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Article original Les conséquences socioéconomiques de l’arthrose en France. Étude COART 1 France Financial cost of osteoarthritis in France -The “COART” France Study e Claude Le Pen a,* , Camille Reygrobellet a , Isabelle Gérentes b a Aremis Consultants, 10, rue Beffroy, 92200 Neuilly-sur-Seine, France b Laboratoires Negma-Lerads, immeuble Strasbourg, avenue de l’Europe Toussus-Le-Noble, 78771 Magny-les-Hameaux, France Reçu le 14 mai 2004 ; accepté le 31 janvier 2005 Disponible sur internet le 08 juin 2005 Résumé Objectif. – Reconnue comme l’affection rhumatismale la plus fréquente, l’arthrose concernerait environ neuf à dix millions de personnes en France dont 4,6 millions présentent une arthrose symptomatique. L’étude COART ® France a comme objectif d’évaluer l’impact écono- mique de la pathologie pour la collectivité et de le comparer avec une estimation réalisée en 1993 selon la même méthodologie. Matériel et méthode. – Le coût de l’arthrose a été évalué selon l’approche macroéconomique à partir des données de consommations de soins (consultations, prescriptions médicamenteuses, hospitalisations) et d’une estimation des coûts indirects (arrêts de travail). Résultats. – Les coûts directs de l’arthrose représentaient en 2002 plus de 1,6 milliard d’euros, soit environ 1,7 % des dépenses de l’assurance maladie. La moitié de ces dépenses était attribuable à la prise en charge hospitalière, avec plus de 800 millions d’euros. 13 millions de consultations ont été effectués annuellement et les coûts des prescriptions médicamenteuses ont représenté 570 millions d’euros. La progression des coûts médicaux directs par rapport à 1993 (+ 156 %) s’explique essentiellement par la croissance du nombre de patients traités (+ 54 %), le coût par patient s’étant accru de 2,5 % par an. Conclusion. – Malgré le fort accroissement de la population traitée et l’apparition de nouvelles classes thérapeutiques, l’augmentation des coûts de la pathologie apparaît bien maîtrisée. Le vieillissement démographique, le développement des techniques et les exigences des patients devraient être parmi les déterminants de l’impact futur de la maladie, et font de cette pathologie un problème majeur de santé publique. © 2005 Publié par Elsevier SAS. Mots clés : Coûts de l’arthrose ; Dépenses de santé ; Anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente ; Vieillissement Keywords: Osteoarthritis costs; Health expenses; Symptomatic slow-acting drugs; Ageing; COART France 1. Introduction L’arthrose est la principale cause de morbidité dans les pays développés [1]. Quand elle devient symptomatique, cette pathologie entraîne douleur, raideur articulaire, invalidité par- tielle ou totale pouvant affecter le patient arthrosique dans ses activités habituelles et altérer sa qualité de vie. Les mala- dies du système ostéoarticulaire, principalement l’arthrose et les affections rachidiennes et discales, apparaissent comme la deuxième cause d’invalidité après les maladies cardiovas- culaires [2]. Sa prévalence s’élève à environ 17 % soit, en France, entre neuf et dix millions de personnes qui seraient concernées [3], dont la moitié est symptomatique. Chaque année, environ 4,6 millions de personnes consultent, en France, pour ce motif [4]. Plus de 80 % des patients arthro- siques ont plus de 50 ans et le sex-ratio est de deux femmes pour un homme [1,3,5]. La prise en charge de l’arthrose vise à agir d’une part sur la symptomatologie en soulageant le patient, en limitant la gêne fonctionnelle et l’invalidité, et d’autre part si possible sur la progression de la maladie en limitant la dégradation du cartilage [6–11]. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Le Pen). 1 Etude sur les COûts de l’ARThrose en France, rapport réalisé sur l’ini- tiative des laboratoires NEGMA-LERADS. e Pour citer cet article, utiliser ce titre en anglais et sa référence dans le même volume de Joint Bone Spine. Revue du Rhumatisme 72 (2005) 1326–1330 http://france.elsevier.com/direct/REVRHU/ 1169-8330/$ - see front matter © 2005 Publié par Elsevier SAS. doi:10.1016/j.rhum.2005.01.016

Les conséquences socioéconomiques de l'arthrose en France. Étude COART France

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Article original

Les conséquences socioéconomiques de l’arthrose en France.Étude COART 1 France

Financial cost of osteoarthritis in France -The “COART” France Study e

Claude Le Pen a,*, Camille Reygrobellet a, Isabelle Gérentes b

a Aremis Consultants, 10, rue Beffroy, 92200 Neuilly-sur-Seine, Franceb Laboratoires Negma-Lerads, immeuble Strasbourg, avenue de l’Europe Toussus-Le-Noble, 78771 Magny-les-Hameaux, France

Reçu le 14 mai 2004 ; accepté le 31 janvier 2005

Disponible sur internet le 08 juin 2005

Résumé

Objectif. – Reconnue comme l’affection rhumatismale la plus fréquente, l’arthrose concernerait environ neuf à dix millions de personnesen France dont 4,6 millions présentent une arthrose symptomatique. L’étude COART® France a comme objectif d’évaluer l’impact écono-mique de la pathologie pour la collectivité et de le comparer avec une estimation réalisée en 1993 selon la même méthodologie.

