudiantsà vélo sont aussi, par endroits, mis à contribu-tion. Le géant américain de l’Internet utilise unlogiciel pour «flouter » les visages et les plaquesminéralogiques.Concernantlesvingtvillesalle-mandes (Berlin, Francfort, Munich…) où StreetView sera bientôt disponible, Google a préciséqu’il donnait jusqu’au 15 septembre à ceux quine souhaitaient pas que leur habitation appa-raisse, pour se manifester.

« Google nous a imposé son calendrier. Nousdevions nous entendre sur les voies d’opposition[à la publication des photos] : par la Poste, parcourriel… Il n’a pas attendu», regrette JohannesCaspar, chargé de mission pour la protectiondes données personnelles de l’Etat de Ham-bourg.C’estluiquinégociaitavecGoogleconcer-nant Street View.

Ilse Aigner, la ministre allemande de la pro-tection des consommateurs, a déclaré sur le sitedu Frankfurter Allgemeine Zeitung qu’il était« décisif de savoir si Google respectera le droit

d’oppositiondeceuxquin’ontpasd’accèsà Inter-net». Dans le quotidien Handelsblatt, Falk Lüke,del’associationdeconsommateursVZBV,aesti-mé que le droit d’opposition ne devait pas êtrelimité dans le temps et s’est inquiété de savoir silescitoyens pourraient empêcher uneexploita-tioncommercialedesphotos.Enmanièredejus-tification, Google a précisé mardi que son servi-ce était très déjà populaire : « Plus d’un millionde panoramas sur Street View sont déjà consul-tés quotidiennement par des Allemands, notam-ment pour leurs destinations de vacances. »

«Ceux qui sont déjà sur Internet ne voient pasforcément le problème. Mais il y a des gens qui nesont pas connectés, plus âgés, et qui s’inquiètent.Street View pourrait être exploité par des cam-brioleurs. Google pourrait construire des profilsà partir de l’endroit où vous habitez, des pagesWeb sur lesquelles vous surfez… », réagit M. Cas-par. « Nous avons eu des expériences totalitaires,les Allemands sont sensibles à la propriété deleurs données personnelles », ajoute le juriste.

Street View ne fait pas polémique unique-ment en Allemagne. Surtout depuis mai : Goo-gle avait alors admis avoir – « par erreur », assu-rent ses dirigeants – collecté des données pri-

véeslors des prisesde vues.Au lieu den’enregis-trer que les identifiants des bornes Wi-Fi (nonsécurisées) devant lesquelles elles passaient, sesvoitures ont « aspiré » des courriels, des adres-ses URL de sites sur lesquels naviguaient à cemoment-là des internautes. Cette « erreur » arenforcé le doute sur les véritables intentionsde Google. C’est l’archivage systématique dequantités colossales d’informations par le lea-der mondial de la recherche en ligne qui inquiè-te les autorités de protection des données per-sonnelles. En plus des données de géolocalisa-tion, Google scanne régulièrement une grandepartie du Web et les informations de navigationdes internautes, officiellement pour assurer lebon fonctionnement du moteur de recherche.

Google afait amende honorable,s’engageantàdétruire lesinformationscollectées si lesagen-ces de protection des données personnellesl’exigeaient. C’est ce qui a été fait au Danemark,en Irlande, en Autriche. Au Royaume-Uni, lesautorités ont conclu, fin juillet, au caractère non«significatif » de ces données. Mais a contrario,l’Australie a jugé que Google avait enfreint seslois sur la vie privée. En France, la Commissionnationale de l’informatique et des libertés, quiétait parvenue à un accord dès 2008 pour le lan-cement de Street View, « poursuit ses investiga-tions » selon un porte-parole. Mardi 10 août, lapolice sud-coréenne a perquisitionné lesbureaux de Google à Séoul, à la recherche d’uneéventuelle preuve d’infractions à la loi. p

Cécile Ducourtieux et

Cécile Boutelet (à Francfort)

Jusqu’àprésent,lesflux decapitauxn’ontpasaffectélacapacité de laChineàmaintenirunyuan stable

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Lacroisade queMattSimmons menaitpourune plusgrandetransparencesurlesréservesde pétrolesefaitpressante

Leprophète du«picpétrolier»estmort, pas son combat

Legroupeaméricainveutlancer outre-Rhinet sansplusattendresontrèscontroverséservicedenavigation

Le point de vue des chroniqueurs de l’agence économique

ReutersBreakingviewsGoogledéfie l’Allemagneavec Street View

130123Jeudi 12 août 2010

Page 14: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Qu’est-cequiachangé? Le tim-bredesavoix,moinsmécani-que ? Le choix de ses mots,plus spontanés ? Le dosmoins raide, les gestes plussouples ? A l’aube de cettesecondesemained’audience,

le président Dominique Pauthe se détend.Ce procès l’intéresse. Les deux juges asses-seures qui l’entourent aussi. La plus jeunedes deux, une jolie femme brune, n’offreplus l’indolence distante des premiersjours. La seconde, toujours très attentive, aabandonné la défiance avec laquelle ellesemblait accueillir les explications des pré-venus. Le procès qui se joue là, devant eux,est en train de s’écarter de la stricte rigueurdu droit. Il s’échappe et chacun a envie de lesuivre.

Lescoudes posés sur le pupitre, les mainscroisées sous le menton, DominiquePauthe appelle Jacques Chirac à la barre.« Monsieur Chirac, les faits qui vous sontreprochés sont anciens. C’est une période dela vie politique particulière pour votre partiet pour vous-même, celle de la conquête dupouvoir. Elle a ses zones d’ombre. Depuis ledébut de cette audience, vous avez manifes-téà plusieursreprises le souhait de dire votrevérité. Le moment est venu. » DominiquePauthe ajoute, dans un sourire : « Il n’ad’ailleurs pas échappé au tribunal que vousavez parfois dissuadé vos avocats de vousinterrompre. Le tribunal a envie de vousentendre sur ce sujet.»

JacquesChiracposesesdeuxmainssurlabarre. Le micro renvoie l’écho d’un racle-ment de gorge.

«Monsieurleprésident,Mesdames…(Nou-veau raclement de gorge.) Le financementde la vie politique… Je pourrais vous parlerdes lois qui ont été votées à mon initiativepour mettre de l’ordre dans tout cela. Mais jedoute que ce soit ce qui vous intéresse…

–Vous avez raison de douter.–Monsieur le président, je vous ai dit que

jenelisais pasles journaux.Mais jenevispasen ermite. L’actualité de ces derniers mois aété mouvementée. On a parlé d’enveloppes.On a aussi parlé de rétrocommissions. Ce nesont pas des éléments de même nature. Nosconcitoyens ont le droit de se poser des ques-tions, nous avons le devoir d’y répondre. Jesuisdésormaisunvieilhomme.Celam’auto-riseunecertaineliberté.Voyez-vous,enpoliti-que, le nerf de la guerre, c’est l’argent.»

Du fond de la salle monte le cliquetis desclaviers d’ordinateur qui s’affolent. Les pre-mières phrases de Jacques Chirac tombenten moins de cinq minutes sur les fils desagences de presse et envahissent les sitesd’information en ligne.

L’ancienprésident semble hésiter. Domi-nique Pauthe l’encourage.

«Vous avez parlé d’enveloppes…– Ah oui, les enveloppes. Je comprends

votre intérêt… Ce que j’ai à vous dire tient enquelquesmots: j’ai eu des collaborateurs quisont allés chercher de l’argent pour moi,pourmescampagnesélectorales.Lefinance-ment de la vie politique exige des sommesastronomiques : les meetings, les déplace-ments, les affiches, les permanents. Com-ment croyez-vous que tout cela fonction-nait?MêmeleGénéral,Monsieurleprésiden-t… Mon père travaillait pour Marcel Das-

sault. J’aimais beaucoup ce petit hommegénial,quim’avaitprisenaffection.A25ans,j’en savais déjà beaucoup. Vraiment beau-coup.»

Les deux avocats de Chirac s’affaissentinsensiblement sur leurs sièges, ils évitentde se regarder.

« Les partis politiques ont toujours eubesoin d’argent. Il y a les militants, les entre-prises amies, les industriels, les grandesfamilles. Chacun veut aider. Plus le candidatest crédible, plus les caisses de campagne seremplissent. S’il est en perte de vitesse, leséquipes tirent le diable par la queue.»

Jacques Chirac parle lentement. Il choisitses mots, les lisse, parfois un peu trop, etveille à s’épargner.

«Ce n’est pas au niveau du candidat quetout cela se passe. C’est vrai pour moi, com-me ce le fut pour mes prédécesseurs et com-me cela l’a été, je n’en doute pas, pour monsuccesseur», prévient-il. Ces prudents préa-lables posés, il raconte « l’intendance d’unecampagne».

«Avant décembre1994, explique Chirac,mes responsables de campagne me disaientque l’argent rentrait difficilement. Tous lessondages me donnaient battu. Les circuitsfinanciers allaient alors à un candidat qu’ilsjugeaient plus crédible… On m’a même rap-porté que le ministre du budget de l’époque–dans la salle d’audience, chacun a mis lenom de Nicolas Sarkozy sur la fonction –disait à un certain nombre de chefs d’entre-prise: “Ne donnez pas à Chirac, il est mort.”Mais comme c’est un tout petit milieu, cer-tains d’entre eux me le rapportaient… Vingtans plus tôt, en 1974, on avait fait la mêmechose contre Chaban-Delmas. On disait auxindustriels: ne financez pas sa campagne, etça avait marché. Pauvre Chaban!»

Il sourit à ce souvenir et se tait quelquesinstants. Puis jette son dos en arrière, glisseles deux pouces dans sa ceinture, remonteson pantalon haut sur le ventre et reprendson récit, le menton relevé vers le tribunal.

«Quand les sondages se sont inversés enma faveur, tous ceux qui avaient éconduitpoliment mes collaborateurs se sont mis àles inviter à déjeuner ou à dîner. Et, à unmoment, tombait la phrase rituelle : “Com-ment peut-on faire pour vous aider?” Voilàles fameuses enveloppes qui vous intéres-sent tant, Monsieur le président.

–C’était beaucoup d’argent ?, demandeDominique Pauthe.

–Ce n’était pas considérable. Mais ce quicompte dans ces moments-là, ce n’est pas lasomme, c’est le fait qu’elle soit en liquide.»

Les trois juges du tribunal écarquillentles yeux.

« Expliquez-vous davantage, s’il vousplaît.

–Il y a des montants que l’on ne doit pasdépasser,descomptesdecampagnequisontsoumis à un contrôle…

–Et il y a ce qui n’entre pas dans ces comp-tes, c’est cela?

–Oui, Monsieur le président. Pour cela, ona besoin d’hommes de confiance autour desoi… Parce qu’il faut participer à beaucoupde déjeuners et à beaucoup de dîners…»

Derrière lui, ses deux anciens chefs decabinet, Michel Roussin et Rémy Chardon,restent impassibles.

« Comment se passent ces déjeuners ouces dîners?

–Mesancienscollaborateursvousraconte-raient sans doute cela mieux que moi. Maisjeneveuxpaslesmettremalàl’aise.C’esttou-jours un peu la même chose. En période élec-

torale, il suffit de dire à un représentant dupatronat : “Je déjeunerais volontiers avecvous”ou“J’aienviedefaireuntourd’horizonavecvous”.Lerepasestsouventdélicieux.Leshôtes ne sont pas n’importe qui. On fait untour d’horizon, chacun explique comment ilfaut diriger le pays, réformer la fiscalité,revoir le droit des sociétés et, à la fin, on voustend votre manteau avec une enveloppekraft en vous disant : “Je crois que ceci estpourvous.”C’estvraipourtouslescandidats.Certains sont bien sûr moins souvent invitésque d’autres…

–Etiez-vous au courant?–Dans le détail ? Evidemment non. Je le

répète, tout cela se passe au niveau des col-laborateurs. Mais le candidat n’est pasaveugle.

–Vous évoquiez tout à l’heure les grandesfortunes…

–Monsieur le président. Il n’est pas ques-tion pour moi de commenter l’actualité. Jeparle du système que j’ai connu tout au longde ma vie politique.

–Pensez-vous qu’il a perduré?»Jacques Chirac inspire longuement« On ne m’a pas rapporté qu’il avait dis-

paru. »Il a prononcé ces derniers mots dans un

silence absolu, aussitôt suivi du brouhahades chaises que l’on bouscule, au fond de lasalle.Lesbancsdelapressesevident,lesjour-nalistes s’éparpillent pour alerter leursrédactions.Leprésidentsuspendl’audiencequelques minutes.

