Le Sage Du Tibet

Embed Size (px)

Citation preview

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    1/45

    T. LOBSANG RAMPA

    LE SAGE DU TIBET

    Le Sage du Tibet- (1980)

    Mieux vaut allumer une chandelleque maudire l'obscurit.

    Table des matiresTable des matires ..................................................................................................................................... 1Avertissement ........................................................................................................................................... 2Chapitre premier ....................................................................................................................................... 2

    Chapitre deuxime .................................................................................................................................... 6Chapitre troisime ................................................................................................................................... 11Chapitre quatrime .................................................................................................................................. 15Chapitre cinquime ................................................................................................................................. 20Chapitre sixime ..................................................................................................................................... 26Chapitre septime .................................................................................................................................... 30Chapitre huitime .................................................................................................................................... 35Chapitre neuvime .................................................................................................................................. 38pilogue .................................................................................................................................................. 43

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    2/45

    Avertissement

    Le sage du Tibet Page 2 sur 45

    AvertissementLorsque j'ai crit dans Le Troisime oeil, il y a dj

    plusieurs annes, que j'avais vol en cerf-volant, mespropos ont t accueillis par des hues et des moqueriescomme si j'avais commis le plus grand des dlits. Etaujourd'hui le vol en cerf-volant est pratique courante. On

    peut voir des cerfs-volants tirs par des hors-bord s'levertrs haut dans le ciel, et d'autres bel et bien "pilots" par unhomme bord. Celui-ci doit, dans un premier temps, setenir au bord d'une falaise ou sur n'importe quel

    promontoire assez haut, puis se lancer dans le vide sur sonappareil qui, vritablement, le porte. Personne aujourd'huine daigne reconnatre que Lobsang Rampa avait dit juste,et pourtant ils ont t nombreux se moquer lorsque, pourla premire fois, j'ai parl de vol en cerf-volant.

    Beaucoup de choses qui, il y a seulement quelquesannes, semblaient relever de la science-fiction sontdevenues des faits quasi quotidiens. Les satellites que l'onenvoie dans l'espace en sont un exemple, ou bien la

    retransmission Londres ou Paris des missionstlvises des tats-Unis, du Japon ou d'ailleurs. Et cela, jel'avais prdit. Nous avons vu aussi un homme, ou pluttdes hommes, marcher sur la Lune ; cela encore prouve quemes livres ont dit vrai et cette confirmation de mes critsne va d'ailleurs qu'en s'amplifiant.

    Le prsent ouvrage n'est pas un roman. Ce n'est pasnon plus un livre de science-fiction. C'est le compte rendu

    pur et simple de ce qui m'est rellement arriv, et je rpteque l'auteur se fait un devoir de ne prendre aucune libertquant la vracit des faits.

    Malgr cela, certains peut-tre s'obstineront n'y voirque de la science-fiction ou quelque chose de similaire.

    Chacun est libre, bien sr, d'en penser ce qu'il veut, libreaussi d'en rire. Mais peut-tre qu'une fois le livre ferm unvnement se produira qui viendra confirmer mes dires. Jetiens signaler toutefois que je ne rpondrai aucunequestion concernant ce livre ; le courrier volumineux que

    j'ai reu concernant mes prcdents ouvrages, sans quemes correspondants ne pensent joindre un timbre pour larponse, m'a dcid prendre pareille mesure. Parfois ilm'a cot davantage pour rpondre un lecteur que celui-ci n'a d payer pour obtenir mon livre.

    Bref, voici de nouveaux crits ; je souhaite qu'ils vousplaisent et que vous les jugiez crdibles ; je me permetsd'ajouter, toutefois, que si cela n'est pas, peut-tre est-ce

    parce que vous n'avez pas encore atteint un degrd'volution suffisant.

    Chapitre premier Lobsang ! Lobsang ! ... J'avais l'impression trs

    vague d'merger d'un profond sommeil dans lequelm'aurait plong une immense fatigue. La journe avait ttrs rude, mais je n'tais pas seul puisque quelqu'unm'appelait. nouveau la voix se fit entendre : Lobsang ! Soudain tout, autour de moi, se mit trembler ; j'ouvris les yeux et j 'eus le sentiment que lamontagne au pied de laquelle je me trouvais tait en train

    de s'effondrer. C'est alors qu'une main se tendit qui, d'unmouvement sec, m'empoigna pour me mettre vivement l'cart. Il tait temps : peine avait-elle accompli ce gestequ'un norme rocher aux artes tranchantes s'croulait

    juste derrire moi et dchirait ma robe. Tant bien que malje me levai et, encore tout abasourdi, suivis moncompagnon jusque sur une petite corniche au bout delaquelle se trouvait un ermitage minuscule.

    Autour de nous ce n'tait que neige et rochersdgringolant. Soudain nous apermes la silhouettecourbe d'un vieil ermite qui courait notre rencontre dumieux qu'il pouvait. Mais une masse norme de rochers se

    mit alors dvaler la pente, emportant avec elle l'ermite,l'ermitage et la pointe rocheuse qui lui servait de support.Celle-ci avait plus de cinquante mtres de long ; elle n'enfut pas moins balaye comme une simple feuille mortedans un coup de vent.

    Mon guide, le lama Mingyar Dondup, me tenaitfermement par les paules. Autour de nous c'taitl'obscurit totale ; aucune toile ne scintillait et, venant desmaisons de Lhassa, pas la moindre lueur vacillante d'unechandelle. Tout n'tait que tnbres. Brusquement, surgitdevant nous un amas de rocs, de sable, de neige et de glaceapparemment tout rcent, et la corniche sur laquelle nousavancions d'un pas trs incertain se mit basculer vers

    l'amont, nous donnant l'horrible impression de glisser,glisser tout jamais sans le moindre recours. Cetteglissade prit fin cependant dans une violente secousse.Sans doute avais-je perdu connaissance car, lorsque jeretrouvai mes esprits, j'tais en train de me remmorer lescirconstances qui avaient t l'origine de ce voyage

    jusqu' cet ermitage lointain.Au Potala, nous tions en train de nous divertir avec le

    tlescope qu'un gentleman anglais avait offert au dala-lama en signe d'amiti, lorsque, tout coup, je reprai flanc de montagne, en un point trs lev, des bannires

    prires que l'on agitait ; les mouvements semblaient sefaire selon un code, aussi je passai trs vite l'appareil

    mon guide, en lui indiquant la direction.Le tlescope fermement appuy contre le mur

    d'enceinte, l'endroit le plus lev du Potala, le guide restal un bon moment scruter, puis s'cria : C'est l'ermitequi demande de l'aide. Il est malade. Il faut avertir l'Abbet lui dire que nous sommes prts y aller. D'un geste

    brusque il replia le tlescope et me le tendit pour que je lerapporte dans la pice o le dala-lama rangeait lesoffrandes exceptionnelles.

    Je courus avec le prcieux objet, prenant garde de nepas trbucher pour ne pas le laisser tomber. C'tait lepremier tlescope que je voyais. Ensuite je sortis pourremplir d'orge mon sac et vrifier si mon briquet amadou

    fonctionnait ; puis, en flnant, j'attendis le lama MingyarDondup.

    Il apparut bientt portant deux baluchons, l'un trslourd qu'il avait dj sur le dos, et un autre plus lger qu'ilinstalla sur le mien. Nous irons cheval jusqu'au pied dela montagne, dit-il, puis nous renverrons les chevaux et ilnous faudra grimper. La monte sera trs dure, je l'ai djfait.

    Chacun ayant enfourch sa monture, nous descendmesles marches jusqu' la route de l'anneau qui entoureLhassa. l'endroit o elle bifurque, je ne pus m'empcher,comme je le faisais toujours, de jeter un coup d'oeil furtifvers la gauche la maison o j'tais n. Mais ce n'tait pas

    le moment de s'attendrir, nous tions en mission.Les chevaux se mirent bientt haleter et s'brouer ;

    de toute vidence ils peinaient. Une telle escaladereprsentait un effort au-dessus de leurs forces. Leurs

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    3/45

    Chapitre premier

    Le sage du Tibet Page 3 sur 45

    sabots ne faisaient que glisser sur le roc. Je crois que leschevaux doivent s'arrter l, dit tout coup le lamaMingyar Dondup poussant un soupir. partir demaintenant nous ne pouvons compter que sur nos pauvres

    pieds ! Nous descendmes donc de cheval et, en lesflattant de la main, mon compagnon dit aux btes derentrer. Elles firent demi-tour et reprirent le sentier parlequel nous tions venus, ragaillardies, semblait-il, l'ide

    de rentrer sans avoir finir cette pnible monte. Aprsavoir redress nos baluchons et vrifi si nos btons taienten parfait tat la moindre fissure pouvant tre fatale ,nous passmes l'inspection des autres objets ; nousavions bien notre pierre feu et l'amadou ainsi que nos

    provisions. Nous pouvions donc partir. Sans mme unregard en arrire, l'ascension commena. Les roches quedifficilement nous escaladions taient aussi dures et aussiglissantes que du verre. Sans souci pour nos mains et nostibias que nous corchions sur la paroi, nous cherchions lamoindre fissure o insrer les doigts et les orteils, et grce ces appuis prcaires, lentement, nous progressions. Nousatteignmes enfin une petite plate-forme sur laquelle nous

    nous hissmes pour reprendre haleine et retrouver quelquenergie. Un filet d'eau qui s'chappait d'une fente rocheusenous permit de nous dsaltrer et de faire de la tsampa.Elle ne fut pas trs bonne car l'eau tait glaciale et l'espacerestreint ne permettait pas de faire du feu. Mais le fait de

    boire et de manger nous requinqua, et nous envisagemesensuite la possibilit de continuer notre ascension. La paroitait tout fait lisse et il semblait impossible que quelqu'unait pu jamais l'escalader. Nous l'attaqumes cependant,comme d'autres avant nous l'avaient fait. Nous montionscentimtre par centimtre et, petit petit, grandissait le

    point minuscule vers lequel nous tendions. Nous pmesbientt distinguer chacun des rochers qui constituaient

    l'ermitage.Celui-ci tait perch l'extrme pointe d'un peron

    rocheux qui surplombait la pente. En poursuivant notreescalade, nous russmes nous glisser dessous, puis, avec

    beaucoup de peine, nous nous hissmes dessus. Une foisl, nous prmes le temps de souffler ; nous tions dj trshaut par rapport la plaine de Lhassa, l'oxygnecommenait manquer et il faisait trs froid. Lorsque nousfmes en tat de repartir, le chemin nous parut moins ardu

    jusqu' l'entre de l'ermitage. Le vieil ermite tait sur leseuil. Je jetai un coup d'oeil l'intrieur et fus frapp parl'exigut de la pice. De toute vidence il tait impossibled'y pntrer trois, et je dcidai de rester l'extrieur.

    Mon guide me fit un signe d'approbation et je m'loignaitandis que la porte se refermait derrire lui.

    La nature a ses lois qu'il faut respecter en tout etpartout ; et c'est pour rpondre l'une de ses exigencesqu'il me fallut trs vite chercher un endroit pouvant faireoffice de "lieux d'aisance". Je le trouvai au bord del'peron rocheux sous la forme d'une roche plate quis'avanait dans le vide et qui comportait en son milieu unorifice trs pratique ; il tait sans doute artificiel ou biennaturel, mais largi par quelqu'un. En m'accroupissantdessus j'eus aussitt l'explication d'un mystre qui m'avaitintrigu en montant. Nous tions passs prs d'unmonticule l'aspect quelque peu singulier, qu'ornaient ce

    qui semblait tre des tessons de glace jauntres dontcertains avaient une forme allonge. Je venais decomprendre que cet amoncellement bizarre n'tait que la

    preuve d'un passage de l'homme en ces lieux, et c'est avecentrain que j'ajoutai ma propre contribution.