Matériel et méthode. – Le coût de l’arthrose a été évalué selon l’approche macroéconomique à partir des données de consommations desoins (consultations, prescriptions médicamenteuses, hospitalisations) et d’une estimation des coûts indirects (arrêts de travail).

Résultats. – Les coûts directs de l’arthrose représentaient en 2002 plus de 1,6 milliard d’euros, soit environ 1,7 % des dépenses del’assurance maladie. La moitié de ces dépenses était attribuable à la prise en charge hospitalière, avec plus de 800 millions d’euros. 13 millionsde consultations ont été effectués annuellement et les coûts des prescriptions médicamenteuses ont représenté 570 millions d’euros. Laprogression des coûts médicaux directs par rapport à 1993 (+ 156 %) s’explique essentiellement par la croissance du nombre de patients traités(+ 54 %), le coût par patient s’étant accru de 2,5 % par an.

Conclusion. – Malgré le fort accroissement de la population traitée et l’apparition de nouvelles classes thérapeutiques, l’augmentation descoûts de la pathologie apparaît bien maîtrisée. Le vieillissement démographique, le développement des techniques et les exigences des patientsdevraient être parmi les déterminants de l’impact futur de la maladie, et font de cette pathologie un problème majeur de santé publique.© 2005 Publié par Elsevier SAS.

Mots clés : Coûts de l’arthrose ; Dépenses de santé ; Anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente ; Vieillissement

Keywords: Osteoarthritis costs; Health expenses; Symptomatic slow-acting drugs; Ageing; COART France

1. Introduction

L’arthrose est la principale cause de morbidité dans lespays développés [1]. Quand elle devient symptomatique, cettepathologie entraîne douleur, raideur articulaire, invalidité par-tielle ou totale pouvant affecter le patient arthrosique dansses activités habituelles et altérer sa qualité de vie. Les mala-dies du système ostéoarticulaire, principalement l’arthrose et

les affections rachidiennes et discales, apparaissent commela deuxième cause d’invalidité après les maladies cardiovas-culaires [2]. Sa prévalence s’élève à environ 17 % soit, enFrance, entre neuf et dix millions de personnes qui seraientconcernées [3], dont la moitié est symptomatique. Chaqueannée, environ 4,6 millions de personnes consultent, enFrance, pour ce motif [4]. Plus de 80 % des patients arthro-siques ont plus de 50 ans et le sex-ratio est de deux femmespour un homme [1,3,5].

La prise en charge de l’arthrose vise à agir d’une part surla symptomatologie en soulageant le patient, en limitant lagêne fonctionnelle et l’invalidité, et d’autre part si possiblesur la progression de la maladie en limitant la dégradation ducartilage [6–11].

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (C. Le Pen).

1 Etude sur les COûts de l’ARThrose en France, rapport réalisé sur l’ini-tiative des laboratoires NEGMA-LERADS.

e Pour citer cet article, utiliser ce titre en anglais et sa référence dans lemême volume de Joint Bone Spine.

Revue du Rhumatisme 72 (2005) 1326–1330

http://france.elsevier.com/direct/REVRHU/

1169-8330/$ - see front matter © 2005 Publié par Elsevier SAS.doi:10.1016/j.rhum.2005.01.016

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Selon une étude publiée en 1993 [12], les coûts directs etindirects de la maladie s’élevaient à presque 1 milliardd’euros. L’étude COART® France a permis de réactualiserles connaissances de l’impact de la pathologie sur les dépen-ses de santé et de connaître les déterminants qui ont participéà l’évolution de son coût sur les dix dernières années.

2. Méthodologie

Les coûts médicaux directs et indirects de l’arthrose ontété évalués en utilisant les dernières données nationales dis-ponibles de recours aux soins de ville, aux hospitalisations etaux arrêts de travail résultant de cette pathologie sur la période2001–2003. Afin de relier les consommations de soins à lapathologie arthrosique, les différents types et localisationsd’arthrose ont fait l’objet d’une recherche parmi les maladiesdu système ostéoarticulaire de la dixième révision de la Clas-sification Internationale des Maladies [Tableau 1]. Les dia-gnostics correspondant à l’arthrose périphérique (M15-M19)et rachidienne (M47) ont été retenus.

