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Le volontariat aux États-Unis d'Amérique Barbara Wriston I1 existe aux &tats-Unis d'Amérique une longue tradition de volontariat. Elle est peut-être née des duretés de la vie des pionniers et de la solitude des quel- ques milliers d'êtres perdus dans un monde en grande partie hostile et incertain. I1 est certain que, depuis la guerre de Sécession, pendant laquelle il a fallu faire face à des besoins immédiats en organisant des services d'infirmières et de visiteurs pour les blessés, un nombre de plus en plus grand de personnes consacrent de plus en plus de temps aux programmes de volontariat. Si les volontaires ont travaillé dans les hôpitaux et les services sociaux, ils ont étendu leur champ d'action et couvrent aujourd'hui presque toutes les formes d'activités. Les meilleurs volontaires sont ceux qui agissent suivant la remarque d'Hazlitt selon laquelle l'homme est le N seul animal ... frappé par la différence entre les choses telles qu'elles sont et telles qu'elles devraient être M. C'est en visant c ce qui devrait être )> que le volontaire doué de tact découvre les nombreux obstacles qu'il devra éviter. La plupart des musées des &tats-Unis, bien qu'ils dépendent d'autorités diverses et relèvent de philosophies différentes, accueillent volontiers les auxiliaires volontaires. II y a quinze ou vingt ans, à queliues exceptions près, les volontaires, dans les musées, travaillaient dans les bibliothèques ou étaient affectés aux services éducatifs, ils s'occupaient d'enfants. Aujourd'hui, hommes et femmes travaillent dans toutes les sections du musée. De la même manière, le recrutement, qui se faisait de bouche à oreille parmi de petits groupes de personnes de même milieu, s'est élargi à toute la com- munauté sont recherchées des personnes aux talents et intérêts divers. Dans les services éducatifs, les volontaires apprennent à travailler avec des enfants de milieux sociaux différents, et de degrés d'aptitude divers, allant de l'enfant brillant à l'enfant mentalement ou physiquement handicapé. Dans certains musées, les volontaires s'occupent de l'éducation permanente. Ce qui, pendant plus d'un siècle, était le domaine réservé des femmes d'âge mûr et disposant de loisirs est aujourd'hui ouvert aux retraités, hommes et femmes, qui sont heureux d'apporter leur concours. On notera alors une différence entre les volontaires qui ont des aptitudes sans grande relation avec l'art, telles que la comptabilité, la photographie, le travail de bureau, et ceux qui désirent apprendre ce qui touche à l'art et transmettre ce nouveau savoir à d'autres. Ces deux groupes doivent accepter une période de formation dans le musée. L'homme d'affaires qui a réussi et qui est à la retraite éprouvera relativement peu de difficulté à s'intégrer dans une organisation complexe. I1 n'en va sou- vent pas de même pour la personne qui vient juste de se libérer de plusieurs années de vie au foyer à temps complet : là, elle décidait dans une large mesure

Le volontariat aux États-Unis d'Amérique

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Le volontariat aux États-Unis d'Amérique

Barbara Wriston

I1 existe aux &tats-Unis d'Amérique une longue tradition de volontariat. Elle est peut-être née des duretés de la vie des pionniers et de la solitude des quel- ques milliers d'êtres perdus dans un monde en grande partie hostile et incertain. I1 est certain que, depuis la guerre de Sécession, pendant laquelle il a fallu faire face à des besoins immédiats en organisant des services d'infirmières et de visiteurs pour les blessés, un nombre de plus en plus grand de personnes consacrent de plus en plus de temps aux programmes de volontariat.

Si les volontaires ont travaillé dans les hôpitaux et les services sociaux, ils ont étendu leur champ d'action et couvrent aujourd'hui presque toutes les formes d'activités. Les meilleurs volontaires sont ceux qui agissent suivant la remarque d'Hazlitt selon laquelle l'homme est le N seul animal ... frappé par la différence entre les choses telles qu'elles sont et telles qu'elles devraient être M. C'est en visant c ce qui devrait être )> que le volontaire doué de tact découvre les nombreux obstacles qu'il devra éviter.

La plupart des musées des &tats-Unis, bien qu'ils dépendent d'autorités diverses et relèvent de philosophies différentes, accueillent volontiers les auxiliaires volontaires. II y a quinze ou vingt ans, à queliues exceptions près, les volontaires, dans les musées, travaillaient dans les bibliothèques ou étaient affectés aux services éducatifs, où ils s'occupaient d'enfants. Aujourd'hui, hommes et femmes travaillent dans toutes les sections du musée.

De la même manière, le recrutement, qui se faisait de bouche à oreille parmi de petits groupes de personnes de même milieu, s'est élargi à toute la com- munauté où sont recherchées des personnes aux talents et intérêts divers. Dans les services éducatifs, les volontaires apprennent à travailler avec des enfants de milieux sociaux différents, et de degrés d'aptitude divers, allant de l'enfant brillant à l'enfant mentalement ou physiquement handicapé. Dans certains musées, les volontaires s'occupent de l'éducation permanente. Ce qui, pendant plus d'un siècle, était le domaine réservé des femmes d'âge mûr et disposant de loisirs est aujourd'hui ouvert aux retraités, hommes et femmes, qui sont heureux d'apporter leur concours. On notera alors une différence entre les volontaires qui ont des aptitudes sans grande relation avec l'art, telles que la comptabilité, la photographie, le travail de bureau, et ceux qui désirent apprendre ce qui touche à l'art et transmettre ce nouveau savoir à d'autres. Ces deux groupes doivent accepter une période de formation dans le musée.