    Une fois ce besoin satisfait, je me promenai dans lesenvirons, et trouvai le sol trs glissant. Je suivis nanmoinsle sentier et arrivai bientt au niveau d'une grosse pierre enquilibre instable qui faisait une avance. Je trouvais un

    peu trange la position de ce rocher mais ne comptais pasapprofondir ce problme lorsque, tout coup, en

    examinant de plus prs le phnomne, j'eusimmdiatement la certitude qu'il n'tait pas naturel. Unhomme avait dlibrment plac la pierre dans cette

    position. Mais dans quel but et de quelle manire ? Jedonnai un coup de pied, au hasard, dans le roc, mais ayantoubli que j'tais pieds nus, je dus pendant un momentfrotter mon pied endolori. Puis tournant le dos l'avance,

    j'inspectai l'autre bord et me trouvai ainsi du ct de lapente par laquelle nous tions monts.

    Que nous ayons pu escalader cette paroi semblait tenirde la magie tant elle tait vertigineuse. D'en haut, cettesurface ressemblait une plaque de marbre poli, et penserqu'il nous faudrait bientt redescendre par la mme voie

    me donnait la nause... Je voulus prendre ma boted'amadou et ma pierre feu, mais brusquement me revint l'esprit le tableau exact de ma situation : je me trouvaisquelque part en montagne et sous le roc, sans le moindrevtement pour me vtir, sans le moindre grain d'orge pourme nourrir, sans bol, sans amadou et sans pierre feu. J'aid alors mettre un juron, d'essence non bouddhique, car

    j'entendis une voix chuchoter mon oreille : Lobsang, mon ami, est-ce que a va ? Je reconnus

    la voix de mon matre, le lama Mingyar Dondup, etaussitt me sentis rassur. Oui je suis ici, rpondis-je, j'aid m'tourdir en tombant, je n'ai plus ma robe ni tout cequ'elle contenait, et je n'ai pas la moindre ide de l'endroit

    o nous sommes, pas plus que je ne sais comment ensortir. Il nous faut de la lumire.

    Le lama, dont les jambes taient coinces sous un grosrocher, rpliqua : Ne t'inquite pas, Lobsang, je connais

    bien cette passe ; le vieil ermite dtenait de grands secretsen ces lieux ; ici est inscrite l'histoire de l'Humanit, ducommencement la fin. Il fit une pause, puis ajouta : Si tu passes la main sur la paroi de gauche tu vas bienttsentir une asprit. En poussant trs fort cet endroit, la

    pierre doit basculer, et tu auras ainsi accs une sorte derenfoncement dans lequel tu trouveras des robes derechange et une provision d'orge. Mais tu devras ouvrird'abord un placard et y chercher de l'amadou, une pierre

    feu et des chandelles. Tout cela doit se trouver sur latroisime tagre en partant du bas. Ce n'est qu'avec un

    peu de lumire que nous pourrons vritablement matriserla situation.

    Tout d'abord, je regardai la paroi de gauche, comme mel'avait indiqu mon compagnon, puis ttai le mur ducorridor, mais ma qute me semblait vaine tant celui-ci me

    paraissait lisse comme s'il et t artificiel.J'allais abandonner quand tout coup mes doigts

    rencontrrent l'asprit attendue. Je bourrai le mur decoups de poing cet endroit, jusqu' y laisser deslambeaux de peau. Je poussai de toutes mes forces,

    persuad que je n'y arriverais jamais. Enfin, mes efforts

    furent rcompenss et la roche bascula sur elle-mme enun grincement effrayant. Je pus voir, en effet, quelquechose qui ressemblait un placard et qui comportait destagres. Aprs avoir repr la troisime, j'y cherchai la

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    4/45

    Chapitre premier

    Le sage du Tibet Page 4 sur 45

    pierre feu et l'amadou ; je les trouvai bientt en mmetemps que les chandelles. L'amadou tait d'une qualitexceptionnelle ; il n'tait pas du tout humide et s'enflammasur le champ. Je m'empressai d'allumer une chandelle car

    je commenais me brler les doigts. Allumes-en deux, me dit mon guide, une pour toi et

    une pour moi. Il y en a tout un stock ; nous en aurionsmme suffisamment pour tenir un sige de huit jours. Je

    jetai un coup d'oeil l'intrieur du placard et y trouvai unebarre mtallique provenant sans doute d'un tonneau. Elleparaissait en fer et j'eus du mal la soulever. Je voulaism'en servir comme levier pour dgager les jambes de moncompagnon qui taient prises sous un rocher. M'clairantd'une bougie, j'allai informer le lama de mon intention,

    puis je revins m'occuper de cette barre. C'tait le seulmoyen, pensais-je, de librer mon compagnon.

    Je posai la barre au pied du bloc de pierre et, quatrepattes devant, cherchai un moyen de le soulever. Enregardant les cailloux tout autour, il me vint une ide : si jedonnais mon guide une des planches en bois que j'avaistrouves dans la cachette, peut-tre pourrait-il la faire

    glisser avec une pierre sous le rocher au moment o jesoulverais celui-ci, en admettant que j'y parvienne ! Lelama approuva mon ide. C'est notre seule chance, dit-il,car si je dois rester un instant de plus l-dessous je vais ylaisser mes os ! Allons, commenons.

    Je reprai donc une grosse pierre de forme cubiqued'environ quatre mains d'paisseur, l'apportai, au pied durocher et l'appuyai contre lui, puis je donnai une planche mon ami pour qu'il contribue la manoeuvre. Nous

    pensions que si j'arrivais soulever un tant soit peu le blocde pierre, il pourrait pousser un caillou dessous et crerainsi une ouverture par o il pourrait sortir ses jambes.

    Je cherchai l'endroit le plus propice pour y insrer la

    barre et enfonai cette dernire par l'extrmit qui portaitune griffe, aussi profondment que possible, entre le sol etla base du bloc. Il me fallut ensuite placer un gros caillouaussi prs que possible de la griffe.

    Quand j'eus termin, je lanai : Vous tes prt,Matre ? Et l'cho de ma propre voix faillit merenverser ! Je poussai ensuite de toutes mes forces etm'appuyai de tout mon poids sur la barre, mais sansrsultat. Je n'tais pas assez lourd. Je cherchai alors autourde moi quel caillou je pourrais utiliser en renfort. Il fallaitqu'il soit trs lourd, mais aussi que je puisse le porter. J'enreprai un et le tranai jusqu' la roche. Il me fallut ensuitele poser en quilibre sur la barre et nouveau m'appuyer

    de tout mon poids sur lui tout en l'empchant de tomber. ma grande joie, tout coup, je sentis un tressaillementdans la barre qui bientt bascula vers le sol.

    Bravo, tu as russi ! s'cria mon ami, et j'ai pu mettrela pierre sous la roche ; je vais pouvoir maintenant retirermes jambes.

    Au comble de la joie je me redressai et vis, en effet,que les jambes du lama taient presque compltementdgages, mais elles taient vif et saignaientabondamment. Nous avions peur d'une fracture et c'estavec beaucoup de prcautions que je l'aidai les mouvoir.Elles fonctionnaient normalement, semblait-il, en dpit dela blessure ; je me glissai sous le rocher pour atteindre ses

    pieds encore retenus dessous et les poussai pour aider lelama s'extraire compltement de sous la pierre. J'opraitrs dlicatement et, de toute vidence, mme si les

    blessures paraissaient trs srieuses, il n'y avait rien decass.

    En poussant je dus dvier de ma trajectoire, gn parune asprit du sol, et je pensai alors que c'tait sans doute cette asprit que le lama devait de n'avoir pas eu les

    jambes broyes. Ce n'est pas sans un soupir desoulagement que nous parvnmes au bout de nos peines, et

    j'aidai mon ami s'asseoir sur une petite corniche.

    Comme nos deux bougies ne nous clairaient passuffisamment, j'allai en chercher d'autres dans la cavit quenous avions dcouverte. J'y trouvai galement une sorte de

    panier dans lequel je mis divers objets. la lumire des six bougies que j'avais rapportes

    nous pmes mieux voir les plaies. Du haut de la cuissejusqu'au genou la jambe tait compltement vif, et dugenou jusqu'aux pieds les chairs n'taient que lambeauxsanguinolents qui pendaient tout autour.

    Le lama me renvoya la caverne pour y prendre de lacharpie et un pot contenant un baume spcial. Grce sesexplications, je n'eus pas de mal trouver ce qu'il medemandait ; je rapportai en plus une bouteille de

    dsinfectant, ce qui parut faire plaisir mon ami. Jenettoyai toute la surface de ses jambes, de haut en bas, etsur les indications de mon guide replaai les chairsmeurtries sur les os apparents, appliquant sur le toutl'onguent que j'avais rapport. Au bout d'une heure, celui-ci tait tout fait sec et le "pltre" semblait tenir.

    Avec la charpie, je fis alors des pansements quej'enroulai tout autour par mesure de prcaution. Puis j'allairemettre sur les tagres tous les objets que j'avaisemprunts, sauf les chandelles que nous gardmes.

    Ramassant deux planches de bois je les donnai au lamaqui m'en sut gr, et je lui fis part de mon intentiond'escalader l'boulis pour voir ce que l'on pouvait faire.

    Il me sourit et me rassura : Je connais bien cetendroit, Lobsang, il existe depuis un million d'annes. D'icisont originaires les premiers habitants de notre pays ; cesont eux qui l'ont amnag. condition qu'une roche nes'effondre pas en obstruant la voie, nous pouvons rester iciune semaine ou deux en toute scurit.

    Il hocha la tte en direction de la valle, et ajouta : Jene pense pas que nous pourrons repartir de ce ct, et sinous ne trouvons pas une ouverture dans la rochevolcanique, peut-tre serons-nous dcouverts dans unmillier d'annes par des explorateurs qui trouveront alorsnos squelettes trs intressants !

    Je fis quelques pas dans la galerie et dpassai l'boulis

    par le ct, mais ce chemin me semblant trop prilleux, jeme demandais comment le lama allait pouvoir passer. Qui veut peut , me dis-je ; et l'ide me vint alors de memettre quatre pattes au pied de l'boulis et de fairemonter mon ami sur mon dos ; celui-ci aurait ainsi moinsde mal passer par-dessus si je lui servais de marche-pied.Quand je lui soumis mon ide, le lama s'y opposa toutd'abord, mais aprs plusieurs tentatives aussi pniblesqu'infructueuses pour escalader tout seul la roche, il finit

    par accepter mon offre. J'empilai alors quelques galetspour me faire un coussin aussi plat que possible, puis je memis quatre pattes en disant mon ami que j'tais prt.Prestement il posa un pied sur ma hanche droite et l'autre

    sur mon paule gauche, et en un clair il passa par-dessusl'boulis et se retrouva de l'autre ct. Je me redressai etvis qu'il tait en sueur, tant il avait souffert et avait craintde me faire mal.

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    5/45

    Chapitre premier

    Le sage du Tibet Page 5 sur 45

    Une fois de l'autre ct, nous nous assmes pourrcuprer un peu de nos forces. Nous ne pouvions pas fairede tsampa puisque nous n'avions plus ni bols ni orge, maissoudain je me rappelai en avoir vu dans la caverne et, unefois de plus, j'y retournai. Je fouillai parmi les bols en boiset en choisis deux, rservant le plus beau pour mon guide.Je les nettoyai avec un peu de sable et lorsqu'ils furent biendcaps je les remplis d'orge. Il me fallait encore faire du

    feu, mais c'tait un jeu d'enfant puisque la cavernerenfermait tout ce dont j'avais besoin : amadou, pierre feu et bches. l'aide d'un gros morceau de beurre que jetrouvai aussi dans le placard je pus faire cette bouillieconsistante que nous appelons tsampa . Revenantauprs de mon guide, nous nous installmes sans mot dire

    pour la manger. Requinqus par ce repas nous tions denouveau prts partir.

