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Article original Les accouche ´ es sont-elles de potentielles donneuses d’ovocytes ? Are patients in the postpartum period potential egg donors? R. Cabry-Goubet *, M. Lombart, F. Scheffler-Garhieni, E. Lourdel, F. Carette, A. Devaux, H. Copin, M. Benkhalifa, P. Merviel Me ´decine et biologie de la reproduction, cytoge ´ne ´tique et CECOS de Picardie, CHU d’Amiens, 124, rue Camille-Desmoulins, 80000 Amiens, France Gyne ´ cologie Obste ´ trique & Fertilite ´ 42 (2014) 844–848 I N F O A R T I C L E Historique de l’article : Rec ¸u le 31 octobre 2013 Accepte ´ le 26 septembre 2014 Disponible sur Internet le 18 novembre 2014 Mots cle ´s : Don d’ovocytes Connaissances en suite de couches Moyens d’ame ´ lioration Keywords: Oocyte donation Knowledge after delivery Way to promote R E ´ S U M E ´ Objectifs. L’activite ´ relative au don d’ovocytes en France reste faible, du fait d’une nette insuffisance de dons par rapport aux couples en attente, responsable d’un tourisme procre ´ atif important vers diffe ´ rents pays europe ´ ens, principalement l’Espagne et la Gre ` ce. Dans ce contexte, le rapport de l’inspection ge ´ne ´ rale des affaires sociales (IGAS) rendu public en 2011 propose certaines pistes a ` explorer afin de reme ´ dier a ` cette situation : promotion du don par l’agence de la biome ´ decine, de ´ veloppement du don spontane ´. L’objectif principal de cette e ´ tude est l’e ´ valuation de l’e ´ tat des connaissances des femmes en suites de couches concernant le don d’ovocytes. L’objectif secondaire est l’identification de moyens permettant de garantir une meilleure information et de favoriser la de ´ marche de don. Patientes et me ´thodes. Nous avons mene ´ une e ´ tude prospective en distribuant un questionnaire anonyme aux patientes hospitalise ´es en suites de couches au centre hospitalier universitaire (service de gyne ´ cologie et d’obste ´ trique) et au po ˆle femme-enfant Victor-Pauchet d’Amiens, de de ´ cembre 2012 a ` janvier 2013. Re ´sultats. Deux cents cinquante-cinq questionnaires ont e ´ te ´ distribue ´s, 242 (94,9 %) ont pu e ˆtre analyse ´ s. Concernant l’e ´ valuation des connaissances des participantes sur le don d’ovocytes : 28 % n’en connaissent pas l’existence, 54 % ne savent pas a ` qui s’adresse ce don, 36 % ont connaissance qu’un traitement pre ´ alable est ne ´ cessaire, 9 % pensent que le don est re ´ mune ´ re ´ et 10 % qu’il n’est pas anonyme. Si 67 % des patientes sont favorables a ` cette de ´ marche, seules 35 % accepteraient de re ´ aliser un don. Concernant la diffusion de l’information, 88 % des patientes conside ` rent ne pas e ˆtre suffisamment informe ´ es, 64 % aimeraient pouvoir be ´ne ´ ficier d’informations comple ´ mentaires. Le professionnel de sante ´ ple ´ biscite ´ pour leur donner ces informations est le gyne ´ cologue (51 %), la sage-femme (37 %) et l’infirmie ` re (12 %). Discussion et conclusion. Si le don d’ovocytes est relativement bien connu des participantes, les modalite ´s de son de ´ roulement le sont moins, des informations spe ´ cifiques ne ´ cessitant d’e ˆtre encore diffuse ´ es. Les me ´ decins gyne ´ cologues et les sages-femmes ont une place centrale a ` tenir dans la diffusion de ces informations. Le de ´ veloppement de nouveaux moyens devrait favoriser ainsi le recrutement de donneuses spontane ´es d’ovocytes. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve ´ s. A B S T R A C T Objectives. In France, oocyte donation program is still underdeveloped because of lack of donors and this situation entails an important wave of cross border medical tourism to different European countries mainly Spain and Greece. In 2011, the General inspection of social affairs report recommended to the biomedicine agency to promote spontaneous oocyte donation via different channels of information to develop this national program. The main objective of this study is to assess the knowledge of women * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. Cabry-Goubet). Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.10.001 1297-9589/ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve ´s.