Jacques Chirac s’est assis. Les traits de sonvisage sont détendus. Il retire ses lunettes,se tourne vers ses avocats. « Où estClaude?», murmure-t-il.

L’avocat lui désigne le cinquième rangdes bancs du public. Celle que l’on a vue si

souvent poser un index impérieux sur seslèvrespour signifier au président de se tairehoche la tête en signe d’approbation et sou-rit. Jacques Chirac pose sa main sur celle deJean Veil. «J’ai encore des choses à dire.»

Au regard inquiet que son avocat posesur lui, l’ancien président répond par unéclat de rire. «Je sais où je vais.»

Dans le brouhaha de la salle perce le tim-bre flûté de l’huissière. « Le tribunal ! »,annonce-t-elle. Du regard, elle s’assure quetous, prévenus, avocats, public, se sontlevés. Le président entre, suivi de ses deuxassesseures.

«L’audience est reprise, vous pouvez vousasseoir. » Dominique Pauthe tourne sonvisage vers Jacques Chirac:

«MonsieurChirac,avez-vousd’autrescho-ses à ajouter à votre déposition?»

Me Jean Veil échange un rapide regardavec le procureur, qui fronce les sourcils.

«Absolument,Monsieurleprésident,Mes-dames. Je souhaiterais être bien compris.L’ancien président de la République que jesuis ne peut s’empêcher de ressentir ce pro-cès comme une offense. Il a été voulu, je suisvenu. Peut-être parce que je sens que cetteexpositionpubliqueestpourmoiladernière,tout cela m’a incité à réfléchir sur le sens queje devais donner à ce procès.

–Le tribunal peut-il le savoir?– J’éprouve un goût très ancien pour la

poésiejaponaise.Çan’estplusunsecretpourpersonne. J’apprécie particulièrement legrandmaître Basho. Je ressens à la lecture deses haïkus beaucoup de sérénité.»

L’ancien président glisse sa main droitedans la poche intérieure de son veston, ensort une feuille bristol, déplie seslunettes etles chausse. Sur le visage de sa fille Claude,assise à une dizaine de mètres de lui, flotte

une expression émue. Jacques Chirac lit endétachant les mots:

«“Sans en être mort/J’arrive au bout duvoyage/En ce soir d’automne.”»

Lentement, il retire ses lunettes. Le silen-ce de la salle est absolu.

«J’ai parlé tout à l’heure de rétrocommis-sions. Des familles veulent savoir si oui ounon la mort de onze de nos compatriotescivils en Afghanistan est liée à des affaires derétrocommissions. Lorsque je suis arrivé aupouvoir, en 1995, j’ai été alerté sur un certainnombre de dossiers, laissés par la précédenteéquipe gouvernementale. Je saisis ce cadresolenneld’uneaudiencepubliquepourdécla-rer que je me tiens à la disposition du jugequi instruit le dossier de Karachi s’il souhaitemon témoignage.»

La déclaration fait l’effet d’une bombe.Dehors,lesdéfenseursdel’ancienprésidentsontassaillisparlesjournalistes,quilespres-sent de convaincre Jacques Chirac de venirs’exprimer. «Non, ça ne serait pas convena-ble », répond-il à Georges Kiejman, avantd’emprunter, comme chaque jour, la sortiedérobée de la salle d’audience.

Unpeuplustard,lesdeuxavocatsdescen-dent ensemble les marches du palais. Aumomentdeseséparerdesonconfrère,Geor-ges Kiejman se tourne vers Jean Veil :

«Jean,pourtes honoraires,commentfais-tu avec le président?»

Jean Veil sourit :«Je les envoie rue de Lille…–Et?– Et j’attends depuis quatre ans une

réponse…» p

Cassiopée

Illustration : Jean-Marc Pau

Prochain article : « Il veut continuer à tuer ? »

Chirac,leromand’unprocèsNousy voilà!L’ancien président a décidéderaconterau tribunal les coulissesdu financement dela vie politique:lesenveloppes,lesrétrocommissions…jusqu’àlâcherunevéritablebombe

«Ilyalesentreprisesamies, lesgrandesfamilles…»Fiction politique 9/17

14 0123Jeudi 12 août 2010

Page 15: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

U ne revue écologiste,une seule ? Impossible.Cela ne peut être qu’un

bouquet, une flore sauvage, desadventices poussant au borddes autoroutes de papier, desfleurs inattendues prospérantsur le compost de projets éva-nouis. Car depuis quelquesannées, la réflexion écologiste arefleuri et, si elle ne connaît nigros tirages ni forte visibilité – lesmilieuxditsintellectuelsnes’inté-ressant pas réellement à la théma-tique –, elle manifeste une vitalitérevigorante. En même temps,aucune n’émerge réellement com-me le donneur de ton du débat éco-logique. Elles composent ensem-ble un paysage chatoyant et assezcohérent, mais où aucun reliefaccusé n’émerge vraiment.

A mi-chemin entre le journal, larevue et l’expérience militante, S!lence mérite la palme de la ténaci-té: lancée en 1982 au moment d’unvif reflux de l’écologisme en Fran-ce, elle a toujours assuré une paru-tion mensuelle marquée par undossier thématique complétéd’une multitude de petites infor-mations. S ! lence a bien souventété la première à repérer des thè-mes émergents dans la commu-nauté écologiste radicale avant deconnaître une assez large fortunepublique. Elle a ainsi lancé la thé-matique de la décroissance, enfévrier 2002, reprise avec succèsensuite par le journal La Décrois-sance, lancé en 2004. S! lence diffu-se près de 5 000 exemplaires, sur-tout par abonnements.

Issue, de son côté, de militantsdes Verts, Ecorev a publié son pre-mier numéro en janvier 2000,sous le parrainage d’André Gorz,

après un numéro zéro consacré à«Survivre au capitalisme». Elle estnée,selonJérôme Gleizes, un desesanimateurs, d’un « refus de l’écolo-gie d’accompagnement » incarnéepar Dominique Voynet, lors de sonpassage dans le gouvernement deLionel Jospin. « Nous allons des éco-logistes de gauche à des décrois-santsqui ne veulent pas se position-neràgauche. »Larevuetrimestriel-le, animée par des normaliens oudes universitaires, se définit com-me « revue critique de l’écologiepolitique », selon son sous-titre,plutôt que théorique. Elle recher-che–etobtient– unebonnelisibili-té, par des articles concis, sanslourd appareil de notes, et souventillustrés. Cette volonté pédagogi-que a fait d’Ecorev l’explorateur dethématiques transversales (lecorps, la démocratie, la science,l’histoire de l’écologie, la mondiali-sation, la décroissance…). Mais cechoix rédactionnel l’a conduite àdélaisser des interrogations plusconcrètes du débat politique ouéconomique, si bien que la revuesemble parfois en apesanteur parrapport au combat des idées. Sesscores sont modestes mais régu-liers, avec une diffusion moyennede plus de 500 exemplaires.

C’est aussi en 2000 qu’est néL’Ecologiste, version française dumensuel The Ecologist fondé parTeddy Goldsmith, en 1970. Trimes-triel, L’Ecologiste a tout de suitepris, tout en se présentant commeun magazine (couverture en cou-leurs, format A4), une forme derevue centrée sur un dossier écritpar des auteurs souvent scientifi-ques, et intégrant nombre d’arti-cles traduits de l’anglais. Animépar Thierry Jaccaud, L’Ecologiste apris son autonomie par rapport àson parrain britannique, tout en

restant sur la ligne d’une écologienaturaliste, portant une grandeattention aux questions de biodi-versité, de forêts, d’agriculture,mais aussi de santé ou de pestici-des. Diffusant à plusieurs milliersd’exemplaires, la revue doit trou-ver un nouveau souffle après ledécès de son fondateur et mécène,Teddy Goldsmith, en août 2009.

Fondée en 2002, à Genève, parSusana Jourdan et Jacques Mire-nowicz, La Revue durable, sous uneforme assez comparable à L’Ecolo-giste (aspect magazine, un dossiercentralparnuméro),aprogressive-ment gagné une visibilité en adop-tant un angle axé sur la questionde l’intégration des pratiques éco-logiques dans les sociétés moder-nes.S’intéressantdavantageàl’éco-nomie qu’à la nature, La Revuedurable cherche un équilibre entrele pragmatisme du « développe-ment durable », honni par nombred’écologistes comme un faux nezdu capitalisme, et la radicalité deschoix qu’impose la crise écologi-que. Cela compose des numérosintéressants et bien informés del’état des questions traitées, maisoù la dimension conflictuelle deschoix sociaux semble évacuée.

Dernier venu dans le champ dela réflexion écologiste, Entropia estnée, en novembre 2006, avec unpremier numéro consacré à« Décroissance et politique ». Larevue, lancée par Jean-Claude Bes-son-Girard, Serge Latouche, AlainGras, Agnès Sinaï, et d’autres, affi-chait une ligne claire définie parson sous-titre : « Revue d’étudethéoriqueetpolitiquede ladécrois-sance». Editée par la maison d’édi-tion Parangon à raison de deuxnuméros par an, Entropia assumel’austérité de sa présentation : « Lesmots sont importants », résumeson principal animateur, Jean-Claude Besson-Girard. Entropiapoursuitson chemin avec ténacité,s’interrogeant au fil des numérossur « Crise éthique, éthique de cri-se? »,« L’effondrement :et après ?»ou « Territoires de la décroissan-ce», attirant parfois des signaturessituées hors du champ de l’écolo-gie comme Zygmunt Bauman ouHervé Le Bras.

Si l’on en croit le paysage intel-lectuel dessiné par les revues, laréflexion écologique va à reboursdes politiques concrètementmises en place par les gouverne-ments sous l’étendard du dévelop-pement durable. Il n’y a guère pourdéfendre celui-ci que Terra Eco,sous-titré«mensueldudéveloppe-ment durable », qui se présentecomme un magazine sans ambi-tion intellectuelle. En ce sens, l’éco-logie reste une pensée du refus del’ordre existant, refus revigorédepuis quelques années par l’affir-mation de la nécessaire objectionde croissance.p

Hervé Kempf

MickaëlMarieSecrétaire national adjointdes Verts,conseiller régionalde Basse-Normandie

EntropiaDirecteur :Jean-Claude Besson-GirardSemestriel, 15 euros

Jours mouvementés pour lenucléaire français. En unesemaine, au creux de l’été, onapprend ainsi que le PDGd’EDF coiffera désormais tou-te l’équipe de la France

nucléaire, son homologue d’Arevapayant l’échec d’Abou Dhabi et lesretards conséquents des chantiersEPR,ceréacteurdenouvellegénéra-tion vanté, sans crainte du ridicule,comme « post-Tchernobyl » et«post-11-Septembre ». Que lesditsretards sont désormais admis parEDF, qui porte du coup la facture de3,3à5milliardsd’euros.Quel’Agen-ce internationale de l’énergies’émeut, dans ses observations, del’imprécision des coûts réels dedéveloppement du parc nucléairefrançais.

Dernière touche au tableau : latardive publication du rapportRoussely sur « L’avenir de la filièrefrançaise du nucléaire civil », quiconfirme,en destermesdiplomati-ques, le désastre industriel de l’EPR,dont il est suggéré pudiquement«d’optimiser» la conception.

Dure semaine ? Même pas. Carface au désastre, la France ne chan-gera rien. Poursuivra sa stratégied’exportation d’un modèle énergé-tique unique, et compte biend’abord la renforcer à l’intérieur deses frontières. C’est la magie del’idéologie que de résister aux faits,et la force du programme électro-nucléaire – et du lobby qui ledéfend et en dépend–est là: jamaisl’Etat, soutien premier de l’atome,n’aura permis une évaluationcontradictoire de la politiqueconduite, qui permettrait auxcitoyens et contribuables de se fai-re une idée plus juste que celle despublicités des opérateurs.

Depuis son lancement il y a plusde quarante ans, on disposeraitpourtant d’un recul suffisant pourengager, sans a priori, un état aussiexhaustif que possible des avanta-ges et des inconvénients de la pro-duction électronucléaire. D’autantqu’elleapris,enFrance,unedimen-

sion inédite. Et pour cause: la Fran-ce concentre sur son seul territoireun sur sept des réacteurs en activi-té dans le monde.

