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L'enfant et la famille devant l'impot Author(s): Alfred Sauvy Source: Population (French Edition), 2e Année, No. 1 (Jan. - Mar., 1947), pp. 31-52 Published by: Institut National d'Études Démographiques Stable URL: http://www.jstor.org/stable/1523846 . Accessed: 08/12/2014 23:56 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Institut National d'Études Démographiques is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Population (French Edition). http://www.jstor.org This content downloaded from 128.235.251.160 on Mon, 8 Dec 2014 23:56:09 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'enfant et la famille devant l'impot

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L'enfant et la famille devant l'impotAuthor(s): Alfred SauvySource: Population (French Edition), 2e Année, No. 1 (Jan. - Mar., 1947), pp. 31-52Published by: Institut National d'Études DémographiquesStable URL: http://www.jstor.org/stable/1523846 .

Accessed: 08/12/2014 23:56

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

Les principes qui guidernt le ldgislateur fiscal pour l'impOt direct ne peuvent &tre appliquis sans riformes profondes. Le souci d'6galitd et de justice rejoint, dans une large mesure, celui du rendement financier, tous deux conduisant h tenir compte des besoins de l'enfant, longtemps ignord par la loi. Commenc6e en 1945 pour l'impot sur le revenu, la rdforme doit &tre aussi dtendue h l'imp6t sur le logement.

LA fiscalit~ familiale, et plus exactement la situation de l'enfant devant I'imp6t, est un problhme nouveau ou, du moins, qui se pose depuis quelques ann&es dans des conditions inddites.

Dans la plupart des pays, la r~forme fiscale a ~t6 simplement 6volutive, les anciennes dispositions out 6t6 amend~es au gr6 des Pv~nements ou des courants psychologiques, mais n'ont pas parti- cip6 & la r~volution qui a touch6 de nombreuses institutions.

L'6tude laisse de c6tt la question des successions, qui ddborde le cadre fiscal pour toucher le statut de la propriht8 et, par suite, le regime Cconomique lui-m~me. C'est l'impbt sur les ressources r~gulibres, sur le train de vie, qui est en cause.

Cet imp6t peut prendre la forme moderne de l'impbt sur le revenu, ou la forme plus ancienne de l'imp6t sur les signes ext&- rieurs, dont l'habitation est toujours le principal.

I. CONSIDERATIONS GJ-N1RALES.

Trois preoccupations essentielles peuvent inspirer une 1lgisla- tion fiscale :

a) l'dgalit6 devant l'imp6t, ou < la justice dans l'imp6t >; b) le souci de corriger les in~galitbs sociales, c'est I'6galit6

par l'imp6t, ou encore < la justice par l'imp6t >~;

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c) le rendement financier (6tant entendu que les considera- tions bconomiques ou d~mographiques peuvent ramener au point de vue financier).

Nous allons les examiner successivement:

I. L'4galit6 devant I'impS6t. Le principe g~ndral < / chacun selon ses facultis > demande i Atre precise. En

fait, qu'il s'agisse d'imp6t sur le revenu ou sur les signes extbrieurs (logement), le principe qui semble avoir guide le l1gislateur et recueillir la faveur gdndrale peut s'6noncer ainsi :

a) deux personnes ayant mdme niveau d'existence doivent payer le mdme imp6t.

b) lorsque deux personnes ont des niveaux d'existence diffl- rents, la diffdrence dolt &tre frapp~e plus lourdement que la partie commune, car elle correspond d des ddpenses moins ndcessaires i la vie, et par suite, plus aisdment supportables.

C'est le principe de la progressivit4, qui a 6t6 peu i peu intro- duit dans la lgislation de tous pays.

La premiere condition est quantitative et se prate i une appli- cation rigoureuse, alors que la deuxibme est qualitative et ne donne aucune precision sur I'6cart qu'elle commande.

L'application de ce principe ne soul~ve pas de difficultY, lors- qu'il s'agit de deux personnes isoldes. Mais le rythme de progres- sivit6 pr~sente un arbitraire que ne peut lever aucun calcul ration- nel, car la notion d'utilit6 d~gressive se prgte mal ? la mesure.

Lorsque l'individu vit avec sa famille et partage son revenu avec les siens, deux conceptions peuvent se faire jour:

a) Selon la conception individualiste, qui a prdvalu jusqu'd une date r~cente et qui privaut encore en certains pays, le niveau d'exis- tence s'identifie avec le revenu (ou l'habitation). Il n'y a pas lieu de tenir compte des charges de famille. Cette conception revient A admettre qu'en ayant des enfants, l'individu n'a pas r~duit son bien- Atre, mais a employ6 son revenu de la fagon qui lui a paru preferable.

Dans cette conception, l'enfant n'a pas d'existence propre, le 16gislateur l'ignore, il ne connait que le chef de famille et son revenu (ou son habitation).

b) La conception sociale tient compte de l'existence des enfants et du niveau d'existence de l'ensemble familial. Elle conduit A frap- per suivant le niveau d'existence et non suivant le revenu nominal.

Les concessions que peut faire la premiere conception sous forme de < d~gr~vements pour charges de famille > participent d'un souci moral, parfois mgme d'un souci de charitY, mais ne peuvent gtre considr~res comme le fruit d'une conception propre.

Voyons comment les deux conceptions s'appliquent aux deux imp6ts: l'imp6t sur le revenu et l'imp6t sur le logement.

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Imp6t sur le revenu. - Lors de son 6tablissement, c'est la con- ception individualiste qui a privalu. Cependant, par une entorse curieuse i ce principe, les revenus d'un homme et d'une femme marius ont 6t6 bloqu~s et se sont ainsi trouv6s plus lourdement frappes. Par contre, lorsque des enfants avaient des biens propres, ces biens 6taient taxis i part. On voit dans ces dispositions contra- dictoires et iniquitables, un reflet du code civil. En fait, le mariage se trouvait p~nalis6 (1).

Des d~gr~vements ont 6t6 accord~s aux charges de famille, att&- nuant les rigueurs des dispositions fondamentales. Ces d~gr~ve- ments n'ont pas 6td calculhs en vue d'assurer la justice dans 1'im- p6t. Parfois cette justice n'6tait pas respectbe, dans d'autres cas, ils allaient au deld, assurant une certaine < justice par l'imp6t ,; les deux objectifs 6taient confus~ment emmilds. Mais le l1gislateur fiscal a toujours entendu les presenter comme une concession de sa part, non comme l'application d'un droit.

En fait, chaque fois que les revenus et les prix ont augment6, accusant une d~pr~ciation de l'6talon mondtaire, les d~grbvements 6taient remis en question.