Les accouchées sont-elles de potentielles donneuses d’ovocytes ?

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Gynecologie Obstetrique & Fertilite 42 (2014) 844–848

Article original

Les accouchees sont-elles de potentielles donneuses d’ovocytes ?

Are patients in the postpartum period potential egg donors?

R. Cabry-Goubet *, M. Lombart, F. Scheffler-Garhieni, E. Lourdel, F. Carette, A. Devaux,H. Copin, M. Benkhalifa, P. Merviel

Medecine et biologie de la reproduction, cytogenetique et CECOS de Picardie, CHU d’Amiens, 124, rue Camille-Desmoulins, 80000 Amiens, France

I N F O A R T I C L E

Historique de l’article :

Recu le 31 octobre 2013

Accepte le 26 septembre 2014

Disponible sur Internet le 18 novembre 2014

Mots cles :

Don d’ovocytes

Connaissances en suite de couches

Moyens d’amelioration

Keywords:

Oocyte donation

Knowledge after delivery

Way to promote

R E S U M E

Objectifs. – L’activite relative au don d’ovocytes en France reste faible, du fait d’une nette insuffisance de

dons par rapport aux couples en attente, responsable d’un tourisme procreatif important vers differents

pays europeens, principalement l’Espagne et la Grece. Dans ce contexte, le rapport de l’inspection

generale des affaires sociales (IGAS) rendu public en 2011 propose certaines pistes a explorer afin de

remedier a cette situation : promotion du don par l’agence de la biomedecine, developpement du don

spontane. L’objectif principal de cette etude est l’evaluation de l’etat des connaissances des femmes en

suites de couches concernant le don d’ovocytes. L’objectif secondaire est l’identification de moyens

permettant de garantir une meilleure information et de favoriser la demarche de don.

Patientes et methodes. – Nous avons mene une etude prospective en distribuant un questionnaire

anonyme aux patientes hospitalisees en suites de couches au centre hospitalier universitaire (service de

gynecologie et d’obstetrique) et au pole femme-enfant Victor-Pauchet d’Amiens, de decembre 2012 a

janvier 2013.

Resultats. – Deux cents cinquante-cinq questionnaires ont ete distribues, 242 (94,9 %) ont pu etre

analyses. Concernant l’evaluation des connaissances des participantes sur le don d’ovocytes : 28 % n’en

connaissent pas l’existence, 54 % ne savent pas a qui s’adresse ce don, 36 % ont connaissance qu’un

traitement prealable est necessaire, 9 % pensent que le don est remunere et 10 % qu’il n’est pas anonyme.

Si 67 % des patientes sont favorables a cette demarche, seules 35 % accepteraient de realiser un don.

Concernant la diffusion de l’information, 88 % des patientes considerent ne pas etre suffisamment

informees, 64 % aimeraient pouvoir beneficier d’informations complementaires. Le professionnel de

sante plebiscite pour leur donner ces informations est le gynecologue (51 %), la sage-femme (37 %) et

l’infirmiere (12 %).

Discussion et conclusion. – Si le don d’ovocytes est relativement bien connu des participantes, les

modalites de son deroulement le sont moins, des informations specifiques necessitant d’etre encore

diffusees. Les medecins gynecologues et les sages-femmes ont une place centrale a tenir dans la diffusion

de ces informations. Le developpement de nouveaux moyens devrait favoriser ainsi le recrutement de

donneuses spontanees d’ovocytes.

� 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

A B S T R A C T

Objectives. – In France, oocyte donation program is still underdeveloped because of lack of donors and

this situation entails an important wave of cross border medical tourism to different European countries

mainly Spain and Greece. In 2011, the General inspection of social affairs report recommended to the

biomedicine agency to promote spontaneous oocyte donation via different channels of information to

develop this national program. The main objective of this study is to assess the knowledge of women

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

* Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (R. Cabry-Goubet).

http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.10.001

1297-9589/� 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

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after baby delivery about oocyte donation. The second objective is the identification of ways to assure

better information and to promote oocyte donation.

Patients and methods. – We conducted a prospective study with anonymous questionnaire distribution

to women after delivery at obstetrics/gynecology department of the Regional University Hospital

and Maternity-Children Unit ‘‘Victor-Pauchet’’ of Amiens, from December 2012 to January 2013.

