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Presses Universitaires du Mirail "RICAS MIELES Y BUEN CAFÉ” Le café dans la chanson populaire du pourtour caraïbe Author(s): Jacques GILARD Source: Caravelle (1988-), No. 61, LES CULTURES DU CAFÉ (1993), pp. 27-48 Published by: Presses Universitaires du Mirail Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40853408 . Accessed: 14/06/2014 05:25 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Caravelle (1988-). http://www.jstor.org This content downloaded from 185.44.77.128 on Sat, 14 Jun 2014 05:25:41 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Presses Universitaires du Mirail

"RICAS MIELES Y BUEN CAFÉ” Le café dans la chanson populaire du pourtour caraïbeAuthor(s): Jacques GILARDSource: Caravelle (1988-), No. 61, LES CULTURES DU CAFÉ (1993), pp. 27-48Published by: Presses Universitaires du MirailStable URL: http://www.jstor.org/stable/40853408 .

Accessed: 14/06/2014 05:25

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C.M.H.L.B. CARAVELLE

n° 61, pp. 27-48, Toulouse, 1993

" RICAS MIELES Y BUEN CAFÉ "

Le café dans la chanson populaire du pourtour caraïbe

PAR

Jacques GILARD Institut Pluridisciplinaire pour les Etudes sur /' Amérique Latine,

Université de Toulouse le Mirail.

C'est en 1927, dans son opérette Niña Rita, que le compositeur cubain Eliseo Grenet crée le "tango congo" intitulé "Mama Inés" (1), dont le refrain est ensuite rapidement connu dans tous les pays de langue espagnole:

Aquí estamo' to' lo' negro' que venimos a roga que nos conceda pemmiso para bailar y canta.

Ay, Mama Ine, ay, Mama Ine, todo' lo' negro' tomamo' café (2).

Cette chanson, que sa célébrité ferait aisément prendre pour un air traditionnel, était la réinterprétation d'un poème anonyme apparu à Cuba en 1868 (3). Dans ce poème il n'était pas question de café mais de canne à sucre; les noirs étaient des esclaves qui demandaient la permis- sion de commencer le broyage de la récolte de canne. De sorte que la chanson qui semblerait proclamer le bonheur de savourer le café nous fait rencontrer la plante qui est bien, dans l'inspiration des composi-

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teurs populaires du pourtour caraïbe, la grande rivale du caféier. Au contraire de ce que Ton pourrait penser, quand on sait ce qu'ils représen- tent dans le discours identitaire des nationalismes de cette vaste région américaine (Isthme, Iles, pays du nord andin), le caféier, le café et le caféiculteur, sans être vraiment absents, occupent comparativement peu de place dans la thématique de la chanson. Ce qui ne les empêche pas de jouer un rôle central dans la nostalgie des origines, comme fondement onirique du passé familial ou national.

Cette faible présence doit s'expliquer en tout premier lieu par le fait que le café-boisson est tellement quotidien qu'il finit par ne plus être remarqué et n'a donc plus à être mentionné, et encore moins chanté. Si on l'évoque, c'est souvent qu'il y a un manque, un malaise ou une souf- france. Le "son montuno" qui chante la négresse Tomasa et sa façon de préparer le café est assombri d'abord, dans son premier couplet, par les fugues de la femme, source de tristesse pour l'homme qui se rappelle les bienfaits que lui dispense l'inconstante, au nombre desquels figure le café:

Lo más que me gusta es la café que ella me cuela. Lo más que me gusta es la comida que ella cocina (4).

Le mari infidèle, puni par une séparation qu'il reconnaît avoir méri- tée, regrette le café que sa compagne lui servait:

Endúlzame el café, María, y cuéntame si aún me amas. Si supieras cuánto extraño tu calor, tu amor y tu café, María (5).

Il y a aussi le café amer du réveil chez l'ouvrier agricole qui doit partir travailler sans espoir d'une juste rémunération, comme le chante une insolite "cumbia" protestataire de la Côte atlantique colombienne:

Son las cinco 'e la mañana, Miguel, tu trabajo rutinario te espera. Levántate y pon a hacer el café, para que descanse tu compañera. Debes de tener en cuenta, Miguel, que el trabajo entre los dos más prospera (6).

Enfin, on peut aussi parler de café pour la simple raison qu'on n'a pas les moyens d'en acheter, comme dans ce "son" du Dominicain Juan Luis Guerra:

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El costo de la vida sube otra vez, el peso que baja y ya ni se ve, y las habichuelas no se pueden comer, ni una libra de arroz, ni una cuarta de café (7).

*

A Cuba, si on observe la thématique urbaine propre aux orchestres qu'il est commode d'appeler afro-cubains, on constate que dès avant "Mama Inés" d'autres saveurs avaient occupé le terrain. En 1920 (8), s'inspirant des appels des marchands de la rue, Moisés Simons avait composé "El manisero", "pregón" d'un marchand de cacahuètes. "El manisero" devait atteindre, y compris dans les pays non hispanophones, à un succès étonnamment durable que n'égale pas ensuite la diffusion de "Marna Inés".Puis d'autres produits, d'autres goûts et odeurs apparais- sent dans les "pregones" qui suivent la voie tracée par celui de Simons. Fruits tropicaux dans "Frutas del Caney", plantes aromatiques dans "Hojas para baño", deux titres du répertoire du Trio Matamoros; choco- lat et cacahuète dans "Crocante habanero", que Celia Cruz interprétait avant 1959 avec la Sonora Matancera; d'autres saveurs encore dans "El panquelero", interprété par la même Celia Cruz. Le café, trop quotidien, n'aura pas suscité l'enthousiasme qu'exprime, chez Simons, l'acheteuse de "manf ':

Qué calentito y rico está, ya no se puede pedir más(9).

Quant au monde rural, on peut dire que le souvenir du caféier, si pré- sent dans la poésie créole du XIXème siècle, s'est effacé. La vie paysan- ne, "guajira", avait connu une de ses plus belles exaltations à travers la fleur du café chantée par Plácido, dont les vers vivent encore dans la mémoire collective.A une époque récente cette veine n'était pas entière- ment tarie, comme semble en témoigner cette "décima" recueillie en 1966 dans une caféière socialisée de l'ouest de l'Ile (on remarque aussi que le rhum est mentionné en premier lieu):

Cómo me roban la calma tus ojos negros que son dos tragos de añejo ron con que me emborracho el alma. Trepa tu cuerpo de palma el suspiro del veguero y el aire vueltabajero

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igual que un niño se alegra en tu cabellera negra como el café carretero (10).