    Nous partmes donc, munis de nos seules richesses ici-bas, savoir, un bol en bois, de l'amadou, une pierre feu,un sac d'orge, et deux planches ! Tout couverts de bleus etde meurtrissures, et aprs une marche qui me parut durerdes sicles, nous atteignmes enfin ce que je pris pour la

    fin du tunnel. Mais le lama m'ta vite mes illusions : Non, Lobsang, ce n'est pas la fin, dit-il, mais si tuappuies la base de ce pan de rocher, il va pivoter sur lui-mme et nous pourrons passer par-dessous. Comme ilme l'avait dit je poussai donc sur le rocher qui fermait le

    passage et, avec un grincement terrifiant, celui-ci basculapour se mettre en position horizontale. Il tenait tout seul,mais par mesure de prudence je le tins pendant que monami passait. Je me glissai mon tour dessous, et quandnous fmes tous deux de l'autre ct je donnai un coup surla dalle pour qu'elle reprenne sa position d'origine. Lafaible lueur de nos chandelles rendait encore plus profondel'obscurit des lieux. Lobsang, teins ta bougie, me dit

    alors le lama, j'teins la mienne aussi ; ainsi nous pourronsmieux apprcier la lumire du jour !

    La lumire du jour ! Je pensai que mon ami taitvictime d'une hallucination que j'attribuais la fatigue et la douleur. J'teignis nanmoins ma chandelle, et l'airs'imprgna aussitt d'une odeur assez dsagrable de

    beurre rance. Dans quelques instants, me dit mon guide, nous

    allons tre submergs de lumire. Je me sentaisparfaitement idiot, debout au milieu des tnbres. Celles-cime semblaient rsonner de mille bruits sourds etoppressants que je n'eus pas le loisir d'identifier car un

    phnomne trange se produisit qui retint toute mon

    attention. l'autre bout de la salle dans laquelle nous noustrouvions, venait d'apparatre une grosse boule lumineuse,toute rouge, qui avait l'aspect du mtal que l'on chauffe

    jusqu' l'incandescence. Le rouge s'attnuaprogressivement, devint jaune, puis blanc, et bientt unelumire lgrement bleute, pareille celle du jour, inondala pice, rvlant chaque objet dans sa vritable nature. Jerestai l, pantelant d'merveillement. La salle o noustions tait trs vaste, si vaste qu'elle aurait pu contenir lePotala tout entier. J'tais comme hypnotis la fois par lalumire et par les dessins tranges qui ornaient les murs.Autre fait extraordinaire : le sol tait jonch d'objets nonmoins tranges mais qui ne gnaient pas lorsqu'on

    marchait dessus ! Quel endroit prodigieux, n'est-ce pas, Lobsang ! me

    dit mon guide en s'approchant. Il date d'une poquebeaucoup trop lointaine pour que l 'esprit humain puisse la

    concevoir. C'tait ici le quartier gnral d'un peuplecapable d'effectuer de grands voyages dans l'espace etquantit d'autres choses. Des millions d'annes ont pass ettout est encore intact. Un certain nombre d'entre noustaient les gardiens de ces lieux que l'on nomme le Templede l'Intrieur.

    Je m'approchai de l'un des murs pour mieux voir ce queje m'imaginais tre des dessins ; mais je vis qu'il s'agissait

    de signes calligraphiques parfaitement inconnus sur terre. Tu as raison, me dit mon ami qui pouvait lire dans mespenses, tout ce que tu vois ici est l'oeuvre d'un peuplesuprieur que l'on appelle les Jardiniers ; ce sont eux quiont amen sur terre les hommes et les animaux.

    Il se tut, et me montra du doigt un casier contre le mur. Peux-tu aller jusque-l, me dit-il, et prendre deux de ces

    bouts de bois que tu vois relis par paires ? Obissant,j'allai dans la direction qu'il m'indiquait, et restai unmoment en admiration devant le contenu de l'armoire. Ilsemblait y avoir l toutes sortes d'objets et de potions usage mdical.

    J'avisai dans un coin un certain nombre de ces bouts de

    bois relis deux par deux par une traverse, et j'en pris deux.Je compris qu'ils devaient servir soutenir un homme. Jen'avais cette poque aucun mot pour dsigner jedevais ne l'apprendre que plus tard ce qu'taient des

    bquilles. J'en donnai deux au lama qui plaa les traversessous ses aisselles tandis qu'il appuyait ses mains sur desergots de bois placs mi-hauteur. Lobsang, me dit-il, tuas parfaitement compris l'usage de ces objets ; ils aident lesinvalides marcher. Maintenant je vais pouvoir aller moi-mme jusqu' ce placard et me faire un pltre plus solide.Il me permettra de marcher plus facilement jusqu' ce queles chairs se cicatrisent.

    Il fit quelques pas et, par curiosit, je le suivis.

    Va chercher les planches que nous avions, me dit-il, etnous les mettrons dans ce coin pour les avoir sous la mainen cas de besoin. L-dessus il me tourna le dos et se mit fouiller dans le casier. J'allai donc chercher les plancheset les posai l o il m'avait dit.

    Maintenant, reprit le lama, pourrais-tu aller cherchernos baluchons et la barre mtallique que nous avons laisssdans la galerie ? Au fait, la barre n'est pas en fer comme tule pensais, mais en acier ; c'est une matire beaucoup plusdure et plus rsistante.

    Je me rendis donc dans la galerie, aprs avoir faitbasculer le rocher comme nous l'avions fait prcdemment.Je bnissais la lumire qui m'avait suivi et qui clairait tout

    le tunnel ; je pus ainsi retrouver facilement mon cheminjusqu' l'boulis que j'escaladai de nouveau pour prendrenos baluchons et la barre mtallique qui se trouvaientderrire. Les sacs me parurent extrmement lourds, maissans doute cette impression tait-elle due au manque denourriture et l'tat de faiblesse qui en rsultait. Je portailes sacs jusqu'au rocher et revins chercher la barre. J'eus

    beaucoup de mal la soulever et je m'essoufflais etgrognais comme un vieillard. J'eus l'ide alors de la

    prendre par une des extrmits et de la laisser tranerderrire moi en marchant. Mais il fallait d'abord passerl'boulis avec, et ce ne fut pas chose facile !

    Arriv au rocher, je le fis basculer, passai pniblement

    dessous en tranant mes objets, et me retrouvai bienttdans la grande salle aprs avoir referm derrire moi la porte d'entre .

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    6/45

    Chapitre deuxime

    Le sage du Tibet Page 6 sur 45

    Le lama Mingyar Dondup tait trs occup et n'avaitpas perdu son temps. Ses deux jambes taient maintenanttroitement maintenues chacune dans une gaine rigide qui

    brillait la lumire. Il semblait pouvoir marchernormalement.

    Lobsang, commena-t-il, nous allons nous faire unrepas avant de visiter ces lieux. Je viens d'avoir une liaisontlpathique avec un ami du Potala, et il me dit qu'

    l'extrieur la tempte fait rage. Mieux vaut rester ici letemps qu'elle se calme. Elle doit durer environ unesemaine. Cette nouvelle ne m'enthousiasma gure ; je ne

    pouvais plus supporter d'tre enferm dans cette galeriesouterraine, et mme l'attrait de cette salle immense ne

    parvenait pas compenser l'angoisse qu'avaient susciteces lieux clos. J'tais comme un animal en cage. Mais,

    parmi mes tourments, la faim tait encore ce qu'il y avaitde plus insupportable ; aussi c'est avec joie que j'accueillisla proposition de mon ami.

    C'est lui qui prpara le repas. Il cuisinait merveille, mon avis du moins. Et comme il tait bon de s'asseoirdevant un bol de tsampa bien chaude ! Je lui trouvai un

    parfum extraordinaire que je humais avec dlice. Mesforces me revenaient et mon humeur morose se dissipait.Lorsque j'eus aval ma ration, le lama me demanda si j'envoulais d'autre. Tu peux en avoir autant que tu veux, medit-il, il y a ici de quoi nourrir une lamaserie ! Je te dirai

    plus tard d'o vient cette nourriture mais, pour le moment,en veux-tu d'autre ? Oh oui ! merci, rpondis-je, jecrois que j'ai encore un peu de place pour un supplmentde tsampa, et c'est tellement bon. Jamais je ne l'ai trouveaussi dlicieuse.

    Le lama eut un petit rire touff tandis qu'il allaitremplir mon bol. Puis il revint en riant gorge dploye,tenant la main une bouteille. Regarde, Lobsang, me dit-

    il, tu as ici la meilleure eau-de-vie qui soit ; elle est icidans un but thrapeutique, mais je pense que, du fait denotre captivit, nous en mritons un peu pour donnerquelque saveur notre bouillie insipide !

    Je pris le bol qu'il me tendait et reniflai la mixture, l'airmfiant, car on m'avait toujours dit que ces breuvagesalcooliss taient l'oeuvre des dmons. Et aujourd'hui, onm'encourageait en absorber ! Tant pis, me dis-je, aumoins a me remettra d'aplomb ! Et je me mis manger.

    Je tiens rappeler que pour manger nous ne disposionsque de nos doigts. Nous n'utilisions ni couteaux nifourchettes, et encore moins de baguettes, si bien qu'aprsil fallut nous laver les mains en les frottant avec du sable

    fin.J'tais donc en train de vider consciencieusement mon

    bol, utilisant non seulement mes doigts mais aussi toute lapaume de ma main droite, lorsque, d'un seul coup, jem'effondrai en arrire. Je me plais dire que j'tais bel et

    bien tomb de sommeil comme on dit, mais mon amile lama m'assura, comme il le dit plus tard au Potala, que

    j'tais, en fait, ivre-mort ! Ivre ou non, j 'ai en tout cas biendormi et dormi longtemps. Et lorsque je m'veillai, la salletait toujours merveilleusement claire. Je portai monregard vers ce qui devait tre le plafond mais il tait si loinqu'on pouvait peine le distinguer. C'tait assurment une

    pice immense qui donnait l'impression que la montagne

    tait tout fait creuse. Regarde, Lobsang, la lumire estencore l et va clairer un nouveau jour. Cette manationlumineuse ne s'accompagne d'aucun dgagement dechaleur, contrairement cette vilaine chandelle qui sent

    mauvais et qui fume ; elle est exactement la mmetemprature que l'air ambiant. Qu'en penses-tu ?

    Je regardai une fois de plus autour de moi n'arrivanttoujours pas comprendre comment une telle lumire

    pouvait pntrer dans une salle qu'entouraient des murs depierre. Devant ma perplexit le lama me dit : Tout celaparat extraordinaire en effet. Je suis incapable d'expliquerce phnomne ; c'est une invention qui remonte des

    millions d'annes. Des tres, cette poque, ont dcouvertun moyen de conserver la lumire mise par le soleil, et ilsutilisaient celle-ci pour dissiper les tnbres. Si l'onn'utilise plus cette technique dans nos cits et dans nostemples, c'est parce que nous ne savons pas comment laretrouver et l'appliquer. Nulle part ailleurs je n'ai vu pareilclairage !