Results. – Two hundred and fifty-five questionnaires were distributed and 242 of them were analyzed

(94.9%). About oocyte donation knowledge: 28% did not know it was possible, 45% did not know it was

legal in France, 54% did not know who was concerned and 36% know that a treatment is necessary, 9%

think that oocyte donation is paid and 10% it is non-anonymous. If 67% seems to be favorable to this

initiative, only 35% could accept to realize it. About information efficiency, 88% think not to receive

enough information, 64% would like to have more information. The health care professional wanted to

give this information is an obstetrician (51%), a midwife (37%) and a nurse (12%).

Discussion and Conclusion. – Oocyte donation program is misoriented due to a lack of information.

Obstetricians and midwives have an important educational and informative role to support oocyte

donation. Specific strategy of communication and valuable targeted information are needed to motivate

potential donor and achieve the objectives of the program.

� 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction

L’activite relative au don d’ovocytes en France reste faible, dufait d’une nette insuffisance de dons par rapport aux couples enattente. Les derniers chiffres de 2011 disponibles de l’Agence de laBiomedecine [1] font etat de 402 donneuses, ayant permis larealisation de 815 tentatives de fecondation in vitro. En prenant enconsideration les 303 transferts d’embryons congeles realises cettememe annee, 208 enfants sont donc nes en France en 2011 grace acette technique. En parallele, la liste des couples sollicitant un dond’ovocytes s’allonge : 1806 couples etaient inscrits en 2011 : ilaurait fallu 900 donneuses supplementaires pour repondre cetteannee-la a l’ensemble des besoins. Face a la demande croissantedes couples et au nombre insuffisant de donneuses en France, s’estdeveloppe le recours a des soins transfrontaliers avec l’apparitiond’un tourisme procreatif [2,3].

Les professionnels de sante ainsi que l’agence de labiomedecine ont pointe du doigt ce phenomene, et ont alertesur les eventuelles consequences de l’incapacite de la France asatisfaire les demandes de don d’ovocytes. Ainsi, une etudeapprofondie de la situation du don d’ovocytes en France meneepar l’IGAS [4] a ete dressee et rendue publique en 2011,proposant un certain nombre de recommandations et de pistesd’ameliorations. Tout d’abord, il semblerait que ce don soitmeconnu du grand public d’ou la mission confiee a l’agence de labiomedecine de promouvoir l’information du don. D’autre part, ilexisterait un grand nombre de dons dits « relationnels » quel’IGAS aimerait elargir a des dons spontanes et ainsi obtenir unediversification dans le recrutement des donneuses. Il a egalementete propose une meilleure repartition nationale de l’activite afinde reduire les inegalites territoriales pour les couples. Cesproblematiques ont largement ete evoquees au cours desconferences dans le cadre des 40 ans des CECOS et des18e journees de la FFER a Rouen.

L’objectif principal de cette etude est l’evaluation de l’etat desconnaissances des femmes en suites de couches concernant le dond’ovocytes. L’objectif secondaire est l’identification de moyenspermettant de garantir une meilleure information et de favoriser lademarche de don.

2. Patientes et methodes

Dans le cadre d’une etude prospective et transversale, nousavons distribue, sur une duree de deux mois en 2013, unquestionnaire anonyme aux patientes hospitalisees en suites decouches au centre hospitalier universitaire de gynecologie etd’obstetrique et au pole femme-enfant Victor-Pauchet d’Amiens.

Apres explications orales et ecrites par une sage-femme desobjectifs et acceptation de participer a l’etude, un questionnaireetait remis aux patientes au 2e ou 3e jour de leur hospitalisation.Les patientes le completaient alors individuellement. Le livretd’informations etabli par l’agence de la biomedecine [1] etaitensuite remis a la patiente avec les coordonnees du CECOS dePicardie, un temps de parole etant alors donne pour fournir desexplications plus specifiques aux patientes interessees et pourrepondre aux questions eventuelles posees par celles-ci.