Le principe m~me de la progressivit6 souligne l'intention du l1gislateur de tenir compte de la d~gressivit6 des besoins : tranche vitale exon~rde, part de plus en plus grande prdlev~e sur les tran- ches successives : la premiere paire de chaussures ne doit pas 6tre frappde, parce que l'homme ne peut aller pieds nus, la seconde paire paye un imp6t modern, la troisibme sera plus lourdement frappde, et ainsi de suite.

Mais que deviennent les enfants? Dans l'ancienne conception, il n'est pas question d'eux; ils reprbsentent un superflu, une con- sommation, serait-on tenth de dire, de sorte que les sommes n~ces- sairs A leur entretien sont lourdement frappies. Dans la conception attinude, un l1ger abattement est consenti en leur faveur.

Cependant, ils portent aussi des chaussures. Dis lors, celui qui a cinq enfants et, de ce fait, ach~te six paires de chaussures, est-il impose 6quitablement ?

L'6tude plus precise des conditions de vie a conduit i mieux priciser la notion de < niveau d'existence >. Un phre de cinq enfants disposant d'un revenu d'un million a un niveau d'existence inf&- rieur a celui d'un c6libataire gagnant 800.000 francs. Si l'on admet - et ce point va stre contest6 - que l'enfant cofite une proportion constante du revenu, le problkme comporte une solution simple, celle du quotient familial. La repartition du revenu entre les mem- bres de la famille, constat~e en fait, est consacr~e en droit. On sup- pose le revenu global rdparti entre un certain nombre de parts, frappdes s~par~ment.

(1) Ou, si l'on prdfbre, l'union libre se trouvait avantagde, en b4ndficiant des avantages de la vie en commun, sans en supporter les cons6quences fis- cales.

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Mais comme un enfant ne coite pas autant qu'un adulte, au lieu de diviser par le nombre de personnes, on divise par un nom- bre plus faible, ou ? quotient 6tabli suivant un barbme approprid, par exemple en admettant que deux enfants coitent autant qu'une personne (1).

Si le barkme reprisente bien les besoins respectifs des divers membres de la famille, la justice dans l'imp6t se trouve rigoureu- sement assurbe dans ses deux principes fondamentaux.

Admettons, par exemple, que les besoins de la femme soient 4gaux i ceux du mari et ceux de l'enfant i la moitid.

L'application du systhme donne:

COlibataire Famille de 2 enfants

Revenu ..................... 100.000 300.000 Quotient familial............... 1 3 Niveau d'existence............ le mnme.

Pbre 100.000 Taxation sur .................. 100.000 M re 100.000

2 enfants 100.000 Imp6t ....................... i 3i

C'est 1k, sous riserve de l'exactitude du quotient, l'application stricte du principe de l'imp6t progressif.

Au lieu de diviser le revenu par le quotient, on peut aussi intro- duire la notion de a revenus equivalents >, c'est-i-dire assurant m~me niveau d'existence. Dans l'exemple ci-dessus 300.000 et 100.000 sont 6quivalents. Ils doivent done payer m~me proportion de leur revenu.

Le point de contestation n'est pas le principe du quotient, mais le barbme qui sert a son calcul, puisqu'avec ce barbme, on peut obtenir n'importe quel r6sultat. En particulier, on peut se deman- der si ce bar~me (par exemple, un enfant comptant pour 1/2) doit $tre le m~me quel que soit le revenu.

Selon la these 4galitaire, la nourriture et m~me l'habillement d'un enfant ont (ou devraient avoir) le mime coftt, quel que soit le degr6 d'aisance. Elle se resume par une formule breve sur le cofit du biberon, qui est le m~me quel que soit le degr6 d'aisance. Cette thlse revient a retomber sur l'abattement fixe, r'abattement vital, ind6pendant du revenu.

(1) Soit I = f (R) la formule qui donne l'imp6t I pour une personne de L.LR)

revenu R. L'imp6t 6tant progressif, doit croitre en mgme

temps que R. Une famille de n personnes, avec un quotient familial q doit payer un

R imp6t q / -

q

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L'autre th6se s'appuie sur le fait que le phre de famille ne peut conserver un niveau d'existence sup~rieur i ses enfants. S'il agis- sait ainsi, il manquerait a ses devoirs les plus 6l1mentaires : il habite le m~me quartier, dans le m~me appartement. En chemin de fer, il voyage dans la m~me classe qu'eux, en vacances, descend dans le m~me h6tel, a recours au m~me m~decin, etc.

Aucune des deux theses ne parait pleinement satisfaisante; la premibre ramine t un principe anachronique, et ne realise la jus- tice dans l'imp6t que pour un seul niveau de revenu. La seconde ne peut 4tre g~ndralis~e a toutes les d~penses. En fait, lorsque le niveau d'existence s'l16ve, une plus grande fraction de la d~pense concerne les adultes (bijoux, fourrures, voyages, etc.).

enfant Toutefois, la constance de la proportion

adulte doit se mainte- adulte

nir g peu pros jusqu'd des revenus assez ~lev~s.

Le fait que le p~re de famille ais6 regoit, pour un enfant, un ddgr~vement beaucoup plus 6lev6 que le phre de famille modeste parait, aux partisans de la premiere thbse, contraire i la justice fiscale.

Rappelons qu'entre deux niveaux d'existence diffbrents, il n'y a aucun moyen de juger rationnellement si la progressivit6 de l'imp6t est suffisante. On ne peut comparer que des niveaux d'exis- tence 6gaux ou des a revenus equivalents >. Si deux revenus 6qui- valents, c'est-i-dire, assurant le m~me train de vie, paient des frac- tions diffbrentes de leurs revenus, la justice dans l'imp6t n'est pas r~alisbe. Seules, les comparaisons horizontales se pr~tent a une mesure suffisamment objective, les comparaisons verticales font n~cessairement appel a la justice par l'imp6t que nous verrons plus loin.

Ainsi, la justice dans l'imp6t ne peut 4tre assurde que par le systhme du quotient familial, ce qui ne signifie pas que ce quotient doive rester ind~pendant du revenu. Le bar6me pourrait $tre assez bien d~gag6 d'une etude objective des besoins.

Imp6t sur le logement. - Les m~mes principes que pour l'im- p6t sur le revenu guident dans la recherche de < la justice dans l'imp6t >~.

Ii suffit de remplacer la notion de a niveau d'existence ? par celle de < genre d'habitation ,, cette expression couvrant non seu- lement la dimension, le cubage d'air, mais aussi l'emplacement, le confort, le luxe, etc., toutes qualitis qui se mesurent a peu pros par la valeur locative rdelle.

Si l'imp6t est progressif (par exemple s'il comporte un abatte- ment a la base), seule une m~thode analogue au quotient familial assure la justice dans l'imp6t.