Les consultations et prescriptions correspondant à ces dia-gnostics ont été relevées parmi les Etudes Permanentes de laPrescription Médicale (EPPM) provenant de panels recon-nus de médecins, puis agrégées.

Pour les hospitalisations, le Programme de médicalisationdes systèmes d’information (PMSI1) permet de recueillir lesdonnées médicales et comptables auprès des établissementshospitaliers publics ou privés, par l’intermédiaire des Résu-més de Sortie Standardisés réalisés pour chaque patient, qu’ilait fréquenté une ou plusieurs unités médicales. Les diagnos-tics retenus pour arthrose ont fait l’objet d’une rechercheparmi les bases du PMSI afin de définir les Groupes homo-gènes de malades (GHM) correspondants [Tableau 1]. Lesdonnées de soins ont ensuite été reliées aux échelles de coûtspubliques et privées2 et afin d’obtenir le coût des hospitalisa-tions pour les diagnostics retenus.

Traditionnellement, les coûts indirects sont, de part la diver-sité de leur composition, plus difficilement évaluables quelleque soit la pathologie considérée. Dans le cas de l’arthrose,les coûts indirects relatifs aux arrêts de travail ont été consi-dérés à partir des indemnités journalières des caisses d’assu-rance maladie associées au diagnostic d’arthrose.

La perspective considérée a été celle de l’assurance mala-die.

3. Résultats

3.1. La consommation de soins

• Plus de 13 millions de consultations correspondant au dia-gnostic d’arthrose ont été réalisées, principalement chezles médecins généralistes (91 %) et chez les rhumatolo-gues (8 %). Valorisées sur les tarifs du secteur un, cesconsultations ont engendré des dépenses de 270 millionsd’euros annuels et étaient accompagnées en moyenne de1,5 prescriptions par patient.

• Les traitements médicamenteux de l’arthrose provenaientde 18 millions de prescriptions annuelles, dont presquesept millions d’antalgiques (41 %), 3,5 millions d’anti-arthrosiques (21 %) suivis de 1,8 millions d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) non spécifiques(11 %), du même nombre de prescriptions pour les AINSinhibiteurs spécifiques de la cyclooxygénase 2 (11 %) etde 0,5 million de protecteurs gastriques (4 %), prescritspour prévenir les complications des AINS. Les baumes etles corticoïdes injectables ont été également prescrits dansl’arthrose mais dans une moindre proportion [Tableau 2].En considérant le taux de prescription moyen pour arth-rose des différentes classes thérapeutiques par spécialitésde médecins, les antiarthrosiques symptomatiques d’actionlente, les AINS inhibiteurs de la cyclooxygénase 2 et lescorticoïdes injectables ont été plus spécifiquement issusdes ordonnances des rhumatologues.Les dépenses de traitements médicamenteux de l’arthrosese sont élevées à plus de 570 millions d’euros, le premierposte de coût étant celui des AINS associés aux protec-teurs gastriques, qui a représenté 43 % des coûts (245 mil-lions d’euros). En seconde position se trouvaient les anti-arthrosiques avec 207 millions d’euros (36 % des coûts detraitement) suivis des antalgiques avec 106 millions d’euros(18 %) [Tableau 2].

• Les examens complémentaires réalisés en ambulatoire(radiographies, analyses de laboratoire...) n’ont pas étéconsidérés dans cette analyse car ces examens ne sont pasobligatoirement prescrits pour confirmer ou infirmer undiagnostic d’arthrose et, par conséquent, difficiles à comp-tabiliser. En revanche, les examens effectués à l’hôpitalont fait l’objet d’une évaluation par l’intermédiaire du coûtdes séjours hospitaliers.

• Les hospitalisations pour arthrose ont entraîné une dépenseannuelle de 820 millions d’euros, soit 1,2 % des dépenses

Tableau 1Critères de recherche des coûts directs

Postes de coûts directs estimés Diagnostics recherchés(Classification Internationale des Maladies X)

Consultations et traitements médicamenteux M15 : PolyarthroseM16 : CoxarthroseM17 : GonarthroseM18 : Arthrose de la première articulation carpo-métacarpienneM19 : Autres arthrosesM47 : Spondylarthrose

Hospitalisations Les diagnostics M15, M16, M17, M18, M19 et M47 ont été retrouvés dans les GHM 294, 295, 301, 303,305, 307, 318, 343, 344, 345, 357 et 770

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hospitalières de l’assurance maladie. Le nombre d’hospi-talisations a progressé de presque 40 %, principalementpour des interventions chirurgicales, majoritairement desarthroplasties de hanche ou de genou. Environ 80 000 pro-thèses de hanche et 38 000 prothèses de genou sont poséeschaque année en première intention, avec un coût unitaired’hospitalisation d’environ 5600 et 4500 euros respective-ment. En France, environ 360 000 personnes de plus de75 ans vivent avec une prothèse de hanche 3].