Le "guajiro" reste une référence constante dans une partie de la musique populaire cubaine, originellement issue de ce groupe, les pay- sans blancs (le "punto" traditionnel, puis la "guajira" populaire); derriè- re le "son", la "guajira" a même pénétré le répertoire des musiciens urbains, d'abord marqué par la "guaracha", avant de figurer dans celui des grands chanteurs des "charangas" et des grands orchestres à vent: des chanteurs de couleur comme Beny Moré ou l'exilée Celia Cruz, des orchestres comme Aragon ou la Sonora Matancera, exilée avec Celia Cruz.

Dans la chanson "guajira" du XXèœe siècle, le lieu par excellence est la savane - et "sabana" rime souvent avec "mañana" dans les dizains, comme les deux mots rimaient chez les faciles poètes créoles du XlXè- me, que justifiait au moins le fait de chanter Taube de la nationalité. C'est dans un "son", intitulé "Camina y ven pa' la loma", que nous pren- drons un exemple de ces clichés:

Qué linda está la mañana en esta verde pradera. Ven, lo más bello te espera en esta inmensa sabana.

Cuando el sol, tras de las lomas, al mundo sus rayos lanza, nos manda luz y esperanza del nuevo día que asoma.

¿No te embriagan los olores que el verde campo despide, ni sientes que te revive el aroma de las flores? (11)

Parfois le milieu naturel sera une zone boisée, "el monte", où le "gua- jiro" connaît le même heureux isolement que dans la savane. La distance qui le sépare de ses semblables fait de lui, inévitablement, un cavalier - ce que rappellent quelques chansons, sans trop d'insistance. A l'écart du monde, le "guajiro" vit dans un "bohío", au milieu des modestes mais toujours opulentes cultures vivrières du "conuco", "sitio", ou "sitial". Le lopin de terre voisine souvent avec une belle palmeraie. Les productions évoquées sont variées (riz, maïs, bananes vertes, fruits de toute sorte). Ce cadre sert de nid d'amour au "guajiro" et à sa compagne, à moins que - très rarement - l'homme ne soit un séducteur itinérant (12). Tel est, à

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grands traits, le monde du "guajiro" selon la musique populaire cubai- ne. On voit ce qu'il doit à la poésie créole nationaliste du XIXème siècle, ce qui lui reste du rêve "siboneyiste" des mêmes générations litté- raires, et l'on comprend quelles racines cette thématique plonge dans un imaginaire venu du Siècle des Lumières. L'histoire de Cuba et de sa poésie a laissé des traces évidentes dans la "guajira", mais il y a aussi une part d'universalité qui explique le charme vrai que cette chanson exerce sur tout étranger. Un charme qui se nourrit de cette image archétypique du paysan petit propriétaire, à la fois laborieux et nonchalant, doux et rude, et en tout cas heureux.

On croit retrouver le portrait idéalisé du caféiculteur, mais le fait est que le caféier a disparu de l'environnement du "bohío" des terres basses, savane ou "monte", tel que l'évoquent les chansons. La "guajira" et le "son" ont oublié l'arbuste comme élément tangible de la petite polycul- ture individuelle (avait-il réellement existé comme tel?). Depuis que le caféier s'est replié vers les hauteurs, où le cheval du paysan n'a pas tou- jours sa place, ce sont d'autres plantes que chantent les compositeurs populaires cubains.

Par contre, le café peut être mentionné dans une enumeration des pro- duits du sol de l'Ile. C'est alors la ligne d'une inspiration patriotique (encore une trace du XIXème) qui fait de tout produit un motif de fierté nationale. Au compositeur Ignacio Pineiro, citadin et mulâtre (qui savait aussi magistralement composer dans le registre faubourien de la "guaracha"), on doit cette "guajira-son" des années 30, "Alma guajira", dont un dizain affirme:

De mi Cuba con jactancia sus frutos mencionaré. Produce caña, café y cacao en abundancia. Da la pina con fragancia y humilde fruto que abundo, pues da mi patio fecundo lucido coco macaco y sobre todo el tabaco, que éste es el mejor del mundo (13).

C'est la canne à sucre qui inspire le plus. Elle est bien sûr une réalité dominante - même comparée au prestigieux tabac, confiné sur des ter- roirs précis et exigus (14). Longtemps elle a été marquée d'un signe néga- tif, du moins si elle poussait sur de grands domaines: on n'oubliait ni les horreurs de l'esclavage, ni l'exploitation éhontée de l'époque républicai- ne, ni ses cruelles mortes saisons (qui se retrouvent aussi bien dans les

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poèmes de Nicolás Guillen que dans les chansons de Carlos Puebla). Mais la canne avait préservé son image de porteuse de miel quand il s'agissait de la petite cannaie que le "guajiro" cultivait à côté d'autres plantes vivrières sur son lopin. Et avec la Révolution, les grandes récoltes pourvoyeuses de devises exigeaient une vaste mobilisation. La canne devenait - comme le café en d'autres temps ou en d'autres lieux - la plante émancipatrice et patriotique, et le vert des interminables can- naies prenait une nuance tendre, aimable aux yeux et au coeur. Les "zafras" révolutionnaires effaçaient le vieux signe négatif, comme le montre ce dizain interprété par Celina González:

Cuba, qué lindas cascadas, Cuba, qué bellas palmeras, qué famosas cordilleras y risueñas alboradas. Tus llanuras matizadas de verdes cañaverales y tus gigantes centrales, erguidos como colosos, hacen lucir más hermosos tus paisajes naturales (15).

Depuis longtemps repoussés par l'expansion sucrière et la sagesse agronomique vers la fraîcheur des montagnes, le caféier et le caféiculteur se retrouvent expulsés de l'imaginaire de la chanson populaire; seul reste leur produit comme un motif d'orgueil que l'on mentionne, parmi d'autres moins omniprésents que la canne.