Esquissons, donc, quelques pre-miers éléments de bilan. Ils serontincompletsetjene doutepasqu’untel inventaire trouvera très vite sescontradicteurs. Tant mieux. Sur leplan budgétaire, d’abord. On saitque la production électronucléairea, ces quarante dernières années,aspiré la presque-totalité des cré-dits publics dédiés tant à la produc-tion qu’à la recherche sur l’énergie.C’est à cette aune que doit être jugéle programme électronucléaire, sidumoinsl’onsesouciedel’efficaci-té de la dépense publique.

Or ces efforts massifs n’ont per-mis ni de résoudre, malgré desengagements aussi solennels querépétés, le problème crucial desdéchets radioactifs, dont la dange-rositése mesure tout demême par-fois en centaines de milliers d’an-nées, ni d’entériner la si fameusepromesse de l’indépendance éner-gétique, mythe qui s’écroule dèslors que le minerai est importé,dans des conditions d’extractiond’ailleurs indignes de notre pays :désastres sanitaires et écologiques,violations des droits humains,arrangements avec des régimesnotoirement corrompus…

Autre effet collatéral de la capta-tion par le nucléaire de la mannebudgétaire: lesénergiesrenouvela-bles sont sous-développées, quandd’autres pays, pas mieux dotés quenous (le potentiel éolien de la Fran-celaisserêveur,quandonlecompa-reauxchiffresdesréalisations),ontsu prendre le virage.

Sur les plans technologique eténergétique, ensuite. L’apothéosescientifique et industrielle promisea déchu en échec patent. Le parcassure à peu près la satisfaction desbesoins électriques du pays, au prixde surcoûts colossaux nés de la sur-capacité installée et d’une moyen-ne de production inférieure à cellede plusieurs de ses voisins.

Maislaprouessetourneàlafarcelorsque, et c’est un événementannuel désormais, des régionsentières sont menacées de plongerdans le noir. Ces épisodes ont lemérite d’agir comme une (brutale)révélation: malgré des investisse-ments publics sans équivalent, lesystème ne fonctionne pas.

Sur le plan social, également. Ledéveloppement du parc nucléaires’estdoubléd’unestratégiededéve-loppement massif du chauffageélectrique, puisqu’il fallait absorberla production, coûte que coûte. Cechoix, particulièrement net dansles logements d’habitat social, a eupour corollaire le sous-investisse-ment dans l’isolation et la faible

attention portée, jusqu’à une épo-que récente, à la performance éner-gétique des bâtiments.

Conséquencemajeure,la«préca-rité énergétique » de millions deménages, prisonniers de facturesd’électricité en hausse constante.S’ilestimpossibled’imputerlatota-litédelaprécaritéénergétique(10%de la population française concer-née) au seul chauffage électrique,cher et peu efficace, son développe-ment a accru les risques de vulnéra-bilité des ménages. Toujours per-suadée de l’excellence du tout-nucléaire,laFrancecontinued’équi-

perdechauffageélectriquesesnou-veaux logements (les trois quartsdesconstructionsen2008)etlePar-lementpersisteàsoutenirunerégle-mentation thermique qui lui estoutrancièrementfavorable.Làenco-re, glorieux bilan.

Quatrième et dernière remar-que: la domination du nucléaire, larépétition de cet aveuglement quela politique conduite était la seulepossible, la marginalisation de toutpoint de vue critique… Tout cela aconsacré,dans l’esprit commundescitoyens, l’idée qu’aucune autresolution n’est possible.

Les expériences de nombreuxpaysnousenseignentpourtantradi-calement le contraire. Elles sontécartées, comme l’est par avancetout ce qui viendrait affaiblir la thè-se de l’infaillibilité nucléaire. Ainsides recherches montrant que lenucléaire n’était d’aucun secoursvéritabledanslaluttecontreledérè-glement climatique ou dans la défi-nition d’une stratégie de réductiondeladépendanceauxénergiesfossi-les, mais qu’il fallait porter l’effortsurlesstratégiesdesobriétéetd’effi-cacitéénergétique…renduesimpos-sibles si l’on choisit pour priorité ledéveloppement d’un parc électro-nucléaire, et ses investissementscolossaux.

Làestpeut-êtreleplusgranddra-me né du choix français du tout-nucléaire,quel’onmesureenBasse-Normandie, terre de Flamanville etde la Hague, presque physique-ment:envoulantàtouteforceprou-ver que ce choix était le seul possi-ble,rationnel et efficace, ila stérilisél’imagination autant que le débat,et condamné la société française àn’imaginer le futur que comme laperpétuation inaltérée du présent.Danslemondequivient,cettefaute-là ne saurait être prolongée sansdommages. Sortir de l’illusion, c’estregarder en face le bilan du pro-grammeélectronucléaire.Cetteana-lyse lucide est le préalable nécessai-re à l’élaboration d’autres scénariosénergétiques. Ils sont urgents.p

27/30 Les écologistes,c’est le bouquet

On assiste aujour-d’hui à de fortschangements desmarchésdel’électri-cité liés aux évolu-tions réglementai-

res, sociétales et environnementa-les et aux avancées technologi-ques. La transformation desréseaux électriques en réseauxintelligents constitue la clé de voû-te de cette mutation. Au risque dese voir distancée par les Etats Unis,l’Europe doit donc sans délai s’ensaisir et agir.

A chaque millionième de secon-de, le système électrique équilibrela production et la consommation,grâce à une gestion fine desréseaux. Mais l’accroissement de lapart des énergies renouvelablesdans le « mix énergétique », leschangements des modes deconsommation, l’accroissementprobable de la consommationalliée à la très grande difficulté deconstruire de nouvelles lignes ren-dent indispensable une gestion«plus intelligente» des réseaux.

Fonctionnant de manière bidi-rectionnelle alors que les réseauxactuels sont unidirectionnels, cesréseaux intelligents répondront àune aspiration grandissante denoscitoyens d’être des « consomac-teurs» pour utiliser leur énergie demanière plus efficace, en émettantmoins de CO2. Cette gestion desflux est aussi indispensable pourintégrer sur le réseau la productionprovenant des énergies renouvela-bles (éolien et solaire), en général

de petite taille et décentralisée. Ensomme, l’électricité ne se propage-ra plus seulement des grosses cen-trales de production vers unconsommateur passif, mais dansdes directions adaptées aux fluxplus complexes de demain.

Energies renouvelablesLa deuxième caractéristique du

réseau intelligent est qu’il seranumérique. Cela permettra d’accé-lérer les échanges d’informations,de collecter davantage de donnéeset de les utiliser pour améliorer lagestion du réseau et le service auxclients. Cette gestion plus fine duréseau devient d’ailleurs indispen-sable pour gérer une proportionplus importante et peu prédictibled’énergies renouvelables.

La troisième caractéristiqueconsistera à adapter les systèmesinformatiques à l’augmentationconsidérable du nombre de don-nées recueillies sur le réseau et àdéfinir des protocoles permettantaux nombreux équipements decommuniquer entre eux.

Le premier pas vers un réseaude distribution intelligent est engénéral la posechez les particuliersde compteurs intelligents permet-

tant de relever la consommationfréquemment. Ainsi, en 2003, sousla pression des consommateurs, legouvernement suédois a renduobligatoire le déploiement généra-lisé de compteurs communicants :en juillet 2009, environ 6millionsd’appareils ont été installés, per-mettant la facturation mensuelleexacte des consommations.

Les compteurs intelligents per-mettent une meilleure maîtrise desa consommation et de ses factu-res. Une étude de Capgemini surles pays de l’Europe des quinze amontré que, dans un scénariovolontariste, les compteurs intelli-gents pourraient permettre à l’ho-rizon 2020 d’économiser200 terawattheures par an (TWh,mille milliards de wattheures), soitla consommation résidentiellecumulée de l’Espagne et de l’Alle-magne, et d’éviter l’émission de100millions de tonnes de CO2.

Encore faut-il réunir les condi-tions de ce développement. On enretiendra trois principales.D’abord le courage politique d’ac-cepter une hausse du prix de l’élec-tricité, inévitable pour assurer leretour sur investissement dudéploiement de réseaux intelli-gents.Ensuite,deseffortsderecher-che, par exemple sur le stockage del’électricité ou sur les innovationstechnologiques et économiquespoureffacerlespointes deconsom-mation. Enfin, la normalisationdes protocoles de communicationen amont et en aval, permettantauxnombreux équipements sur le

réseau d’échanger des données,comme permettre aux appareilsménagerséquipantlamaisonintel-ligente de dialoguer entre eux.

Labonne échelle pourtoutes cesactions, et notamment la normali-sation,est leniveaucommunautai-re.Lespayseuropéensdoiventmet-tre en commun leurs moyensfinanciers et technologiques etassocier les régulateurs à la démar-che. Certes, l’Union européenne nereste pas l’arme au pied.

Des sommes importantes sontmobilisables(parexemple 250mil-lions d’euros du grand empruntsont destinés aux réseaux numéri-ques), mais elles sont dispersées,gérées dans des programmes com-munautaires différents et à deséchelles (nationale, européenne)différentes.

Aujourd’hui, les Etats-Unis vontplus vite et plus loin que le VieuxContinent. Le gouvernement amé-ricain a débloqué 4,5 milliards dedollars à la conception de prototy-pes et à l’amélioration des techno-logies. De même, des groupes detravail ont été mis en place par ledépartement américain de l’éner-gie sur la question des protocolesde communication.

Sans mobilisation européennesur le sujet, les équipementiersaméricains gagneront un doubleavantage compétitif : celui de dis-poser de technologies expérimen-tées, et celui d’imposer leurs nor-mes. Le marché européen auraitgrand tort de laisser s’installer untel déséquilibre.p

Malgrédesinvestissements

publicssanséquivalent, lesystèmenefonctionnepas»

Dressonsenfin le bilan dunucléaire françaisUnepolitique aveugle, coûteuse et inefficace

Laréflexionécologiqueva àreboursdespolitiquesmisesen placeparlesgouvernements

Analyses&DébatsDécryptages

Colette LewinerDirectrice internationale del’activité Energie, Utilitieset Chimie chez Capgemini

Optonspour les réseaux électriques intelligentsL’Europe doitse mobiliseret agir auplus vite

La saga des revues

150123Jeudi 12 août 2010

Page 16: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

L’historien britannique TonyJudt est mort vendredi 6 aoûtchez lui, à New York, des suitesde la maladie de Charcot. Cettemaladie neurodégénérativedont il était atteint depuis

deuxans lui avait fait perdre l’usage de sesmembresetdesesmuscles. Ilétaittétraplé-gique, ses poumons ne fonctionnaientdepuis des mois qu’à l’aide d’un appareild’assistancerespiratoire.Directeurdel’Ins-titut Erich-Maria-Remarque à l’universitéde New York, essayiste piquant et finconnaisseur de l’histoire française et euro-péenne du XXe siècle, il était l’une des gran-desfiguresdumondeintellectuelnew-yor-kais. Attachant, sceptique, inclassable. Onse pressait à ses conférences, et ses articlessuscitaient régulièrement la polémique.

Il était né à Londres le 2 janvier 1948,dans les faubourgs de l’East End, à l’époquele fief des exilés juifs d’Europe centrale etorientale. A l’adolescence, il s’engagea dansles mouvements de jeunesse sioniste ; l’étévenu, il s’échinait dans des kibboutz dujeune Etat d’Israël. Il prit le dernier avion àdestination de Tel-Aviv, en 1967, justeavant la guerre des Six-Jours. Il servit dechauffeur dans les unités de Tsahal, puis, àla fin des hostilités, devint traducteur pourdes groupes de volontaires sur les hau-teursduGolan qu’Israëlvenait d’arracheràla Syrie.

Déçu par la vague de nationalisme quirégnait alors, il rentra en Europe et repritses études d’histoire au King’s College deCambridge.Ilensortit,en1972,avecundoc-torat d’histoire, après avoir aussi passé unan à l’Ecole normale supérieure (ENS), àParis. Commença une féconde carrièred’universitaire: àBerkeley,àOxford,puisàl’université de New York, où, en 1995, il pritla direction du nouvel Institut Erich MariaRemarque, dédié à l’étude de l’histoireeuropéenne contemporaine.

