2

Click here to load reader

Le point après deux années de généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en France

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Le point après deux années de généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en France

Imagerie de la Femme 2006;16:77-78 Éditorial 77© Masson, Paris, 2006

Éditorial

Le point après deux années de généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en France

Rosemary Ancelle-ParkInstitut de Veille Sanitaire, 12, rue du Val d’Osne, 94415 Saint-Maurice.

Correspondance : R. Ancelle-Park, à l’adresse ci-dessus.Email : [email protected]

Le programme de dépistage organisé du cancer du seina été établi par la Direction Générale de la Santé en 1994.Il a été basé sur les recommandations européennes pour laformation, le contrôle de qualité et l’évaluation et lesexpériences pilotes de la Caisse Nationale d’Assurance-Maladie. Le protocole était calqué sur celui des paysd’Europe du Nord et les indicateurs précoces d’efficacitéretenus pour guider et surveiller la qualité du programmeétaient ceux de l’Europe Contre le Cancer (ECC) [1].

Comparativement aux pays du nord de l’Europe, lasituation française comporte des structures existantes deradiologie décentralisées et une réalisation libre et fré-quente de la mammographie hors programme, rembour-sée par l’Assurance-Maladie. Les résultats des premiersprogrammes expérimentaux, ont été interprétés en fonc-tion de ce contexte particulier et ont montré que la parti-cipation faible ne permettrait pas d’atteindre l’objectif deréduction de la mortalité.

Une refonte du cahier des charges a été effectuée et aété publiée en 2001 [2]. Il comporte des modalités d’orga-nisation adaptées à notre système de santé. Le but étant defaire adhérer les médecins et les femmes, de retrouver lecolloque singulier et de se rapprocher des pratiques habi-tuelles, tout en encadrant l’organisation et les pratiquespar des normes de qualité et d’évaluation précises. Ainsi, leprogramme s’adresse aux femmes de 50 à 74 ans et associeplus étroitement dépistage et diagnostic. Il permet deréduire le nombre de faux positifs (clichés complémen-taires immédiats), de réduire le nombre de faux négatifs(examen clinique des seins et double lecture des mammo-graphies normales ou avec image bénigne), et enfind’effectuer un bilan complémentaire diagnostique immé-diat sans avoir à rappeler la femme.

Ce programme a été généralisé en France en 2004. Onconstate que le taux de participation global au programme

était en 2004 de 40 %, mais que le taux de couverture(dépistage individuel et dépistage organisé) par la mam-mographie récente c’est-à-dire une mammographie demoins de deux ans, estimé par les grandes enquêtes natio-nales était en 2002 de 70 % pour les femmes de 50 à74 ans. Ce taux décroît avec l’âge (77 % environ entre 50et 59 ans, 64 % entre 65 à 69 ans et 52 % entre 70 à74 ans) [3]. Cependant on observe une augmentation de3 % de ce taux de couverture entre 2000 et 2002 et cetteprogression est observée dans toutes les tranches d’âgeavec une augmentation forte de 8 % pour les femmes de70 à 74 ans, qui en 2000, n’étaient pas invitées par le pro-gramme organisé.

Le taux de participation global au programme était en 2004 de 40 %, le taux de couverture estimé par les grandes enquêtes nationales

était en 2002 de 70 % pour les femmes de 50 à 74 ans

Les effets du programme de dépistage se remarquentlorsque l’on compare les départements avec et sans pro-gramme. Ainsi, les femmes qui résident dans un départe-ment où existe un programme de dépistage organisé, ontglobalement un taux de mammographie récente plus élevé(74 %) que celles qui résident dans un département sansprogramme (64 %) [4]. Cette différence est observée seu-lement pour les femmes ayant plus de 60 ans et est del’ordre de 17 % pour ces femmes plus âgées.

Les effets du programme de dépistage se remarquentaussi sur l’état du parc mammographique. Ainsi onconstate qu’en 1998, 30 % des appareils présentaient undéfaut d’étalonnage en 1998 (1 029 appareils contrôlés)

Page 2: Le point après deux années de généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en France

78 Le point après deux années de généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en France

contre seulement 6 % en 2004 (2 317 appareils contrôlés)et 37 % des appareils travaillaient avec des densitésoptiques hors normes en 1998 contre 2 % en 2004 [5].Les améliorations très importantes obtenues sur lesmammographes, les négatoscopes, les machines à déve-lopper bénéficient à toute la population en dépistagecomme en diagnostic.