Sinon, lorsque deux logements identiques sont occupis par des families n'ayant pas le meme nombre d'enfants, l'imp6t est le m~me,

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ce qui n'est pas juste, puisque la part du ndcessaire est plus grande dans un cas que dans l'autre.

A cette iniquit6 dans la progressivit6 s'en ajoute une autre qui vient de ce que c'est ici non le revenu total, mais un besoin essen- tiel qui sert d'assiette t l'imp6t. Le logement augmente avec la dimension de la famille, sans accuser n~cessairement un train de vie plus 6lev4.

Ainsi on peut se trouver devant le cas suivant :

C61libataire M~nage 2 enfants

Besoins .................... 1 3 Revenu ..................... R R Niveau d'existence ............ . 1 1/3 Logement ................... 1 2 Imp6t ...................... 1 4

Le niveau d'existence trois fois plus faible paie un imp6t quatre fois plus fort. I1 s'agit lIa d'un cas thdorique, mais dont on peut trou- ver de frdquentes applications pratiques.

Ainsi, la justice dans l'imp6t ne peut Stre r~alisbe que par un principe tout i fait comparable au quotient familial, qui appelle les m~mes observations. L'application du quotient ne peut, du reste, supprimer facilement l'iniquit6 qui rbsulte du principe m~me de l'imp6t sur un besoin essentiel.

2. Corrections des in6galit6s sociales ou justice par I'impat.

L'imp6t est ici appel i corriger les indgalit6s sociales. Ce souci part du sentiment que l'inbgalitb des revenus

ou des conditions n'est pas 6quitable. Dans un r6gime oii les reve- nus seraient fixds par voie d'autorit6, ou tout au moins, considdrds comme approprids aux circonstances, leur indgalitb se justifiant par des considerations sociales, le souci de nivellement aurait naturel- lement moins de place. Mais cette question sortant de notre cadre, nous nous bornons h constater qu'une grande partie de l'opinion accorde en fait, h l'imp6t, un r6le social.

La progressivit6 de l'imp6t sur le revenu (ou sur l'habitation) rdpond t cet objectif; mais comme le rythme de la progression est, nous I'avons vu, subjectif et arbitraire, les deux formes de justice ne peuvent pas &tre s~pardes, lorsqu'il s'agit de deux individus vivant seuls et ayant des revenus diffirents, ou bien de deux families ayant les m~mes charges et des revenus diffbrents.

Aucun moyen de juger objectivement si, un revenu de 100.000 frs payant 10 %, il est juste qu'un revenu d'un million en paie 60 ou 70 %. En fait, la recherche de la justice par l'imp6t finit toujours par s'opposer A la troisibme prdoccupation, celle du rendement finan-

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cier (risque de fuite devant I'imp6t ou devant le revenu lui-m~me). L'imp6t s'avyre d'autant moins capable de supprimer toutes les in&- galitbs sociales que certaines d'entre elles sont justifibes ou affir- ment I'4tre. En un mot, on ne peut demander a l'imp6t de changer le r6gime lui-m~me.

La justice par l'imp6t consiste : - soit t faire payer au revenu (ou au niveau d'existence)

le plus 6lev4 une somme supdrieure a celle que semblerait exiger la simple 6galit6 devant l'imp6t (accentuation de la progressivith).

- soit a tenir compte de circonstances particulibres, par exemple, en ne supprimant pas tout d~gr6vement lors- qu'un enfant est d6c6d6.

- soit a rdduire l'indgalit6 des niveaux d'existence resultant des charges de famille, ce qui conduit A prendre un quo- tient supCrieur i celui d~termind par les besoins.

Dans ce cas, l'imp6t compense l'insuffisance des allocations familiales ou en tient lieu.

Ce souci peut se traduire de diff6rentes fagons: par exemple, surimposition du c6libataire ou du m6nage sans enfants, ou encore dtgr~vement croissant suivant le rang de l'enfant (plus 6lev6 pour le 4" que pour le 38 par exemple) pour soulager les familles nom- breuses.

Mais le souci de la justice par l'imp6t ne peut pas conduire a riduire ou supprimer le quotient familial, m~me pour les revenus 6lev6s, sous r~serve, une fois de plus, que ce quotient ait 6td conve- nablement 6tabli pour les diverses categories de revenu.

C'est I'4galith devant l'imp6t et I'6tude des besoins familiaux qui conduit t concevoir un quotient plus faible pour les hauts reve- nus, non l'6galit6 par l'imp6t.

Rendement financier. Le souci du rendement financier s'accorde assez bien avec la progressivit6, mais jusqu'i

un certain rythme seulement. Lorsque l'imp6t atteint une fraction trbs l6ev6e du revenu, par exemple 80 %, il se produit un tassement. Le rendement effectif n'augmente pas autant que le tarif, soit que la fraude pr6sente plus d'attraits, soit que les revenus se modifient 16galement.

Cette modification des revenus peut d'ailleurs avoir une riper- cussion 6conomique d6favorable et, par suite, agir sur le rendement des autres imp6ts.

Ces consid6rations sont g6n6ralement admises, les d6bats por- tant surtout sur leur application. Elles peuvent inciter, en tous cas, le financier t s'opposer d'une fagon g6ndrale aux charges de famille, car, pour maintenir le rendement global de l'imp6t, il lui faut accroi- tre les taux.

Cette conception financibre ne s'appuie que sur le souci de ren- dement immddiat. Son application conduit t aggraver encore la

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condition de ceux qui 6lvent des enfants et, par suite, a r&duire le nombre de ces enfants qui, un jour, seront i leur tour, produc- teurs et contribuables.

Dans un pays oh la natalit4 est excessive ou suffisante, sans aide dconomique, le financier peut s'en disint~resser et s'opposer mime aux partisans de la justice dans l'imp6t. I1 n'en est pas de m&me lorsque, la natalit6 6tant insuffisante, le souci m~me des finances publiques conduit i ddgrever les families.

Agir autrement serait commettre une erreur financibre : la negligence de l'amortissement du < capital humain ,. Le revenu de l'Etat serait en partie une consommation de ce capital, le plus pr&- cieux de tous.

Mais poussons plus loin : comme un enfant coc~te moins i ole- ver dans un revenu modeste que dans une famille aisle, le point de vue financier conduit ? n'encourager la natalith que parmi les classes les moins aisdes de la population et, par suite, a modifier le bar~me du quotient, dict6 par la justice dans l'imp6t, en l'abaissant pour les revenus trbs blevis, quitte a le relever en bas de l'4chelle. Cette conception se retrouve dans toutes les formes d'aide i la famille. L'encouragement i la natalit6 est, du point de vue materiel et finan- cier, plus productif quand il porte sur les categories sociales ddfavorisdes. Le souci de r6duire la mortalit6 des jeunes, qui doit prendre 6galement place dans les soucis financiers, conduit au m~me rdsultat.