Tony Judt avait d’abord axé ses recher-ches sur le mouvement ouvrier français dela fin du XIXe siècle. Sa thèse portait sur lesocialisme en Provence de 1871 à 1914. Ilavait ensuite consacré de nombreux écritsau marxisme et à la gauche française, de larévolutionde Juilletàl’élection deFrançoisMitterrand. Dans son ouvrage Un passéimparfait (Fayard, 1992), cet admirateur deCamus, de Blum et d’Aron, trinité à laquel-le il consacra par la suite un autre livre (TheBurden of Responsibility : Blum, Camus,Aron, and the French Twentieth Century,University of Chicago Press, 1998), passaitaucriblelesintellectuelsfrançaisdel’après-guerre. Il dénonçait leur « auto-amnésie »vis-à-vis du régime de Vichy et leur adora-tion de Staline « à un niveau aussi répu-gnant qu’incompréhensible».

Il s’en prenait en particulier au magistè-redeJean-PaulSartre,«symboled’unegéné-ration lâche et à la conscience peu tranquil-le», plusencline selonluiàs’appesantirsurles malheurs du monde qu’à se penchersur les méfaits de son propre passé.

En2005,cet érudit qui maîtrisait le fran-çais, l’allemand et avait appris plus tard letchèque (afin d’échanger avec ses héros, lesdissidents d’avant la chute du rideau defer), signait son grand œuvre avec Aprèsguerre. Une histoire de l’Europe depuis 1945(Armand Colin, 2007). Dans cette sommemagistrale de plus de 1 000 pages, récom-pensée par le Prix du livre européen, TonyJudt embrassait d’un grand souffle soixan-teansd’histoireduVieuxContinent.Dignede la meilleure historiographie anglo-saxonne, il y alliait verve, anecdotes etréflexions synthétiques mais pointues. S’il

se passionnait pour l’Europe, ses peuples,ses traditions culinaires et ses paysages,Tony Judt se méfiait des eurocrates deBruxelles, qu’il comparait aux despoteséclairés de la fin du XVIIIe siècle, à JosephIId’AutricheouàFrédéricle GranddePrusse,propageant leurs idéaux rationnels d’ad-ministration universelle, régis par les hor-logeries parallèles et complémentaires dumarché et du droit.

Marxiste non orthodoxe, anticommu-niste virulent – il considérait que le philo-sophe Louis Althusser était un « charla-tan» –, Tony Judt demeurait un adepte dela social-démocratie, dont il espérait lerenouveau.

Ces derniers mois, malgré la maladie, ilavait publié en feuilleton dans la New YorkReview of Books des fragments de Mémoi-res plus intimistes, ironiques et mélancoli-ques aussi, où il narrait d’une maîtresseplume l’Angleterre de sa jeunesse, desvacances familiales dans un chalet suisseou sa première traversée des Etats-Unisdans une Buick oblongue et dorée… Ilsferont l’objet d’un livre en 2011.

«Je n’ai jamais été un adepte du silence,comme étudiant ou comme professeur »,écrivait-il y a peu dans les colonnes de laprestigieuse revue new-yorkaise. En effet,Tony Judt ne tint jamais sa langue dans sapoche et rien ne lui plaisait davantage quede croiser le fer avec ses collègues. De gau-che, il était considéré comme un réaction-naire par nombre de professeurs de l’uni-versité de New York, qui lui reprochaientson élitisme et son mépris pour le postmo-dernisme et le structuralisme.

Un intellectuel des confinsFier de son héritage juif, Judt s’était aus-

si attiré les foudres de la plupart des orga-nisationsjuivesaméricainesaprèsson tex-te « Israël : l’alternative », paru à l’autom-ne 2003 dans la New York Review of Books.Considérant que le sionisme était un ava-tar des nationalismes ethniques centre-européens de la fin du XIXe, il écrivait quel’Etat d’Israël était un anachronisme. Leprocessus de paix ayant été « assassiné »par l’incurie et la lâcheté des dirigeantsisraéliens et palestiniens, par la bêtise des

colons et des terroristes et par la noncha-lance de l’Amérique, Judt recommandaitla création d’un Etat binational pour met-tre un terme au conflit, sauver l’âme d’Is-raël et enterrer le projet sioniste…

Il n’était jamais à court de contradic-tions. C’était un idéaliste, mais toujoursprompt à critiquer les beaux esprits quipartageaient ses rêveries; un social-démo-crate européen qui avait fait son nid auxEtats-Unis ; un intellectuel engagé « à lafrançaise », qui raillait ses homologuesfrançais– dans un récentéchange de mailsavec l’auteur de ces lignes, il se moquaitencore de Pascal Bruckner et de Bernard-Henri Lévy, « célèbres pour être célèbres » ;un contempteur féroce de Bush et qu’Oba-ma laissait froid…

Judt, électron libre qui aimait les trainset les ferries, fut un dissident permanent,un cosmopolite critique en diaspora àtoutjamais.Un Zivilizationliterat,un intel-lectuel des confins, dans la lignée de sesmaîtres, Manès Sperber et Joseph Roth,Czeslaw Milosz et Leszek Kolakowski. p

Olivier Guez

V ittorio De Sica, MichelangeloAntonioni, Mario Monicelli, Lui-gi Comencini, Francesco Rosi,

Mauro Bolognini, Franco Zeffirelli etsurtout Luchino Visconti : la liste descinéastes italiens qui ont tourné des scé-narios écrits ou coécrits par Suso Cecchid’Amico ressemble à un dictionnaireexhaustif, auquel on aurait arraché laseule page Federico Fellini. L’infatiga-ble scénariste italienne est morte, le31 juillet, à Rome, après une longuemaladie. Elle avait 96 ans.

Giovanna Cecchi, bientôt surnomméeSuso, est née le 21 juillet 1914 à Rome,d’un père critique littéraire et d’unemère peintre. Sous le fascisme, elle étu-die en Grande-Bretagne, avant de pren-

dre un emploi dans un ministère tout entraduisant des œuvres littéraires (Judel’obscur, de Thomas Hardy, entre autres)de l’anglais.

A la Libération, elle se rapproche dumilieu du cinéma. Son premier scénario,écrit pour le jeune producteur Carlo Pon-ti, a pour titre Avatar. Mais cette adapta-tion de Théophile Gautier ne sera jamaistournée. Elle travaille ensuite avec LuigiZampa et se lie d’amitié avec AnnaMagnani, qui tient la vedette dans L’Ho-norable Angelina (1947).

En 1949, Suso Cecchi d’Amico fait par-tie de l’impressionnante équipe de scéna-ristes réunie par Vittorio De Sica pour LeVoleur de bicyclette. C’est elle qui a l’idéedu vol final, alors que son collègue Cesa-re Zavattini envisageait de renvoyer lepère et le fils chez eux, défaits par la per-te de la bicyclette.

Le succès mondial du film de De Sicaattire l’attention des studios hollywoo-diens, et Suso Cecchi d’Amico collabore(sans être créditée au générique) au scé-nario de Vacances romaines (1953), deWilliam Wyler, avec Audrey Hepburn etGregory Peck.

Avec Visconti, jusqu’au boutMais l’essentiel de la carrière de Suso

Cecchi d’Amico est italien. En 1951, elle acommencé une collaboration avecLuchino Visconti qui durera jusqu’au ter-me de la carrière du cinéaste. A Bellissi-ma, avec Anna Magnani (1951), succéde-ront Senso (1954), Rocco et ses frères(1960), Le Guépard (1963), Sandra (1965),Ludwig (1972) ou Portrait de famille(1973). En 1976, L’Innocent, le dernier filmdu comte, est encore écrit par sa scénaris-te d’élection.

Dans un entretien publié en 2001, lascénariste se remémorait la méthode dunéoréalisme qui exigeait la présence desscénaristes sur le plateau, afin de pou-voir adapter le dialogue aux conditionsdu tournage. Elle expliquait aussi qu’elleavait « toujours fait des emprunts à la lit-térature, surtout à Dostoïevski. DansRocco et ses frères, Rocco, c’est le prince ».

Pressée aussi de définir la nature deson travail, elle préférait le terme d’« arti-sanat » à celui d’art. A la veine dramati-que qu’elle creuse avec Visconti s’ajouteune série de comédies, à commencer parLe Pigeon, de Mario Monicelli (1958).Pour Luigi Comencini, elle écrit Casano-va, un adolescent à Venise (1969) et adap-te le Pinocchio de Collodi pour la télévi-sion en 1971. Elle retrouve Shakespeare,qu’elle avait traduit dans sa jeunesse,avec La Mégère apprivoisée, de FrancoZeffirelli (1967).

En 1999, elle participe à l’élaborationdu Voyage dans le cinéma italien, deMartin Scorsese. Cinq ans plus tôt, laMostra de Venise, où tant de films qu’el-le a écrits ont été présentés, lui avaitdécerné un Lion d’or pour l’ensemble desa carrière. p

Thomas Sotinel

Tony Judt chez lui, à New York. GINA LEVAY/REDUX-REA

2 janvier 1948 Naissance à Londres1992 « Un passé imparfait » (Fayard)1995 Directeur de l’Institut Erich-Maria-Remarque à New York2007 « Après guerre. Une histoire del’Europe depuis 1945 » (Armand Colin)6 août Mort à New York, de la maladiede Charcot

Historienbritannique

TonyJudt

21 juillet 1914 Naissance à Rome1949 Coscénariste du « Voleurde bicyclette », de Vittorio De Sica1953 Collabore au scénario de« Vacances romaines », de l’AméricainWilliam Wyler1963 Coscénariste du « Guépard »,de Luchino Visconti1971 Adapte pour la télévision« Pinocchio », de Collodi1999 Participe à l’élaboration de« Voyage dans le cinéma italien », deMartin Scorsese31 juillet2010 Mort à Rome

Scénariste italienneSusoCecchid’Amico

«L’art exigeantde se fairedes ennemisimpitoyables»

Disparitions

Témoignage

Je n’avais pas beaucoup aimé Un passéimparfait (Fayard, 1992). Je ne l’ai pascaché à Tony Judt, lorsqu’il m’en a fait lirele manuscrit. Il m’en a peut-être un peuvoulu; notre amitié y a sans doute gagné.D’autres lui ont alors reproché d’avoir ladent dure pour nos intellectuels. «Quiaime bien châtie bien », répondait-il déjà,blessé de ce malentendu. Sur mon exem-plaire, la dédicace le dit bien : «Encore unAnglo-Américain qui se moque des Fran-çais. Et pourtant…» Car, s’il devait se réin-carner un jour, ce serait à n’en pas douteren normalien d’après-1968. Ce fantasmeserait ridicule chez un Français; il forçaitla sympathie chez cet Anglais d’Amérique.

Je ne ressentais guère de solidarité pourles intellectuels français au temps du stali-nisme. Mais c’est en 1989 que j’ai rencon-tré Tony Judt : sa charge ne me semblaitplus si courageuse; et faire ainsi la morale

aux morts me paraissait manquer d’hu-mour. Or, ni le courage ni l’humour ne luiauront fait défaut jusqu’à la fin, ses lec-teurs assidus de la New York Review ofBooks le savent bien. A cause de sa mala-die, il lui devenait difficile de recevoir desvisiteurs; mais nous avons continuéd’échanger des messages électroniques.Aujourd’hui, je souris tristement en reli-sant ses plaisanteries mordantes.

Son regard sur la France n’était pasdénué de culturalisme; mais il en jouaitaussi: il tenait (à merveille) le rôle du Bri-tannique caustique, en France et aux Etats-Unis – quitte à incarner à la fois «l’intellec-tuel engagé» à la Camus et «l’intellectueljuif new-yorkais» à la Arendt. Il s’en amu-sait encore lors de son ultime conférence,en octobre2009, devant un public médu-sé par son intelligence lumineuse, qui nepouvait faire oublier le spectacle terriblequ’il offrait à son corps défendant. Ironi-sant sur le sentimentalisme positif des

Américains, il refusait ce jour-là de trans-former sa maladie tragique en récit édi-fiant: « Je suis anglais, nous ne faisons pascela.»

J’ai pu mesurer son courage quand il apris la plume, dans les années 2000, pourcritiquer la politique américaine menéesous l’égide de George Bush, alors que tantd’intellectuels se taisaient; et plus encorepeut-être dans ses analyses lucides surIsraël, qui lui ont valu les attaques les plusviolentes. Je lui ai dit alors mon estime, etmême mon admiration.