L'homme d'affaires qui a réussi et qui est à la retraite éprouvera relativement peu de difficulté à s'intégrer dans une organisation complexe. I1 n'en va sou- vent pas de même pour la personne qui vient juste de se libérer de plusieurs années de vie au foyer à temps complet : là, elle décidait dans une large mesure

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II Formation, par le conservateur,.de volon- taires appelés à seconder le personnel du musée. Galerie d'art oriental, Art Institute of Chicago, Chicago (États-Unis d'Amérique), 1976.

Un volontaire en action dans le cadre d'un programme visant A constituer une collec- tion de diapositives. Art Institute of Chicago, Chicago (États-Unis d'Amérique),

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'976. I2

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que faire et quand, elle organisait le temps des autres, attribuait les tâches, organisait les horaires et faisait les comptes. L'habitude de ce genre d'activité peut aider à supporter les interruptions constantes, mais peut aussi faire que l'arrivée dans une organisation plus vaste soit ressentie comme un choc. Dès qu'il y a prise de conscience de la complexité d'un groupe plus important, ce type d'expérience se révèle bénéfique et pour le volontaire et pour le musée. Ces volontaires peuvent développer leurs aptitudes au contact de groupes d'origines diverses, font souvent montre d'initiative dans leurs propres recherches, apportent des idées nouvelles dans la conduite de groupes dans les salles d'exposition et, ayant l'habitude des décisions, savent faire le meilleur usage du temps libre, quand il s'en présente de fason inattendue.

Les musées souvent négligent trop les programmes de formation, n'ex- pliquent pas suffisamment l'organisation de l'institution et ses objectifs, ne spécifient pas assez les niveaux de compétence et de présentation demandés aux volontaires. On reste un peu trop dans le domaine de l'amateurisme. Celui qui recrute, forme les volontaires et travaille avec eux doit consacrer beaucoup de réflexion, de temps et d'attention au programme qui leur est destiné et à la manière dont les objectifs de ce programme peuvent être atteints. Le coordon- nateur doit se rendre compte que les aptitudes, et aussi les aspirations, varient chez les volontaires comme chez les membres du personnel. I1 arrive fréquem- ment qu'un nouveau volontaire mette la main dans l'engrenage pour savoir si, en fait, il, ou elle, désire trouver ou retrouver un emploi rémunéré : or, il doit être clair, de part et d'autre, que le volontaire est redevable à l'institution d'un certain temps de travail en échange de la formation qu'il resoit.

Des interviews bien préparées et bien menées avec chaque volontaire ou groupe de volontaires sont essentielles pour créer un climat de bonnes rela- tions. A l'Institut d'art de Chicago, nous recrutons certes, mais, comme tout bon recruteur dans d'autres secteurs, nous ne voulons pas seulement les per- sonnes qui conviennent le mieux à nos besoins, nous voulons aussi utiliser leurs talents au mieux pour leur propre épanouissement. I1 est essentiel de dire ouvertement ce qu'on veut, ce qu'on demande de la personne et pourquoi. Une vague notion de a faire le bien D peut démolir un programme. I1 est spé- cialement important, lors de l'interview, d'insister sur la discipline de travail à respecter. Aujourd'hui les possibilités de ce qu'on appelle éducation per- manente, postsecondaire ou même formation continue sont virtuellement intines ; les musées, donc, recherchent des personnes vraiment désireuses d'apprendre et qui mettront à profit ce qu'elles auront appris pendant une assez longue période.

Pour assurer la qualité d'un programme, un bon coordonnateur, membre du personnel, est essentiel: il faut quelqu'un qui, à la fois, comprenne les besoins du musée et sache les expliquer aux volontaires, mais aussi qui com- prenne les relations dilicates qui existent entre le musée et les volontaires, ainsi que les problèmes particuliers de ces derniers. Un coordonnateur peut faire le succès d'un programme, ou le mener à I'échec.

De son côté, le volontaire doit se rendre compte que le membre du personnel régulier est présent tous les jours, toute l'année; qu'il a une carrière à suivre et un salaire à gagner. Les membres du personnel ont une vie privée, doivent faire vivre leurs familles et ont de nombreuses obligations professionnelles. Le programme du volontaire équivaut à une partie, mais non à la totalité, de cette vie professionnelle.

Enfin, le membre du personnel et l'auxiliaire volontaire doivent tous deux reconnaître que chacun apporte sa contribution spécifique au bien-être du musée et de la communauté. Un peu d'admiration et d'appréciation mutuelles, qu'on soit professionnel ou volontaire, peut beaucoup faciliter les rapports humains.

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