Les améliorations très importantes obtenues sur les mammographes, les négatoscopes,

les machines à développer bénéficient à toute la population en dépistage

comme en diagnostic

Le nouveau cahier des charges a introduit dans ledéroulement de l’examen de dépistage un examen cliniquesystématique et un bilan diagnostique immédiat en casd’image suspecte (agrandissement, échographie, cyto-ponction) permettant de confirmer ou non les imagesdétectées par la première lecture (L1). En 2003, 12 % desfemmes ont eu un bilan diagnostique immédiat après lapremière lecture et seules 4 % des anomalies ont étéconfirmées par le bilan diagnostique immédiat. Le taux demammographies positives peut paraître élevé, mais lesnouvelles modalités ont réduit à 1,8 % le nombre defemmes rappelées après la deuxième lecture (L2) (1,6 %des mammographies négatives en L1 + 0,2 % de mammo-graphies positives en L1 mais négatives après bilan immé-diat). La référence européenne pour le taux de rappelrepose uniquement sur des bilans diagnostiques différéscomme dans l’ancien cahier des charges. Pour comparai-son 6,3 % des femmes en 2001 et 7,9 % en 2002 ont étérappelées pour faire un bilan diagnostique différé dans lecadre de l’ancien cahier des charges.

L’examen clinique anormal, qui nécessite un bilan dia-gnostique, n’est pas pour l’instant bien enregistré. Cepen-dant, les résultats des examens cliniques anormaux suivisd’un bilan et sans anomalie visible à la mammographieconcernent seulement 0,3 % des femmes dépistées.

Parmi les femmes ayant effectué une première mammo-graphie dans le cadre du dépistage (prévalence), 0,8 % onteu une biopsie chirurgicale (référence européenne < 0,9 %en prévalence).

Les indicateurs d’efficacité du programme, relatifs auxcancers détectés, à leur stade et à leur taille sont des indi-cateurs indirects du pronostic et donc de l’impact potentieldu dépistage sur la mortalité. Le taux de cancers détectéspar le dépistage était de 6,3 ‰, dont 8,3 % ont été détec-

tés par le 2e lecteur. Ce taux de cancers détectés par le2e lecteur laisse supposer que dans le cadre du dépistageindividuel, où la deuxième lecture n’existe pas ou bien sefait dans des cabinets qui ne sont pas des cabinets de radio-logie avec des négatoscopes contrôlés peu souvent, cer-tains cancers ne sont pas repérés.

Le pourcentage de petits cancers de bon pronostic étaitpour les cancers canalaires in situ de 13 %, pour les cancersinvasifs ≤ 10 mm de 37 % et pour les cancers invasifs≤ 10 mm sans envahissement ganglionnaire, de 31 %. Enprévalence, c’est-à-dire pour la première mammographiedans le cadre du dépistage, ces indicateurs étaient confor-mes aux références européennes.

Les taux de mammographies positives diminuent avecl’âge avec la décroissance naturelle de la densité mam-maire. Conformément à l’histoire naturelle du cancer dusein, on constate une augmentation régulière des taux decancers détectés avec l’âge et une diminution du pourcen-tage de cancers canalaires in situ.

L’objectif du programme est de donner un accès libreet gratuit à une mammographie de qualité aux femmes dela tranche d’âge. Les différents indicateurs à court termedont on dispose pour faire l’évaluation indiquent une aug-mentation de la couverture et une augmentation de la qua-lité. Le programme généralisé en 2004, montre une parti-cipation en hausse par rapport aux années précédentes etde bons résultats des indicateurs de qualité et d’efficacité.Cependant, il ne s’agit pas de relâcher les efforts. La parti-cipation des femmes au programme de dépistage organisédoit mobiliser les énergies, mais la qualité ne doit jamaisêtre oubliée car elle est directement liée à l’efficacité duprogramme donc à la réduction de la mortalité par cancerdu sein.

Références

[1] Europe Against Cancer. European guidelines for quality assurancein mammography screening, 1996 et 2001 European commission.

[2] Cahier des charges relatif à l’organisation du dépistage des cancers,aux structures de gestion, aux radiologues, annexes à la convention-type entre les organismes d’Assurance-Maladie et les profession-nels de santé. Bulletin Officiel 2001;43.

[3] Makdessi-Raynaud Y. « La prévention : perception et comporte-ments — premiers résultats de l’enquête sur la santé et les soins mé-dicaux ». Études et Résultats, Drees 2005;385.

[4] Duport N, Ancelle-Park R. Do socio-demographic factors in-fluence mammography use of French women: analysis of a crosssectional survey. Eur J Cancer Prev 2006 (sous presse).

[5] Séradour B. L’égalité des femmes devant le dépistage des cancersdu sein : ce qui a changé. 27e journées de la Société Française de Sé-nologie et de Pathologie Mammaire. Deauville 2005:207-12.