Ce questionnaire, presente dans sa totalite en Annexe 1 :comportait quatre parties :

� la premiere etablissait les caracteristiques des participantes :age, parite, problemes d’infertilite (a titre personnel et/oumembres de l’entourage) ;� la seconde portait sur l’evaluation de leurs connaissances sur le

don d’ovocytes : connaissance du don, de ses aspects legaux, desindications, des conditions prealables a sa realisation, de sonderoulement et des lieux de sa realisation ;� la troisieme s’interessait a leur opinion sur le don : avis quant a la

realisation d’un don, motivations en cas d’acceptation derealisation ou raisons en cas de refus ;� la derniere portait sur la diffusion de l’information a apporter :

appreciation de la diffusion de l’information, moyens d’informa-tions a developper, moments et professionnels adaptes.

Le logiciel « Epi InfoTM 354 » a ete utilise pour la creation duquestionnaire et le logiciel « Excel 5.0, Microsoft1 » pour la saisiedes donnees, leurs interpretations statistiques et la realisation desgraphiques. L’analyse statistique des resultats a ete effectuee par lamethode du Chi2 pour les variables qualitatives et test t de Studentpour les variables quantitatives. Le seuil de significativite a etedefini pour un p < 0,05.

3. Resultats

Nous avons distribue au total 255 questionnaires : 244 nous ontete rendus. L’analyse a porte sur 242 questionnaires, 2 ayant eteexclus car consideres ininterpretables. Les maternites ou cetteetude s’est deroulee ont realise, sur cette meme periode,823 accouchements : les questionnaires analyses representantdonc 30 % des patientes en suites de couches.

3.1. Caracteristiques des participantes

L’age moyen des participantes est de 28,3 ans [19–42] : 24 % ontmoins de 25 ans, 46 % ont entre 25 et 30 ans, 22 % ont entre 31 et

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37 ans et 8 % ont 38 ans ou plus. La majorite des femmes sontprimipares (58 %), 22 % ayant deux enfants, 14 % trois enfants et 6 %quatre enfants.

Vingt-sept pour cent des patientes interrogees ont connu desproblemes d’infertilite : 10 % de ces problemes les concernaient atitre personnel, 12 % concernaient leurs familles et 5 % desmembres de leurs connaissances.

3.2. Evaluation des connaissances des participantes sur le don

d’ovocytes

L’evaluation des connaissances des participantes sur le dond’ovocytes dresse le tableau suivant :

� connaissance du don d’ovocytes : 28 % des participantesdeclarent n’avoir jamais entendu parler du don d’ovocytes. Lespatientes ayant connu des problemes d’infertilite (personnels,familiaux ou membres de leurs connaissances) ont statistique-ment plus connaissance de l’existence de ce don (p < 0,05). Lessupports d’informations par lesquels les participantes ontentendu parler du don d’ovocytes sont pour 60 % les medias(television, radio, journaux), 14 % Internet, 12 % les profession-nels de sante et 14 % autres ;� connaissance des personnes concernees par le don d’ovocytes :

46 % des participantes savent quelles sont les personnesconcernees par le don ;� connaissance des aspects legaux du don d’ovocytes : 54 % ont

connaissance de la legalite du don, 82 % de sa gratuite et 80 % desconditions d’anonymat. Concernant la gratuite et l’anonymat,respectivement 9 et 10 % n’ont pas repondu a la question : 9 % ontdonc repondu que le don est remunere et 10 % qu’il n’est pasanonyme ;� connaissancedesconditionspourpouvoiretredonneused’ovocytes:

76 % ont repondu qu’il avait une limite d’age. Cinquante-deux pourcent ignorent qu’une maternite anterieure est actuellementobligatoire et 60 % ont indique l’obligation d’etre en couple (17 %des participantes n’ayant pas repondu a cette question) ;� connaissance du deroulement d’un don d’ovocytes : 4 % ont

connaissance de la necessite d’une consultation prealable, 29 %de la possibilite d’une anesthesie, 14 % de la necessite d’unehospitalisation de jour, 36 % qu’un traitement prealable estrealise et 24 % que ce traitement se fait par injections. Lesresultats obtenus (bonnes reponses/mauvaises reponses/absences de reponses) concernant ces differents items sontpresentes dans la Fig. 1 (Fig. 1 : connaissances des participantes

Fig. 1. Connaissances des participantes sur les mo

sur les modalites du deroulement d’un don d’ovocytes). Laconfrontation a des problemes d’infertilite (personnels, famil-iaux ou membres de leurs connaissances) n’est pas statistique-ment associee a une meilleure connaissance du deroulementd’un don d’ovocytes ;� connaissance des structures ou le don d’ovocytes peut etre

realise : 65 % des participantes ont repondu que le don se realisaitdans une structure specialisee, 29 % que le don pouvait se realiserdans n’importe quel hopital et 6 % que le don pouvait se pratiquerdans un cabinet medical.