    Un million d'annes, rptai-je l'air rveur, c'est plusque je n'en peux concevoir. Un million, c'est un chiffreavec toute une srie de zros derrire, six je crois ; mais jene vois pas quoi cela peut correspondre dans la ralit !Dix ans, vingt ans, je peux la rigueur en avoir une ide,mais plus, non ! Comment a-t-on pu construire cette

    salle ? demandai-je tout en passant les doigtsdistraitement sur l'une des inscriptions du mur. Soudain jereculai d'effroi, un dclic venait de se faire entendre, et un

    pan de mur commenait s'enfoncer. Lobsang ! s'cria mon ami, tu viens de mettre au jour

    une cavit secrte ! Aucun d'entre nous ne connaissaitl'existence de cette seconde salle. Prudemment, nous

    passmes la tte par l'ouverture et nous fmes surpris deconstater que le rayon lumineux nous accompagnait, etqu' mesure que nous nous loignions de la premire salle,cette dernire progressivement s'obscurcissait.

    Nous avancions avec crainte et regardionsattentivement autour de nous pour dpister un ventuel

    danger. Puis, rassemblant notre courage, nous nousdirigemes hardiment vers le centre de la pice o trnaitune masse gigantesque. Cette forme , pour laquellenous n'avions pas de nom, avait d tre brillante dj, maissa surface tait maintenant toute ternie et gristre. Ellemesurait prs de huit mtres de haut et ressemblait deux

    plats poss l'un sur l'autre.Nous en fmes le tour et dcouvrmes, l'arrire de

    l'appareil, une chelle qui, partir d'un orifice situ ausommet, descendait jusqu'au sol. Oubliant alors que monstatut de jeune ecclsiastique exigeait quelque tenue, jem'lanai vers l'chelle et y grimpai prestement sans mmem'tre assur de sa solidit. Mais elle tenait, apparemment.

    Je constatai encore une fois que le rayon lumineux taittoujours l quand je passai la tte pour regarder l'intrieurde la machine. J'y vis le lama qui, de son ct, avait

    pntr dans l'appareil l'tage infrieur. Lobsang, dit-ilsur un ton solennel, nous sommes dans ce qu'on appelle "lechar des dieux" ; ils utilisent de tels engins pour sedplacer dans l'espace. Tu en as d'ailleurs peut-tre vudans le ciel ? Oh oui ! rpondis-je, mais c'est le premierque je vois de si prs.

    Chapitre deuximeNous nous trouvions dans une sorte de couloir dont les

    parois taient constitues de placards et de casiers divers.Je tirai une poigne au hasard et un immense tiroir vint moi, coulissant aussi bien que s'il et t neuf. Ilrenfermait toutes sortes d'objets tranges. Le lama Mingyar

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    7/45

    Chapitre deuxime

    Le sage du Tibet Page 7 sur 45

    Dondup qui regardait par-dessus mon paule prit quelquechose et s'exclama : Ce sont srement des picesdtaches ! Je suis sr qu'il y a ici de quoi faire fonctionner nouveau la machine.

    Nous refermmes le tiroir et allmes plus loin. Lefaisceau de lumire nous prcdait et, dans les lieux quenous quittions, la lumire diminuait progressivement. Nousatteignmes bientt une trs grande pice qui s'illumina ds

    que nous y pntrmes. Quelle ne fut pas notre surprise dela voir remplie de monde ! C'tait, semblait-il, le poste depilotage, et les individus que nous voyions taient assischacun en un endroit bien prcis. L'un d'eux regardaitattentivement ce qui devait tre un tableau de bord, o setrouvaient une multitude de cadrans ; il semblait se

    prparer au dcollage. Comment se fait-il, m'criai-jeencore tout abasourdi, que ces tres soient encore l aprsdes millions d'annes ! Ils ont l'air tellement vivants,seulement profondment endormis.

    Un autre homme tait assis devant une table surlaquelle taient tales d'immenses cartes qu'il consultait latte dans ses mains et les coudes appuys sur la table.

    Nous parlions mi-voix. Tout cela tait presque effrayantet nos petits acquis techniques, dont nous tions si fiers,

    paraissaient plutt pitoyables dans ce milieu. Ces hommes sont en tat d'hibernation, m'expliqua le

    lama. Je suis certain qu'il existe un moyen de leur redonnervie, mais je ne le connais pas et je me demande ce qui se

    passerait si je le connaissais. Tu as vu comme moi d'autrescavernes dans cette montagne ; beaucoup contiennent deschoses assez tonnantes, des chelles mcaniques, parexemple, tu t'en souviens ? Mais cet endroit est vraimentexceptionnel, je n'en ai jamais vu de pareil. En tantqu'ans, nous avons, certains autres lamas et moi, laresponsabilit de ces lieux. Il nous revient de les garder

    intacts, et je peux te dire que c'est ici l'endroit le plusmerveilleux. Je me demande s'il y a encore d'autres salles dcouvrir. Mais examinons celle-ci d'abord. Nous avonsune semaine devant nous, car il me faudra bien tout cetemps avant que je sois capable de redescendre dans lavalle.

    Nous nous approchmes des autres hommes ; il y enavait sept en tout. On avait l'impression que chacun tait son poste et qu'ils s'apprtaient dcoller. Mais ledcollage avait d tre interrompu par une catastrophesubite ; peut-tre un tremblement de terre qui aurait faits'effondrer des rochers sur ce qui devait tre un toit glissire.

    Le lama s'arrta la hauteur d'un homme qui tenait unlivre, une sorte de journal de bord, et il semblait qu'ilvenait d'y inscrire quelque chose peut-tre les derniersincidents. Mais nous ne pouvions comprendre son criture.taient-ce des lettres, des idogrammes ou bien seulementdes symboles techniques ? Nous n'en savions rien. Nousn'avons jamais russi traduire ces signes, dit le lama,mais, attends un instant... N'est-ce pas un appareil enregistrer, l-bas ? (Il montrait du doigt l'appareil, en

    proie une vive excitation). De toute faon, am'tonnerait qu'il soit en tat de fonctionner , reprit-ilcomme nous nous dirigions vers l'appareil en question.

    Il avait la forme d'une bote et, mi-hauteur, une ligne

    en faisait le tour. Nous essaymes de pousser vers le haut,juste au-dessus de la ligne de dmarcation, et bientt, notre grande joie, la bote s'ouvrit, rvlant des rouages

    l'intrieur, et quelque chose qui semblait servir auxdplacements d'une bande mtallique entre deux bobines.

    Le lama se pencha vers les diffrents boutons fixs surle devant de la bote, les touchant tour tour. Tout coup,nous sursautmes : une voix se fit entendre qui venait de la

    partie suprieure de l'appareil. C'tait une voix commenous n'en avions jamais entendu et le discours tait tout fait inintelligible. Pour ajouter notre tonnement, les

    paroles furent suivies de sons qui se voulaient peut-tre musicaux mais qui, pour nos oreilles, n'taient quecacophonie. Ne pouvant en supporter davantage, monguide pressa un bouton et le bruit s'arrta. Assez prouvs

    par nos dcouvertes, toutes plus excitantes les unes que lesautres, nous aspirions tous deux au repos ; aussi, desfauteuils qui se trouvaient l furent-ils les bienvenus. Maisen m'asseyant sur l'un d'eux, je fus saisi de frayeur en lesentant se drober sous moi. J'tais comme assis sur uncoussin d'air. Cet instant de surprise pass, le lama me dit : Peut-tre qu'un peu de tsampa nous ferait du bien ; noussommes tous deux puiss.

    L-dessus il chercha des yeux l'endroit le plus propice

    pour y faire du feu. C'est alors qu'il remarqua une alcve, l'extrieur de la "cabine de pilotage". C'est sans doute iciqu'ils prparaient leurs repas, dit-il en y pntrant, toujours

    prcd du rayon lumineux. Tous ces boutons doivent bienservir quelque chose, ils ne sont pas ici pour le dcor ! Il me montra un bouton sur lequel tait reprsente unemain semblant indiquer la position "arrt". Sur un autretait dessine une flamme ; c'est sur ce dernier qu'ilappuya. Au-dessus se trouvaient des rcipientsmtalliques. Il en prit un.

    Trs vite nous ressentmes une sensation de chaleur. Tiens, Lobsang, me dit mon Matre, mets ta main ici.Est-ce que tu sens comme c'est chaud ? Nous allons

    pouvoir faire chauffer la tsampa. Je mis la main l o ilm'indiquait et la retirai aussitt ; sans doute l'avais-je poseun peu trop prs car la sensation ressentie fut trs forte !Mon guide sourit et mit la tsampa froide dans le rcipientmtallique, puis posa le tout sur une grille au-dessus de lasource de chaleur. Il y ajouta de l'eau, et le mlange netarda pas bouillonner. Il appuya alors sur le bouton"arrt" et le rouge incandescent disparut. Ayant retir lercipient, l'aide d'un objet mtallique dont l'extrmitavait la forme d'une petite cuelle, il distribua la tsampadans les bols. Nous n'avions plus qu' la manger, et,

    pendant quelque temps, nous n'entendmes plus que lebruit que nous faisions en mangeant.

    J'ai une de ces soifs ! m'criai-je ds que j'eus aval ladernire bouche. Je boirais volontiers quelque chose... ct de l'endroit o nous avions fait chauffer la tsampa

    je vis une sorte de grande cuvette et, au-dessus, deuxmanettes mtalliques. Je tournai l'une d'elles et de l'eaufroide se rpandit dans la cuve. Je la tournai rapidementdans l'autre sens, et l'eau s'arrta de couler. J'essayai l'autremanette elle tait rouge celle-l et il sortit alors de l'eau sichaude que je faillis m'bouillanter. Je refermai le robinetet me tournai vers le lama : Matre, dis-je, si cette eau estl depuis des millions d'annes, comme toute chose ici,

    pourquoi ne s'est-elle pas vapore depuis longtemps ?Comment expliquer qu'elle devrait normalement tre

    mauvaise, alors qu'elle est potable ? L'eau peut se conserver indfiniment, dclara mon

    guide. Regarde les lacs et les fleuves, l'eau ne s'est pasvapore ! L'eau a toujours exist, bien avant qu'il y ait des

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    8/45

    Chapitre deuxime

    Le sage du Tibet Page 8 sur 45

    hommes sur terre. Et si cette eau est toujours potable c'estparce qu'elle provient sans doute d'un rservoir asseztanche pour la prserver de toute pollution. Selon moi, cevaisseau qui est dans l'autre salle, est venu atterrir ici pourse rapprovisionner et peut-tre pour rparer une avarie. Aen juger par la pression de l'eau au robinet, la rserve d'eauest immense, en tout cas suffisante pour que nous

    puissions passer un mois ici !

    Mais s'il y a de l'eau, m'criai-je, peut-tre y a-t-ilaussi de la nourriture bonne manger ! Et l-dessus,j'essayai de m'extirper de mon sige qui semblait vouloirme retenir. J'appuyais par hasard sur le ct du fauteuilquand je me vis tout coup propuls dans les airs et meretrouvai en position debout sur le sol. L'effet de surprise

    pass, je me dirigeai vers la petite cuisine et ttai la paroiqui laissait voir quelques trous dont je ne comprenais pasl'utilit. En enfonant le doigt au centre de l'un d'eux, tout fait par hasard, je vis bientt coulisser un panneau etaperus toutes sortes de pots, de bocaux et de botes dont

    je cherchai l'ouverture. Les bocaux taient transparents, etce que je voyais l'intrieur me paraissait bon manger.

    Mais quel got cela aurait-il, pensai-je, aprs tantd'annes !

    Cette question du vieillissement ou du non-vieillissement des choses m'intriguait. Je passai ensuite l'inspection des autres rcipients, et les images que jevoyais notamment sur certaines botes me laissaient

    perplexe ; elles ne ressemblaient rien de ce que jeconnaissais. Et il n'y avait apparemment aucun moyend'ouvrir ces rcipients. J'inspectai niche aprs niche,

    placard aprs placard, et allais de surprise en surprise.Dans l'un des bocaux transparents je crus reconnatre desfeuilles de th, mais ce qui retint le plus mon attention futce qui me sembla tre des morceaux de viande. Je n'avais

    jamais mang de viande de ma vie, et avais grande envied'y goter un jour. Ma curiosit satisfaite par la visite de lacuisine, je rejoignis mon ami le lama. Je le trouvai trsabsorb par la lecture d'un livre.