Tony Judt n’évitait jamais la controver-se; c’était un rude bretteur. Il n’avait guèrede patience pour le «politiquement cor-rect». Il maîtrisait plus que quiconquel’art exigeant de se faire des ennemis impi-toyables, et d’abord parmi ses amis. Je luisais gré de cette vertu, tant intellectuelleque politique. p

Eric Fassin

(Ecole normale supérieure)

16 0123Jeudi 12 août 2010

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CD4159722

DÉCOUVREZ SUR RADIO CLASSIQUEDES EXTRAITS DE CET ALBUM,TOUT L’ÉTÉ DANS LES ÉMISSIONS

SUR LA ROUTE DE VOS VACANCES ENTRE 9H ET 12H,VOS APRÈS-MIDI D’ÉTÉ ENTRE 15H ET 18H.

RETROUVEZ LE BOLÉROSOUS LA DIRECTION DE GUSTAVO DUDAMEL

LE 10 OCTOBRE À 19H15 SUR ARTE

UNE SÉLECTIONÀ PRIX SPÉCIAL DISPONIBLE ÉGALEMENT SUR TOUTES LES PLATEFORMES DE TÉLÉCHARGEMENT LÉGAL

RÉVISEZ VOS CLASSIQUESRAVEL BOLÉRO CLAUDIO ABBADOLorsque Maurice Ravel se lance dans la composition du Boléro, en 1928, il se met au défit d’écrire une pièce qui deviendraaussi populaire que La Madelon. Or, en 2010, bien peu de français se souviennent de cette Madelon qu’entonnaient les poilusen revenant du front. En revanche, le Boléro reste l’une des pièces de musique classique les plus jouées dans le monde !Les temps changent, et seules les oeuvres de génie perdurent. Le Boléro est une musique envoûtante, avec son rythmeobstiné, son orchestration subtile et son lent crescendo qui est un véritable défi pour les chefs d’orchestre. Quant à la mélodie,elle est de celles qui vous accompagnent des jours entiers quand vous l’avez entendue une fois !Alors disons-le sans aucune hésitation, Ravel a incontestablement gagné son pari : Adieu Madelon!

L es comploteurs ont bien choi-si leur planque. Perdu dansles plaines dorées de la Beau-

ce, le petit village de Corbreuse,dans l’Essonne, n’attire guère l’at-tention. Une charmante église, desjardinières fleuries, une carrioletirée par un poney… Qui se doute-rait que le portail d’une vieille fer-me abrite un étrange camp d’en-traînement ? Dans le jardin, prèsdu barbecue, sur le banc, en lieu decoussins bayadères s’étalent destapis venus d’Afghanistan. Maisc’est sous un drap discret que setrouve l’objet du délit. Avec soncapot de Plexiglas, ses circuits élec-troniques miniaturisés et ses sixhélices agressives, la chose ressem-ble étrangementà un drone. Et c’enest un.

Les deux pilotes qui s’entraî-nent chaque jour à le manipuleront plus l’air d’étudiants attardésque d’agents des services secretsou d’apprentis terroristes. Le pho-tographe Raphaël Dallaporta, l’undes cerveaux du projet, a l’œil aubeurre noir. Mais on apprend trèsvite que c’est le dommage collaté-ral d’un enterrement de vie de gar-çon trop arrosé.

Son complice, l’architecte YvesUbelmann, se dépêche d’enleverun pull aux couleurs de l’arméeaméricaine – un souvenir « kitsch»rapporté de Kaboul. Les deux jeu-nesgensontl’airdangereuxouillu-minés. Ils sont pacifiques etsérieux à l’extrême : le drone leurservira à photographier des sitesarchéologiques en Afghanistan.

Enseptembre,lafineéquipepar-tira pour Mes Ainak, au sud deKaboul. Là-bas, ils travaillerontavec un groupe d’archéologues dela Délégation française archéologi-que en Afghanistan (DAFA) venusapporterleurconcoursauxarchéo-logues afghans sur une campagnedefouillesde grande ampleur. Ily a

urgence: le site de Mes Ainak abri-te les restes exceptionnels d’unmonastère bouddhique de l’épo-que kouchane (préislamique), eten six mois une centaine de sta-tues ont déjà été mises au jour.Mais le sous-sol renferme d’autresrichesses : le deuxième gisementdecuivre au monde. L’exploitationde la mine a été cédée à des Chinoispour 6,5 milliards de dollars(4,9 milliards d’euros), et ces der-niers attendent le feu vert pourcommencer les forages. En atten-dant, l’armée afghane surveille lesite nuit et jour.

Vu l’itinéraire de Raphaël Dalla-

porta,30 ans, cetteétrange histoirede drone n’est pas si surprenante.Depuis ses débuts, le photographea suivi un parcours original, entrephotographie documentaire etengagement. Son angle d’attaque?« Faire parler des choses muettes. »Comme des mines antipersonnel,photographiées avec un atroce raf-finement – un travail qui l’a révéléen 2004 et qui est aujourd’huirepris dans un livre, Antipersonnel(éd. Barral, 88 p., 35¤).

Il y a eu des façades d’immeu-bles, révoltantes de banalité, qu’il acollectionnées dans une série surl’esclavage domestique, et qui

seront exposées sur les murs de laville de Genève du 6 au 29 septem-bre. Le photographe a aussi tra-vaillé à la morgue, sur des organesabîméslivrésàl’autopsie.Pourcha-que série, Raphaël Dallaporta tra-vaille « sous influence », s’éver-tuant à définir un protocole de pri-se de vue adapté aux contraintesd’une profession.

C’est le cas du projet afghan,pour lequel le photographe et l’ar-chitecte, qui se sont connus aulycée, ont travaillé à la conjonctionde leurs deux domaines. « Lesarchéologues ont toujours besoind’images aériennes, explique Yves

Ubelmann. Ils utilisent souvent desballons d’hélium ou des perchesrudimentaires. Mais les imagesobtenues sont déformées. » Lesdeux amis ont eu l’idée d’embar-quer un appareil photographiquesur un drone pour tourner autourdu site et multiplier les points devue. « En archéologie, on dit qu’unepièce de monnaie donne autantd’informations qu’une vue satelli-taire, indique le photographe.Nous pourrons aller de l’infinimentgrand à l’infiniment petit. »

Avec l’aide de l’informatique, enconjuguant les données fourniesparle drone etpar des prises de vue

au sol, les deux amis veulent aussicréer des images en trois dimen-sions. Histoire de pouvoir recréer,par extrapolation, les parties man-quantes d’un temple ou d’unesculpture. L’outil pourrait s’avérerprécieux à Mes Ainak, où nombrede statues, victimes de pillagesaprès l’invasion américaine, sontprivées de tête.

La réalisation du projet n’a pasété simple. Un troisième larroninformaticien a compilé deux logi-ciels en accès libre pour arriver àobtenir des images en 3D exploita-bles. Il a aussi fallu faire construire– en France – un drone capabled’embarquer un appareil photoactionné à distance. Reste enfin àpiloter l’engin, ce qui n’est visible-ment pas une mince affaire.

En attendant le départ, les deuxcomplices mènent la drôle de viedes « nerds », ces dingues de tech-nologie totalement asociaux. Ilspotassent des magazines d’aéro-modélisme cryptiques et des trai-tés sur la perspective. Ils s’entraî-nent plusieurs heures par jour surun simulateur de vol ou sur unpetit drone d’essai, qui a déjà beau-coup mordu la poussière. Ils s’ap-pliquent à reconstituer la petiteéglise de Corbreuse en 3D. « Ce quiest compliqué, explique RaphaëlDallaporta, c’est qu’en photo je suishabitué à des conditions parfaites,en studio. Là-bas, il faudra sedébrouiller.»

Le drone a été conçu pour pou-voir être léger, maniable et répara-ble. Il ne devrait normalement pasêtre détecté par les radars militai-res. Resteque si malgré tout l’engindevait s’écraser, victime d’un ventcontraireoud’unemauvaisemani-pulation, les deux amis ont prévuun plan B, au design nettementmoins agressif. Dans leur valise, ilsemporteront aussi un rokkaku.Autrement dit, un cerf-volant. p

Claire Guillot

Lephotographe, le drone etl’archéologieRaphaël Dallaporta et l’architecte Yves Ubelmann s’entraînent pour une mission de fouilles au sud de Kaboul

Ilaaussi travailléàla morgue,surdesorganesabîméslivrésà l’autopsie

LeFestivalde Locarno secouépar «Bas-Fonds», d’Isild LeBescoL’actrice et réalisatrice signe un troisième film inspiré d’un fait divers. Brutal par ses images comme par sa sincérité

Justice L’assassin de JohnLennon demandesa liberté conditionnellepour la sixième foisMark David Chapman, 55 ans,condamné à perpétuité pour l’as-sassinat, le 8décembre 1980, àNew York, de John Lennon,devrait comparaître à la mi-sep-tembre devant une commissiond’application des peines pourdemander sa liberté conditionnel-le, ont annoncé, mardi 10 août, lesautorités du pénitencier d’Attica.C’est la sixième fois que Chap-man fait cette demande . – (AFP.)

Cinéma Jerzy Skolimowskien compétitionà la Mostra de VeniseLe film Essential Killing, de JerzySkolimowski, terminé à temps,pourra participer à la compétitionpour le Lion d’or, viennent d’an-noncer les organisateurs de la Mos-tra de Venise (du 1erau 11 septem-bre). Vingt-quatre films serontdonc en compétition. – (AFP.)

Culture

«Autoportrait».Yves Ubelmann et Raphaël Dallaporta dans la Beauce. RAPHAËL DALLAPORTA POUR « LE MONDE »

Locarno (Tessin)Envoyé spécial

P endant la projection de pres-se de Bas-Fonds, mardi10 août, au Festival de

Locarno, on a entendu quelquesricanements. De ceux que l’onpousse pour manifester que l’onrésiste, qu’on ne veut pas admet-tre ce qu’on a sous les yeux. Cequ’onvoyait àl’écran était terrible,et aucun ricanement ne pouvait leréfuter.

Bas-Fonds, le troisième filmd’Isild Le Besco est très court, à pei-neplusd’uneheure–«Nousn’avio-ns pas beaucoup de pellicule », dit-elle – et très ample. A 25 ans, lajeune femme voulait faire un filmsurdes«personnagesquisont com-me de la viande ». Elle s’est inspirée

d’un fait divers survenu en Auver-gne en 2002. Trois jeunes femmesavaient été arrêtées après le meur-tre d’un boulanger, tué d’unedécharge de chevrotine.

Alors que les deux premiersfilms d’Isild Le Besco, réalisatrice(elle en compte deux douzaines entant qu’actrice) Demi-Tarif (2004)et Charly (2007), étaient très libresdans leur expression, elle a choiside tourner Bas-Fonds en 35 mm, enécran large, comme si la rigueur dela mise en scène – qui lui est venuenaturellement – était indispensa-ble pour donner forme à la brutali-té insensée de la vie quotidiennede son trio.

Effarée par la lourdeur de la pei-ne infligée à la meurtrière, vingt-huit ans de prison, Isild Le Besco avoulu réinventer, en s’éloignant

souvent du fait divers, le parcoursde ces trois filles, qui s’est forméautour d’une femme forte, bruta-le, criarde, Magalie. Incarnées partrois débutantes, Valérie Nataf,Ginger Roman et Noémie Le Car-rer, choisies au terme d’intermina-bles séances de casting, ces corpsprivés de tout – de biens matérielset surtout d’amour – sont devenuspour la réalisatrice les objets d’unecélébration, envers et contre tout.« Quand je rentre dans une pièce,dit-elle, je suis attiréepar la person-ne au fond qui ne dit rien, plutôtque par celui qui fait le malin.»

Toute la journée, à Locarno,Isild Le Besco s’est défendue d’êtreattirée par le spectacle de la misè-re : « Ce n’est pas ce que je voulaismontrer», ou par le thème l’homo-sexualité féminine, comme cer-

tains de ses interlocuteurs l’ontsuggéré. En revanche, Bas-Fondsest traversé, comme nombre defilmsrécents(enFrance, Poisonvio-lent, de Katell Quillévéré ou Deshommes et des dieux, de XavierBeauvois), par l’irruption de la reli-gion. Les diatribes ordurières deMagalie, le casse minable, le pro-cès, sont scandés par de beauxplans de ciel ou d’eau, sur lesquelson entend la réalisatrice dire despsaumes.