3.3. Opinion des participantes sur le don d’ovocytes

Soixante-sept pour cent se montrent favorables a cettedemarche, 5 % y sont opposees et 28 % n’ont pas d’opinion.Quatre-vingt-cinq participantes (35 %) accepteraient de realiser undon d’ovocytes. Parmi elles, 27 n’avaient jamais entendu parler dudon d’ovocytes. Les motivations evoquees par les patientes quiaccepteraient de realiser un don d’ovocytes sont : l’altruisme (49 %),la gratitude (17 %), la necessite (16 %), le besoin (15 %) et autres (3 %).

Au total, 150 (62 %) refuseraient de realiser un don d’ovocytes.Les causes evoquees par les patientes qui refuseraient de faire undon sont : le besoin d’informations complementaires (32 %), la peurdes complications (22 %), la peur d’une sterilite secondaire (13 %),des motifs ethiques (13 %), le manque de disponibilite (10 %), lesautres causes (7 %) et des motifs religieux (3 %).

3.4. Diffusion de l’information

Quatre-vingt-huit pour cent des participantes ne se sentent passuffisamment informees sur le don d’ovocytes, 10 % considerantque l’information est largement diffusee.

Soixante-quatre pour cent sont demandeuses d’informationscomplementaires. La remise d’un livret d’informations est plebis-citee par 56 %, la rencontre avec un professionnel de sante par 17 %,l’organisation d’un forum d’informations par 12 % et l’orientationvers un site Internet par 14 % d’entre elles.

Quatre-vingt-trois pour cent estiment que plus d’informationsdevraient etre delivrees en maternite. Selon elles, le moment leplus opportun serait lors des consultations de suivi gynecologique(58 %), lors des cours de preparation a la naissance (18 %), lors del’hospitalisation en suites de couches (11 %), lors des consultationsprenatales (7 %) et lors des consultations postnatales (6 %). Leprofessionnel qui serait le plus habilite a delivrer ces informations

dalites du deroulement d’un don d’ovocytes.

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est le gynecologue (51 %), la sage-femme (37 %) et l’infirmiere(12 %).

4. Discussion

Les derniers chiffres de 2011 de l’agence de la biomedecine [1]retrouvent une augmentation du recrutement des donneuses parrapport aux annees precedentes : 328 donneuses en 2009, 356 en2010 et 402 en 2011. Les modes de recrutement des donneusessont au centre des reflexions visant a developper le don d’ovocytes,leur diversification etant une mesure phare envisagee par l’IGASdans son rapport afin de developper les dons spontanes. Dans lalitterature, du fait des conditions legales differentes selon les pays,il est considere, en plus des donneuses dıtes « volontaires »realisant un don altruiste, les donneuses dıtes « relationnelles »realisant un don direct (non anonyme) et les donneuses dıtes« commerciales » etant remunerees par le fait de faire un don [5]. LeLannou [6] rapporte quant a lui trois modes de recrutementdifferents des donneuses en France :

� les donneuses spontanees (5 % des donneuses) souventsensibilisees par les medias, generalement donneuses de sang,de plaquettes ou de moelle osseuse ;� les donneuses par reciprocite (10 % des donneuses) qui realisent

un don d’ovocytes apres avoir beneficie d’un don de sperme ;� les donneuses relationnelles, sensibilisees par leur entourage,

representant actuellement la plus grande part du recrutement(85 % des donneuses), posant la question d’eventuelles remu-nerations occultes, a l’encontre du principe de gratuite du don.