Du point de vue moral ou sociologique, une telle diff6renciation ouvre un large champ a la discussion. Celle-ci est trop subjective pour pouvoir 6tre abordde ici. Nous nous bornons a constater les tendances oii conduisent n~cessairement les preoccupations d'ordre financier.

II. L'IMP6T GENERAL SUR LE REVENU EN 1947.

I. Tarifs appliqubs. Le systhme en vigueur comporte deux principes essentiels :

a) Une progressivitd par larges tranches. Chaque tranche de revenu est frappde dans une proportion qui s'dltve avec le revenu; la premiere tranche, consid~rde comme le minimum vital, est tota- lement exempte.

On applique ainsi au revenu imposable (1) le tarif uniforme de 60 % (2) a :

(1) Le revenu imposable est le revenu obtenu en enlevant au revenu brut les cotisations pour les assurances sociales, le montant de I'imp6t c~dulaire sur les traitements et salaires, les imp6ts directs locaux et l'ensemble des frais professionnels calcul6 forfaitairement en prenant 10 % du revenu brut diminu6 des cotisations pour assurances sociales et de I'imp6t c6dulaire pour la tranche inf~rieure a 500.000 et 5 % au dell.

(2) Pour les c6libataires, divorces ou veufs n'ayant pas d'enfant, ce taux est port6 I 65 % sur la fraction de revenu comprise entre 500.000 et 1.000.000 de francs et & 70 % sur la fraction dudit revenu d~passant 1.000.000 de francs.

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0 % du revenu infirieur i 40.000 frs. 20 % de la tranche de revenu comprise entre 40.000 et 200.000 frs. 50 % - - 200.000 et 500.000 - 75 % - - 500.000 et 1.000.000 -

100 % - sup~rieure i 1.000.000 de francs. On obtient ainsi un imp6t de :

12 % sur le revenu compris entre 40.000 et 200.000 frs. 30 % sur la tranche de revenu comprise entre 200.000 et 500.000 frs. 45 % (1) -- - 500.000 et 1.000.000 - 60 % (2) - supdrieure h 1.000.000 de frs.

ce qui donne au total un imp6t de : 0 % sur un revenu de 40.000 frs. 9,6 % - 200.000 -

21,8 % - 500.000 - 33,4 % - 1.000.000 - 60 % - infini; les 6chelons intermidiaires 6tant obtenus par interpolation.

b) Le quotient familial ' barime ind~pendant du revenu : minage sans enfant...... 2 (premieres ann~es de mariage).

- avec 1 enfant.... 2,5 -- 2 enfants... 3 - 3 - ... 3,5

- 4 - ... 4 et ainsi de suite, en augmentant de 0,5 par enfant.

Le revenu disponible par personne - est impose sdpar~ment. q La famille paie alors le mime imp6t que le c6libataire, multiplid par q, et la mime proportion de son revenu.

Si l'imp6t 6tait proportionnel au revenu, cette operation n'aurait ni utilit6, ni justification. Mais le tarif 6tant progressif, le principe de la progressivit6 suivant le niveau d'existence est respectS, grace au quotient familial. Lorsque survient un enfant supplhmentaire, le contribuable voit ses charges augmenter, mais b~ndficie :

a) d'un abattement i la base plus important pour toutes les tran- ches d~passies par le quotient (40.000 X 0,5 X 12 % = 2.400 frs si le revenu divis6 par le quotient est compris entre 40.000 et 200.000 frs, etc.);

b) d'un changement de tranche, lorsque son quotient tombe dans une tranche plus basse. Lorsque le quotient d6passe 1.000.000, le taux est proportionnel et l'avantage procur6 par la venue d'un enfant reste constant.

C'est ce qui ressort, pour la venue d'un troisibme enfant, du gra- phique 1, construit au moyen du tableau II.

(1) 48,75 % pour les c61ibataires, divorc6s ou veufs n'ayant pas d'enfant. (2) 70 % pour les c61ibataires, divolrc6s ou veufs n'ayanit pas d'enfant.

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Les diff~rents abattements h op~rer sur un mime revenu brut varient suivant les contribuables, et sp~cialement suivant les c~du- les, c'est le revenu imposable, un peu infdrieur au revenu reel qui a servi de base aux calculs. Toutefois, on a donn6, h titre d'indica- tion, le revenu avant deduction des frais professionnels forfaitaires.

Mais voici tout d'abord (tableau I), I'imp6t payd par un manage ayant 2, 3 ou 4 enfants.

TABLEAU I

Impbt payd par les familles ayant 2, 3 ou 4 enfants.

Imp~t paye par un m~nage ayant Revenu brut Revenu imposable Impt pay par un mnage aant

de la famille de la famille 2 enfants 3 enfants 4 enfants

133.000 120.000 0 0 0 136.000 123.000 360 0 0 155.000 140.000 2.400 0 0 159.000 143.000 2.760 360 0 178.000 160.000 4.800 2.400 0 181.000 163.000 5.160 2.760 360 658.000 600.000 57.600 55.200 52.800 661.000 603.000 58.500 55.740 53.340 763.000 700.000 87.600 67.200 64.800 766.000 703.000 88.500 68.100 65.160 868.000 800.000 117.600 97.200 76.800 871.000 803.000 118.500 98.100 77.700

1.604.000 1.500.000 327.600 307.200 286.800 1.607.000 1.503.000 328.950 308.100 287.700 1.867.000 1.750.000 440.100 382.200 361.800 1.870.000 1.753.000 441.450 383.550 362.700 2.130.000 2.000.000 552.600 494.700 436.800 2.133.000 2.003.000 553.950 496.050 438.150 3.182.000 3.000.000 1.002.600 944.700 886.800 3.185.000 3.003.000 1.004.400 946.050 888.150 3.708.000 3.500.000 1.302.600 1.169.700 1.111.800 3.711.000 3.503.000 1.304.400 1.171.500 1.113.150 4.234.000 4.000.000 1.602.600 1.469.700 1.336.800

20 R S19 R tras dlevn -> 60% -60 % - 60 %

Au moyen des 3 dernikres colonnes, on d(gage soit le dfgr~ve- ment absolu apport6 par un enfant, soit le d~grbvement relatif (ou rdduction de l'imp6t rapport~e h cet imp6t). Les rdsultats sont don- nds au tableau II ci-contre :

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 41

TABLEAU II

DigrBvement absolu et digravement relatif pour le 3e et le 4e enfants.

