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Les Intouchables en Inde. Des castes d'exclus by Robert DeliègeReview by: Christophe JaffrelotArchives de sciences sociales des religions, 40e Année, No. 92 (Oct. - Dec., 1995), pp. 100-101Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/30118595 .

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ARCHIVES DE SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

cartes trbs suggestives plac6es en d6but de cha- pitres. Au XVIe sidcle, le centre de gravit6 pa- raft 8tre La Roche-Bernard; puis, un si~cle suivant et apris une totale disparition du culte, trois p61es se dessinent, en Basse-Loire, autour de Vitr6 et sur la c6te de Penthibvre. Par Nantes, au XVIIIe sidcle, renaft un culte qui perdure. Enfin, si Nantes conserve, avec la 16- gislation napol6onienne sa position, de nou- veaux foyers apparaissent qui n'ont aucun lien avec ce qui, pour le protestantisme, aurait pu devenir une capitale r6gionale.

Le plus original reste la perc6e des pr6dica- teurs revivalistes, puis gallois, qui parviennent, cette fois, A entamer l'aire bretonnante au cours du XIXe sibcle. Cette mission, au sens plein, suit de prbs le renouveau celtique, par- ticulibrement fort en Pays de Galles. Car la <<t~te de pont>>, A Saint-Malo, constitude par des families anglaises r6sidantes ne permet pas d'importantes conversions, sinon quelques alliances, ponctuelles. Bretonnant lui-meme, J.-Y.C. a pu, de l'intdrieur, expliquer les m&- canismes d'adh6sion au protestantisme. Cette fois, les sources permettent de comprendre mieux les recrutements. Dans le L6on et le Tr&- gor, les villes sont r6tives, mais non les cam- pagnes, A la fois <<bleues >> et anti-cl6ricales. Les conversions, ici militantes, sont plut~t so- ciales en pays Bigouden A la fin du XIXe sib- cle. Dans les milieux de pacheurs sardiniers, tout juste arrach6s A la terre, le tissu paroissial qui n'a pas su se moderniser, en conduit beau- coup au cabaret. L'adh6sion au protestantisme, souvent f6minine d'abord, est li6e, alors, A un acte de temp6rance et r6ciproquement. De telles r6ussites doivent done, avant tout, f des prddicateurs (Jenkins, Jones), mais aussi f des colporteurs 6tonnants. Adapter le message 6vangl61ique A ces espaces, imaginer des tra- ductions 6crites du Nouveau Testament dans un breton accessible, lutter contre les pr6ventions du pouvoir administratif et politique, r6sister aux assauts d'une intense reconquite catholi- que dans les ann6es 1880-1895 n'a pas 6t6 chose ais6e. Mais l'enracinement n'en a 6td que plus fort, et surprenant. Par ailleurs, si comme le r6pite l'A. la solidarit6 intra-confes- sionnelle a 6t6 constante (A Brest, le pasteur Le Fourdrey, r6form6, aidant de son mieux un pr6dicateur baptiste, f Morlaix), ce sont bien des protestantismes qui se c8toient, ce sont bien des formes diffdrentes d'adh6sion A la R6- forme que l'on observe. L'un des principaux m6rites de ce travail est de faire sortir l'his- toire du protestantisme du sentier des seules Eglises concordataires, pour s'attacher aux communaut6s isol6es, aux assembl6es minori- taires. Au bout du compte, le monolithisme

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culturel et spirituel breton, dans sa version la plus sch6matique, est sdrieusement et heureu- sement, remis en cause.

Patrick Harismendy.

92.12

Centre d'Etude des Religions Africaines.

Sectes, cultures et soci6tis. Les enjeux spi- rituels du temps pr6sent. Actes du quatrifme colloque international du CERA (Kinshasa 14- 21 novembre 1992). Kinshasa, Cahiers des Re- ligions Africaines, vol. 27-28, no 53-56, 1993-1994, 608 p. (cf., Arch. infra, no 54).

92.13 DELIEGE (Robert).

Les Intouchables en Inde. Des castes d'ex- clus. Paris, Imago, 1995, 333 p.

Le lecteur frangais disposait d6ji de nom- breuses autobiographies d'intouchables tra- duites dans sa langue mais R.D. lui offre la premiere pr6sentation g6n6rale de ce ph6no- mene social de premibre importance qu'est I'intouchabiliti en Inde. Cette question int6- resse non seulement les sp6cialistes de la re- gion mais aussi les sociologues en general et I'auteur s'efforce d'ailleurs de le mettre en perspective en comparant intouchabilite et ra- cisme ou en recherchant des formes d'exclu- sion sociale analogues - notamment au Japon. L'ouvrage n'en reste pas moins centr6 sur l'Inde. II vaut d'abord par le talent p6dagogi- que de son auteur pour exposer un riche ma- teriau puise a la source de l'exp6rience de terrain et de nombreuses 6tudes - comme en t6moigne l'abondante bibliographie - dont il fait la synthise de fagon plus ou moins criti- que. En un sens ce livre est done un manuel.

Il s'ouvre par un chapitre descriptif pr6sen- tant la r6partition gdographique, le niveau d'6- ducation, etc. des intouchables; il se poursuit par une revue des conceptions de l'intoucha- bilit6 chez les thdoriciens de la caste oif les modules d'unit6 et de s6paration sont analys6s de fagon fouill6e. Le chapitre 3 - sur lequel nous reviendrons- aborde la question de <<l'ambigui't6 des intouchables >>. Viennent en- suite trois chapitres pr6sentant les mythes d'o- rigine des castes intouchables (tires d'un article d6jf publi6 et de fait un peu long par rapport aux autres), un panorama des discrimi- nations dont sont victimes les intouchables et une 6tude des activit6s qu'ils exercent. Les trois derniers chapitres s'intdressent aux d6ve- loppements modernes : les mouvements

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d'6mancipation - en particulier celui animd par B.R. Ambedkar - dont l'A. souligne bien les limites, qu'il rapporte f l'incapacitd des castes intouchables A former un front uni - et le sys- thme de discriminations positives dont bdndfi- cient les intouchables depuis l'inddpendance et dont l'A. montre trbs justement qu'il suscite l'opposition croissante des castes supdrieures, surtout lorsqu'il s'agit de l'dtendre f de nou- velles castes.