    Matre, lanai-je tout excit, j'ai dcouvert l'endroito ils stockaient leur nourriture. Mais elle se trouve dansdes botes que l'on ne peut pas ouvrir ! Mon guide tournaun regard vide vers moi mais, se ressaisissant, il clata

    bientt de rire et dit : Mais si, Lobsang, il y a un moyende les ouvrir ; il y a des millions d'annes on connaissait un

    procd de conditionnement diffrent du ntre quipermettait de conserver des aliments trs frais. J'ai djmang de la viande de dinosaure aussi frache que si

    l'animal avait t abattu la veille. Je vais te rejoindre l-baset nous allons examiner tes dcouvertes.

    En l'attendant, je me dirigeai du ct de la cabine depilotage, et m'assis pour mditer un peu sur la question quim'embarrassait le plus : Si ces hommes taient vraimentaussi gs qu'on me le disait, pourquoi n'taient-ils pastombs en poussire ? Je n'arrivais pas croire qu'ilstaient l depuis des millions d'annes tant ils paraissaientintacts et vivants. On aurait dit qu'ils attendaient d'trerveills. Je remarquai alors sur le dos de l'un d'entre euxune petite sacoche que j'ouvris. Elle contenait des bobinessur lesquelles taient enrouls des fils lectriques et deschoses en verre dont je ne comprenais pas l'usage. Il y

    avait aussi une plaque avec diffrentes touches. J'appuyaisur l'une d'entre elles et fus glac d'effroi : l'homme qui

    j'avais pris la sacoche avait eu un sursaut et, sur-le-champ,tait tomb en poussire une poussire vieille de

    plusieurs millions d'annes... Le lama Mingyar Dondup merejoignit. Je n'avais pas boug, j'tais comme ptrifi. Il meregarda, puis fixant le tas de poussire il dit : Ce n'estqu'en essayant les divers appareils, en appuyant sur lesdiffrents boutons, en jouant avec les diffrentes manettesque nous trouvons dans ces cavernes que nous pourrons

    peu peu dcouvrir leur fonction. Quant ces hommes, jecrois comprendre qu'ils savaient qu'ils allaient mourir ici,

    enterrs vivants ; alors le mdecin du bord a d leurdonner chacun cet quipement de survie qu'ils ont sur ledos et qui les a mis en tat d'hibernation. Ils ne sont pasrellement morts ; ce dispositif leur dispense la quantitminimum d'nergie ncessaire au fonctionnement de leurorganisme ; mais ce fonctionnement est, bien entendu, trsrduit. En appuyant sur cette touche, la rouge, tu as rompule fil tnu qui reliait cet homme la vie et, d'un seul coup,son ge vritable s'est effondr sur lui le rduisant en

    poussire. Nous regardmes ses compagnons encore"vivants" et dcidmes que nous ne pouvions pratiquementrien pour eux. Nous tions nous-mmes prisonniers de lamontagne, comme l'tait le vaisseau ; et qui pouvait dire,

    par ailleurs, que si nous rveillions ces hommes ils nemettraient pas en danger le monde des lamaseries ? Il taitcertain qu'ils dtenaient un savoir suprieur au ntre quiles ferait passer pour des dieux par rapport nous, et notre

    peuple ne pouvait se permettre d'tre nouveau rduit enesclavage comme il l'avait t jadis.

    Mon guide et moi gardmes le silence un moment,chacun absorb dans ses penses. Qu'arriverait-il si nous

    pressions tel ou tel bouton ? Quelle sorte d'nergie pouvaittre assez puissante pour maintenir ces hommes en vie ?Au mme moment, nous fmes pris d'une frisson et lelama rompit le silence. Tu es jeune, Lobsang,commena-t-il, et moi je suis un vieil homme, j'ai

    expriment quantit de situations ; j'aimerais savoir ceque toi tu penses de celle-ci. Que ferais-tu ? Ces hommessont en vie, cela est certain ; mais qui peut nous dire que sinous leur redonnons vie ils ne se comporteront pas en

    barbares ? Peut-tre mme nous tueraient-ils pour vengerleur compagnon que nous avons laiss mourir ? Il faut

    penser tout cela. Et aucune des inscriptions qui sont icine peut nous aider puisque nous ne les comprenons pas.

    Il s'interrompit car je venais de me lever en proie laplus grande des excitations. Matre, m'criai-je, j'ai vutout l'heure un livre qui peut peut-tre nous aider ; ondirait un dictionnaire multilingue. Sans attendre sarponse, je me prcipitai dans une pice contigu la

    cuisine et retrouvai le fameux livre qui paraissait tout neuf.Je le pris deux mains, car il tait lourd, et l'apportai mon guide.

    Cachant mal son excitation, il le prit et se mit leconsulter. Il resta lire un certain temps, puis se rendantcompte de mon impatience il me dit : Dans ce livre nousavons la cl de tout. Il raconte par ailleurs une histoirefascinante. Je peux le lire parce qu'il est crit en une languesacre l'usage des seuls lettrs. Le Tibtain moyen ne

    peut pas la comprendre, moi je peux ; et dire que ce livre adeux millions d'annes ! C'est l'ge du vaisseau galement.Ce livre dit qu'il tire son nergie de la lumire, c'est--direde n'importe laquelle des sources lumineuses : soleil,

    toiles, etc., ou bien de toute substance ayant dj utilisce type d'nergie nergie qu' son tour il transmet unautre corps.

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    9/45

    Chapitre deuxime

    Le sage du Tibet Page 9 sur 45

    Les hommes qui sont ici sont nuisibles, poursuivit lelama qui se rfrait toujours au livre. C'taient lesdomestiques des "Jardiniers de la Terre". Ils avaient quittle "vaisseau mre", comme l'appelle le livre, et setrouvaient dans ce qu'il nomme un "canot de sauvetage"(c'est le vaisseau qui est l). Le livre dit aussi que lanourriture conserve ici est bonne et que les hommes del'autre pice peuvent tre ranims ; mais quand bien

    mme ils le seraient, ils resteraient ces tres pervers quirecherchaient des femmes plus petites qu'eux pour,disaient-ils, faire des expriences ; cette union rsultant,

    bien entendu, en de violentes souffrances pour leurscompagnes. Dans ce livre, les auteurs se demandent sil'quipement de survie va fonctionner ou bien s'il va tredsamorc aprs avoir quitt le vaisseau mre. Je pensequ'il faudrait en lire plus encore, mais la conclusionimmdiate est que si nous redonnons vie ces individus,ils risquent de se montrer trs cruels notre gard, et nousne pourrions pas lutter contre eux. Ils sont habitus traiter autrui comme du vulgaire btail servant desexpriences gntiques ; et, toujours selon ce livre, ils

    auraient commis beaucoup d'atrocits en effectuant desexpriences sexuelles avec les femmes de notre peuple.Mais tu es trop jeune encore pour savoir tout cela.

    Je me promenai un peu dans les parages, laissant monami allong sur le sol o il soulageait ses jambes trsdouloureuses. J'arrivai dans une pice de couleur verte ; aucentre trnait une table, assez insolite, qu'clairait du

    plafond une lumire trs intense. Partout ce n'tait quebotes et rcipients en verre.

    Je pensai qu'ils devaient soigner les malades dans cettepice, et j'allai avertir le lama de ma dcouverte. Il se mitdebout pniblement, et me suivis en clopinant jusqu' lasalle que je venais de lui dcrire.

    Ds que j'y pntrai, il y fit clair comme en plein jour,et je notai sur le visage du lama une expression de grandesatisfaction. Bravo, Lobsang, s'exclama-t-il, Sa Saintetle dala-lama sera fier de toi ; tu as fait aujourd'hui deuxdcouvertes importantes. Il fit quelques pas dans la

    pice, examinant tour tour les objets. Puis il jeta un coupd'oeil des bocaux qui m'avaient intrigu car ilsrenfermaient quelque chose que je ne connaissais pas.S'asseyant sur une chaise il se plongea bientt dans lalecture d'un livre qu'il avait pris sur une tagre.

    Comment se fait-il, Matre, que vous compreniezcette langue ? demandai-je tonn.

    Il repoussa le livre et sembla un instant mditer sur ma

    question. Tu sais, Lobsang, dit-il enfin, c'est une longuehistoire qui remonte au dbut des temps, et nous-mmes,lamas, nous nous perdons dans ses mandres. Mais je vaiste la rsumer brivement.

    Le monde o nous vivons tait prs d'tre colonis etnos Matres je les appelle "Matres" car dans lahirarchie ils sont encore au-dessus des Jardiniers donnrent l'ordre de planter sur Terre une nouvelle espce.C'est de cette premire souche que notre peuple est issu.

    Sur une plante fort loigne de la ntre, l'autre boutde l'univers, on se mit prparer l'vnement et l'onconstruisit un vaisseau spatial spcial capable de sedplacer trs grande vitesse et qui devait emporter dans

    ses cales les embryons humains. Les Jardiniers, comme onappela ceux qui devaient accomplir cette mission,emmenrent donc sur terre les embryons, mais on ne saitrien de la priode qui suivit leur arrive sur notre plante et

    qui va jusqu' l'mergence des premires cratureshumaines.

    Pendant ce temps, sur leur plante d'origine, deschangements importants avaient lieu. Le "dieu" qui rgnaitalors tait trs vieux et son pouvoir tait convoit par une

    bande de sinistres individus qui russirent le dtrnerpour mettre sa place un fantoche leur solde.

    Quand les Jardiniers revinrent de la plante Terre, ils

    furent trs mal accueillis par les tratres au pouvoir : onvoulait les exterminer car ils risquaient d'tre gnants.Aussi remontrent-ils bien vite dans leur vaisseau, aprss'tre empars de quelques femmes de leur taille, et ilsmirent le cap nouveau sur la Terre (mais tu sais,Lobsang, la Terre ne reprsente qu'une infime partie del'univers, et il y a d'autres univers encore).

    De retour sur Terre, ceux qui avaient cr l'espcehumaine y tablirent leur propre empire. Ils construisirentnombre de superstructures, de hautes pyramidesnotamment qui leur permettaient de capter par radio lemoindre message et aussi de se prserver contred'ventuelles attaques. Les humains leur servaient

    d'esclaves et les Jardiniers n'avaient qu' savourer leurconfort et mettre des ordres.

    Bientt les hommes et les femmes gigantesques decette race se lassrent de leurs partenaires respectifs etcherchrent des aventures ailleurs. Ce qui entrana desquerelles et des troubles divers. C'est alors que, venu dequelque galaxie lointaine, un vaisseau spatial surgit, que nedtectrent pas les radars. Il tait immense, et de son borddescendirent des tres qui leur tour s'installrent et

    btirent des habitations. Les premiers occupants de laplante prirent trs mal cette invasion et il y eut unebataille de mots, que suivit bientt un vritable combatentre les deux factions. La guerre dura trs longtemps, et

    chacun se surpassa dans l'invention d'engins diaboliques.Finalement, comme les nouveaux arrivs ne parvenaient

    pas se rendre matres de la situation, ils lancrent desengins, partir du grand vaisseau, porteurs de bombesqu'ils lchrent sur le territoire ennemi.

    Ces bombes taient des modles dj trsperfectionns de bombes atomiques, et lorsqu'ellestombaient, tout tait dcim des kilomtres la ronde.Aprs le passage de ces engins il n'y eut plus sur terrequ'une aveuglante lumire pourpre que contemplaient lesoccupants du grand vaisseau en s'loignant dans l'espace.