Afin que se developpent les dons spontanes, l’augmentation del’information faite au grand public est necessaire. Cette mission aete confiee a l’agence de la biomedecine. Par notre etude, nousavons pu mettre en evidence que le don est connu par 82 % desfemmes de cette population cible des donneuses potentielles. Lespatientes ayant deja ete confrontees a des problemes d’infertilite atitre personnel ou au titre de l’entourage ont statistiquement unemeilleure connaissance de l’existence du don d’ovocytes (p < 0,05).Cependant, malgre cette relative bonne connaissance de l’exis-tence du don, de sa gratuite (82 %), et des conditions d’anonymat(80 %), les modalites de deroulement du don paraissent moins bienconnues : la necessite d’un traitement prealable n’etant connu quepar 36 % d’entre elles. Nous noterons egalement que 54 % desparticipantes ne savent pas a qui ce don est destine.

L’agence de la biomedecine a developpe, depuis 2008, desactions d’information sur l’AMP incluant le don d’ovocytes enciblant les couples ayant eu recours a l’AMP, les couples feconds etles professionnels de sante. Un document d’information [1] a etealors distribue a 1,2 millions d’exemplaires pour le grand public, etune brochure [1] a ete diffusee aux professionnels de sante descentres d’AMP, des maternites et des gynecologues liberaux. Cettepremiere campagne a engendre une augmentation d’articles depresse concernant le don d’ovocytes qui a touche davantage legrand public. Toujours dans cette dynamique, depuis 2010 a etemis en place un numero vert ou des tele-conseillers renseignent lesdonneuses potentielles et leur envoient un document d’informa-tions [1]. La mission parlementaire d’information sur la revisiondes lois de bioethiques de janvier 2010 a recommande la poursuitede ces actions d’informations : un budget de 2,4 millions d’eurosetait prevu en ce sens pour la periode 2011–2013 [7]. Notre etudesuggere que le travail d’informations pourrait etre desormais pluscible sur les aspects pratiques du deroulement d’un don d’ovocyteset les centres ou celui-ci pourrait etre realise.

Si la pratique du don d’ovocytes semble dans notre etude pour laplupart des participantes acceptee, 67 % se montrant favorables, elle a

longtemps fait debat dans notre societe [8,9]. Cependant, seules 35 %des participantes de notre etude favorables au don d’ovocytes sedisent pretes a realiser une demarche de don. Svander, en 2003,rapportait que 17 % (n = 120) des femmes interrogees dans son etudeseraient pretes a envisager la realisation d’un don d’ovocytes[10]. Plus recemment Brett, en 2008, retrouvait 43 % de patientesavec intention de donner mais sur un faible echantillon (n = 18)[11]. Les principales raisons avancees pour la realisation d’un donsont l’altruisme [12–14] et l’aspect financier [15–17]. La recentemeta-analyse menee par Purewal sur 64 etudes sur les attitudes faceau don d’ovocytes et les motivations pour la realisation de celui-ci [5],fait etat d’un nombre important de donneuses susceptibles derealiser une demarche de don considerees comme des « donneusespotentielles » (30 a 50 % selon les etudes). Cependant, malgre le faitque de nombreuses etudes, realisees dans des pays de legislations etcultures differentes, aient retrouve que le don d’ovocytes etaitconsidere comme une attitude positive [18], le nombre de donneusesreste faible. Les facteurs suivants ont ete reconnus commeinfluencant l’intention de realiser un don d’ovocytes : l’experiencede l’infertilite [19], l’absence d’attachement religieux [20] et laperception non importante du lien genetique entre parents et enfants[10,21]. Parmi les participantes de notre etude qui n’accepteraientpas la realisation d’un don, 32 % evoquent un besoin d’informationscomplementaires. La encore, nous pouvons penser que l’ameliorationde la diffusion de l’information au grand public permettrait acertaines femmes de choisir la realisation d’un don. Nous pouvonsremarquer que les motifs ethiques et religieux ne representent autotal que 13 % des refus et que le manque de disponibilite, souventavance, n’est evoque que pour 10 % des refus de realisation d’un don.

L’identification de moyens permettant de garantir une meil-leure information et favoriser la demarche de don est doncprimordiale. Ainsi, 88 % des participantes a notre etude ne sesentent pas suffisamment informees sur celui-ci. Nous avons ainsipu remarquer que les medias tiennent une part importante dansles supports a developper ainsi qu’Internet par le biais de sites,forums et blogs specifiques. Les maternites sont egalement un lieud’appui pour la circulation de l’information : 83 % des participantesa notre etude pensent que la maternite tient une place centrale. Lemoyen d’information le plus plebiscite par les participantes est laremise d’un livret d’informations, qui a le merite d’etre simple,rapide et peu couteuse. La derniere revision de la loi de bioethiquestipule en particulier que les gynecologues et les medecinstraitants ont une obligation d’information sur le don d’ovocytes.Les sages-femmes peuvent avoir egalement un role important dansla transmission de cette information, non seulement en maternite,mais egalement en milieu liberal.