• Chez les personnes en activité, l’arthrose apparaît commel’une des principales causes d’incapacité totale ou par-tielle au travail, et représente un problème socioéconomi-que dont l’impact sur la productivité est loin d’être négli-geable. Réparties à 88 % dans l’arthrose des membres, plusde cinq millions de journées d’arrêt maladie ont été attri-buées à cette pathologie, soit 2,56 % des arrêts de travailtout diagnostic confondu. Les dépenses d’indemnités jour-nalières pour cette pathologie ont été valorisées à 180 mil-lions d’euros.Actuellement, en considérant la population arthrosique

symptomatique en France, un patient consulte en moyennetrois fois par an pour sa pathologie et obtient une prescriptionà l’issue de sa consultation dans 94 % des cas. Les hospitali-sations concernent une petite proportion de patients arthrosi-ques (3 %) mais représentent la moitié des coûts de l’arth-rose. Le coût moyen annuel d’un patient hospitalisé est plusde 30 fois supérieur au coût d’un patient ne subissant pasd’hospitalisation soit 5800 vs 181 euros respectivement. Lescoûts directs de l’arthrose s’élèvent à 1,6 milliards d’eurosannuels, répartis pour moitié entre les soins de ville et leshospitalisations [Fig. 1]. Ces dépenses ont représenté 1,7 %des dépenses de santé de l’assurance maladie en France soitune part similaire à celle des cardiopathies ischémiques.

3.2. Evolution 1993–2003

Sur les dix dernières années, la population arthrosiquesymptomatique a progressé de 54 %, passant de trois mil-lions de personnes symptomatiques à 4,6 millions de person-nes actuellement. Sur cette même période, le coût de la patho-logie a connu une progression supérieure. Les recours aux

consultations pour arthrose ont suivi l’évolution de la popu-lation arthrosique (+54 %). Si les prescriptions pour arthroseont augmenté d’environ 40 %, les dépenses médicamenteu-ses ont, elles, été multipliées par quatre. En effet, l’arrivée deproduits relativement plus chers que les médicaments de lamême classe thérapeutique a contribué à la croissance desdépenses pharmaceutiques de l’arthrose.Ainsi, lesAINS inhi-biteurs spécifiques de la cyclooxygénase 2 se sont substituéspour 50 % aux prescriptions des AINS classiques et les inhi-biteurs de la pompe à protons sont apparus comme les pre-miers protecteurs gastriques retrouvés dans l’arthrose. La misesur le marché de traitements médicaux chers utilisés au longcours comme les inhibiteurs de la COX2 ou comme les pro-tecteurs gastriques en association aux AINS s’est accompa-gnée d’une augmentation des coûts de traitement. Les anti-arthrosiques sont apparus comme les deuxièmes produits lesplus prescrits après les analgésiques et devant les AINS quioccupaient cette place jusqu’en 1999. Malgré leurs prescrip-tions fréquentes, le poids des anti-arthrosiques dans les dépen-ses médicamenteuses pour arthrose a diminué d’environ dixpoints sur dix ans.

Enfin, le nombre d’hospitalisations, avec l’accroissementdu recours aux arthroplasties de hanche ou de genou, a pro-gressé d’environ 40 % sur cette même période. En parallèle,la population arthrosique ayant augmenté, le taux de patients

Tableau 2Répartition des prescriptions et coûts des traitements médicamenteux de l’arthrose

Classe médicamenteuse Prescription annuelleen milliers de prescriptions(%)

Coût annuel des traitementsen millions d’euros

(%)Estimation de 2003 Estimation de 1993 Estimation de 2003

AINS+Anti-ulcéreux 4224 (26) 54 (36) 245 (43)AINS inhibiteurs spécifiques COX-2 1 64 (11) 0 (0) 151 (26)AINS non spécifiques 1866 (11) 47 (32) 44 (8)Antiulcéreux 594 (4) 7 (4) 50 (9)Antiarthrosiques 3 29 (21) 44 (29) 207 (36)Analgésiques 6 57 (41) 38 (25) 106 (18)Baumes 1 18 (9) 4 (3) 6 (1)Corticoïdes injectables 237 (1) 1 (1) 3 (1)Autres 273 (2) 10 (6) 5 (1)

AINS : Anti-inflammatoires non stéroïdiens ; COX-2 : Cyclo-oxygénase 2.