    Pendant une centaine d'annes, peut-tre plus, il n'y eutpratiquement plus de vie sur terre dans les rgions

    bombardes. Mais lorsque les effets des radiationscommencrent se dissiper, des tres se mirent sortir,craintivement, se demandant ce qu'ils allaient dcouvrir.Ils mirent bientt sur pied une sorte d'agriculture, utilisantdes charrues en bois et autres instruments.

    Matre, interrompis-je, vous dites que notre monde estvieux de plusieurs millions d'annes, peut-tre cinquantemillions, mais il y a tant de choses que je ne comprends

    pas. Ces hommes, par exemple, dans cette pice, nous nesavons pas depuis combien de temps ils existent. Et cettenourriture, pourquoi est-elle encore frache et comestible ?Pourquoi ces hommes ne sont-ils pas tombs en

    poussire ?

    Le lama sourit et me dit : Nous sommes un peupled'ignorants, mais il y a eu sur Terre des hommes beaucoup

    plus savants que nous. Si tu prends ce livre, par exemple(il me montrait un livre qui se trouvait sur une tagre), tu

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    10/45

    Chapitre deuxime

    Le sage du Tibet Page 10 sur 45

    y trouveras toutes sortes d'explications sur des pratiquesmdicales et techniques chirurgicales totalement inconnuesau Tibet. Et pourtant, nous sommes parmi les premiershabitants de la Terre...

    Et pourquoi notre pays se trouve-t-il si hautealtitude ? repris-je. Pourquoi notre existence ici est-elle si

    pnible ? Les ouvrages que vous avez rapports deKatmandu parlent d'un tas de choses, mais ils ne disent

    rien de ce que nous voyons ici. Et pourquoi rien au Tibetne marche sur des roues ? Il y a un vieux, trs vieux dicton, rpondit le lama,

    qui dit que lorsque les engins roues pntreront au Tibetce sera l'annonce d'une invasion par des peuplades hostiles.Cela s'est vrifi, et je vais te prouver que les anciens

    pouvaient rellement prvoir l'avenir car il y a ici desinstruments permettant de voir non seulement dans le

    pass, mais aussi dans le prsent et le futur. Mais comment ces objets peuvent-ils durer aussi

    longtemps ? continuais-je obstinment. Une chose, avec letemps et lorsqu'on ne s'en sert plus, ne doit-elle pasncessairement se dtriorer, tomber en dcrpitude

    comme cette vieille roue prires que vous me montriezl'autre jour dans l'ancienne lamaserie ? Elle tait si rouillequ'elle ne pouvait plus tourner. Comment les gensfaisaient-ils jadis pour arrter ce processus dedsintgration ? Quel est le pouvoir occulte qui permet ces objets de se conserver ? Et cette lumire qui nous

    prcde chaque fois que nous pntrons dans une pice,quelle est-elle ? Nous n'avons au Tibet que des lampes

    beurre nausabondes ou des torches pour nous clairer, etici il fait clair comme en plein jour ! Pourtant je ne vois

    pas ces gnrateurs dont vous m'expliquiez l'emploi l'autrejour et qui produisent ce que vous appelez l' "lectricit".Pourquoi sommes-nous si arrirs ?

    J'tais profondment embarrass par toutes cesquestions que je venais de formuler.

    Le lama garda le silence un certain temps puis me dit : Tu as raison, mon ami, il y a des choses que tu doissavoir. Ne dois-tu pas devenir le lama le plus savant et le

    plus clairvoyant du Tibet ? Tu seras capable de voir dansl'avenir aussi bien que dans le pass et le prsent. Bon, jevais te dire... Il y avait jadis dans cette chane demontagnes un grand nombre de cavernes relies entre elles

    par des tunnels, mais dans chacune d'elles, o que l'on soit,on avait de la lumire et de l'air frais. Notre pays, le Tibet,se trouvait alors ct de la mer, et les gens vivaient dansles plaines ; celles-ci n'taient que lgrement vallonnes.

    cette poque, les gens aussi disposaient de pouvoirsqu'ils n'ont plus aujourd'hui. Puis, il se produisit unegrande catastrophe dont furent responsables les savants deces rgions que l'on appelle l'Atlantide. Avec un explosiftrs puissant, ils dtruisirent le monde...

    Dtruisirent le monde ? interrogeai-je, incrdule.Mais notre pays existe toujours, et le monde aussi !

    Le lama se leva alors et alla chercher un livre. Il y enavait des quantits ici. Ouvrant le livre qu'il avait pris, ilme montra des images. Regarde, dit-il, le monde jadistait protg par une couche de nuages. On ne pouvait voirdu sol le soleil, et l'on ne souponnait pas l'existence destoiles. cette poque, les gens vivaient des centaines

    d'annes ; ils ne mouraient pas comme aujourd'hui meurentles gens ds qu'ils ont acquis quelques connaissances. Sil'on meurt aujourd'hui, c'est cause des rayons toxiques dusoleil, qui ne sont plus arrts par ces nuages protecteurs.

    Ces rayons nocifs sont responsables de bon nombre demaladies sur terre, troubles aussi bien physiques quementaux. Cette explosion eut donc de violentesrpercussions sur le monde. Ce fut un grand

    bouleversement : les les de l'Atlantide qui se trouvaienttrs loin du Tibet sombrrent dans la mer, tandis que notre

    pays fut projet prs de dix mille mtres au-dessus duniveau de la mer. Les gens perdirent de leur robustesse et

    moururent en grand nombre du fait de la rarfaction del'oxygne et de la plus grande nocivit des rayons solaires cette altitude.

    Le lama fit alors une pause et se frotta les jambes ; ilsemblait beaucoup souffrir. Une partie de notre pays estcependant reste prs de la mer, reprit-il, mais seshabitants se sont progressivement diffrencis de nous. Surle plan de l'esprit, ils sont trs limits ; ils n'ont pas detemples, ils ne vnrent aucun dieu, et, encore de nos

    jours, ils se servent d'embarcations en peaux de btes pouraller chasser le phoque et pcher toutes sortes de poissons.Ils tuent aussi beaucoup de ces cratures majestueuses dontle chef s'orne de cornes immenses, et ils en mangent la

    chair. Plus tard, les autres peuples de la terre ont donn ces gens du Nord le nom d'Esquimaux. La partie du Tibetdans laquelle nous sommes renfermait l'lite de la

    population : les prtres, les sages, les mdecins les plusrenomms, etc., tandis que celle qui s'est spare poursombrer dans l'ocan, ou du moins rester son niveau, nerenfermait que des individus trs moyens, des ouvriers nonspcialiss et sans grande intelligence comme les

    bcherons ou les porteurs d'eau. Ces individus n'ont pasvolu et sont rests pratiquement au mme stade durantun million d'annes. Ils se sont nanmoins maintenus surterre en pratiquant une petite agriculture.

    Mais avant de t'en dire davantage, coupa le lama, je

    voudrais que tu regardes mes jambes ; elles me font trsmal et j'ai trouv un ouvrage mdical ici qui parle de

    blessures qui ressemblent la mienne. Je n'ai pas besoind'en lire davantage pour savoir que je souffre d'uneinfection. Je le regardai, l'air tonn, me demandant ceque je pouvais faire pour le soigner, moi pauvre novice !Mais je retirai nanmoins ses pansements et j'eus un chocen voyant ses jambes. Les plaies taient trs enflammes etcouvertes de pus, et toute la rgion sous le genou taitenfle.

    Tu vas faire trs exactement ce que je te demande defaire, me dit mon guide. Tout d'abord, il faut dsinfecterles plaies. Heureusement, il y a ici tout ce qu'il faut et en

    trs bon tat. Sur cette tagre, en m'indiquant l'endroit dudoigt, tu vas trouver un flacon de verre portant unetiquette. C'est le troisime de la gauche sur la deuximetagre en partant du bas. Apporte-le et je te dirai si c'est le

    bon. Obissant, je me dirigeai vers les tagres et je fis

    coulisser ce qui me sembla tre une porte en verre. Mais jene savais pas encore bien reconnatre le verre car il n'y enavait pratiquement pas au Tibet. Les fentres taienttendues de papier huil pour permettre la lumire de

    passer, ou bien elles ne comportaient aucun "vitrage".Mettre des vitres en verre et cot trop cher car le verredevait tre import de l'Inde et le transport par les sentiers

    de montagne n'tait pas facile.Je fis donc coulisser la vitrine et examinai les

    bouteilles. J'en trouvai une qui me sembla tre celle quevoulait le lama et la lui apportai. Il la regarda et lut le

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    11/45

    Chapitre troisime

    Le sage du Tibet Page 11 sur 45

    mode d'emploi. Aprs quoi il me demanda de lui passer ungrand rcipient. Celui qui est retourn, prcisa-t-il ; lave-le bien et rappelle-toi que nous avons toute une rserved'eau. Ensuite, tu y verseras environ trois bols d'eau. Jelavai donc minutieusement le rcipient qui tait dj trs

    propre, puis y versai la quantit d'eau requise et apportai letout au lama. Ce qu'il fit alors m'tonna beaucoup : aprsqu'il eut manipul quelque peu le flacon, l'extrmit s'en

    dtacha brusquement. Oh ! vous l'avez cass, m'criai-je.Est-ce que je vais en chercher un autre ? Lobsang, mon ami, je ne l'ai pas cass, dit gentiment

    le lama. Sache que si l'on a pu introduire quelque chosedans cette bouteille, on peut aussi l'en retirer. Ceci est toutsimplement un bouchon, et en le retournant on peut mmes'en servir comme doseur. Regarde...

    Je regardai le bouchon qu'il tenait renvers et vis qu'il yavait, en effet, de haut en bas une graduation. Il va nousfalloir maintenant du linge, reprit mon guide ; ouvre ce

    placard, je vais te dire quel paquet prendre. La porte n'tait pas en verre ni en bois, mais en une

    matire que je ne connaissais pas. Je l'ouvris et vis une

    srie de baluchons. Prends le bleu, me dit mon ami, etaussi le blanc droite. Et puis va te laver les mains !ajouta-t-il aprs m'avoir examin. Prs du robinet tu verrasun cube blanc, frotte tes mains avec et insiste sur lesongles.

    Je fis tout cela et trouvai amusant de voir ma peaus'claircir mesure que je frottais. Mes mains taient

    presque roses et j'allais les essuyer sur ma robe lorsque lelama arrta mon geste : Non, Lobsang ! Essuie-toi aveca (il me tendait un morceau d'toffe qu'il avait sorti d'undes baluchons) et ne touche surtout pas ta robe ; elle estdgotante ! Il faut que tes mains soient impeccables pourfaire ce travail.

    J'tais fort intress par tous les prparatifs. Mon amiavait tendu par terre une sorte de drap et avait pos dessusdivers objets : une cuvette, quelque chose qui ressemblait un godet et un autre objet que je ne connaissais pas ; c'taitun tube de verre, semblait-il, gradu, l'extrmit duquelse trouvait une aiguille en acier ; l'autre extrmitconsistant en une tirette. Il tait rempli d'un liquide decouleur qui faisait des bulles. Maintenant, coute-moiattentivement, dit le lama. Il nous faut dsinfecter la chair

    jusqu' l 'os. Profitons de ce qui est offert ici ; ce sont destechniques mdicales trs avances. Prends cette seringue,sors-en l'extrmit... attends je vais le faire... maintenant tuenfonces l'aiguille dans ma jambe, l o je mets mon doigt.

    Cela va insensibiliser cette rgion et tu pourras nettoyer laplaie sans que je souffre. Allez, vas-y !