L’equipe anglaise de Purewal et Van Den Akker s’est particu-lierement penchee sur l’attitude des couples dans le cadre des donsde gametes, en se fondant sur la « Theorie du comportementplanifie » (« Theory of Planned Behaviour ») [18]. Cette theorie vise aexpliquer les comportements a partir de trois elements : lesattitudes par rapport au comportement en question (jugementpersonnel sur le comportement en question et ses consequences),le sentiment d’auto-efficacite (croyance du sujet sur sa capacite areussir le comportement en question) et les normes sociales(influence et opinions des proches sur le comportement enquestion) [22]. Cette theorie a ainsi ete appliquee a unquestionnaire dans le cadre du don d’ovocytes avec explorationde cinq items [21] : attitudes face au don d’ovocytes, attitudes faceaux consequences du don d’ovocytes, normes sociales, controle desoi et intention de donner. Ainsi, dans un pays ou le « egg-sharing »(partage d’ovocytes au cours d’une fecondation in vitro) estlargement pratique [23], cette equipe a essaye d’identifier le profildes donneuses altruistes : parmi 349 femmes agees en moyenne de27,8 ans, un tiers se considerait comme de potentielles donneuses,un tiers comme des donneuses possibles et un tiers comme

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non-donneuses [21]. L’age, le statut marital et le niveau socio-economique n’apparaissaient pas comme des elements discrimi-nants dans l’intention de donner. Dans cette etude, la nullipariteetait un facteur significatif de non-intention de donner tandis quela confrontation a des problemes d’infertilite et le souhait deconstituer soi-meme une famille etaient des facteurs d’intentionde donner [21].

Dans une etude publiee en 2006, Purewal [24] s’est egalementinteressee aux differentes attitudes vis-a-vis du don d’ovocytes dedeux populations en Grande-Bretagne de niveau socioeconomiqueidentique mais d’origines ethniques differentes : 101 femmes (55 %d’origine asiatique et 45 % d’origine caucasienne) avaient ainsirepondu a un questionnaire s’interessant a leur attitude vis-a-visdu don d’ovocytes : 5 ont ete identifiees comme « donneusesprobables », 41 comme « donneuses possibles » et 54 comme « non-donneuses ». Il n’avait pas pu etre mis en evidence dans cette etudede difference significative sur le statut de donneuse entre lesorigines ethniques des patientes. Cependant, il avait ete retrouveune plus grande importance concernant la place de l’enfant, le liengenetique et le maintien d’une relation entre donneuse et couplesreceveurs chez les participantes d’origine asiatique (p < 0,05).

Les modifications des textes de loi concernant l’anonymat desdonneurs, comme en Grande-Bretagne en 2005, se sont accom-pagnees d’une crainte de voir le nombre de donneuses diminuer[25,26]. Les chiffres recents dans cette population retrouvent unmanque de donneuses, mais pas plus que dans les autres payseuropeens, le nombre de donneuses annuelles n’ayant que peuchute [27,28]. Certains auteurs rapportent que 89 % de leursdonneurs anonymes continueraient a donner meme s’ils nedevaient pas rester anonymes [29].

5. Conclusion

Les campagnes d’information recemment menees par l’agencede biomedecine ont permis une meilleure connaissance dudon d’ovocytes des femmes potentiellement concernees et desprofessionnels de sante. Si le don d’ovocytes paraıt relativementbien connu, les informations concernant les modalites de sarealisation doivent encore etre diffusees, les maternites ayantun role majeur a jouer. Ces mesures devraient favoriser lerecrutement des donneuses spontanees.

Declaration d’interets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits d’interets enrelation avec cet article.

Annexe 1. Materiel complementaire

Le materiel complementaire (Annexe 1 : questionnaire remisaux participantes) accompagnant la version en ligne de cet articleest disponible sur http://www.sciencedirect.com et http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.10.001.

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