Rédemptionpar lafoiLes dernières séquences, qui

mettent en scène le procès, avecune économie de moyens forcéemais magnifique, réintroduisentdans le corps du récit le thème dela rédemption par la foi. « Mais elleaurait aussi bien pu être musulma-

ne. Ce n’est qu’une réponse, ce n’estpas la réponse », précise la réalisa-trice. Ce film est tellement brutal –dans ses images, mais aussi danssa sincérité – qu’il a pour l’instantfait peur à beaucoup de monde.Bas-Fonds a été tourné avec l’ar-gent de l’avance sur recette et de larégion Limousin. Les chaînes detélévision, les distributeurs en sal-les se sont pour l’instant abstenus.

En début de festival, on avait vuIsild Le Besco en actrice, dans Aufond des bois, de Benoît Jacquot (LeMonde du 6 août), un film qui trai-tait – sur un mode plus matérialis-te – lui aussi du mal fait aux autreset du manque d’amour. Elle étaitabsente lors de la projection etremarque en passant qu’elle n’atoujours pas vu le film. p

Thomas Sotinel

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&Vous

Tourisme

SingapourEnvoyée spéciale

U ne fille en short, tatouage àla cheville, s’approche del’autel d’un pas traînant.

Elle allume des bâtonnets d’en-cens avant de se mettre à prier,indifférente aux bruits de volièrequi résonnent d’un bout à l’autredu gigantesque hawker centre (oufood centre), cantine kilométriqueaux allures de marché couvert,situéedans les étages d’un immeu-ble commercial de Chinatown,l’un des trois quartiers « histori-ques », avec Little India et Arab

Street, de l’ultramoderne Singapo-re City. Sa prière terminée, lajeune bouddhiste s’en va rejoin-dre la file de clients, qui patien-tent devant un marchand de zhenzhen (porridge au poisson), vrai-semblablement excellent.

Chaudron magique où se croi-sent les cuisines de Chine, d’Indeet de Malaisie, les food centressont à Singapour ce que furenthier, toutes proportions gardées,les Halles de Paris ou de Lyon : deslieux de convivialité, où l’on vientà toute heure, autant pour y man-ger que pour y faire ses courses,bavarder, observer ou rêver. Ici,pas de meubles design ni de ser-veurs stylés, mais des centainesde tables en plastique, alignéessous lesventilateurs. Dans les kios-ques-cuisines se mitonnent, à lon-gueur de journée les plats les plusvariés et les plus savoureux duSud-Est asiatique. De la soupe detortue au gâteau de tapioca, dessatay (brochettes) au popiah (rou-leau de printemps), de la tête depoisson braisé au fameux chickenrice ou à la non moins fameuse lak-sa (soupe de nouilles à la noix decoco et aux crevettes), que l’on

peut, au choix, déguster en gour-met ou dévorer en Gargantua. Detoute façon, l’addition restera trèsraisonnable : de 2 à 4 euros le plat.

Les plus courus des hawker cen-tres sont ceux de Maxwell Road,du Chinatown Complex et duTiong Bahru Market. N’importequel chauffeur de taxi vous ymènera les yeux fermés, à moinsqu’il ne vous convainque d’es-sayer son food centre préféré. Carla cuisine, comme le shopping,est l’activité reine de cette curieu-se cité-Etat, hyperlibérale sur leplan économique mais d’un auto-ritarisme tatillon sur le plan poli-tique. Gare aux Singapouriensqui s’avisent – Amnesty Interna-

tional peut en témoigner – decontester la mainmise du Partid’action populaire (PAP, au pou-voir) sur les affaires du pays !Gare également aux migrantsirréguliers ! Singapour la métis-sée, forgée à 100 % par des descen-dants d’immigrés, ne badine pasavec ses sans-papiers. Mais pourles visiteurs d’un jour, ces détailsde l’histoire passeront à la trap-pe. Qu’ils sachent seulement quejeter un mégot par terre, mâcherun chewing-gum en public ou tra-verser en dehors des clous consti-tuent des délits, passiblesd’amende.

La propreté – maître mot à Sin-gapour, où même les poubelles

sont nickel – règne égalementdans les hawker centres, ce qui n’apas toujours été le cas. Pour com-prendre l’histoire de cette « cuisi-ne des rues » si riche, rien ne vautune escale au musée national. Ony découvre l’origine du chickenrice, spécialité de l’île chinoise deHainan, longtemps baptisé com-munist chicken, du bak ku teh, unpot-au-feu autrefois prisé des coo-lies, ou des roti prata, ces crêpesgéantes venues d’Inde. La mise enscène est formidable, mêlantfilms documentaires et objetsd’époque. Une autre salle est réser-vée aux épices et plantes aromati-ques – que le visiteur peut reniflergrâce à des testeurs. Un régal.

Populaires ou aristocratiques,les cuisines de Singapour ont unevertu commune : elles vivent etchangent, empruntant ici et là,sans se mélanger tout à fait. Dansl’ouvrage en deux volumes que lacuisinière Shermay Lee (nièce dupremier ministre) a consacré auxrecettes de sa grand-mère, l’exem-ple est donné d’une salade à la sau-ce de cacahuète, baptisée « rojak,dans le style du hawker chinois ».D’origine indonésienne,cette sala-de est un concentré de la culturesingapourienne. « Chaque ingré-dient est différent, comme le sontnos races et nos langues, mais l’en-sembleforme un plat unique et trèséquilibré », résume la jeune fem-

me, qui dirige une école de cuisinedans le quartier huppé d’HollandVillage. Une vingtaine d’écoles decuisine ont vu le jour dans la cité-Etat, qui pullule, bien évidem-ment, de restaurants plus oumoinschics ou chers, offrant toutela gamme des cuisines du monde.

Les événements gastronomi-ques, le Singapore Food Festivalou le luxueux Wine, Food & ArtsExperience de l’Hôtel Raffles,font désormais partie des meu-bles. Quant aux hawker centres,plusieurs sites Internet, à l’instarde Makantime.com ouMakansutra.com, leur sont consa-crés. A vos baguettes… p

Catherine Simon

Carnet de route

Y aller Une vingtaine de compa-gnies assurent le vol Paris-Singa-pour, avec ou sans escale, à destarifs très variables. La SingaporeAirlines est l’une des plus conforta-bles – détail non négligeable pourun vol de près de treizeheures.

Se loger Pour les voyageurs fortu-nés, l’Hôtel Raffles, du nom dufondateur de Singapour, ThomasStamford Bingley Raffles, palaceau charme so british (avec chef etsommelier français), reste unincontournable parmi les établis-sements de luxe. La chaîne Meri-tus offre des prix plus modérés.

Visiter Les quartiers de China-town, Little India et Arab Streetvalent plus qu’un détour. Les fousde shopping ne doivent pas man-quer le Mustafa Centre, ouvert24heures sur 24, ni le Marina BaySands, dernier-né des complexescommerciaux.Parmi la multitude de musées etde lieux culturels, impression-nants par leur richesse, le TylerPrint Institute, consacré à l’édi-tion et aux arts graphiques, et leMarina Barrage, qui raconte, à tra-vers la question des ressourcesen eau, comment s’est construitela ville-Etat de Singapour, méri-tent une mention spéciale.

Lesclés USB résistentàtoutEnplus d’accroître la capacité de stockage des données person-nelles, les nouvelles clés USB rivalisent d’ingéniosité. Recouverted’un boîtier en métal, la XtremKey, commercialisée par LaCie,supporte le poids d’un camion de 10 tonnes, résiste à des tempéra-tures allant de – 50 à 200 ˚C et ressort intacte d’une chute de5mètres. Les fans de high-tech préféreront sans doute le périphé-

rique de stockage deux en un Datashare, qui permet de lire lescartes mémoire (format SD et micro SD) des appareils

photo. Moins résistante que l’alliage métallique dumodèle XtremKey, mais plus écologique, la clé

Flash Drive (EMTEC) est équipée d’une coque100 % biodégradable. Le matériau utilisé,

l’acide polylactique, directement issu deressources végétales telles que l’ami-

don de maïs, ne met que trois moispour se dégrader dans la nature sanslaisser de traces. Autre originalité:

une succession de lumières multicolo-res aux vertus relaxantes apparaît sur la clé lorsque celle-ci

est connectée. p Hélène Guinhut (PHOTOS DR)

XtremKey de LaCie, à partir de 49,90 ¤ et la LaCieDataShare, 14,90 ¤ surLacie.fr. Eco Flash Drive d’EMTEC, à partir de 16,90 ¤, dans les magasinsspécialisés.

www.lemonde.fr/dosdocJuillet-août 2010

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International Afghanistan, Israël, Iran, etc. : unmonde en guerre

Littératures La critique de la peinture

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Ici,pasde meublesdesignnide serveursstylés,mais descentainesdetables enplastique

Singapouriens devant des «bak kwa» (tranches de porc séché) d’un «food centre» de Chinatown. STEFEN CHOW/BLOOMBERG NEWS

Lechaudronmagiquedes«foodcentres»deSingapourLa cité-Etat fait découvrir sa gastronomie métissée dans ces restaurants populaires

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Mercredi11 aoûtTF1

20.50 Football.Norvège - France. Match amical. En direct d’Oslo.23.10 Dirty Sexy Money.Série. Surgie du passé. Le silence est d’or.Les Dessous de l’histoire (S2, 3, 4-7/13, 145 min).

FRANCE2

20.35 Secrets d’histoire.Diane de Poitiers, la reine des favorites.22.15 Clérambard.Pièce de Marcel Aymé. Mise en scène de NicolasBriançon. En 2008. Avec Jean-Marie Bigard,Nicolas Biaud-Mauduit.0.35 Journal de la nuit, Météo.0.50 Le Pressentimentp

Film Jean-Pierre Darroussin. Avec Jean-PierreDarroussin, Valérie Stroh (Fr., 2005, 100 min).

FRANCE3

20.35 Inspecteur Barnaby.Série. Le Couperet de la justice (GB, 2007).22.15 Soir 3.22.45 Mission Millenium. Jeu.0.40 Strip-tease. America America.[3/4] Mon frère s’appelle Raymond (55 min).

CANAL+

20.45 Coup de foudre à Seattle p

Film Brandon Camp. Avec Aaron Eckhart,Jennifer Aniston (EU - Can. - GB, 2009).22.30 Appaloosa ppp

Film Ed Harris. Avec Viggo Mortensen, Ed Harris,Renée Zellweger (EU, 2008, 115 min) U.

ARTE

20.35 Les Mercredis de l’Histoire.Guerre dans le Grand Nord. [1 et 2/2].Tempête sur l’Arctique. L’Heure de la débâcle.22.20 Le Dessous des cartes. [2/2].22.30 Désert heureux pp

Film Paulo Caldas. Avec Nash Laila, HermilaGuedes, Peter Ketnath (All. - Bré, 2007, v.o.).23.55 Court-circuit (50 min).

M6

20.40 « Zone interdite » :les inédits de l’été. Palais, palaces,villas de rêve : les nouvelles stars de la déco.22.45 Accusé à tort.[6 et 2/8]. 27 ans derrière les barreaux :l’affaire Sean Hodgson V. Triple meurtreen famille : affaire Jacomet (110 min) U.

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Météorologue en directau 0899 700 703

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En EuropeAmsterdamAthènesBarceloneBelgradeBerlinBerneBruxellesBucarestBudapestCopenhagueDublinEdimbourgHelsinkiIstanbulKievLa ValetteLisbonneLjubljanaLondresLuxembourgMadridMoscouNicosieOsloPragueReykjavik

RigaRomeSofiaStockholmTallinTiranaVarsovieVienneVilniusZagrebDans le mondeAlgerAmmanBangkokBeyrouthBrasiliaBuenos AiresDakarDjakartaDubaiHongkongJérusalemKinshasaLe CaireMexicoMontréalNairobi

New DelhiNew YorkPékinPretoriaRabatRio deJaneiroSéoulSingapourSydneyTéhéranTokyoTunisWashingtonWellingtonOutremerCayenneFort-de-Fr.NouméaPapeetePte-à-PitreSt-Denis

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Metz

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Brest

Nantes

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Montpellier

Perpignan

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Clermont-Ferrand

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30 degrés La chaleur ne désarme pas en Russie

En Europe12h TU

La perturbation s'évacuera vers lesfrontières de l'Est, avec encorequelques averses localementorageuses, notamment sur les Alpesdu Nord et sur les Pyrénées. Ailleursle ciel sera le plus souvent variable,partagé entre des éclaircies et desnuages, mais le risque d'ondée seratrès faible et localisé. Lestempératures seront doucesmais unpeu justes pour la saison.