    Je pris l'objet qu'il avait appel "seringue" et levai unregard apeur vers lui. Non, je vous assure, je ne peux

    pas ! Lobsang, dit doucement mon ami, tu vas bientt tre

    un lama-mdecin, et bien souvent tu seras oblig de fairemal tes patients. Allez, fais ce que je te dis et enfoncel'aiguille compltement. Je te dirai si a fait mal.

    Je repris donc l'instrument et crus que j'allais dfaillir.Mais un ordre est un ordre ! Je tenais la seringue le plus

    bas possible en l'approchant de la peau et je fermai lesyeux tandis que je plantais l'aiguille d'un coup sec. Il n'y

    eut aucune raction de la part du lama. J'ouvris les yeux etle trouvai en train de me sourire. Bravo, Lobsang ! medit-il enfin, tu as fait du beau travail, je n'ai rien ressenti.Tu seras un mdecin patant ! Je croyais qu'il se moquait

    de moi, mais son expression je vis qu'il tait sincre. Maintenant que cette jambe est insensibilise, tu vas

    pouvoir prendre cet instrument qui est l ; ce sont despinces... Ah ! j'oubliais, verse un peu de ce liquide dans unbol et frotte ma jambe avec, de haut en bas. Si tu appuiesbien, tu vas pouvoir enlever de gros blocs de pus. Lorsqu'ily en aura trop par terre il faudra que tu m'aides medplacer vers un endroit plus propre.

    Je pris les pinces et m'en servis pour prlever de grosmorceaux de coton que j'imbibais de liquide, puis jefrottais vigoureusement la surface blesse. Je dtachaiainsi beaucoup de pus et des caillots de sang sch ; c'taitimpressionnant.

    La jambe fut bientt parfaitement propre. Voil unepoudre dont tu vas recouvrir toute la plaie, me dit encoremon ami. Elle va dsinfecter et empcher que ne sereforme du pus. Tu prendras ensuite du linge dans ce

    baluchon bleu et tu me feras un pansement. Je continuai donc le nettoyage, saupoudrant partout,

    puis j'enveloppai la jambe dans une espce de gaine enplastique aprs l'avoir bande en prenant garde de ne pas

    trop serrer. Quand j'eus termin, j'tais en sueur mais monami semblait aller beaucoup mieux.

    Il me fallait encore faire l'autre jambe. Tu ferais biende me donner un stimulant, dit le lama. Sur cette tagre tuvas voir une bote d'ampoules. Donne-m'en une. Tu vois ce

    bout pointu ? Casse-le d'un mouvement brusque contre mapeau, n'importe o.

    Aprs avoir fait tout cela, je nettoyai le pus de l'autrejambe et la bandai ; puis, puis, je sombrai dans lesommeil...

    Chapitre troisime Ma parole, quel soleil ! Il faut que je me mette l'ombre ! pensai-je, encore couch. Mais quand je meredressai et que j'ouvris les yeux je compris que ce n'tait

    pas le soleil et que je n'tais pas dehors. O tais-je ? Enapercevant mon ami, le lama Mingyar Dondup, tout merevint de ce qui aurait pu tre un rve. Ce que j'avais pris

    pour le soleil tait cette lumire mystrieuse quiressemblait la lumire du jour, mais dont nous neconnaissions pas l'origine.

    Tu as l'air compltement abasourdi, Lobsang, me ditmon guide. J'espre que tu as bien dormi. Oui,rpondis-je, mais je trouve toujours tout cela extrmementcompliqu ! Et plus je tente d'expliquer ces choses, plusmes explications s'embrouillent. Cette lumire, parexemple, d'o vient-elle ? Pourquoi peut-elle se conserver,durant des millions d'annes, aussi brillante que lesoleil ?

    Tu as beaucoup apprendre, Lobsang, me ditgentiment mon guide. Tu es un peu jeune encore, mais

    puisque nous sommes dans ces lieux, je vais t'en dire unpeu. Les Jardiniers de la Terre, commena-t-il, lorsqu'ilsvenaient incognito sur la plante avaient besoin de retraitescomme celle-ci, et ds qu'ils rencontraient sur leur cheminun promontoire rocheux, ils y faisaient une ouverture l'aide d'un chalumeau (comme on appellera cet appareil

    plus tard). Sous l'effet de la chaleur, une partie de la pierrefondait et le revtement gristre que l'on peut voir l'extrieur provient de la vapeur que dgageait la roche enfusion. Lorsque la caverne tait perce aux dimensions

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    12/45

    Chapitre troisime

    Le sage du Tibet Page 12 sur 45

    voulues on la laissait refroidir et sa paroi intrieuredevenait lisse comme du verre. Aprs avoir fait cetteimmense caverne dans laquelle pourrait tenir le Potala toutentier, ils creusrent un tunnel le long de la chanemontagneuse qui, cette poque, n'tait pas encore sortiede terre. Ce tunnel, long de cinq cents kilomtres environ,reliait entre elles toutes les cavernes. Puis il y eut cetteeffroyable explosion qui fit basculer la Terre, faisant

    disparatre des continents sous l'ocan, et en projetantd'autres bien au-dessus du niveau de la mer. Nous avons eude la chance d'tre parmi ceux-l, et de la chance aussi quenos collines deviennent des montagnes. J'ai desreproductions de cela que je te montrerai. Mais, dans cegrand bouleversement, l'alignement des tunnels se trouvagrandement perturb, et il fut impossible de le parcourird'un bout l'autre. Deux ou trois cavernes restaientaccessibles et l'on se trouvait aussitt dans la montagne.Quant au tunnel, on y pouvait faire seulement quelques pasl o l'on se rappelait l'ancien trac. Tu sais que le tempsne m'importe pas, aussi ai-je pu jadis moi-mme visiter

    beaucoup de ces lieux, et dcouvrir des choses absolument

    extraordinaires. Oui mais, interrompis-je, tout cela ne me dit pas

    pourquoi ces lieux sont encore intacts aprs tant d'annes !Mme une roue prires, avec le temps, se dtriore, etainsi en va-t-il de toutes nos possessions terrestres.Comment expliquez-vous qu'il fasse ici plus clair qu'en

    plein jour ? Le lama eut un geste d'impuissance. Lobsang, dit-il,

    nous allons tout d'abord nous restaurer car nous devonstenir plusieurs jours ici. Puis me montrant du doigtl'alcve, il ajouta : Va l-bas et rapporte quelques-unesde ces botes sur lesquelles il y a des images. Il faut que tuaies une ide de la faon dont les gens vivaient autrefois, il

    y a trs longtemps. Je me levai, et sus ce qui m'importait avant tout de

    faire. Honorable lama, dis-je en me retournant vers lui,puis-je vous aider satisfaire vos besoins naturels ? Merci, Lobsang, rpondit-il dans un sourire, c'est djfait ! Il y a un endroit l-bas trs commode. Tu y verras untrou creus dans le sol.

    J'allai dans la direction qu'il m'indiquait et trouvai eneffet un trou. Les murs de la pice taient lisses, mais lesol ne l'tait pas, si bien que l'on ne pouvait craindre deglisser. Une fois ces besoins satisfaits, je m'occupai denotre repas. J'allai dans l'alcve et m'y lavai soigneusementles mains. C'tait si commode de n'avoir qu'un robinet

    tourner ! En le fermant je sentis de l'air chaud qui venait dumur. Je plaai mes mains devant la bouche d'air qui taitune ouverture rectangulaire, et pus loisir me scher lesmains. Mais le courant s'arrta bientt et je pensai queceux qui avaient conu ce systme avaient d calculer letemps moyen qu'il fallait pour se scher les mains !J'ouvris ensuite le placard aux provisions et restai unmoment contempler les botes multicolores. Elles taientcouvertes d'images qui n'avaient aucun sens pour moi.L'une d'elles reprsentait une chose rouge avec de grosses

    pinces, l'air trs froce ; une autre me faisait penser unmille-pattes. Sur une autre encore on avait l'impression devoir des araignes cuirasses de rouge. Je passai outre

    ces horribles choses, et donnai la prfrence ce qui meparut tre des fruits. Il y en avait des rouges, des jaunes etdes verts ; l'effet tait des plus jolis ! J'en pris autant que je

    pus en porter et, avisant un chariot dans un coin, j 'y plaai

    mes trsors et rejoignis ensuite le lama. Quand il me vitarriver dans cet quipage il ne put s'empcher de rire.

    Est-ce que tu as trouv agrable de te laver lesmains ? me demanda-t-il ensuite. Et que penses-tu duschage ? N'est-il pas fascinant de voir que tout celafonctionne encore aprs un million d'annes ou plus ? C'estque l'atome de base qui produit l'nergie ncessaire est

    pratiquement indestructible. Mais lorsque nous quitterons

    ces lieux tout s'arrtera. Il suffira que quelqu'un d'autrevienne pour que tout se remette en marche. Au fait, lalumire qui t'intrigue tant, sache qu'elle est obtenue parquelque chose que tu ne pouvais deviner ; derrire cette

    paroi polie se trouve une substance chimique qui ragit certains stimuli en produisant de la lumire froide. Maisvoyons ce que tu as apport.

    Je lui tendis les botes de conserve une par une, et il enmit quatre de ct. Cela suffit pour maintenant, dit-il ; etil nous faut quelque chose boire aussi. Peux-tu allerchercher de l'eau ? Tu prendras des rcipients au-dessus du

    placard. Prends aussi sur l'tagre du bas des pastilles quidonneront un peu de saveur l'eau.

    Je me rendis dans la cuisine, pris les rcipients, lesremplis d'eau et les apportai mon ami avant de repartirchercher les tubes qui contenaient de drles de pastillesorange. Je donnai un tube mon ami qui le dcapsula et

    jeta une pastille dans un verre d'eau. Il rpta l'oprationune seconde fois et me tendit un verre. Lui-mme prit lesien et but de bon coeur. Je l'observai, l'air un peu hsitant,

    puis mon tour avalai ce breuvage trange. Mais je fustonn, et bientt ravi par son got inattendu.

    Mangeons quelque chose maintenant , dit monguide. Il s'empara d'une bote ronde, et tira sur un anneau.Il y eut un appel d'air, mon ami tira plus fort et tout lecouvercle se souleva. l'intrieur il y avait des fruits. Le

    lama les renifla, puis en gota un et me dit : Tu peux en manger, ils sont encore trs frais ; choisis

    la bote que tu veux je vais te l'ouvrir. Je regardai toutes les tiquettes et mon choix s'arrta

    sur des fruits noirs qui semblaient couverts deprotubrances. Mon guide tira nouveau sur un anneau.Le mme bruit sec se fit entendre et le couvercle sesouleva. Mais cette fois il y avait un problme, car lesfruits minuscules baignaient dans un liquide. Il va falloirnous civiliser un peu, dit alors mon guide. Retourne dansla cuisine et prends dans un tiroir l'un de ces objets enmtal argent dont l'extrmit a la forme d'une cuelle.Apportes-en deux.

    J'allai chercher les objets qu'il me demandait et revinsbientt en disant : Il y avait l des objets tranges,certains avec des pointes au bout, et d'autres avec unelame !

    Ce sont des fourchettes et des couteaux, me dittranquillement mon ami. Nous nous en servirons plus tard.Ce que tu as apport c'est une cuiller. En en plongeantl'extrmit dans la bote tu vas pouvoir recueillir les fruitsen mme temps que le jus, et ce sans te salir. Il memontra comment faire et je l'imitai, mais je ne remplis macuiller qu' moiti, ne sachant si j'allais aimer cet alimentnouveau pour moi. La sensation que j'prouvai la

    premire bouche fut tellement agrable que j'eus vite fait

    d'engloutir toute la bote. Le lama qui avait t encore plusrapide que moi me dit en riant : Il va falloir nous calmercar, si nous continuons ainsi, nous n'aurons passuffisamment de provisions !