Il convient donc de citer, comme elle le mérite de par son allusion au café, une chanson de Joseíto Fernández, l'auteur de la "Guantanamera". Il s'agit d'une "guajira-son" qui reprend les stéréotypes de la chanson "guajira" et de la cubanité (très partielle, en fait) que celle-là est censée incarner. En donnant, avec "A mi chocita", une version insulaire du "Si j'étais riche..." de Jean-Jacques Rousseau, Joseíto Fernández rejoint les thèmes des poésies "siboneyiste" et créole du XIXème et exprime, en toute sincérité et en toute émotion, l'imaginaire collectif. Le café est présent - ainsi l'exigeaient la mémoire historique et l'héritage poétique figé -, comme plante et comme boisson conviviale, mais il est cerné de la faune et de la flore idéales de tout "conuco" bien pourvu, la canne est là et bien là, et le "cafecito" sera accompagné de l'obligatoire cigare:

A pesar de no ser campesino, ya tengo formada mi idea para cuando me falte la voz: recogerme a un ambiente tranquilo.

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Formaré mi chocita de guano en el centro del alguna sabana. Puercos, chivos, gallos y gallinas tendrá el patio de mi terrenito, el cual tendré sembradito y con gusto cuidaré ya que me consagraré a mi chocita lejana.

Sembraré viandas, sembraré caña, sembraré mucho cacao y café.

Aquel que vaya, que me visite. Le brindo a gusto tabaco y café (l6).

Mais on est loin des caféiculteurs de la Sierra Maestra ou de l'Escam- bray. Le café n'est plus qu'un cliché, peut-être légèrement nostalgique -

qui figure encore, tenace, dans les compositions de Cubains exilés, avec là encore des mentions fugitives, comme pour une réminiscence mineu- re, au même titre que le tabac, bien en dessous de la canne à sucre, du sucre lui-même et du rhum, qui donnent ce qui est ressenti comme la couleur et la saveur représentatives de l'Ile perdue (17).

Décidément, dans la chanson cubaine, et en particulier dans la veine "guajira" (celle qui pouvait le mieux préserver le souvenir, tant du pro- cessus économique que des thèmes de la poésie créole du XIXème), le thème du café n'est plus qu'un sédiment dont quelques particules font surface de loin en loin, quand viennent l'agiter les imprévisibles remous de la nostalgie ou les élans de l'émotion nationaliste. Quant aux caféi- culteurs, géographiquement marginaux et numériquement très minori- taires, ils ne font plus partie de la représentation de la nationalité.

*

Le "jíbaro" portoricain est un frère jumeau du "guajiro" cubain et, de fait, il n'est pas aisé de distinguer leurs chants respectifs: mêmes accom- pagnements de cordes aigrelettes, de percussions et de "güiros", mêmes intonations nourries de communes influences canariennes. Et, dans la version populaire d'un chant traditionnel désormais plus qu'incertain,

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memes sources d'inspiration. Si le "guajiro" cubain peut aujourd'hui encore se reconnaître dans les vers de Plácido ou de Nápoles Fajardo ("El Cucalambé"), le "jíbaro" portoricain - l'image qui en subsiste - pourrait tout entier se retrouver dans la poésie créole du moderniste Luis Lloréns Torres. Mais le fait est que l'histoire de Puerto Rico s'est cassée en 1898 avec l'invasion nord-américaine. La nationalité a suivi des chemins incertains. Et le café et la canne à sucre ont établi des relations encore plus conflictuelles qu'à Cuba.

Aussi, bien que la représentation du "jíbaro" soit également d'abord celle d'un homme de la savane, les terres basses de l'Ile ont reculé dans l'imagerie populaire et dans l'imagerie nationaliste, envahies qu'elles ont été dans la réalité par les grandes plantations sucrières créées ou développées par les capitalistes venus du Nord. Le fantôme du "jíbaro" s'est donc replié vers les hauteurs du centre de l'Ile, autrement dit dans ce qui avait été (mais allait être de moins en moins) le terroir du café. Dans l'imaginaire collectif, le refuge de la nationalité menacée a donc été parfois la caféière montagnarde et son incarnation idéale a pu être le petit caféiculteur, qui a tendu à devenir le Portoricain par excellence.

Cependant les hésitations ne manquent pas. La "décima" la plus fré- quemment citée et reproduite de Luis Lloréns Torres ("Vida criolla") parle d'autres types de plantations, et évoque le cigare matinal, sans un mot pour le café:

Ay qué lindo mi bohío y qué alegre mi palmar y qué fresco el platanar de la orillita del río. Qué sabroso es tener frío y un buen cigarro encender. Qué dicha no conocer de letras y astronomía. Y qué buena hembra la mía cuando se deja querer <18).

Alors que Lloréns Torres a pourtant mentionné la caféière ("La mujer puertorriqueña") et la boisson ("Café prieto"), c'est un autre univers que l'on semble volontiers retenir de sa poésie créole. A une date récente, un groupe qui se voulait de musique "jíbara", évidemment nationaliste (le groupe Haciendo punto en otro son), interprétait la "décima" que nous allons citer, où le lieu idéal du paysan portoricain était toujours la sava- ne - comme à Cuba, alors que la géographie physique est différente et que le processus historique portoricain a été plus qu'adverse. A noter

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que le quatrain initial provient d'une "décima" de Lloréns Torres ("Madrugada") et que les six derniers vers - où il est obstinément ques- tion de la savane - sont une création du musicien Silverio Pérez; le "jíba- ro" est encore représenté comme l'homme des terres basses:

Ya está el lucero del alba encimita del palmar como horquilla de cristal en el moño de una palma. Cuando viene la mañana, de los pitirre' oigo el canto. Entonces yo me levanto y voy a abrir la ventana. Andando por la sabana, mato la morra y el sueño, y para vivir dichoso soy jíbaro borinqueño (l9).

Mais le café s'est bien fait une place dans l'inspiration des composi- teurs populaires, celle qu'il avait perdue à Cuba en quelque sorte. Une rumba protestataire a connu depuis les années 30 un succès particulière- ment durable, y compris dans les pays non hispanophones où les mal- heurs de Puerto Rico n'intéressaient pas : c'est le "Lamento borincano", histoire de la déception du paysan qui descend de la montagne pour vendre sa production et qui y retourne le soir sans avoir trouvé le moindre acheteur. Le café n'est pas mentionné, mais il pourrait bien être ce chargement que transporte le "jibarito" de la chanson, acculé à la misère et au désespoir, comme la caféiculture portoricaine a été finale- ment annihilée par la concurrence irrésistible des grands trusts alimen- taires nord-américains (20).