Sainte ClarisseCoeff. demarée 112

LeverCoucher

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Instable sur les Alpes du Nord

Aujourd’hui

Météo&Jeux

0123 du futur

Jeudi12 aoûtTF1

20.45 Section de recherches.Série. Surf. Une femme comme les autres.Le Droit chemin U (saison 3, 8, 7 et 5/10).23.30 Les Experts/Miami.Série. Une empreinte de trop U. Œil pour œil V

(saison 1, 12 et 14/24, 95 min).

FRANCE2

20.35 Enquêtes spéciales.Au sommaire : Les Héritiers de Sœur Emmanuelle ;« Plus belle la vie » : les coulisses d’un succès...22.35 La Boîte à musiquede Jean-François Zygel.Classique et jazz.0.25 Journal, Météo (15 min).

FRANCE3

20.35 Pearl HarborFilm Michael Bay. Avec Ben Affleck, Josh Hartnett,Kate Beckinsale, Ewen Bremner (EU, 2001) U.23.35 Soir 3.0.05 Bienvenuechez les Chevaliers du fiel (125 min).

CANAL+

20.45 FlashForward.Série. Actions, réactions. Les Meilleurs Anges.(S1, 13 et 14/22) U. Avec Joseph Fiennes.22.05 Skins. Série. Katie et Emily.Bouquet final (saison 3, 9 et 10/10) V.23.40 The Office. Série. Le Retour de Toby.Un excédent excellent (S5, 9 et 10/28, 45 min).

ARTE

20.34 Summer of the 60s.20.35 A double tour pp Film Claude Chabrol.Avec Madeleine Robinson, Antonella Lualdi,Jean-Paul Belmondo (Fr. - It, 1959).22.10 Birth of Cool. Documentaire.23.05 Birth of Groove. Documentaire.0.00 Le jour où les Beatlessont arrivés à Marbourg... ou presque.Documentaire (70 min).

M6

20.40 Le Gendarme en baladeFilm Jean Girault. Avec Louis de Funès (1970).22.20 Anne Roumanoff.Anne, bien plus que 20 ans. En 2009.0.10 Le Comique.Pièce de Pierre Palmade. Avec Pierre Palmade,Sébastien Castro (150 min).

Lessoiréestélé

Les résultats du Loto sont publiés dans nos éditions datées diman-che-lundi, mardi, mercredi et vendredi. Tous les jours Mots croiséset sudoku ; Samedi daté dimanche-lundi Echecs

Sudoku n˚10-191 Solution du n˚10-190

Paris-Dakar

Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ;

télécopieur : 01-57-28-21-21Courrier des lecteurs : par télécopie : 01-57-28-21-74 ;

Par courrier électronique : [email protected]édiatrice : [email protected]

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Sur Internet : www.lemonde.fr/abojournal/Changement d’adresse et suspension :

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Collection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60

Motscroisés n˚10-191

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MoyenCompletez toute lagrille avec des chiffresallant de 1 a 9.Chaque chiffre ne doitetre utilise qu’uneseule fois par ligne,par colonne et parcarre de neuf cases.

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Départ du 88e rallye Paris-Dakar malgré la polémique sur l’impact del’automobile sur la hausse radicale des températures dans la capitale.ILLUSTRATION COLCANOPA

Lesjeux

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Retrouvez nos grilles sur www.lemonde.fr

Solution du n° 10 - 190HorizontalementI. Préventorium. II. Souille. Orne.III. Essai. NASA. IV.Ui. Brai. Aida.V.Défièrent. Oc.VI.Oral. Azuré.VII.Nénies. Leçon.VIII. As. Os.Rut. IX.Mégères. RaseX.Eternuements

Verticalement1. Pseudonyme. 2. Rosière. Et.3. Eus. Fanage. 4. Viabiliser.5. Elire. RN. 6.NL. Aras. Eu.7. Teniez. Ose. 8.Nuls. 9. Rosâtre.Rê. 10. Irai. Ecran. 11.Un. Do. Oust.12.Menaçantes.

Philippe Dupuis

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

1.Dangereuse obstruction ouemballement. 2. Rongeur à poildur. Bien en peine. 3. Ses batteriessont disposées sur plusieursniveaux. 4. Sans scrupules. Circuleen Amérique latine. 5.Un trèsgrand chez les lourds. Comme desfrères au couvent. 6.Méprisables.Pour de beaux tirages et de bellescouvertures. 7. Passe par-dessus.Mesure renversée. 8. Palmipèdedesmers. Bonne carte. 9. Entrées.10. Arrivée parmi nous. A un gesteécologique. 11.Grandes réservesen cave. Bien familier. 12. Blocageau sommet.

I. Elle est extraordinairemais biensouvent déraisonnable. II. Parfumde princesse. Scène grecque quel’on retrouve à Paris et ailleurs.III.Mouvement enmasse.IV.Ouverturemusicale. De beauxmorceaux pour de grandes voix.Bien arrivé.V. Belle de Corrèze.Grave chez les clarinettes.VI.Gouffres en région. Personnel.VII. Pose des problèmes enprenant ses distances. Petite pièceduMoyen Age.VIII. En Somme.Cercle poétique. IX. Clairs et sansbavure. De Tabriz ou d’Hispahan.X. Attaquassent les braises aucœur du foyer.

20 0123Jeudi 12 août 2010

Page 21: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

210123Jeudi 12 août 2010 Carnet

Nos services--------------------------------------------------------------LecteursKAbo��eme�ts

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SÉRIES DE L’ÉTÉ

Le procèsde JacquesChirac

Du lu�di 2 août auve�dredi 20août

Les ave�tures deBlake et MortimerDu lu�di 2 août au jeudi 19 août

Dumardi 13 juilletausamedi 14août--------------------------------------------------

Chez votre marcha�d de jour�aux

Ve�dredi 13 août daté samedi 14 août

E� couvertureEva Joly e� lice pour 2012

ReportageKawi�i, u� i�die�da�s la ville

Collectio�s-------------------------------------------------------

Livre 11 :ANDRÉA DE NERCIATFélicia o� Mes fredaines

dès le jeudi 12 août---------------------------------------------------

Dès le ve�dredi 13 aoûtALICIA DE LARROCHALe double CD-livret �° 32

Prolongat�on

Le Carnet

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vos textes par :Tél. : 01 57 28 28 28Fax : 01 57 28 21 36

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et associations :- 20 %

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AU CARNET DU «MONDE»

DécèsLe colonel et Mme Philippe Arnaud,

ses parents,Les familles Marin, Ottmann, Aptel,

Connen,

ont l’immense chagrin de faire part durappel à Dieu de

Amaury ARNAUD,

le vendredi 6 août 2010,à l’âge de vingt-deux ans.

La cérémonie religieuse sera célébréece mercredi 11 août, à 15 heures, enl’église de la Sainte-Trinité (Paris 9e),suivie de l’inhumation au cimetière deMontmartre.

33, rue de la Rochefoucauld,75009 Paris.

Ruth BENARROCH,épouse BRANDT,

s’est éteinte le 4 août 2010,à l’âge de quarante-neuf ans.

Sa volonté, sa joie de vivre, son courageà surmonter les atteintes d’un cancerillumineront les siens pour toujours.

Que l’équipe du professeur Khayat dela Pitié-Salpêtrière soit chaleureusementremerciée pour sa compétence et sondévouement.

Les obsèques ont eu lieu le lundi9 août, au cimetière de Villerville(Calvados).

Ni fleurs ni couronnes.

Mme Janine Breton,son épouse,M. Jean-François Breton,M. et Mme Robert Feige,

ses enfants,M. et Mme Rodrigue et Florence

Saint-Just,David et Thomas Feige,

ses petits-enfants,M. et Mme André Gillard,

sa belle-sœur et son beau-frère,Ses neveux, ses nièces, sa cousineEt toute la famille,

ont la douleur de faire part du décès de

M. Claude BRETON,

survenu à Meaux, le lundi 9 août 2010,à l’âge de quatre-vingt-quatre ans.

La cérémonie religieuse sera célébréele lundi 16 août, à 15 h 30, en l’églisede Jouarre, suivie de l’inhumationau cimetière de la commune.

Vos marques de sympathie serontreçues sur un livre d’amitié.

Mme Janine Breton,10, allée des Déportés,93190 Livry-Gargan.

Mme Janine Breton,8, route des Corbiers,77640 Jouarre.

Jean Claude et Pierre Alain Chapuis,ses fils,Mathilde, Léo, Tom Chapuis,

ses petits-enfants,Elisabeth Chapuis,Fatima Gueffaf,

sa compagne,Chantal Sauvolle,Toute sa famille,

ont la tristesse de faire part du décès de

Robert CHAPUIS,

survenu le 6 août 2010.

Les obsèques auront lieu le samedi14 août, à 10 h 30, au cimetièrede Monjavoult (Oise).

Claire et Louis Debru,ses enfants,Catherine Bertrand,

sa compagne,Toute sa famille,Ses amis,

ont la douleur de faire part du décès de

M. Pierre DEBRU,ancien responsable du service presse aucabinet du préfet et du conseil général

de Seine-Maritine,Délégué général aux grands évènements

de la ville du Havre,

survenu le 9 août 2010.

La cérémonie religieuse sera célébrée levendredi 13 août 2010, à 10 heures, enl’église Saint-Maclou de Rouen.

Mme Julia Demont,sa mère,Le docteur Andrée Demont,

sa femme,Laurent, Emmanuel, Pascale,

ses fils et sa belle-fille,Benjamin, Théo, Matthieu,

ses petits-enfants,Mme et M. François Kimmel,

sa sœur et son beau-frèreEt toute la famille,

ont la tristesse de faire part du décès du

docteur Patrick DEMONT,pédiatre,

survenu le 9 août 2010,à l’âge de soixante-six ans.

La cérémonie religieuse sera célébrée levendredi 13 août, à 11 heures, en lachapelle de l’Est, au cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e, suivie d’une crémation,à partir de 12 h 15.

Cet avis tient lieu de faire-part.

25, rue de la Gare de Reuilly,75012 Paris.

Mme Marthe Heilmann,son épouse,Julien, Ophélie, Rémi, Lucas,

ses enfants,M. Pierre Heilmann,

son père,M. et Mme Bruno Heilmann,

son frère et sa belle-sœurEt toute la famille,

ont la douleur de faire part du décès de

M. Jean HEILMANN,

survenu le 5 août 2010,à l’âge de quarante-trois ans.

La crémation aura lieu le vendredi13 août, à 15 heures, au crématoriumd’Evreux (Eure).

Cet avis tient lieu de faire-part.

36, rue de la Touques,78711 Mantes-la-Ville.

La directionEt l’ensemble des collaborateurs

de la société

ResMed

ont la tristesse d’annoncer le décèsaccidentel, le 5 août 2010, de

M. Jean HEILMANN,directeur commercial France.

L’ensemble des salariés s’associe à ladouleur de sa famille.

ResMed,Le Parc Technologique de Lyon,292, allée Jacques Monod,69791 Saint-Priest.

Henry Hermand,son mari,Marie, Patrick, Nadine

et Jean-Philippe,ses enfants,Ses petits-enfants,Sa sœurEt toute la famille,

ont la douleur de faire part du décès de

Micheline HERMAND,née QUEMAREC,

survenu à son domicile,le vendredi 6 août 2010.

Cet avis tient lieu de faire-part.

M. et Mme Pilippe d’Iribarne,M. et Mme Alain d’Iribarne,

en union avec M. Francis d’Iribarne (†),Mme Françoise d’Iribarne,

ses neveux,Ses petits-neveuxEt ses arrière-petits-neveux,

ont la tristesse de faire part du rappelà Dieu de

M. Xavier d’IRIBARNE,officier de la Légion d’honneur,

commandeurdans l’ordre national du Mérite,

survenu dans sa centième année.

Ses obsèques ont été célébrées le3 août 2010, en l’église de Saint-Jean-le-Vieux (Pyrénées-Atlantiques).

Il repose dans le caveau familial,à Saint-Jean-le-Vieux, auprès de sonépouse,

Huguette,née BRINGUET,

décédée en 1963.

Aphat-Ospitalia,64220 Saint-Jean-le-Vieux.

On nous prie d’annoncer le décès de

François LOPEZ,professeur émérite

à l’université Michel de MontaigneBordeaux III,

survenu le 5 août 2010,à l’âge de soixante-quinze ans.

Famille Lopez,10, rue Amiral Courbet,33110 Le Bouscat.