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    13/45

    Chapitre troisime

    Le sage du Tibet Page 13 sur 45

    Je me sens encore trs faible, reprit-il ensuite, jevoudrais que tu continues visiter tout seul.

    Aprs le repas, d'un pas trs assur, je quittai donc lagrande pice et allai inspecter les autres salles. Dans l'uned'elles je trouvai toutes sortes d'appareils tincelantscomme des sous neufs. Mon regard fut attir par l'un d'euxqui avait un cran. Il tait allum et l'on pouvait distinguerune image. On y voyait des boutons sur lesquels quelqu'un

    appuyait, et un fauteuil. Un homme en aidait un autre s'asseoir dans ce fauteuil, et tournait une manette placesur le ct. La chaise grimpait alors de quelquescentimtres. Sur une autre image je vis le fauteuil se

    promener d'un appareil l'autre... et c'est alors que jem'aperus qu'il tait prcisment derrire moi. Je meretournai si vite que je butai dessus et me retrouvai parterre, le nez contre le sol. J'avais l'impression qu'on mel'avait arrach tant il me faisait mal, et il tait tout humide.Je compris qu'il saignait et je retournai dans la salle otait le lama pour ponger ce sang.

    J'allai prendre un peu de ce coton qui m'avait servi pourses jambes et l'appliquai dans mes narines.

    L'coulement s'arrta bientt et je jetai le coton usagdans un rcipient vide qui se trouvait proximit. Quelquechose me poussa alors regarder dedans et, ma grandesurprise, je me rendis compte que le coton n'y tait plus.J'allai alors ramasser, l'aide d'une pelle que je trouvai, le

    pus dont j'avais fait un tas dans un coin et le versai dans lemme rcipient. Comme le coton, il disparut son tour ! Jefis de mme pour ce que nous avions laiss dans les "lieuxd'aisance", et tout se droula de mme : la substance futengloutie sur-le-champ, tandis que le rcipient demeurait

    propre et brillant. Lobsang, me dit le lama, tu devrais essayer de le

    placer dans le trou que nous utilisons. J'ai l'impression qu'il

    doit s'y adapter. Je tranai l'espce de cuvette jusqu'autrou ; elle s'adaptait en effet merveille dessus.

    Matre, dis-je en rejoignant mon ami, vous devriezvous asseoir dans le fauteuil que j'ai apport ; je vous

    pousserais et vous pourriez ainsi visiter sans vousfatiguer. Il accepta et je glissai le fauteuil sous lui. Puiscomme je l'avais vu faire sur l'image, je tournai l'une des

    poignes sur le ct et la chaise s'leva de quelquescentimtres. Elle se trouvait ainsi la bonne hauteur pourque je puisse la diriger. (En fait, la mobilit de ce que

    j'appelais un fauteuil roulant dpendait plus du phnomnede la lvitation que de roues vritables.) Nous nousdirigemes tous deux vers cette salle o j'avais vu une

    multitude d'appareils. C'tait probablement leur salle de jeu, dclara le lama

    en y pntrant. Toutes ces machines ne sont l que pour ledivertissement ; jetons un coup d'oeil cette espce de

    bote qui se trouve l'entre. Je fis demi-tour et poussai le fauteuil vers l'appareil

    qu'il m'indiquait. C'tait prcisment celui sur lequelj'avais vu le fauteuil se promener la premire fois. Quel nefut pas notre tonnement de nous voir sur l'cran, moiaidant le lama monter. On vit aussi mon ami dire quelquechose et notre quipage faire brusquement demi-tour pouraller l o nous tions prcisment. Nous tions bel et bienen train de voir ce qui venait de se passer dans la pice.

    Ensuite apparurent sur l'cran les diffrents appareilsqu'elle contenait, accompagns de leur mode d'emploi enimages.

    peu prs au centre de la salle se trouvait une machinequi, ds qu'on appuyait sur un bouton, dversait sur un

    plateau quantit de petits objets multicolores. Arrivs prsde cet appareil, le lama appuya sur ledit bouton, et dans un

    bruit mtallique tombrent toutes sortes de petites boules.Aprs les avoir examines, et essay de les casser, j'avisaiun peu plus loin un plat que surmontait une lameincurve ; je plaai les boules dessus et, un peu

    craintivement, abaissai la lame. Tout se passa comme je lesouhaitais ; les boules taient chacune coupes en deux etune substance molle s'en chappait. Toujours trs intress

    par ce qui se mange, j'en pris un fragment que je posai surma langue. Sublime ! Je n'avais jamais rien mang d'aussi

    bon. Matre, m'criai-je, il faut que vous gotiez cela ! Je le ramenai prs de la machine pour qu'il appuyt nouveau sur le bouton. Ce fut encore une avalanche de

    petites boules. J'en plaai une dans ma bouche, et j'eus toutd'abord l'impression que c'tait un caillou, mais elle netarda pas se ramollir, et j'eus bientt, en mastiquant, la

    plus agrable des sensations. Chaque boule, selon sacouleur, avait un parfum diffrent, mais je n'avais pas la

    moindre ide de ce que c'tait. Le lama remarqua monembarras et me dit : Lors de mes voyages en Occident

    j'ai vu beaucoup de machines ressemblant celle-ci etdonnant les mmes bonbons, mais l-bas il fallait mettredes pices de monnaie pour les obtenir ! Il y avait aussi

    beaucoup d'autres appareils de type distribuant quantit dechoses. Il y en avait un que j'apprciais tout

    particulirement car il donnait du "chocolat" ; du moinstait-ce le mot qui tait inscrit dessus. Je serais bienincapable de te l'crire. Mais... regarde (il me montraitl'une des machines qui taient dans la pice) c'est le mmemot qui est crit sur celle-ci ! Il est l au milieu de sixautres, mais je suppose que c'est la traduction en d'autres

    langues ! Voyons si elle fonctionne. Il s'approcha de la machine et appuya sur un bouton ; il

    y eut une lgre secousse et bientt un battant s'ouvritrvlant toute une rserve de bonbons au chocolat et autresfriandises. Nous n'avions plus qu' nous servir ! Nous enmangemes jusqu' nous rendre malades. Je pensais que

    j'allais en mourir et dus aller dans ce fameux cabinetrejeter ce que je venais d'avaler. Le lama Mingyar Dondup,toujours assis dans son fauteuil, m'appela ensuite pour que

    je le conduise au mme endroit, et nous baisserons lerideau sur ce qui se passa ensuite ! Plus tard, lorsque nousfmes nouveau d'aplomb, nous en vnmes la conclusionque nous avions t victimes de notre gourmandise... Puis

    nous passmes dans une autre pice. C'tait une sorted'atelier de rparation. Il renfermait toutes sortes d'objetstrs tranges et parmi eux je reconnus ce qui me semblatre un tour bois. Le dala-lama en avait un dans sarserve spciale. Personne, videmment, ne savait s'enservir, mais moi qui m'tais souvent introduit en cachettedans cette pice, je savais le faire marcher. C'tait un tour

    pdales ; il n'y avait qu' s'asseoir sur un tabouret et, avecles pieds, actionner deux pdales de haut en bas. Celles-cifaisaient tourner une roue et quand on plaait un morceaude bois entre deux repres ("la poupe", et la "contre-

    poupe") on pouvait le tailler facilement et faire des btonset des cannes parfaitement rectilignes. Je cherchai dans

    l'immdiat quoi il pourrait me servir, et pensant auxplanches que nous avions je dcidai d'en faire des cannes.Le rsultat fut magnifique, un vrai travail de

    professionnel !

  • 7/25/2019 Le Sage Du Tibet

    14/45

    Chapitre troisime

    Le sage du Tibet Page 14 sur 45

    Nous nous approchmes ensuite de quelque chose quiressemblait un foyer. Il y avait aussi des chalumeaux ettoutes sortes d'objets en rapport avec le feu. Commed'habitude nous fmes divers essais et dcouvrmes quenous pouvions runir des pices mtalliques en les faisantfondre. Aprs plusieurs tentatives nos rsultats devinrenttrs satisfaisants, mais le lama y coupa court et dit : Nousavons encore beaucoup de choses voir. Partons !

    Je repris donc la manette et la tournai pour faire monterla chaise et nous allmes dans une autre salle. Celle-ciconsistait en un grand espace vide o taient disposesquelques tables mtalliques sur lesquelles reposaientd'normes cuvettes. Nous ne comprenions pas bien leurusage. Dans une pice adjacente il y avait un grand creuxdans le sol et des inscriptions sur le mur qui, sans doute,donnaient le mode d'emploi. Heureusement, des images lesaccompagnaient. Comme elles l'indiquaient, nous nousassmes sur le bord de la "piscine", et je commenai dfaire les pansements de mon matre, puis l'aidai setenir debout. Il n'tait pas sitt au centre du bain qu'unliquide mousseux apparut dont le niveau monta

    progressivement. Lobsang ! Lobsang ! s'cria mon ami, ce liquide, je le

    sens, va gurir mes jambes ! Je comprends certaines desinscriptions du mur, elles disent que cette eau rgnre lestissus.

    Mais comment cela peut-il se faire, rtorquai-jeincrdule, et comment pouvez-vous comprendre celangage ?

    C'est trs simple, rpondit-il. Tu sais que j'aibeaucoup voyag, j 'ai entendu parler quantit de langages,et je me suis toujours intress l'tude de ces languestrangres. Tu as remarqu que je me plongeais souventdans les livres, essayant d'en apprendre toujours

    davantage. Eh bien ! cette langue, sur le mur, je crois quec'est ce qu'on appelle le sumrien o l'une des langues

    principales des les de l'Atlantide. Les les de l'Atlantide ? repris-je. Mais je croyais que

    c'tait un seul pays que l'on dsignait par ce nom. Lelama me sourit. Non, dit-il, il n'y a pas un endroit prcisqui s'appelle l'Atlantide. Ce terme dsigne plusieurs

    bandes de terre qui ont sombr dans l'ocan. Ah bon, dis-je, je croyais que c'tait un pays o l'on

    tait arriv un niveau de civilisation tel que nous autres, ct, tions de vritables ignorants ; et maintenant vous medites que l'Atlantide n'est pas vraiment un pays !

    Les ides sont encore trs confuses ce sujet, reprit

    mon ami, et les hommes de science du monde entierjamais n'accepteront la vrit, celle que je vais te dire. Il ya trs longtemps, ce monde o nous vivons n'tait qu'uneseule et mme tendue de terre. Au-del ce n'tait que del'eau. Puis, sous l'effet des vibrations terrestres destremblements de terre, si tu prfres , cette tendue s'estfissure et s'est brise en plusieurs morceaux qui devinrentdes les. Lorsque ces les taient trs vastes on les appelaitdes continents. Ces fragments de terre se disperserent et lesgens qui les peuplaient oublirent bientt leur langueoriginelle, car ils utilisaient des dialectes propres leurgroupe. Jadis, cependant, il n'tait pas besoin de parler

    pour se comprendre, on pratiquait la tlpathie. Mais

    certains individus malveillants en profitaient pour saisir lespenses d'autrui qui ne leur taient pas destines ; aussi lesgroupes choisirent-ils de communiquer en un langage quileur tait particulier. Ces langues particulires se

    multiplirent et furent de plus en plus utilises, si bien quel'on perdit trs vite la facult de communiquer partlpathie, except au Tibet et en quelques rares endroits.Ici nous pratiquons toujours cet art, comme tu as pu t'enrendre compte lorsque je suis entr en contact avec monami du Potala. J'ai inform ce dernier de notre situation etil m'a rpondu, toujours par la mme voie, de rester ici, enattendant que la tem