La protestation sociale et patriotique s'efface dans les chansons abusi- vement qualifiées de "jíbaras" (thèmes bucoliques et mélodies assez typiques, mais rythme afro) qu'interprétait "le chef Daniel Santos. Ce sont plutôt des affirmations identitaires optimistes, voisines des thèmes de la "guajira" cubaine comme de ceux de Lloréns Torres; et elles sont marquées par la présence du café et de l'environnement montagnard. La présence du café est explicite dans un des deux cas que nous allons citer, et implicite dans l'autre. Dans "Romance del campesino", le quatrain initial dit:

En las montañas de Borinquen bella, entre la fronda de un cafetal, vive mi amada, linda doncella, la jibarita de mi cantar (21).

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Mais le quatrain final fait une place à la canne à sucre. L'amour de la patrie tout entière, de ses productions et de ses paysages, vient émousser ce qu'il pouvait y avoir de très spécifiquement national et nationaliste dans l'idylle caféicole du premier quatrain. Certes, la canne est là, non comme plante des Nord-Américains, mais comme souvenir d'une pro- duction domestique aux temps heureux, in ilio tempore . On ne se défait pas aisément de la tradition, ni de la nostalgie du "trapiche" et de ses senteurs:

No hay otra tierra como mi tierra, de ricas mieles y buen café. Por eso siempre, mi vida entera, en el bohío viviré.

"Canción de la serranía", comme son titre l'annonce, chante encore les montagnes du coeur de l'Ile, refuge bucolique de l'heureux "jíbaro". Le café peut en être la base économique. C'est que, s'il n'est pas mentionné, on voit se manifester ici le stéréotype du travail opiniâtre et bien récom- pensé, connotation presque inévitable de la thématique du café, dès lors que sa production est l'affaire d'une agriculture familiale:

Ya se va a asomar el sol por detrás de la montaña y hay luz dentro 'e la cabana del hombre madrugador. Ese es el trabajador que con empeño trabaja, trabaja, canta y trabaja pa' que lo bendiga Dios <22).

Quatre décennies ont passé depuis que Daniel Santos interprétait ses chansons "jíbaras" - parmi boléros et "guarachas", il faut aussi le rappe- ler - et l'illusion a eu largement le temps de s'évaporer. Alors qu'on est déjà à la veille du centenaire de l'invasion, l'identité insulaire est massi- vement urbaine et métisse, et elle n'est même plus vraiment insulaire puisque l'exil new-yorkais et le ghetto sont une composante forte de l'expérience portoricaine. Le chant "jíbaro" était déjà bien irréel face à la "plena" mulâtre dont l'essor avait accompagné l'urbanisation, et il l'est plus encore face à la "salsa". Dans les années 70, le retour à l'image archétypique du paysan de la savane était une double négation de l'évo- lution socio-économique et culturelle de l'Ile. Et le café était tout au plus le symbole d'une nostalgie qui n'était pas, qui n'est pas, ce qu'il peut y avoir de plus clairvoyant ni de plus efficace dans le discours nationaliste.

*

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La Colombie, où la caféiculture se développait à peine au temps de l'Indépendance, n'entretient pas avec son produit national des relations aussi délicates, car les angoisses de l'histoire ne les marquent guère. Les convulsions n'ont pas manqué dans le pays au temps où la production caféière prenait son essor, mais elles n'ont pas entravé son développement (pas plus que, par la suite, la "Violence" ou le chaos de la drogue n'ont bloqué la marche en avant de l'économie nationale dans son ensemble). Ces relations entre le pays et son produit, longtemps d'harmonie tran- quille ou de relative indifférence, ne se sont altérées que dans les toutes dernières années. Mais la thématique du café dans la chanson populaire colombienne n'en présente pas moins de notables particularités.

Quand on aborde les compositions qui proviennent des zones caféières de l'intérieur andin, c'est l'extrême rareté des allusions qui attire l'atten- tion. Alors que diverses essences sont mentionnées (23), l 'arrière-fond des caféières, sans doute parce qu'il va de soi, n'est pas évoqué dans les "bambucos", "pasillos", "torbellinos" et autres "guabinas". L'indifférence à ce qui est trop connu serait donc la première raison. D'autres peuvent venir à l'esprit. Ainsi, par exemple, le fait que le caféier, ses fleurs et ses fruits n'ont guère eu le temps de s'intégrer comme motifs au trésor des "copias" traditionnelles - au contraire de la canne à sucre et de certains fruits tropicaux comme l'ananas -, phénomène de carence qui se retrou- ve dans d'autres pays caféiers; faute de matière de base, le passage, si évi- dent dans le cas d'autres motifs, de l'oralité traditionnelle à la composi- tion populaire ne pouvait avoir lieu. Ainsi encore, autre exemple, le caféier n'a pas laissé de trace insistante dans la poésie créole du XIXème (rien à voir avec les métaphores militantes des poètes cubains de l'époque) et n'a pas pu non plus cristalliser, même faiblement, les inquiétudes identitaires d'une nationalité qui ne se sentait pas menacée (pour faire un parallèle avec le cas portoricain); de fait, le discours régio- naliste, très vigoureux dans ces terroirs andins, se distinguerait plutôt par une tranquille certitude d'être à soi seul un monde ou même d'être le centre du monde: nul besoin de symbole identificateur dans de telles conditions.

Telles peuvent être quelques unes des explications de l'étonnante rare- té des allusions au café. Sur une soixantaine de chansons andines exami- nées, nous ne relevons que deux mentions. L'une dans le "bambuco" intitulé "Medellin":

Como tacita de plata, así te estoy viendo yo, llena de mujeres bellas y de cafetos en flor(24).

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L'autre dans le "pasillo" intitulé "Señora María Rosa", et encore s'agit- il là d'un cas fort sujet à caution. En effet, une interprétation de la can- tatrice espagnole María Dolores Pradera donne:

Por ella yo he dejado mis viejos tan queridos, mis bueyes y mi arado, mi cafetal florido (25).

Par contre, une interprétation du duo Garzón y Collazos, très popu- laires chanteurs de "bambucos" et plus dignes de foi, donne le dernier vers sous la forme "mis valles tan floridos" (26).