D(grbvement absolu D~grbvement relatif Revenu imposable

pour le 3* enfant pour le 4* enfant pour le 3" enfant pour le 4* enfant

120.000 0 0 100 % 0 123.000 360 0 100 % 0 140.000 2.400 O 100 % 0 143.000 2.400 360 87 % 100 % 160.000 2.400 2.400 50 % 100 % 163.000 2.400 2.400 46,5 % 87 % 600.000 2.400 2.400 4,2 % 4,3 % 603.000 2.760 2.400 4,2 % 4,3 % 700.000 20.400 2.400 23,3 % 3,6 % 703.000 20.400 2.940 23 % 4,3 % 800.000 20.400 20.400 17,3 % 21 % 803.000 20.400 20.400 17,2 % 20,8 %

1.500.000 20.400 20.400 6,2 % 6,6 % 1.503.000 20.850 20.400 6,3 % 6,6 % 1.750.000 57.900 20.400 13,1 % 5,3 % 1.753.000 57.900 20.850 13,1 % 5,4 % 2.000.000 57.900 57.900 10,5 % 11,8 % 2.003.000 57.900 57.900 10,5 % 11,8 % 3.000.000 57.900 57.900 5,8 % 6,1 % 3.003.000 58.350 57.900 5,8 % 6,1 % 3.500.000 132.900 57.900 10,2 % 5,0 % 3.503.000 132.900 58.350 10,2 % 5,0 % 4.000.000 132.900 132.900 8,3 % 9,0 % trbs 61ev4 132.900 132.900 trbs faible

Ainsi la reduction d'impbt apport~e par la venue d'un enfant progresse par bonds assez rapides et reste quelque temps A un palier.

Le 4' enfant apporte parfois une reduction absolue aussi forte que le 3", mais jamais plus forte (et la rbgle est g~ndrale quel que soit le rang considerS). Le rbsultat peut 6tonner au premier abord : lors de la naissance de deux jumeaux, le phre de 2 enfants qui a 700.000 francs de revenu voit le premier nd lui rapporter une rbduc- tion de 20.400 francs et le second une reduction de 2.400 francs seulement.

La difference tient a ce que le (n + 1) enfant rbduit moins le niveau d'existence g~ndral que le n, parce que sa charge est r~par-

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42 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L' IMPOT

tie sur un nombre de parts plus grand. Mais, dans l'exemple ci- dessus, elle est exagdrbe par le jeu des larges tranches.

DMgr&vement (1) S i i ]..... I . .. I~ F , , i t T ..

140 132.900 Frs

120

100

80

60 57.900 Frs

40

_2

20.400 Frs

- 10 50 - 2.400 Frs 1947

0 0 500 1.000 1.500 2.000 2.500 3.000 3.500

(1) on milliers de francs Revenu (1)

GRAPHIQUE No 1. - Digrbvement procure par le 3e enfant.

D0grdvement

40 /. Jusqu' 140. 000Frs 10 0 % 35 *!.

_ "/.

-

30 * *

L25 . 20 7 .

Tend vers 0 10 "/.

5

?/o

0 500 1.000 1.500 2.000 2.500 3.000 3.500 4.000 Revenu en milliers de francs

GRAPHIQUE No 2.-- DNgrbvement relatif (rapport du dbgrivement ? l'irmp6t) procur6 par le 3e enfant.

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 43

2. Justice dens I'imp6t. Sous reserve de l'exactitude du barme adoptC pour le quotient, un m~me niveau

d'existence connait bien un m~me taux d'imp6t quel que soit le nombre des enfants (1). Ce barcme est le m~me quel que soit le revenu; nous avons vu que pour les revenus tres 6levfs, ce barkme devrait comporter une dfcroissance; par contre, pour les revenus modestes, les besoins d'un enfant sont souvent supdrieurs A 0,5. L'abattement A la base de 40.000 francs pour un adulte 6tant trbs bas, celui de 20.000 francs pour un enfant est insuffisant. Pour les revenus trbs 61ev6s, la proportionnalit6 de 1'imp6t au-dessus d'un certain chiffre a pour effet d'instituer un plafond au d6grbvement absolu apporti par un enfant.

L'institution de larges tranches dans la progressivit6 a pour effet de crier de nombreuses anomalies qui apparaissent comme autant d'iniquitbs. La justification de bonds aussi rapides n'apparait pas i premiere vue, puisqu'en pratique, le calcul de l'imp6t est tta- bli par des bar6mes imprim6s ? l'avance. Elle peut avoir pour effet de discrbditer le systhme lui-m~me par l'Cnonc6 de cas limites par- ticulibrement frappants.

3. Justice per I'imp6t. Nous avons vu qu'une fois l'6galit6 devant l'imp6t assur~e par le quotient et l'appli-

cation d'un m~me taux i tous les revenus equivalents, la justice par l'imp6t 6tait surtout une question de progressivit6.

La surimposition des cl61ibataires au-dessus de 500.000 francs (signalde plus haut) ne peut gubre 8tre consid6rde comme inspir~e par le ddsir d'accroitre la nuptialit~, car la fraction de la population qu'elle touche est assez faible et a souvent d6pass6 l'Age du mariage. C'est surtout le d6sir de r&duire la prime dont b6ndficie le c6liba- taire vis-t-vis du charg6 de famille, du fait de l'insuffisance des allocations familiales, qui justifie la surimposition.

Quant at la reduction du quotient de 2 a 1,5 pour les m~nages sans enfant aprbs 3 ans de mariage, elle semble au contraire ins- pir6e par des preoccupations natalistes; le dl61ai de 3 ans ne peut se justifier, en effet, par aucune consid6ration de justice pure. Nous retrouverons done cette disposition A propos du rendement financier.

L'exemption de tout imp6t des allocations familiales manifeste au contraire un souci visible de justice par l'imp6t, bien qu'elle puisse aussi encourager la natalitd. Certaines pensions et retraites b6ndficient du m~me privilege.

L'influence des allocations va d'ailleurs $tre reprise plus loin.

(1) Cependant, lorsque le revenu d6passe 500.000x q, le charge de famille est avantag6 par rapport au c61ibataire, car celui-ci subit un taux de 65 % si le revenu est compris entre 500.000 et 1.000.000 et de 70 % s'il est suplrieur ? 1 million. Ainsi, pour un revenu de 2 millions, le c~libataire pale 1.059.000 frs d'imp6ts, soit 52,9 % du revenu, alors que, pour un revenu 6quivalent de 7 millions, le phre de 3 enfants paie 3.484.000 francs, soit 49,8 % de son revenu.

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44 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

4. Rendement financier. La proportionnalit6 de l'imp6t au-dessus d'un certain chiffre se justifie par le souci

du rendement financier et la crainte de l'6vasion fiscale. Du mime coup, le fonctionnement du quotient n'apporte plus aucun avan- tage supplhmentaire.

D'une fagon g~ndrale, nous l'avons vu, le quotient familial se justifie par le souci d'dgalitd devant l'imp6t. Ii n'est pas completd, dans la l1gislation de 1947, par des dispositions proprement nata- listes.