Le thbme de 1'<< ambigui't des intouchables >> revient plus ou moins nettement dans tous les chapitres. Cette expression d~signe chez R.D. la situation particulibre des intouchables qui sont A la fois dans la socidt6 des castes et en dehors d'elle. La question est centrale et aurait sans doute demandd une qualification plus prd- cise. L'<< ambigul'ta> n'est en effet pas vdrita- blement construite en concept analytique. En fait, I'ouvrage aurait pu s'articuler tout entier autour de ce problbme. I1 aurait alors gagnd en force de conviction ce qu'il aurait peut-8tre perdu en clartd pour le lecteur non initid.

Christophe Jaffrelot.

92.14 DELUMEAU (Jean).

Mille ans de bonheur. Une histoire du para- dis. t. 2, Paris, Fayard, 1995, 493 p.

Historien des mentalitds, J.D. (ddsormais professeur honoraire au Collbge de France) s'est fait une rdputation par ses recherches sur les couples pdchd-peur d'une part, et aveu-par- don d'autre part dans l'histoire de l'Occident. Comme l'Apocalypse, qui annonce des cata- strophes avant de proclamer le triomphe du sa- lut, J.D. aprbs avoir montrd les consdquences du p6chd et exposd la gestion th~rapeutique de l'aveu, aborde ddsormais aux rives du bonheur et de la victoire sur le mal. Ses deux derniers ouvrages forment en effet un diptyque autour des notions de paradis (t. I, Une histoire du pa- radis, Le Jardin des dilices, Fayard, 1992, 360 p.) et de milldnium (t. 2, Mille ans de bon- heur). C'est ce dernier travail qui retient notre attention ici.

La notion de milldnium renvoie, on le sait, f Apoc. 20, et f une promesse de bonheur terrestre et temporaire faite aux martyrs et confesseurs de la foi. Ce rigne de dur6e indd- terminde, sous l'dgide du Christ, se situe entre les deux batailles eschatologiques devant prd- cdder le Jugement gdndral, puis l'dtablissement de la Jdrusalem cdleste. La croyance au milld- nium -fut-elle jamais g6n6rale et Jdsus l'avait-il enseignde ?- a connu une histoire

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

mouvementde et qui continue. Mettant fin, pour une durde que l'on suppose devoir 8tre longue, f une histoire prdcddente de l'Eglise (qui connut ses moments de gloire mais appa- rait de plus en plus catastrophique avec le pas- sage des sifcles), ce <<rkgne de mille ans>> a beaucoup donn6 f penser... Certains - indivi- dus ou groupes - en ont accentud les aspects religieux et pacifiques ainsi que les promesses d'abondance et d'harmonie terrestre qui se sont greffdes dessus; d'autres par contre en ont sou- lignd les aspects - dventuels : l'Apocalypse n'en sait rien -de rdforme ou de rdvolution sociale, de <<monde f l'envers> assurant la domination des petits et des exclus sur une soci6t6 d6sor- mais promise a la justice. En d'autres termes, le milldnarisme a connu des formes varides au cours des temps, informant aussi bien de qui6- tistes collbges de pidt6 que des sectes pacifi- ques ou rdvolutionnaires, toutes sortes de fagons de << vivre autrement>> : en r6gime re- ligieux ou moins religieux, I'utopie se r6vd- lant ici commune matrice f plus d'une forme sociale.

J.D. limite bien son sujet au christianisme occidental, pris en ses d6buts et portd jusqu'h nos temps par toutes les couleurs et les nuances du prisme confessionnel : sans oublier -transconfessionnel - le pluriforme joachi- misme. Inutile d'entrer dans le ddtail d'un ex- pose qui s'dtale sur pratiquement cinq cents pages. Remarquablement inform6 -comme tous les autres ouvrages du mime A.- ces Mille ants de bonheur mettent l'accent sur quel- ques iddes-clefs : que le milldnarisme n'appar- tient ni au type-Eglise ni au type-secte (quoiqu'il ait ses pr6f6rences); qu'il n'est ni catholique ni protestant (quoique nettement plus proche du dernier que du premier, et lui offrant plus de possibilit6s de d6veloppement); qu'il n'est ni pacifique ni violent, mais l'un ou l'autre selon les temps et les lieux. Enfin, J.D. apergoit bien et salt exploiter l'idde que le mill6narisme, en tant qu'utopie, est ouvert A une dvolution sdcularisante, vers l'idde de progrfs. Ainsi la quatribme partie de l'ouvrage traite d'une <<lai'cisation >> du mill6narisme, et montre les formes diverses qu'elle assume f partir du XVIIIe sifcle. La cinquibme et der- nitre partie, intitul6e << Le bonheur a l'hori- zon>> se prdsente sous les dehors d'une anthologie de <<textes futuristes>> (fin du XVIIIe-XXe sifcle); ces textes sont empruntds aux diverses littdratures europdennes et nord- am6ricaines. La conclusion pose de fagon origi- nale le problfme du New Age, que certains extraits de l'anthologie pr6cddente illustrent d6jt.

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