De l'absence des caféières dans cette musique de l'intérieur andin, on a un exemple très significatif avec un "bambuco" célèbre, "Cámbulos y gualandayes". Alors qu'il va être question du village de Pandi, situé dans la zone caféicole de Sumapaz, il n'est pas dit un mot de la principa- le caractéristique du paysage; ce sont deux grands arbres, l'un aux fleurs rouges et l'autre aux fleurs bleues, qui donnent à ce "bambuco" son titre et son motif récurrent:

Dices que te pone triste la bruma de la ciudad, camina, mi amor, camina, camina conmigo a Pandi, ahora que están floreciendo cámbulos y gualandayes (27).

Plus remarquable encore, nous retrouvons dans ces terres caféières la tenace thématique de la canne à sucre. La première raison en est que la mélasse fermentée, ou fermentée puis distillée, fournit à l'homme l'alcool qui lui permet d'affirmer sa virilité ou de noyer ses peines d'amour. Citons ce début de "torbellino":

De la caña sale el guaro, qué caramba, si la caña sabe a fruta, si la caña se machaca, qué caramba, el guaro también se chupa (28).

Le thème de la virilité, très curieusement puisqu'il s'agit de zones caféières, peut même se trouver lié à celui de l'identité. Un "bambuco" commence ainsi:

A mí denme un aguardiente, un aguardiente de caña, de la caña de mis valles y el anís de mis montañas. No me den trago extranjero... (29).

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CAFE ET CHANSON POPULAIRE 39

La deuxième raison est que, selon un stéréotype déjà présent dans la "copia" traditionnelle, la bouche et les baisers de l'aimée font penser à la douceur de la canne à sucre. Une "guabina" très connue, "Campesina santandereana", dit en particulier:

Campesina santandereana, eres mi flor de romero. Por tu amor yo vivo loco, si no me besas me muero. Me muero porque tus besos tienen miel de mis cañales que saben a lo que huelen las rosas de mis rosales (30).

Et c'est paradoxalement dans une région basse et peu clémente à l'arbuste que l'on peut trouver les allusions les plus nombreuses: les chansons de la Côte atlantique colombienne font une place à la caféicul- ture dans leur thématique. Il faut y reconnaître l'impact du discours nationaliste dans l'imaginaire collectif. De plus, la Côte savait bien ce que l'exportation du café signifiait de mouvement et de prospérité sur ses fleuves et dans ses ports maritimes. C'est au compositeur "costeño" Crescencio Salcedo que l'on doit l'emblématique "Mi cafetal", très célèbre des années durant dans les pays de langue espagnole. Nous y reviendrons plus loin. Soulignons simplement que, s'il possédait quelques plants de caféier, c'est la fierté patriotique qui a poussé Salcedo à composer ce "porro" (31).

Une autre raison est que l'infime production caféière de la Sierra Nevada de Santa Marta (et plus récemment de la Sierra de Motilones) suppose une radicale étrangeté pour les hommes de la Côte. S'y consa- crer est pour eux un reniement de leur manière d'être. Habitués au cli- mat chaud de la plaine et à une convivialité tonitruante, formés à la simpliste rudesse d'une économie à dominante pastorale, il leur faut s'adapter à la fraîcheur, au relief, à la solitude et à la minutie d'une arbo- riculture lente à produire. Très caractéristique est le "merengue vallena- to" de Emiliano Zuleta, "El regreso de Carmen Díaz":

Me critica la gente que yo vivo gobernao, tanto que parrandiaba y hasta de eso me olvidé. Es que tengo una estancia y una finca de café,

y ahora tengo una tierra donde estoy criando ganado. Cada cabeza en su mundo, cada loco con su tema. Yo estoy sobre lo seguro: el que trabaja prospera (32).

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En remarquant au passage, une fois de plus, le thème du travail qui enrichit, il faut souligner que les problèmes de santé de Zuleta et ses conflits matrimoniaux font un mélange explosif. D'un côté, l'homme a intérêt à vivre en altitude, alors qu'il n'est pas fait pour cette existence:

El cuerpo no permite de viví en clima caliente, por eso es que yo vivo metido en la serranía. Yo tengo la esperanza de poder salí algún día, cuando me sienta bueno y con dinero suficiente,

et d'un autre côté, il lui a fallu faire usage de son autorité d'époux pour obliger Carmen à le rejoindre dans la montagne:

Era muy positivo que a Carmen no le gustaba, pero llegó el momento de poderla convencer.

De sorte que le milieu physique, l'isolement et les difficultés de la caféiculture - tout ce qui peut heurter un homme des terres basses - se manifestent dans la chanson lorsqu'ils bouleversent la vie et la philoso- phie du compositeur.

C'est une thématique voisine, toujours avec une insistance sur les pro- blèmes de la femme, que l'on retrouve dans un "paseo vallenato" plus récent, plus conventionnel aussi parce qu'il ne relate pas une expérience vécue. "Mujer conforme", de Máximo Móvil, est écrit de l'extérieur, avec un assez fade alibi "costumbrista". La situation évoquée et certains traits de la chanson (le café n'y est pas mentionné) en font une version "vallena- ta", plus optimiste, du "Lamento borincano" dont Móvil s'est sûrement inspiré: le paysan qui va vendre sa production au marché espère prospérer rapidement dans son activité montagnarde parce que sa compagne souffre de l'isolement et qu'il veut la mener vivre dans un bourg de la plaine pour lui donner "una vida sabrosa", une "felicidad... doble" (33). Le courage au travail ne leur manque pas, mais la montagne (et sans doute le café) n'est pas leur monde. Aussi ce "paseo" nous en parle-t- il aussi longuement - ce que les compositeurs des Andes n'éprouvent pas le besoin de faire. Il n'est pas aisé d'être pionnier. Ces "Costeños" installés en altitude découvrent les inconvénients du travail colonisateur, que les habitants des zones caféières plus anciennes ont dépassés depuis long- temps (et on se rappelle à ce propos que la colonisation "antioqueña" de la Cordillère centrale aura laissé en littérature, et parfois dans la chanson populaire, plus de traces que la caféiculture qui lui a succédé).