II faut cependant revenir sur la reduction du quotient de 2 B 1,5 aprbs 3 ans de mariage, pour les m~nages sans enfant. Une telle dis- position peut hMter la naissance du premier enfant. Elle constitue, en tous cas, une entorse i la < justice dans l'imp6t >, puisque le m~nage l1gal se trouve p~nalis6 par rapport au m~nage de fait, plac6 dans les m~mes conditions.

Cette p~nalisation ne s'observe pas dans tous les cas. Pour les revenus trbs 6lev~s, la surtaxe des c6libataires peut

compenser celle du m~nage sterile. D'autre part, si les deux revenus sont tris diff~rents ou si la

femme n'a aucun revenu, le jeu du quotient peut apporter un d~grd- vement, malgrb son insuffisance. Par exemple, si le revenu de l'homme est de 150.000 francs et celui de la femme nul:

Imp6t du m~nage lgal...................... 10.800 francs; Imp6t du m~nage de fait.................... 13.200 -

III. NIVEAU D 'EXISTENCE DES SALARI1S

SUIVANT LES CHARGES DE FAMILLE.

L'imp6t sur le revenu assure ou peut assurer une certaine cor- rection des inigalitis de condition dont souffrent les charges de famille. I1 est done intbressant d'examiner les consequences de l'ensemble des deux 16gislations. Nous nous limiterons au cas des salaries.

Voyons d'abord l'influence propre de l'imp6t cddulaire sur les traitements et salaires.

I. ImpS6t c6dulaire sur les traitemenfts et salaires.

Les dfgrbvements accord~s aux charges de famille sont calculus en fonction de l'im- p6t: 15 % avec plafond de 3.000 francs

pour chacun des deux premiers enfants; 45 % avec plafond de 9.000 francs pour chaque enfant t partir du troisibme. Le souci de justice par I'imp6t est visible, alors que la justice dans l'imp6t n'est pas assurde, si le revenu est consid~rb comme determinant le niveau d'existence.

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 45

Nous prenons ici, comme point de depart, non plus le revenu imposable A l'imp6t global, mais le revenu brut. Voici la compa- raison pour 2 et pour 3 enfants :

TABLEAU III

ImpdOt cdulaire pour 2 et 3 enfants.

D(gr~lvement Revenu brut 0 enfant 2 enfants 3 enfants Dgrveme

pour le 3" enfant

80.000 614 430 154 276 100.000 2.336 1.635 584 1.051 120.000 5.043 3.530 1.261 2.260 140.000 7.750 5.425 1.938 3.487 160.000 10.544 7.380 2.636 4.744 200.000 16.304 11.413 4.076 7.357 300.000 30.704 24.704 15.704 9.000 500.000 59.504 53.504 44.504 9.000

De ce bar~me, on peut d~gager, a rebours, un quotient familial thborique. Par exemple, pour une famille de 3 enfants (g laquelle est appliqud un quotient de 3,5 h l'imp6t global), on trouve les

r~sultats suivants : pour les revenus faibles, le quotient est voisin de 1. Il s'6lve ensuite pro- gressivement jus- qu'A un maximum un peu supdrieur b 2 pour un revenu moyen et redes- cend progressive- ment vers 1 pour les revenus 6lev~s.

Cette allure anor- male souligne l'il- logisme du sys- thme; celui-ci d&- favorise les faibles revenus, par I'ab- sence d'abattement a la base pour les enfants.

Degrevement (I) I I I I ........ I

9

B

7

6

5

4

3

2

InED 60) e m 12 1

I 2

194

60 80 100 120 140 160 180 200 220 (I) en milliers de francs Revenu (tl

GRAPHIQUE No 3. - D6grbvement h l'imp6t c6dulaire procur6 par le 3e enfant.

4

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46 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

2. Prestations familiales et fiscalit6. Abordons maintenant le pro- blame g~ndral. Il s'agit de mesu-

rer l'influence globale des prestations familiales et de la fiscalit4 sur le bien-$tre de la famille.

En raison de la complexit6 des calculs et du grand nombre de combinaisons possible, nous nous sommes limit6 au cas du salarid clibataire, ou bien ayant 2, 3 ou 5 enfants. Nous supposons, en outre, que la femme ne travaille pas, nous plagant ainsi dans le cas oii les allocations atteignent leur chiffre le plus 6lev4.

Du salaire brut, il faut ddduire dans l'ordre : - les assurances sociales, - I'imp6t c~dulaire, - l'imp6t global sur le revenu.

Les prestations familiales 6tant exemptes de toute retenue ne doivent 6tre ajouties qu'ensuite (allocations familiales et allocation de salaire unique). On obtient ainsi le revenu net total dont dispose la famille pour couvrir ses besoins. Les rbsultats figurent au tableau IV:

Pour isoler l'influence respective de l'imp6t et des prestations, nous avons compare pour chaque cat~gorie quatre chiffres: A) ressources dans le cas ohi n'existeraient ni imp6ts, ni prestations

familiales; c'est le revenu taxable; B) ressources dans le cas oii existeraient les imp6ts, mais non les

prestations familiales; C) ressources dans le cas ohi existeraient les prestations familiales,

mais non les imp6ts; D) ressources disponibles effectives.

Ces chiffres sont donnis dans le tableau V. Ces chiffres ne prennent leur signification qu'en valeur relative,

compares aux besoins. On obtient ainsi les niveaux d'existence. Nous prendrons le bar~me adopt6 pour l'imp6t 1947 (1 pour l'adulte, 0,5 pour chaque enfant), qui semble lgitime au moins jusqu'd 500.000 frs et adopterons, dans chaque cat6gorie, le niveau d'exis- tence du c6libataire pour base 100 (1); les rbsultats figurent dans le tableau VI.

Dans tous les cas, la venue d'enfants au foyer diminue fortement le bien-6tre.

L'influence des imp6ts est nfgligeable pour les revenus du bas de l'6chelle et devient appreciable pour les revenus 6lev6s. Inver- sement, les prestations familiales ont une influence sensible pour les revenus modestes et trbs faible pour les revenus 6lev6s.

C'est vers le revenu de 300.000 francs que l'imp6t l'emporte sur les prestations.

(1) Le niveau d'existence d'un c~libataire prgte a controverse, car le genre de vie peut varier considrablement depuis la personne habitant en h8tel jus- qu'& celle qui habite chez ses parents. Nous laisserons cette controverse de c6td en rappelant que nous envisageons les besoins rbels des diverses cat6gories et non celles qui ddcoulent des habitudes prises, celles-ci 6tant nfcessairement caIqu~es sur les niveaux d'existence eux-mnmes.