Mme Jacques Mauris,sa mère,Mme Pascal Mauris,

née Odile Lavoissière,son épouse,Alice et Ghislain Tenneson,Georges Mauris et Lucie-Anne Girault,

ses enfants,Anne et Ettore Meneghini,Nathalie et Michel Jacob,

ses sœurs et beaux-frèreset leurs enfants,Les famil les Tor land, Pot t ie r ,

Lavoissière, Liban,

font part, dans la tristesse et l’Espérance,du rappel à Dieu de

M. Pascal MAURIS,

survenu le samedi 7 août 2010,dans sa soixante-troisième année.

La cérémonie religieuse aura lieuce mercredi 11 août, à 15 h 30, en l’égliseSaint-Symphorien d’Epoisses.

Cet avis tient lieu de faire-part.

Le président,Les membres

du conseil d’administration,Le directeur généralEt les collaborateurs

de Crédit Logement,

ont la tristesse de faire part du décès de

Claude MORANDEAU,directeur général déléguéde Crédit Logement,directeur général

de Crédit Logement Assurance,

survenu le 6 août 2010,à l’âge de soixante-deux ans.

Ils tiennent à rendre hommage à celuiqui fut, pendant près de trente-cinq ans, uncollaborateur compétent et dévoué.

Ils expriment à sa famille et à sesproches leurs plus sincères condoléances.

Rennes. Bruxelles.

Le présidentEt les membres

du Bureau politique de la CRPM(Conférence des régions périphériquesmaritimes d’Europe),Le présidentEt les membres

du Conseil administratif de la CRPM,La secrétaire généraleEt les collaborateurs de la CRPM,

ont la tristesse de faire part du décès de

M. Georges PIERRET,

ancien secrétaire général du CELIB,fondateur et secrétaire

général honoraire de la CRPM,chevalier

de la Légion d’honneur,officier dans l’ordre national du Mérite,officier dans l’ordre de Dom Henrique

(Portugal).

La cérémonie religieuse sera célébréece mercredi 11 août 2010, à 10 heures,en l’église Saint-Paul de Rennes.

Sandrine Retailleau-Vallet,son épouse,Jean-Michel et Arnaud Vallet,

ses fils,Armelle Lecomte,

sa nièce,

ont la profonde tristesse d’annoncerle décès, survenu le 9 août 2010, à l’âgede soixante-sept ans, de

Michel VALLET.

La cérémonie d’incinération aura lieule vendredi 13 août, à 13 heures,au crématorium de Nanterre, 42, ruedes Cendres, Mont-Valérien.

M. Roland Vivier,son époux,M. et Mme Alain Vivier,

ses enfants,M. et Mme Jean-Philippe Vivier,M. et Mme Fabrice Bouffard,M. et Mme Jérôme Vivier,

ses petits-enfants,Noémie, Cécile, Anouk, Naoki,Kohei, Maïa,

ses arrière-petits-enfants,

ont la tristesse de faire part du décès de

Mme Edmonde VIVIER,née GARNIER,

survenu à Niot, le 7 août 2010,à l’âge de quatre-vingt-quatorze ans.

Les obsèques ont eu lieu dans l’intimitéfamiliale, le 10 août.

21, rue Michelet,92500 Rueil-Malmaison.

RemerciementsMme Nina Lévy,Son fils, sa belle-filleEt ses petits-enfants,

très touchés des marques de sympathie quileur ont été témoignées lors du décès de

M. Pierre-Robert LÉVY,

vous prient de trouver ici leurs sincèresremerciements.

Fanette Bressolle,Daniel Marchand,Catherine Brochard,

remercient les personnes qui se sontassociées à leur peine après la disparitionde leur père

Géo MARCHANDancien inspecteur

des ouvrages d’art à la SNCF,président honoraire

de la Fédération française de spéléologie.

Anniversaires de décèsUn an déjà, le 11 août 2009.

Noëlle JACOTIN,

quittait ceux qui l’aimait.

Elle est toujours fortement présentepour ces derniers.

Le 12 août 2000, disparaissait

Serge LEBOVICI

et le 22 août 2003, son épouse

Ruth LEBOVICI,née ROOS.

Leur famille et leurs prochesse souviennent d’eux avec affection.

SouvenirEn ce jour anniversaire de la mort de

Jean CARZOU(1er janvier 1907 - 12 août 2000)

partageons le souvenir d’un immenseartiste, d’un homme attaché à sa famille etl’espoir de voir son œuvre pérennisé dansson intégrité.

Louis Carzou.

Le CarnetFaites part

de vos événementspar téléphone : 01 57 28 28 28

par e-mail : [email protected] fax : 01 57 28 21 36

au journal ou par courrier :Le Monde - Le Carnet

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Tarifs 2010 (prix à la ligne)

Naissances, Anniversairesde naissance, Mariages,Fiançailles… : 18 � TTC

Décès, remerciements,Avis de messe, Anniversairesde décès, Souvenirs : 24 � TTC

Thèses : 15 � TTC

Réduction abonnésUn justificatif d’identité sera demandé.

Vous pouvez nous transmettrevos annonces la veille pour

le lendemain :• du lundi au jeudi jusqu’à 18 h;

• le vendredi jusqu’à 17 h;• le samedi et jours fériés

jusqu’à 16 h.

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Page 22: Le Monde - Jeudi 12 Aout 2010 - 12/08/2010 - 2010/12/08

Affaire BettencourtTémoignageJe suis une « citoyenne lambda».J’ai eu la surprise d’être convo-quée en 2009 par les services desimpôts pour justifier des sommesdonnées régulièrement à mesdeux filles, qui pour des raisonsdiverses ont des difficultés àentrer dans la vie professionnelle :c’était pour 200 euros mensuels!Elles n’ont pu bénéficier de cettesynergie « argent-relation-pou-voir » dont l’affaire Bettencourtn’est qu’un mince paragraphedans l’histoire de notre Républi-que à deux vitesses. Cela pourdire que nous payons allègre-ment le RSA de mes deux fillesavec nos impôts. Certes, noussommes de modestes « héritiers »selon la formule de Bourdieu, etplus sur le plan financier que sym-bolique. Nos parents n’ont pas étéconfrontés au chômage de leursenfants comme nous le sommesmaintenant. Chômage que le gou-vernement s’était juré de réduire.Il paraît donc important de réta-blir les chances de réussite endemandant à ceux qui ont la chan-ce et le pouvoir de créer des riches-ses d’en rendre une partie par lebiais d’une imposition adéquate.Pour l’instant, « Liberté EgalitéFraternité » signifie pour beau-coup : liberté pour un capitalismedestructeur, inégalité flagrantepour tous et fraternité dans laconsommation.

Catherine Ibert

Boulogne-Billancourt

(Hauts-de-Seine)

MéprisFaisant suite à l’article de M. Saint-Pierre paru dans cette rubrique le29 juillet, je voudrais rendre plusconcret encore ce que peut repré-senter pour Mme Bettencourt lasomme de 500000 euros, mon-tant du cadeau qu’elle a fait à lafille du docteur Brucker. Le patri-moine de Mme Bettencourt est deplus ou moins 20 milliards d’eu-ros. Son cadeau de 500000 eurosreprésente 0,0025 % de ce patri-moine. Si l’on applique ce pour-centage à un patrimoine français«moyen » de 300000 euros, celaferait un cadeau de 7,5 euros !Donc, pour Mme Bettencourt, soncadeau a une valeur équivalant à7,5 euros pour un Français mêmepas lambda. Naïveté, non, mépris.

François Dominguez

Nogent-sur-Marne

(Val-de-Marne)

Muraille de ChineM.Woerth l’a répété, il a dressé« une muraille de Chine » entre sesdifférentes activités et celles deson épouse. Sauf que, comme lerappelle Le Monde du 31juillet, lamuraille de Chine n’a pratique-ment jamais rien arrêté, et sur-tout pas les invasions des noma-des du nord. Ainsi donc M. Woertha dressé une muraille de Chine…Puisque lui-même l’avoue.

Michel Bancel

Gouzon (Creuse)

Le courrier du jour

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Leretour de la chaleur duSudEtape 26: Moreilles (Vendée) –Aulnay (Charente-Maritime)Total : 95 km ; dénivelé : 260m

S oleil et vent. Petit déjeuner en terras-se. Café noir, croissant, œuf au platet jambon de Vendée. Alex 007,

névrotique, fixe l’écran de son portable.Céline joue le silence. Pas un seul textodepuis leur fiévreux échange toi-émoi quisemblait avoir rouvert le scénario étriquéde leur histoire.

Il se mord la lèvre supérieure et balayel’inquiétude d’un revers de la main:«Bah, j’irai la voir à Aix-en-Provence dèsqu’on finira ce voyage. Les Chinois disent:l’esprit a beau faire plus de chemin que lecœur, il ne va jamais aussi loin. »

Nous logeons chez Renaud-Pierre, undiplômé de l’Essec revenu dans lemarais poitevin après avoir épousé uneThaïlandaise et vendu du Dom Péri-gnon aux Américains. Les chambresd’hôtes de son castel, le gazouillis deleur bébé et le retour au calme lui procu-rent davantage de bonheur que millesoirées new-yorkaises. Un exemple réus-si de néoruralisation.

Il déplie sur la table une grande cartedu marais, tachetée de vert et de bleu,kaléidoscope d’une réalité fascinante. Sesdoigts courent sur le plan, dessinent de lar-ges cercles, sa bouche se remplit de motsétranges: bot, contre-bot, levée, porte àflots… Il nous entraîne à la surface de ladeuxième zone la plus humide de France,

du marais desséché au marais mouillé, etremonte les siècles : « Niort avait presqueles pieds dans l’eau, dit-il, tout ici n’étaitqu’océan et îlots calcaires, moines etabbayes, un peu comme la lagune de Veni-se. Les cisterciens creusèrent le premiercanal à la main, en 1119.» A l’aide d’un mar-queur rose fluo, il surligne notre étape jus-qu’à Aulnay. Son épouse, Korakot, noussert une tasse de café. « La légende affirmeque le marais s’est fait en une nuit, pour-suit-il. La mer s’est mystérieusement reti-rée, d’un coup, laissant derrière elle unmarécage sauvage. »

En regardant la carte, tu comprendsque cet hiver, lors des inondations dans labaie de l’Aiguillon, l’océan a tenté dereprendre ce qui lui appartenait. « Nous

sommes donc sur une sorte de polder,non? », demande Alex 007, captivé.«Exact; Henri IV avait d’ailleurs engagédes ingénieurs hollandais pour organiserl’irrigation et nettoyer le marais. Pas suffi-samment au goût du cardinal de Richelieu,qui avait surnommé Moreilles “l’évêché leplus crotté de France!”»

Quand nous avons quitté Renaud-Pier-re, le soleil venait de franchir le zénith.

Lumière jaune marocaine, vent tournantcomme dans le Nebraska, champs de tour-nesols, blé moissonné, poussière. Circula-tion infernale en direction de LaRochelle.Virage à gauche, cap sud-est : je m’enfoncedans une campagne dorée, presque brû-lée, qui me rappelle la Castille. Alex 007

m’offre une tranche d’un juteux meloncharentais, acheté au bord de la route. Jeretrouve la chaleur du Sud, celle qui frap-pe la nuque, alourdit les épaules et cuit lecerveau comme un œuf à la coque.

Le perron de l’hôtel franchi, je me suisprécipité sous une douche froide avant deme laisser tomber les bras en croix surmon vingt-sixième lit depuis la Corse. Loinde chez soi, on apprend à être personne.«Celui qui voyage est toujours un vaga-bond, un étranger, un invité, écrit ClaudioMagris dans Trois Orients. Récits de voyages(Rivages poche/Petite bibliothèque, 2006).Il dort dans des chambres qui ont abrité desinconnus avant lui, il ne possède pasl’oreiller sur lequel il pose la tête ni le toit quile protège. Il comprend qu’on ne peutjamais vraiment posséder une maison, unespace taillé dans l’infini de l’univers, maisseulement s’y arrêter, pour une nuit oupour la vie, avec respect et gratitude.» p

n Sur le Webwww.guillaumeprebois.com

Capsud-est: jem’enfoncedansune campagne dorée,presquebrûlée,quime rappelle la Castille

Bastia

Macinaggio

Auron

Fréjus

Bois-d’Amont

Ottmarsheim

Vireux-WallerandNoyal-sur-Vilaine

LignéVesdun

0123

Courrier et contributions des lecteurs :[email protected] : 01-57-28-21-74

pTirage du Monde daté mercredi 11 août 2010 : 369 706 exemplaires. 1 2 3

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