*

On aura pu remarquer néanmoins que, même là où la plante et le tra- vail qu'elle exige sont vus comme exotiques, le paysage caféier - à peine naissant ou organisé de longue date - n'apparaît toujours pas. Si l'on

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CAFE ET CHANSON POPULAIRE 4 1

peut supposer qu'il a existé ou qu'il existe des chansons où quelques vers au moins se risquent à une description des caféières, elles n'ont guère accédé à la notoriété. Raison de plus pour rappeler une chanson vénézué- lienne qui apportait une évocation d'atmosphère, dans la tonalité mélan- colique des "bambucos" et pasillos" des Andes colombiennes, mais char- gée d'un mystère et d'une nostalgie convaincants. Le Venezuela, plus vieux pays caféier que la Colombie, pouvait bien en effet permettre à un compositeur clairvoyant d'aller aux essences d'un paysage et d'un état d'esprit. "Moliendo café", devenu quasiment traditionnel tellement on l'a entendu en de multiples versions au cours des trente dernières années, est sans doute le seul morceau dont on puisse dire avec justice qu'il aura donné une âme - dont la véracité importe peu - aux innom- brables caféières du continent. Peut-être parce qu'il rompt avec les mièvres gémissements du "bambuco", peut-être parce qu'il oublie toute prétention identitaire, peut-être parce qu'il parle de solitude affective et de travail acharné. Solitude et travail, deux thèmes qui reviennent avec une certaine insistance dans les chansons du café: solitude heureuse du "jíbaro" portoricain idéalisé, solitude inconfortable du "Costeño" accro- ché aux versants de la Sierra Nevada, et pour tous la conviction que leur travail ne sera pas, ne peut pas être, ingrat. Le compositeur vénézuélien Hugo Blanco a aussi su combiner ces thèmes avec originalité:

Cuando la tarde languidece, renacen las sombras y en la quietud los cafetales vuelven a sentir esa triste canción de amor de la vieja molienda que en el letargo de la noche parece gemir. Una pena de amor, una tristeza, lleva el zambo Manuel, en su amargura; pasa incansable la noche moliendo café, moliendo café (34).

*

De fait, malgré (ou à côté de) tout ce qu'on a voulu lui faire symboli- ser dans les divers discours nationalistes, le café reste avant tout, dans la chanson populaire, la production type de l'indépendance individuelle et du travail récompensé. Le caféier est l'arbuste de l'effort et de l'optimis- me. Et il y avait le contraste profond entre le café et la banane, un contraste que l'on trouve dans plusieurs pays: les gens de la Côte colom- bienne n'ont pas oublié la grève tragique de 1928 dans les bananeraies, la "Zone" où régnait la United Fruit Company donnait l'image d'une enclave étrangère, et le désengagement de la société nord-américaine a laissé la région dans le désarroi. La banane était étrangère, le café est

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national. Dans les années 40, le "Costeño" colombien Crescencio Salcedo - qui a aussi chanté la cannaie (35) et mentionné la bananeraie (36) - a composé "Mi cafetal"; il y faisait revivre intensément l'image stéréoty- pée du petit Créole heureux, en la liant au caféier et en mettant l'accent sur la générosité de l'arbuste:

La gente vive criticando que paso la vida sin pensar en na, pero no sabiendo que yo soy el hombre que tengo mi vida bien asegura. Pero no sabiendo que yo soy el hombre que tengo un hermoso y lindo cafetal (37).

Et aujourd'hui encore l'arbuste reste synonymeîd'abondance et de bonheur. Dans un "son" qui est hymne d'espoir (les choeurs sont d'ailleurs formés de voix enfantines), le "salsero" dominicain Juan Luis Guerra, habituellement plus sombre dans ses compositions, assimile la récolte de café à la manne:

Ojalá que llueva café en el campo, que caiga un aguacero de yuca y té, del cielo una jarina de queso blanco, al sur una montaña de berro y miel, oh, oh, oh, oh, ojalá que llueva café (38).

Et lorsque le café est affecté par les malheurs de l'histoire, comme au Salvador, les amertumes se donnent certes libre cours devant les ravages de la guerre, mais c'est aussi pour demander justice afin de pouvoir, une fois obtenue réparation, regagner la montagne et produire à nouveau: l'outil de travail et le savoir-faire sont toujours là, prêts à servir. Une "cumbia" salvadorienne de 1990, "El cafetero", dit:

Allá viene el cafetero señor juez, con su canto lastimero del café.

Llora el cafetero, señor juez, no tiene dinero ni café.

Mira la montaña con dolor. Sólo le ha quedado el azadón (39).

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CAFE ET CHANSON POPULAIRE 43

En Colombie, la guerre de la drogue n'a pas fait autant de ravages qu'une guerre civile, mais l'image du pays en a souffert. Une "cumbia" de 1993 essaie de faire revivre l'optimisme de "Mi cafetal"; elle oppose les gains faciles du trafic d'émeraudes aux bénéfices hautement mérités du travail caféier. Certes, c'est revenir pudiquement (ou prudemment, puisque les cartels de la drogue sont toujours là) vers un temps où la Colombie, terre de l'émeraude et du café, pouvait hésiter entre la pierre verte (rôle du hasard, esprit aventurier, dislocations familiales, négoce douteux) et la baie rouge (opiniâtreté, stabilité, labeur familial, com- merce officiel); certes, c'est jeter un voile sur les vingt dernières années, sur le désordre économique et le délabrement moral engendrés par la marihuana et la cocaïne. Et c'est aussi oublier que le café n'est plus qu'une part modeste des exportations du pays. Mais il s'agit surtout d'un appel à retrouver des vertus cordiales et à faire en sorte que le nom du pays parvienne au monde sous sa meilleure facette. Et cela est dit, comme presque un demi-siècle plus tôt, sur un rythme de la Côte atlan- tique et non de l'intérieur andin. Comme dans le voeu de Juan Luis Guerra, il s'agit d'une pluie de café, bien réelle celle-ci et dont il faut recueillir promptement les bienfaits:

En Colombia llovió café, deja la esmeralda y vamos a recoger. Agarra la canasta, vamos a recoger. Ponte la pollera, vamos a recoger. Cálzate la alpargata, vamos a recoger. Vamos, mi negrita, para coger café.

Ven, mi negrita, ayuda a recoger, que va pa'l mundo aroma de café (40).

On retrouve ici, à nouveau chez un "Costeño", le même ingrédient de nationalisme naïf que dans les compositions de Crescencio Salcedo. Au moins pour un compositeur d'une région qui n'en produit pas et qui est d'autant plus sensible à sa représentation valorisante, le café reste syno- nyme de bien-être, de fierté et d'espoir.

*

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En cette terre d'utopie qu'est encore l'Amérique, l'espoir peut bien se sentir chez lui, et le café le peut donc également, ce qui justifie que l'on s'autorise à réécrire l'histoire.