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 47

On peut 6tre surpris de voir l'imp6t atttinuer les inigalitts, alors que l'imp6t global realise simplement la justice dans l'imp6t, selon les conventions adoptbes, et que l'imp6t c~dulaire ne va pas mame aussi loin. C'est que l'imp6t joue ici son r6le g6ndral de nivellement, du fait de sa progressivitb. Le rapport de deux revenus nets d'im- p6ts est toujours plus prbs de 1 que le rapport des revenus bruts.

Ainsi, le jeu combine des allocations et des impbts assure une certaine harmonie : on peut reprocher a l'imp6t global la constance

TABLEAU IV Du revenu brut aux ressources disponibles.

Revenu brut Allocations et revenu Impbt

Nombre taxable Impt gml Total familiales Ressources (apr~s deduc- des deux et d'enfants tion des As- ctkulaire sur le disponibles surances so- imp6ts salaire

ciaes), runique

CGlib. Brut: 2.336 5.100 7.436 - 86.564 2 100.000 1.635 - 1.635 40.680 133.045

5 94.000 - - - 108.480 202.480

CGlib. Brut: 16.304 14.067 30.371 - 160.629 2 200.000 11.413 4.995 16.408 40.680 215.272 3 Taxable : 4.076 3.388 7.464 67.800 251.336 5 191.000 - -- 108.480 299.480

C6lib. Brut: 30.704 29.480 60.184 230.816 2 300.000 24.704 14.360 39.064 40.680 292.616 3 Taxable: 15.704 12.932 28.636 67.800 330.164 5 291.000 - 9.828 9.828 108.480 389.652

C6lib. d Brut:,

45.104 52.592 97.696 - 293.304 2 400.000 39.104 23.605 62.709 40.680 368.971 3 Taxable :j 30.104 22.177 52.281 67.800 406.519 5 391.000 12.104 19.321 31.425 108.480 468.055

C61ib. Brut : 59.504 75.704 135.208 - 355.792 2 500.000 53.504 32.850 86.354 40.680 445.326 3 Taxable : 44.504 31.422 75.926 67.800 482.874 5 491.000 26.504 28.565 55.069 108.480 544.411

Cdlib. Brut : 135.440 249.494 384.934 - 606.066 2 1.000.000 129.440 115.645 245.085 40.680 786.595 3 Taxable : 120.440 97.810 218.250 67.800 840.,550

991.000 102.440 76.696 179.136 108.480 920.344

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48 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

TABLEAU V

Ressources disponibles : influence respective des irmp6ts et des prestations familiales.

Revenu Nombre brut d'enfants

C*lib. 94.000 86.564 94.000 86.564

100.000 2 94.000 92.365 134.680 133.045 100.000 3 94.000 93.416 161.800 161.216 5 94.000 94.000 202.480 202.480

C6ib. 191.000 160.629 191.000 160.629

200.000 2 191.000 174.592 231.680 215.272 21 012 49 3 191.000 183.536 258.800 251.336

5 191.000 191.000 299.480 299.480

C6lib. 291.000 230.816 291.000 230.816 2 291.000 251.936 331.680 292.616 300.000 3 291.000 262.364 358.800 330.164 5 291.000 281.172 399.480 389.652

C6lib. 391.000 293.304 391.000 293.304

400.000 2 391.000 328.291 431.680 368.971 4OO.OOO 3 391.000 338.719 458.800 406.519 5 391.000 359.575 499.480 468.055

C6lib. 491.000 355.792 491.000 355.792 2 491.000 404.646 531.680 445.326 5;00.000 3 491.000 415.074 558.800 482.874 5 491.000 435.931 599.480 544.411

C*lib. 991.000 606.066 991.000 606.066

1 million 2 991.000 745.915 1.031.680 786.595 3 991.000 772.750 1.058.800 840.550 5 991.000 811.864 1.099.480 920.344

du quotient familial suivant le revenu pour les revenus trbs 6lev~s. A l'inverse, on a souvent propose de faire varier les allocations fami- liales en fonction du revenu. Entre les deux imperfections existe une certaine compensation.

Si l'on ajoute que la constance des taux des allocations et celle du quotient pr~sentent le grand avantage de la simplicitY, I'ensemble de la 16gislation, pris en bloc, parait preferable a des systhmes com-

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Page 20: L'enfant et la famille devant l'impot

L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 49

TABLEAU VI Niveaux d'existence comparis. Influence respective de l'impdt

et des prestations familiales.

Revenu Nombre brut

d'enfants uoD

C61ib. 1 100 100 100 100

2 3 33 35,5 48 51 100.000 3 3,5 29 31 49 53 5 4,5 22 24 48 52

CBlib. 1 100 100 100 100 2 3 33 36 41 45

200.000 3 3,5 29 33 49 45 5 4 25 26 35 41

C2lib. 1 100 100 100 100

30.00 2 3 33 35 38 42

300.38 3 3,5 29 32 35 41 5 4 25 27 30 38

C61ib. 1 100 100 100 100 2 3 33 37 37 42

00.000 I 3 3,5 29 33 34 40 5 4 25 27 j 28 35

Cdlib. 1 100 00 100 100 2 3 33 38 36 41 500.000 3 3,5 29 33 33 39 5 4 25 27 27 34

Reveni C6~lib. 1 100 100 100 100

Ievenu 2 3 33 33 33 33 trbs 6leve3 Sla limite 3 3,5 29 29 29 29 5 4 22 22 22 22

portant plus de justice dans le d6tail, mais revenant au m~me rnsultat (1).

Vue d'ensemble. La formule de l'imp6t 1947 est inspir~e essentiel- lement par le souci de justice dans l'imp6t. Tou-

tefois, la n6cessit6 de simplification a conduit a adopter un barbme indipendant du revenu qui ddfavorise les bas revenus, en raison du trop faible abattement h la base.

(1) Les observations ci-dessus ne tiennent pas compte de la fraude dans l'imp6t. Mais, i vrai dire, aucun principe de 16Igislation ne peut prendre appui sur les entorses i cette m~me 16gislation.

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50 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

Les imperfections qui rtsultent de ce d~faut ont 6tt accrues: a) par l'emploi de larges tranches dans la progressivitt. Elles ne

reprisentent pas une amelioration sur les tarifs anttrieurs par petites tranches et crdent des anomalies qui sont imputtes A tort au quotient familial.

b) par la prdsentation du calcul. Pour des raisons de commo- dit6, le revenu n'est pas rdparti par le jeu du quotient. Cette r~par- tition mettrait en evidence l'tquit6 du systhme.