Fig. 1. Répartition des postes de coûts directs annuels de l’arthrose.

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ayant recours à une hospitalisation est resté quasiment stabledepuis 1993 [Tableau 3].

Au cours des dix dernières années, en déflatant les coûtsnominaux par l’indice de prix du Produit intérieur brut del’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Eco-nomiques), les coûts réels par patient ont augmenté de 0,3 %,7,4 %, 3,7 % respectivement pour les consultations, prescrip-tions pharmaceutiques et hospitalisations. Cette croissanceapparaissant comme relativement bien maîtrisée car de l’ordrede 2,5 % par an et par patient.

4. Discussion

Dans la perspective d’une estimation des conséquenceséconomiques de l’arthrose, l’étude COART® France a estiméles coûts directs à 1,6 milliards d’euros. L’ajout des indem-nités journalières, conséquences de la gêne voire de l’incapa-cité fonctionnelle affectant fréquemment les patients arthro-siques, laisse entrevoir l’impact social évident de la pathologiearthrosique qui représente une part similaire à celle des dépen-ses de santé relatives aux cardiopathies ischémiques.

La progression des dépenses pour arthrose ces dernièresannées peut s’expliquer pour moitié par la croissance du nom-bre de patients arthrosiques et l’inflation et d’autre part avecles changements dans la prise en charge de la pathologie,notamment médicamenteux. L’augmentation des coûts étantrelative à une pathologie du sujet âgé, elle peut néanmoinsêtre considérée comme raisonnable avec une croissanceannuelle de 9 %, par comparaison aux résultats d’une récentepublication de la caisse nationale d’assurance maladie selonlaquelle les consommations médicales des personnes âgéesde 78–79 ans ont augmenté, en moyenne, de 10 % par an surles dix dernières années [13].

Cette étude, bien que révélant l’impact actuel importantde l’arthrose, peut être considérée comme le reflet d’une esti-mation minimum des coûts liés à cette pathologie. En effet,l’étude COART France n’a pas tenu compte de tous les aspects

de la prise en charge de l’arthrose notamment les examensréalisés en ville, les reprises de prothèses, les complicationsd’une intervention chirurgicale, les traitements admis récem-ment au remboursement (à base d’acide hyaluronique) ou lespertes de productivité, car ces données étaient indisponibles.Pour exemple, le nombre de reprises de prothèses sera amené,dans les années à venir, à suivre la fréquence des interven-tions pour arthroplasties. Outre les conséquences cliniquesd’une intervention chirurgicale supplémentaire sur un patientsouvent âgé, l’impact des reprises de prothèses est égalementéconomique car estimé par l’assurance maladie [14] commesupérieur de 29 % en moyenne à celui des interventions pourprothèse de hanche. En effet, les pertes sanguines supérieu-res, le temps opératoire allongé et l’incidence des complica-tions plus élevée entraîneraient un surcoût par rapport auxmêmes interventions réalisées en première intention [15–17].La prise en compte de ces éléments alourdirait encore plus lepoids de cette pathologie sur les systèmes de santé. Néan-moins, les estimations réalisées reflètent de façon claire lapart conséquente de l’arthrose dans les dépenses de santéactuelles.

À l’heure où se posent les questions du financement desdépenses de santé, la croissance des coûts de l’arthrose seprésente comme un problème majeur de santé publique. Dansles années à venir, le vieillissement démographique, la pro-gression de facteurs de risque comme l’obésité, le dévelop-pement des techniques chirurgicales et les exigences despatients vis-à-vis du traitement de leur pathologie devraientêtre les déterminants essentiels du poids économique et socialde la maladie.

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Tableau 3Évolution du coût socioéconomique de l’arthrose (1993–2003)

Résultats de l’étude Levy et al.[11] en 1993

Résultats de l’étude COART Franceen 2003

Évolutionen %

Populationarthrosique symptomatique 3 millions 4,6 millions + 53Consultations

Nombre 8,7 millions 13,4 millions + 54Coût 145 millions Q 270 millions Q

TraitementsNombre de prescriptions 14 millions 18 millions + 28Coût 150 millions Q 574 millions Q

HospitalisationsNombre 93 000 127 000 + 37Coût 270 millions Q 820 millions Q

Coût annuel par patientHospitalisé 3425 Q 5800 Q

Non hospitalisé 98 Q 181 Q

Coûts directs 641 millions Q 1644 millions Q

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