Nous préférerons ne mentionner ici que pour mémoire le très discutable "Plantación adentro", qui est loin d'être ce qu'aura fait de mieux le Panaméen Rubén Blades, pourtant le plus grand des "salseros": il commet l'anachronisme de parler d'Amérique "latine" à propos de l'année 1745, l'erreur de voir l'Indien travailler comme esclave dans les plantations tropicales, et cette autre erreur d'imaginer que c'étaient des caféières (comme l'indique un vers improvisé dans la partie "montuno" de la chanson). Cette composition est un avatar malheureux de la "légende noire", que Blades a mieux chantée dans d'autres compositions ("Cipriano Armenteros") et qu'il a dépassée dans ses appels à la fierté des "latinos" d'aujourd'hui ("Siembra", "Plástico").

Venons-en plutôt au très suggestif "son montuno" composé par le "salsero" new-yorkais Eddie Palmieri, simplement intitulé "Café". Sur un rythme d'une lenteur majestueuse, le musicien refait à sa guise l'his- toire du café et recrée le monde des origines, son mythique Puerto Rico. L'enfant d'émigrés s'adresse à sa grand-mère, celle qui a subi le déracine- ment choisi bon gré mal gré par la génération intermédiaire, et qui porte en elle l'expérience, le savoir et les mythes de l'Ile. A la demande du petit-fils, qui a médité sa grave question devant la tasse vide en attendant que l'emplisse le café quotidien, l'aïeule raconte les origines de la boisson. Celle-ci n'est plus originaire d'Ethiopie; les vertus de l'arbuste n'ont pas été révélées par les gambades de chèvres qu'excitaient les feuilles et les baies qu'elles ont broutées, et n'ont pas non plus été divulguées par un berger sagace. Une légende chasse l'autre. Selon l'aïeule, les caféières providentielles étaient depuis toujours dans l'Ile merveilleuse d'avant l'exil, nées en bon ordre d'un généreux terroir caraïbéen; et c'est un vieillard, sagace lui aussi, qui a su déchiffrer le chant des oiseaux autochtones, un chant qui disait même comment préparer la boisson chaleureuse: à la façon de "là-bas", "tostão y colao".

Café, tostão y colao café, tostão y colao.

Sentado yo un día esperando mi café, a mi abuelita casualmente casualmente le pregunté.

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CAFE ET CHANSON POPULAIRE 45

Abuelita de mi vida, por favor dígame usté, esto, lo que tengo en mente: ¿Cómo se descubrió el café?

Es muy sencillo, mi hijo, mi abuelita me contestó: habían grandes cafetales y un viejo observó los pájaros en el monte; uno en su canto decía, uno en su canto decía: café , tostão y colao (4l).

Quand c'est la nostalgie des origines qui est en question - et elle peut être doublement profonde dans le cas d'un Portoricain exilé -, le café parle au coeur plus que ne le pourrait la canne à sucre. Alors, pourquoi ne pas accepter cette nouvelle légende? Pourquoi ne pas croire, avec Eddie Palmieri et avec tous ceux qui s'identifient à l'arbuste et à son produit, que le café est né en Amérique?

Résumé - La chanson populaire accorde au caféier moins d'importance qu'à la canne à sucre, et au café moins qu'au rhum ou à l'eau-de-vie. Mais le café a préservé une image très identifìcatrice dans l'imaginaire collectif, même si c'est dans les régions qui n'en pro- duisent pas, ou qui ont cessé d'en produire, qu'on l'exalte le plus. Persistance de la conviction que le caféier et son produit signifient travail honnête et prospérité.

Resumen - La canción popular concede al cafeto menos importancia que a la caña de azúcar, y al café menos que al ron o al aguardiente. Pero el café preserva una imagen iden- tificadora en el imaginario colectivo, aunque sea en las regiones que no lo producen o dejaron de producirlo donde más se le exalta. Persiste la convicción de que el cafeto y su producto significan trabajo sano y prosperidad.

NOTES

(1) Cf Ambrosio Fornet, En blanco y negro, La Havane, Instituto del Libro, 1967, p. 140.

(2) Transcrit du disque 33 t. de Ignacio Villa (Bola de Nieve), Otra vez Bola , La Hava- ne, Palma (LP 1008), 1970.

(3) Cf José Lezama Lima, Antología de la poesía cubana , T. III, La Havane, Editora del Consejo Nacional de Cultura, 1965, p. 179-180.

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(4) II y a de nombreuses versions de "La negra Tomasa". Nous transcrivons d'après un 33 t. où ce morceau figure sous le titre de "Bilongo". Composition de Guillermo Rodrí-

guez Fiffe, interprétation Ismael Rivera et orchestre Fania All Stars. 33 t. Latin Connection, New York, Fania (SLP 595),1981.

(5) "Endúlzame el café, María", composition de Henry Posada, interprétation orchestre Impacto de Montemorelos. Compact Planète latine , Paris, WMD (WM 334), 1992. L'enregistrement original est de 1 969 (Fonovisa).

(6) "Los trabajos de Miguel", composition de José Anillo, interprétation Andrés Lan- dero. 33 t. Us hamaqueros , Medellín, Sonolux (15-0131-00137), 1977.

(7 ) "El costo de la vida", composition de Juan Luis Guerra et Diblo Dibala, interpré- tation Juan Luis Guerra. Cassette Areito , New York, Karen (K 146), 1992.

(8) Cf Ambrosio Fornet, op. cit. , p. 129.

(9) "El manisero", composition de Moisés Simons, interprétation Ignacio Villa (Bola de Nieve). Mêmes références que note 2.

(10) El Indio Naborí (Jesús Orta Ruiz), "Por los cafetales pinareños", Bohemia , La Havane, 2 décembre 1966, n° 48-66, p. 40.

(11) "Camina y ven pa' la loma", sans indication de compositeur, interprétation Roberto Torres. Cassette Roberto Torres recuerda al Trío Matamoros , SIS (O38), s.l.n.d.

(12) Citons rapidement, en une liste qui pourrait être beaucoup plus longue: "Soy del monte", "¿Cómo está mi conuco?", interprétés par Beny Moré; le célèbre "En el bajío", que Celia Cruz avait enregistré avec "Laito" et la Sonora Matancera avant 1959; "Tengo una choza" chanté par Ramón Veloz dans la période révolutionnaire. Et on pourrait remonter plus avant dans le temps, en pensant au textes de certains "danzones" chantés par Barbari to Diez.