Le systhme semble devoir &tre conserve pour les raisons sui- vantes :

a) ses imperfections peuvent Ctre ais~ment corrigtes pour les trbs hauts revenus, par exemple, en sp~cifiant que le plafond assi- gn4 par le calcul pour le dtgr~vement procurt par un enfant sera rtduit de 1/5, 1/4, 1/3...

b) si les tarifs sont modifies, soit du fait de la variation des reve- nus et des prix, soit pour tout autre cause, il n'y a pas besoin de proc~der i un rajustement des charges de famille.

c) lorsque des enfants ont des revenus propres, ceux-ci ne sont pas totalis~s avec ceux de leurs parents ou tuteurs, mais imposts s~par~ment. Le quotient familial n'est qu'une d6l1gation de revenu en faveur d'un enfant, consecration d'un partage de fait.

d) l'imp6t c~dulaire est indgalement rdparti. L'absence d'abat- tement A la base pour les enfants est d~favorable aux families.

e) la progression du d~gr~vement quand le revenu augmente s'oppose a la fixitt des allocations familiales et lui sert en partie de compensation, permettant d'ajourner la solution d'un problUme doublement difficile.

Il semble du reste n~cessaire, en toute occasion, de lier les deux 16gislations ou, du moins, de tenir compte de l'autre lorsqu'on aborde l'une d'elles.

IV. LA CONTRIBUTION MOBILIERE.

La contribution mobilibre est assise sur une valeur locative fic- tive, fix~e d'aprbs les dimensions du logement et d'aprbs ses quali- tts (quartier, confort, etc...). L'~tablissement de ces valeurs loca- tives comporte un large arbitraire et les m~thodes d'estimation varient d'une commune a l'autre.

Jusqu'en 1945, de nombreuses communes ne proc~daient A aucun abattement pour charges de famille, suivant la conception indivi- dualiste 6tudide page 32. Cette disposition 6tait d'autant moins explicable qu'un abattement A la base 6tait op~r6 pour le chef de famille, assurant A la fois la progressivit6 (peut-atre insuffisante) et le caractbre personnel de l'imp6t.

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L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT 51

La justice dans l'imp6t 6tait moins r~alis&e encore que pour l'imp6t sur le revenu, puisque le cubage vital des enfants ne b~n&- ficiait d'aucun d~gr~vement et se trouvait ainsi tax& plus lourde- ment, comme un espace superflu.

La loi du 3 novembre 1944 prdvoit un minimum d'abattement t la base dans les conditions suivantes:

< Dans les chefs-lieux de d~partement, dans les villes comptant au moins 5.000 Ames de population agglombrde et dans toutes les communes oh il est proc~d6, sur la demande des conseils munici- paux, at un recensement i domicile des contribuables, la base de la contribution mobilibre est obtenue en retranchant obligatoirement du loyer matriciel de chaque redevable, pour chaque personne t

sa charge, une somme au moins 4gale au quotient convenablement arrondi du loyer matriciel moyen par douze fois le nombre moyen de personnes t charge par foyer. ?

Cet abattement minimum est si faible qu'il n'a guere que la valeur d'un symbole.

Imaginons une commune oti tous les contribuables auraient le mfme nombre de personnes a charge, mais se diff~rencieraient par le loyer matriciel. Les uns seraient au-dessus, les autres au-dessous. Il serait heureux de pouvoir ne taxer que les premiers, car les seconds seraient insuffisamment log~s.

Soit e 1 le loyer matriciel moyen. Soit ( p > le nombre de personnes a charge. Compte tenu de l'abattement t la base du contribuable lui-m~me,

l'abattement par personne a charge devrait Atre 6gal ~t , celui du contribuable 6tant 6gal & ce m~me chiffre.

Comme p est 4gal en moyenne a 2, on voit qu'il faudrait prendre pour diviseur 3 au lieu de 24, pour r~aliser l'6galite devant l'imp6t.

En introduisant la diversit6 dans le nombre des personnes, on trouverait un chiffre plus faible encore.

Toutefois, l'6galitt devant 1'imp6t n'exige pas l'assimilation totale d'un enfant i un adulte; une fraction pourrait convenir pour les trbs grands logements.

L'6galit6 devant l'imp6t est, en tous cas, loin d'etre assurde; les charges de famille sont lourdement surcharges sans justification.

Quant i l'iniquit6 resultant du fait que l'imp6t est assis sur un besoin essentiel, elle se trouve quelque peu att6nude, depuis que la crise des logements atteint une acuit4 sans prdcident. Si l'espace vital de chaque personne de la famille b~ndficie d'une exoneration totale, l'imp6t peut mime trouver une justification dconomique et sociale. II pourrait en effet jouer, dans la repartition des logements existants, le r6le actuellement confit i la taxe sur les logements insuffisamment occup~s, trbs imparfaitement appliqude.

Un projet de r~forme est i l'6tude pour remplacer la contribu- tion mobilibre par une taxe sur l'habitation.

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52 L'ENFANT ET LA FAMILLE DEVANT L'IMPOT

V. CONCLUSIONS GENERALES.

L'6volution qui s'est produite peu h peu dans les conceptions fiscales de l'imp6t personnel n'est pas achev~e. La 16gislation fis- cale, qui a longtemps pu ignorer l'existence de l'enfant, serait en contradiction avec le reste de la 16gislation si elle continuait a l'igno- rer totalement ou h lui accorder un d~gr~vement arbitraire, de nature ? consolider les principes pdrimbs en attfnuant leurs rigueurs.

Lorsque les diverses preoccupations : 6galit6 devant I'imp6t, jus- tice sociale, rendement financier A court ou h long terme, sont con- fusfment emmilhes dans les dfbats, ceux-ci ne pr~sentent pas la clart6 n~cessaire.

Il y a lieu 6galement de bien sfparer les questions suffisamment objectives se pr~tant assez bien a la mesure (par exemple, cubage vital dans I'imp6t sur l'habitation), des questions purement subjec- tives comme le tarif de la progressivit6.

La notion de niveau d'existence s'est, en particulier, affirmde, ces dernidres annies, avec une force croissante; elle sert d'appui solide pour l'application du principe de la progressivit~, mais dans sa premiere partie seulement.

Les sp~cialistes des questions fiscales savent que l'imp6t unique, si s~duisant par sa simplicit6, n'est pas realisable parce que l'6nor- mite de son tarif provoquerait des evasions massives, tandis que la dispersion de l'imp6t att~nue l'attrait de cette evasion.

Et, de m~me, il semble difficile que la compensation familiale se fasse par le seul moyen des allocations familiales ou d'une insti- tution 6quivalente. Les taux atteindraient des niveaux trop 6levfs pour pouvoir Atre facilement appliques.

On est done en droit de penser que la l1gislation fiscale doit $tre utilisde elle aussi et qu'elle doit, par suite, aller un peu plus loin que l'6galit6 devant l'imp6t.

Celle-ci ~tant loin d'etre encore assurde, nous l'avons vu, un champ de r(formes s'ouvre a la fiscalit6, particuli~rement en matibre d'imp6ts cdulaires et d'habitation.

Alfred SAUVY.

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