(13) "Alma guajira", composition de Ignacio Pineiro, interprétation de Ignacio Pineiro et Septeto Nacional. Cassette Sones cubanos , New York, SEECO (SCCA 9278), 1992. Le premier enregistrement doit correspondre aux années 30.

(14) Ravivé par l'historiographie, le souvenir de la révolte des "vegueros" (fin du XVIIème) fonctionne comme un des éléments fondateurs de la nationalité cubaine. Mais si le tabac est perçu comme plus cubain que le café - c'est ce que suggère la "décima" de Pineiro -, sa culture est trop localisée pour que la plante puisse concurrencer la canne dans l'imaginaire collectif.

(15) "Paisajes naturales", composition de José M. Rodríguez, interprétation Celina González. 45 t. Música campesina cubana , La Havane, Areito (EPS 6 138), 1970.

(16) "A mi chocita", composition et interprétation Joseíto Fernández. 33 t. Guajira guantanamera , La Havane, Guama (LDG 2010), s.d.

(17) Voir "Sí señor" et "Montuno", compositions de Juanito R. Márquez, interpréta- tion Gloria Estefan. Cassette Mi tierra , New York , Epic / Sony Music (47 3799-4), 1993.

(18) "Vida criolla", reproduit par exemple dans Antología de la poesía puertorriqueña , Madrid, Playor, 1980, p. 23.

(19) "La vida campesina", composition de Silverio Pérez autour de vers de LLoréns Torres, interprétation du groupe Haciendo punto en otro son. 33 t. La vida campesina , Santurce, Artomax (ARM 405), 1976.

(20) "Lamento borincano", d'après la transcription figurant dans Meri Franco-Lao, Basta. Chants de témoignage et de révolte d'Amérique latine , Paris , Maspéro, 1967, p. 93.

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(21) "Romance del campesino", composition de R. Cole, interprétation Daniel Santos. Cassette Daniel Santos canta mùsica jíbara , New York, SEECO (SCCA 9122), 1992. L'enregistrement original doit être du début des années 50. Le groupe Haciendo punto en otro son a repris ce quatrain en le modifiant légèrement (on peut parler d'affadisse- ment; le deuxième vers devient "bajo la sombra de un cafetal").

(22) "Canción de la serranía", composition de R. Cole, interprétation Daniel Santos. Mêmes références que note précédente.

(23) Les roselières dans "Los guaduales", les mauves, le tournesol, le coquelicot dans "Camino viejo"; divers arbres comme dans "Cámbulos y gualandayes", "Las acacias", etc.

(24) "Medellin", composition de Arturo Zuluaga, interprétation du duo Arboleda y Valencia. Cassette n° 1 du coffret Souvenir de Colombia, Medellin, Sonolux (CH 8902), 1989.

(25) "Señora María Rosa", composition de Efraín Orozco, interprété par María Dolores Pradera. D'une bande magnétique aux références incomplètes.

(26) Interprétation par le duo Garzón y Collazos. 45 t., Medellin, Sonolux (1496), s.d.

(27) "Cámbulos y gualandayes", composition de Lucio García, interprétation du duo Garzón y Collazos. 45 t., Medellin, Lyra (2090), s.d.

(28) D'une bande magnétique sans références.

(29) "Soy colombiano", composition de Rafael Godoy, interprétaion du groupe Can- tares de Colombia. Mêmes références que note 24.

(30) "Campesina santandereana", interprétation du duo Garzón y Collazos. D'une bande magnétique aux références incomplètes.

(31) "Hubo una época en que decían que Colombia no tenía nada. Oportunamente, en esta temporada, también me lo decían a mí. Que no tenía nada porque vivía despegado de muchas cosas de que otros viven pegados (...). Por eso el origen de esa obra está a cargo de Colombia, en su grande virtud que ha tenido por naturalidad de estar circuladita; o sea, construida sobre un terreno tan grande y tan bueno para su café de tanta importancia por su aroma. En esa temporada tenía, en verdad, poquitas matas de café; pero sí podía hablar de Mi Cafetal, que coincidía con lo de Colombia para el campo internacional, donde se hablaba que ella no tenía nada, lo mismo que mi persona en Colombia." Jorge Villegas et Hernando Grisales, Crescendo Salcedo. Mi vida , Medellin, Ed. Hombre Nuevo, 1976, p. 41. Le même livre recueille des compositions tardives de Salcedo, où il est question de café, toujours avec cette connotation patriotique: "Mi fìnquita" (p. 47- 48), "Sembrando café" (p.48-49), "Tesoro verde" (p. 49).

(32) "El regreso de Carmen Díaz", composition de Emiliano Zuleta, interprétation de Colacho Mendoza. 33 t., vol. 1 du coffret Realeza vallenata , Bogota, Fontana (9195583), 1979.

(33) "Mujer conforme", composition de Máximo Móvil, interprétation Jorge Oñate (chant) et Emilianito Zuleta (accordéon). 33 t. La parranda y la mujer , Bogota, CBS Colombia (LP 14-509), 1975.

(34) "Moliendo café", composition généralement attribuée à Hugo Blanco. Les mul- tiples interprétations rendent le texte incertain. Nous nous fondons sur celle de Lucho Gatica. Compact Bolero es Lucho Gatica, Madrid, EMI Odeon (CDP 7957 262), 1990.

(35) "La varita de caña" (voir Jorge Villegas et Hernando Grisales, op. cit., p. 59-60). L'interprétation la plus connue est celle de Guillermo Buitrago, antérieure à 1949.

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(36) " Santa Marta y Cartagena" (voir Villegas et Grisales, op. cit., p. 50-51).

(37) "Mi cafetal" (voir Villegas et Grisales, op. cit., p. 42).

(38) "Ojalá que llueva café", composition et interprétation de Juan Luis Guerra. Cas- sette Ojalá que llueva café , New York, Karen (K-MC-126), 1990.

(39) "El cafetero", interprétation de l'orchestre Hermanos Flores. D'une bande magné- tique aux références incomplètes.

(40) "En Colombia llovió café", composition de Hernando Pardo, interprétation de Pastor López. Compact El indio Pastor López y su combo , Medellín, Fuentes (D. 16277), 1993.

(41) "Café", composition et interprétation de Eddie Palmieri. Compact Planète latine, mêmes références que note 5. L'enregistrement original est de 1991 (Fania).

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